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Van Andrea Bakana : l’allégorique destin de l’eau 21 ans, vit et travaille à Brazzaville Description de l’œuvre Au-delà du rêve est une toile de taille quasi humaine qui présente une figure en dessous de laquelle se glisse, dans un fond grisâtre et jauni, la vue en filigrane d’une ville dans la pénombre. La partie supérieure montre un faciès sillonné de plusieurs fissures d’eau. Et la partie inférieure, une scène de nuit sous la forme d’une goute, accolée à un bout de la figure de dessus, où pause un personnage isolé. Regard critique L’œuvre de Van Andrea traduit en général le cri d’une jeunesse aux prises avec un système social – indolent - qui l’enrôle. Au-delà du rêve semble opérer du même principe ; elle exprime, avec une certaine poésie, la rudesse qu’engendre dans les mentalités congolaises, le phénomène du va-et-vient de l’eau potable. Il créée dans cette substance visiblement humaine, des coupures caractéristiques de la disparité du précieux liquide sous les toits congolais. Ces coupures d’eau dont la fréquence suscite justement frayeur, aigreur et difformité. Au-delà du rêve Encre de chine, café, acrylique, fusain, pastel 100 x 190 cm L’artiste joue des expressions pour construire un univers pictural entre fable et caricature. Son trait évoque la BD, univers dans lequel, il a baigné, adolescent. Van Andrea part de la perception de la flaque d’eau, cette petite digue naturelle dont on a très peu souvent conscience, surtout dans la nuit, mais au travers de laquelle, tout un monde peut s’observer (grâce au jeu du reflet), pour explorer de manière graphique l’allégorie d’une société immergée dans une goutte d’insouciance. Une goutte de trop. Landry Mbassi Doctrovée Bansimba : frontière-blessure 28 ans, vit et travaille à Brazzaville Mozindo Stylo, acrylique, gravure et verres sur contre-plaqué 150 x 95 cm Description de l’œuvre Mozindo, son tableau, de format horizontal, dépeint une agglomération riveraine. Réalisée du point de vue de quelqu’un placé sur la rive opposée, l’œuvre saisit un moment où aucun habitant ni aucun moyen de locomotion – embarcations, véhicules – ne sont perceptibles. On devine néanmoins les façades des habitations et une végétation luxuriante, qui déchirent un ciel menaçant. Une vaste étendue d’eau, la moitié du tableau, est faite de réverbérations d’une ville déshumanisée, qu’elle a traduit par des tessons de vitres et de bouteilles d’épaisseurs et de couleurs différentes. Regard critique L’acte créatif chez Doctrovée est un crédo. Elle explore la profondeur - « mozindo » en lingala - de son sujet jusqu’à en extraire la quintessence. Son œuvre pose la problématique des frontières. Comment deux peuples, parfois à peine séparés par un cours d’eau, ne peuvent pas fraterniser ? Identité, émigrés, immigrants, sans papiers, l’Autre, l’Étranger, ne sont pas des concepts fédérateurs. Une blessure béante, sanguinolente ; qui assure aussi la médiation entre les cultures de làbas, invite à l’altérité. Pour parvenir à ses fins elle n’hésite pas à recourir aussi bien au pinceau, au couteau qu’au stylo à bille. Le processus créatif repose ainsi sur la mixité de techniques : acrylique et collage. Doctrovée élabore un travail patient et méticuleux. La concentration est de tous les instants. L’artiste sort du chantier battu des peintres de Poto-Poto, dont les récurrents paysages lacustres commencent à agacer. Du fleuve au goutte à goutte Verres, bidons, robinets, tuyau , fils de fer 78 x 130 x 200 cm Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo La sueur de Juvhy Boudzoumou Boukaka 22 ans, vit et travaille à Brazzaville Dans le grand bain Acrylique, journal 80 x 70 cm Description de l’œuvre Avec Le grand bain Juvhy Boudzoumou a réalisé le portrait enaction, symétrique, d’un athlète au regard droit et figé et au visage marqué par la transpiration. Il présente un crâne éclaboussé par un jet d’eau. Regard critique S’inspirant du verset de la Bible « Tu mangeras à la sueur de ton front », Juvhy Boudzoumou a créé ce personnage en transpiration pour souligner une ambivalence : la sueur comme souffrance lors du travail et la sueur bénéfique. Si Juvhy Boudzoumou se situe hors de la peinture classique qui consiste à peindre des sujets visuels, c’est parce qu’il est chrétien, responsable de soi-même dans ce monde. Pour Juvhy, l’homme est le seul responsable de ses actes. Nul ne peut être pécheur ni responsable à la place de l’autre. Nous sommes alors dans un monde compartimenté dont les règles de vie de chaque individu sont parfois identiques ou parallèles à celles des autres, mais ne se croisent jamais. En choisissant d’incarner ce principe dans un personnage au regard fixe et obstiné, Juvhy peint une œuvre qui dénonce la responsabilité collective, souvent mis en avant. Pour Juvhy ce n’est qu’une lâcheté, une irresponsabilité et un faux refuge. Jean Euloge Samba Essombe Desawa : l’eau divine 33 ans, vit et travaille à Douala (Cameroun) H2O Acrylique sur toile 145 x 125 cm Description de l’œuvre H2O, peint à l’acrylique, montre un énorme nuage pluvieux descendant progressivement du ciel vers la terre en se rétrécissant. Il prend la forme d’un