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13 Opérations élémentaires sur les lignes ou les colonnes d'une matrice. Applications On désigne par K un corps commutatif de caractéristique diérente de 2. Pour n, m entiers naturels non nuls, on note Mn,m (K) l'espace des matrices à n lignes, m colonnes et à coecients dans K. Pour m = n, on note Mn (K) . Si A ∈ Mn,m (K) , on désigne par u l'application linéaire de Km dans Kn qu'elle dénit dans les bases canoniques. Pour 1 ≤ i ≤ n et 1 ≤ j ≤ m, on note Eij la matrice dont tous les coecients sont nuls sauf celui d'indice (i, j) (ligne i et colonne j ) qui vaut 1. On rappelle que la famille (Eij )1≤i≤m est une base de Mn,m (K) qui est donc de dimension 1≤j≤n m · n. Pour toute matrice A = ((aij ))1≤i≤m ∈ Mn,m (K) , on note pour tout entier i compris entre 1≤j≤n 1 et n : Li = (ai1 , ai2 , · · · , aim ) sa ligne numéro i (c'est une matrice à une ligne et m colonnes) et pour tout entier j compris entre 1 et m : Cj = a1j a2j .. . anj sa colonne numéro j (c'est une matrice à n lignes et une colonne). On écrira : L1 ( .. A = . ou A = C1 · · · Ln Cm ) 13.1 Matrices de dilatation et de transvection. Opérations élémentaires Soit A = ((aij )) 1≤i≤n ∈ Mn,m (K) . 1≤j≤m 319 Opérations élémentaires ... 320 On appelle matrice déduite de A par opération élémentaire sur les lignes de A toute matrice de la forme : L1 .. . Li−1 Ai (λ) = λLi Li+1 . .. Ln avec 1 ≤ i ≤ n et λ ∈ K∗ , c'est-à-dire que la matrice Ai (λ) est déduite de la matrice A en multipliant sa ligne numéro i par λ ou de la forme : L1 .. . Li−1 Aij (λ) = Li + λLj Li+1 .. . Ln 1 ≤ i ̸= j ≤ n et λ ∈ K, c'est-à-dire que la matrice Aij (λ) est déduite de la matrice A en ajoutant à la ligne numéro i la ligne numéro j multipliée par λ. Une telle opération est codée par : Li ←− λLi ou Li ←− Li + λLj On appelle matrice déduite de A par opération élémentaire sur les colonnes de A toute matrice de la forme : A′j (λ) = ( C1 · · · Cj−1 λCj Cj+1 · · · Cm ) avec 1 ≤ j ≤ m et λ ∈ K∗ , c'est-à-dire que la matrice A′i (λ) est déduite de la matrice A en multipliant sa colonne numéro j par λ ou de la forme : A′ij (λ) = ( C1 · · · Cj−1 Cj + λCi Cj+1 · · · Cm ) 1 ≤ i ̸= j ≤ m et λ ∈ K, c'est-à-dire que la matrice A′ij (λ) est déduite de la matrice A en ajoutant à la colonne numéro j la colonne numéro i multipliée par λ. Une telle opération est codée par : Ci ←− λCi ou Ci ←− Ci + λCj Remarque 13.1 Si A est transformée en A′ par une opération élémentaire, alors A′ peut être transformée en A par opération élémentaire. Ainsi : 1 si A′ se déduit de A par Li ←− λLi avec λ ∈ R∗ , alors A se déduit de A′ par Li ←− Li ; λ si A′ se déduit de A par Li ←− Li + λLj avec λ ∈ R et i ̸= j, alors A se déduit de A′ par Li ←− Li − λLj . Matrices de dilatation et de transvection. Opérations élémentaires 321 On rappelle que le rang de la matrice A est égal à la dimension du sous-espace vectoriel de Kn engendré par ses colonnes : rg (A) = dim (Vect (C1 , · · · , Cm )) Il est équivalent de dire que le rang de A est égal au nombre maximum de vecteurs colonnes de A linéairement indépendants dans Kn . Une matrice et sa transposée ayant même rang, le rang de A est aussi égal à la dimension du sous-espace vectoriel de Km engendré par ses lignes : rg (A) = dim (Vect (L1 , · · · , Ln )) c'est donc le nombre maximum de vecteurs lignes de A linéairement indépendants dans Rm . Théorème 13.1 Si A et A′ dans Mn,m (K) se déduisent l'une de l'autre par opération élémentaire, elles ont alors même rang. Démonstration. Supposons que A′ se déduise de A par opérations élémentaires sur les lignes (quitte à transposer) et notons Li les lignes de A, L′i celles de A′ , où i varie entre 1 et n. Chaque ligne de A′ étant combinaison linéaire de celles de A, le sous-espace vectoriel F = Vect (L1 , · · · , Ln ) de Km est contenu dans le sous-espace F ′ = Vect (L′1 , · · · , L′n ) et comme A se déduit aussi de A′ par opération élémentaires, on a également F ′ ⊂ F et en dénitive F = F ′ , ce qui implique A et A′ ont même rang. On déduit de ce résultat que deux matrices de Mn,m (K) qui se déduisent l'une de l'autre par une suite nie d'opérations élémentaires, ont alors même rang. On peut aussi remarquer que supprimer des lignes [resp. colonnes] nulles d'une matrice ne modie pas son rang. Dénition 13.1 On appelle matrice de transvection toute matrice dans Mn (K) de la forme : Tij (λ) = In + λEij avec 1 ≤ i ̸= j ≤ n et λ ∈ K. Une matrice de transvection Tij (λ) est donc une matrice triangulaire dans Mn (K) dont tous les termes diagonaux valent 1 et de termes hors de la diagonale tous nuls sauf celui d'indice (i, j) (i. e. en ligne i et colonne j ) qui vaut λ. Dénition 13.2 On appelle matrice de dilatation toute matrice dans Mn (K) de la forme : Di (λ) = In + (λ − 1) Eii avec 1 ≤ i ≤ n et λ ∈ K∗ . Une matrice de dilatation Di (λ) est donc diagonale de termes diagonaux tous égaux à 1 sauf le numéro i qui vaut λ. Remarque 13.2 Dans les deux dénitions qui précédent, on devrait préciser relativement à la base canonique . De manière plus générale, on appelle matrice de transvection, de dilatation, élémentaire, une matrice semblable à une matrice de transvection, de dilatation, élémentaire, relativement à la base canonique. Opérations élémentaires ... 322 Remarque 13.3 La transposée d'une matrice de transvection [resp. de dilatation] est une matrice de transvection [resp. de dilatation]. Exercice 13.1 Soient associé. A ∈ Mn (K) et u ∈ L (Kn ) l'endomorphisme de Kn canoniquement 1. Montrer que A est une matrice de transvection si, et seulement si, il existe un hyperplan H de Kn tel que u|H = IdH et Im (u − Id) ⊂ H. 2. Montrer que A est une matrice de dilatation si, et seulement si, il existe un hyperplan H de Kn tel que u|H = IdH et u est diagonalisable. Solution 13.1 1. Si A est une matrice de transvection, elle est alors semblable à une matrice de transvection relativement à la base canonique, il existe donc une base (ei )1≤i≤n de Kn et des indices i ̸= j tels que u (ej ) = ej + λei et u (ek ) = ek pour k ̸= j. En désignant par H l'hyperplan engendré par {ek | 1 ≤ k ≤ n, k ̸= j} , on a u|H = IdH . Et avec (u − Id) (ej ) = λei ∈ H, on déduit que Im (u − Id) ⊂ H. Réciproquement s'il existe un hyperplan H de Kn tel que u|H = IdH et Im (u − Id) ⊂ H, on a u (x) = x pour tout x ∈ H, donc H ⊂ ker (u − Id) et ker (u − Id) = H ou ker (u − Id) = Kn . Si ker (u − Id) = Kn , on a alors u = Id et A = In est une matrice de transvection. Si ker (u − Id) = H, l'endomorphisme u admet 1 pour valeur propre d'ordre au moins égal à n−1 et le polynôme caractéristique normalisé de u est χu (X) = (X − 1)n−1 (X − λ) . Si λ ̸= 1, il existe alors un vecteur x ∈ / H tel que u (x) = λx et (u − Id) (x) = (λ − 1) x ∈ / H, ce qui contredit Im (u − Id) ⊂ H. Donc λ = 1 est valeur propre d'ordre n de u avec u ̸= Id. L'endomorphisme u n'est donc pas diagonalisable et le théorème de réduction de Jordan nous dit qu'il existe une base de Kn dans laquelle la matrice de u est Tn,n−1 (1) et A est une matrice de transvection. 