La place des femmes dans la vie associative française
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La place des femmes dans la vie associative française
La place des femmes dans la vie associative française I- Quelques rappels sur la situation du tissu associatif et du bénévolat en France : Sel ondeschi f f r est i r ésd’ unei mpor t ant eenquêt emenéesousl adi r ect i ondeVi v i aneTcher nonog (CNRS/MATISSE), l enombr edeper sonnesengagéesdansl ebénévol atassoci at i fser ai td’ env i r on14 millions en 2005. Ce chiffre aurait progressé régulièrement de 3,8% par an depuis 1999. Le taux d’ engagementestdoncde28% del apopul at i ondepl usde15ans. Chaque bénévole passe en moyenne 86 heures par an dans son ou ses engagements (contre 81 heures en 1999). Ces chiffres sont très positifs et cassent le discours mortifère sur « la crise du bénévolat » ou l ’ égoï sme desf r ançai s! Il convient de noter toutefois que cette ét onnant e pr ogr essi on s’ expl i que prioritairement par la progression du nombre des associations (70 000 créations nouvelles tous les ans, solde net estimé à + 35 000 par an) ;enmoy enne,chaqueassoci at i onn’ adoncpaspl usde bénévoles, environ 16 par association.C’ estenquel quesor t e«l ’ of f r eassoci at i ve», considérable et très diversifiée, qui tire la progression du bénévolat. Dans ce contexte globalement favorable, on pourrait dire que tout va bien et que les associations n’ ontaucunpr obl èmepourt r ouv erdesbénév ol es.I ln’ en estr i en,bi enaucont r ai r e( c’ estd’ ai l l eur sl a raison même de la création et du développement de France Bénévolat ; voir www.francebenevolat.org) : 1. Telles Moloch, les associations sont insatiables : toute association digne de ce nom –et le plus grand nombre en est digne- di tqu’ av ecl esmoy ensqu’ el l ea, el l en’ apasàr ougi r .Beaucoup af f i r mentquesiel l esav ai entdeuxf oi spl usdemoy ens,el l es aur ai entdeuxf oi spl usd’ actions et de résultats. Et bien sûr ,l esr essour cesessent i el l esd’ uneassoci at i onsontl esbénév ol es,qu’ i l s’ agi sse des di r i geant sassoci at i f sou des bénévol esde t er r ai n pl usou moi nsengagés.Ce besoin constant de bénévoles supplémentaires est le signe de l ’ ext r aor di nai r e dy nami s me associ at i f ,dubesoi ndesassoci at i onsd’ ent r epr endr eetder épondr eauxbesoi nsdel i ensoci al , que ce soit au travers des associations qui se situent sur des champs réparateurs, « les ravaudeurs du tissu déchiré », ou sur des champs plus préventifs (le secteur sportif, le secteur soci aletl esai desàl aper sonne,l esect eurcul t ur eletdesl oi si r s,l ’ appuiaudév el oppement économi que…)ou encore sur des champs plus revendicatifs. 2. Les bénévoles choisissent et les associationsdoi ventf ai r epr euv ed’ at t r act i v i t é,cari lyadef ai t concurrence sur une ressource toujours insuffisante. Le tissu associatif est immense et diversifié, même si sa lisibilité, en particulier locale, est insuffisante. Du coup les bénévoles potentiels ou actuels sont sollicités par de multiples canaux : cercle familial et personnel, grands médias pour les grandes associations de niveau national, médias locaux, notre propre Réseau France Bénévolat composé de plus de 230 poi nt sd’ i mpl ant at i onslocales etnot r esi t e…Contrairement à des i dées acqui ses,ce n’ estpas pr i or i t ai r ementetexcl usi v ementl e sect eurassoci at i fqui const i t ue l ef act euressent i eld’ at t r act i vi t é.Ce sontessent i el l ementl e dy nami s me du Pr oj et associatif, le charisme de ses dirigeants,l aqual i t édel ’ accuei letdel ’ i nt égr at i ondesnouv eaux bénév ol es,l aqual i t édel ’ ambi ance,l aqual i t édel adi v er si t éetl apossi bi l i t édet r ouv erdesgens « sympa » ethumai nementr i ches… 3. Les compétences demandées sont souvent de plus en plus pointues.Cequ’ onappel l edepl us en plus « le professionnalisme des bénévoles », renvoie à des besoins de compétences spéci f i