Supply Chain Magazine 74 - Forum de printemps Pièces de rechange

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Supply Chain Magazine 74 - Forum de printemps Pièces de rechange
FORUM DE PRINTEMPS
©C.POLGE
Plus d’une centaine de personnes ont participé le 25 avril dernier au
premier Forum de Printemps sur le thème de la Supply Chain des
pièces de rechanges, organisé par Supply Chain Magazine en partenariat avec L’Université Paris-Dauphine, A-Sis, Oracle et Viastore. Une
matinée de conférences émaillée de conseils pratiques et de retours
d’expériences enrichissants, notamment en matière de déménagements dans de nouveaux entrepôts plus performants et concentrant
une activité préalablement plus dispersée.
Pièces de rechange
Régis Bourbonnais,
Directeur du Master
Logistique
de l’Université
Paris Dauphine
Ça déménage !
’est dans les locaux méconnus et pourtant très accueillants du Pôle Léonard de
Vinci de l’Université Paris
Dauphine à La Défense que
s’est tenu le 25 avril 2013 le premier
Forum de Printemps consacré à la SC
des pièces de rechange (PR). Après un
mot d’introduction de Jean-Philippe
Guillaume, Directeur des Rédactions de
Supply Chain Magazine, Régis Bourbonnais, Directeur du Master Logistique de l’Université Paris Dauphine, a
exposé les méthodes propres à réduire
les risques d’erreur de prévisions et à
optimiser les niveaux de stocks dans le
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monde de la pièce de rechange. « La
problématique particulière aux PR est
que leur consommation est erratique,
sporadique, car ce sont souvent des
articles à faible rotation, a-t-il commencé. Et la technique classique du
lissage exponentiel selon laquelle le
passé récent pèse plus que le passé
lointain est inadaptée à ce type de
consommation. En fait, dans la PR,
quand on n’a pas de consommation,
c’est plutôt le signe qu’il va y en avoir
une et inversement. Et le modèle de
Croston, qui s’appuie sur la fréquence
de consommation (période) et la quantité consommée (grappe) est le plus
Vers une concentration
des stocks de PR
Ainsi, pour lui, la PR se caractérise par
le fait de « mobiliser beaucoup de cash,
de surface et de main d’œuvre pour les
réparations ». Et de lister sept autres
spécificités : le rôle important du réparateur (ex : coordination des pièces et
des interventions), le nombre de réfé-
Un esprit commando
Jean-Louis Monein, ex-Directeur de la
SC de Feu Vert et depuis peu consultant,
a rejoint François Rochet pour décrire le
projet de concentration de ses flux sur
une nouvelle plate-forme de 30.000 m2
à Saint Vulbas, mené conjointement et
tambour battant avec Agenoria. Spécialiste de l’équipement et de l’entretien
automobile, Feu Vert compte près de
400 centres auto en Europe, dont plus
de 300 en France. Un premier programme a été mené en 2006-2007 pour
optimiser la SC aval, i.e. en lien avec les
points de ventes. Ont été revus la
construction et le pilotage des assortiments (permanents, saisonniers, promotions…) afin d’harmoniser les processus
ainsi que le pilotage des stocks et des
réapprovisionnements des centres auto.
« Peu d’actions avaient été menées sur
la plate-forme en amont », commente
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Un domaine très vaste
Après cette introduction orientée mathématiques statistiques, François Rochet,
Président du cabinet de conseil Agenoria a pris la parole pour évoquer les spécificités de la Supply Chain des PR.
