03.

Transcription

03.
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
Le dossier
Endométriose
Diagnostic et prise en charge actuelle
de l’endométriose modérée
Résumé : L'endométriose est une pathologie fréquemment rencontrée en gynécologie. Elle génère un grand
nombre de symptômes. La principale classification utilisée pour l’endométriose est celle de l’American
Fertility Society révisée (R-AFS), qui repose sur l’évaluation peropératoire des lésions. L’endométriose modérée
correspond au stade II, soit un score AFS allant de 6 à 15.
Actuellement, la suspicion clinique et paraclinique d’endométriose modérée, en l’absence d’infertilité, peut
être traitée de façon médicale dans un premier temps. Ce n’est qu’en cas d’échec du traitement médical et/ou
de l’association à une infertilité qu’une chirurgie par voie cœlioscopique pourra être proposée.
L'
➞C. FREY, A. BRICOU,
C. PONCELET
Service de Gynécologie-Obstétrique,
Hôpital Jean Verdier, BONDY.
endométriose est une
pathologie fréquemment
rencontrée en gynécologie. Elle génère un grand nombre de
symptômes. Elle se caractérise sur le
plan histologique par la présence ectopique de tissu endométrial (l’épithélium et/ou le stroma). L’extension de
la maladie est variable d’une patiente
à l’autre. Il peut s’agir de lésions peu
étendues n’entraînant aucune modification anatomique, de kyste ovarien de
taille variable, de lésions florides étendues à l’origine de syndrome adhérentiel de sévérité variable, ou de zones
de fibrose entraînant un remaniement
anatomique pelvien important.
Quatre grandes entités lésionnelles
sont individualisées : les lésions
superficielles, les adhérences, les
endométriomes ovariens et les lésions
profondes. Très souvent, il existe une
association à des degrés variables entre
ces types de lésions. D'un point de vue
épidémiologique, la prévalence de
l’endométriose est probablement sousestimée. Elle varie entre 5 et 15 % des
femmes en âge de procréer [1]. Cette
prévalence est variable en fonction de
la symptomatologie (25 % en cas d'al-
gies pelviennes, 20 % en cas d'infertilité, 4 % en cas de patientes asymptomatiques) [2] et de l’âge. La pathologie
endométriosique abdomino-pelvienne
est souvent multifocale et peut concerner divers organes : péritoine, ovaire,
paroi vaginale postérieure, ligaments
utéro-sacrés, intestin, vessie, uretère,
creux inguinal, nerf sciatique, foie,
diaphragme…
La principale classification utilisée pour l’endométriose est celle de
l’American Fertility Society révisée
(R- AFS). Définie en 1985 et révisée en
1996, elle est basée sur l’observation
en peropératoire des implants d’endométriose au niveau du péritoine et/
ou des ovaires. Le stade de l’atteinte
endométriosique est fonction de son
étendue et de sa profondeur. Les adhérences sont également intégrées à ce
score qui tient compte de leur densité
(tableau I). Le stade I correspond à un
score AFS allant de 1 à 5. Le stade II
correspond à un score AFS allant de
6 à 15. Le stade III correspond à un
score allant de 16 à 40. Et le stade IV
correspond à un score supérieur à 40.
L’endométriose modérée correspond
au stade II.
