Interdisciplinarité Mathématiques – Sciences Physiques dans les

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Interdisciplinarité Mathématiques – Sciences Physiques dans les
Interdisciplinarité Mathématiques
– Sciences Physiques dans les
nouveaux programmes de
Seconde
Groupe IREM mathématiques et sciences physiques au lycée
Gabriel Birague, Michèle Fauré, Pierre Lopez, Monique Mandleur, Monique Sosset
Rédacteurs : Monique Mandleur, Monique Sosset, avec la collaboration de Pierre Lopez.
Introduction :
Professeurs de sciences physiques en classe de seconde, nous avons mis en place
depuis l'année 2000-2001 les nouveaux programmes. Comme le dit le texte officiel, des
thèmes du programme de physique mettent en jeu certaines notions mathématiques,
notamment la partie « Exploration de l’espace ». Plusieurs difficultés rencontrées, nous
semblent liées à l'état des connaissances mathématiques de nos élèves. Nous en avons
sélectionné quelques exemples des difficultés rencontrées, et nous nous sommes efforcés de
préciser les différents moments où elles se situent dans l’année.
L’organisation du travail en classe de sciences physiques se fait sur la base d'heures de
travaux pratiques en groupes et de cours en classe entière. On ne saurait trop souligner
l’importance des séances de travaux pratiques. En effet, l’organisation en groupes d’une part,
et d’autre part le fait que les élèves soient en situation d’expérimentation, avec du matériel à
leur disposition, font des travaux pratiques des moments privilégiés d’apprentissage. Souvent,
c’est au cours de ceux-ci que les élèves vont appréhender l’essentiel du cours. Or il faut savoir
qu’en sciences physiques, les contenus des travaux pratiques sont planifiés à l’avance. En
effet, pour faciliter le travail des personnels de laboratoire, chaque semaine, le même sujet est
abordé avec le même matériel dans toutes les classes. Le professeur se trouve de facto dans
l’obligation d’enchaîner son programme. Il n’est pas libre d’adapter le rythme d’avancement
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de son cours au niveau de sa classe. Cela complique sérieusement le travail de l’enseignant
qui est obligé de passer à une partie nouvelle même si la précédente n’est pas bien assimilée
par l’ensemble des élèves.
L’expérience de ces dernières années a montré que, outre des difficultés liées
proprement à la physique, une assimilation imparfaite de certains concepts ou techniques
mathématiques peut sérieusement perturber l’organisation très rigide de la progression en
sciences physiques. Aussi paraît-il fondamental d’établir avec le professeur de mathématiques
une progression concertée à défaut d’être commune.
A partir d’exemples, nous essaierons de faire l’analyse des difficultés rencontrées et de
proposer un certain nombre de pistes de réflexion permettant d’entamer une démarche
commune aux professeurs de sciences physiques et de mathématiques.
Le texte officiel du programme de sciences physiques en classe de seconde est paru au
B.O. n°6 du 12 août 1999. Il est complété par deux documents d’accompagnement
respectivement en physique (184 pages) et en chimie (182 pages). On peut consulter ces
documents sur le site du CNDP.
Les exemples choisis relèvent de la partie du programme intitulée :
I. Exploration de l’espace. 1. De l’atome à la galaxie. Contenus : 1.2 Echelle des
longueurs.
Par ailleurs il est fait mention des activités données dans le document
d’accompagnement de physique. On donnera les références par rapport à la version CD-ROM
distribuée aux professeurs de sciences physiques. On peut aussi trouver ce document sur le
site du CNDP ( http://www.cndp.fr/textes_officiels/Lycee/phychim/).
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A] Premier exemple : première quinzaine de cours.
Prenons l’activité B1 du document d’accompagnement page 11/184 ou l’activité D1
page 28/184.
Le but est de placer sur un axe les longueurs intervenant dans l’univers, incluant les
plus petites (10-15 m) et les plus grandes (1020 m). Il est évident qu’une graduation régulière,
celle que les élèves ont l’habitude d’utiliser, ne peut convenir. Dans un premier temps, il
s’agit de leur en faire prendre conscience.
Ensuite, il faut les amener à utiliser un axe gradué, tel qu’entre deux graduations
successives, il y ait un rapport de 10. On utilise donc, sans le dire aux élèves, une échelle
logarithmique en base 10 .
D’un point de vue technique, il est important de remarquer que l’on ne peut placer
correctement sur un tel axe que des puissances entières de 10. Il faut donc faire des
approximations des distances représentées avec une puissance entière de 10. Par exemple,
7,6×103 aura pour approximation 104 . Autre exemple, 2,1×10-2 aura pour approximation 102
.
