atlantes et cariatides

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atlantes et cariatides
ATLANTES ET CARIATIDES > balades du patrimoine
>>> (10ème) >>> 18,
u n n o u v e a u r e g a r d s u r l e pat r i m o i n e pa r i s i e n
28 ATLANTES ET CARIATIDES
d e s g r a n d s b o u l e va r d s
de la porte saint-martin
( 10 è m e ) à l ’ o p é r a (2 è m e )
Les balades du patrimoine
>>> C’est, semble-t-il, à partir de la fin du xviiie siècle que les figures
d’atlantes 1 et de cariatides 2 ont investi certaines des façades des Grands
Boulevards au fur et à mesure que le monde du théâtre et des affaires
s’installait le long du parcours. D’un usage très souple, elles accueillent
le visiteur à la porte de la salle ou occupent l’étage d’attique 3, décorant
indifféremment lieux de spectacles ou banques de dépôt.
>>> Aux façades des théâtres, leurs silhouettes servent d’enseigne
parlante ou font la gloire de l’édifice. Le meilleur exemple en fut
le Théâtre Historique aujourd’hui disparu, qui s’élevait boulevard du
Temple. Le fronton du bâtiment était supporté par deux groupes
de figures se répondant, l’un représentant Hamlet et Ophélie et l’autre
Le Cid et Chimène. Aujourd’hui encore, à quelques pas des Boulevards,
jouxtant le square des Arts-et-Métiers, le théâtre de la Gaîté Lyrique
bientôt voué aux musiques actuelles et aux arts numériques montre,
sans qu’on y prête véritablement attention, la Comédie sous les traits
de Scapin et le Drame sous ceux d’Hamlet.
>>> Au fil du xixe siècle, les cariatides prennent des tournures plus aimables
et même volontiers séductrices quand les scènes du Boulevard
se convertissent à l’opérette, aux revues chantées et aux spectacles
de variétés, privilégiant ainsi le rêve et le divertissement. La Belle
Epoque à peine finie, le Septième Art récupère atlantes et cariatides
à son profit. Leurs silhouettes traditionnelles apportent alors aux
nouvelles salles construites sur les Boulevards une dignité architecturale
qui éloigne le cinéma de ses origines foraines et convainc un public
plus bourgeois de fréquenter les nouveaux temples du spectacle.
boulevard Saint-Martin
Le théâtre de la Porte
Saint-Martin
Le théâtre de la Porte Saint-Martin fut construit
en 1781 sur les plans de l’architecte Nicolas
Lenoir (1726-1810), dit Lenoir le Romain,
pour recevoir l’Opéra alors situé au PalaisRoyal et qui avait été détruit par un incendie.
La salle ne prit réellement de l’importance
qu’en 1830, en devenant l’une des scènes
principales du théâtre romantique. Marie Tudor,
Lucrèce Borgia ou la Tour de Nesle firent alors
les beaux jours du lieu réputé, également pour
la magnificence de ses décors de scène dus
aux pinceaux de Séchan (1803-1874), Dieterle
(1811-1889) et Desplechin (1802-1870). Le
bâtiment montrait un avant corps saillant
décoré de huit cariatides adossées aux piliers
encadrant les portes d’entrée du théâtre et
présentait en partie haute, barrant la façade,
un bas relief représentant le Triomphe des arts
et quatre bustes de musiciens et librettistes
(Quinault, Rameau, Lully et Glück) évoquant
le lien de la salle avec la musique.
Le théâtre, incendié sous la Commune, fut
reconstruit en 1873 par l’architecte Oscar
de la Chardonnière (mort en 1881) qui demanda au sculpteur Jacques-Hyacinthe Chevalier
(1825-1895) le nouveau décor de façade.
L’artiste devait exécuter, au long de sa
carrière, un nombre important d’œuvres pour
les théâtres parisiens (théâtre du Châtelet,
Opéra et théâtre du Vaudeville). Il livre ici
un ensemble de masques, têtes, portraits en
médaillon et figures de fronton symbolisant,
tout à tour, la Tragédie, le Drame et la Comédie,
tandis que quatre solides figures d’atlantes
placées au rez-de-chaussée, donnent une
note solennelle aux entrées du théâtre.