entonnoir géant renversé. Pour Essombe, l’eau naît toujours propre et pure dans toutes ses dimensions. Sur un sol rempli d’eau souillée les personnages recueillent et filtrent l’eau du nuage. Regard critique L’œuvre d’Essombe révèle que l’eau est un don divin. Il veut donner un avertissement tant aux populations qu’aux gouvernants des pays. À Brazzaville comme dans sa ville Douala, l’eau est la première nécessité de la vie comme partout ailleurs, mais ne semble pas être une priorité de l’homme dans la gestion des ressources naturelles. Paradoxe : dans les régions où elle est abondante, elle est plus polluée et souillée. La peinture d’Essombe saisit ce conflit, un contraste tout à fait évident qui devient une opposition qu’il ne laisse pas fermée comme dans la plupart de ses travaux, nous dit-il. Le regard de l’artiste renvoie également à la relation divine verticale de Dieu à sa créature. L’œuvre n’hésite pas aussi à montrer ces personnages qui se prosternent devant une récompense divine : l’eau. Cela apparaît très simplement sur la toile. Jean Euloge Samba Teska Konongo : sans eau, pas de vie 32 ans, vit et travaille à Brazzaville Sans eau, pas de vie sur terre Acrylique sur toile 100 x 100 cm Description de l’œuvre L’importance de l’eau sur l’être vivant, c’est ce que Teska KONONGO couche sur ses toiles avec du bleu comme fond principal. Le thème de l’eau, elle l’extériorise avec une figure à deux représentations de nature distincte, mais ayant une même forme : les seins et le fruit. Elle peint la papaye, en lui donnant une image expressive : trois fruits superposés. Les trois mamelles prenant au même moment l’image des fruits donnent l’occasion de s’écrier : « Ah l’eau c’est la vie ! » Regard critique Son engagement sur la place prépondérante de l’eau se traduit sur la toile par des paysages visionnaires ou s’abattent d’étranges et belliqueuses créatures. A travers une peinture abstraite, contemporaine, Teska présente un produit cher à l’être vivant dans sa diversité. Le sein et la papaye font couler le liquide qui désaltère les nourrissons. Par ailleurs, l’eau prend diverses formes pour garantir la vie humaine, animale et végétale. Pour Teska, aucune espèce ne peut se passer de l’eau. Si ce n’est la pluie qui arrose, c’est l’homme qui va à sa recherche. Plus loin, le pinceau lui permet de créer un être lugubre selon le regard profane, mais très artistique. La représentation incarne les trois espèces vivantes : un visage humain encadré par un arbre, un éléphant et un serpent. Raïtel Yengo Jérémie Kuminuna « Kum’s » : bionique 31 ans, vit et travaille à Brazzaville Description de l’œuvre Le polyptique réalisé par Kum’s intègre toile, vitres et sculptures en papier mâché. Un homme disproportionné, reproduit dans la vue antérieure, écarte membres supérieurs et inférieurs. Un miroir s’intercale entre ses jambes. Il va des fonds noirs aux blancs. Des motifs polychromes parcourent ce corps. À première vue, il fait penser à un écorché ou à un homme tatoué de la tête aux pieds. D’autres motifs peints, circulaires, alternent avec le collage de vraies montres et de mécanismes de réglage de cathéters. Au niveau de la ceinture pelvienne se dresse un robinet blanc d’où s’extrait avec peine une créature aux allures de batracien. On en aperçoit sur des vitres cinq autres déjà extirpées. Regard critique Kum’s met aux prises l’art, la génétique et l’éthique. Sa peinture explore l’éventualité où l’homme pourrait donner la vie sans coït et sans clonage. Elle se sert des arguments proches de la bionique. Le robinet, notamment, remplace le membre viril, l’eau le liquide séminal. Tout le processus reproducteur décrit par l’artiste relève de l’anticipation. On savait que l’homme était une machine complexe. Avec ce polyptique on découvre combien celle-ci peut être plus complexe encore. D’une certaine manière, démonstration est faite que l’homme ne saurait toujours demeurer ce roseau que l’on croyait qu’il fût. Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo H2O = Vie. Système vital Installation, acrylique, colle à résine, papier mâché, miroir 100 x 30, 100 x 30, 100 x 35, 100 x 35, 100 x 50, 100 x 100 cm Shaggy Luamba : peinture en relief 38 ans, artiste congolais de Kinshasa, originaire d’Angola, vit et travaille à Brazzaville L’Os de la nature Pigments traditionnels, marouflage sur toile 120 x 170 cm (17 pièces) Description de l’œuvre Son Os de la nature est un polyptique de 17 panneaux, constituant un tableau de 1m20 sur 1m70. Blocs de glace, neige, goutte, vapeur, l‘eau représentée sous toutes ses formes est L‘Os de la nature. Entendez par là que l‘eau est la force de la nature. Tout naît dans la nature par le concours de l’eau qui symbolise la maternité. Dans son graphisme, l‘artiste fait allusion à l‘appareil génital féminin. Les gouttes d’eau évoquent la semence masculine. Dans le panneau où l’on distingue trois os disproportionnés, on perçoit trois personnages qui représentent la famille. Elle n‘est rien de plus insignifiant au départ qu‘une goutte. L‘artiste représente aussi une sorte d‘escalier, pour dire la crue et la baisse des eaux. Phénomène qui traduit l‘énergie de l‘eau. L‘arc-en-ciel est l‘esprit de l’eau, pour