« Pendant longtemps, la SC des PR a été
le parent pauvre tandis que les entreprises se concentraient sur leur chiffre
d’affaires. A présent, c’est devenu un
choix stratégique et les activités PR
prennent leurs lettres de noblesse avec
des organisations dans laquelle sont
faits de plus en plus d’investissements,
pour des questions d’image, mais aussi
de marge », observe-t-il. Et de poursuivre : La PR est un domaine très vaste
car on la trouve dans les secteurs Automobile, IT/Telecom, Electroménager,
Chauffage/Climatisation, Aéronautique,
Médical et Industrie/Logistique. » Pour
lui, ce n’est pas tant le prix de la pièce
qui est important que la capacité à la
mettre à disposition au bon endroit et
au bon moment, parfois pour éviter de
fortes pénalités. Et de citer un exemple
vécu lorsqu’il était Responsable de la SC
de Magneti Marelli. « Renault a affrété à
l’époque un hélicoptère pour une pièce à
20 FF afin d’éviter un arrêt de ligne.
Pour la petite histoire, j’ai préféré réserver un taxi en arguant qu’il serait plus
rapide, et comme il est arrivé le premier,
je n’ai pas payé l’hélico ! »
rences élevé et croissant, des cycles de
vie très long (ex : obligation d’avoir des
PR plusieurs dizaines d’années après
l’arrêt de fabrication du dernier modèle
de véhicule), des besoins erratiques sur
les lieux de consommation finaux, des
commandes en général urgentes (ex :
Aircraft On Ground), des commandes
comportant très peu de lignes et un coût
de mise à disposition transport très
important. Et d’en déduire : « Optimiser
les PR, c’est travailler sur la réduction
des stocks, mais aussi sur celle des surfaces (sachant qu’elles pèsent entre 15
et 20 % dans l’exploitation d’une logistique et sur la main d’œuvre ». Il
remarque par ailleurs que compte tenu
de l’amélioration du transport, « la centralisation du stock devient un facteur
important d’augmentation de la performance économique en réduisant le
BFR [ndlr : Besoin en Fonds de Roulement] et les ruptures, tout en favorisant
la montée en compétence des équipes
logistiques (plus de perspectives d’évolution). » En matière de préparation
de commande de PR, il conseille de bien
analyser son portefeuille de commandes. « Il doit devenir le cahier des
charges de votre organisation ! »,
assène-t-il. Il suggère aussi d’isoler les
commandes mono-lignes pour les préparer rapidement et de faire de la préparation multi-commandes, avec un
niveau de regroupement optimisé.
François Rochet, Président du cabinet
de conseil Agenoria
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adapté. » De même, pour calculer le
stock de sécurité, il prévient que la formule classique s’appuyant sur la Loi
Normale est inadéquate. « La loi des
événements rares est plutôt la Loi de
Poisson. Mais on a mieux encore avec
la Loi Gamma qui se comporte comme
une Loi Normale quand la consommation est normale et comme une Loi de
Poisson quand la consommation est
faible. En quelque sorte, elle est « tout
terrain », résume avec pédagogie Régis
Bourbonnais.
Jean-Louis Monein, ex-Directeur de la SC de
Feu Vert et depuis peu consultant à son compte
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Eric Chaintron, Responsable Projets Logistique
chez NTN-SNR Roulements
Gilles Charpille, Ingénieur Commercial d’A-Sis
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De gauche à droite :
Jean-Philippe Guillaume (SCMag),
Jean-David Attal (Viastore France),
Eric Chaintron (NTN-SNR),
Gilles Charpille (A-Sis)
et Lionel Albert (Oracle)
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Jean-Louis Monein. D’où un second
projet avec la création en 2008 d’une
plate-forme pour massifier les achats et
permettre aux centres de commander de
petites quantités sans franco, sachant
que des flux directs fournisseurs subsistent. Feu Vert connaissant une forte
croissance, trois ans plus tard, il ne
compte pas moins de quatre platesformes en Rhône Alpes et Région Parisienne et loue 18.000 m2 de surface à
l’extérieur. Et si les entrepôts sont géographiquement séparés, informatiquement, Feu Vert Plate-Forme représente
un seul fournisseur. « Le système ne
donnait pas satisfaction, certaines
palettes figurant sur le même BL n’arrivaient pas toujours en même temps. Il
était temps de passer à autre chose ! »,
reconnaît l’ex Directeur SC. Sans oublier
de fortes ambitions de croissance (400
PDV visés en France en 2015/2016,
quintuplement du nombre de pneus
traités entre 2011 et 2013, intégration de
l’activité e-commerce…) et une volonté
de garder la maîtrise des flux, du BFR
et des coûts de transports (le tiers du
coût logistique dans une telle organisation). Décision est prise en mai 2011 de
centraliser l’activité sur un seul entrepôt
opérationnel pour janvier 2012 (soit sept
mois pour agir !), de vendre l’ancien,
d’intégrer l’activité e-commerce en mai
2012 et d’organiser la centralisation des
approvisionnements pour les succursales. « Nous avions besoin d’aller droit
au but et vite. Il fallait un esprit commando que j’ai trouvé chez François
Rochet », justifie Jean-Louis Monein.
14.000 palettes transférées
en 69 heures
Agenoria s’est chargé du schéma directeur (budget, planning, R.O.I.), de définir les nouveaux processus et la
nouvelle implantation, de gérer les
appels d’offre (équipement, WMS) et le
projet, d’organiser et piloter le déménagement ainsi que de transmettre ses
compétences en matière d’e-commerce.