ques.Pourpr endr eunexempl epar midescent ai nes,l esassoci at i onsquis’ occupentdes personnes les plus exclues, doivent avoir des bénév ol esspéci al i st esdesquest i onsd’ écout e,de conseil familial, de santé, de droit administratif, de logement, de formation, etc. 4. Il y a réellement « crise »surl aquest i ondur enouvel l ementdesdi r i geant sassoci at i f s.C’ esten tant que tel un « sujet dans le sujet ». Les raisons de cette difficulté sont multiples : montée La place des femmes dans la vie associative française –Dominique THIERRY –janvier 2008 1 objective des responsabilités et de la complexité (et bien sûr dans cette complexité, le poids des problèmes de financement), disponibilité insuffisante, nécessité d’ av oi runl eader shi p personnel, insuffisance de formation, mauvaise délégation dans les équipes dirigeantes. Le CNOSF, pour le secteur sportif, a pris ce sujet à bras le corps et développe des démarches originales dans la durée. France Bénévolat a, pour sa part, engagé une étude/action qui sera publiée en juin 2008. I lestcl ai rquec’ estl ’ undest r èsgr andschant i er squel eMonde Associatif devra traiter dans les années à venir. L’ accès des f emmes aux r esponsabi l i t és associ at i vesenconst i t uel ’ undesvol et s. II- Part de l’ empl oidesf emmesdansl esassoci at i ons: Sur les 1 100 000associ at i ons,envi r on15% sontempl oy eur s( l esaut r esnef onct i onnentqu’ av ecdes bénévoles). Elles représentent environ 1750 000 emplois et environ 1 000 000d’ équi val ent st emps plein, donc avec un fort taux de travail à temps partiel. L’ empl oiassoci at i facr u, de 1999 à 2005, 2, 5f oi spl usv i t equedansl ’ ensembl edel ’ économi e.C’ est l à aussil a pr euv e de son dy nami s me eti lconst i t ue mai nt enantl ’ un des sect eur s empl oy eur s dominants, bien dev antl apl upar tdessect eur si ndust r i el s,j ust eder r i èr el ’ ar t i sanat . 68% des emplois sont féminins avec de fortes disparités sel on l es sect eur s( l ’ empl oiest majoritairement masculin dans le secteur sportif et majoritairement féminin dans le secteur social). Seul s53% decesempl oi ssontsousf or medeCDI ,l apr écar i t éf or t edel ’ empl oi associ at i fs’ expl i quant à la fois par des activités saisonnières et par le poids très important des emplois aidés, sous toutes ses formes (CES, « Emplois jeunes »,CAE…) . III- Par tdel ’ engagementassoci at i fcompar édeshommesetdesf emmes Les hommes participent à la vie associative à un taux sensiblement supérieur à celui des femmes. L’ excel l entt r av ai lduCNRS/ MATI SSEnecompor t emal heur eusementpasd’ anal y separgenre et par âges. Nous en sommes réduits à utiliser des données maintenant un peu anciennes. Globalement, la présence des hommes est nettement majoritaire dans les associations (55% des adhérents sont des hommes selon un travail du CREDOC de 1998), mais les femmes sont plus nombreuses à donner de leur temps en dehors de la vie associative (16% contre 13%, selon la SOFRESen2002) .Oncompt abi l i semal enFr ancecequ’ onappel l edansd’ aut r espay s«le bénévolat direct » ou « le bénévolat de proximité ». Cette différence vaut tant sur le registre des adhérents que sur celui des bénévoles impliqués dans la vie associative : 40% des Fr ançai ssontmembr esd’ uneassociation : 46% des hommes et seulement 34% des femmes ; 13% sonti mpl i qués( c’ estàdi r eceuxquis’ yconsacrent au moins 5h par mois et vont à toutes les assemblées générales). Parmieux 80% s’ engagentdans des associations spor t i vesdont18% d’ hommeset8% def emmes. 