en faire non une force de destruction, mais créatrice de vie. Des pierres ramassées au bord de cours d‘eaux, de la cola, et des racines sont la matière de la pigmentation de cette en peinture en relief. Regard critique La pigmentation donne aux os un aspect moisi. Mais l’artiste ne cite jamais la pollution. Sa technique évoque régulièrement mort et renaissance. Cet Os de la nature est peut-être à l’image du phœnix le pouvoir de naître de ses propres cendres. Job Olivier Ikama Van Cruz Massengo 26 ans, travaille et vit à Brazzaville H2O distribution Acrylique sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre H2O distribution se présente sous forme d’un véhicule de distribution de proximité surmonté d’une citerne d’eau raccordée à une multitude de tuyaux sous forme de tentacules donnant ainsi une image d’un mollusque marin légendaire. Ces tuyaux servent au ravitaillement en eau. Regard critique La ville de Brazzaville est entourée d’eau, mais les populations manquent d’eau potable et utilisent largement d’eau insalubre provoquant ainsi des maladies infectueuses. Van Cruz n’a pas fait par hasard une telle peinture de distribution équitable de l’eau comparable à un animal aquatique. La forme méchante et belliqueuse de l’œuvre met à nu l’attitude et le comportement irresponsables des gouvernants. Van Cruz dénonce, par son œuvre, le mauvais fonctionnement des systèmes politiques mis en place par les gouvernants qui n’arrivent pas, cinquante ans après l’indépendance, à mettre en place des réseaux énergétiques et hydrauliques pour les populations. Des coupures intempestives d’eau et d’électricité dans la plupart des quartiers de Brazzaville sont devenues monnaie courante. L’œuvre de Van Cruz a une connotation péjorative et sévère à l’égard des politiques. Jean Euloge Samba Yvanovitch Mbaya : l’art du spirituel 22 ans, vit et travaille à Brazzaville Énigmes Acrylique sur toile 70 x 150 cm - Tryptique Description de l’œuvre Énigmes présente des êtres étranges gris, noirs et blancs mi-hommes, mi-animaux, chimères isolées sur fond blanc. Une composition de trois toiles qui fonctionneraient comme des cartes à jouer, sur lesquelles apparaissent des figures liées l’une à l’autre par des rhizomes. Regard critique Yvanovitch manifeste depuis quelque temps un penchant pour le traitement métaphorique de ses sujets qu’il scrute au plus profond de l’âme. Comme la Naissance de Vénus de Boticelli (Renaissance), l’œuvre tente d’illustrer les qualités de l’eau de manière plutôt allégorique. Yvanovitch en traduit une vision intérieure et en fait une expérience spirituelle. L’acte artistique se présente alors comme une profession de foi. Toute la spiritualité est rendue ici par des couleurs qui nous plongent dans la tradition africaine où le noir renvoie à la profondeur, à l’inconnu et le blanc aux esprits. Les figures au nombre de six et leurs supports forment un ensemble de neuf éléments, chiffre récurrent dans les figurines d’ancêtres chez les Punu au Sud du Gabon. Ce triptyque s’inspire du style des dessins du dragon légendaire noir sur fond blanc des Chinois. On peut aussi voir dans ces dignités de l’eau les héros de la mythologie antique, tels Naïades, Poséidon ou Mami Wata en Afrique. L’eau devient cet élément puissant où se manifeste le sacré, une incarnation de la relation homme, nature, dieu. Ruth Belinga Dyclo M’Boumba : l’eau, l’avenir de l’homme 33 ans, vit et travaille à Brazzaville Naissance d’une nature Acrylique sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre L’artiste utilise l’acrylique bleu, qu’il dégrade à souhait. Son tableau campe une créature féminine. Décalée vers la gauche, elle baigne dans une eau tourmentée, dans laquelle tenter de se reconstruire est un idéal. Regard critique Avec Naissance d’une Nature, Dyclo M’Boumba plonge dans un univers onirique, presque surréaliste et cubiste. La femme, éthérée et évanescente, vit, quoique démembrée. L’eau se mue en liquide amniotique, pour entretenir cette vie si précieuse. Ses membres, formes géométriques éparses, tentent de se rapprocher, de se reconstruire. On y verrait la Maison à l’Estaque de Braque (1908), où les maisons sont des cubes. On ne peut contempler la peinture de Dyclo sans penser à La naissance de Venus (1485) de Sandro Botticelli. Dans cette peinture du Quattrocento, une jeune femme épanouie surgit des eaux, debout sur un gros coquillage. Entourée à gauche par deux créatures célestes, Zéphyr et sa compagne, et à droite par une femme bien terrestre, elle est drapée de sa seule chevelure. Celle-ci, ainsi que le mouvement de la tête, se retrouvent chez Dyclo, où cheveux et ondulations de la vague se confondent. Sur le plan du discours, l’œuvre devient prétexte pour passer au crible l’épineux problème du réchauffement climatique et du développement durable. L’évocation de la fonte de la banquise est un plaidoyer de Dyclo pour la Planète bleue. L’eau est l’avenir de l’homme. Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo Frangeska M’Bouma 26 ans, vit et travaille à Brazzaville Kintuadi Acrylique sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre Avec Kintuadi (« union » en lari), Frangeska peint l’unité. Elle représente une embouchure où se rencontrent des cours d’eaux aux colorations différentes : on n’est pas tous les mêmes. Des cours d’eaux de tailles moins importantes se déversent – sans le moindre souci de se tarir, dit l’artiste - en un point de chute où ils augmentent en volume et en taille. Il s’y dégage aussi de la profondeur et une sensation de vapeur qui s’élève - allusion aux coups de pinceau de couleurs blanches au point de rencontre des eaux – comme pourrait s’évaporer tout ce qui nous divise. Regard critique « L’union » est le terme qui, pour l’artiste, dit avec la limpidité d’une eau de source ce qu’évoque un réseau hydrographique. Le Congo, illustre fleuve du pays qui porte le même nom, a sans doute inspiré cette œuvre. Le fleuve est témoin car ses eaux sont l’encre avec laquelle s’est écrite l’histoire de son peuple. Le fleuve inspire des rythmes, des musiques et adoucit les mœurs. Le fleuve est force car le Congo est le deuxième fleuve le plus puissant au monde. Le plus petit des Congolais en est fier. Mais Kintuadi partage avec nous un paradoxe : à grand fleuve, petit peuple. C’est que, nous dira peut-être M’Boumba, les fils du fleuve ne parviennent pas – avant d’admirer sa grandeur et sa force – à voir qu’il en appelle d’abord à l’unité. Job Olivier Ikama Les femmes de Diane S. Miangounina 44 ans, vit et travaille à Brazzaville Femmes sapeurs-pompiers Acrylique et café sur toile 110 x 160 cm Description de l’œuvre Femmes Sapeurs Pompiers aborde le sujet de l’intégration et du rôle de la femme dans la société. Par le jeu de la perspective, les pompiers ont pris position depuis le fond du tableau jusqu’à l’avant-plan. Des personnages alignés, mais tous impliqués. Combatives et endurantes, les femmes sapeurs pompiers forment un mur où le feu est pris en étau par de puissants jets d’eau. Regard critique L’artiste signifie que la femme doit apprécier à juste titre son humanité afin de compter pour la société. Le feu représente les conflits qui meurtrissent le monde. Pour Diane, la femme peut mettre à profit sa nature pacificatrice comme force de dissuasion. On pense aux paroles de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient ». Mais qu’est-ce être femme et quelle femme devient-on ? Pour devenir femme faut-il lutter contre des flammes ou en sortir ? Cette question se poserait-elle si la femme ne désespèrait pas de l’homme ? Il est vrai aussi qu’on regarde la femme uniquement selon sa volonté. Job Olivier Ikama Anaëlle Miemoukanda : une œuvre engagée 30 ans, vit et travaille à Brazzaville Horizon 2025 Acrylique sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre Horizon 2025 est une composition en aplat sur fonds de ton ocre : deux mains sont trempées dans un récipient plein d’eau qui se déverse sur le sol. Le récipient est animé par un planisphère. Regard critique Devant le tableau d’Anaëlle, on ne peut s’empêcher de dire : « On n’y voit rien ». Cette formule, titre d’un essai de l’historien d’art Daniel Arasse signifie que souvent nous ne voyons rien de ce que l’œuvre nous montre. Quelquefois la peinture révèle sa puissance sans forcément nous éblouir. Cette œuvre très simple de prime abord est pourtant politiquement engagée. Elle est née de la promesse congolaise selon laquelle l’eau sera potable à l’horizon 2025. Enième promesse dont Anaëlle doute. Le geste absurde qui consiste à se laver les mains à l’intérieur d’un récipient plein d’eau rappelle l’acte irresponsable de Ponce Pilate qui selon les Évangiles a ordonné l’exécution et le crucifiement du Christ. L’eau finalement souillée se répand et inonde le monde. Bienvenue les épidémies ! L’image peu dynamique place le public devant la léthargie qui caractérise les stratégies de développement durable définies par les politiques africaines et mondiales. Le contraste entre le fond chaud et le motif principal aux couleurs plutôt froides, illustre l’opposition entre les promesses (couleurs chaudes) et la triste réalité (couleurs froides). Anaëlle ouvre là une discussion sur les liens entre l’artiste et la pensée humaniste de l’époque. Ruth Belinga Gildas Mimbounou à la chicotte 32 ans, vit et travaille à Brazzaville Les jets d’eau dans les rues Acrylique et écorces de bois sur toile 130 x 190 cm Description de l’œuvre Les jets d’eau dans les rues est une peinture abstraite. Dans cette toile de Gildas, on peut facilement remarquer une fuite de tuyau, les traces des pneus responsables de cette cassure. Ces frappes forment des collés avec le bleu et le marron comme couleurs de choix. Il met en exergue la souffrance d’une eau qui veut servir, mais hélas ! L’outil de prédilection d’un artiste peintre est le pinceau ou le couteau. Gildas lui a pour technique la chicotte. Hé bien cela paraît insolite. Il tient la peinture avec les mains, ensuite la frappe sur sa toile. C’est ainsi qu’il extériorise ses images mentales. Regard critique Le génie de Gildas est d’avoir su donner une dimension hautement humaine à l’eau. Avec le thème de l’eau, l’artiste manifeste le regret qu’a l’eau de ne pas être utilisée à bon escient. Il ne s’agit pas de l’assister en train de gémir, mais de l’aider à s’exprimer. L’artiste ne s’arrête pas à la simple représentation de l’eau, il