Commentaires de la Chambre de l`assurance de dommages sur la
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Commentaires de la Chambre de l`assurance de dommages sur la
Commentaires de la Chambre de l’assurance de dommages sur la consultation relative à l’encadrement de la distribution de produits d’assurances par la Fédération Québécoise des Clubs Quads et la Fédération des Clubs de Motoneigistes du Québec. Novembre 2004 Table des matières Courte présentation de la Chambre 3 Chronologie de la distribution d’assurance par les Fédérations 4 Quelques chiffres 5 Le produit distribué par les Fédérations et les interventions du Bureau des services financiers 5 Les problèmes intrinsèques à la formule retenue par les Fédérations 8 Les touristes 9 La solution pour la Fédération 10 La solution pour le gouvernement 12 En conclusion 12 Annexe A (voir feuille jaune) Annexe B (voir feuille bleue) Annexe C (voir feuille verte) Annexe D (voir feuille rose) 2 Il nous fait plaisir de répondre à votre invitation et de participer à la consultation relative à l’encadrement de la distribution de produits d’assurances par la Fédération Québécoise des Clubs Quads et la Fédération des Clubs de Motoneigistes du Québec. La Chambre de l’assurance de dommages est un organisme sans but lucratif dont l’unique mission est la protection du public. Son intervention visera donc à faire une analyse des failles liées à la distribution des produits d’assurance proposés par ces Fédérations dans l’optique de la protection du public. À la lecture de votre lettre d’invitation, nous comprenons que l’Autorité souhaite proposer l’adoption d’un décret en vertu de l’article 428 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (ci-après appelée LDPSF) qui permettrait à la Fédération des clubs quads, à l’instar de la Fédération des motoneigistes, de distribuer sans représentant des produits d’assurance responsabilité. D’entrée de jeu, il est important de souligner que la distribution sans représentant, prévue au titre VIII de la Loi sur la distribution de produits et services financiers est l’exception à la règle voulant que la distribution doit être faite par un représentant certifié. Il est donc important de souligner que la proposition de l’Autorité constitue une modification au régime usuel de distribution et aurait pour effet de permettre un mode de distribution parallèle qui ne comporte pas les mêmes protections que le mode de distribution assuré par des représentants certifiés. En effet, les représentants certifiés ont des responsabilités et des obligations strictes à respecter dans le but d’assurer une plus grande protection du public (formation minimale, examens d’entrée à la profession, stages, détention d’un certificat pour agir, police d’assurance responsabilité, protection par le fonds d’indemnisation, formation continue obligatoire, obligations déontologiques) et ils doivent répondre de leurs actes devant le comité de discipline. Courte présentation de la Chambre La Chambre de l’assurance de dommages est un organisme créé par la Loi sur la distribution de produits et services financiers et sa mission est d’assurer la protection du public en assurance de dommages en maintenant la discipline, en veillant à la déontologie et à la formation de ses 11 400 membres qui sont des agents et des courtiers en assurance de dommages et des experts en règlement de sinistres. Pour mener à bien sa mission, la Chambre peut compter sur un conseil d’administration composé de onze personnes (5 courtiers, 2 agents, 2 experts en sinistre et 2 personnes nommées par le ministre pour représenter le public). Les 9 personnes qui proviennent de l’industrie permettent à la Chambre de se doter de règles bien adaptées pour encadrer l’exercice des activités des représentants en assurance de dommages. La Chambre compte également sur l’apport de son personnel formé d’agents, d’experts et de courtiers et elle dispose de l’expertise de plusieurs comités. La Chambre est donc un organisme d’encadrement voué spécifiquement au secteur de l’assurance de dommages, par lequel les membres s’autoréglementent à l’aide d’un système qui s’autofinance. 