NOTE SUR LE TRAVAIL DES ENFANTS
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NOTE SUR LE TRAVAIL DES ENFANTS
NOTE SUR LE TRAVAIL DES ENFANTS Le travail des enfants est un problème préoccupant à double titre : d’abord, en raison du nombre des enfants concernés qui demeure très élevé, ensuite et surtout en raison des conséquences négatives que le travail prématuré a sur le développement personnel de l’enfant et sur le développement économique et social du pays. Le travail des enfants doit être aboli. Les normes internationales du travail reflètent toutes ces positions. Mais cette élimination ne peut intervenir du jour au lendemain parce que le travail des enfants constitue un des nombreux aspects de la pauvreté et du sous-développement. Il est donc indispensable de fixer des priorités, l’objectif devant être dans un premier temps pour les politiques nationales de réduire les cas les plus urgents, c’est à dire ceux qui font entrer en jeu des activités particulièrement dangereuses ou dégradantes. Au Mali, le phénomène du travail des enfants n’est point marginal, Beaucoup d’enfants commencent à travailler dans notre pays avant l’âge de 14 ans. Fort de ce constat, le Gouvernement esquisse aujourd’hui ce qui sera les bases d’une politique cohérente de lutte contre le travail des enfants. Ce programme d’éradication viendra en appoint aux autres dispositifs de protection des enfants déjà existants notamment le «Plan d’action national pour la survie, le développement et la protection de l’enfant». I. AMPLEUR DU TRAVAIL DES ENFANTS ET SECTEURS D’ACTIVITES Le nombre des enfants qui travaillent demeure extrêmement élevé, dans le monde entier 73 millions d’enfants de 10 à 14 ans exercent actuellement une activité économique. Dans les pays en voie de développement, il y a au moins 120 millions d’enfants de 5 à 14 ans astreints au travail. En ce qui concerne le Mali, il n’existe pas d’informations statistiques fiables sur la question, celles-ci sont disparates et très fragmentaires. Les enfants sont occupés de façon très inégale dans les différents secteurs économiques. 1 1 - ) Le secteur rural : il renferme le plus grand nombre d’enfants travailleurs. Cela n’est point étonnant si l’on sait que la population nationale est rurale à 85% et que plus de 80% des enfants vivent dans les zone rurales. Selon les données d’un rapport d’enquête de la Direction Nationale de la Statistique et de l’Informatique (1989) sur le secteur informel il existe un nombre très élevé d’enfants de moins de 15 ans travaillant dans les zones rurales. Ils seraient de 423.372 dont 131 293 fillettes. 21 056 enfants de moins de 15 ans exercent des activités secondaires (travaux effectués pendant l’inter-saison). Il est établi également que la majorité des enfants en age d’aller à l’école sont en milieu rural. Dans le secteur, la main d’œuvre enfantine est constituée à 95% d’aides familiaux non rémunérés. 2 - ) Le secteur urbain Là encore les informations sont très insuffisantes. Néanmoins, une étude sur les enfants dans les rues de Sabalibougou, un quartier des zones défavorisées de Bamako révèle que sur un effectif total de 4 807 enfants observés : 48,98% s’adonnaient au petit commerce et activités similaires ; 41,31% sont des apprentis ; 5,78% constitué d’aides familiaux. La même étude a révélé que 4 787 enfants soit 99,5% de l’effectif participaient activement à l’amélioration du revenu de leur famille. L’enquête de la DNSI déjà citée donne pour sa part d’autres chiffres indicatifs. Sur un effectif de 11 148 enfants travailleurs observés : 2 991 dont 775 fillettes ont entre 8 et 9 ans ; 8 157 dont 1 161 filles sont âgées de 10 à 14 ans. 3 – Le secteur formel : Officiellement, il n’existe pas d’enfants travailleurs dans le secteur formel (Administrations, grandes entreprises industrielles, commerciales…). Cependant, l’«Enquête nationale sur les activités économiques des ménages» de la DNSI a dénombré 125 enfants de sexe féminin âgés de 8 à 9 ans travaillant dans le secteur urbain structuré. Ils sont le plus souvent utilisés dans les opérations de tri dans certaines unités industrielles (usines de cubes de bouillon) mais en fait viennent en aide à leurs parents salariés. Ils sont astreints à un rythme de travail très élevé, le salaire étant fixé à la tache ou aux pièces. 