Ce type d’approximation peut surprendre les élèves. Il est donc important qu’en
mathématiques on ait déjà pratiqué de manière conséquente les ordres de grandeur. En classe
de seconde, on peut d’ailleurs, au moment de l’étude des fonctions de référence, faire
remarquer, par exemple, que le carré de 900 qui est égal à 810000 a pour ordre de grandeur
106. Ou encore, que l’inverse de 900 a pour ordre de grandeur 10-3.
Au-delà de ces considérations pratiques, on peut s’interroger sur le caractère « outil »
d’un tel axe ; que peut-on en faire, si ce n’est le « contempler » ?
Il faut comprendre que l’idée introduite par un tel axe est la notion de comparaison
relative. On trouve d’ailleurs cette phrase dans les commentaires du programme de physique :
“ Pour une meilleure compréhension des dimensions relatives du noyau et du nuage
électronique de l’atome, on peut donner dans le cadre du cours de physique ou de chimie un
exemple transposé à l’échelle humaine (si le cortège électronique avait la taille du Stade de
France, le noyau de l’atome aurait approximativement la taille d’une tête d’épingle placée au
centre). Le rapport entre la taille du soleil et la taille du système solaire est du même ordre de
grandeur ”. Malgré le caractère démagogique et “ parisien ” de la comparaison avec le Stade
de France, il faut reconnaître que l’idée de fond est là. On peut se servir de cet axe pour établir
des comparaisons. En effet, deux couples de points équidistants sur cet axe sont dans le même
rapport de longueur. On imagine sans peine le type de problème en physique que l’on peut
alors poser aux élèves une fois que l’axe est constitué.
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Exemple 1 :
Données :
Diamètre de la Terre : 13 000 km
Le rayon du Soleil est environ 100 fois plus grand que celui de la Terre.
Distance Terre-Soleil = 150 millions km.
Calculer le diamètre du Soleil.
Si le Soleil avait la taille d’une orange ( diamètre d’environ 10 cm) :
•
A l'aide de l'axe gradué, déterminer le diamètre qu'aurait la Terre dans ces
conditions.
Pour cela, placer sur l'axe gradué : le diamètre de la Terre, le diamètre du Soleil et le
diamètre de l'orange.
•
De la même façon, toujours à partir de l'axe gradué, indiquer ce que vaudrait
la distance Terre-Soleil.
Exemple 2 :
Données :
Dimension d'un atome : 0,1 nanomètre
Dimension d'un noyau : 0,001 picomètre
Si le noyau de l’atome avait la taille d’une tête d’épingle (sphère de diamètre environ
1 mm ), quelle serait la dimension de l’atome ? Par quoi pourrait-on le représenter ?
De plus en mathématiques, on peut se saisir de l’occasion pour faire intervenir les
racines carrées. En effet, alors qu’en physique on évite de poser le problème des points en
dehors de la graduation, en mathématiques on peut se poser la question de la signification
d’un point entre deux graduations, notamment en abordant la question du “ milieu ”. En
appliquant le principe précédent, on montre sans difficulté que le point au milieu de deux
graduations correspond à 10.10 n (et non à 0,5. 10n). Enfin à titre d’approfondissement, on
pourra faire des activités préparatoires à la fonction logarithme.
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B] Deuxième exemple : deuxième quinzaine de cours.
-
1) Parallaxe entre les deux yeux :
On prendra comme référence le TP Mesure de longueurs (2) page 39/184 et la fiche
technique n°1 page 82/1841 . L’activité proposée est basée sur la méthode de la parallaxe entre
les deux yeux.
a) Principe de la méthode :
L’observateur cherche à déterminer la distance D qui le sépare d’un objet.
Il dispose pour cela d’une règle graduée maintenue sur un support à hauteur des yeux.
Il reste immobile, les yeux à une distance d de la règle, ferme son œil droit et vise avec l’œil
gauche (P1) un point précis de l’objet (par exemple le bord vertical gauche d’un support ) en
l’alignant avec le zéro de la règle. Il change ensuite d’œil (P2) et repère la graduation h de la
règle qui se trouve dans l’alignement du support.
Visée par l’œil gauche
1
Visée par l’œil droit
On remarquera que dans le document d'accompagnement on a une représentation des yeux qui est faite avec deux yeux
droits ! Nous nous sommes permis de rétablir un certain réalisme.
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b) Tâches données aux élèves :
---Faire un schéma permettant de modéliser la situation.
---Exprimer la distance D à partir de vos connaissances mathématiques en fonction de H, h et
d.
---Mesurer h, H, d.
