Premiata Forniera Marconi, Marillion, La Playlist
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Premiata Forniera Marconi, Marillion, La Playlist
SAMEDI 24 SEPTEMBRE 2016 LE JOURNAL DU JURA RIFFS HIFI 27 PFM La légende du progressif italien récemment en concert au Z7 de Pratteln Premiata Forniera Marconi encore là depuis l’aube du rock PIERRE-YVES THEURILLAT La culture italienne a toujours réservé dans son cœur une place de choix au genre progressif. Genesis, en 1972 à l’époque de «Nursery Cryme», était particulièrement bien situé dans les charts italiens. Ces mêmes Genesis qu’on retrouve en 2007 balançant leur rock symphonique et étoilé devant 500 000 personnes à Rome. Et pas seulement. La scène progressive a suivi dans la Grande Botte un tracé unique avec des bands phares comme Le Orme, Banco del Mutuo Soccorso et surtout PFM. Premiata Forniera Marconi, de Milan, est l’un des groupes de rock d’Italie qui s’est le plus et le mieux exporté à l’étranger. «Nous avons vendu entre trois et quatre millions d’albums toutes périodes confondues», confie le bassiste francophone Patrick Djivas. 5000 concerts Ce Niçois présent depuis les débuts discographiques de PFM (en 1972!) se produisait mardi soir avec ses compères au Z7 de Pratteln. Devant moins de 200 personnes, le groupe a revisité un vaste répertoire, foisonnant surtout durant les années 70, avec un arrêt des hostilités entre l987 et 1997 et une reprise d’autant plus marquée par l’appui, dès 1998, de Roberto Gualdi comme second batteur. Le double emploi de la batterie et du chant (tout comme celui du violon depuis toujours dans PFM) est désormais une marque de fabrique d’un band jugé élégant dans sa démarche, proche de King Crimson, de Genesis, avec ce caractère méditerranéen et ces compositions kaléidoscopi- Un vibrant hommage aux trois King Attention, danger! Ce type est un hyperactif. Un caméléon, surtout, qui sait mieux que quiconque magnifier le style des autres. Son nom? Joe Bonamassa. Son job? Guitar hero. En solo ou avec la prodigieuse Beth Hart (voir ci-dessous), voire avec le gang destroy Black Country Communion – featuring Glenn Hughes et Jason Bonham –, ce gars aligne les albums les plus variés sur un rythme de stakhanoviste. Dans «Live at the Greek Theatre» (distribution Musikvertrieb), un double CD, il a par exemple choisi de rendre hommage aux trois King. Allusion évidente à B. B., Freddie et Albert, dont il reprend les hymnes épaulé par une formation de dix musiciens. Du blues on ne peut plus classique, forcément, administré avec une maestria peu commune. A ce qu’il paraît, dans une autre tournée, quasi parallèle, Joe le fébrile honore les trois kings de la guitare anglaise. On veut bien sûr parler de Jeff Beck, de Jimmy Page et d’Eric Clapton. Il aurait pu penser à Peter Green, le bougre. Ce disque-là, on l’attend avec une impatience non feinte. Sacré Joe: depuis longtemps, il fait partie des grands serviteurs de la six cordes. Ne lui manque peut-être qu’un style propre. } PABR BETH HART La nouvelle diva du blues et du rock, c’est elle Roberto Gualdi (batterie), Marco Sfogli (gtr), Franz di Cioccio (chant, batterie), Patrick Djivas (basse), Lucio Fabbri (violon) et au devant Alessandro Scaglione (claviers) et Alberto Bravin (chant et clavier) forment le PFM actuel. LDD ques qui l’en distingue. Au Z7, PFM poursuivait sa petite tournée qui l’avait déjà emmené à Londres, à Manchester, à Verviers (BE), en Hollande et le déposait en Allemagne le lendemain. «Voilà 35 ans que nous n’avions plus joué en Allemagne», commente Patrick Djivas. A 69 ans, vieux de la vieille s’il en est avec le leader batteur et chanteur Franz di Cioccio, le bassiste, qui avait officié au préalable dans les early seventies avec le groupe Area et accompagné Lucio Dalla, est entouré de jeunes musiciens plutôt valeureux. L’esprit technique, à la fois rock et classique, l’emprunt au jazz, au folklore et à la