Il refuse de manger - Eki-Lib

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Il refuse de manger - Eki-Lib
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Il refuse de manger!
Parents : Documentation : Alimentation : Il refuse de manger !
Jocelyne Petit
Le refus de manger et les caprices alimentaires atteignent un stade critique
durant la petite enfance, autour de l’âge de trois
ans. Plusieurs aliments, autrefois appréciés, sont
maintenant boudés. Il devient plus difficile
d’intéresser l’enfant à goûter de nouveaux aliments.
L’appétit subit des fluctuations incontrôlables,
faisant alterner de bonnes journées avec des moins
bonnes. L’enfant a aussi ses préférences : il peut
demander certains aliments en particulier, au
détriment d’autres. Voici des pistes pour aider le
parent à mieux comprendre ce qui se passe et pour
mieux l’aider à intervenir.
1. Les comportements à adopter
2. Les comportements à éviter
Se rappeler qu’une diminution de croissance entraîne une diminution de
l’appétit
Au cours de l’enfance, des périodes de croissance rapide succèdent à des
périodes d’accalmie, où l’enfant grandit peu.
Ses besoins nutritionnels subissent donc une grande fluctuation et cela
constitue un facteur physiologique indépendant à la volonté.
Dans les périodes où le parent aurait tendance à s’inquiéter, il y a lieu de se
poser les questions suivantes : «Est-ce que mon enfant fonctionne
normalement sur le plan physique? Dispose-t-il de l’énergie nécessaire pour
bouger, courir, sautiller, etc.?»
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Si la réponse est oui, il n’y a vraisemblablement pas lieu de s’inquiéter.
L’enfant absorbe assez d’énergie pour être en mesure d’en dépenser autant.
Si, par contre, la réponse est non, l’enfant est apathique et s’intéresse à peu
de choses. Il choisit des activités où il se dépense peu… Il y a alors lieu de
consulter un spécialiste de la nutrition.
Une règle d’or : diminuer les portions
Le parent a souvent tendance a surcharger l’assiette de l’enfant. Cela a un
effet décourageant. Il vaut mieux présenter une petite portion et donner la
possibilité à l’enfant d’en redemander. Le parent est souvent inquiet du
«gaspillage» de nourriture. Il est donc préférable de réduire la portion : cela
diminue le «gaspillage».
Mais il faut aussi se dire que parfois, il vaut mieux «gaspiller» un peu de
nourriture plutôt que de «gaspiller» la relation à la nourriture qu’établit
l’enfant en créant un climat stressant autour de la table et en faisant
pression sur l’enfant pour qu’il mange.
Louise Lambert-Lagacé propose un indice pour mesurer les portions/enfant :
de un à cinq ans, compter environ une cuillère à table par année de vie. Ainsi,
entre trois et quatre ans, quatre cuillères à table de légumes et quatre
cuillères à table de viande constituent des portions convenables pour les
besoins nutritionnels de l’enfant. Elle suggère aussi que le parent offre la
qualité de nourriture et qu’il laisse l’enfant déterminer la quantité qui lui
convient. Le nouveau «Guide canadien alimentaire pour manger sainement»
suggère des petites portions/enfant équivalentes à une demi-portion adulte
(exemple : ½ tranche de pain à 1 tranche, ½ tranche de fruit à 1 fruit, etc.).
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Présenter les légumes crus plutôt que cuits
Dès que l’enfant possède une dentition suffisante qui lui permet de croquer,
il apprécie beaucoup les aliments croquants. À partir de ce moment, après
l’âge d’un an, très souvent les légumes seront plus appréciés s’ils sont
présentés crus. Les mêmes légumes cuits peuvent rester dans l’assiette. Une
petite trempette à base de yogourt nature (aromatisé à la tomate, au
concombre, etc.) accompagnant des légumes crus laisse rarement le jeune
convive indifférent. Cela demeure vrai tout au long de l’enfance.
Les légumes sont parmi les aliments les plus refusés. Les servir en crudités
avant le repas, pour faire patienter avant que celui-ci soit prêt, et le tour est
joué! Ils vont souvent être plus appréciés à ce moment-là que dans l’assiette,
baignant dans la sauce (beaucoup d’enfants préfèrent la viande sans sauce).