---Calculer D.
---Mesurer la distance D avec le mètre ruban. On la notera Drub.
---Evaluer l’écart relatif (E.R.) entre D et Drub par la relation suivante :
D−Drub
.
Dmoy
Dmoy est la moyenne des valeurs D et Drub (soit : D+Drub ).
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---Cette méthode convient-elle pour mesurer de grandes distances ? Pourquoi ? Comment
faudrait-il l’améliorer ?
c) Eléments de réponses aux questions :
Sans faire une correction détaillée, on trouvera ci-dessous le schéma attendu, avec les
étapes de calculs permettant d’obtenir la distance cherchée.
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OC = AB = D−d = h
OK P1 P2 D H
Soit : D.h = D.H-d.H
D.h-D.H = -d.H
D(h-H) = -d.H
D = d.H
H −h
D(H-h) = d.H
d) Observations faites lors du déroulement de cette activité :
1°) On constate que les élèves éprouvent des difficultés à schématiser la situation par
un triangle (le triangle P1P2O). On peut énoncer trois hypothèses pour expliquer cette
difficulté.
La première est le niveau d’abstraction nécessaire pour passer d’objets matériels
comme les yeux ou l’objet visé, à des points du plan.
La deuxième consiste dans le fait que le schéma attendu représente une vue de dessus
de la situation. Ceci peut être lié avec leurs difficultés à percevoir l’espace.
Enfin, le schéma n’est pas fait à l’échelle. Il est donc plus difficilement associé à la
situation représentée.
On voit alors les propositions que l’on peut être amené à faire.
Tout d’abord, ce type d’activité en seconde ne peut se concevoir que si les élèves ont
eu, au préalable, par exemple au collège, une pratique concrète de mesures avec un
entraînement à la schématisation. Le professeur de mathématiques, toujours au collège, doit se
sentir concerné par ce type de problématique, par exemple au moment du théorème de Thalès.
En ce qui concerne les vues de dessus, il serait intéressant de voir ce qui est fait dans
certaines matières technologiques.
Enfin, on peut considérer qu’il est nécessaire de prendre le temps de commencer par
un schéma fait à l’échelle, et ne passer au schéma ci-dessus qu’après avoir constaté l’intérêt de
l’abandon du respect des proportions.
2°) Une autre difficulté liée à la schématisation est l’intervention du segment OK. Les
élèves ont du mal à l’identifier comme le segment dont la longueur est la grandeur cherchée.
On est obligé de remarquer que ce segment est le seul dans la situation étudiée qui n’a pas de
matérialisation. Ceci peut expliquer la difficulté rencontrée. On retrouve donc ici la
problématique de la schématisation. Un travail spécifique sur la schématisation est donc
nécessaire en sciences physiques, et ceci peut encore être l’occasion d’une collaboration avec
le professeur de mathématiques. On notera d’ailleurs que dans la liste des compétences
données dans le programme de physique-chimie on trouve : “ Faire le schéma d’une
expérience. ”
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3°) L’établissement de l’expression de D en fonction des données à partir du théorème
de Thalès pose des problèmes aux élèves.
En premier lieu, ce que les élèves ont retenu du théorème de Thalès est :
OA
OB
=
.
OP1
OP2
Le passage à
OC A B
=
nécessiterait qu’ils aient compris que le triangle OAB est une
O K P1 P2
réduction du triangle OP1P2 et donc que toutes les grandeurs caractéristiques de ces triangles
(longueurs des côtés et hauteurs) sont dans le même rapport de proportion.
Ensuite, les élèves ont du mal pour exprimer chaque segment à partir des
indications figurant sur le schéma.
Ceci est dû en partie à l’utilisation de lettres de même nature pour désigner des objets
différents et établir des relations entre elles.
Par exemple, la lettre K désigne le point.
De même la lettre O désigne le point correspondant.
Mais par ailleurs, OK désigne une longueur représentée par la lettre D.
L’élève rencontre donc des difficultés pour écrire OC = D-d.
D’autre part, si l’on considère le plan purement calculatoire, les élèves se trouvent
confrontés à la résolution d’une équation du premier degré à une inconnue. Or cette inconnue
n’est pas désignée par la lettre x , et qui plus est, les constantes intervenant dans cette équation
sont sous forme littérale. Il ne nous semble pas qu’un élève de collège ait l’habitude de cette
pratique.
Il s’ensuit que les élèves n’ont pas le réflexe de faire le produit en croix ni d’isoler D
pour l’exprimer. Ils n’ont donc pas l’idée de changer le terme D.H de membre dans l’équation,
ni de factoriser. Ils ne savent pas changer les signes en multipliant correctement par -1 et ne
savent pas extraire D de l’avant dernière relation.