3 Chronologie de la distribution d’assurance par les Fédérations • • • • • • • • • • • En octobre 1997, l’article 19 de la Loi sur les véhicules hors route, qui oblige tout propriétaire de véhicule hors route de détenir une police d’assurance responsabilité d’au moins 500 000 $, entre en vigueur. Le 1er septembre 1998, la Fédération des motoneigistes débute la distribution sans représentant de son produit MaxNeige. En 1998, des plaintes pour exercice illégal sont déposées au Conseil des assurances de dommages. À l’époque cet organisme a considéré qu’il s’agissait d’exercice illégal mais, à cause de la venue imminente du Bureau des services financiers, le dossier lui a été référé. En mai 2000, la distribution du produit MaxNeige par la Fédération des motoneigistes est jugée illégale. La Fédération ne rencontre pas les exigences décrites à l’article 408 de la loi, car il ne s’agit pas d’un produit d’assurance afférent à un bien vendu par la Fédération ni d’une assurance collective à laquelle adhèrent les motoneigistes (il s’agit au contraire d’une assurance individuelle). Le décret no 1085 - 2000 permettant la distribution sans représentant a été adopté en septembre 2000, et ce malgré la recommandation négative du BSF. Le guide de distribution est approuvé par le Bureau des services financiers en décembre 2000. Le projet de loi 13 (Loi modifiant la Loi sur les véhicules hors route) a été adopté en décembre 2001 mais n’est jamais entré en vigueur. Le ou vers le 1er mai 2004, La Fédération des Quads a commencé à distribuer son produit d’assurance responsabilité MaxQuad. Le 5 mai 2004, l’Autorité met en demeure la Fédération de cesser la distribution du produit MaxQuad. Le 16 juin 2004, l’Autorité décrète que la Fédération n’est pas autorisée à distribuer le produit MaxQuad et adopte une ordonnance provisoire enjoignant à la Compagnie d’assurance Élite de cesser, avant le 30 juin 2004, la distribution de ce produit. Le 2 juillet 2004, l’Autorité adopte une ordonnance permanente enjoignant à la Compagnie d’assurance Élite de cesser la distribution du produit MaxQuad. Ce n’est donc pas d’hier que la distribution de ces produits a suscité des problèmes au plan légal. Par ailleurs, il est important de faire preuve de beaucoup de rigueur dans l’analyse de ce dossier. Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur le sujet et qui méritent d’être corrigées. 4 Quelques chiffres • • • 157 370 motoneiges sont immatriculées au Québec1. 105 000 personnes sont membres de la Fédération des motoneigistes2 ; 278 576 véhicules tout terrain (VTT) sont immatriculés au Québec3. 51 108 personnes sont membres de la Fédération des quadistes4 ; Au total, 435 946 véhicules hors route sont immatriculés au Québec alors que 156 108 personnes sont membres de ces deux Fédérations. Ainsi, seulement 35,8%5 des véhicules hors route immatriculés au Québec se retrouvent sur les sentiers d’une des deux Fédérations. Depuis le mois d’octobre 1997, La loi sur les véhicules hors route oblige les propriétaires de véhicule hors route à détenir une police d’assurance responsabilité civile d’au moins 500 000 $. Les Fédérations allèguent que malgré le caractère public de cette loi, certains propriétaires de motoneiges ou de quads ne détiennent pas l’assurance requise6. Tout comme les Fédérations, nous pensons qu’il est impératif, pour la protection du public, que les propriétaires de motoneiges et de quads, qui fréquentent les sentiers balisés, aient une protection d’assurance. Nous différons cependant d’avis sur les moyens qui doivent être pris pour atteindre cet objectif. Nous pensons que le régime proposé par la Fédération, qui exclue la distribution par des professionnels certifiés, n’est pas la bonne façon de s’assurer que les détenteurs de véhicules hors route possèdent la protection d’assurance requise par la Loi. En effet, il faut garder à l’esprit que seulement 36% de ces véhicules circulent sur ces sentiers. Ainsi, si la protection du public est la priorité pour l’Autorité, elle devra également se préoccuper des 65% de véhicules qui ne fréquentent pas les sentiers et trouver une solution qui permettrait à l’ensemble des utilisateurs d’être bien protégés. Le produit distribué par les Fédérations et les interventions du Bureau des services financiers Comme principal cheval de bataille pour pouvoir distribuer son produit d’assurance responsabilité civile la Fédération s’exprimait comme suit : 1 SAAQ, rapport annuel de gestion 2003. Site Internet de la Fédération (www.fcmq.qc.ca), novembre 2004. À noter que ce nombre a diminué avec les années puisqu’en 2001, ils étaient plus de 117 000, déclaration de Yves Watier, chef de la direction de la Fédération des clubs de motoneigistes du Québec, au Journal de l’assurance du mois d’octobre 2001. 