Nymphoplastie, réduction des petites lèvres : une demande

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Nymphoplastie, réduction des petites lèvres : une demande
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[ conseil ] pratique
Nymphoplastie, réduction des petites lèvres :
une demande de plus en plus fréquente
La chirurgie intime regroupe les interventions ayant pour but d’améliorer la région vulvaire. Il ne s’agit pas d’interventions
visant à recréer une virginité mais d’interventions de chirurgie réparatrice ou esthétique des petites et grandes lèvres, du clitoris
et parfois du vagin. La réduction des petites lèvres génitales est une demande de plus en plus fréquente dans les consultations
de chirurgie plastique et esthétique car, pour la majorité des patientes, la gêne est essentiellement esthétique.
ette intervention, fréquente en ExtrêmeOrient, ou de nombreuses techniques
sont utilisées, a encore mauvaise réputation en France, elle est même parfois
déconseillée par certains médecins, en particulier à cause des suites opératoires parfois difficiles de la technique la plus
ancienne.
C
Quelles est la demande ?
Dans le cas de la chirurgie intime, il faut
avoir conscience du handicap qui existe chez
de nombreuses patientes qui, bien souvent,
n’osent pas parler à leur conjoint ou à leur
gynécologue.
La médiatisation, l’échange d’informations
sur des sites internet médicaux autour de
ce type de problème a amené de nombreuses
patientes à consulter. Ces patientes expriment une gêne d’ordre esthétique accentuée par l’évolution des modes vestimentaires (jeans très serrés...) et des dessous
(string) mais aussi par la comparaison avec
Rappel anatomique
Il n’y a pas de poils sur les petites lèvres,
mais beaucoup de follicules sébacés et une
grande variété de nerfs très fins et très sensibles. Les petites lèvres (labia minora) changent considérablement dans la taille et la
forme. Elles sont habituellement peu visibles
chez les femmes qui n’ont jamais accouché,
alors que chez les femmes qui ont eu des
enfants, il est fréquent que les petites lèvres
se projettent au-delà des grandes lèvres. L’extrémité antérieure des petites lèvres se divise
en deux replis qui coiffent en avant le clitoris
pour former le prépuce clitoridien (ou capuchon
du clitoris), et qui se fixent en arrière sur le
clitoris pour former le frein du clitoris. Les
extrémités postérieures des petites lèvres se
réunissent en arrière de l’orifice vaginal pour
former la fourchette vaginale.
les actrices de film X ayant des vulves « juvéniles ». Ces patientes, de plus en plus jeunes,
vivent un véritable complexe, parfois depuis
l’adolescence, qui trouble leur vie amoureuse.
Anatomo-pathologie
L’hypertrophie des petites lèvres est parfois
d’origine congénitale (des enfants qui naissent avec des petites lèvres plus grandes),
mais, dans la majorité des cas, les petites
lèvres se développent excessivement lors de
la puberté ou elles sont secondaires ou
aggravées par les accouchements. Après la
ménopause, elles tendent plutôt à s’atrophier et à se cacher entre les grandes lèvres.
La demande actuelle vient de jeunes femmes
n’ayant pas encore eu d’enfant et qui sont
gênées sur le plan esthétique mais aussi
physique avec des difficultés, voire des douleurs, lors des rapports sexuels, lors de la
pratique de certains sports (vélo, équitation)
ou en raison du port de vêtements trop serrés.
Au maximum, une véritable amputation
(nymphectomie) est possible. L’inconvénient
de cette technique est qu’elle place la cicatrice sur toute la zone de contact avec les
sous-vêtements. Le risque de trouble de
cicatrisation (désunion, infection, hématome) est plus important, les patientes se
plaignent de l’importance des suites opératoires et, surtout, le risque de séquelles à
type de dyspareunie est plus fréquent.
Des techniques dérivant des techniques de
chirurgie plastique avec des résections en
« V » 2 permettent dorénavant de diminuer
la longueur de la cicatrice afin d’éviter le
risque de complication locale. La technique
utilise une résection centrale en V limitant
la cicatrice à la partie centrale des petites
lèvres. Cette technique est bien supérieure
à la technique classique car elle limite la
cicatrice à la région centrale de la petite
lèvre (voir ci-dessous). Elle permet des résec-
Comment se déroule
ce type d’intervention ?
L’objectif essentiel est de réduire les petites
lèvres de façon adaptée à la taille de départ.