Par ailleurs, la séance de travaux pratiques ne dure que 1h30min. Ce temps qui nous
est imparti, est très largement insuffisant pour tout traiter correctement compte tenu des
difficultés évoquées précédemment. Il faudrait avoir la possibilité d’utiliser des heures de
cours pour mener à bien tout ce travail, ce qui n’est pas toujours compatible avec la
planification des séances de travaux pratiques.
e) Propositions de modifications :
1°) Aider les élèves à la réalisation des schémas de modélisation de la situation
expérimentale de façon à ce qu'ils acquièrent des compétences dans ce domaine. Faire un
premier schéma où l’on se contenterait de représenter les segments de droite correspondant à
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une réalité physique pour les élèves, c’est à dire en particulier dans lequel n’interviendrait pas
le tracé du segment OK.
2°) Au cours de la réalisation de l’expérience, les élèves sont tellement absorbés par la
lecture de la règle graduée et du mètre ruban, qu’ils perdent de vue la dimension qu’ils
cherchent finalement à évaluer, en l’occurrence la distance OK. Il conviendrait donc de le leur
rappeler et dans un deuxième temps, de leur faire construire un autre schéma dans lequel on
ferait figurer le segment OK.
3°) Laisser à l’élève le temps nécessaire au relevé de mesures correctes, à l’application
numérique ainsi qu’aux conclusions. Une durée d’environ 30 à 35 minutes semble nécessaire.
4°) Le travail du professeur de mathématiques serait alors la recherche de
l’établissement de la relation permettant de calculer D à partir de H, h et d lors de l’étude du
théorème de Thalès et l’entraînement au calcul littéral.
2) Parallaxe entre deux observateurs :
On peut prolonger l’étude précédente en proposant aux professeurs de physique une
idée de manipulation qui ne coûte pratiquement rien et qui « marche bien » d’après l’activité
de la fiche technique n0 2 page 83/184 du document d’accompagnement du programme de
physique.
Dans notre lycée, les locaux ne s’y prêtant pas, nous n’avons pas pu réaliser
l’expérience préparée par les groupes d’auto formation de physique. Nous avons dû mettre ne
place une autre manipulation.
a) Matériel pour la manipulation proposée :
Pour quatre groupes élèves :
--- 4 tuteurs de jardin de hauteur 2 m environ.
--- 4 bâtons de craie.
--- 1 mètre ruban.
Pour toute la classe :
--- Un disque en carton blanc de diamètre 20 cm scotché au milieu du tableau.
--- Un décamètre.
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b) Réalisation de l’expérience (par exemple par les élèves des
groupes 5, 6, 7, 8) (voir schéma).
O
table 2
Deuxième visée:
les 2 tuteurs de
jardin T’1 et T’2
sont alignés
avec O.
disque fixé sur le tableau
table 1
D
table 4
table 3
table 6
table 5
Première visée:
les 2 tuteurs de
jardin T1 et T2
sont alignés
avec O.
T1
T’1
table 8
d
T’2
table 7
T2
Un élève du groupe 5 tient un tuteur T1 verticalement devant lui contre la table. La
verticalité du tuteur est surveillée par l’autre élève du même groupe qui repère en même temps
la position du tuteur par rapport à la table par un trait tracé à la craie sur celle-ci.
Ensuite, un élève du groupe 7 aligne son tuteur T2 avec le tuteur précédent T1 et le
disque du tableau par une visée. On effectue également le marquage sur la table 7 de la
position du tuteur.
La même manipulation est réalisée simultanément par les élèves des groupes 6 et 8
avec les tuteurs T'1 et T'2 .
Il reste ensuite bien évidemment à mesurer les distances T1T’1, T2T’2 et d à l’aide du
mètre ruban et à faire le calcul de D après avoir reconnu que la situation géométrique est
identique à celle de la parallaxe entre les deux yeux.
D=
T T' 2 ×d
2
T2 T2' − T1T1'
En l'occurrence le décamètre permet d’avoir une estimation directe de la valeur de D
ce qui amène le calcul de l’écart relatif entre la valeur de D calculée et la valeur mesurée.
Celui-ci est inférieur à 3% alors que dans l’expérience précédente il était de l’ordre de 8 à 10
%.
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c) Observation :
On a pu observer lors du déroulement :
- Une plus grande facilité dans la schématisation, la localisation des tuteurs étant plus
concrète pour les élèves que celle des yeux.
- Une plus grande facilité dans la mesure des distances entre les tuteurs qu’entre les
pupilles.
