Article complet. - Gustave Flaubert

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Article complet. - Gustave Flaubert
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L’image de Salomé
Gustave Moreau et Gustave Flaubert
Atsuko OGANE
I. Gustave Moreau et Gustave Flaubert
La fortune a-t-elle souri simultanément au peintre et à l’écrivain, leur
production étant chronologiquement très proche, ou s’agit-il d’une pure
coïncidence ? C’est au Salon de 1876 que Flaubert alla voir les deux
représentations de Salomé de Gustave Moreau, alors qu’il ruminait justement
le plan d’Hérodias. On constate une allusion embryonnaire de Flaubert sur
Iaokanann dans la même lettre que l’allusion à ce Salon : « Jeokhanan [sic.]
(traduisez : saint Jean-Baptiste) viendra. Mais il faut finir ma bonne femme, et
à peine si je suis au tiers1).» Il fait allusion au futur plan d’Hérodias, et après
avoir signalé son impression sur les Salomé de Gustave Moreau : « Il y a au
Salon trois tableaux vantés qui m’exaspèrent2).» Au sujet du rapprochement de
ces deux allusions, Adrianne Tooke remarque3), en témoignant son opposition
à Pierre-Marc de Biasi : « This can hardly be coïncidence.» Néanmoins,
ayant publié l’édition critique et génétique des Carnets de travail de Flaubert,
De Biasi situe l’embyron du plan juste avant le Salon : « Les choses se sont
probablement passées de la façon suivante. En mars avril 1876, Flaubert était
parti faire du repérage en Normandie pour Un Cœur simple. Pour prendre
ses notes en chemin, il avait emporté avec lui un calepin, déjà bien noirci
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de notes anciennes prises en 1871-1872 pour La Tentation, mais où il restait
plusieurs pages vierges disponibles. Or, au milieu des notes utilisées pour
La Saint Antoine, plusieurs feuillets du calepin contenaient des recherches
restées inexploitées, dont trois ou quatre pages écrites en 1871-1872 sur JeanBaptiste, Vitellius, Ponce Pilate.» Ainsi, il conclut : « C’est précisément au
retour de cette expédition qu’il annonce son nouveau projet de rédaction4).»
Il est vrai que Flaubert avait entamé depuis sept mois une brochure qui sera
intitulée Trois Contes, récits bibliques. Si l’on se réfère à la datation de
l’édition du Club de l’Honnête Homme, la première allusion à Hérodias se
trouve dans une lettre du 20 avril 18765) ( l’édition Conard indique seulement
« fin avril 1876 »). Les deux artistes se sont croisés au bon moment. Flaubert,
pourtant, s’intéressait déjà à ce peintre depuis une dizaine d’années, alors que
ce dernier était encore inconnu. Il remercia Chesneau d’avoir « rendu justice
à Gustave Moreau » que beaucoup de ses amis n’avaient pas suffisamment
admiré6).
D’autre part, Gustave Moreau avait une grande admiration pour les œuvres
de Flaubert, dont notamment Salammbô et La Tentation de Saint Antoine.
Larroumet ne dit-il pas : « Il a reconnu dans La Tentation de Saint Antoine
de Flaubert, des sentiments qui avaient hanté son âme, mais, tandis que
Flaubert suit la légende dans l’horrible et le grotesque, M. Gustave Moreau
n’a exprimé sa pensée sur la vie et la destinée que par de nobles formes7). »
En fait, Moreau approfondit ses connaissances à l’aide des catalogues
des musées, des lithographies du Louvre, ou des revues populaires dont
le Magasin Pittoresque8), de même que Flaubert recourt aux livres de la
Bibliothèque Nationale ou encore à d’autres ouvrages disponibles pour son
appareil historique et scientifique. Qui plus est, ils eurent le même souci de
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 85
travailler à leur ideal de création, loin de la foule détestable. En témoigne cette
allusion de Flaubert : « J’ai appris à Paris que plusieurs personnes (entre autres
Gustave Moreau, le peintre) étaient affectées de la même maladie que moi,
c’est-à-dire l’insupportation de la foule9). » Shigeru Kashima constate que
la similitude frappante entre ces deux artistes pousse Flaubert à s’identifier à
Moreau, tous deux ayant en commun leur rêve byzantin et une vie solitaire.