y met aussi son âme et sa sensibilité dans la retranscription d’une vision. Son originalité vient dans le fait de personnifier l’eau en lui accordant une capacité d’expression. Loin d’être excessivement pessimiste, l’artiste peint aussi la satisfaction végétale, une forêt qui retrouve son feuillage au retour des pluies. Raïtel Yengo Jordy Kissy Moussa, de la récupération intelligente 19 ans, vit et travaille à Brazzaville Vague minérale Dessin et installation 210 x 180 cm Description de l’œuvre Vague minérale est une installation constituée de bouteilles en plastique vides de différentes tailles. L’œuvre, vue de profil, se présente sous la forme d’une courbe composée de ces contenants, qui semblent se jeter dans le pot d’un W.C. Regard critique Œuvre hétéroclite, Vague minérale est inspirée de la pénurie d’eau dans les foyers brazzavillois. L’artiste dit être « scandalisé par le flux de plus en plus en croissant de la consommation d’eau minérale » utilisée en général pour se désaltérer ou résoudre des questions d’usage domestique (à la cuisine essentiellement). Il semble poser la question : à ce rythme accéléré où vont les choses, ne finira-t- on pas par user de la même « eau minéralisée » pour des besoins – ordinaires - comme chasser les selles de nos W.C ? L’artiste cultive une esthétique du cru, de l’instinctif, du désordre, voire du chaos. C’est un esprit en « émulsion instable », qui s’apaise au moyen d’un art au scalpel dans sa peinture, une peinture virulente. Artiste à contre-courant d’une certaine mouvance, il se moque des canons. Engagé. Cet engagement se traduit esthétiquement et éthiquement par un assemblage de bouteilles que l’on pourrait considérer comme des déchets, soigneusement collectées auprès de foyers voisins. Pour dire que l’art contemporain peut à la fois, résoudre deux questions fondamentales : le beau et l’utile. Et au Congo, reconstruit par la DGGT (Direction générale des Grands travaux), cette vision prend tout son sens. Landry Mbassi Artmel Mouyoungui : l’homme au cœur de la pollution 30 ans, vit et travaille à Brazzaville Tâ Mpuingi Acrylique sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre Tâ Mpuingi est le titre de la toile d’Artmel Mouyoungui. Une personne vient boire l’eau mais ne peut l’avaler parce que souillée. L’eau de mauvaise qualité entraîne des maladies. Ce qui est présenté par l’œil borgne. La couleur dominante du tableau est le marron. Regard critique Le travail d’Artmel ne relève pas de l’hyperréalisme édifiant, mais d’un vécu. Il s’inspire des scènes de rue, du quotidien. Il peint une pratique décriée mais ne trouve aucune solution. L’homme est victime de son propre comportement. L’artiste ne montre pas les facteurs de pollution mais porte son regard sur les conséquences de la pollution. Le marron qui est la couleur du deuil, du malheur, en dit plus. Le travail d’Artmel rime avec l’époque du changement climatique et des enjeux de l’art actuel. Raïtel Yengo Christian Mukenge : la route des eaux 25 ans, vit et travaille à Kinshasa Cliché métaphore Acrylique, pastel et encre de chine 250 x 150 cm Description de l’œuvre Cliché métaphore, titre de la toile réalisée par Christian Mukenge, est une peinture abstraite dont la charpente repose sur trois axes. Le premier, au bas du tableau, de ton ocre a pour limite la ligne de couture de sa toile, faite de deux tissus différents. Le deuxième axe recouvre la gauche du tableau. Il est blanc. Le troisième, enfin, de couleur grise, est la zone la plus vaste. Les deux premiers axes servent de points de départ d’une infinité de lignes qui se retrouvent dans le troisième. Des mots écrits accompagnent ces lignes, comme sur des cartes routières ou ferroviaires. Regard critique Christian Mukenge réussit le tour de force de présenter l’eau sans la faire voir. Par un procédé graphique allusif, il se détourne de la mimêsis (imitation) qu’il abolit. L’écrit devient alors substitut de la réalité protéiforme de l’eau, de l’indispensable constitution physique de la terre à celle des organismes vivants, du cycle de la pluie au circuit urbain. L’artiste se sert de sa toile comme d’un prétexte pour « cartographier » le parcours de l’eau dans la nature et la vie humaine. Les lignes vectrices de sa composition, horizontales ou verticales, créent la tension plastique. Il considère l’eau comme « une armature de la nature et en même temps un cliché métaphorique ». Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo Maximilien Samba contre la fatalité 27 ans, vit et travaille à Pointe-Noire (Congo) Mamba ma safukidi Acrylique, pastel, collage sur toile 100 x 80 cm Description de l’œuvre Mamba ma Safukidi (« l’eau sale » en lari, une langue congolaise), présente un robinet sec sous lequel apparaissent deux visages humains tristes. Ils sont inondés par un mélange de couleurs terre et bleue mélangées à des taches rouges et noires. Une page de journal avec pour titre : Environnement. Vendeurs et acheteurs se plaignent de la pollution est collée au milieu de ce tableau réalisé selon la technique de l’aquarelle et au style mi-abstrait mi-figuratif. Regard critique Maximilien pose dans cette composition dynamique un regard sur la pollution de l’eau