Une manière de les servir cuits qui plaît davantage, c’est lorsqu’ils sont
accompagnés de fromage fondu.
Porter une attention toute spéciale à la présentation visuelle
L’enfant mange d’abord avec les yeux. Une belle vaisselle colorée, une table
bien mise, un napperon gai, une tasse amusante, autant de détails qui le
stimulent positivement, comme nous le disions plus tôt.
Les aliments dans l’assiette ont avantage à être séparés, car bon nombre
d’enfants n’aiment pas les mets en casserole où tout est mélangé. Bien sûr, il
se trouvera toujours un gamin pour mélanger tout, en faisant un monticule au
centre de l’assiette. Mais d’ordinaire, c’est de manière plus méthodique et
ordonnée que les enfants aiment voir les aliments dans leur assiette.
La couleur des aliments est aussi importante. Comme parent, il convient de
porter attention à ces détails pour choisir des aliments qui, une fois dans la
même assiette, sont appétissants et colorés. Il vaut mieux investir notre
énergie là, plutôt que dans l’insistance, à table, pour forcer l’enfant à manger.
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Faire participer l’enfant à son alimentation
Faire participer l’enfant à son alimentation
peut largement contribuer à susciter une
ouverture plus grande face aux aliments à
consommer. Voici un exemple
J’ai remarqué que mon enfant retire
minutieusement tous les morceaux de
champignons qu’elle retrouve dans sa sauce à spaghetti. Elle mange très bien
tout le reste. Mais quand vient le temps de ramasser après le repas, nous
retrouvons ces petits morceaux au fond de son assiette. Un jour, j’ai eu l’idée
de la faire participer. Je lui ai proposé de couper elle-même les champignons.
Eh bien, ce soir-là, elle les a mangés. Elle a dit : «Ce sont mes champignons !»
Quand l’enfant met la main à la pâte, il lui sera plus difficile de refuser par la
suite ce qui se trouve dans son assiette. Il est probable que le fait de
s’affirmer, d’exprimer quelque chose de lui-même, l’intègre davantage au
repas familial. Il doit moins sentir qu’on le lui impose, puisqu’il y a participé de
son plein gré et avec plaisir en plus. C’est connu, les enfants adorent cuisiner.
Dans le même sens, si on met des plats de service sur la table et qu’on laisse
l’enfant choisir sa portion, en lui disant bien sûr de veiller à prendre les
quatre groupes alimentaires, on peut être surpris des résultats positifs d’une
telle stratégie.
En fait, plus on impose et plus la fermeture s’installe. Et plus on laisse de la
place à l’enfant, en lui permettant de faire certains choix (exemple : crus ou
cuits?), de participer ou de se servir lui-même, et plus on a de chances que
cela devienne plus facile, l’ouverture étant plus grande.
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Introduire une variété d’aliments durant les deux premières années de
vie
Quand le parent veille à introduire une variété d’aliments durant les deux
premières années de vie, pour l’enfant, c’est souvent plus facile, par la suite,
d’accepter ces aliments. Après la deuxième année, en effet, la nouveauté est
souvent refusée. Ainsi, brocoli, chou, épinard, betterave, pour n’en nommer
que quelques-uns, ont avantage à faire partie du menu dès le plus jeune âge.
Attention au contexte émotif du repas
Le contexte émotif du repas importe énormément. Quand il est chargé
d’inquiétudes, de stress, de pression, d’insistance, il engendre souvent la
fermeture chez l’enfant. Ce dernier se défend, se protège et ne laisse plus
rien entrer du monde extérieur, encore moins la nourriture. Le parent a
avantage à investir son énergie positive pour soigner l’ambiance, pour manger
de bon cœur. C’est son seul vrai pouvoir, car il ne peut contrôler l’enfant de
l’intérieur, lui faire ouvrir le «clapet» pour imposer sa volonté. L’enfant sait
intuitivement qu’il détient là un outil d’affirmation par excellence. Et il s’en
servira pour imposer sa propre volonté.