H. Chevalier réalisa également, à l’intérieur
de la salle, les cariatides d’avant scène.
>>> (10ème) >>> 20,
boulevard Saint-Martin
Le théâtre de la Renaissance
Créé en 1838, à l’initiative de Victor Hugo
et Alexandre Dumas, le théâtre de la
Renaissance, alors installé salle Ventadour
(rue Méhul), fut la première salle de la
capitale entièrement consacrée au drame
romantique. On y créa notamment Ruy-Blas
ainsi que quelques drames de Frédéric
Soulié interprétés brillamment par Marie
Dorval et Frédéric Lemaître.
La salle actuelle, élevée à l’emplacement
du restaurant Deffieux incendié sous la
Commune, fut confiée à Charles de Lalande
(mort en 1887) qui devait donner par la suite
une nouvelle façade au théâtre du Gymnase
(38 boulevard de Bonne Nouvelle). L’architecte semble s’être souvenu ici de certains
modèles palladiens, comme la loggia del
Capitanio dressée à Vicence sur une parcelle
étroite et dont la verticalité est soulignée
par l’emploi de l’ordre colossal.
Quatre couples de cariatides, les torses
nus et paraissant introduire aux plaisirs de
la salle, supportent le balcon du premier
étage. Sculptées par Carrier-Belleuse (18241887), elles démontrent le talent de l’artiste
rendu célèbre par les torchères du grand
escalier de l’Opéra. Passé maître dans l’art
du décor, l’artiste multiplia ces figures d’architecture au style très personnel échappant à la monotonie, comme le montrent
les vingt-quatre cariatides engainées de
la cour intérieure du Tribunal de commerce
(boulevard du Palais). Les couples féminins
du théâtre de la Renaissance rompent
avec la tradition et semblent anticiper les
changements de registre d’une salle qui
s’éloignera rapidement du genre dramatique pour se consacrer aux opérettes de
Charles Lecocq.
>>> (2ème) >>> 1,
place à la statuaire et au décor sculpté, la
façade présente de part et d’autre de l’avantcorps central, dans les niches latérales du
premier étage, deux statues montrant, l’une,
la Musique par Denys Puech (1854-1942) et
l’autre, la Poésie par Ernest Guilbert (18481913). Au niveau supérieur, un ensemble de
cariatides inspirées des figures du Pavillon de
l’Horloge au Louvre et remises à l’honneur
sous le Second Empire, en particulier à l’attique 3 des pavillons de la cour de la Pyramide
(Louvre), supportent le lourd bandeau de la
corniche en saillie du théâtre. Leur rythme
dansant fait écho à celui des jeunes adolescents en bronze doré fondus par Christofle
que l’architecte a perchés sur les fenêtres
de l’avant-corps. Sculptées par André Allar
(1845-1926), Henri Lombard (1855-1929),
Gustave Michel (1851-1924) et Emile Peynot
(1850-1932), ces cariatides ont cette gaité
et cette insouciance qui se sont progressivement imposées, au fil du siècle, dans la
représentation des figures de cariatides pour
répondre aux évolutions mêmes du répertoire théâtral sur le Boulevard.
place Boieldieu
L’Opéra-comique
L’Opéra-Comique construit par l’architecte
Jean-François Heurtier (1739-1822) à la veille
de la Révolution et détruit une première
fois par un incendie en 1838, fut à nouveau
la proie des flammes en 1887. Lors de sa
première construction, le théâtre présentait
en façade un péristyle ionique à six colonnes
de rang et deux en retour engagées dans le
mur. Cette architecture sévère voisine de
celle de l’Odéon offrait pour seul décor les
joints d’appareil du mur de fond.
C’est un tout autre parti qui fut choisi par
l’architecte Louis Bernier lors de la reconstruction de 1894-1898. Faisant une large
>>> (9ème) >>> 17-23,
boulevard des Italiens
Le Crédit Lyonnais
L’essor considérable des banques de dépôt
au xixème siècle poussa les principaux établissements à se doter, à Paris, d’un siège central
destiné à afficher aux yeux de la clientèle
d’épargnants la puissance et la pérennité
de l’entreprise. On fit pour cela largement
appel aux grands modèles du passé sans
craindre de recourir au pastiche.