1
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
Le dossier
Endométriose
Lésions péritonéales
Superficielles
Profondes
1
2
4
2
4
6
Superficielles
Profondes
Ovaire droit
< 1 cm
1 à 3 cm
> 3 cm
1
2
4
4
16
20
Ovaire gauche
< 1 cm
1 à 3 cm
> 3 cm
1
2
4
4
16
20
Adhérences
Vélamenteuses
Denses
Ovaire droit
< 1/3
1/3 à 2/3
> 2/3
1
2
4
4
8
16
Ovaire gauche
< 1/3
1/3 à 2/3
> 2/3
1
2
4
4
8
16
Trompe droite
< 1/3
1/3 à 2/3
> 2/3
1
2
4
4*
8*
16
Trompe gauche
< 1/3
1/3 à 2/3
> 2/3
1
2
4
4*
8*
16
Partielle
Totale
4
40
Minime
Modérée
Moyenne
Sévère
1-5
6-15
16-40
> 41
< 1 cm
1 à 3 cm
> 3 cm
Lésions ovariennes
Oblitération du Douglas
Stade I Stade II
Stade III
Stade IV
* Si le pavillon de la trompe est complètement immobilisé (adhérent sur toute la circonférence), compter 16
Tableau I : Le score AFSR de l'endométriose (score de l'American Fertility Society, révisé en 1985).
[
ymptômes en rapport avec
S
une endométriose modérée
Le plus souvent, l’endométriose modérée est peu invalidante. La corrélation
entre la sévérité de l’atteinte endométriosique et la sévérité des symptômes
reste débattue, qu’il s’agisse des douleurs pelviennes chroniques [3, 4] ou
de l’infertilité [3, 5]. Il est fréquent de
détecter des lésions superficielles de
manière fortuite lors d’une intervention sans aucune symptomatologie
2
associée. De même, chez un nombre
non négligeable de patientes, l’exploration paraclinique et chirurgicale
ne permet pas de mettre en évidence
de lésions endométriosiques alors
qu’elles présentent une symptomatologie très évocatrice.
En 2008, sur 423 patientes présentant
une endométriose de stade I-II évaluée
chirurgicalement, Sinaii et al. rapportent rétrospectivement la fréquence
suivante des symptômes ayant mené
au diagnostic : 78 % de dysménorrhées, 71 % d’algies pelviennes chroniques, 51 % de dyspareunie, 21 %
d’infertilité et 7 % de masses ovariennes [6]. Les douleurs pelviennes
peuvent être scindées en cinq sousgroupes : les algies pelviennes chroniques, les dysménorrhées, les dyspareunies profondes, les douleurs à la
défécation et les dysuries.
Le caractère cyclique de la douleur est
un argument en faveur d’une atteinte
endométriosique. La douleur reste un
critère subjectif propre à chacun. Il est
difficile d’établir une relation entre
le degré d’atteinte et l’intensité de la
douleur.
La présence de dysménorrhée sévère
(EVA ≥ 8) serait en faveur d’une
endométriose [7]. Les dysménorrhées
seraient corrélées à l’importance des
adhérences et à la profondeur de l’atteinte endométriosique [8].
L’infertilité ne constitue pas en soi un
symptôme spécifique d’endométriose.
Son association à d’autres symptômes
déjà énumérés doit attirer le praticien
sur le rôle potentiel d’une endométriose.
L’association d’une infertilité à une dysménorrhée majeure doit faire évoquer le
diagnostic d’endométriose [7].
[ Place de l’imagerie
Dans le cadre de l’endométriose
modérée, le bilan d’imagerie peut être
strictement normal et n’élimine pas
le diagnostic. Il est rare qu’à ce stade
de la maladie, il existe une atteinte
profonde ou de volumineux endométriomes. Les deux principaux examens prescrits de prime abord chez
les patientes présentant des signes
évocateurs d’endométriose modérée
sont l’échographie pelvienne (par
voie sus-pubienne et endovaginale) et
l’IRM pelvienne. Ces deux examens
sont peu performants pour mettre en
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
évidence des implants péritonéaux ou
des syndromes adhérentiels. Le plus
souvent, seuls des signes indirects
peuvent être retrouvés (rétroversion
utérine, fixités des différentes structures anatomiques entre elles). Ce
bilan a principalement pour but de
déterminer l’extension de la maladie
en mettant en évidence des localisations plus profondes ou plus volumineuses qui feraient suspecter un stade
AFS plus élevé.