La guerre de pouvoir est commencée et le jeu de «Qui va gagner?» aussi. Et
ce, au détriment de ce qui est essentiel : l’établissement d’une relation
heureuse avec les parents.
À certaines étapes du développement de l’enfant et selon sa personnalité,
c’est pour lui impossible de renoncer à lui-même. Alors il s’imposera et la
table deviendra un véritable champ de bataille. C’est à éviter à tout prix!
D’autres stratégies apportent de meilleurs résultats. De plus, il faut se
rappeler que nous travaillons au cœur d’un processus à long terme. Nous
avons du temps pour enseigner à l’enfant ce qui nous tient à cœur. Il n’y a pas
lieu de se durcir, car ceci peut entraîner des conséquences fâcheuses à long
terme dans lesquelles la relation à la nourriture devient malsaine.
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Considérer le contexte émotif de la vie familiale et sociale
Nous disions plus tôt que des événements perturbateurs, engendrant des
changements possibles, peuvent influencer les comportements de l’enfant en
produisant une ouverture ou une fermeture démesurée. L’enfant éprouve de
la difficulté à absorber le changement, alors il absorbe plus ou moins de
nourriture. L’émotion est difficile à ravaler. En qualité de parent, il convient
de porter attention à la vie émotive de l’enfant et de sa famille, sachant
qu’un inconfort ici ou là peut influer sur la relation à la nourriture. Au lieu de
s’acharner sur le refus de manger, il sera plus pertinent alors de prendre
soin des émotions, d’aider à les identifier, d’aider à porter la souffrance et le
manque, d’aider à trouver des ressources appropriées.
Reconnaître les besoins d’affirmation qui se manifestent à table
Nous le disions précédemment, l’enfant a une autonomie à développer, une
identité distincte de ses parents à construire. L’expression de ses goûts et
de ses préférences alimentaires s’inscrit en ligne directe avec ce
cheminement. Elle est donc à encourager, sans toutefois se soumettre «aux
quatre volontés» de l’enfant. Parfois, il s’agit seulement de reconnaître
verbalement qu’un tel aliment constitue une préférence alors qu’un autre n’en
est pas du tout une. Une parole du genre : «Tu peux essayer de le manger,
même si ce n’est pas ce que tu préfères» peut parfois aider parce que
l’enfant se sent reconnu dans sa différence.
Autour de la table, l’enfant adoptera des comportements d’affirmation. La
demande et le refus d’aliments représentent des lieux d’affirmation
importants. L’ouverture ou la fermeture du clapet, liée à un consentement
que seul l’enfant peut donner de l’intérieur, définit une autre façon de
s’affirmer. Confronter ses parents en faisant le contraire de ce qui est
souhaité par eux (exemple : les bonnes manières à table) est un autre moyen
à sa disposition pour faire savoir qu’il existe, qu’il a une volonté propre et qu’il
n’a pas l’intention de se soumettre.
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Il faut donc éviter de se montrer impressionné ou inquiet devant le moindre
signe de refus ou d’affirmation que l’on jugerait négatif. Il s’agit alors
d’observer la situation et de voir ce qu’il convient le mieux de faire, sans
envenimer le problème ou tomber dans la lutte de pouvoir. Parfois, il s’agit de
demander à l’enfant, doucement, de se retirer de table en lui offrant la
possibilité de revenir quand ses dispositions seront davantage positives. Le
parent a quelquefois besoin de défendre, avec beaucoup de conviction, la
table comme lieu de plaisir et d’échanges et de ramener les convives à cette
vision du moment du repas. Ce n’est pas le temps de régler ses comptes, de
faire la morale, de réprimander. Une parole du genre : «Nous avons besoin de
ce petit répit. Nous tenons à la tranquillité lors du repas. Tu pourras revenir
quand cela sera possible pour toi de respecter un climat plus calme» peut
redonner une valeur prépondérante au plaisir de manger.
