LE GRAND MASSACRE DES CHOUETTES […] Midi le trouva en
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LE GRAND MASSACRE DES CHOUETTES […] Midi le trouva en
LE GRAND MASSACRE DES CHOUETTES […] Midi le trouva en train de marcher sur le sentier des volières. Il s’assit sous un arbre et fit honneur à son goûter. Il digéra en faisant un somme. Lorsqu’il ouvrit les yeux, un oiseau volait en cercle au‐dessus de sa tête. Il se leva pour mieux l’identifier. L’oiseau plongea vers lui et se posa sur son épaule. C’était une chouette et son comportement lui laissa supposer qu’il avait affaire à Juliette Cayouette. Il s’adressa à l’oiseau : — J’ignore si tu peux me répondre, mais serais‐tu Juliette? La chouette inclina la tête. — Alors voici ce que nous allons faire. Nous nous rendrons chez toi et ta mère va te plonger dans un bain de lait de pierre. La chouette opina de la tête une seconde fois. Ti‐Jean marcha vers le village sans que l’oiseau ne quittât son perchoir. De le voir passer ainsi avec un oiseau au plumage gris et blanc sur l’épaule piqua les curieux qui se joignirent à lui, formant un véritable cortège. Il frappa à la porte des Cayouette. Donatienne ouvrit. Elle avait les yeux rougit par les larmes. En apercevant Ti‐Jean avec une chouette sur l’épaule, elle crut à une attrape. Il la rassura en la mettant au parfum. Donatienne héla son mari qui bafouilla, car il ne comprenait rien à ce manège. Sa femme lui répéta ce que Ti‐Jean lui avait raconté. — Mon Dieu, est‐ce possible! Mon Dieu, est‐ce possible! répétait‐il sans arrêt. — Pardonnez‐lui, s’excusa Donatienne, mais la douleur est en train d’emporter sa raison. — Pour délivrer votre fille de son mauvais sort, faites‐lui prendre un bain de lait de pierre. — Du lait de pierre! s’étonna Donatienne. Mais où donc allons‐nous en trouver. Ti‐Jean lui tendit le sac de lin. — Il est en poudre, mais en le diluant dans l’eau vous obtiendrez la consistance du lait de vache. Plongez‐y la chouette et votre fille vous sera rendue. Que sa fille fut changée en oiseau semblait à peine croyable à la mère, mais puisqu’elle était vivante, elle se résolut à se conformer à l’incroyable pour la sauver. Elle dénicha une bassine dans le fond d’une armoire et la remplit d’eau. Elle la monta dans la chambre de sa fille et revint chercher la chouette et le sac de lin. L’oiseau consentit à se poser sur son épaule. Elle remonta l’escalier et toutes deux disparurent dans la chambre. Dans la cour, les badauds commentaient avec excitation les événements. Roméo Lebeau, averti du retour de Ti‐Jean, arriva en trombe. Il voulut pénétrer dans la maison, mais Conrad Cayouette se posta devant la porte pour lui interdire le passage. Les minutes passèrent, la foule commença à s’impatienter. Enfin, la porte de chambre s’ouvrit. Une mère radieuse descendit l’escalier avec sa fille enveloppée dans une couverture de laine. La nouvelle se répandit aussi vite qu’un feu d’herbe. On s’empressa autour des deux femmes, on leur posa mille questions. Elles n’avaient pas assez de bouches pour répondre à toutes en même temps. — Un miracle! s’écria Donatienne, j’ai assisté à un miracle! Quand j’ai plongé la chouette dans le lait de pierre, il en est sorti un hibou blanc qui s’est envolé par la fenêtre. Juliette était étendue sur son lit, nue et grelottante. Roméo put enfin s’approcher et serrer sa fiancée dans ses bras. L’attroupement poussa des hourras. Certains criaient : — C’est pour quand le mariage? Roméo saisit la perche. — Veux‐tu encore de moi, demanda‐t‐il à Juliette. — Tu pourrais attendre que je sois plus présentable. — Je suis trop impatient, j’ai eu si peur de te perdre à jamais. — Je veux bien t’épouser, mais à la lumière des derniers événements, je pose deux conditions. — Je les accepte d’avance. — Attends au moins que je les formule. Tu pourras alors me donner une réponse réfléchie. — Pose tes conditions que je me hâte de les accepter. — D’abord tu vas me faire le serment solennel de ne plus te moquer des sentiments d’autrui. Un sentiment est toujours vrai, seule sa cause peut amener celui qui l’éprouve à se méprendre. — Et ensuite? — Tu t’es rendu coupable d’une faute impardonnable envers les chouettes. Tu leur dois réparation. — Ce que je leur ai fait me tourment jour et nuit, mais j’ignore comment me racheter. — Construis un refuge sur les battures où tu accueilleras, sans distinctions, les oiseaux blessés et malades jusqu’à leur complet rétablissement. Estime‐toi chanceux. C’est peu cher payé pour tout le mal que tu leur as fait. Maintenant, si tu acceptes ces deux conditions, je suis prête à t’épouser. Sache, cependant, que tu vas trouver en moi une épouse qui veillera scrupuleusement à ce que tu remplisses ta promesse. Je le dis devant tous pour éviter que tu ailles te plaindre, plus tard, de ma détermination en me faisant passer pour une femme acariâtre. — Je me rends à toutes tes conditions. Et je te demande en mariage en toute connaissance de cause. Le grand massacre des chouettes De la collection : Contes du Pays de la Ouananiche IQ RÉDACTION Rédacteur officiel : Bertrand BERGERON INTERACTION QUI LTÉE