L’échographie pelvienne sus-pubienne
et endovaginale constitue l’examen
de première intention. Lorsqu’elle est
réalisée par un personnel entraîné,
elle permet un premier bilan lésionnel précis au niveau pelvien, tant au
niveau de l'étage antérieur que postérieur. Le balayage échographique
permet d’étudier les principales structures où siègent préférentiellement les
lésions endométriosiques (ligaments
utéro-sacrés, torus uterinum, cul-desac vaginal postérieur, paroi antérieure du recto-sigmoïde, vessie et
ovaires). Il s’agit de l’examen de choix
pour caractériser les endométriomes
ovariens. L'imagerie par résonance
magnétique (IRM) qui est l’autre examen de choix permet l'obtention d'un
bilan pelvien complet et de détecter
d’éventuelles lésions profondes.
Il existe une étude comparant la
classification R-AFS réalisée peropératoire à une stadification basée sur
les mêmes critères en IRM (implants,
endométriomes) [9]. Dans cette étude
regroupant 44 patientes, il ressort une
sensibilité de détection des endométriomes de 100 % et de 77 % pour la
détection des implants péritonéaux.
Il existe une concordance entre les
stades AFS peropératoire et celui de
l’IRM dans 94,4 % des cas. Mais la
majorité des stades AFS dans cette
étude étaient stade III et IV. La limite
reste la détection des implants péritonéaux de petite taille ainsi que des
adhérences. Cette technique d’ima-
gerie ne semble donc pas pouvoir se
substituer à la cœlioscopie exploratrice dans le diagnostic d’endométriose modérée.
L’hystérosalpingographie tient une
place à part. Elle peut être demandée
dans le cadre de l’infertilité. Il existe
pour cet examen un certain nombre de
signes radiologiques faisant évoquer
le diagnostic. Ils ont été décrits par
l'école française [10] ; parmi eux, les
plus caractéristiques sont :
– les images d'angulation de l'isthme
en baïonnette ; son trajet est presque
horizontal tandis que le col et le corps
lui sont perpendiculaires, malgré une
traction sur le col,
– la rétention ampullaire du produit
de contraste liée à des adhérences
annexielles ou à un fonctionnement
tubaire perturbé [11],
– le refoulement de la trompe par une
masse ovarienne est un signe moins
spécifique isolément, mais la présence
d'accolement de l'ovaire à la paroi
empêche le liquide de contraste de passer sous l'ovaire dont seuls les contours
supérieurs sont bien dessinés.
L'hystérographie n'est pas une investigation à réaliser pour le diagnostic
d'endométriose. Si cet examen a été
pratiqué, par exemple dans le cadre
d'un bilan d’infertilité, les clichés
devront être soigneusement étudiés à
la recherche de signes indirects caractéristiques surtout si le contexte clinique est lui-même évocateur.
lutivité entre ces trois types lésionnels. Les lésions rouges seraient le
stade précoce de la maladie et évolueraient vers les lésions noires, tandis
que les lésions blanchâtres seraient
le stade cicatriciel des lésions. Un
certain nombre d’arguments laissent
présager que certaines lésions pro-
Fig. 1 : Lésions rouges.
© Photo Dr C. Frey/Pr C. Poncelet.
Fig. 2 : Lésions noires.
© Photo Dr C. Frey/Pr C. Poncelet.
[ Prise en charge thérapeutique
1. Conduite à tenir devant la
découverte laparoscopique d’une
endométriose stade II
On distingue trois types macroscopiques de lésions superficielles : des
lésions rouges (fig. 1), des lésions
noires (fig. 2 et 3) et des lésions
blanches. Il pourrait exister une évo-
Fig. 3 : Lésions noires.
© Photo Dr C. Frey/Pr C. Poncelet.
3
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
Le dossier
Endométriose
fondes résulteraient de l’évolution de
lésions initialement superficielles. En
revanche, l’évolution spontanée vers
l’aggravation de la maladie endométriosique n’est pas certaine. Certains
ont même constaté une régression des
lésions sans aucun traitement [12].