26% ont une implication « ordinaire »( i l ss’ i mpl iquent moins de 5h par mois et ne vont qu’ à quelques assemblées générales) ,dont28% d’ hommeset26% defemmes ; 39% ont une participation occasionnelle ; 29% sontmembr esd’ uneassoci at i ont our néever s« l ’ épanoui ssement 13% s’ engagentpourunegr andecause. personnel » ; Il y a plus de participation dans le milieu rural que dans le milieu urbain, surtout chez les personnes qui font partie des « impliqués ». Les divers secteurs attirent différemment les deux sexes : Secteurs Sports Culture Hommes 18% 13% Femmes 11% 10% La place des femmes dans la vie associative française –Dominique THIERRY –janvier 2008 2 Loisirs Aide aux personnes défavorisées Par ent sd’ él èv es 3°âge Associations confessionnelles 10% 6% 6% 7% 6,6% 5,3% 4,8% 6,3% 6,3% 3,8% (Données tirées des travaux de Dan Ferrand-Bechman,pr of esseuràl ’ Uni ver si t éPar i sVI I I ) Les représentations diffèrent selon le sexe. Le mot « association » ne rime pas nécessairement avec le mot « militantisme », mais parfois avec ceux de « bénévolat » ou de « solidarité » : 75% des femmes et 74% des hommes pensent au bénévolat, 74% des femmes pensent solidarité contre 68% pour les hommes, 19% des hommes pensent militantisme et 14% des femmes, 57% des hommes voient les associations comme des éléments de démocratie contre 48% des femmes, 21% des hommes les voient efficaces, 27% pour les femmes 46% desdeuxsexespensentquel ’ Et at devrait avoir un rôle plus important. L’ i nsat i sf act i onpor t e surl esdomai nessui vant s:j eunesse,sant é,sol i dar i t é,éducat i on,envi r onnement … IV- Rôl ehi st or i quedel avi eassoci at i vedansl ’ émanci pat i ondesf emmes En dehors même des associations féminines ou féministes, dont il convient de rappeler le rôle essent i el dansl ’ émanci pat i ondesf emmesetl eurl ut t ev er sl ’ égal i t é,l esassoci at i onsmi xt esont const i t ué,etconst i t uentencor eauj our d’ hui ,desl i euxdesoci al i sat i on,d’ éducat i onetd’ expr ession des femmes. Rappel onsquel esf emmesn’ ontl edr oi tdev ot equedepui s60ans,al or squel esuf f r ageuni ver sel était un principe affiché depuis la Révolution de 1789. Les associations ont ainsi joué un double rôle : l i eud’ expr essi oncol l ect i veetdémocr at i quedesf emmes,encompensat i ond’ uneabsence de possi bi l i t éd’ i mpl i cat i onàl adémocratie politique, et lieu de revendication pour obtenir des droits qui leur étaient refusés par le Monde Politique. V- Un rapport différent au pouvoir et aux responsabilités Il existe un net déséquilibre entre les femmes et les hommes en matière de responsabilités associatives. Nousdi sposonsàl ’ i nt ér i eurdut r av ai ldéj àment i onnéduCNRS/ MATI SSE,d’ unr egar dpar t i cul i ersur la place des femmes dans les responsabilités associatives (travaux spécifiques de Muriel Tabarès), avec une comparaison entre 2003 et 2005 : La place des femmes dans la vie associative française –Dominique THIERRY –janvier 2008 3 Par tdesf emmesauxpost esde… Enquêtes Présidents Trésoriers Secrétaires 2003 2005 26% 31% 40% 42% 55% 57% Ensemble des postes dirigeants 39% 46% Onnepeutquesef él i ci t erd’ uneév ol ut i onqui t endprogressivement vers une plus une grande égalité dans la répartition des responsabilités, même si des progrès importants restent à faire. Cette évolution globalement positive recouvre évidemment des disparités importantes selon les sect eur s.Ai nsi sionsef ocal i sesurl eseulpost edePr ési dent( t e)oùl ’ i négal i t éestl apl usf l agr ant e, on retrouve tous les stéréotypes par genre : Répartition hommes/femmes du poste de Président Secteurs Action caritative et humanitaire Action sociale Santé Défense des droits et des causes Education, formation, insertion Chasse et pêche Sports Culture Loisirs Défense des intérêts économiques Hommes 53% 53% 56% 80% 64% 97% 87% 62% 62% 70% Femmes 47% 47% 44% 20% 36% 3% 13% 38% 38% 30% Tout ef oi s,onpeutdécel eruneévol ut i ont r èsi nt ér essant esel onl ’ âgedesassoci at i ons,l es associations les plus récentes « autorisant » une plus grande place aux femmes : Date de création de l ’ associ at i on Avant 1960 1961/1970 1971/1980 1981/1990 1991/2000 Après 2000 Ensemble Présidents Présidentes 83% 76% 67% 68% 66% 62% 69% 17% 24% 33% 32% 38% 38% 31% le secteur associatif constituerait un secteur de référence, exemplaire, en évolution