3 SAAQ, rapport annuel de gestion 2003. 4 Site Internet de la Fédération (www.fqcq.qc.ca), novembre 2004. 5 Prenant pour acquis que la plupart des personnes possèdent un véhicule mais elles peuvent en posséder plusieurs. 6 En 1998, la Fédération des motoneigistes alléguait que 30% des propriétaires ne détenaient pas d’assurance responsabilité. Il faut comprendre qu’à l’époque l’obligation imposée par l’article 19 de la Loi sur les véhicules hors route était toute récente. Selon les chiffres fournis par le GAA (Groupement des assureurs automobiles) pour l’année 2003, l’ensemble des motoneigistes du Québec sont assurés dans l'ordre de 80 à 89 %, alors que l’ensemble des quadistes du Québec sont assurés dans l'ordre de 70 à 72%. Il est permis de croire que cette proportion est plus élevée pour les utilisateurs de sentiers puisque la détention d’une preuve d’assurance est nécessaire pour l’obtention d’un droit d’accès. 2 5 « Le Gouvernement oblige les clubs à s’assurer que tous les motoneigistes possèdent une protection d’assurance de 500 000 $ en vigueur »7. Cet énoncé est inexact car, nous l’avons vu précédemment, l’obligation de posséder une assurance de responsabilité civile repose sur les épaules du propriétaire du véhicule8 et non aux clubs. La Fédération a par contre l’obligation de veiller au respect des dispositions de la Loi9, obligation qu’elle pourrait facilement rencontrer en vérifiant que les personnes qui achètent un droit d’accès sont dûment protégées par une assurance de responsabilité civile. Les tarifs des droits d’entrée incluent le coût de l’assurance responsabilité civile10. Les droits d’entrée aux sentiers peuvent être acquittés de quatre façons différentes : 1. Par la poste lors du renouvellement de la carte de membre; 2. Par les détaillants et ateliers de réparation de motoneiges; 3. Par des employés de dépanneurs, bars ou restaurants qui jouxtent les sentiers; 4. Par les bénévoles à l’entrée des pistes. Les primes d’assurance suivent donc le parcours suivant : bénévoles, clubs, Fédération, Groupe 3PCS, assureur. C’est donc dire que la prime d’assurance n’est pas déposée dans un compte séparé en ce qui a trait aux trois premiers intervenants. La distribution de produits d’assurance sans représentant, même lorsqu’elle est autorisée par décret, doit respecter les conditions suivantes : • • • • • • • La distribution du produit d’assurance doit respecter le libre choix du consommateur. Le coût de l’assurance ne doit donc pas être inclus dans le droit d’accès puisqu’un distributeur ne peut assujettir la conclusion d’un contrat (droit d’accès aux sentiers) à l’obligation de conclure un contrat d’assurance (article 439 LDPSF). La personne qui distribue le produit doit demander au consommateur s’il n’est pas déjà couvert par une assurance similaire (article 430 LDPSF). La personne qui distribue le produit doit avoir une bonne connaissance du produit et du guide de distribution (article 429 LDPSF). La personne qui distribue le produit doit le décrire au consommateur et lui préciser la nature de la garantie et lui indiquer clairement les exclusions (article 431 LDPSF). La personne qui distribue le produit doit donner au consommateur toutes les informations sur la façon de présenter une réclamation et sur le délai pour le faire et lui expliquer les démarches à faire en cas de négation de la part de l’assureur (article 434 LDPSF). Avant de vendre le produit, la personne qui le distribue doit remettre au consommateur une copie du guide de distribution (article 435 LDPSF). Si le consommateur achète le produit d’assurance, le distributeur doit lui remettre un avis lui indiquant qu’il peut résoudre le contrat dans les 10 jours (article 440 LDPSF). 