« Il nous a bien fallu cinq à sept itérations avec les équipes pour aboutir au
plan d’implantation du nouvel entrepôt
», admet François Rochet, qui insiste
également sur l’importance de bien
préparer le déménagement et de suivre
son déroulement heure par heure.
« Nous avons transféré 14.000 palettes
(7.000 références) en 69 heures sans
impact sur la livraison aux magasins »,
reprend Jean-Louis Monein. Feu Vert a
ainsi gagné 20 % de productivité sans
dégrader la qualité de préparation
(taux erreur < 1/1.100 lignes) ni le taux
de service (> 97 %). La distance parcourue par les préparateurs a diminué
d’un tiers (8 km vs 12 km), grâce
notamment à l’instauration du picking
dynamique qui réduit les surfaces et à
l’aménagement de zones spécifiques
fortes charges. D’autres projets sont
également en cours comme l’augmentation des directs sur le transport, la
centralisation des approvisionnements
des succursales, l’élaboration d’un
nouveau plan directeur S.I. (gestion
commerciale, WMS…), l’utilisation
d’AGV ou encore l’éclairage de l’entrepôt (70 % d’économie à la clef !).
Reprendre la maîtrise du S.I.
Eric Chaintron, Responsable Projets
Logistique chez NTN-SNR Roulements,
accompagné de Gilles Charpille, Ingénieur Commercial d’A-Sis, a expliqué
ensuite comment il a choisi et mis en
place le WMS LM de l’éditeur sur son
Centre de Distribution Européen de
18.000 m2… également à Saint Vulbas !
La Société Nouvelle de Roulements,
rachetée an 2007 par le groupe japonais NTN, emploie 4.000 personnes
dans le monde dont les trois quarts en
France. Elle s’adresse a trois marchés
principaux : l’automobile, l’industrie et
l’aéronautique. Elle compte 11 usines
en Europe et sept centres logistiques
(dont un à Casablanca). En 2001, elle a
décidé de concentrer son activité sur
un entrepôt de 18.000 m2 dans la
région lyonnaise. Cet European Distribution Center (EDC), confié à un prestataire logistique, gère 20.000 références actives dans 60.000 emplacements. Il prépare 5.000 à 6.000 lignes
par jour et expédie 90.000 à 120.000
pièces par jour (soit 60 à 80 t). Tous les
centres livreurs (Aéronautique, Industrie & Automobile OEM, ainsi que le
centre de packaging et de confections
de kits) étaient gérés sous SAP, l’EDC
l’étant avec le WMS du prestataire
logistique. « Nous avons voulu changer
de WMS sur l’EDC pour reprendre la
maîtrise du S.I., et ainsi gagner en performance et en évolutivité, résume Eric
Chaintron, qui estime que le prestataire
logistique ne doit pas être dans une
position inamovible. » Il recherchait
notamment à améliorer le rangement
des produits (par type, famille, classe
de rotation…), à faciliter la saisie des
données logistiques et à se doter d’une
gestion dynamique des allocations
par format de contenants de stockage,
d’inventaires tournants par radiofréquence et temps réel pendant la préparation, d’un pré-colisage tenant compte
de contraintes clients, d’un ordonnancement des préparation et des réapprovisionnements (avec des règles de
priorité), d’une gestion de pickings flottants et des charges/ressources.
Des opérateurs
qui ont « la banane »
Constatant que SAP ne pouvait répondre à ces besoins qu’au prix de développements spécifiques longs et coûteux, NTN-SNR envisage de trouver
un WMS sur le marché. Et c’est LM
d’A-Sis « spécialiste de la distribution/
rechange et répondant dans sa version
la plus standard possible aux fonction-
nalités attendues » qui est retenu. Le
projet est lancé en mai 2011 pour un
démarrage en février 2012. « Le démarrage en février 2012 s’est très bien passé
et les nouvelles fonctionnalités ont très
vite donné des résultats. Mais le meilleur indicateur pour moi, c’est que les
opérateurs « avaient la banane » ! », s’est
réjouit Eric Chaintron. En termes de
projets, NTN-SNR prévoit d’agrandir
son centre packaging et kit à Cran
Gevrier (12.000 m2, en cours de construction) et de le doter de LM avec le
module slotting pour gérer l’activité
rechange auto (coupée de l’activité
Industrie). Le démarrage de ce nouvel
entrepôt est prévu pour novembre de
cette année.
Une table ronde à laquelle ont participé Jean-David Attal, DG de Viastore
France, Eric Chaintron, Gilles Charpille
et Lionel Albert, Value Chain Planning
Business Development Director chez
Oracle, animée par Jean-Philippe Guillaume a clos la matinée. ■
CATHY POLGE
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