chanson italienne, aussi, l’exigent. +«Avec PFM, nous nous sommes produits sur scène plus de 5000 fois. La musique, ça main- tient!», poursuit Patrick Djivas. A ses côtés, Franz di Cioccio se fait troubadour en chef, voire chef d’orchestre avec ses deux baguettes, mime, fait le clown et rend digeste les guirlandes de notes et les nombreuses cassures rythmiques de PFM, pleinement dans la tradition progressive. Réminiscences d’ELP Le groupe, qui a connu nombre de changements de personnel tout au long de sa longue carrière, a su maintenir la flamme intacte. PFM a récemment sorti un 20e album studio, intitulé «The World». A son actif également, 15 albums live, non compris les bootlegs, compilations, et autres vidéos et DVD. Marrant de découvrir seulement aujourd’hui ces vétérans de la cause musicale progressiste. A l’ancienne, et au format rock classique, parfois, cette moutarde-là monte dans les naseaux et élève le propos émotionnel bien haut, notamment lorsque PFM reprend à son compte Prokofiev. Non loin d’ELP dans cette démarche, le groupe évite pourtant (mais de justesse) d’en devenir particulièrement kitsch. Avec ses fins de titres en majeur, ses gimmicks puisés dans le folklore emballant vite le public, ses breaks surprises suscitant l’étonnement, ce PFM nouvelle vague est tout à fait convaincant. Pour peu que l’on n’attende pas de révolution dans une musique progressive qui trouve là, avec PFM notamment, sa place traditionnelle. } Aucune barrière, aucune limite dotée en la matière. «F.E.A.R.», en abrégé, peut sans orgueil déplacé prendre place entre «Misplaced Childhood» (1985) et «Clutching at Straws» (1987) pour la période Fish, entre «Brave» (1994), «Afraid of Sunlight» (1995) et «Marbles» (2004) pour la période Steve Hogarth. Dans la lignée de son prédécesseur, le déjà remarquable Vous n’aimez pas toutes ces chanteuses qui couinent? Moi non plus! Alors, vous adorerez Beth Hart. Enfin une grande voix féminine! Comme au temps jadis, serait-on tenté de dire. Diable, cette splendide Américaine chante le blues comme une Black et le rock comme Chrissie Hynde. A tel point qu’ils sont nombreux à faire appel à ses services. Jeff Beck, que la belle considère comme le plus grand guitariste de tous les temps. Slash, première gâchette des Guns. Mais aussi le bon Joe Bonamassa (voir ci-dessus), avec lequel elle a réalisé trois albums. Mais Beth Hart peut aussi s’enorgueillir d’une belle carrière solo. Qualifiée par The Blues Magazine qui s’y connaît d’«ultime female rock star», auréolée de bien d’autres récompenses, elle publie «Fire on the Floor» (distribution Musikvertrieb), nouvel album solo suintant le blues, le rock et le jazz par tous les pores. Avec une telle voix, on l’achèterait même si elle chantait du bödölö! } PABR VOLXROX Du rock dialectal au rockabilly-woogie VolXRox, ça vous dit quelque chose? Simu & Simu, peut-être. Mais oui, l’orchestre pain-fromage qui sévit souvent aux alentours de Moutier, où l’un des membres, nous murmure-t-on, a quelques accointances. Bref, tout cela nous avait intrigué. D’autant plus que l’un des Simu, le fils, a désormais formé un autre gang baptisé VolXRoX. Ces bougres-là mêlent joyeusement rock dialectal, rockabilly et boogie totalement woogie, avec des guitares qui le disputent aux renifleuses. C’est léger, jovial et rigolo. Les fans des Ramones et de MXD passeront leur chemin en courant. Les autres, adeptes de lutte, se rappelleront que VolXRoX a composé l’hymne officiel de la récente Fête fédérale, «Kampf ume Thron». L’album éponyme des Emmentalois est fourgué par Phonag Records. Et, dites, y a même une chanson en français. } PABR LA PLAYLIST DE... Matthieu Hofmann [email protected] MARILLION «Fuck everyone and run» Trente-cinq ans de carrière, 18 albums studio, plusieurs vies et toujours, immuablement, la même fascination, le même mystère. Sa trajectoire, son évolution, sa musique, son business – financement