7 Flash finances 11 décembre 2000. Article 19 de la Loi sur les véhicules hors route (LVHR). 9 Article 16 de la Loi sur les véhicules hors route (LVHR). Par ailleurs, l’amende exigée en cas d’infraction de la part d’une Fédération est minime puisqu’elle se situe entre 500$ et 1000$ en vertu de l’article 62 de cette loi. 10 En septembre 2004, le site Internet de la Fédération des motoneigistes explique que les coûts d’assurance sont inclus dans le droit d’entrée. 8 6 Pour s’assurer du respect des dispositions de la Loi, le Bureau des services financiers avait imposé une série d’exigences à la Fédération des motoneigistes. En août 2000: Le BSF indique que la distribution doit se faire uniquement par le personnel de la Fédération. La Fédération ne peut recevoir les primes d’assurance, ce qui implique que la prime d’assurance doit être acquittée par le biais d’un chèque distinct, libellé au nom de l’assureur. En décembre 2000 : Le BSF demande de cesser d’inclure l’assurance responsabilité civile dans le droit d’accès, d’accepter la preuve d’assurance fournie par un motoneigiste et de permettre au motoneigiste de résilier sans frais l’assurance dans les 10 jours. En septembre 2002 : Le BSF demande à la Fédération de fournir la liste exhaustive des distributeurs et de mettre à jour la liste des Clubs et notifier tout changement relatif au produit (changement d’assureur, etc…). Malgré ces demandes, plusieurs illégalités ont perduré. Lors d’inspections menées par le BSF, notamment le 21 décembre 2000, il est apparu que le libre choix de l’assureur n’était pas respecté, que l’assurance était incluse dans le droit d’accès, que plusieurs points de vente (garages, restaurants, concessionnaires de motoneiges, bars) ne figuraient pas sur la liste des distributeurs autorisés et que les changements d’assureurs n’étaient pas signalés au BSF. De même, encore aujourd’hui, la prime est payée au bénévole. Les sommes ne sont pas déposées dans un compte séparé avant d’être reçues chez le courtier. De plus, de l’aveu même de la Fédération des quads, les bénévoles ne connaissent pas le produit d’assurance vendu et ne sont pas habilités à répondre aux questions des consommateurs. À noter que cette même Fédération conservait un montant de 10 $ en cas de demande de remboursement de l’assurance responsabilité civile11. Quant à la Fédération des motoneigistes, il semble qu’en cas de demande de remboursement, le propriétaire du véhicule doive attendre la fin de la saison avant de recevoir son dû. Finalement, quant au respect du libre choix de l’assureur, la Fédération s’est déjà exprimée comme suit : « En voulant offrir un choix d’assureur aux motoneigistes, le BSF a plutôt donné le choix de ne pas s’assurer. On n’acceptera jamais de se faire prendre en souricière par la loi, même si un article stipule le libre choix12 ». C’est ce qui explique sans doute qu’encore aujourd’hui, le site Internet de la Fédération indique que « les tarifs des droits d’accès incluent le coût de l’assurance responsabilité civile »13. On peut donc affirmer que la prise d’un décret, pour permettre la distribution d’un produit d’assurance comme MaxNeige, ne règle pas tous les problèmes, bien au contraire. 11 Voir annexe A, information qui se retrouvait, en juin dernier, sur le site Internet du Club quad de Mascouche. Flash finances 11 décembre 2000 et Journal de l’assurance janvier 2001, p. 9. 13 Voir annexe B, tarifs en vigueur pour la saison 2004-2005 pour la Fédération des motoneigistes. 12 7 Les problèmes intrinsèques à la formule retenue par les Fédérations Outre les failles dans le mécanisme de distribution dont nous venons de traiter, la distribution des produits MaxQuad et MaxNeige soulève plusieurs problèmes en regard de la protection du public : • • • • • L’assurance responsabilité civile 500 000 $ (chapitre A) est incluse dans le droit d’accès des sentiers de la Fédération. Le propriétaire du véhicule n’est donc pas assuré (volet A) tant qu’il n’a pas demandé son droit d’accès. De plus, cette assurance n’est pas automatiquement renouvelée. Ainsi, un individu qui se promène hors sentier entre-temps, se retrouve sans assurance responsabilité et met en péril la protection du public. Le propriétaire du véhicule doit se procurer