2. Si A est une matrice de dilatation, elle est alors semblable à une matrice de dilatation relativement à la base canonique, il existe donc une base (ei )1≤i≤n de Kn , un indices j et un scalaire λ ∈ K∗ tels que u (ej ) = λej et u (ek ) = ek pour k ̸= j. En désignant par H l'hyperplan engendré par {ek | 1 ≤ k ≤ n, k ̸= j} , on a u|H = IdH et u est diagonalisable. Réciproquement s'il existe un hyperplan H de Kn tel que u|H = IdH et u est diagonalisable, l'endomorphisme u admet 1 pour valeur propre d'ordre au moins égal à n−1 et une valeur propre λ ̸= 0. Dans une base adaptée la matrice de u est Dn (λ) et A est une matrice de dilatation. Théorème 13.2 Avec les notations qui précèdent on a : Ai (λ) = Di (λ) A pour 1 ≤ i ≤ n Aij (λ) = Tij (λ) A pour 1 ≤ i ̸= j ≤ n A′ (λ) = ADj (λ) pour 1 ≤ j ≤ m ′j Aij (λ) = ATij (λ) pour 1 ≤ i ̸= j ≤ m C'est-à-dire que : 1. la la 2. la la multiplication à gauche par une matrice de dilatation Di (λ) a pour eet de multiplier ligne i par λ ; multiplication à droite par une matrice de dilatation Dj (λ) a pour eet de multiplier colonne j par λ ; Matrices de dilatation et de transvection. Opérations élémentaires 323 3. la multiplication à gauche par une matrice de transvection Tij (λ) a pour eet de remplacer la ligne Li par Li + λLj ; 4. la multiplication à droite par une matrice de transvection Tij (λ) a pour eet de remplacer la colonne Cj par Cj + λCi . Démonstration. Le coecient d'indice (p, q) du produit de matrices Di (λ) A est obtenu en faisant le produit de la ligne p de Di (λ) par la colonne q de A, ce qui donne en notant αp,q ce coecient : { ap,q si 1 ≤ p ̸= i ≤ n, 1 ≤ q ≤ n αp,q = λaiq si p = i, 1 ≤ q ≤ n On a donc bien Ai (λ) = Di (λ) A. Les autres égalités se montrent de façon analogue. Ce résultat justie la dénition suivante. Dénition 13.3 On appelle matrice élémentaire une matrice de dilatation ou de transvection. Lemme 13.1 Une matrice de transvection ou de dilatation est inversible dans Mn (K) avec : Tij (λ)−1 = Tij (−λ) pour une matrice de transvection et : Di (λ) −1 ( ) 1 = Di λ pour une matrice de dilatation. Démonstration. Pour λ, µ dans K et i ̸= j compris entre 1 et n, la matrice Tij (λ) Tij (µ) se déduit de Tij (µ) en ajoutant à sa ligne i sa ligne j multipliée par λ, ce qui donne la matrice Tij (λ + µ) . Prenant µ = −λ, on a Tij (λ) Tij (−λ) = T0 = In , ce qui signie que Tij (λ) est inversible d'inverse Tij (−λ) . Le deuxième résultat est évident. Remarque 13.4 On sera amené à utiliser deux autres types d'opérations élémentaires que sont les permutations de lignes ou de colonnes. En fait ces opérations se déduisent des précédentes. Par exemple pour permuter les lignes i et j où 1 ≤ i < j ≤ n on eectue les opérations suivantes : L1 .. . Ln L1 .. . Li−1 → 7 Li + Lj Li+1 .. . Ln L1 .. . Li + Lj .. 7→ . −L i . . . Ln L1 .. . Lj 7→ ... −L i . . . Ln ce qui revient à eectuer les produits : Dj (−1) Tij (1) Tji (−1) Tij (1) A 7→ L1 .. . Lj .. . Li .. . Ln Opérations élémentaires ... 324 La matrice Dj (−1) Tij (1) Tji (−1) Tij (1) est la matrice de permutation qui se déduit de la matrice In en permutant ses colonnes i et j. Elle s'écrit plus simplement : Pij = In − (Eii + Ejj ) + (Eij + Eji ) De même la permutation des colonnes i et j est obtenue avec : ATij (1) Tji (−1) Tij (1) Di (−1) Le produit de matrices Tij (1) Tji (−1) Tij (1) Di (−1) est la matrice de permutation t Pij = Pji . Lemme 13.2 Une matrice de permutation Pij est inversible dans Mn (K) d'inverse Pij−1 = Pji . Démonstration. C'est évident. Avec l'exercice qui suit, on vérie que toute matrice inversible d'ordre 2 est produit de matrices élémentaires. Ce résultat est en fait vrai pour les matrices inversibles d'ordre n ≥ 2. Exercice 13.2 Soit A = ( a b c d ) une matrice inversible. 1. On suppose que c ̸= 0. (a) Déterminer un scalaire λ1 tel que : ( A1 = T12 (λ1 ) A = (b) Déterminer un scalaire λ2 tel que : 1 b1 c1 d1 ( 1 b2 0 d2 A2 = T21 (λ2 ) A1 = (c) Déterminer un scalaire λ3 tel que : ( A3 = A2 T12 (λ3 ) = 1 0 0 d1 ) ) ) (d) En déduire qu'il existe des matrices de transvection P1 , P2 , Q1 et une matrice de dilatation D telles que : A = P1 P2 DQ1 2. Donner un résultat analogue dans le cas où c = 0. Solution 13.2 1. (a) Pour tout scalaire λ1 , on a : ( T12 (λ1 ) A = 1 λ1 0 1 )( a b c d ) ( = a + cλ1 b + dλ1 c d 1−a , on a : c ( ) d − det (A) 1 T12 (λ1 ) A = c c d et prenant λ1 tel que a + cλ1 = 1, soit λ1 = ) Matrices de dilatation et de transvection. Opérations élémentaires 325 (b) Pour tout scalaire λ2 , on a : ( T21 (λ2 ) A1 = 1 0 λ2 1 )( 1 b1 c d ) ( = 1 b1 c + λ2 d + b1 λ2 ) et prenant λ2 = −c, on a : ( T21 (λ2 ) A1 = ( ) 1 b1 0 d − cb1 d − det (A) c 0 det (A) ) 1 = (c) Pour tout scalaire λ3 , on a : ( A2 T12 (λ3 ) = 1 b2 0 d2 et prenant λ3 = −b2 , on a : ( A2 T12 (λ3 ) = )( 1 λ3 0 1 1 0 0 d2 ) ( ) = ( = 1 b 2 + λ3 0 d2 1 0 0 det (A) ) ) (d) On a donc en dénitive : T21 (λ2 ) T12 (λ1 ) AT12 (λ3 ) = D2 (det (A)) et utilisant le fait que les matrices de transvections sont inversibles, on déduit que : A = T12 (−λ1 ) T21 (−λ2 ) D2 (det (A)) T12 (−λ3 ) 1−a det (A) − d , λ2 = −c et λ3 = . c c 2. Si c = 0, on a nécessairement a ̸= 0 puisque A est inversible et : ( )( ) ( ) 1 0 a b a b T21 (1) A = = 1 1 0 d a b+d où λ1 = ce qui nous ramène au cas précédent et donne : T21 (1) A = P1 P2 DQ1 soit : A = T21 (−1) P1 P2 DQ1 Le résultat suivant nous dit que l'ensemble des matrices de dilatation ou de transvection forme un système générateur du groupe multiplicatif GLn (K) . Théorème 13.3 Une matrice A ∈ Mn (K) (où n ≥ 2) est inversible si, et seulement si, elle est produit de matrices élémentaires. Précisément si A ∈ Mn (K) est inversible, il existe alors des matrices de transvection P1 , · · · , Pr et Q1 , · · · , Qs et une matrice de dilatation Dn (λ) telles que : A = P1 · · · Pr Dn (λ) Q1 · · · Qs Opérations élémentaires ... 