Développer l’art du camouflage
L’aliment refusé par l’enfant peut parfois être accepté s’il est intégré à une
préparation où il se retrouve camouflé (exemples : potage au brocoli, lait aux
fraises, pouding, potage aux épinards, sauce à spaghetti aux lentilles, etc.).
Alors, le goût des autres aliments de la préparation vient masquer celui de
l’aliment refusé. Quand on peut passer les légumes au mélangeur ou au robot
culinaire, avant de les intégrer à une recette, ils disparaissent dans la
préparation tout en y ajoutant de bons nutriments.
Cela vaut toujours la peine d’investir dans cette recherche des recettes qui
permettent d’ajouter des aliments boudés par l’enfant.
Laisser l’enfant assumer la conséquence de son refus de manger
Il convient de laisser l’enfant assumer la conséquence logique et naturelle de
son refus de manger, soit la faim jusqu’au prochain repas ou la prochaine
collation. Le repas ne sera pas devancé.
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Le parent pourra aviser l’enfant de cette conséquence qui peut lui être
désagréable, et ce, sans en faire une menace du type : «Si tu ne manges pas,
tu auras faim tout l’après-midi!» Il est préférable de dire sur un ton calme
quelque chose comme : «Il se peut que tu ressentes la faim à un moment où il
ne sera pas temps de manger. Tiens compte de ça dans ta décision.»
Utiliser l’influence positive des autres enfants
Quand des enfants sont assis à une table et que certains d’entre eux
mangent avec appétit des aliments moins appréciés par d’autres, il arrive que
ces derniers se laissent influencer et acceptent de goûter de nouvelles
saveurs autrefois refusées. Cette stratégie peut aider, à l’occasion.
Le plus souvent, les caprices alimentaires se résorbent d’eux-mêmes, au fil
des ans, devenant moins évidents dans les périodes de croissance rapide.
Les parents sont soucieux d’ouvrir les horizons
gustatifs de leur enfant et cela est positif en soi.
Toutefois, il faut garder constamment à l’esprit que
cet apprentissage du goût s’échelonne dans le temps,
qu’il est un processus à long terme, car les goûts
changent beaucoup avec le temps. Il faut aussi se
rappeler que l’apprentissage se réalise beaucoup
mieux dans un climat agréable. Prenons l’exemple des
petits Mexicains qui s’habituent graduellement au
goût du piment fort. Ce goût du «piquant» est associé
à un symbole positif : grandir, devenir puissant… L’enfant n’est pas forcé et
c’est de lui-même qu’il s’ouvre peu à peu.
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2- Les comportements à éviter
Éviter le grignotage entre les repas : l’importance d’une certaine
régularité
Quand l’enfant manifeste souvent un refus de manger, il est conseillé de ne
pas offrir de la nourriture à tout moment de la journée. Il vaut mieux
concentrer l’appétit. Entre deux repas, on peut offrir une collation santé. Il
faut adapter le type de collation selon l’appétit de l’enfant et éviter de
surcharger son estomac. La collation doit se prendre au minimum 90 minutes
avant le repas principal. Sinon, c’est avec l’estomac encore plein que l’enfant
se présentera à table, exprimant un manque d’appétit et un refus de manger.
Il est plus facile de bien doser la prise alimentaire lorsque l’enfant peut
vraiment sentir la faim et la satiété, son estomac et son ventre vides ou
pleins. Le grignotage brouille tous ces signaux. L’enfant ne sait plus quand il a
vraiment faim et quand il est vraiment rassasié. Son estomac est toujours en
train de digérer quelques aliments qu’il vient de grignoter.
Éviter le «trop de jus» et le «trop de lait»
Il n’est pas rare que l’enfant reçoive du jus ou du lait en quantité
importante, on s’en rend compte lorsqu’on fait la mesure à la fin de la
journée. Le lait est l’aliment de base de l’alimentation du poupon et ce, jusqu’à
six mois. De la naissance à six mois, en effet, la consommation de lait
augmente graduellement pour atteindre environ 1,25 l (40 oz) par jour. À
partir de ce moment, la quantité de lait consommé diminue au cours de la
petite enfance, pour laisser la place aux aliments variés des quatre groupes
alimentaires. Par la suite, durant les périodes de croissance soutenue, la
consommation de lait augmentera à nouveau, au même titre que tous les
autres aliments au menu de l’enfant. Voici un tableau qui présente cette
évolution dans la consommation de lait.