D’ailleurs, ils étaient tous deux des artistes contemporains en rupture avec leur
naissance bourgeoise, menant une vie de célibataire avec leur mère et ayant
la même attitude sincère vis-à-vis de l’Art pour l’Art10). Ces deux artistes
s’étant intéressés au même motif de Salomé, nous devons tenir compte de leur
contemporanéité. Pierre-Louis Mathieu ne constate-t-il pas : « Et pourtant
les artistes ont été souvent attirés par cette histoire, dont la charge d’érotisme
latente a excité le talent d’un grand nombre de peintres ou de sculpteurs, de
Ghirlandaio, Lippi ou Luini, Memling ou Cranach pour les anciens, à Henri
Regnault ou Paul Baudry pour les modernes : justement, en 1874, ce dernier
exposait les esquisses pour la décoration du grand foyer du public à l’Opéra,
dont une voussure devait accueillir La Danse de Salomé. Dans l’ordre de la
poésie, un autre « homme au rêve habitué », Mallarmé, polissait lentement une
Hérodiade11).»
À propos d’l’intertextualité, Françoise Meltzer remarque perspicacement
l’influence de Salammbô de Flaubert sur Moreau : « Indeed, Flaubert’s
description of Salammbô is almost identical to Moreau’s vision of Salome.
(...) Here we already have the combination that makes Salome so tantalizing
for many fin de siècle writers : the virgin and the devouress12).» Un peu
plus loin, elle remarque une influence réciproque entre ces deux artistes :
« Moreau, inspired by Flaubert’s Salammbô, paints “ Salome Dancing” in
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oils and the watercolor “ The Apparition,” both works displayed in April of
1876 at the Salon Palace of the Champs Elysées, (...). Flaubert himself was
overwhelmed by Moreau’s vision and began research for his Hérodias in the
same month of the same year. So we have come full circle. Flaubert’s verbal
depiction of Salammbô inspires Moreau’s paintings of Salome, which in
turn help to motivate Flaubert’s story of Salome13).» Remarque intéressante,
mais avouons qu’il y avait des cercles similaires en dehors de leur relation.
Pierre-Louis Mathieu déclare, toutefois, que Salammbô ne se trouvait pas
dans la bibliothèque de Moreau14). Néanmoins, Chikashi Kitazaki soutient
que l’influence de Salammbô fut indéniable, d’une part parce qu’il y a eu une
toile intitulée Salammbô à l’exposition de Paris15) en 1906 et d’autre part parce
que certains dessins et esquisses de Salomé montrent un serpent rampant,
reptile qui rappelle Python, le serpent sacré du Tanit16). Mais, il faut remarquer
que Françoise Meltzer ne met pas en évidence la principale raison pouvant
expliquer les similitudes entre les Salomés de Flaubert et Moreau. Pourquoi
s’agit-il de la virginité ainsi que de la dévoreuse ? Quelles sont ces similitudes
et quelles sont les différences dans la création du motif de Salomé ? Quelle
est la motivation provocatrice qui a fait de l’image d’Hérodias-Salomé le
prototype de la femme fatale ?
II. Le sanctuaire ̶ le thème du sacrifice
Intéressé depuis sa jeunesse par les dieux antiques, l’orientalisme et
l’exotisme, Moreau, dans son tableau Salomé dansant devant Hérode, situe
la fête d’Hérode-Antipas non à « la citadelle de Machærous », mais de même
que Flaubert qui a choisi le terme « basilique », à l’intérieur du bâtiment
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 87
religieux, mélange de culture chrétienne et orientale. La Bible indique que la
fête eut lieu à Machærous. Sans doute Moreau s’est-il lui aussi intéressé au
thème de Salomé sous l’angle du sacrifice, en montrant une basilique orientale ?