326 Démonstration. On procède par récurrence sur n ≥ 2. Le cas n = 2 a été traité avec l'exercice précédent. On le suppose vrai pour toutes les matrices inversibles d'ordre n − 1 ≥ 2 et on se donne une matrice inversible A d'ordre n. On se ramène tout d'abord par opération élémentaire au cas où a21 ̸= 0. Si a21 = 0, comme A est inversible, sa colonne 1 n'est pas nulle, il existe donc un indice i ∈ {1, 3, · · · , n} tel que ai1 ̸= 0 et la matrice T2i (1) A (déduite de A en ajoutant la ligne i à la ligne 2) est telle que son coecient d'indice (2, 1) est non nul. Une fois ramené à a21 ̸= 0, on se ramène à a11 = 1 en remplaçant la première ligne L1 par L1 + λL2 (multiplication à gauche par T12 (λ)) où le scalaire λ est choisi tel que a11 + λa21 = 1. Ensuite, pour tout i ∈ {2, 3, · · · , n} , en remplaçant la ligne Li par Li − ai1 L1 (multiplication à gauche par Ti1 (−ai1 )), on annule le coecient d'indice (i, 1) . On peut donc trouver des matrices de transvection P1 , · · · , Pk telles que : 1 α12 · · · α1n 0 α22 · · · α2n Pk · · · P1 A = .. .. . . . . . .. . 0 αn2 · · · αnn De manière analogue, en multipliant à droite par des matrices de transvection, Q1 , · · · , Qm , on obtient : 1 0 ··· 0 0 β22 · · · β2n Pk · · · P1 AQ1 · · · Qm = .. .. . . . .. . . . 0 βn2 · · · βnn 1 0 ··· 0 = .. . B 0 0 On peut alors conclure en appliquant l'hypothèse de récurrence à la matrice B qui est d'ordre ′ n−1 n − 1 et inversible. tel que Bx′ = 0, ( ) En eet, si B n'est pas inversible, il existe x ̸= 0 dans K 0 donc x = ∈ Kn est non nul solution de Pk · · · P1 AQ1 · · · Qm x = 0 qui équivaut à Ay = 0 x′ avec y = Q1 · · · Qm x ̸= 0 puisque les matrices Pi et Qj sont inversibles, en contradiction avec A inversible. Corollaire 13.1 Le groupe multiplicatif SLn (K) = {A ∈ Mn (K) | det (A) = 1} est engendré par l'ensemble des matrices de transvection. En supposant le déterminant dans une base B d'un espace vectoriel E de dimension n ≥ 1 déni de manière traditionnelle comme l'unique forme n-linéaire alternée sur E qui vaut 1 sur B, on vérie facilement que le réel λ qui intervient dans le théorème précédent est le déterminant de A et il est donc uniquement déterminé par cette matrice A. Pour n = 1, le résultat est encore vrai avec A = (a) = D (a) . − En désignant par GL+ n (R) [resp.GLn (R)] l'ensemble des matrices d'ordre n à coecients réels de déterminant strictement positif [resp. négatif] on déduit du théorème précédent le résultat suivant. Corollaire 13.2 Les ensembles − GL+ n (R) et GLn (R) sont connexes par arcs et ce sont les composantes connexes de GLn (R) . Déterminant des matrices carrées 327 Démonstration. Soit A ∈ GL+n (R) . Elle s'écrit : A = P1 · · · Pr Dn (det (A)) Q1 · · · Qs les Pk et Qj étant des matrices de transvections. Pour toute matrice de transvection T = Tij (λ) et tout t ∈ [0, 1] , on note T (t) = Tij (tλ) et on dénit l'application γ : [0, 1] → Mn (R) par : ∀t ∈ [0, 1] , γ (t) = r ∏ Pk (t) ∆ (t) k=1 où : s ∏ Qk (t) k=1 ∆ (t) = Dn (t det (A) + (1 − t)) Pour tout t ∈ [0, 1] , on a det (γ (t)) = t det (A) + (1 − t) > 0 du fait que A ∈ GL+ n (R) . De plus γ est continue avec γ (0) = In et γ (1) = A. On a donc ainsi prouvé que GL+ (R) est connexe n par arcs. Pour toute matrice A ∈ GL− n (R) (par exemple A = Dn (−1)) l'application M 7−→ AM − − réalise un homéomorphisme de GL+ n (R) sur GLn (R) . On en déduit alors que GLn (R) est connexe par arcs. − + − Avec GLn (R) = GL+ n (R) ∪ GLn (R) , les ensembles GLn (R) et GLn (R) étant des ouverts connexes disjoints, on déduit que ce sont les composantes connexes de GLn (R) . Ce résultat permet de dénir une orientation sur un espace vectoriel réel E de dimension n. On dit que deux bases B et B′ de E dénissent la même orientation si la matrice de passage de B à B′ est dans GL+ n (R) . En fait le déterminant d'une matrice carrée peut être déni en utilisant les opérations élémentaires. 13.2 Déterminant des matrices carrées On dénit tout d'abord le déterminant d'une matrice d'ordre deux A = par : a b c d det (A) = ( a b c d ) ∈ M2 (K) = ad − bc Une matrice d'ordre 1 étant tout simplement un scalaire, son déterminant est lui même. Le déterminant d'une matrice A = ((aij ))1≤i,j≤n ∈ Mn (K) d'ordre n ≥ 3 peut se dénir par récurrence comme suit : n det (A) = ∑ (−1)i+1 ai,1 det (Ai,1 ) i=1 où Ai,1 est, pour i compris entre 1 et n, la matrice d'ordre n − 1 déduite de A en supprimant la première colonne et la ligne numéro i. Dans cette expression, on dit qu'on développe le déterminant suivant la première colonne. On note : det (A) = a11 a12 · · · a21 a22 · · · a1n a2n an1 an2 · · · ann .. . .. . ... .. . Opérations élémentaires ... 328 Les lignes d'une matrice A ∈ Mn (K) étant notées L1 , L2 , · · · , Ln , on écrira aussi : L1 L2 det (A) = det .. . Ln Théorème 13.4 Si Ai (λ) est la matrice déduite de A ∈ Mn (K) en multipliant sa ligne i par un scalaire λ, on a alors det (Ai (λ)) = λ det (A) , soit : L1 .. . Li−1 det λLi Li+1 . .. L1 .. . Li−1 = λ det Li Li+1 . .. Ln Ln Démonstration. On procède par récurrence sur n ≥ 1. Pour n = 1 c'est clair et pour n = 2, on a : λa λb c d = a b λc λd = λ (ad − bc) = λ det (A) Supposons le résultat acquis pour les matrices d'ordre n − 1 ≥ 2. Soient A d'ordre n et A = Ai (λ) déduite de A en multipliant sa ligne i par λ. On a alors : ′ det (A′ ) = (−1)i+1 λai,1 det (Ai,1 ) + n ∑ (−1)k+1 ak,1 det (A′k1 ) k=1 k̸=i la matrice A′k,1(, pour) k ̸= i, étant déduite de Ak,1 en multipliant une seule de ses lignes par λ. On a donc det A′k,1 = λ det (Ak,1 ) pour k ̸= i et det (A′ ) = λ det (A) . Corollaire 13.3 Pour tout A ∈ Mn (K) et tout scalaire λ, on a det (λA) = λn det (A) . Démonstration. En utilisant n fois le théorème précédent, on a : L1 λL1 λL2 λL2 det (λA) = det .. = λ det .. . . λLn λLn L1 L2 = · · · = λn det .. . . Ln Corollaire 13.4 Si A ∈ Mn (K) a une ligne nulle, on a alors det (A) = 0. Déterminant des matrices carrées 329 Démonstration. Supposons que la ligne i de A soit nulle. En désignant par A′ = Ai (λ) la matrice déduite de A en multipliant sa ligne i par λ = 0, on a A′ = A et det (A) = det (A′ ) = 0 det (A) = 0. Théorème 13.5 Le déterminant d'une matrice triangulaire (supérieure ou inférieure) est égal au produit de ses termes diagonaux, soit : n ∏ det (A) = aii i=1 Démonstration. Considérons tout d'abord le cas des