et les dangers permanents qui guettent les populations dans les grandes villes africaines. Les couleurs marron claires et foncées créent un effet de saleté qui, par écoulement, tombent dans l’eau et la souillent. La bouteille vide et les déchets sur le papier journal nous situent dans un contexte où la globalisation a accéléré le processus de productivité dans les sociétés de consommation au détriment de l’homme et de son environnement. Le titre du journal au milieu de la toile qui semble donner tout son sens à l’œuvre le dit de manière subtile et explicite. Comme le photographe congolais Kiripi Katembo connu pour ses images de rues reflétées par l’eau, Maximilien milite pour un environnement plus sain et dénonce visuellement ce qui apparaît comme fatalité pour les habitants des ces villes. Ruth Belinga Ruth Belinga : une passion partagée 37 ans, vit et travaille à Foumban (Cameroun) Mañ yat. Vidéo. 7’30 Description de l’œuvre Mañ yat s’ouvre sur un gros plan d’un verre translucide à moitié plein. Ce plan revient comme une ponctuation, cédant la surface à des plans plus dynamiques où les pieds de l’artiste, errant sur un sol tantôt sableux, tantôt pierreux, avancent vers une destination inconnue. À la fin, ces pieds se retrouvent dans l’eau, celle d’un fleuve. Au loin, se lèvent des vagues troubles qui dissimulent l’existence d’un paysage à l’horizon. Regard critique Mañ yat, expression bulu (langue du sud du Cameroun) se traduit par « de l’autre côté de la mer ». Ruth part du postulat selon lequel les pays ou les continents, en général, sont disjoints par des grandes étendues d’eau. Son regard sur la question du voyage témoigne de sa vision : l’eau comme un obstacle entre les hommes. Métaphoriquement, l’artiste évoque les notions de frontières et de rêve d’évasion. Frontières comme limites auxquelles l’état physique de l’eau renvoie dans l’espace quand elle se dresse viscéralement devant les rêves d’évasion de l’homme. Cette immense étendue qui oppose au rêve, l’impénétrabilité, l’appréhension. Face à la force évocatrice de cette œuvre, il est difficile de ne pas penser à La pirogue, film du réalisateur sénégalais Moussa Touré, couronné à Cannes 2012, où l’on voit la mer, s’exprimer dans sa férocité la plus redoutable, alors que d’enthousiastes candidats à l’immigration, blottis dans une embarcation de fortune, ne vibrent que d’une seule pensée : parvenir à frôler, et vivants, le sol de l’Occident. Landry Mbassi Vertu Boudimbou : la symbiose 21 ans, vit et travaille à Brazzaville Poto-Poto. Vidéo. 1’30 Description de l’œuvre Vertu Boudimbou s’inspire d’un souvenir d’enfance de son quartier : Poto-Poto, qui signifie « la boue » en langue nationale, le lingala. Symbiose naturelle : une union entre l’eau et la terre, deux des quatre éléments constitutifs du globe, tel est son message principal. En absence de l’eau, la terre devient égoïste. Dans sa vidéo, l’eau n’apparaît pas en tant que telle. La vidéo de Vertu présente juste les traces de passage et les conséquences de son absence d’avec la terre. La présence de l’eau est sous-jacente. Regard critique Elle a passé son enfance dans le quartier Poto-Poto. Comme les rapports qui se renversent avec le peintre Van Gogh, l’œuvre de Vertu Boudimbou revient à un concept capital du macrocosme familial, africain notamment. Elle dénonce la dislocation de la famille qui fut jadis le noyau de la société africaine traditionnelle. La boue, n’étant ni de l’eau, ni la terre, mais un tout, est l’union dans laquelle se dissolvent toute la richesse de la famille africaine, à savoir sa taille élastique, du noyau central à la famille élargie. La vidéo fait état d’autres thèmes intéressants. Elle montre que l’un en absence de l’autre ne serait qu’un fantôme : corps sans esprit. Le travail de Vertu veut éviter également la fausseté dans laquelle la vie moderne se plonge, où les gens sont dispersés. Jean Euloge Samba Richard Goma : l’Homme fumée 43 ans, vit et travaille à Brazzaville Désastre. Vidéo. 3’30 Description de l’œuvre Dans Désastre un homme énigmatique apparaît dans une forêt. Une fumée se dégage de son buste et de ses pieds. Elle se propage dans la nature que montrent les plans suivants. La fumée dessèche tout à son passage. La forêt et l’eau sont les principaux éléments touchés. Regard critique Désastre traite du réchauffement climatique. Déjà Laura Sérani et Michket Krifa, commissaires de la Biennale photographique de Bamako 2011 l’avaient souligné : « Les préoccupations écologiques, jadis limitées à un cercle restreint de visionnaires alertes font désormais partie de notre quotidien et sont au cœur de tous les débats ». L’œuvre de Richard s’y inscrit parfaitement. La rapidité avec laquelle la fumée s’étend d’un espace à l’autre nous met face à un monde globalisant où la vitesse des échanges et de déplacements fracturent l’espace-temps. Les conséquences négatives n’épargnent personne, encore moins la nature et l’eau. L’homme fumée devient l’incarnation même du désastre. Comme le vidéaste Goerges Méliès, Richard crée des truquages. Mais il n’utilise pas d’effets spéciaux. Ce procédé provoque l’illusion dans le regard du spectateur. La vidéo est dans la continuité de la démarche photographique de Richard Goma qui consiste à rechercher l’équilibre environnemental en imposant une cohabitation entre les mondes humain et non humain. Ruth Belinga Francis Kodia : de la peinture en mouvement 39 ans, membre du collectif de photographes Génération Elili, vit et travaille à Brazzaville au Congo Rituel. Vidéo. 