Moreau lui-même signale le caractère spirituel et mystérieux du lieu :
« Un saint, une tête décapitée, sont au bout de son chemin qui sera
parsemé de fleurs. Le tout se passe dans un sanctuaire mystérieux, qui
porte l’esprit à la gravité et à l’idée des choses supérieures17). »
Pourquoi situer la danse dans un sanctuaire ? Est-ce parce qu’il s’agit
du sacrifice d’un saint ? Étant donné que cette histoire de la décollation de
Iaokanann se situe au croisement historique des cultures̶christianisme,
mithracisme, judaïsme, l’amalgame religieux et oriental est évident.
Larroumet n’écrit-il pas : « le paganisme de M. Gustave Moreau rejoint le
christianisme18).» À cela vient s’ajouter l’orientalisme qui était à la mode à
cette époque pour décrire la terreur et la cruauté que les Européens percevaient
en Orient. Chikashi Kitazaki soutient que la documentation de Moreau sur le
Palais de l’Alhambra lui a permis de dessiner un sanctuaire dont l’atmosphère
est pleine de la cruauté orientale19). À cette époque, les sacrifices aux divinités
tenaient une place essentielle dans chaque religion du monde judéo-romain
et alentours. W. Robertson Smith souligne cette importance du sacrifice dans
l’Antiquité : « Originellement, le rite du sacrifice est d’une telle importance
parmi toutes les anciennes tribus à travers le monde où le rite religieux s’est
suffisamment développé20). »
Commentant Salomé dansant devant Hérode, Pierre-Louis Mathieu décrit
ainsi « le présentoir » : « enfin à l’extrême gauche du tableau, sertie dans
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un présentoir, une immense intaille sur laquelle est gravée un sphinx tenant
entre ses griffes le corps d’une victime masculine21).» Kitazaki assimile dans
sa traduction ce « présentoir » à un « autel de sacrificature22) ». Le sacrifice
est donc bien présent dans les Salomés de Gustave Moreau, comme dans
Hérodias de Flaubert.
Rien d’étonnant donc que Moreau ait orné Hérode et Salomé de la même
coiffure : il s’agit de « la mitre », accessoire nécessaire au moment d’offrir
un sacrifice. Rappelons que nous avons constaté dans notre analyse précédent
la place importante qu’occupe « la mitre » dans les œuvres flaubertiennes
dont Hérodias et Salammbô : Hérodias porte « la mitre » au moment où elle
s’incarne en Cybèle23). Dans Salomé dansant de Moreau, nous trouvons
également Hérode-Antipas coiffé d’une « mitre », ce qui explique bien
l’intention de Moreau dans un de ses dessins :
« chercher par un moyen quelconque à enlever à cette figure toute
apparence de majesté & de dignité / bien qu’elle doive être impassible.
momie orientale exténuée & sommeillan(te) / aspect sacerdotal
hiératique. idole / Le tétrarque. chef politique & religieux »
[M.G.M. 2275]24)
Ë la lecture de cette indication du peintre, nous reconnaissons la même
intention que Flaubert avait conçue pour décrire le chef de la Judée. Flaubert
et Moreau montrent non seulement la fusion de la politique et de la religion,
mais aussi le caractère du chef : l’impassibilité voulue par Moreau correspond,
selon nous, à ce que recherchait Flaubert : « la vacherie d’Hérode ». Dès le
début de son plan, Flaubert avait écrit :
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 89
« Savez-vous ce que j’ai envie d’écrire après cela ? L’histoire de saint
Jean-Baptiste. La vacherie d’Hérode pour Hérodias m’excite. Ce n’est
encore qu’à l’état de rêve, mais j’ai bien envie de creuser cette idée-là.
Si je m’y mets, cela me ferait trois contes, de quoi publier à l’automne
un volume assez drôle25). »
En dehors de cette « impassibilité » appliquée à Hérode, il est à remarquer que
Moreau assimile aussi Hérode-Antipas à une « idole ». D’autre part, Flaubert
remarque Hérode et Hérodias comme deux « idoles » dans les manuscrits
d’Hérodias : « Avec les deux lions cabrés à ses flancs elle avait l’air d’une
idole de Cybèle. On se tait. Elle était debout. dominant Antipas pareil à une
autre idole [sic]26)». Flaubert comme Moreau semblent essayer de peindre ou
de dessiner deux idoles orientales.