matrices triangulaires inférieures. On procède par récurrence sur n ≥ 1. Pour n = 1 c'est clair et pour n = 2, on a : a 0 c d = ad − 0 · c = ad Supposons le résultat acquis pour les matrices triangulaires inférieures d'ordre n − 1 ≥ 2 et soit A triangulaire inférieure d'ordre n. La matrice A11 est triangulaire inférieure de diagonale a22 , · · · ann et pour i compris entre 2 et n, la matrice Ai1 est telle que sa première ligne est nulle, elle est donc de déterminant nul et : det (A) = a1,1 det (A1,1 ) = n ∏ aii i=1 Pour le cas des matrices triangulaires supérieures, le cas n = 1 est encore évident et le cas n = 2 se vérie par le calcul. Supposant le résultat acquis au rang n−1 ≥ 2, pour A triangulaire supérieure d'ordre n, La matrice A11 est triangulaire supérieure de diagonale a22 , · · · ann et pour i compris entre 2 et n, les coecients ai1 sont nuls de sorte que : det (A) = a1,1 det (A1,1 ) = n ∏ aii i=1 Exemple 13.1 Si A = In est la matrice identité, on a alors det (In ) = 1. Exemple 13.2 Si A = Di (λ) est une matrice de dilatation, on a alors det (Di (λ)) = λ. Exemple 13.3 Si A = Tij (λ) est une matrice de transvection, on a alors det (Tij (λ)) = 1. Théorème 13.6 Soient A, A′ , A′′ des matrices de lignes respectives Li , L′i , L′′i (pour i compris entre 1 et n) telles que Li = L′i = L′′i pour i ̸= k et L′′k = Lk + L′k où k est un indice compris entre 1 et n. On a : det (A′′ ) = det (A) + det (A′ ) soit : L1 .. . Lk−1 det Lk + L′k Lk+1 .. . Ln L1 .. . Lk−1 = det Lk Lk+1 . .. Ln L1 .. . Lk−1 + det L′k Lk+1 . .. Ln Opérations élémentaires ... 330 Démonstration. On procède par récurrence sur n ≥ 1. Pour n = 1 c'est clair et pour n = 2, il sut de calculer. Supposons le résultat acquis pour les matrices d'ordre n − 1 ≥ 2. Soient A, A′ , A′′ d'ordre n vériant les conditions du théorème. On a alors : ′′ det (A ) = (−1) k+1 (ak,1 + a′k1 ) det n ( ′′ ) ∑ ( ) Ak,1 + (−1)i+1 ai,1 det A′′i,1 i=1 i̸=k avec A′′k,1 = Ak,1 = A′k,1 et pour i ̸= k, les matrices Ai,1 , A′i,1 , A′′i1 vériant les hypothèses du théorème au rang n − 1 (avec des notations évidentes), donc : ( ( )) det (A′′ ) = (−1)k+1 ak,1 det (Ak,1 ) + a′k1 det A′k,1 n n ∑ ∑ ( ) + (−1)i+1 ai,1 det (Ai,1 ) + (−1)i+1 a′i,1 det A′i,1 i=1 i̸=k i=1 i̸=k = det (A) + det (A′ ) . Les théorèmes 13.4 et 13.6 se traduisent en disant que le déterminant est linéaire par rapport à chaque ligne. Théorème 13.7 Si A′ est la matrice déduite de A ∈ Mn (K) en permutant deux lignes, on a alors det (A′ ) = − det (A) , soit : det .. . Li .. = − det . Lj .. . .. . Lj .. . Li .. . où les pointillés indiquent les lignes inchangées. Démonstration. On procède par récurrence sur n ≥ 2. Pour n = 2, il sut de calculer. Supposons le résultat acquis pour les matrices d'ordre n − 1 ≥ 2. La permutation de deux lignes se faisant avec un nombre impair de permutations de deux lignes successives (par exemple la permutation (2, 4) se fait par les trois permutations (2, 3, 4) → (3, 2, 4) → (3, 4, 2) → (4, 3, 2)), il sut de considérer le cas où j = i + 1 (montrer ce point rigoureusement). On se donne donc A d'ordre n et A′ est déduite de A(∈ M)n (K) en permutant les lignes i et i + 1. Pour k ̸= i et k ̸= i + 1, on a a′k1 = ak,1 et det A′k,1 = − det (Ak,1 ) par hypothèse de récurrence, et avec a′i,1 = a(i+1),1 , a′(i+1),1 = ai,1 , A′i,1 = A(i+1),1 , A′(i+1),1 = Ai,1 , on déduit que : ( ) det (A′ ) = (−1)i+1 a(i+1),1 det A(i+1),1 + (−1)i ai,1 det (Ai,1 ) n ∑ − (−1)k+1 ak,1 det (Ak,1 ) = − det (A) k=1 k̸=i,k̸=i+1 Le résultat précédent se traduit en disant que le déterminant est une forme alternée sur les lignes. Déterminant des matrices carrées 331 Corollaire 13.5 Si la matrice A ∈ Mn (K) a deux lignes identiques, alors det (A) = 0. Démonstration. Si Li = Lj avec i ̸= j, alors matrice A′ déduite de A en permutant ces deux lignes est égale à A et det (A) = − det (A) , donc det (A) = 0 puisque K est de caractéristique diérente de 2. Corollaire 13.6 On ne change pas la valeur d'un déterminant si on ajoute à une ligne une combinaison linéaire des autres lignes. Démonstration. Il sut de montrer le résultat quand on ajoute à la ligne Li la ligne Lj multipliée par un scalaire λ où i ̸= j. Dans ce cas, on a : .. . Li + λLj .. det . Lj .. . = det .. . Li .. + λ det . Lj .. . .. . Lj .. = det . Lj .. . .. . Li .. . Lj .. . où les pointillés indiquent les lignes inchangées. De ce qui précède, on peut déduire qu'en eectuant des opérations élémentaires sur les lignes d'une matrice A, on peut se ramener à une matrice triangulaire supérieure de même déterminant que celui de A. Exercice 13.3 Calculer le déterminant de la matrice réelle : 5 4 2 1 2 3 1 −2 A= −5 −7 −3 9 1 −2 −1 4 en eectuant des opérations élémentaires. Solution 13.3 Les opérations L2 → L2 − 5 0 det (A) = 0 0 11 =5 55 4 7 5 −3 14 − 5 7 −3 −14 2 1 L1 , L3 → L3 + L1 , L4 → L4 − L1 donnent : 5 5 2 1 7 1 12 − 5 5 5 = 5 −3 −1 10 14 7 19 − − 5 5 5 1 −12 7 1 −1 10 = −3 5 −7 19 −14 3 7 Puis les opérations L2 → L2 + L1 , L3 → L3 + 1 −12 4 34 0 − 7 7 0 −5 −5 = 2 · 19 = 38 1 −12 −1 10 −7 19 14 L1 = L3 + 2L1 donnent : 7 7 1 det (A) = 5 1 12 − 5 5 −1 10 7 19 − 5 5 = 1 2 −2 17 ·7· ·5 −1 −1 5 7 Opérations élémentaires ... 332 Exercice 13.4 Développer le déterminant de la matrice réelle suivante sous la forme d'un produit de facteurs linéaires en x : x + 2 2x + 3 3x + 4 A (x) = 2x + 3 3x + 4 4x + 5 . 3x + 5 5x + 8 10x + 17 Solution 13.4 Les opérations L3 → L3 − L2 , L2 → L2 − L1 (dans l'ordre indiqué) donnent : det (A (x)) = x + 2 2x + 3 3x + 4 x+1 x+1 x+1 x + 2 2x + 4 6x + 12 x + 2 2x + 3 3x + 4 1 1 1 = (x + 1) (x + 2) 1 2 6 puis L3 → L3 − L2 donne : x + 2 2x + 3 3x + 4 1 1 1 det (A (x)) = (x + 1) (x + 2) 0 1 5 ( ) 1 1 2x + 3 3x + 4 = (x + 1) (x + 2) (x + 2) − 1 5 1 5 = (x + 1) (x + 2) (4 (x + 2) − (7x + 11)) = − (x + 1) (x + 2) (3x + 3) = −3 (x + 1)2 (x + 2) Les théorèmes 13.4 et 13.6 et le corollaire 13.6 se traduisent aussi par le résultat suivant. Corollaire 13.7 Pour toute matrice A ∈ Mn (R) , toute matrice de dilatation Di (λ) et toute matrice de transvection Tij (λ) , on a : { det (Di (λ) A) = det (Di (λ)) det (A) = λ det (A) det (Tij (λ) A) = det (Tij (λ)) det (A) = det (A) En utilisant le théorème 13.3, on obtient le résultat suivant. Théorème 13.8 Pour toute matrice inversible A et toute matrice B dans Mn (K) , on a det (AB) = det (A) det (B) . Démonstration. La matrice A étant inversible s'écrit A = P1 · · · Pr Dn (λ) Q1 · · · Qs , où les matrices Pi et Qj sont des matrices de transvection et la matrice Dn (λ) une matrice de dilatation. Une utilisation répétée du corollaire précédent nous donne : det (A) = det (Dn (λ)) = λ et pour toute matrice B : det (AB) = det (Dn (λ)) det (B) = det (A) det (B) Le résultat précédent est en fait valable pour toutes matrices A et B. Le cas où la matrice A n'est pas inversible se traite en utilisant le résultat suivant. Déterminant des matrices carrées 333 Théorème 13.9 Une matrice A ∈ Mn (K) est inversible si, et seulement si, son déterminant est non nul et dans ce cas, on a det (A−1 ) = 1 . det (A) Démonstration. Si A est inversible d'inverse A−1 , on AA−1 = In et le théorème précédent nous dit que det (A) det (A−1 ) = det (In ) = 1, donc det (A) ̸= 0 et det (A−1 ) = 1 . det (A) La réciproque se démontre par récurrence sur n ≥ 1. Pour n = 1, le résultat est évident car det (a) = a pour tout scalaire a. Supposons le résultat acquis pour les matrices d'ordre n − 1 ≥ 1 et soit A d'ordre n telle que det (A) ̸= 0. La première colonne de A est nécessairement non nulle (dénition du déterminant) et on peut reprendre la démonstration du théorème 13.3 pour trouver des matrices de transvection P1 , · · · , Pk telles que : 1 α12 · · · α1n 0 α22 · · · α2n Pk · · · P1 A = .. .. . . . . . .. . 0 αn2 · · · αnn ) ( 1 α = 0 B où α est un vecteur ligne à n − 1 composantes et B une matrice carrée d'ordre n − 1. Comme det (Pj ) = 1 pour tout j compris entre 1 et k, on a : det (A) = det (Pk · · · P1 A) = det (B) et det (B) ̸= 0. La matrice B est)donc inversible, ce qui implique que A est aussi inversible. En ( 1 0 eet, en posant A′ = où d ∈ Mn−1,1 (K) est à préciser, on a : −1 d B ( )( ) ( ) 1 0 1 0 1 0 ′ AA = = c B d B −1 c + Bd In−1 et : ( ′ AA= 1 0 d B −1 )( 1 0 c B ) ( = 1 0 d + B −1 c In−1 ) soit AA′ = A′ A = In en prenant d = −B −1 c. La matrice A est donc inversible. Théorème 13.10 Pour toutes matrices A et B dans Mn (K) , on a : det (AB) = det (BA) = det (A) det (B) Démonstration. Il reste à traiter le cas où la matrice A n'est pas inversible. Dans ce cas la matrice AB ne peut être inversible (sinon, en notant C l'inverse de AB, on a (AB) C = In , soit A (BC) = In et A est inversible) et on a : 0 = det (AB) = det (A) det (B) = 0 · det (B) L'égalité det (BA) = det (B) det (A) donne det (AB) = det (BA) . On peut remarquer que det (AB) = det (BA) alors qu'en général AB ̸= BA. La multiplication à droite par une matrice élémentaire se traduisant par une action particulière sur les colonnes, on déduit du théorème précédent et du théorème 13.2 les propriétés suivantes du déterminant. Opérations élémentaires ... 334 Corollaire 13.8 Si A′j (λ) est la matrice déduite de A ∈ Mn (K) en multipliant sa colonne j ( ) par un réel λ, on a alors det A′j (λ) = λ det (A) . Si A ∈ Mn (K) a une colonne nulle, alors det (A) = 0. Pour l'instant, le déterminant d'une matrice se calcule en utilisant la première colonne de cette dernière. En réalité, on peut aussi utiliser la première ligne et nous en déduirons que cette première ligne ou colonne peut être remplacée par n'importe quelle autre. Précisément, on a les résultats suivants. Théorème 13.11 Pour toute matrice A dans Mn (K) , on a det ( t A) = det (A) . Démonstration. Comme d'habitude c'est trivial pour n = 1. On suppose donc que n ≥ 2. Si A n'est pas inversible, il en est de même de sa transposée (si t A est inversible, il en est de même de A = t ( t A)) et on a alors det ( t A) = det (A) = 0. Si A est inversible, elle s'écrit : A = P1 · · · Pr Dn (λ) Q1 · · · Qs où les Pi , Qj sont des matrices de transvection et λ = det (A) , ce qui donne : t A = t Qs · · · t Q1 t Dn (λ) t Pr · · · t P1 les transposées de matrices élémentaires étant des matrices élémentaires de même type avec t Dn (λ) = Dn (λ) , ce qui donne : det ( t ) A = det (Dn (λ)) = λ = det (A) De ce résultat, on déduit le développement du déterminant suivant la première ligne (pour n ≥ 2) : det (A) = det ( t n ) ∑ A = (−1)j+1 a1,j det (A1,j ) j=1 où A1,j est la matrice carrée d'ordre n − 1 déduite de A en supprimant la ligne 1 et la colonne j. On en déduit alors les propriétés suivantes relatives aux colonnes, ces propriétés étant analogues à celles obtenues pour les lignes. Corollaire 13.9 Si A′ est la matrice déduite de A ∈ Mn (K) en permutant deux colonnes, on a alors det (A′ ) = − det (A) . Soient A, A′ , A′′ des matrices de colonnes respectives Cj , Cj′ , Cj′′ (pour j compris entre 1 et n) telles que Cj = Cj′ = Cj′′ pour j ̸= k et Ck′′ = Ck + Ck′ où k est un indice compris entre 1 et n. On a : det (A′′ ) = det (A) + det (A′ ) On ne change pas la valeur d'un déterminant si on ajoute à une colonne une combinaison linéaire des autres colonnes. Ce corollaire se traduit en disant que le déterminant est linéaire par rapport à chaque colonne et que c'est une forme n-linéaire alternée sur les colonnes. En général, pour calculer un déterminant, on essayera d'eectuer des opérations élémentaires sur les lignes ou les colonnes dans le but de faire apparaître un maximum de coecients nuls, ce qui facilitera le calcul du déterminant de la matrice obtenue. De tout ce qui précède, on déduit les diérentes formes de développement d'un déterminant suivant une ligne ou une colonne (pour n ≥ 2). Déterminant des matrices carrées 335 Théorème 13.12 Pour toute matrice A ∈ Mn (K) , on a : det (A) = n ∑ (−1)i+j ai,j det (Ai,j ) (1 ≤ j ≤ n) i=1 (développement suivant la colonne j ) et det (A) = n ∑ (−1)i+j ai,j det (Ai,j ) (1 ≤ i ≤ n) j=1 (développement suivant la ligne i) où Aij est la matrice carrée d'ordre n − 1 déduite de A en supprimant la ligne i et la colonne j. Démonstration. Pour j = 1, c'est la dénition première du déterminant et pour i = 1 c'est une conséquence immédiate de det ( t A) = det (A) . Fixons la colonne j ≥ 2 et notons (ei )1≤i≤n la base canonique de Kn . n ∑ La colonne Cj s'écrit Cj = aij ei et en utilisant la linéarité du déterminant par rapport à i=1 la j -ième colonne, on a : det (A) = n ∑ aij det (Bi,j ) i=1 où Bij est la matrice déduite de A en remplaçant Cj par ei . En permutant la colonne j avec la colonne j − 1, puis j − 1 avec j − 2, · · · , 2 avec 1 et ensuite la ligne i avec la ligne i − 1, i − 1 avec i − 2, · · · , 2 avec 1 (on fait rien pour i = 1) on aboutit à : 1 0 .. . ai1 a11 .. . ··· ··· .. . det (Bi,j ) = (−1)i+j 0 ai−1,1 · · · 0 ai+1,1 · · · i+j = (−1) .. . .. . 