du fait de sa propre et seule dynamique ; le secteur associatif joue, par ailleurs, un rôle irremplaçable en matière éducative, donc avec un rôle indirect (« un effet levier ») sur lesaut r escel l ul esdel aSoci ét éenmat i èr ed’ égal i t éetde parité. Comme évoqué en introduction, une bonne partie des préoccupations des associations réside moins dans le recrutement de « bénévoles de base » que dans le renouvellement de leurs dirigeants. Cette question incontournable pour leur avenir peut être un levier particulièrement puissant pour accélérer cepr ocessusenf aveurdel ’ égalaccèsauxr esponsabi l i t ésassoci at i vesent r el esf emmesetl es hommes. On peut donc estimer que le maintien du dynamisme associatif, tout à fait exceptionnel dans notre pays, passe par le renouvellement des dirigeants associatifs, avec une place plus large accordée aux femmes et aux jeunes. Ainsi, une plus grande égalité dans les responsabilités associatives constitue évidemment une question de justice, mais aussi une formidable opportunité de transformation pour le Monde Associatif, et en tout état de cause une nécessité. La place des femmes dans la vie associative française –Dominique THIERRY –janvier 2008 4 Mais cet élargissement passe lui-même, de mon point de vue, par une révision profonde du fonctionnement des associations : plus transparent, plus pragmatique, avec des responsabilités plus réparties et plus déléguées, avec une gouvernance davantage préoccupéed’ ef f i caci t éet plus soucieuse d’ éval uat i ondesonut i l i t ésoci al e…Lef ai tdel i er ,commel ’ af ai tl eCNOSF,l aquest i on de la formation et du renouvellement des dirigeants et la question de l’ accèsauxresponsabilités pour les femmes et les jeunes me semble particulièrement prometteur. Onpeutdoncf ai r el ’ hy pot hèsequel esf emmesi nv est i esdansl eMondeAssoci at i f ,souci euses d’ ef f i caci t éetpr i or i t ai r ementpr éoccupéesparl ’ ut i l i t ésoci al edes activités développées par les associ at i ons,n’ ontaucuneenvi edes’ i nv est i rdansdesf onct i onnement si nst i t ut i onnel sf or mat éspar des hommes et largement centrés sur des problèmes de pouvoir. Gl obal ementl esf emmesnes’ i nvest i r ontpasdansl esr esponsabilités associatives si elles y voient d’ abor ddesf onct i onnement si nst i t ut i onnel s,surdesl ogi quesdepouvoi r sst r uct ur éspardesv i eux mâles ! Les femmes doivent prendre le pouvoir dans les associations et y imposer progressivement un nouveau modèle. Heureuse conjonction : le renouvellement des dirigeants associatifs passe largement par une évolution de la gouvernance associative et cette nouvelle gouvernance passe par une plus grande place accordée aux femmes et aux jeunes ! Enfin un secteur de la Société où l ’ onal esent i mentqu’ unpeupl usdevol ont ar i smeetdeconvi ct i on partagée accél ér er ai entunmouv ementdéj ààl ’ œuv r e! Dominique Thierry Vice-président national de France Bénévolat et Membr edel ’ Obser v at oi r edel aParité Janvier 2008 Sources principales : travaux du CNRS/MATISSE/Paris I dirigés par Viviane Tchernonog, en particulier : « Les associations : ressources, emploi, travail bénévole, évolutions » (Septembre 2007) travaux de Dan Ferrand-Bechman « La France Bénévole 2007 » Enquête CERPHI/France Bénévolat Evelyne Diebolt « Femmesdeconv i ct i on,f emmesd’ act i on» Ed. Association Femmes et Associations-2004 www.femmesetassociations.org Françoise Nallet, Anne Guardiola, Laurence Nobili, Rapport remis à la DIES dans le cadre du Programme d'action pour l'égal accès aux responsabilités entre femmes et hommes au sein des associations, Union Nationale des associations territoriales Retravailler, juillet 2003. Françoise Nallet ,AnneGuar di ol a,Laur enceNobi l i ,Pr at i que( s)del ’ égal i t édansl esassoci at i ons, DIES/ Union Nationale des associations territoriales Retravailler, fin 2004. La place des femmes dans la vie associative française –Dominique THIERRY –janvier 2008 5