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Consommation approximative de lait
Jusqu’à 6 mois : Jusqu’à 1,25 litres de lait (40 oz)
Vers 7-9 mois : Environ 750 ml à 930 ml (25-30 oz)
Vers 9-12 mois : Environ 620 ml à 900 ml (20-30 oz)
Vers 1 an- 2 ans : Jusqu’à 720 ml (24 oz)
Vers 2-5 ans : Environ 500 ml (16 oz)
Vers 4-9 ans : Environ 500 ml à 750 ml (16-24 oz)
Vers 10-16 ans : Environ 750 ml à 1l (24-32 oz)
Il ne convient pas d’offrir du lait à l’enfant à tout moment. Cet aliment
nutritif prendrait alors la place des autres aliments riches en nutriments
dont l’enfant a besoin. Il en est de même pour le jus. Il ne sera pas trop
surprenant qu’un enfant gorgé de lait ou de jus, en dehors des repas, refuse
de manger; il n’a pas faim tout simplement. Il a déjà été nourri.
Éviter d'accorder trop d’attention au refus de manger
Si l’enfant reçoit beaucoup d’attention quand il refuse de manger, il est
probable qu’il persévère longtemps dans son refus. Parfois, c’est la seule
stratégie qui lui reste et qui soit aussi efficace pour le rendre important aux
yeux de ses parents. En effet, que peut-il faire d’autre qui lui attire autant
d’attention, en paroles, en présence, en intérêt qu’on porte à sa personne? Le
fait de parler constamment à l’enfant de son refus et du devoir qu’il a de
manger lui donne ainsi beaucoup d’importance. Même si cette attention est
négative, elle vaut mieux que rien.
Il arrive que des parents proposent même des jeux pour susciter l’ouverture
(du clapet!) chez l’enfant. On jouera alors à l’avion qui doit rentrer, au
camion… C’est encore une fois déployer beaucoup d’énergie. Au lieu de
résoudre la difficulté, cela peut avoir l’effet contraire d’en augmenter la
fréquence. Il est sain que l’enfant reçoive une bonne dose d’attention
positive et ce, en dehors des repas comme au repas.
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Que les parents communiquent à l’enfant l’importance qu’il a à leurs yeux
n’est que positif. Cependant, ce sentiment doit être communiqué à d’autres
moments que lorsque l’enfant refuse de manger.
Éviter de le forcer à manger
Le respect de l’enfant passe par le respect de ses
goûts. Il faut éviter à tout prix de tenter de
dominer l’enfant en le forçant à manger des aliments
qu’il refuse. Les spécialistes de la nutrition, tels que
Louise Lambert-Lagacé, M.C. Belliot, H. Cachia et S.
Machinot, s’entendent pour dire qu’il faut éviter le
«forçage», car la table risque de se transformer en
champ de bataille où régneront conflits, chantage et marchandage.
Le parent peut demander à l’enfant de goûter, de faire un petit effort en ce
sens. Si l’aliment n’est pas consommé en entier après cet essai, l’assiette est
tout simplement retirée, sans réprimande ni commentaires désobligeants. Le
parent peut dire : «Tu te reprendras au prochain repas!» sans plus. De cette
manière, on évite que la nourriture devienne un support, une monnaie
d’échange pour l’enfant qui s’entête à affirmer son autonomie dans la
confrontation avec l’adulte.
Le parent ne doit pas utiliser son pouvoir pour dominer l’enfant et le réduire
à l’impuissance en refusant de reconnaître ses goûts. Le refus d’un aliment
n’est pas nécessairement définitif. Parfois, il s’agit de le présenter sous une
autre texture, une autre forme et le tour est joué! Il faut toujours
persévérer et continuer de l’offrir à l’enfant, car les goûts changent avec le
temps.