0 an,1 .. . ··· ai,j−1 a1,j−1 .. . ai,j+1 a1,j+1 .. . ··· ··· .. . ai−1,j−1 ai−1,j+1 · · · ai+1,j−1 ai+1,j+1 · · · .. . .. . an,j−1 an,j+1 .. . ··· ain a1n .. . ai−1,n ai+1,n .. . an,n det (Ai,j ) et on a le résultat annoncé. On procède de manière analogue pour la deuxième formule. Avec les notations du théorème, on dit que det (Ai,j ) est le mineur d'indice (i, j) de la matrice A et que (−1)i+j det (Ai,j ) est le cofacteur d'indice (i, j) de A. Exercice 13.5 En admettant que 1700, 1020, 1122 et 1309 sont tous divisibles par 17, montrer sans le calculer que le déterminant réel : D= est un entier divisible par 17. 1 1 1 1 7 0 1 3 0 2 2 0 0 0 2 9 Opérations élémentaires ... 336 Solution 13.5 On ne change pas la valeur de ce déterminant si on remplace la colonne 4 par C4 + 10C3 + 102 C2 + 103 C1 , ce qui donne : D= 1 1 1 1 7 0 1 3 0 2 2 0 1700 1020 1122 1309 1 1 = 17 1 1 7 0 1 3 0 100 2 60 2 66 0 77 = 17q avec q entier puisque tous les coecients du déterminant sont entiers. Exercice 13.6 Soient n ≥ 2 un entier et α1 , α2 , · · · , αn des scalaires. 1. Calculer le déterminant ∆ (α1 , · · · , αn ) de la matrice : 1 1 α1 α 2 V (α1 , · · · , αn ) = .. .. . . n−1 n−1 α1 α2 1 αn .. ... .. n−1 · · · αn ··· ··· Une telle matrice est dite de Vandermonde. 2. À quelle condition une telle matrice est-elle inversible ? Solution 13.6 Pour n = 2, on a : ∆ (α1 , α2 ) = 1 1 α1 α2 = α2 − α1 1. Le calcul de ∆ (α1 , · · · , αn ) se fait par récurrence sur n ≥ 2. En retranchant, pour i = n, n − 1, · · · , 2 à la ligne i la ligne i − 1 multipliée par α1 , on obtient : ∆ (α1 , · · · , αn ) = 1 0 ··· ··· 1 α2 − α1 .. . .. . ... 0 α2n−2 (α2 − α1 ) · · · = α2 − α1 α2 (α2 − α1 ) α3 − α1 α3 (α3 − α1 ) .. . .. . ··· ··· ... α2n−2 (α2 − α1 ) α3n−2 (α3 − α1 ) · · · 1 αn − α1 .. . αnn−2 (αn − α1 ) αn − α1 αn (αn − α1 ) .. . αnn−2 (αn − α1 ) soit : ( ∆ (α1 , · · · , αn ) = n ∏ ) (αk − α1 ) k=2 ( = n ∏ k=2 1 α2 .. . ··· ··· ... α2n−2 · · · ) 1 αn .. . αnn−2 (αk − α1 ) ∆ (α2 , · · · , αn ) Déterminant des matrices carrées 337 et par récurrence : det (An ) = n ∏ n ∏ (αk − α1 ) k=2 = (αj − αi ) 2≤i<j≤n n ∏ (αj − αi ) . 1≤i<j≤n 2. Cette matrice est inversible si, et seulement si, les αi sont deux à deux distincts. Exercice 13.7 Calculer le déterminant de la matrice réelle : 1 2n . . . .. . · · · nn ··· ··· 1 1 2 22 An = .. .. . . n n2 Solution 13.7 On a : 1 1 ··· 1 2 ··· .. .. . . . . . det (An ) = n! 1 n−1 2 .. . = n!∆ (1, 2, · · · , n) 1 n · · · nn−1 n n ∏ ∏ ∏ = n! (i − j) = n! (i − 1)! = i! i=2 1≤j<i≤n Exercice 13.8 Soit An = a1 c1 0 b2 a2 c2 0 .. . 0 ... ... ··· ... i=2 ··· 0 .. . ... ... 0 bn−1 an−1 cn−1 0 bn an une matrice tridiagonale d'ordre n ≥ 3. Pour tout entier k compris entre 1 et n, on désigne par Dk le déterminant de la matrice d'ordre k formée des k premières lignes et k premières colonnes de An (les Dk sont les déterminants extraits principaux de An ). 1. Exprimer, pour tout k compris entre 3 et n, Dk en fonction de Dk−1 et Dk−2 . 2. Calculer le déterminant de la matrice réelle : An = 2 1 0 22 5 1 0 .. . 0 Solution 13.8 ... ... ··· ... ··· ... ... 0 .. . 0 (n − 1)2 2n − 1 1 2 0 n 2n + 1 Opérations élémentaires ... 338 1. En développant Dk suivant la dernière ligne on a : Dk = a k a1 c1 0 b2 a2 c2 0 .. . 0 ... ... ··· ... ··· 0 .. . ... ... 0 − bk bk−2 ak−2 ck−2 0 bk−1 ak−1 a1 c1 b2 a2 0 .. . 0 ... ... ··· 0 ... ... ··· 0 ck−3 0 ... .. . bk−2 ak−2 0 0 bk−1 ck−1 = ak Dk−1 − bk ck−1 Dk−2 . Ce qui donne, avec les valeurs initiales D1 = a1 et D2 = a1 a2 − b2 c1 , un algorithme de calcul de Dn . 2. On a : Dn = (2n + 1) Dn−1 − n2 Dn−2 avec les valeurs initiales D1 = 2, D2 = 6. En calculant D3 et D4 on conjecture que Dn = (n + 1)! Ce qui se montre par récurrence sur n ≥ 2. C'est vrai pour n = 2 et le supposant acquis jusqu'au rang n − 1 ≥ 2, on a : Dn = (2n + 1) n! − n2 (n − 1)! = (n + 1)! 13.3 Méthode des pivots de Gauss Pour A ∈ Mn (K) et b ∈ Kn , on s'intéresse aux solutions dans K du système linéaire de n équations à n inconnues Ax = b. Au paragraphe 14.2, on étudie de manière plus générale les systèmes linéaires de n équations à m inconnues. En eectuant des opérations élémentaires sur les lignes du système linéaire Ax = b, on pourra le transformer en un système triangulaire supérieur Rx = c. Du fait qu'une permutation de lignes change le déterminant de signe et que d'ajouter un multiple d'une ligne à une autre ne change pas ce dernier, on a : n ∏ det (A) = det (R) = ± rii i=1 L'intérêt de cette méthode est surtout pédagogique, dans la pratique il est préférable d'utiliser la méthode LR quand cette dernière peut s'appliquer, ou la méthode de Gauss-Jordan. On note ici Li la ligne numéro i du système linéaire Ax = b. Etape 0 On se ramène à un système tel que a11 non nul. Si pour tout i = 1, 2, · · · , n, on a ai1 = 0, alors det (A) = 0 et c'est ni. Sinon, il existe i > 1 tel que ai1 soit non nul, et en permutant les lignes 1 et i (si i = 1, on ne fait rien), on se ramène à un système A(1) x = b(1) , avec a(1) 11 non nul. (1) Le coecient a11 est le premier )pivot. ( On a alors det (A) = ± det A(1) , avec le signe moins si et seulement si il y a une permutation des lignes 1 et i avec i > 1. Etape 1 Elimination de x1 dans les équations 2, · · · , n. On eectue pour cela les transformations élémentaires suivantes : (1) (1) Li 7→ (1) Li − ai1 (1) a11 (1) L1 (i = 2, 3, · · · , n) Méthode des pivots de Gauss 339 et après une éventuelle permutation des lignes 2 et i > 3, on obtient le système A(2) x = b(2) , avec a(2) 22 non nul où : (1) (1) (1) A(2) a12 · · · (2) a22 · · · a11 0 = . .. .. . (2) 0 an2 a1n (2) a2n . . . .. . (2) · · · ann Le coecient a(2) 22 est le deuxième pivot. Etape k Elimination de xk dans les équations k + 1, · · · , n. À la n de l'étape k − 1, on a obtenu le système A(k) x = b(k) , avec : A (k) (1) (1) a11 0 . .. = 0 . .. (1) a1n (2) a2n . . . .. . (k) · · · akn . . . .. . ... ... a1k · · · (2) a2k · · · ··· 0 akk ··· 0 ank .. . ... 