3) Conclusion :
Peut-être serait-il préférable de privilégier cette deuxième expérience plus « à taille
humaine » et plus facilement schématisable.
Cependant, une fois qu’elle est maîtrisée, la méthode de la parallaxe entre les deux
yeux est plus facile à mettre en œuvre dans la vie courante (une règle graduée suffit).
Le professeur de mathématiques peut retenir de cette expérience que la « configuration
Thalès-triangle » intervient à nouveau.
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C) Troisième exemple :Troisième quinzaine de
cours.
1) Mesure du rayon terrestre par la méthode d’Eratosthène :
Cette partie, qui utilise la proportionnalité et la trigonométrie, a été traitée en cours et
sous forme d’exercices car les TP proposés pages 43 à 46/184 du document
d’accompagnement sont difficiles à comprendre par les élèves et très contraignants dans leurs
réalisations :
- nécessité de deux lycées, situés approximativement sur le même méridien, distants
d’au moins 500 km
- communication par téléphone portable ou messagerie d’internet
- mesures effectuées en même temps par les élèves des deux lycées
- présence obligatoire du soleil (à huit heures du matin, fin octobre ce n’est pas
évident !)
a) Principe de la méthode :
Ceci peut être retrouvé sur le document d’accompagnement page 45/184.
ERATOSTHENE (276-194 avant
J.-C.), avait remarqué que le jour
du solstice d’été (21 juin), à midi,
la surface de l’eau, au fond des
puits de Syène
(aujourd’hui
Assouan)
était
entièrement
éclairée, ce qui signifiait que les
rayons solaires suivaient la
verticale de Syène.
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Mais ce même jour, à la même
heure, les rayons solaires, qui sont
parallèles entre eux, donnaient une
ombre portée au phare d’Alexandrie,
autrement dit, ils faisaient, avec la
verticale d’Alexandrie, un angle
mesuré facilement par Ératosthène.
Il trouva 7° 12’. Cet angle est égal à
l’angle au centre (SOA).
Remarque : On peut réaliser une maquette représentant l’expérience à l’aide d’une lanterne,
d’une grosse sphère de polystyrène et de fines baguettes, en utilisant la fiche n°4 page 87/184
du document d’accompagnement.
b) Exercices proposés aux élèves :
- énoncé :
On considère en général un bâton AB planté en un point A à la surface de la Terre. On
connaît la distance SA. On mesure l’ombre AC du bâton.
A partir de ces renseignements, les élèves doivent :
• schématiser la situation.
• trouver la valeur de la circonférence terrestre et le rayon de la Terre.
N.B.: On a conservé les notations de la présentation de l’expérience d’Eratosthène dans ces
exercices .
- schémas attendus des élèves :
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C
ombre
A
B
bâton
S
O
L
E
I
L
rayon du Soleil
β
Verticale ayant la
longueur du bâton
S
TERRE
ombre
Terre
schéma 1
schéma 2
Outre le schéma vu dans l'expérience d'Eratosthène (schéma 1), on attend donc un
sous-schéma dans lequel on néglige la rotondité de la Terre (schéma 2).
c) Observations faites lors de la résolution de ces exercices :
- La première difficulté pour les élèves est de faire les deux schémas représentatifs de
la situation.
Parmi les erreurs trouvées on peut signaler :
•
•
pour le schéma 1 :
- ombre du bâton du côté du soleil
- ombre des deux côtés du bâton (Peut-on voir là, la conséquence de la
représentation de la lumière du Soleil en forme de cône, à la façon d’une lampe
avec son abat-jour ? )
- lorsque la Terre et le Soleil sont représentés par l’élève, il les place de
telle sorte qu’il mesure l’ombre….la nuit !
pour le schéma 2 :
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-Dans un premier temps, la modélisation n’est pas naturelle pour l’élève.
Dans de nombreux schémas, AC est représenté par un arc de cercle. Le fait
d’assimiler l’arc AC à un segment de droite car la distance AC est petite par
rapport à la circonférence de la Terre pose un problème à l’élève. La courbure de
AC est considérée comme négligeable. Or la recherche des aspects négligeables
d’une situation est un objectif de formation en sciences physiques.
-Dans un deuxième temps, si on a fait le schéma 2 et identifié l’angle β
les élèves trouvent assez facilement que la relation trigonométrique à utiliser est
celle de la tangente. La définition générale (côté opposé divisé par côté adjacent)
est connue mais du fait de la notation littérale, tous les élèves n’arrivent pas à
ombre AC
l’expression :
tan β =
=
baton BA
- AC et BA étant connus et en général mesurés avec la même unité, le
calcul de tanβ ne pose pas de problème sauf au niveau des chiffres significatifs.