L’intervention fréquente aux USA, est souvent
réalisée sous anesthésie locale seule. En
France, les patientes préfèrent souvent être
endormies mais il n’y a généralement pas
d’hospitalisation (hôpital de jour). L’intervention dure 45 minutes et par des techniques de chirurgie réparatrice, on retire
l’excès cutanéo-muqueux qui existe. Un examen anato-pathologique est demandé dans
la majorité des cas pour rechercher une néoplasie débutante 1.
Technique avec résection centrale en V.
Technique chirurgicale
La technique la plus ancienne consiste à
retirer l’excès cutanéo-muqueux suivant un
croissant qui touche la surface de la peau.
tions d’importance faible à moyenne mais
est parfois insuffisante pour les grandes
hypertrophies. Elle présente comme inconvé-
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Quel type d’anesthésie ?
• Anesthésie locale possible mais déconseillée car zone sensible et position gynécologique de la patiente.
• Anesthésie locale potentialisée (Neuroleptanalgésie).
• Anesthésie générale courte : le plus souvent utilisée pour le confort des patientes.
nient de placer les cicatrices dans la partie centrale de la petite lèvre, ce qui peut
être source de problème de cicatrisation à
type de désunion partielle. C’est pourquoi
nous avons tenté de déplacer le siège de la
cicatrice aux extrémités des petites lèvres,
zones moins exposée à ce type de complications comme dans la technique du
Pr Paniel 3.
En revanche, il est souvent nécessaire de
pratiquer une double résection en V, d’où
l’intitulé de la technique dite « V-V ». Nous
pratiquons une résection cutanéo-muqueuse
avec deux « V » latéraux aux extrémités
supérieures et inférieures des petites lèvres
(voir ci-dessous). Par conséquent, la partie
Résection cutanéo-muqueuse en V central.
Aspect final après sutures.
tants : la suture doit être rigoureuse en trois
plans (muqueux, dermique et cutané) et la
résection adaptée mais à minima car une
trop grande résection peut se traduire par
un échec total avec des problèmes de cicatrisation (nécrose) et inverser le problème.
– infection locale,
– hématome,
– dyspareunies généralement transitoires,
– une nécrose cutanée est parfois observée,
en général limitée et localisée. Les nécroses
importantes sont en fait exceptionnelles liées
à un excès de résection,
– altérations de la sensibilité, notamment
diminution de la sensibilité : la sensibilité normale réapparaît le plus souvent dans un
délai de trois à six mois.
Quelles sont les suites
opératoires ?
Les suites sont simples si les conseils élémentaires d’hygiène et de prudence sont
respectés. Pendant les jours qui suivent l’intervention, les douleurs sont possibles à
type de légères brûlures calmées par des
antalgiques simples (paracétamol). Des soins
locaux sont à faire chaque jour à type de
désinfection locale jusqu’à la chute des fils
résorbables. Les douches sont autorisées à
partir du 3e jour mais pas les bains (à partir de trois semaines). Enfin, élément important à préciser, les rapports sexuels sont
interdits ainsi que l’usage de tampons périodiques pendant les quatre à six semaines
suivant la cicatrisation.
Quelles sont les complications
possibles ?
Technique avec résections latérales dites « V-V ».
centrale reste indemne de toute cicatrice,
les suites sont rapides et permettent une
reprise des rapports intimes plus précoce.
Enfin, deux points techniques sont impor-
Les complications peuvent être les suivantes :
– lâchage des sutures partiel ou total, surtout en cas de traumatisme,
– retard de cicatrisation qui allonge les suites
opératoires,
Bibliographie
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Conclusion
La nymphoplastie ou la réduction des
petites lèvres n’est plus un tabou dans
notre société.
Cette chirurgie intime est simple techniquement et présente d’excellents résultats,
apportant aux patientes un véritable soulagement physique et psychologique.
En revanche, il est important que cette intervention, qui présente des risques, soit réalisée par des praticiens habitués dans un
milieu chirurgical (bloc opératoire) d’autant
qu’une prise en charge partielle de l’Assurance maladie est possible. ◗
Dr Laurent Benabida
Chirurgien plasticien,
26, rue de la Tremoille, 75008 Paris
Choi HY, Kim KT. A new method for aesthetic reduction of labia minora (the
deepithelialized reduction of labioplasty). Plast Reconstr Surg. 2000 Jan;
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