Cela dit, il restera toujours des aliments bannis par l’enfant. Dans une
famille, par exemple, les parents se sont entendus pour permettre à chaque
personne de refuser un aliment en particulier.
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Chacun a alors la responsabilité de se préparer lui-même un substitut
équivalent en valeur nutritive. Exemples : du concombre au lieu des
courgettes, des tomates au lieu des betteraves, du navet au lieu des pois
mange-tout. Pour tous les autres aliments, la consigne est claire, on doit
faire l’effort d’y goûter pour voir si le goût a changé et vérifier si on
l’apprécie.
Éviter l’aliment-punition ou l’aliment-récompense
La préférence pour le sucré est bien connue. Des études prouvent qu’elle est
génétique. Le parent doit éviter le piège du chantage par lequel il profite de
l’expérience et menace l’enfant d’être privé de dessert s’il ne mange pas
toute son assiette. Les desserts sont censés être nutritifs et sains. L’enfant
qui refuse un aliment (exemple, les légumes) et qui a fait un effort en y
goûtant devrait se voir offrir le dessert sans commentaires. Il a besoin de
ces calories nutritives pour se construire et pour fonctionner. Il faut donc
éviter l’association dessert-récompense, dessert-punition. Cette intervention
est néfaste, car elle survalorise le sucré au détriment des autres
composantes du repas. Si le dessert est aussi nutritif que le reste du repas,
l’enfant n’a pas à le considérer comme un privilège à gagner en se pliant aux
exigences de l’adulte, indépendamment de ses propres goûts et de son
appétit.
Dans les occasions spéciales et les périodes de fêtes où des sucreries et des
desserts très sucrés sont offerts, le parent peut faire comprendre à
l’enfant qu’il est important de garder son appétit pour les aliments qui
nourrissent vraiment le corps. Les gâteries ne constituent pas le repas. On
s’assure donc d’abord de préserver l’appétit pour les vrais aliments et
ensuite, on peut compléter avec un petit «extra». Cette intervention,
toutefois, ne doit pas se faire sous le mode de la punition avec un message du
genre : «Si tu manges toute ton assiette, tu auras une sucrerie» ou l’inverse.
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Des parents diront à leur enfant, en cherchant un raisonnement logique
infaillible : «Si tu n’as plus faim pour le repas, tu n’as plus faim pour le
dessert!». À priori, ce raisonnement peut sembler convaincant. Or, la réalité
scientifique est tout autre. En effet, il est prouvé que les humains
deviennent, après un certain temps, saturés d’un certain goût et qu’ils s’en
lassent. Le message corporel émis à ce moment ressemble à la satiété, du
genre : «Je n’ai plus faim…» En réalité, si la personne consomme un autre
aliment, la faim se renouvelle, car il s’agit plus d’une saturation face à un goût
particulier qu’une véritable satiété. Comme le goût sucré est génétiquement
programmé pour être perçu comme plaisant, il n’est pas rare qu’enfants et
adultes retrouvent, pour consommer le dessert, une faim et un appétit qu’ils
croyaient satisfaits. Alors le raisonnement ne tient pas et nous-mêmes,
adultes, nous expérimentons ce phénomène de saturation après le repas,
suivie d’une nouvelle faim pour le dessert. Nous pouvons penser qu’il en est de
même pour l’enfant.
Il faut à tout prix faire diminuer la pression que nous mettons sur l’enfant.
Cette pression ne produira pas d’ouverture véritable face aux goûts. Elle
risque davantage d’engendrer le rejet et la fermeture. Il est souhaitable de
prévenir de tels troubles.
Cela dit, quand la situation nous dépasse en tant que parent, il convient de
consulter des spécialistes de la nutrition ou des psychologues afin de trouver
de l’aide pour résoudre les difficultés plus graves.
Cet article a été publié dans le magazine Junior, numéro de septembre 1998.
Jocelyne Petit est docteure en sciences de l’éducation. Ses recherches ont
porté principalement sur le corps et le développement de la personne.
Source : MANGER AVEC DES ENFANTS. POUR LE PLAISIR ET POUR LA
VIE, Jocelyne Petit, Les Presses de l’Université Laval, 1996.
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