le chaptire B (l’assurance pour les dommages survenus au véhicule lui-même) auprès d’un autre assureur. Cette obligation introduit deux modes de renouvellement différents et deux dates d’échéance différentes. Quelqu’un qui a reçu le renouvellement de sa compagnie d’assurance, pour le chapitre B, pourra croire, à moins d’être un initié, qu’il est couvert pour sa responsabilité civile et se promener en dehors d’un sentier sans être protégé. Le fait de séparer les chapitres A et B sur deux contrats d’assurance distincts sème le chaos, c’est ce qu’en pense un juge de la cour supérieure qui a eu à analyser la situation14. Certains assureurs ne veulent pas vendre uniquement le chapitre B, du fait que leur structure de tarification couvre la prime globale pour toute la période d’utilisation du véhicule15. La responsabilité civile est le chapitre le plus rentable pour les assureurs ce qui fait que certains assureurs hésitent à couvrir le chapitre B seul, car juste le vol constitue 65% des sinistres. Ainsi, malgré la carte d’accès qui protège pour le chapitre A, il est possible qu’un propriétaire d’un véhicule hors route doive quand même souscrire les deux chapitres auprès d’un autre assureur. La carte d’accès est distribuée par des personnes non formées car les bénévoles de la Fédération ne reçoivent pas de formation leur permettant de remplir leur mandat de distribution avec compétence16. La Fédération des quads a d’ailleurs admis que ses bénévoles ne donnaient aucune information lors de la vente du droit d’accès. L’ignorance des bénévoles peut avoir un impact important sur la protection du public17. 14 Bonin c. Picard et al, Cour supérieure no. 700-05-011316-019, le 11 juin 2004, j. Grenier, page 18, paragraphe 85, on peut lire que l’assureur a manqué à son obligation de renseignement. Cette obligation le « contraignait à informer son assuré de la situation chaotique dans laquelle il se trouvait par le fait même que la date d’échéance de son assurance responsabilité civile n’était pas la même que celle de son assurance de dommages » « Le produit MaxNeige n’était donc pas d’usage courant. Il fallait donc redoubler de précautions et s’assurer que les clients comprenaient bien que les dates d’échéance des polices ne concordaient pas nécessairement » 15 Bonin c. Picard et al, Cour supérieure no. 700-05-011316-019, le 11 juin 2004, j. Grenier, page 18, paragraphe 85, on peut lire que « La plupart des compagnies d’assurance refusent de contracter une assurance de dommages seulement. Elles exigent que l’assuré achète une double couverture. » 16 Bonin c. Picard et al, Cour supérieure no. 700-05-011316-019, le 11 juin 2004, j. Grenier, page 16, paragraphe 74. 17 Bonin c. Picard et al, Cour supérieure no. 700-05-011316-019, le 11 juin 2004, j. Grenier, page 20, paragraphe 92, on peut lire que « L’article 420 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers contraint l’assureur à s’assurer que ses distributeurs ont une bonne connaissance de son produit. L’omission a eu un effet domino, a provoqué une réaction en chaîne… » 8 • • • • • • • • Le jugement récent de la Cour supérieure en date du 11 juin 200418, démontre de façon flagrante que le régime MaxNeige a semé la confusion chez les consommateurs et les professionnels de l’assurance. Cette séparation des deux chapitres, loin d’offrir une protection pour le public, crée de la confusion pour le consommateur. Un assuré qui souscrit la responsabilité civile auprès de la Fédération et l’assurance dommage de son véhicule auprès d’un autre assureur et qui décide, une année, de ne pas utiliser les sentiers de la Fédération se retrouve alors sans assurance responsabilité et met en péril la protection du public. Si le coût de l’assurance est inclus dans le droit d’accès, la perception de prime est faite par une personne non certifiée, les sommes ne sont pas déposées dans un compte séparé, contrairement aux exigences de la loi. La Fédération transférera ensuite les sommes au cabinet de courtage puis à l’assureur. Entre-temps, comment les sommes sont-elles protégées ? Comme la Fédération des quads le signalait, lorsque les primes sont acheminées au courtier, celui-ci remplit fidèlement ses obligations. Qu’arrive t-il