- Le passage de tanβ à β à l’aide de la calculette n’est pas toujours
assimilé. Nous avons découvert à cette occasion qu’en début de seconde les
élèves ignorent qu’il existe différentes unités de mesure d’angle. Par conséquent
ils peuvent utiliser une calculette programmée en radians croyant qu’il s’agit de
degrés. De plus ils transforment facilement 7°12’ en 7,12° car les minutes
d’angles ne sont pas maîtrisées.
- La deuxième difficulté concerne l’égalité des angles alternes-internes (CBA) et
(AOS). Les dimensions du bâton sont tellement petites par rapport à celles de la Terre, que les
élèves n’imaginent pas qu’il puisse y avoir des angles égaux. Les professeurs de
mathématiques pourront voir là un écho à une difficulté "classique" sur les angles (par
exemple : grandeurs des angles d'un triangle liées aux dimensions des côtés).
- Ensuite on doit utiliser une relation de proportionnalité pour déterminer la
circonférence terrestre. Aucun élève n’avait trouvé cette relation.
L’angle (BOS) calculé précédemment intercepte l’arc AS à la surface de la Terre
Un angle de 360° intercepterait la circonférence entière soit 2 π R.
β°
AS
=
360° 2.π.R
De cette relation les élèves doivent tirer R.
AS × 360 0
- Écrire R =
est particulièrement difficile pour les élèves surtout si on
0
2× π×β
garde la notation littérale avant de remplacer les lettres par les valeurs numériques. Cette
pratique est très courante en sciences physiques. Le professeur de mathématiques peut se
saisir de cette occasion pour motiver des travaux sur le calcul littéral.
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Groupe IREM : mathématiques et sciences physiques au lycée
De plus, lors de l’établissement de la relation de proportionnalité, les élèves
confondent périmètre et surface.
Enfin, lors du calcul numérique, les unités utilisées ne sont pas cohérentes entre elles
(utilisation de km et de m).
Autant d'éléments de réflexion pour le professeur de mathématiques.
d) Approfondissement possible :
Après ce travail en physique, qui peut ressembler dans une certaine mesure à des
exercices faits en cours de mathématiques (d'où la nécessité encore une fois d'une
connaissance mutuelle des objectifs et pratiques de nos deux matières), le professeur de
mathématiques pourra envisager d'exploiter la situation plus complexe suivante en
réinvestissement.
Deux bâtons sont plantés en des lieux
différents mais situés sur le même méridien
(voir schéma).
Le calcul de la valeur de l’angle γ entre les
deux verticales est totalement inconnu des
élèves.
Le professeur de mathématiques pourrait
peut-être utiliser ce schéma en géométrie et en
profiter pour rappeler les relations entre les
angles d’un triangle et les cas d’égalité des
angles délimités par des parallèles et une
sécante.
verticale de D
D
β
<
verticale de P
γ
α
P
<
<
S
O
L
E
I
L
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2) Tracé et utilisation d’un graphe : “ Mesure de l’épaisseur
d’un cheveu ” :
Ce TP figure page 48/184 et sur la fiche technique n°7 page 91/184 du document
d’accompagnement.
a) Principe de la manipulation :
En interposant successivement sur le trajet d’un pinceau de lumière émis par une diode
laser, des fils très fins de différents diamètres a, on obtient sur un écran une figure de
diffraction différente pour chaque fil. On mesure pour chaque fil la longueur L de la tache
centrale de diffraction obtenue sur l’écran.
On effectue ensuite un graphique sur lequel on place les points correspondant aux
mesures. On relie ces points par une courbe que l'on considère comme la représentation
graphique de la fonction L= f(a) . Cette courbe, dite d’étalonnage, va être utilisée pour la
détermination du diamètre d’un cheveu (voir graphique ci-dessous).
Pour cela, on interpose le cheveu sur le trajet de la lumière émise par la diode laser. On
obtient sur l’écran une figure de diffraction, on mesure la longueur Lc de la tache centrale. En
reportant cette valeur sur la courbe d’étalonnage, on en déduit le diamètre ac du cheveu.
Axe des abscisses : a en mètre ; axe des ordonnées : L en mètre.
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Groupe IREM : mathématiques et sciences physiques au lycée
b) Difficultés rencontrées par les élèves :
Au moment où nous avons fait ce travail, la notation L = f(a) était inconnue des
élèves. De plus ils ignorent ce que l’on va mettre en abscisse ou en ordonnée. L’inversion des
axes est très courante. Même après une remarque du professeur, ils poursuivent leur travail et
indiquent qu’ils arriveront aussi au résultat. Ceci est vrai ici, mais ne peut être généralisé en
physique. De ce fait nous sommes obligés d’imposer le tracé de la courbe demandée.