De même qu’Hérode-Antipas porte « la mitre » dans Salomé dansant,
nous trouvons Salomé coiffée d’une sorte de « mitre », évoquant la chevelure
de Salammbô, qui « réunie en forme de tour selon la mode des vierges
chananéennes la faisait paraître plus grande.» Commentant une étude à
la même échelle que le tableau définitif de Salomé dansant, Geneviève
Lacambre fait aussi allusion à « la mitre » et remarque la similitude avec
Salammbô :
« [...] ; au premier plan de profil, Salomé, sur la pointe des pieds, tenant
de la main droite le lotus de la volupté, la tête coiffée d’une mitre
blanche, couverte de bijoux et de voiles brodés qui en font une sorte de
chasse vivante, pour envoûter le vieil Hérode. Elle s’apparente ainsi à
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la Salammbô de Flaubert27). »
De même, Pierre-Louis Mathieu remarque : « Précisément la figure finale
de Salomé, entièrement parée de bijoux, la coiffure prise sous une haute mitre
blanche, rappelle la silhouette de Salammbô telle que la décrit Flaubert28).» Dans
A Rebours, Huysmans décrit notamment « la mitre » de Salomé de Gustave
Moreau :
« (...), en la mitrant d’un certain diadème en forme de tour phénicienne
tel qu’en porte la Salammbô, en lui plaçant enfin dans la main le sceptre
d’Isis, la fleur sacrée de l’Egypte et de l’Inde, le grand lotus29).»
En présentant ces deux mitres̶coiffure portée lors des sacrifices̶, Moreau
souligne ainsi le sens mystique de la scène. D’après l’expression de Maria
L. Assad, critique d’Hérodiade de Mallarmé, Jean devient maintenant une
« victime sacrificielle30) ». De là déduit-on l’identité de Salomé comme
sibylle. Moreau avoue en ce qui concerne sa création de Salomé :
« Je construis d’abord dans ma tête le caractère que je veux donner à
ma figure et je l’habille ensuite en me conformant à cette idée première
et dominante.
Ainsi dans ma Salomé, je voulais rendre une figure de sibylle et
d’enchanteresse religieuse avec un caractère de mystère. J’ai alors
conçu le costume qui est comme une chasse31). »
Comme Flaubert, voire Mallarmé, Moreau peint la jeune fille dénudée
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 91
comme une sibylle enchanteresse. Rappelons la description de la danse de
Salomé chez Flaubert : « Elle dansa comme les prêtresses des Indes, comme
les Nubiennes des cataractes, comme les bacchantes de Lydie32). » En outre,
un autre caractère mystique et sibyllin de la description de Salammbô, qui
est sibylle d’Astarté, Arthémis phénicienne, a inspiré Moreau. La remarque
de Shigeru Kashima, sur ce point, semble insuffisante, parce qu’il signale
seulement la conscience de la femme fatale chez Moreau ; il pose au premier
abord une question essentielle : pourquoi Moreau dessina-t-il Salomé en se
référant à l’image de Salammbô de Flaubert ? Il postule ainsi que Salomé
devient le symbole de la femme fatale pour Moreau à cause de sa virginité
provoquant le désir.33) Il est vrai que la femme fatale conçue par Moreau
évoque la luxure, mais ce qui est essentiel, c’est l’association de la luxure avec
l’élément mystique qui est inséparable de la mort sacrificielle d’un homme,
comme le souligne Mario Praz :
« et il y a une certaine analogie entre la situation d’Atalanta et celle
de Salammbô. L’homme s’éteint sous les yeux d’une femme froide,
dévouée au culte de la Lune, idole elle-même, et s’il meurt, c’est son
œuvre involontaire à elle. Mâtho, déchiré par la torture, ne dit pas
mot, mais contemple la femme avec un regard d’épouvante. Méléagre,
consumé comme le tison fatal, « a woman’s offering », une offrande
à la femme, lui aussi, suppplie la vierge qu’elle le touche avec ses
doigts rosés, qu’elle ferme ses paupières avec un amer baiser, qu’elle
l’enveloppe de la tête aux pieds dans son voile, s’étende sur lui,
unissant paume contre paume et lèvre contre lèvre34). »
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Nous remarquons ici la genèse du mythe de la femme fatale par un glissement
du thème du sacrifice : « une offrande », « le sacrifice » de Jean, sacrifice
d’un homme vis-à-vis de Dieu, bref « une offrande au dieu » dans Hérodias
de Flaubert est remplacée par « une offrande à la femme » chez Moreau.