si le bénévole s’est approprié l’argent ? Le volet assurance responsabilité est limité à 500 000 $. C’est donc dire que si le consommateur veut 1 000 000 $, il doit se procurer un avenant additionnel. Si le consommateur a deux véhicules, il doit payer deux droits d’accès et deux assurances responsabilité. Il ne profite donc pas des rabais qui sont normalement offerts aux clients qui regroupent leurs biens auprès d’un seul assureur. Comment peut-on justifier deux régimes parallèles, soit un secteur qui se développe sans respecter toutes les règles du jeu alors que le régime de distribution traditionnel, avec représentant certifié, est soumis à toutes sortes d’obligations légales et déontologiques ? Finalement, il est important de souligner que le type de distribution proposé par les fédérations n’a pas d’équivalent ailleurs au Canada. Au contraire, dans les autres provinces, ce type de produit doit plutôt être distribué par des représentants certifiés. Les touristes Les Fédérations ont déjà prétendu que la distribution des produits d’assurance responsabilité était nécessaire compte tenu de la présence de touristes dans les sentiers. Les touristes européens n’apportent pas leur motoneige. Ils louent une motoneige auprès d’une entreprise qui fournit l’assurance responsabilité et l’assurance pour les dommages matériels sur une base « court-terme » et sont par le fait même convenablement protégés. Les touristes limitrophes, c’est-à-dire ceux qui proviennent des provinces voisines et des États américains doivent déjà répondre à des exigences similaires en terme d’assurance responsabilité civile19. Ces assurances contractées à l’extérieur sont valables au Québec de la même façon qu’un touriste québécois est assuré lorsqu’il circule sur les routes ou dans les sentiers des provinces voisines ou des états américains voisins. 18 19 À noter que ce jugement a été porté en appel. En Ontario, l’assurance responsabilité minimale est de 500 000 $ et au Nouveau-Brunswick elle est de 200 000 $. 9 Il semble même que la Fédération des motoneigistes, par la grande promotion de son produit MaxNeige, a contribué à induire en erreur certains résidents limitrophes. Il semble notamment que divers résidents de provinces limitrophes aient décidé de fréquenter une fois l’an les sentiers québécois afin de se procurer l’assurance responsabilité civile, prenant pour acquis que l’achat de ce produit les couvrirait également dans leur province d’origine. Ce qui, malheureusement, n’est pas le cas. Les Fédérations connaissent le nombre de membres qui ne résident pas au Québec (touristes) puisqu’elles ont besoin des coordonnées de la personne pour émettre la carte de membres comprenant la vignette et le certificat d’assurance. Si problème majeur il y avait, ce dont nous doutons, il serait alors possible de limiter la distribution du produit MaxNeige et MaxQuad aux touristes qui ne sont pas en mesure de démontrer qu’ils possèdent une couverture d’assurance suffisante. La solution pour la Fédération Pour répondre aux besoins de contrôle que pose l’assurance responsabilité, la Fédération dispose déjà de certaines avenues. Premièrement, le législateur, en octobre 1997, a fait en sorte que les propriétaires ont désormais l’obligation de détenir une police d’assurance responsabilité civile. Même si la Fédération doit veiller au respect de la loi, cette obligation ne va pas jusqu’à exiger que la Fédération vende l’assurance elle-même! Il s’agit d’une obligation de moyens qui est imposée à une Fédération et non pas d’une obligation de résultat. Ainsi, si une Fédération veut s’assurer que les utilisateurs des sentiers sont convenablement assurés, elle n’a qu’à exiger de voir la preuve d’assurance avant d’émettre une carte de membre. L’article 38 de la Loi sur les véhicules hors route prévoit que : « Pour vérifier l'application de la présente loi et de ses règlements d'application, un agent de la paix peut, dans l'exercice de ses fonctions: (…) 3° ordonner l'immobilisation d'un véhicule auquel s'applique la présente loi et faire l'inspection des équipements obligatoires du véhicule et, le cas échéant, du traîneau ou de la remorque; 4° exiger la production d'un document attestant l'âge du conducteur