Les élèves ont des difficultés à graduer un axe. Le professeur est obligé de donner une
échelle de graduation sur chaque axe.
Par exemple :
- 1 cm sur l’axe des ordonnées correspondra à 1 mm de la tâche de diffraction.
- 1 cm sur l’axe des abscisses correspondra à 10 µm.
Ils joignent les points les uns aux autres à l’aide d’une règle ; ils ne cherchent pas à
faire une "courbe".
En revanche, ils semblent maîtriser la lecture sur la courbe.
c) Remarques pour le professeur de mathématiques :
On serait tenté de ne rien dire tant ce qui précède est édifiant à la fois sur les
manquements de l'enseignement des mathématiques au regard des besoins des sciences
physiques, et sur les aspects redondants de certaines activités (si on prend pour critère le
contenu des différents manuels).
Cependant on se permettra trois réflexions.
Avec une telle situation, le professeur de mathématiques a une occasion de faire
intervenir les fonctions dans un contexte concret "vrai". Bien sûr, ceci n'est "viable" pour les
élèves que si un accord existe entre les professeurs de mathématiques et de sciences physiques
sur les "objets" utilisés (voir en annexe un exemple d'activité).
Il nous paraît important de souligner l'aspect fondamental avec lequel intervient ici une
fonction, à savoir la modélisation. En effet, le travail physique ne prend sens que lorsqu'on
postule une relation fonctionnelle entre la dimension de la tache et l'épaisseur. D'autre part, le
tracé reliant les points expérimentaux est pris comme définition de cette fonction. On voit
2
alors l'enjeu important de la nature de ce tracé .
Enfin, les difficultés avec les unités graphiques devraient inciter le professeur de
mathématiques à ne pas négliger cet aspect dans la constitution de graphiques. Dans un article
précédent sur la vitesse instantanée et les tangentes on a montré comment la notion d'unité
graphique intervenait dans la compréhension des phénomènes.
2
Le tracé spontané par des segments de droite renvoie à l'étude des obstacles liés à la notion de fonction.
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D) Quatrième exemple : Quatrième quinzaine de
cours.
Comment déterminer l’ordre de grandeur de la longueur
d’une molécule ? L'Expérience de FRANKLIN :
Dans cette partie on est amené à utiliser les formules de volumes, de surfaces, et les
puissances de 10 . De plus les élèves doivent se rendre compte que les unités de volume,
surface et longueur ont un lien entre elles.
Le T.P. réalisé par les élèves peut être retrouvé sur le document d’accompagnement
page 47/184 et sur la fiche technique n°6 pages 89-90/184.
a) Principe de la méthode :
On cherche à évaluer l’ordre de grandeur de la taille d’une molécule.
L’acide oléique est une molécule organique, insoluble dans l’eau.
On lâche une goutte d’acide oléique en solution dans l’acétone sur de l’eau contenue
dans un cristallisoir dont la surface est parsemée de particules de talc.
En s’étalant la goutte repousse les particules de talc. On observe un disque d’acide
oléique à la surface de l’eau. On considère que les molécules déposées sur l’eau restent en
surface et se positionnent les unes contre les autres verticalement. On admet que l’épaisseur
du disque d’acide oléique correspond à la longueur h d’une molécule d’acide oléique.
Connaissant le volume V d’acide oléique
contenu dans une goutte et en mesurant la surface S de
la tâche huileuse à la surface de l’eau, on en déduit
l’épaisseur h du film d’acide oléique et donc la
V
longueur h d’une molécule. h =
S
b) Difficultés rencontrées par les élèves :
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- La formule donnant la surface d’un disque en fonction du diamètre, s =
π × d2
, n’est
4
pas connue.
- Le lien entre les unités de longueur, de surface et de volume n’est pas fait.
( longueur en cm, surface en cm2, volume en cm3 )
- La valeur trouvée est de l’ordre du nanomètre ce qui oblige les élèves à manipuler les
puissances de 10.
- L’utilisation de la calculette, à ce niveau n’est pas évidente. Les signes des
puissances négatives ne sont pas prises en compte qui, d’autre part, font des erreurs dans les
simplifications.
- De plus, mais rien n'est plus classique, le fait de trouver une molécule de plusieurs
centimètres de long (!) , n’attire pas l’attention des élèves.