0 (1) a12 · · · (2) a22 · · · .. . (k) .. . (k) ··· (k) ann et a(k) kk non nul. Le coecient a(k) kk est le pivot numéro k. On eectue alors les transformations élémentaires suivantes : (k) (k) Li 7→ (k) Li − aik (k) akk (k) Lk (i = k + 1, · · · , n) puis une éventuelle permutation des lignes k + 1 et j > k + 1 pour se ramener à a(k+1) k+1,k+1 non nul. Au bout de n−1 étapes, on est donc(ramené à un système triangulaire supérieur A(n) x = b(n) . ) p De plus, on a det (A) = (−1) det A(n) , où (p est)le nombre de permutations qui ont été nécessaires pour avoir des pivots non nuls et det A(n) est le produit des pivots. Remarque 13.5 Pour éviter de faire une division par un nombre trop petit, dans le choix du pivot, on aura intérêt, à l'étape k − 1, à permuter la ligne k avec la ligne j ≥ k telle que : |ajk | = max {|aik | | i = k, · · · , n} de manière à avoir le pivot le plus grand possible en valeur absolue. Si ce maximum est trop petit, alors le système est numériquement dégénéré. Exercice 13.9 Donner un ordre de grandeur du nombre d'opérations élémentaires que nécessite la méthode de Gauss. Solution 13.9 Les opérations (k) (k) Li 7→ (k) Li − aik (k) akk (k) Lk (i = k + 1, · · · , n) , à l'étape numéro k, demandent (n − k) divisions, (n − k)2 multiplications et (n − k)2 additions. n−1 ∑ n (n − 1) divisions et un nombre d'additions et de 2 k=1 n−1 ∑ 2n(n − 1) (2n − 1) multiplications égal à 2 (n − k)2 = . 6 k=1 Ce qui donne un total de n−k = Opérations élémentaires ... 340 n(n − 1)(4n + 1) 2n3 Il nous faut donc v opérations élémentaires pour aboutir à un système 6 3 triangulaire supérieur. Puis la résolution de ce dernier système nécessite n divisions et n (n − 1) additions et multiplications, soit n2 opérations élémentaires. En résumé, la résolution d'un système de n équations à n inconnues par la méthode de Gauss va nécessiter un nombre d'opérations qui est un O (n3 ) . 13.4 Décomposition LR (méthode de Crout) Dénition 13.4 On appelle sous-matrices principales d'une matrice trices : A ∈ Mn (K) les ma- Ak = ((aij ))1≤i,j≤k , (k = 1, · · · , n) Les déterminants principaux sont les ∆k = det (Ak ) . Si tous les déterminants principaux de A sont non nuls alors, dans la méthode de Gauss, tous les pivots seront non nuls et il ne sera pas nécessaire de faire des permutations de lignes (on ne s'occupe pas de la taille des pivots). Réciproquement, si tous les pivots sont non nuls, alors tous les déterminants principaux sont non nuls. Exemple 13.4 Si A est une matrice réelle ou complexe à diagonale strictement dominante alors toutes les sous matrices principales de A sont aussi à diagonale strictement dominante et donc inversibles. On en déduit donc que pour A à diagonale strictement dominante, la méthode de Gauss ne nécessite pas de permutations de lignes. Exemple 13.5 Si A est une matrice réelle symétrique dénie positive, il en est de même de toutes les sous matrices principales de A. Donc, pour A symétrique dénie positive, la méthode de Gauss ne nécessite pas de permutations de lignes. La méthode des pivots de Gauss est basée sur les résultats suivants. Lemme 13.3 Soit A ∈ Mn (K) de coecient a11 non nul. Il existe des matrices de transvection P1 , · · · , Pr telles que : a11 a12 · · · a1n 0 a(1) · · · a(1) 22 2n Pr · · · P1 A = .. .. . . .. . . . . (1) (1) 0 an2 · · · ann Démonstration. En reprenant les notations du paragraphe 13.3 le passage de la matrice A, de premier terme a11 non nul à la matrice unité A(2) se fait en multipliant à gauche la matrice A par les matrices de transvection : Pi = Ti1 (λi1 ) (2 ≤ i ≤ n) où on a noté : C'est-à-dire que : (1) a λi1 = − i1 a11 a11 a12 · · · a1n 0 a(1) · · · a(1) 22 2n Pn−1 · · · P1 A = .. .. . . . . . .. . (1) (1) 0 an2 · · · ann Décomposition LR (méthode de Crout) Remarque 13.6 On a rg (A) = 1 + rg 341 ( ) B (1) , en notant : (1) (1) ··· a2n 0 ··· 1 0 ··· ··· a22 . . . .. B (1) = ... . (1) (1) an2 · · · ann On a Pn−1 · · · P1 = F1 avec : 1 λ21 .. F1 = . λn−1,1 λn1 .. . ... 0 ··· 0 ··· 0 0 . . . .. . 1 0 0 1 La matrice F1 est une matrice de Frobenius. Dénition 13.5 On appelle matrice de Frobenius une matrice carrée d'ordre n qui ne dière de l'identité que par une colonne (ou une ligne). Théorème 13.13 Toute matrice A ∈ GLn (K) peut être réduite à la forme triangulaire supé- rieur en la multipliant à gauche par des matrices de transvection ou de dilatation de la forme Di (−1) . Démonstration. C'est la transcription matricielle de l'algorithme de Gauss. On peut aussi raisonner par récurrence sur n ≥ 1 en utilisant le lemme précédent. En multipliant au besoin la matrice A par une matrice de permutation (produit d'une matrice de dilatation par trois matrices de transvection) on se ramène au cas où le coecient a11 est non nul. On conclut alors facilement en utilisant le lemme précédent et l'hypothèse de récurrence. Dans l'hypothèse où tous les déterminants principaux de la matrice A sont non nuls (on n'effectue pas de permutations de lignes dans la méthode de Gauss) le résultat précédent s'exprime en disant qu'il existe des matrices de Frobenius de la forme : Fk = n ∏ Tik (λik ) i=k+1 (k) (λik = − aik (k) akk avec les notations du paragraphe 13.3) telles que : Fn−1 · · · F1 A = R où R est une matrice triangulaire supérieure. La matrice produit Fn−1 · · · F1 est triangulaire inférieure à diagonale unité. En notant L = (Fn−1 · · · F1 )−1 on a alors la décomposition A = LR avec L triangulaire inférieure à diagonale unité et R triangulaire supérieure. Théorème 13.14 Une matrice inversible A possède une décomposition A = LR, avec L triangulaire inférieure à diagonale unité et R triangulaire supérieure si et seulement si tous les Opérations élémentaires ... 342 déterminants principaux de A sont non nuls. Une telle décomposition est unique et les coecients diagonaux de R sont donnés par : r11 = a11 det(Ak ) (k = 2, · · · , n) rkk = det (Ak−1 ) où les Ak désignent les sous matrices principales de A. Démonstration. Si tous les déterminants principaux de A sont non nuls on a vu que la matrice A admet une décomposition LR. Pour k = 1, · · · , n, on peut décomposer les matrices A, L et R par blocs de la façon suivante : ( A= ) Ak B k C k Dk ( , L= Lk 0 Ek Gk ) ( , R= Rk Hk 0 Mk ) où Ak , Lk et Rk désignent respectivement les sous matrices principales de A, L et R. Le produit A = LR donne alors Ak = Lk Rk et : det (Ak ) = det (Lk ) det (Rk ) = det (Rk ) = k ∏ rii i=1 L'unicité de la décomposition LR provient du fait que si A = LR et A = L′ R′ avec L, L′ triangulaires inférieures de diagonale unité et R, R′ triangulaires supérieures, alors L′−1 L = R′ R−1 est à la fois triangulaire inférieure et triangulaire supérieure de diagonale unité et c'est alors nécessairement l'identité. Inversement si la matrice inversible A admet une décomposition LR, alors R est aussi inversible et la décomposition