d'un véhicule hors route et, le cas échéant, le certificat d'aptitudes ou son autorisation à conduire; 5° exiger la production du permis de conduire du conducteur d'un véhicule hors route qui emprunte un chemin public; 10 6° exiger la production du certificat d'immatriculation délivré en vertu du Code de la sécurité routière ( chapitre C-24.2) et de l'attestation d'assurance de responsabilité civile. L'agent de surveillance de sentier peut, dans les mêmes conditions, exercer les pouvoirs prévus aux paragraphes 3°, 4° et 6° du premier alinéa. Toute personne qui a la garde, la possession ou le contrôle de tels documents doit, sur demande, les remettre pour examen à la personne qui fait l'inspection. Après examen, l'agent de la paix ou l'agent de surveillance de sentier doit les lui remettre, sauf s'il s'agit d'un permis de conduire que l'agent de la paix est autorisé à saisir en vertu du Code de la sécurité routière. » C’est l’article 37 qui établit les modalités de nomination des agents de surveillance de sentier : « Pour l'application de la présente loi, sont des agents de surveillance de sentier: 1° les inspecteurs et enquêteurs nommés en vertu de la Loi sur la sécurité du transport terrestre guidé ( chapitre S-3.3); 2° les personnes, recrutées à ce titre par chaque club d'utilisateurs de véhicules hors route, qui satisfont aux conditions déterminées par règlement. » Si une Fédération veut être en mesure de contrôler en tout temps la possession d’assurance responsabilité par ses membres, la voie est déjà toute tracée par le biais des articles 37 et 38 LVHR. En effet, un règlement pourrait permettre de rendre ce contrôle opérationnel. Par ailleurs, une telle forme de contrôle est essentielle, non seulement pour vérifier si une personne qui circule dans les sentiers possède une assurance responsabilité civile, mais également pour vérifier si cette personne conduit un véhicule sécuritaire, s’il a l’âge pour le faire, s’il possède un permis de conduire valide, etc. Cette forme de contrôle est d’ailleurs exercée, par les Clubs, dans la majorité des autres provinces et territoires au Canada.20 Si la sécurité publique est l’élément qui préoccupe les Fédérations, ces dernières devraient non seulement être préoccupées par le respect de l’exigence de l’assurance responsabilité mais également par toutes les facettes qui entourent l’utilisation d’un véhicule motorisé. Ainsi, nous croyons qu’il est extrêmement important que le pouvoir réglementaire prévu à l’article 37 soit exercé pour garantir une meilleure protection des utilisateurs de sentiers. Nous pensons à ce sujet que le 40 $, qui était prélevé aux fins de l’assurance responsabilité, devrait plutôt être utilisé pour le financement d’agents de surveillance de sentier. Si le tout ne s’avérait pas suffisant, nous croyons que les Fédérations devraient mettre leurs énergies à convaincre le gouvernement de mettre davantage d’agent de la paix en patrouille dans les sentiers. 20 Site Internet du Conseil canadien des organismes de motoneiges www.ccso-ccom.ca/newsite/fenforcement.html. 11 Finalement, nous avons compris que les Fédérations sont préoccupées par le respect de l’article 16 de la Loi sur les véhicules hors route. Or, en vertu de cet article, une Fédération a l’obligation de veiller au respect des dispositions de la Loi et de ses règlements d’application, notamment par l’entremise d’agent de surveillance de sentier. Grâce à l’entrée en vigueur du pouvoir réglementaire, cette dernière obligation sera donc rencontrée! La solution pour le gouvernement Si le gouvernement se soucie du non-respect de l’article 19 de la Loi sur les véhicules hors route, il doit préconiser une solution qui protégera non seulement les usagers des sentiers balisés mais également tous les conducteurs de véhicules hors route. En ce sens, la vente d’assurance responsabilité par les Fédérations n’est pas la mesure appropriée. En effet, la formule proposée par les Fédérations ne protège que les utilisateurs de sentier. De plus, même au niveau des utilisateurs de sentier, un nombre restreint de victimes seront indemnisées puisque chaque victime doit être en mesure de démontrer la responsabilité de l’autre conducteur. C’est donc dire que les