2 La même enquête a révélé que 689 garçons âgés de 10 à 14 ans et 2 657 filles de la même tranche d’âge sont également employés dans le même secteur. Dans le secteur rural structuré, on ne rencontre pas d’enfants travailleurs âgés de moins de 10 ans. Par contre, 648 garçons et 352 filles de tranche d’age de 10 à 14 ans ont été comptés. Ils sont utilisés à la conduite des bœufs de labour, au sarclage et parfois au labour. 4 - ) Le secteur informel : Une grande majorité d’enfants travailleurs se rencontre dans ce secteur. Dans le secteur rural informel, les enfants s’adonnent principalement à l’apprentissage des arts et des métiers (forge, cordonnerie, tissage etc…). Dans le secteur urbain informel, les enfants se retrouvent en priorité dans le secteur du petit commerce et les activités de service (cireurs, gardiens de voiture, servantes, vendeurs d’eau, trieurs d’ordures…). A coté de cette catégorie d’enfants au travail, il y a aussi celles des apprentis (menuisier, mécanicien, teinturier…) très nombreux mais sur laquelle il n’existe aucune statistique précise. 5 - ) Répartition sur branche d’activités : Les enfants de moins de 15 ans travaillent pratiquement dans toutes les branches d’activités (agriculture, industries manufacturières, commerce, transports…). Il n’existe pas de statistiques à l’échelon national. Selon une étude faite cependant sur un échantillon de 9 051 enfants, on relève que 40,7% se trouve dans les secteurs de l’agriculture-élevage-pêche ; 11,6% dans la métallurgie ; 6,6% dans le commerce ; 10,6% dans les services. Il est à noter qu’une forte proportion des enfants salariés remettent la totalité de leur rémunération à leurs parents ou aux autres membres de la famille avec lesquels ils vivent. II. LES CAUSES DU TRAVAIL 1 - ) Les causes économiques : La pauvreté est la cause première du travail des enfants. Dans bien des cas, le travail des enfants est considéré comme essentiel pour l’économie du ménage, qu’il s’agisse d’un emploi salarié ou d’une contribution aux travaux de l’entreprise familiale. A ce niveau, la taille de la famille a une incidence déterminante sur le travail des enfants. Plus une famille nombreuse, plus les enfants travaillent et plus les taux de fréquentation et de réussite scolaires baissent. Le travail des enfants est aussi la conséquence de la pauvreté. Ainsi, les stratégies visant à la réduction et à l’élimination de la pauvreté doivent prendre en considération cet aspect du problème. 3 L’utilisation du travail des enfants ralentit la croissance sociale et le développement économique. Il constitue une violation des droit fondamentaux de l’homme. Les rapports entre le travail des enfants et les conditions sociales dans lesquelles se trouvent l’enfant doit donc être au centre de toute politique de développement social durable. 2 - ) Les facteurs socio-culturels Le travail a été longtemps perçu comme un mode de socialisation des enfants ; c’est à dire «un processus qui initié graduellement l’enfant au travail et lui transmet des compétences lui permettant de vivre». On admet généralement que l’enfant doit apprendre à s’adapter aux situations de son environnement et à trouver des solutions aux problèmes que celui-ci lui pose. La bénédiction et la considération qu’il a de ses parents et de la société dépendent en outre en grande partie de sa contribution aux charges familiales. Dès lors, le travail devient un devoir pour lui. Par ailleurs, l’éducation, en particulier l’éducation de base qui constitue l’un des principaux instruments de prévention et d’élimination du travail des enfants est toujours assez mal perçue dans certains milieux. L’école y demeure un lieu de perdition pour les enfants. Ce précieux outil de prévention et d’élimination du travail des enfants est ainsi mis en échec à cause de considération subjectives. 