Actuellement, nous ne pouvons pas
déterminer l’évolution des lésions
superficielles chez les patientes
atteintes d’endométriose modérée. Il
paraît légitime de proposer une destruction des lésions superficielles qui
sont, dans la plupart du temps, peu
étendues dans les stades II lorsque
celles-ci sont mises en évidence
au cours d’un geste chirurgical. De
même, un lysis le plus complet permettant la restitution de l’anatomie
pelvienne normale doit être tenté.
2. Principes du traitement
Comme nous l’avons vu, le diagnostic d’endométriose modérée est
obtenu par l’inspection chirurgicale.
Actuellement, la suspicion clinique et
paraclinique d’endométriose modérée
ne doit pas conduire systématiquement à une prise en charge chirurgicale. Il s’agit d’une pathologie fonctionnelle. L’évaluation de l’intensité
de la symptomatologie (douleur et
désir de grossesse) et du retentissement psychosocial est primordial
pour définir la stratégie thérapeutique. Il n’y a pas lieu actuellement de
traiter les patientes asymptomatiques.
3. Prise en charge des douleurs
pelviennes
La prise en charge des différents symptômes douloureux chez les patientes
présentant une endométriose modérée est initialement médicale.
l
Traitement médical
Les différentes molécules disponibles
en première intention sont les suivantes : les anti-inflammatoires non
4
stéroïdiens, la contraception estroprogestative et les progestatifs chez
les femmes n’ayant pas de désir de
grossesse.
Bien que l’étude de Cochrane
Database en 2009 [13] n’ait pas montré d’efficacité des anti-inflammatoires non-stéroïdiens (naproxène)
dans les douleurs pelviennes en rapport avec une atteinte endométriosique (24 patientes), il est néanmoins
possible, en cas de douleurs cycliques
menstruelles en dehors d’un besoin
de contraception, de proposer dès le
début de la période douloureuse un
anti-inflammatoire non-stéroïdien
ayant l’autorisation de mise sur le
marché (AMM) (tableau II).
Dans les autres situations de douleur
pelvienne, on proposera un progestatif
à dose antigonadotrope (tableau III)
ou une contraception estroprogestative [14]. La contraception estroprogestative n’a fait l’objet que d’une
comparaison avec la prise d’un analogue de la GnRh pendant 6 mois, qui ne
retrouvait pas de différence en termes
d’efficacité concernant les douleurs
pelviennes (hors dysménorrhées) et
les dyspareunies [15]. Les progestatifs en continu semblent être efficaces
dans le traitement des douleurs endométriosiques [16]. Ces traitements
doivent faire l’objet d’une administration continue, car une interruption du
traitement entraîne une récidive des
symptômes. L’efficacité sera réévaluée
au bout de 3 mois.
Les androgènes antigonadotropes
comme le danazol ne sont plus recommandés par l’Afssaps du fait de leurs
effets secondaires. En cas d’échec, un
analogue de la GnRH peut être intro-
Acide méfénamique
Ponstyl
Jusqu’à 1 500 mg par jour
Acide tiaprofénique
Flanid, Surgam
Jusqu’à 600 mg par jour
Diclofénac
Voltarène, Xénid
Jusqu’à 100 mg par jour
Flurbiprofène
Antadys, Cébutid
Jusqu’à 300 mg par jour
Ibuprofène
Antarène, Brufen, Intralgis, Nurofen
Jusqu’à 1 600 mg par jour
Kétoprofène
Toprec
Jusqu’à 75 mg par jour
Naproxène
Apranax, Naprosyne
Jusqu’à 1 100 mg par jour
Tableau II : AINS ayant l’AMM dans l’endométriose (dysménorrhée) (d’après Afssaps [14]).