motoneigistes qui perdent le contrôle de leur véhicule, sans entrer en contact avec une autre motoneige ou un véhicule automobile, ne seront pas indemnisés21 pour leurs blessures corporelles. La création d’un fonds d’indemnisation, qui permettrait d’indemniser les victimes d’un conducteur non assuré, serait la piste à explorer. Sous réserve d’une analyse actuarielle, on peut présumer que la mise en place d’un tel fonds ne s’avérera pas trop dispendieux. En effet, il faut être conscient que depuis 1998, le nombre de personnes qui ne sont pas détentrices d’une assurance responsabilité civile devrait avoir largement diminué. De plus, la mise en place de mesure de contrôle efficace au sein des sentiers balisés devrait, à toutes fins pratiques, régler le problème. Ainsi, seul un infime nombre de personnes serait susceptible de demander une indemnisation au fonds. De plus, le fonds devrait disposer d’un pouvoir de subrogation qui lui permettrait d’aller récupérer une partie des sommes déboursées. En conclusion Suite au jugement du 11 juin 2004, il est possible de se questionner sur le bien-fondé du programme MaxNeige en regard de la protection du public. A fortiori, il faut prendre le temps de bien examiner la situation dans le cas du programme MaxQuad. Un décret, même sur une base temporaire, ne règle pas le problème. Cette avenue crée de la confusion chez les assurés et constitue, encore une fois, une brèche non souhaitable dans le régime de distribution. Le programme ne protège qu’une fraction des conducteurs hors route qui par ailleurs ne semblent pas être en défaut de s’assurer22. De plus, compte tenu du haut taux d’irrégularités observées par le passé, sous l’égide du décret, l’Autorité devra exercer un contrôle serré pour s’assurer du respect des dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers. 21 Selon le Bureau d’assurance du Canada, seulement 20% des accidents impliquent une collision entre deux et plusieurs motoneiges, mémoire du BAC de juin 2001 sur le projet de loi 13. 22 Voir note 6. 12 En permettant à la Fédération de vendre de l’assurance à ses membres, même en balisant le tout par le biais d’un décret, ouvre une brèche qui risque de faire boule de neige. En effet, la multiplication des régimes parallèles risque de mettre en péril la protection des consommateurs si toutes les associations peuvent distribuer de l’assurance sans trop de formalités d’informations. Par exemple, on sait que plusieurs locataires ne possèdent pas d’assurance de dommages. Qu’en serait-il des associations de propriétaires d’immeubles à logements qui offriraient de l’assurance à leurs membres en même temps que la mise en vigueur d’un bail, des entreprises forestières qui offriraient de l’assurance machinerie à leurs membres, des clubs de golf qui assureraient l’équipement de leurs membres ? Plusieurs autres exigences légales pourraient être invoquées pour justifier l’introduction d’un régime de distribution parallèle : Un concessionnaire d’un débit d’essence ne peut obtenir de permis que s’il détient une assurance responsabilité civile. Cela autoriserait-il les grandes pétrolières, les franchiseurs, à imposer leur propre régime d’assurance ? Qu’en est-il des garderies qui doivent détenir une assurance responsabilité de 1 000 000 $ ? Est-ce qu’une association de garderies pourrait obliger la souscription d’une assurance obligatoire auprès d’un assureur de son choix ? Nous sommes convaincus qu’après les Fédérations qui ont développé les produits MaxNeige et MaxQuads, d’autres Fédérations leur emboîteront le pas. Nous pensons que pour assurer une meilleure protection du public, il est important de limiter à sa plus simple expression les modes alternatifs de distribution de produits et services financiers et, c’est pourquoi nous pensons que les deux pistes de solutions que nous avons proposées mériteraient d’être sérieusement analysées. Rappel des deux pistes de solutions : 1. Mettre en vigueur le pouvoir réglementaire lié à l’article 37 de la Loi sur les véhicules hors route pour permettre à la Fédération de patrouiller les sentiers. 2. Créer un fonds d’indemnisation qui permettrait d’indemniser les victimes d’un conducteur non assuré en responsabilité civile. 13