4’15 Description de l’œuvre Rituel est le titre de son œuvre. À travers plusieurs plans fixes, Francis présente de manière simple mais poétique, l’usage de l’eau dans les gestes quotidiens. La vidéo s’ouvre sur un plan qui revient de manière répétitive comme un rite. Francis se substitue à sa caméra derrière une grille. Il regarde les mouvements de va-et-vient des pieds reflétés par l’eau d’une flaque qui se présente comme un miroir. L’homme est mis face à sa propre image et ainsi à ses responsabilités vis-à-vis de ce liquide dont dépend toute vie, mais dont il est le principal pollueur. Regard critique Faire de la vidéo comme une peinture, telle est l’ambition de cette œuvre. Les recherches permanentes de Francis en sont d’ailleurs la preuve comme on peut le voir dans l’un de ses travaux photographiques : Ville d’Etatolo : cimetière des épaves (2011), si proche des aquarelles de Turner à Venise. La beauté des images allie forme et sensualité. A la manière du vidéaste américain Bill Viola, Rituel s’écarte de la saisie simple de l’univers environnant. Il va au-delà de la perception en travaillant des mises en scène où la référence à la peinture est manifeste et où s’impose le sujet sur l’eau comme élément vital, mais malheureusement polluée. Cette recherche, on la trouve également dans le traitement des couleurs et des lumières. Ruth Belinga Jaguar Landu Ntoumi : le trône détrôné 28 ans, vit et travaille à Kinshasa (République Démocratique du Congo) Ironie. Vidéo. 2’30 Description de l’œuvre Ironie, la vidéo de Jaguar, montre une espèce de trône libre en mouvement sur une rivière agitée par une sorte de tempête. La rivière ne cesse de produire, par effet d’entraînement, des oscillations continues et des vagues. Le trône ne résiste pas à toutes ces agitations. Il bascule. Il est emporté. Il échoue finalement sur le rivage. L’auteur parle des codes, des choses abstraites, des illustrations qui symbolisent des problèmes socio-politiques et des réalités de la vie quotidienne. Regard critique La vidéo de Jaguar se présente sans effets de montage, en un seul plan-séquence. La rivière s’écoule à perte de vue, à l’image d’une société déboussolée. Les eaux troublantes sont une métaphore des perpétuelles perturbations socio-politiques des états africains. Ironie révèle l’inexistence de l’Etat et du chaos dans la société, sur un registre poétique. Elle cache de nombreux messages de rénonciations, l’improvisation et d’impunité institutionnalisées. Jean Euloge Samba Maurice Milandou face à la catastrophe 50 ans, vit et travaille à Brazzaville La flamme d’une goutte d’eau. Vidéo. 3’50 Description de l’œuvre Des robinets ouverts sans qu’il n’en sorte une seule goutte d’eau. Le canon menaçant d’un char. Une tige d’allumettes enflammée. Des braises ardentes. Des vagues déferlantes du fleuve Congo. La vidéo La flamme d’une goutte d’eau de Maurice Milandou s’ouvre sur ces séquences, brèves et redondantes. Son point culminant coïncide avec le moment où un enfant, après avoir joué au football sous un soleil ardent, désir se désaltérer. Mais, seule une goutte sort du robinet, par intermittence. Se représentant une eau abondante, où flotte même une jacinthe, il casse son verre. Aussitôt un canard vient boire de l’eau insalubre, presque aux pieds de l’enfant assoiffé. Celui-ci observe la bête avant d’imiter son geste. Regard critique La flamme d’une goutte d’eau vilipende la politique de la gestion des eaux dans les pays du Sud, dont la ressource hydrographique est immense. C’est le cas du Congo, un pays parcouru par des rivières et charrié par un des fleuves les plus puissants du monde. Paradoxalement, sa population ne peut accéder à l’eau potable. Le son, la redondance des plans rapprochés d’une tige d’allumettes, des braises surchauffées ou du canon d’un blindé montrent que la situation, si elle n’est pas explosive, est catastrophique. Maurice Milandou dessine, joue de la guitare et fait de la radio. La présente vidéo introduit ce touche à tout dans l’univers de l’image filmique. Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo Paul Alden M’vout : la finesse graphique au service d’une éthique 26 ans, travaille et vit à Brazzaville Altération. Vidéo. 