3 - ) Autres facteurs favorisants Dans la plupart des pays, les enfants sont particulièrement sollicités parce qu’ils coûtent moins chers et créent moins de problèmes que les travailleurs adultes. III. LES CONDITIONS DE TRAVAIL DES ENFANTS Dans le travail des enfants, le nombre et la proportion des enfants concernés ne sont pas les seuls paramètres à considérer. Les types de travaux confiés aux enfants, les conditions dans lesquelles ils sont effectués et les risques et abus auxquels les enfants sont exposés en cours d’emploi sont également importants pour la compréhension du phénomène. La majorité des enfants qui exercent une activité lucrative sont astreints à des horaires abusifs et nombreux sont ceux qui travaillent 6 ou 7 jours par semaine y compris les jours fériés, en particulier dans les zones rurales. Il n’existe pas de données sur cet aspect des choses mais les principaux risques liés au travail des enfants sont les suivants. 1 - ) L’âge de mise au travail Dans beaucoup de pays, y compris le Mali, de nombreux enfants sont mis au travail très jeunes, en particulier dans les zones rurales où il n’est pas rare de les voir utilisés dès l’age de 7 à 8 ans, au moment où leurs camarades d’âge reçoivent instruction et éducation dans les écoles. L’emploi d’enfants très jeunes est un problème inquiétant. En effet, plus jeune est l’enfant, plus il est vulnérable aux risques professionnels sur le lieu de travail. 4 2 - ) La durée du travail Le travail constitue très souvent pour les enfants une activité permanente difficilement compatible avec la poursuite des études dans des conditions satisfaisantes. Ces enfants sont en effet confrontés à la nécessité impérieuse de gagner chaque jour de quoi vivre ou survivre. Ils sont astreints à des durées excessives de travail et à cet égard l’exemple le plus évocateur est celui des «bonnes» qui, levées à 6 heures du matin ne retrouvent le plus souvent leur lit qu’après 22 heures pour un salaire dérisoire. 3 - ) Les risques physiques Beaucoup d’enfants qui travaillent sont exposés à des risques physiques. Les petits trieurs d’ordures dans les décharges publiques de Bamako par exemple sont exposés à des risques d’infection graves telles que le tétanos, les maladies de la peau et autres maladies provoquées par le manque total d’hygiène. L’agriculture est considérée comme l’un des secteurs les plus dangereux : horaires abusifs, aléas du climat, outils tranchants, agressions extérieures (insectes, serpents…). La modernisation de l’agriculture est source de risques supplémentaires avec l’utilisation de plus en plus répandue de produits chimiques toxiques. 4 - ) Les risques psycho–sociaux On les retrouve plus généralement au niveau des filles domestiques qui travaillent durement, privées de toute affection et presque de tout contact avec leurs familles. Elles sont fréquemment victimes des mauvais traitements physiques et psychologiques et d’abus sexuels. A ceux-là, s’ajoute souvent la prostitution, facteur d’aggravation chez les enfants des risques liés aux MST. IV. LE DISPOSITIF LEGISLATIF EXISTANT 1 - ) La législation internationale La Convention n° 5 sur l’âge minimum (1919) est le premier instrument adopté par l’OIT sur le travail des enfants. Elle interdit le travail des enfants de moins de 14 ans dans les établissements industriels. Par la suite, l’OIT a adopté 9 autres conventions sectorielles sur l’âge minimum d’admission à l’emploi. Cependant, les instruments les plus récents et les plus complets sur le travail des enfants sont la Convention n° 138 sur l’âge minimum, 1973 et la Recommandation n° 146. La Convention n° 138 : Elle fait obligation aux Etats qui la ratifient de fixer un âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail et de s’engager à pour suivre une politique nationale visant à assurer l’abolition effective du travail des enfants et à élever progressivement cet âge minimum à un niveau permettant aux adolescents d’atteindre le plus complet développement physique et mental. Le principe de base est que l’âge minimum ne devrait pas être inférieur à celui auquel cesse la scolarité obligatoire. La Convention indique que pour le cas des pays en développement, cet âge minimum peut être de 14 ans dans un premier temps. 