Nous constatons que Moreau semble avoir perçu ce thème dans Salammbô de
Flaubert. Seulement, dans Salammbô, l’héroïne n’est pas vraiment consciente
de ce sacrifice, voire innocente jusqu’au dernier moment ; de là la mort
de Salammbô amoureuse, en même temps que celle de Mathô35). De fait,
elle ne demande pas intentionnellement la mort de Mathô, mais ce sont ses
agissements, à savoir la reprise de zaïmphe, qui ont accéléré la mort d’un
homme amoureux.
La notion d’« une offrande à la femme » proviendrait de l’existence d’une
femme « sans merci » qui demande et obtient la mort de l’homme. Pour être
« sans merci », telle est l’expression de Mario Praz36), la femme doit avoir l’air
d’une déesse à la sentimentalité transcendante, voire étrange et inconnue, ce
que Moreau semble avoir essayé de dépeindre, en ajoutant à la jeune vierge
des éléments des divinités indiennes. D’après Geneviève Lacambre, les études
pour Salomé dansant devant Hérode montrent bien l’intérêt du peintre pour
la référence au « dieu Siva », qu’il puisa dans le Magasin pittoresque de
183737) : la description de tous les bijoux évoque ceux « dont vont se vêtir les
Salomé de Gustave Moreau. » Lacambre décrit ainsi l’objectif de Moreau :
« L’idée de Gustave Moreau est de donner ainsi, par accumulation
de ces détails archéologiques certes détournés de leur signification
première, une image du luxe et de la décadence du temps où Salomé
pouvait obtenir le sacrifice de Jean-Baptiste, un prophète, un homme de
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 93
parole assimilable à ses chers poètes38). »
Chikashi Kitazaki remarque d’ailleurs que les bijoux que Salomé porte
ressemblent à ceux de Pompei que l’on retrouve dans le Magasin Pittoresque
ou à ceux d’origine byzantine que l’on peut trouver dans le recueil de dessins
dont Moreau disposait39) . D’où vient l’air cruel et froid de Salomé qui
donne l’impression d’une sibylle ? Le sanctuaire, les mitres, l’encensoir qui
fume, tout est prêt pour le rite du sacrifice de Iaokanann. Il n’est donc pas
surprenant de remarquer au coin gauche de Salomé dansant de Moreau l’autel
du sacrifice avec un immense relief dans lequel le Sphinx tient « entre ses
griffes le corps40) » d’un homme. Nous sommes maintenant sous le règne de la
femme fatale.41)
III. «La sphinx» ou la femme fatale
Pour ce qui est de ce sphinx dans Salomé dansant, il convient de tenir
compte de l’intention de Gustave Moreau. Sur le trône et sur les piliers on
remarque des statuettes de sphinx sur la balle. Il semble que Moreau dessine le
sphinx grec dans un espace sombre, peut-être parce que le sphinx incarne pour
lui « l’éternelle énigme » qui s’attachera à l’essence de la femme : à partir
d’Œdipe et le Sphinx, le motif principal de sa peinture consiste toujours en une
femme « lascive et dévoreuse d’hommes »42). Cela tourne même à l’obsession,
si bien qu’il peint successivement Chimères, Sirènes, Pasiphaé, Dalila,
Messaline, jusqu’à retrouver l’essence de la femme fatale dans Salomé.