3’20 Description de l’œuvre Altération est réalisée à partir d’une bouteille d’eau étiquetée d’une croix rouge que l’artiste place au centre de l’espace. L’eau subit au fil du temps une transformation, elle devient noire, changeant progressivement la couleur de la croix rouge. Dans un plan rapproché, sur fond d’une musique grave, apparaissent des scènes d’inondation. Regard critique Paul Alden rêve d’un monde où l’eau serait au centre de l’intérêt humain. Et par cette vidéo, il en fait l’ample et subtile démonstration. L’eau est ici personnifiée. Elle prend une dimension idéologique et éthique, se présentant comme le garant de notre bien-être. L’artiste attire notre attention sur le fait que le liquide précieux, plus de 65% de notre organisme, donc en grande partie responsable de notre état de santé, pourrait desservir notre cause si nous ne lui attribuons pas la place qu’elle mérite dans nos usages divers. L’altération à laquelle il fait allusion, n’est en réalité que la rébellion de la nature, de la matière, de l’eau qui, se sentant menacée par l’attitude négligente de l’homme, décide de réagir violemment. D’une étonnante force métaphorique, cette œuvre traite de la question des changements climatiques sur fond de tsunamis. Elle nous révèle par ailleurs la pathologie de notre société : une communauté universelle spoliée dans son désir d’élévation, mais qui cependant ne prend pas en compte son rôle dans l’amélioration de ses conditions de vie. Landry Mbassi Nathalie Ngoma : la dualité de l’eau 32 ans, vit et travaille à Brazzaville Dualité. Vidéo. 4’30 Description de l’œuvre Dualité : La vidéo de Nathalie Ngoma porte un titre expressif. L’œuvre démontre par les inondations, les noyades comment l’eau peut ôter l’existence. Pourtant au même moment, l’eau soulage la soif. L’aspect positif de l’eau se dégage entre autre par l’image répétée d’une petite fille en train de prendre son bain. Nathalie n’hésite pas, quand cela est nécessaire, d’user des effets spéciaux pour arriver à décrire les scènes. La mort est exprimée par un fond noir. Regard critique La démarche de l’artiste est caricaturale. Dans ses séquences, se succèdent les plans rapprochés, les images d’archives pour souligner l’aspect négatif de l’eau. Elle extrapole sur les dangers que présente l’eau. Sa vidéo montre que l’eau est changeante. Seulement, pendant que certains pleurent du malheur causé par l’eau, d’autres se réjouissent des différents avantages qu’elle leur procure. Cette dualité, Nathalie la puise dans sa vie de tous les jours. Avec cette vidéo, Nathalie Ngoma a fait une révélation susceptible de surprendre le public. Raïtel Yengo Pierre-Manau Ngoula « Man’s » 20 ans, vit et travaille à Brazzaville Like a diamond. Vidéo. 4’15 Description de l’œuvre Like a diamond, la vidéo de Pierre-Manau Ngoula, exploite la réverbération de la lumière sur l’eau, à la manière du scintillement d’un diamant. On n’y voit rien : ni homme, ni bête, ni plante, hormis l’eau. La vidéaste procède par plans fixes. D’abord, images du fleuve Congo, avec un soleil qui le darde comme une épée de laser. Ensuite, l’eau dans un seau en plastique, éblouie par une lampe-torche. L’incommensurable et l’infinitésimal miroitent indistinctement. Regard critique Pierre-Manau Ngoula tente une expérience originale à travers cette vidéo. Sa préoccupation fondamentale est de tirer parti de la lumière, tantôt naturelle, tantôt artificielle, et donner de l’eau une image autre que péjorative. Le côté poétique et féerique nous emballe dans cette vidéo. Instant magique, elle réussit à capter magistralement les particules de poussière en suspension dans l’air. L’effet produit grâce à des plans rapprochés est semblable à un ballet extraordinaire d’objets minuscules tourbillonnant dans tous les sens, mais sans affolement. De surcroît l’artiste arrive à donner de l’eau l’image d’un organisme qui vit, respire et se meut, rappelant une échographie pelvienne, ou un banc de sardines virevoltant dans l’eau. Une musique de fond abstraite renforce cette impression : l’eau, comme le diamant, est intemporelle et éblouissante. Avec sa vidéo, une âme contemplative se dévoile. Sigismond Kamanda Ntumba Mulombo Y’en a marre Acrylique pastel et collage sur toile 150 x 55 cm Jussie Nsana fait parler une goutte d’eau 29 ans, vit et travaille à Pointe-Noire (Congo) Tela (la goutte). Vidéo. 4’10 Description de l’œuvre Tela ntela nkouani ntelo akou (en lari : « Goutte d’eau, parle-moi. » ) Quatre minutes, néant d’exclamation. Pourtant, la vidéo n’est pas muette. La première minute est une plainte : le danseur exécute une chorégraphie de l’attente marquée par la nervosité ; l’attente, longue, est pénible ; les images accélérées, se répètent quelques secondes ; l’instant dont il faut s’échapper mais qui se répète ; le fond sonore fait penser à un grésillement. Ecrasé par la chaleur, roulant à même le sol, il sanglote. Assis, il se lamente. Se ventilant avec le tee-shirt dont il s’est déshabillé, il geint. Le regard désespérément dirigé vers le ciel est un cri. Un quotidien voué au hasard est un ordinaire misérable. Le hasard c’est le ciel, d’où nous viendra peut-être « tela », la goutte d’eau. Pas celle qui fait déborder le vase mais celle qui emplit le corps abattu - assoiffé ou dans la crasse – de grâce et de douceur. Regard critique Nsana fait communiquer vidéo et danse, corps humain et éléments physiques. Tela est sa deuxième vidéochorégraphie après Bimbamboukila, où elle traitait de la question de la mémoire. Satisfait des nécessités premières le corps trouve son aisance. Désinvolture charnelle, bonheur de la vie dirait l’artiste, alors épicurienne ? Tela est une sorte de « Glo » ou danse de réjouissance. Mais ici l’individu se rencontre seul dans le plaisir de sa nature physique. L’artiste questionne-t-elle la notion du bonheur individuel ? Job Olivier Ikama