5 L’âge minimum ne devra pas être inférieur à 18 ans ou à 16 ans dans certaines conditions pour les types d’emplois qui sont susceptibles de compromettre la sécurité, la santé ou la moralité des enfants. Les personnes âgées de 13 à 15 ans qui n’ont pas encore terminé leur scolarité obligatoire peuvent être autorisées à exécuter des travaux légers de certains types à certaines conditions. La Convention ne s’applique pas au travail effectué dans les établissements d’enseignement général, technique ou professionnel, ni le travail effectué dans les entreprises dans le cadre d’un enseignement, d’un apprentissage ou d’une formation. La Recommandation n° 146 : Complétant la Convention n° 138, elle propose le cadre d’action et les mesures essentielles à mettre en œuvre pour prévenir et éliminer le travail des enfants : Adoption de mesures destinées à assurer le plein emploi ; Adoption de mesures économiques et sociales pour réduire la pauvreté ; Création et développement progressif des services appropriés chargés de veiller à la protection et au bien être des enfants et des adolescents ; Contrôle strict par les services appropriés des conditions de travail et d’emploi des enfants et des adolescents etc. 2 - ) La législation malienne Le Mali n’a pas ratifié la Convention n° 138 mais la législation nationale est à bien des égards très proche des prescriptions internationales. Les textes de référence en la matière sont la Loi n° 92-020 du 23 septembre 1992 portant Code du Travail et le Décret n° 96 – 178 P- RM du 13 juin 1996 fixant les modalités d’application de diverses dispositions du Code du Travail. Les articles L 187 du Code du Travail et les dispositions des articles D 189-14, D 189-15 et D 189-21 du Décret n° 96-178 traitent expressément de la question. Il ressort de ces différents articles ce qui suit : les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise, même comme apprentis avant l’age de 14 ans, sauf dérogation écrite accordée par le Ministre chargé du travail dans les établissements de quelque nature qu’ils soient y compris les entreprises familiales, il est interdit d’employer les enfants âgés de moins de 18 ans à des travaux excédant leur force présentant des causes de danger ou qui, par leur nature et par les conditions dans lesquelles ils sont effectués sont susceptibles de blesser leur moralité. C’est le lieu cependant de relever que le Code du Travail protège principalement l’enfance au travail mais ne donne indication précise concernant l’élimination progressive du travail des enfants. Une autre faiblesse de la législation est qu’elle est sans emprise réelle sur le secteur informel qui recèle pourtant le plus grand nombre d’enfants travailleurs, mettant en échec à certains niveaux le système de protection mis en place. 6 LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL DES ENFANTS : ELEMENTS D’UNE STRATEGIE NATIONALE Comme indiqué plus haut, tous les programmes d’action initiés aussi bien par le Gouvernement que par les organisations non gouvernementales visent plus la protection de l’enfant en général que la lutte contre le travail des enfants. L’idée d’élaborer une stratégie nationale de lutte contre le travail des enfants est toute récente au Mali. Elle remonte au séminaire organisé par l’Organisation de l’Unité Africaine a Arusha (Tanzanie) du 31 mars au 03 avril 1997 que notre pays a eu l’honneur de présider par l’entremise du Ministre de l’Emploi, de la Fonction Publique et du Travail. Le projet sera conforté après la tenue des consultations régionales sur le travail des enfants à Pretoria (1 – 3 septembre 1997) et celle de la Conférence Internationale d’Oslo sur le même sujet (13 – 17 octobre 1997). Du 05 au 07 février 1998, s’est tenue à Kampala (Ouganda) une réunion tripartite africaine sur le travail des enfants en vue de dégager une position commune africaine devant servir de contribution du continent à la 86 ème session de la Conférence Internationale du Travail de juin 1998. Les contacts noués par le Département avec le Bureau International du Travail ont permis d’esquisser les éléments d’un projet de coopération entre notre pays et le Programme International pour l’Elimination du Travail des Enfants de l’OIT (IPEC). L’IPEC est un programme de coopération technique mis en place en 1992 par le BIT et qui vise à aider les pays membres de l’OIT à se doter des moyens nécessaires pour s’attaquer de façon durable au problème du travail des enfants. Il favorise en outre l’instauration d’un véritable partenariat entre les services gouvernementaux, les organisations d’employeurs, les syndicats, les ONG et les autres acteurs concernés par ce problème. Les activités de l’IPEC s’adressent en premier lieu à trois groupes prioritaires. Les enfants astreints à un travail forcé ou en situation de servitude ; Les enfants soumis à des conditions de travail dangereux ; Les très jeunes enfants travailleurs (moins de 12 ans). Dans le cadre de sa coopération avec le Mali, l’IPEC a déjà financé une étude sur le travail des enfants. Dirigée par un consultant national, cette étude avait pour but de faire l’inventaire de la situation de l’enfance au travail en vue de dégager les solutions propres à l’éliminer à terme. Le résultat de l’enquête ont servi de trame au séminaire national sur le travail des enfants tenu à Bamako du 13 au 17 octobre 1997 avec la collaboration du BIT. Ce séminaire qui a regroupé une quarantaine de participants avait pour objectif de faire l’état des lieux avec tous les acteurs concernés et de proposer les éléments d’une politique de 7 lutte sinon contre le travail des enfants, du moins contre ses formes les plus intolérables (esclavages, prostitution, travaux dangereux…). Le séminaire a dégagé quatre (4) groupes cibles et des actions prioritaires devant être menées en leur direction à court et moyen terme. Il s’agit des enfants ruraux, des enfants travaillant dans les mines, des enfants apprentis de et des petites filles travaillant en milieu urbain. Les actions à court terme (6 mois) - Procéder par une équipe multidisciplinaire à une étude plus approfondie des conditions de travail des enfants dans les quatre groupes cibles ; - Identifier tous les acteurs et partenaires intervenant sur la question du travail des enfants en vue de la création d’un cadre de concertation et de la mise en place d’une structure de coordination ; - Analyser la législation nationale existante sur le travail des enfants en vue d’une amélioration des conditions d’emploi et de travail ; - Réaliser un module de sensibilisation sur les risques liés aux formes les plus intolérables du travail des enfants en direction des employeurs, des parents et des enfants ; - Réaliser un module de formation sur l’amélioration des conditions de travail des enfants. Les actions à moyen terme (2 ans) - Informer et sensibiliser les parents et les enfants sur les aspects les plus intolérables du travail des enfants ; - Trouver des solutions appropriées aux difficultés d’accès des enfants aux structures d’enseignement notamment de base et aux soins de santé ; Le séminaire à en outre dégager des actions spécifiques pour chaque groupe cible : Les résolutions ainsi adoptées seront traduites en plan d’action national dans le cadre d’un programme qui fera l’objet d’un accord entre le gouvernement et le Programme International pour l’Elimination du Travail des Enfants. Ce plan va proposer des alternatives adéquates au travail des enfants et s’appuyer sur des stratégies créatrices d’emplois durables et de revenus pour les plus pauvres. Son élaboration et sa mise en œuvre nécessitera cependant la création d’un mécanisme institutionnel qui aura pour rôle de définir les priorités et de coordonner les activités des différents intervenants. Ce mécanisme comprendrait les ministères concernés par la question, les organisations d’employeurs et de travailleurs, les ONG et les autorités locales. 