E) Conclusion :
Nous pensons avoir montré à travers tous ces exemples en quoi certaines
notions, ou plus modestement certaines techniques mathématiques, sont fondamentales dans
le travail du physicien. Leur mauvaise maîtrise entraîne chez les élèves des incompréhensions
qui interférent avec l'assimilation des notions physiques.
De plus le professeur de mathématiques trouvera dans toutes ces situations de quoi
alimenter sa pratique dans une partie du programme de la classe de seconde qui souvent le
laisse perplexe dans la mesure où peu de notions (pour ne pas dire aucune) sont à enseigner.
Seule une pratique est à travailler.
Bien sûr tout cela postule une collaboration entre les professeurs des deux matières, et
souvent par manque de temps « institutionnel », les choses ne se font pas. Puisse cet article
crée un pont, même modeste, entre nos deux disciplines !
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Annexe : un exemple d'activité faite dans une classe de seconde en mathématiques sur la
base de l'activité menée en sciences physiques sur la mesure de l'épaisseur d'un cheveu.
Titre : "Inversement proportionnel"
Ce qui suit n'est pas un texte distribué aux élèves. C'est une sorte de scénario dont le
professeur est le metteur en scène "en direct".
Cette activité a été effectivement faite en classe de seconde 10 au lycée Louis Rascol à Albi
par Pierre Lopez. On n'a pas eu le temps de faire une analyse de pratique, notamment sur la
base d'une analyse "a priori". Cependant on s'est permis quelques réflexions temps en temps
pour essayer de clarifier la "mécanique" qui est sous-jacente à cette activité.
1°) Approche directe :
a) Contexte :
Au cours d'un TP en sciences physiques vous avez fait des mesures concernant les
dimensions de la tache centrale de diffraction obtenue en interposant successivement un fil sur
le trajet d’un pinceau de lumière émis par une diode laser. Voici les relevés d'un groupe :
a (en µm)
L (en cm)
40
1,4
60
1
80
0,7
100
0,5
120
0,4
b) Graphique :
Représentez dans un repère orthogonal "bien choisi" les points de coordonnées
(a ; L) pour les valeurs du tableau ci-dessus.
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c) Exploitation :
Par un tracé à main levée reliant ses différents points, on représente la fonction
donnant L en fonction de a . Déduisez-en, par lecture graphique, l'épaisseur d'un cheveu
correspondant à L égale à O,9 cm.
Prolongement : (travail à faire à la maison)
Déterminez la fonction affine dont la représentation graphique passe par les points de
coordonnées respectives (60 ; 1) et (80 ; 0,7).
Déduisez-en une nouvelle estimation de l'épaisseur d'un cheveu correspondant à L
égale à O,9 cm.
2°) Signification de l'expression « inversement
proportionnel » :
a) Introduction :
Il est manifeste que la largeur de la tache centrale de diffraction L n'est pas
3
proportionnelle à l'épaisseur des fils a . Par ailleurs, dans ce genre de situation , on dit parfois
que « L est inversement proportionnel à a « .
Quel sens mathématique attribuez-vous à cette expression ?
b) Un tableau numérique :
Constituez le tableau numérique donnant L en fonction de
1 4
.
a
3
On remarquera la formulation choisie volontairement floue. En effet, on cherche ici, non seulement, à travailler sur une
question de sens, mais par ailleurs, on poursuit un objectif à long terme qui permettra précisément de mettre à mal l'usage, en
particulier par les journalistes, de cette expression dans tous les cas de décroissance.
4
Au cours de la discussion menée en classe, une élève a évoqué la possibilité que ce soit l'inverse de L qui soit
proportionnel à a . Bien sûr, elle a parfaitement raison, et ce point de vue peut paraître a priori mathématiquement plus
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c) Un graphique :
Représentez dans un repère orthogonal "bien choisi", les points correspondant au
tableau précendent.
1
Pourquoi est-il légitime de considérer qu'il y a proportionnalité
et L ?
a
d) Approximation « globale » :
Calculez la moyenne des abscisses des points représentés. De même avec les
ordonnées. On appelle point moyen le point dont les coordonnées sont respectivement les
moyennes calculées.
1
On considère qu'il y a proportionnalité entre les deux grandeurs
et L . En
a
conséquence on considère que la droite passant par le point moyen M et l'origine du repère
1
est la représentation graphique de la fonction donnant L en fonction de
.
a
1
Calculez dans ces conditions k tel que L = k . .
a
Déduisez l'épaisseur d'un cheveu correspondant à L = 0,9 .
"signifiant". Le choix fait se justifie par le fait que pour les physiciens dans ce genre de situation de "changement de
variable", on garde en général la grandeur "image" ; on change la variable !

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