Acétate de chlormadinone
Lutéran 5 mg
10 mg par jour en traitement continu
Acétate de médroxyprogestérone
Dépo-Prodasone
150 à 250 mg par mois
Dydrogestérone
Duphaston 10 mg
3 0 mg par jour en traitement continu
ou du 5e au 25 e jour du cycle
Médrogestone
Colprone 5 mg
5 à 15 mg par jour en traitement continu
ou du 5e au 25 e jour du cycle
Tableau III : Progestatifs à dose antigonadotrope ayant l’AMM dans l’endométriose (d’après Afssaps [14]).
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
Leuproréline
Enantone LP 3,75 mg
Enantone LP 11,25 mg
Nafaréline
Synarel 0,2 mg
Triptoréline
Décapeptyl LP 3 mg
Décapeptyl LP 11,25 mg
1 injection SC ou IM tous les mois
1 injection SC ou IM tous les 3 mois
l
1 injection IM tous les mois
1 injection IM tous les 3 mois
Dans l’endométriose modérée, le traitement chirurgical est généralement
effectué lors de la cœlioscopie réalisée
dans le cadre du bilan d’infertilité.
duit. Ces molécules induisent une
profonde hypo-estrogénie et ont des
effets secondaires importants, ce qui
limite leur durée d’administration. Ils
ont comme avantage principal leur
rapidité d’action. Ils sont efficaces
dans le traitement des douleurs [17],
mais non dénués d’effets secondaires.
Ils ne sont pas recommandés par
l’Afssaps en première intention dans
le traitement des douleurs associées à
une endométriose modérée.
Trois agonistes de la GnRH sont
actuellement disponibles en France
en clinique humaine dans l'indication : “Endométriose à localisation
génitale et extragénitale (du stade I au
stade IV) de la classification R-AFS”
(tableau IV). Le traitement ne peut
être prolongé au-delà de 6 mois (1 an
pour la leuproréline) en raison de la
perte osseuse induite. Une hormonothérapie estroprogestative de substitution (add-back therapy) peut être associée selon les modalités de l’AMM,
à partir du 3e mois de traitement. A
la fin du traitement par agonistes de
la GnRH, un relais par progestatifs à
doses antigonadotropes peut être proposé. Il n’est pas recommandé d’entreprendre chez la même patiente une
seconde cure, même à distance, par
agoniste de la GnRH.
Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical doit être
proposé en cas d’échec du traitement médical. La méta-analyse de la
Cochrane en 2009 [18] a inclus cinq
Traitement chirurgical
400 µg, soit 2 pulvérisations nasales par jour
Tableau IV : Agonistes de la LHRH ayant l’AMM dans l’endométriose modérée (d’après Afssaps [14]).
l
naître une autre cause associée d’infertilité.
études randomisées contrôlées : quatre
ont comparé la cœlioscopie opératoire
(avec différentes méthodes utilisées :
coagulation ou exérèse des lésions
endométriosiques) à la cœlioscopie
diagnostique ; une étude a comparé la
cœlioscopie opératoire avec coagulation des lésions endométriosiques à la
cœlioscopie diagnostique avec traitement médical.
Le résultat de cette analyse montre un
bénéfice de la cœlioscopie opératoire
par rapport à la cœlioscopie diagnostique seule dans le traitement des douleurs liées à l’endométriose. La supériorité d’une technique chirurgicale
par rapport à une autre n’a pas pu être
montrée. Il paraît donc légitime de
proposer chez les patientes infertiles
dans le cadre de l’AMP une cœlioscopie diagnostique et thérapeutique
chez les patientes présentant une
suspicion d’endométriose modérée,
ce d’autant que les autres facteurs de
risque d’infertilité ne sont pas retrouvés (réserve ovarienne satisfaisante,
absence d’anomalies spermatiques).
4. Prise en charge de l’infertilité
Le rôle de l’endométriose dans l’infertilité est reconnu, mais ne semble
pas forcément corrélé à son étendue
et à sa localisation. La prise en charge
doit intégrer les éventuels symptômes
associés qui peuvent être au premier
plan (algies pelviennes). Par ailleurs,
il s’agit d’une prise en charge globale
du couple. Le bilan d’infertilité doit
être exhaustif pour ne pas mécon-
Il existe une étude réalisée par la
Cochrane Database de 2002 [19].