La partie centrale de la façade du Crédit
Lyonnais, construite au début des années
1880 par l’architecte d’origine hollandaise
William Bouwens van der Boijen (18341907), reprend presque mot à mot l’ordonnance du Pavillon de l’Horloge (Louvre) et
la coiffe d’un tronc de pyramide du pavillon
de Flore. Un motif de serlienne 4 mettant en
valeur l’axe d’entrée se répète à l’étage et
une large place a été faite à la sculpture
allégorique. Le fronton est soutenu par quatre
groupes de cariatides encadrant l’horloge du
pavillon central et symbolisant les heures
du jour. Leur exécution fut confiée aux sculpteurs Henri Lombard (1855-1929), Edouard
Pépin (né en 1853), Antonin Carlès (18511914) et Désiré-Maurice Ferrary (1852-1904).
Les statues, doublées dans la profondeur
par des silhouettes en faible relief qui leur
font écho, s’inspirent librement des groupes
de Jacques Sarrazin (1592-1660) dominant
la cour carré du Louvre. Au fronton, le programme d’inspiration classique représente
la Banque entourée du Commerce et de
l’Industrie et flanquée du Rhône et de la
Seine distribuant les crédits. Le programme
qui affiche la place éminente qu’occupe
l’institution parmi les banques françaises,
comme le voulait le fondateur du Crédit
Lyonnais Henri Germain, a été exécuté par
le sculpteur Camille Lefèvre (1853-1933).
>>> (9ème) >>> 2,
boulevard des Capucines
Le Gaumont Opéra
Les cariatides au sommet du bâtiment rappellent que le Gaumont Opéra (autrefois
Paramount) a pris là en 1927 la suite du
théâtre du Vaudeville élevé à l’angle du
boulevard des Capucines et de la rue de la
Chaussée-d’Antin en ­1868 par l’architecte
Auguste Magne (1816-1885).
Dès le début des années 1900, les exploitants de cinéma avaient compris le parti
qu’ils pouvaient tirer de l’installation en
façade d’atlantes ou de cariatides, trouvant
là le moyen d’élargir leur public en attirant
une clientèle plus huppée. C’était le cas de
l’Omnia-Pathé inauguré en 1906 au numéro 5
du boulevard Montmartre – aujourd’hui
détruit et remplacé par une grande surface
commerciale. Celui-ci fut un magnifique
exemple, après sa rénovation en 1913, de
cette politique de séduction utilisant les
ressources de la sculpture (atlantes engainés)
pour annoncer en façade le luxe du décor
intérieur évoquant celui des plus grands
théâtres du Boulevard. L’immeuble du
Vaudeville présentait à l’origine à l’étage
supérieur quatre cariatides dominant la rue.
Œuvres du sculpteur Jules Salmson (18231902), elles représentaient la Folie, la Comédie,
la Satire et la Musique. Le pan coupé du
bâtiment fut remanié ultérieurement avec
l’ajout d’une coupole d’angle et la transformation des fenêtres hautes qui furent encadrées de six nouvelles cariatides anonymes
conçues à partir d’un modèle unique.
ATLANTES ET CARIATIDES > balades du patrimoine
figures, en rapport direct avec la fonction
du pavillon, sert ici puissamment le discours
politique.
>>> (9ème) >>> rue
Auber
L’Opéra Garnier :
le Pavillon de l’Empereur
>>> (9ème) >>> 12,
boulevard des Capucines
Le Grand Hôtel
Fort du succès remporté en 1860 avec la
construction de l’Hôtel du Louvre, les frères
Pereire firent élever en 1862, à deux pas de
l’Opéra alors en travaux, le Grand Hôtel dont
la réalisation fut confiée à Alfred Armand
(1805-1888), assisté dans sa tâche par Charles
Rohault de Fleury (1801-1875) et JacquesIgnace Hittorf (1792-1867).