par les fans –, Marillion est unique. Et libre, tellement libre. Sorti hier, «Fuck everyone and run» (Phonag Records) constitue une nouvelle perle dans sa discographie déjà bien JOE BONAMASSA «Sounds that can’t be made» (2012) – un album accouché dans la douleur –, Marillion pousse encore plus loin les frontières de la création, de l’exploration. Il s’affranchit complètement de toute influence extérieure, de toute pression commerciale. Les pionniers du «crowdfunding» déstructurent complètement leur musique, située quelque part entre rock, prog, ambiant et psychédélique. Le genre? Inclassable. Aucune barrière, aucune limite, rien. Juste l’instinct. En découle une œuvre magistrale contenant six morceaux, dont trois pièces magistrales de plus de 15 minutes, savants panachages de petits fragments qui, mis bout à bout, forment un tout étonnamment cohérent. «El Dorado», «The Leavers» et «The New Kings», les trois péplums en question, n’atteignent peut-être pas tout à fait le niveau de précédents morceaux épiques tels que «The Invisible Man», «Ocean Cloud» ou «This Strange TRIPTIK FEAT. DJ PONE «Papa» (2012) Engine», certes, mais ils s’inscrivent déjà dans la longue liste des grands classiques «marillionesques». L’ensemble, très organique, est bâti sur les denses nappes de clavier vaporeuses et le piano sobre de Mark Kelly, la voix de Steve Hogarth, nourrie par des textes souvent engagés (les dérives du capitalisme, la puissance de l’argent, la vie sur la route, l’écologie) servant de fil conducteur. Et il y a cette touche, unique, si précieuse, quand le guitariste Steve Rothery prend les commandes. On respire un bon coup, on se cale dans le fauteuil, on ferme les yeux. On écoute, on flotte. Bien que parfois un peu trop éthéré, «F.E.A.R.» est un parfait équilibre, une synthèse qui donne le frisson. Bien sûr, l’auditeur doit comprendre la démarche, l’accepter, aller au-delà d’une première écoute, moment souvent compliqué avec les cinq Anglais. Marillion existe, loin du monde. Il vit, vibre. Et fait vibrer. } LAURENT KLEISL Des uns mieux que d’autres, mais oui, les rappeurs aussi vieillissent et certains deviennent même papas. Ici, le duo Triptik, composé de Dabaaz et de Greg Frite, évoque les joies et les défis de la paternité. S’il est plutôt rare d’entendre un morceau de rap où l’on parle d’un sourire dessiné au ketchup sur un œuf au plat, celui-ci est une réussite où les assonances et les allitérations se succèdent avec justesse. RENAUD «La Médaille» (1994) Il n’avait pas encore le Christ tatoué dans le dos, mais possédait par contre une plume magique, qu’il trempait dans une encre aussi tendre qu’acerbe. Dans cette chanson sortie sur l’album «A La Belle de Mai», le «chanteur énervant» nous plonge dans son antimilitarisme, sans tomber dans la niaiserie d’un miss. Oui, la guerre c’est mal. BÉNABAR «Je suis de celles» (2003) Pour une fois, Bénabar nous épargne ses traditionnelles banalités et ne nous explique pas qu’il a envie de commander des pizzas devant la télé. Dans «Je suis de celles», il se met à la place de la fille dite facile, celle qui, à l’adolescence, ne disait jamais non. Tout en sensibilité, il se moque des garçons et fera culpabiliser ceux qui ne se sont peut-être pas comportés avec respect auprès de celle qui était «la première qui compte, mais pas tant que ça». NOIR DÉSIR «Gagnants-Perdants» (2008) Le dernier texte de Bertrand Cantat avec Noir Désir. Mise en ligne sur le site internet du groupe avec une reprise du «Temps des Cerises», cette chanson, inhabituellement explicite pour Cantat, critique le contexte social, le système politique et la course à la performance, notamment. «Nous ne pouvions pas attendre pour la sortir», dira le rockeur. Avec une référence à la série télévisée pour enfants «Bonne nuit les petits», Noir Désir reproche notamment aux politiciens d’endormir le peuple. Ce qui n’est pourtant de loin pas leur genre... }