8 En attendant les actions spécifiques ci-après peuvent être menées. Améliorer la législation nationale et son application Le code du travail exclut de son champ d’application les activités dans lesquelles son trouve le plus d’enfants (exploitations agricoles familiales, petits ateliers, services domestiques…). La protection assurée par la loi se limite en effet aux zones urbaines et au secteur structuré. Les Inspecteurs du travail chargé de faire respecter la législation sur le travail des enfants ne sont toujours pas habilités à se présenter au domicile des particuliers ou dans les entreprises familiales. Le propos n’est pas d’essayer d’étendre systématiquement le système d’inspection au secteur informel mais améliorer l’efficacité de son action de prévention en y associant les associations venant en aide aux enfants et à leur famille. Ces organisations disposent d’atouts réels pour concevoir de programmes de protection visant les enfants : elles sont plus proches des enfants que les services d’inspection et jouissent très généralement de la confiance des communautés. Il est aujourd’hui important que les inspections du travail établissent et maintiennent avec ces associations des relations dynamiques de collaboration aussi bien dans les échanges d’information que dans le contrôle sur les lieux de travail des conditions de travail. Un autre moyen d’assurer une meilleure application de la législation existante est de doter les services d’inspection de moyens humains et matériels suffisants. Les inspecteurs du travail sont si peu nombreux qu’ils ne peuvent visiter toutes les entreprises du secteur structuré à plus forte raison celles du secteur informel, des petits ateliers. Par ailleurs, les moyens logistiques font cruellement défaut. Or, il est important que l’Inspecteur du travail prenne le plus souvent possible l’initiative d’aller sur le terrain au lieu d’attendre d’hypothétiques plaintes des enfants. Autrement, elle s’interdit toute intervention efficace pour la protection des enfants. La visite des lieux de travail est la base de son action, la condition dans laquelle il n y a pas d’inspection du travail. Il faut en outre donner aux inspecteurs du travail chargés du travail des enfants un solide formation technique pourqu’ils soient capables d’observer les situations de travail, d’évaluer les risques et de faire des choix. La volonté politique de donner à l’inspection du travail les moyens d’exercer ses missions de protection des travailleurs devrait être un des éléments majeurs d’une politique nationale cohérente et concertée tendant à l’élimination du travail des enfants. En amélioration l’efficacité de ses interventions habituelles au bénéfice des travailleurs, elle agira indirectement sur certaines causes du travail des enfants telles que l’insuffisance du revenu des parents ou l’absence de protection sociale. 9 Mener une vigoureuse campagne d’information et de sensibilisation de l’opinion publique sur le travail des enfants et ses conséquences afin de susciter une large alliance sociale autour de ce phénomène Au Mali comme dans d’autre pays en voie de développement, le travail des enfants est généralement considéré comme une conséquence inéluctable de la pauvreté. Les pesanteurs socio-culturelles qui contribuent à banaliser ce phénomène pourtant très grave ont été déjà évoquées. Il faut donc absolument dans un premier temps faire prendre conscience à toute la communauté de l’ampleur et de la gravité du travail des enfants : (autorités administratives, employeurs, syndicats, communautés locales, parents, enfants…). Cette sensibilisation pourrait se faire par voie de presse écrite et de radio. A cet égard, l’émission de la Radio Nationale intitulée « le monde du travail » peut être utilisé pour lancer régulièrement les différents messages. Des débats et des conférences peuvent être également organisés. Cependant, pour que ces débats puissent porter réellement il est indispensable qu’ils aient un bon support d’informations fiables sur la question. Ce qui nous ramène à la nécessité de disposer d’un bon système de collecte de données. CONCLUSION Le travail des enfants est un problème qui interpelle la conscience collective. Quelque soit le niveau de notre développement économique notre société ne doit pas continuer à poser des actes qui empêchent la jeunesse d’accéder à son plus complet développement physique et mental. A défaut d’éliminer dans un avenir proche le travail des enfants, toutes les actions doivent tendre aujourd’hui au moins à lutter contre ses formes les plus dégradantes. L’avenir mérite du pays est à ce prix. 10