A l’ordonnance sévère des façades extérieures,
imposée par le Préfet Haussmann pour les
édifices formant les abords du nouvel Opéra,
répond le luxe inouï des salons intérieurs et
de la grande salle à manger dont les arcades
sont encadrées sur deux niveaux de cariatides
musiciennes réalisées par le sculpteur Aimé
Millet (1819-1891).
La façade d’entrée sur le boulevard des
Capucines est rythmée de colonnes corinthiennes portant de jeunes atlantes groupés
deux à deux. Ils sont l’œuvre du sculpteur
Pierre-Jules Cavelier (1814-1894), auteur
en façade des pavillons encadrant la Cour
Napoléon au Louvre de plusieurs figures de
cariatides en haut-relief d’un style beaucoup
plus sévère (Pavillons Richelieu – esquisse
au musée d’Orsay –, Turgot et Lesdiguières).
toutes les balades sont disponibles sur le site
www.culture.paris.fr
:
GLOSSAIRE
1. Atlante : Figure d’homme, en ronde-bosse ou en relief, servant de support
vertical. L’atlante évoque le géant Atlas qui fut condamné par Zeus
à porter la voûte du ciel sur ses épaules. Il est montré debout, assis ou accroupi,
les mains au dessus de la tête, aux hanches ou aux genoux et supporte
sur le cou et sur les épaules un entablement. Les atlantes, dont la partie
inférieure est prise dans une gaine, sont dits engainés.
2. Cariatide (de Kariatides, femme de Carie) : Statue féminine, avec
ou sans bras, vêtue d’une longue robe, utilisée comme support vertical.
Les cariatides sont employées pour soutenir les entablements, leur tête
servant directement d’appui. Les cariatides sont dites engainées
lorsque leur partie inférieure est prise dans une gaine. (D’après Principes
d’analyse scientifique, La sculpture, méthode et vocabulaire, Paris, 1978)
3. Attique : Couronnement horizontal décoratif ou petit étage terminal
d’une construction, placés au dessus d’une corniche ou d’une frise importante.
4. Serlienne : Groupement de trois baies, les baies latérales coiffées
d’un linteau étant moins hautes que la baie centrale couronnée d’un arc
en plein cintre.
5. Colonne rostrale : Colonne ornée d’éperons de navires (rostres), élevée
en souvenir d’une victoire navale.
Retrouvez tous les points Vélib’
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Le spectacle fastueux de la façade principale
de l’Opéra ne doit pas faire oublier la découverte, sur les côtés du théâtre, des pavillons
en rotonde couronnés de coupoles que Charles
Garnier (1825-1898) développa dans son
projet final pour occuper toute la largeur
du terrain.
Celui situé à l’ouest et visible de la rue Auber
en contre-bas était destiné aux entrées particulières de Napoléon III et de ses proches
qui pouvaient ainsi accéder à la salle en
toute sécurité. On sait en effet que le souverain avait échappé de peu à un attentat
en se rendant au spectacle quelques années
auparavant. La chute de l’Empire mit fin aux
travaux laissant le pavillon en partie inachevé.
Deux colonnes rostrales 5 marquent le départ
des rampes d’accès conduisant au pavillon.
On accède au vestibule par un double portique monumental flanqué de cariatides
symbolisant la Gloire du souverain. Œuvres
des sculpteurs Elias Robert (1818-1899)
(entrée sud) et Mathurin Moreau (1822-1912)
(entrée nord), elles brandissent d’une main
une palme de bronze tendue vers l’Aigle impérial et maintiennent de l’autre une couronne
de laurier. Leur beauté sévère, empreinte
de rigueur classique, les rapproche de leurs
consœurs des pavillons du nouveau Louvre,
si parfaitement intégrées à l’architecture,
ou de celles qui marquent le portail d’entrée
du Conservatoire des Arts et Métiers (rue
St-Martin), exécutées par le même Elias Robert
(L’Art et La Science). Le style idéalisé des
Mairie de Paris / Directions des affaires culturelles - Conception graphique :
Crédits photographiques : Ville de Paris – C. Fouin, J.M. Moser, C. Pignol
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