Cependant, il ne s’agit pas ici du sphinx égyptien. Rappelons que Flaubert
évoque l’image du sphinx égyptien pour décrire le regard épouvantable et
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énigmatique de Salomé : au stade final de la danse, il utilise en outre celle
d’un grand scarabée, insecte égyptien qui symbolise la résurrection du
soleil43).
Pourtant, les Salomé de Gustave Moreau n’accompagnent pas la lumière ni
la gloire du soleil égyptien, mis à part le rayonnement auréolé de Iaokanann
dans l’Apparition. Si Flaubert utilise le « scarabée », insecte solaire, comme
symbole de la résurrection, Huysmans, à propos des Salomé de Moreau, décrit
des insectes :
« sur sa robe triomphale, couturée de perles, ramagée d’argent, lamée
d’or, la cuirasse des orfèvreries, dont chaque maille est une pierre,
entre en combustion, croise des serpenteaux de feu, grouille sur la chair
mate, sur la peau rose thé, ainsi que des insectes splendides aux élytres
éblouissants, marbrés de carmin, ponctués de jaune aurore, diaprés de
bleu d’acier, tigrés de vert paon44). »
Contrairement au sphinx de Flaubert, Moreau dessine des monstres grecs dans
un espace sombre, à l’aube. Moreau assimile le sphinx à l’énigme éternelle
dans son explication d’ Œdipe et le sphinx :
« Le peintre suppose l’homme arrivé à l’heure grave et sévère de la vie,
se trouvant en présence de l’énigme éternelle. Elle le presse, l’étreint
dans sa griffe terrible. Mais le voyageur fier et tranquille dans sa force,
la regarde sans trembler.
C’est la chimère terrestre, vile comme la matière, attractive comme
elle, représentée par cette tête charmante de la femme, avec ses ailes
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 95
prometteuses de l’idéal, mais le corps du monstre, du carnassier qui
déchire et anéantit45). »
« Chimère », « attractive », « charmante », « monstre », « carnassier »,
« déchire », « anéantit », « cette tête charmante de la femme » : nous
reconnaissons ici tous les termes qui deviendront les caractéristiques de la
femme fatale. Selon Yôko Kudô, « la cruauté accompagne généralement la
virginité46). » Il est surprenant que Flaubert, alter ego de Moreau, avait déjà
discerné la distinction de sexe concernant le sphinx dans sa première allusion
à Gustave Moreau dans une lettre à Ernest Chesneau en 1868. Commentant
la peinture de Moreau, Flaubert écrit : « Mais pourquoi dites-vous le sphinx
? C’est ici la sphinx47).» Malgré le titre Œdipe et le sphinx, Moreau n’utilise
jamais le terme masculin « le sphinx » dans son commentaire de la toile48),
mais toujours « elle », qui signifie « l’énigme éternelle » ou « la chimère ».
Mais cette féminité du sphinx renvoie aussi à l’ambivalence du sexe, élément
énigmatique à la future femme fatale49).
De plus, dans son explication du tableau intitulé Œdipe voyageur, Moreau
signale que cette « énigme éternelle », « monstre à la tête de femme », attend
sur « la plate-forme, autel naturel », ce qui renvoie à l’idée de sacrifice. Un
peu plus loin, il ajoute : « l’abîme est au pied de cet autel de la vie et de la
mort devant lequel passe l’humanité tremblante50). »
Moreau semble considérer le Sphinx comme un être sombre, prédateur de
l’homme, en référence au mythe grec, et désigne ainsi le moment décisif avec
la lune : « un croissant pâle se voit encore dans le ciel ». En revanche, Flaubert
a utilisé le sphinx égyptien comme une image solaire, souvenir de son voyage
en Orient. À cette « femme fatale » incarnée par le Sphinx, Shigeru Kashima
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ajoute qu’il y a également un reflet des tendances de l’époque51) : l’inversion
des sexes (femme forte / homme passif) est assimilée à la domination féminine
après le Coup d’Etat de 1851. Les sphinx de Moreau sont davantage associés à
l’idée de fatalité et caractéristiques de l’esthétique fin de siècle, à la différence
de celui de Flaubert.