Elle rapporte deux études randomisées comparant l’effet du traitement
chirurgical sur l’infertilité associée à
une endométriose de stade I-II.
>>> La première est celle de Marcoux
en 1997, regroupant 341 patientes
avec un stade AFS I ou II. Il retrouvait
un effet bénéfique de la chirurgie sur
l’infertilité [20]. Le taux de grossesse
à 36 semaines était significativement
plus important chez les patientes traitées par rapport aux patientes non
traitées (30 % versus 17 %).
>>> Une autre étude publiée en 1999,
regroupant 101 patientes stades I et II,
retrouve une absence d’effet bénéfique
de la chirurgie sur l’infertilité [21].
Au vu de ces données, les auteurs de
Cochrane Database recommandent
la réalisation d’un traitement des
lésions observées lors de la cœlioscopie quand il existe une infertilité associée car on observe une augmentation
significative des taux de grossesse
cumulés et de naissance d’enfants
vivants. La technique chirurgicale à
employer reste discutée (vaporisation
des lésions au laser CO2 ou exérèse). Si
on pense que le traitement chirurgical
n’a pas été complet, on peut éventuellement proposer un traitement médical en postopératoire pendant 3 mois.
l
Traitement médical
Il existe une place pour le traitement
médical chez des patientes infertiles
5
réalités en gynécologie-obstétrique # 150_Décembre 2010
Le dossier
Endométriose
endométriosiques nécessitant une
assistance médicale à la procréation
(AMP) après la chirurgie. Ce sujet
a déjà fait l’objet d’un article dans
Réalités en Gynécologie-Obstétrique
et nous n’allons donc pas détailler
dans cet exposé la place de l’insémination, de la FIV ou de l’ICSI [22].
[ Conclusion
Les douleurs pelviennes de l’endométriose modérée doivent être traitées
médicalement en première intention.
En l’absence d’efficacité, le traitement
chirurgical par cœlioscopie avec
destruction ou l’exérèse des lésions
retrouvées est le traitement de choix.
Dans le cadre des algies pelviennes,
ce traitement chirurgical doit être
proposé après un bilan d’imagerie
exhaustif orienté par la symptomatologie et l’examen clinique. Le rôle
de l’endométriose modérée dans l’infertilité existe, mais ses mécanismes
physiopathologiques demeurent
incomplètement résolus. Une prise
en charge en assistance médicale à la
procréation peut être nécessaire.
Bibliographie
01. Matarese G et al. Pathogenesis of endometriosis : natural immunity dysfunction
or autoimmune disease ? Trends Mol Med,
2003 ; 9 : 223-228.
02. Eskenazi B, Warner ML. Epidemiology of
endometriosis. Obstet Gynecol Clin North
Am, 1997 ; 24 : 235-258.
6
03. Hassa H, Tanir HM, Uray M. Symptom
distribution among infertile and fertile
endometriosis cases with different stages
and localisations. Eur J Obstet Gynecol
Reprod Biol, 2005 ; 119 : 82-86.
04. Hurd WW. Criteria that indicate endometriosis is the cause of chronic pelvic pain.
Obstet Gynecol, 1998 ; 92 : 1 029-1 032.
05. V entolini G, H orowitz GM, L ong R.
Endometriosis in adolescence : a longterm follow-up fecundability assessment.
Reprod Biol Endocrinol, 2005 ; 3 : 14.
06. S inaii N, P lumb K, C otton L et al.
Differences in characteristics among 1,000
women with endometriosis based on
extent of disease. Fertil Steril, 2008 ; 89 :
538-545.
07. Panel P, Renouvel F. Management of endometriosis : clinical and biological assessment. J Gynecol Obstet Biol Reprod, 2007 ;
36 : 119-128.