par bloc faite précédemment nous montre que tous les déterminants principaux de A sont non nuls. Pour obtenir pratiquement de la décomposition LR on peut procéder par coecients indéterminés, c'est-à-dire qu'on écrit A = LR, on eectue le produit et on identie, ce qui donne en eectuant les calculs dans l'ordre indiqué : r1j = a1j (j = 1, · · · , n) a Li1 = i1 (i = 2, · · · , n) a11 puis, pour k = 2, · · · n : rkj = akj − k−1 ∑ Lki rij (j = k, · · · , n) i=1 et : ( aik − Lik = k−1 ∑ j=1 rkk ) Lij rjk (i = k + 1, · · · n) avec Lii = 1. En utilisant la décomposition A = LR, le système Ax = b équivaut aux deux systèmes triangulaires : { Ly = b (triangulaire inférieur) Rx = y (triangulaire supérieur) Décomposition LD t L des matrices symétriques réelles 343 La méthode obtenue est appelée méthode de Crout. Cette méthode est intéressante pour résoudre en parallèle plusieurs systèmes linéaires de même matrice A, car la décomposition LR ne fait pas intervenir le second membre. En utilisant la décomposition A = LR, on a A−1 = R−1 L−1 et il sut alors d'utiliser des procédures d'inversion des matrices triangulaires. 13.5 Décomposition LD tL des matrices symétriques réelles On suppose dans ce paragraphe que la matrice A est inversible, symétrique réelle et qu'il n'y a pas de permutations dans la méthode de Gauss. Dans la décomposition LR de A, on a det (R) = det (A) ̸= 0, donc tous les termes diagonaux de R sont non nuls et on peut écrire R sous la forme R = DR′ , où D est diagonale et R′ est triangulaire supérieure à diagonale unité (il sut de diviser chaque ligne de R par son terme diagonal). On a donc A = LDR′ , puis en écrivant que t A = A et en utilisant le fait que la décomposition LR est unique, on déduit que R′ = t L. On a donc pour toute matrice symétrique A, dont tous les déterminants principaux sont non nuls, la décomposition unique A = LD t L, la matrice L étant triangulaire inférieure et à diagonale unité et la matrice D diagonale. Remarque 13.7 Cette décomposition nous donne un moyen de calculer la signature de la matrice symétrique réelle A. L'égalité A = LD t L avec L inversible se traduit en disant que les matrices A et D sont congruentes et le théorème de Sylvester nous dit que deux matrices congruentes ont même signature. On a donc : sign (A) = sign (D) = (p, n − p) où p est le nombre de termes strictement positifs de la diagonale de D. Remarque 13.8 La matrice A est dénie positive si et seulement si tous les coecients de D sont strictement positifs. Comme pour la décomposition LR, on trouve les coecients de L et D par identication, ce qui donne, d1 = a11 et pour i = 2, · · · , n : ( ) j−1 ∑ aij − Lik dk Ljk k=1 Lij = dj ) ( i−1 ∑ 2 di = aii − Lik dk (j = 1, · · · , i − 1) k=1 13.6 Décomposition de Cholesky des matrices symétriques réelles dénies positives L'espace vectoriel Rn est muni de sa structure euclidienne canonique. Dans le cas où la matrice A est symétrique dénie positive, la décomposition LD t L permet de montrer le résultat suivant. Théorème 13.15 Une matrice réelle A est symétrique dénie positive si et seulement si il existe une matrice B triangulaire inférieure et inversible telle que A = B t B. De plus une telle décomposition est unique si on impose la positivité des coecients diagonaux de la matrice B. Opérations élémentaires ... 344 Démonstration. Si A est symétrique dénie positive, dans la décomposition LD t L, on a alors di > 0 pour tout i = 1, · · · , n. On peut donc écrire D = D′2 et, en posant√B = LD′ , on a A = B t B avec B triangulaire inférieure, la diagonale de B étant formée des ± di . Inversement, si A = B t B, alors A est symétrique et pour tout vecteur x non nul, on a : ⟨ ⟩ ⟨ ⟩ ⟨Ax | x⟩ = B t Bx | x = t Bx | t Bx > 0, puisque B est inversible. Le calcul eectif des coecients de B se fait par identication ce qui donne : ( ) j−1 ∑ aij − bik bjk k=1 bij = (j = 1, · · · , i − 1) , bjj i−1 ∑ b2ii = aii − b2ik , (i = 1, · · · , n) k=1 Le nombre d'opérations, dans la décomposition de Cholesky est un O (n3 ) . En eet, il y a n racines carrées à calculer, n ∑ i−1= i=1 n ∑ i=1 ( i−1+ i−1 ∑ j=1 ) j−1 n (n − 1) divisions 2 ( ) (i − 1) (i − 2) = i−1+ 2 i=1 n ∑ i (i − 1) additions = 12 n ∑ i=1 et autant de multiplications. Ce qui donne un total Le déterminant de A se calcule avec : det (A) = n (2n2 + 3n + 1) opérations. 6 b ∏ b2ii i=1 La résolution du système Ax = e se ramène à la résolution de deux systèmes triangulaires. Pour calculer l'inverse de A il sut d'inverser la matrice triangulaire B. 13.7 Méthode d'élimination de Gauss-Jordan pour les systèmes de Cramer On suppose ici que A ∈ GLn (K) . La méthode de Gauss-Jordan est une variante de la méthode de Gauss. Elle consiste à se ramener à un système diagonal, à l'aide de transformations élémentaires. À l'étape k, on ne se contente pas seulement d'éliminer le coecient de xk dans les lignes k + 1 à n, mais on l'élimine aussi dans les lignes du dessus soit 1 à k − 1. Ce qui donnera au bout de n étapes un système diagonal. Méthode d'élimination de Gauss-Jordan pour les systèmes de Cramer Description de la étape du calcul ( kème départ dans la situation suivante : x1 + · 1≤k ≤n (k) · xk−1 (k) (k) +akn xn (k) · · = (k) +ak+1,k xk + · · · · · (k) +ank xk + · · · · (k) +a1n xn = b1 · · · (k) (k) +ak−1,n xn = bk−1 +··· +akk xk ) À la kème étape, on est au (k) +a1k xk + · · · · · (k) +ak−1,k xk + · · · · 345 (k) bk (k) +ak+1,n xn = bk+1 · · · (k) (k) +ann xn = bn On peut supposer que a(k) kk est le pivot maximum, sinon, il sut de permuter avec une des lignes suivantes. On commence par extraire xk de la k ème équation : ( xk = (k) (k) (k) bk − ak,k+1 xk+1 − · · · − akn xn ) (k) ak,k que l'on reporte ensuite dans les autres équations, ce qui donne : x1 + · (k+1) · · xk−1 xk +a1k+1 xk+1 + · · · · · (k+1) +ak−1,k+1 xk+1 + · · · (k+1) +ak,k+1 xk+1 +··· (k+1) · · · +ak+1,k+1 xk+1 + · · · · · (k+1) +ank+1 xk+1 + · · · avec, pour j = k + 1, · · · , n : (k) (k+1) akj = akj (k) (k+1) (k+1) +a1n xn = b1 · · · (k+1) (k+1) +ak−1,n xn = bk−1 (k+1) +akn (k+1) , akk = bk (k) akk et, pour i ∈ {1, · · · , n} − {k} , j ∈ {k + 1, · · · , n} : (k+1) aij (k) (k) (k+1) = aij − aik akj (k+1) , bi (k) (k) (k+1) = bi − aik bk On obtient alors directement la solution, après la nème étape : (n) x1 = b1 . . (n) xn = bn (k+1) +ak+1,n xn = bk+1 · · · (k+1) (k+1) +ann xn = bn (k) (k+1) bk (k+1) xn = bk 346 Opérations élémentaires ...