08. Fauconnier A, Chapron C. Endometriosis
and pelvic pain : epidemiological evidence
of the relationship and implications. Hum
Reprod Update, 2005 ; 11 : 595-606.
09. Zanardi R, Del Frate C, Zuiani C, Bazzocchi
M. Staging of pelvic endometriosis based
on MRI findings versus laparoscopic
classification according to the American
Fertility Society. Abdom Imaging, 2003 ;
28 : 733-742.
10. Musset R, Neter A, Poitout Ph, Riou J.
Précis d'hystérosalpingographie. Ed. Les
Presses de l'Université (1977), Laval,
Canada.
11. Querleu D, Crepin G, Bouteville C et al.
Aspects hystéro­s alpingographiques de
l'endométriose ovarienne. J Gynecol
Obstet Biol Reprod, 1989 ; 18 : 303 -310.
12. Harrison RF, Barry-Kinsella C. Efficacy of
medroxyprogesterone treatment in infertile women with endometriosis : a prospective, randomized, placebo-controlled
study. Fertil Steril, 2000 ; 74 : 24-30.
13. Allen C, Hopewell S, Prentice A, Gregory
D. Nonsteroidal anti-inflammatory drugs
for pain in women with endometriosis.
Cochrane Database Syst Rev, 2009 ; 2 :
CD004753.
14. Affsaps. Les traitements médicamenteux
de l’endométriose : recommandations.
Décembre 2005.
15. Davis L, Kennedy SS, Moore J, Prentice A.
Modern combined oral contraceptives
for pain associated with endometriosis.
Cochrane Database Syst Rev, 2007 ; 3 :
CD001019.
16. Prentice A, Deary AJ, Bland E. Progestagens
and anti-progestagens for pain associated
with endometriosis. Cochrane Database
Syst Rev, 2000 ; 2 : CD002122.
17. Prentice A, Deary AJ, Goldbeck-Wood S
et al. Gonadotrophin-releasing hormone
analogues for pain associated with endometriosis. Cochrane Database Syst Rev,
2000 ; 2 : CD000346.
18. Jacobson TZ, Duffy JM, Barlow D et al.
Laparoscopic surgery for pelvic pain
associated with endometriosis. Cochrane
Database Syst Rev, 2009 ; 4 : CD001300.
19. Jacobson TZ, Duffy JM, Barlow D et al.
Laparoscopic surgery for subfertility
associated with endometriosis. Cochrane
Database Syst Rev, 2010 ; 1 : CD001398.
20. M arcoux S, M aheux R, B erube S.
Laparoscopic surgery in infertile women
with minimal or mild endometriosis. Canadian Collaborative Group on
Endometriosis. N Engl J Med, 1997 ; 337 :
217-222.
21. Parazzini F. Ablation of lesions or no
treatment in minimal-mild endometriosis
in infertile women : a randomized trial.
Gruppo Italiano per lo Studio dell'Endometriosi. Hum Reprod, 1999 ; 14 :
1 332-1 334.
22. Ayel JP. Endométriose et PMA. Réalités
en Gynécologie Obstétrique, 2009 ; 140 :
21-27.
L'auteur a déclaré ne pas avoir de conflit
d'intérêt concernant les données publiées
dans cet article.

Documents pareils

Endométriose et fertilité version médecin

Endométriose et fertilité version médecin Le traitement médical n'a pas de rôle dans le traitement de la stérilité associé à l'endométriose, quelque soit le stade de la maladie. Cette notion est clairement établie au vu d'études comparant ...

Plus en détail

Contribution de l`imagerie au diagnostic de l`endométriose pelvienne

Contribution de l`imagerie au diagnostic de l`endométriose pelvienne Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, 4 rue de la Chine, 75020, Paris L’endométriose est une affection fréquente, touchant 10 % des femmes en période d’activité génitale. Elle est définie par la...

Plus en détail