IV.
La généalogie des Déesses
Nous allons maintenant aborder une autre caractéristique de la Salomé
peinte par Moreau : sa relation à la lune. Nous avons tenté d’analyser le
symbole du soleil dans le récit de Flaubert : l’évocation de Iaokanann ainsi
que la description de la danse de Salomé ont pour objet de symboliser la gloire
de Dieu, assimilé au soleil52). D’autre part, le symbole de la lune, l’incarnation
d’Hérodias en Cybèle et les croissants sur son front occupent moins de place
dans cet antagonisme53). Or, nous constatons dans les Salomé de Moreau une
teinte noire et sombre qui interdit la lumière, excepté l’auréole autour de
la tête de Jean dans l’Apparition. Plus précisément, on se trouve dans « un
sanctuaire mystérieux » à l’atmosphère malsaine. Le tableau évoque ainsi la
nuit profonde de la sensualité qui devient presque un abîme luxurieux dans
lequel la blancheur de Salomé apparaît comme celle de la lune. Apparemment,
dans la peinture de Moreau, le côté lunaire domine le côté solaire.
La prépondérance de la lune est largement accentuée par les trois idoles qui
se trouvent à l’arrière-plan d’Hérode-Antipas. Une d’eux représente Arthémis,
déesse de la lune. Un commentaire anonyme paru dans la Bibliothèque
universelle de Lausanne, et que l’on considère être celui de Fromentin, donne
une longue description :
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 97
« Hérode, assis sur un trône élevé se laisse fasciner par la beauté de
la magicienne : il suit d’un regard hébété les ondulations de Salomé.
On dirait que son corps épuisé essaie de se ranimer pour mieux subir
le charme fatal qu’elle exerce. Au-dessus de sa tête, on aperçoit une
idole singulière. Est-ce la Cybèle aux nombreuses mamelles, la déesse
phrygienne par laquelle les créations monstrueuses de l’imagination
phénicienne se rattachent aux radieux habitants de l’Olympe ? Est-ce
une des innombrables divinitiés du panthéon hindou ? On peut hésiter
entre les deux : l’une ou l’autre serait également à sa place dans cette
œuvre étrange qui semble garder un reflet de tous les mysticismes de
l’Orient54). »
L’auteur cite ici la même déesse comparée par Flaubert à Hérodias :
« Cybèle », grande déesse de la fécondité. Or, Julius Kaplan55) aussi bien
que Pierre-Louis Mathieu56) affirment que la déesse dans Salomé dansant
est l’Arthémis d’Éphèse57) aux nombreuses mamelles. Comme le remarque
Hideo Ogawa, disciple de Vermaseren, Arthémis et Cybèle sont des déesses
chthoniennes dans la même lignée de la Grande Mère, excepté les nombreuses
mamelles d’Arthémis58). Selon l’explication des tauroboles par Frédéric
Creuzer, le rite du taurobole renvoie non seulement à Cybèle mais aussi à
Diane : « les taureaux étaient consacrés aux grandes déesses, à Diane d’Éphèse,
à Cérès ou à Proserpine, etc59)». Edward Falkener remarque ainsi : « Diana
was believed to assist at generation, from the circumstance of the time of
bearing being regulated by the lunar month : and Proclus says of her, or the
moon, ̶she is the cause of nature to mortals, as she is the self-conspicuous
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image of fontal nature60).» Dans L’Ane d’Or aussi, nous retrouvons le même
syncrétisme mythologique et la mention des déesses issues de la Grande Mère
dans chaque religion.
« (...) ; alors, le visage baigné de larmes, j’adresse cette supplication à
la divine Maîtresse :
« Reine du Ciel̶que tu sois Cérès, la féconde, mère et créatrice des
moissons, qui, joyeuse d’avoir retrouvé ta fille, après avoir banni
l’antique et bestiale provende du gland et révélé une nourriture plus
douce, hantes maintenant les sillons d’Éleusis̶que tu sois Vénus
du Ciel qui, au commencement des temps, as uni les sexes opposés
en engendrant l’Amour et, une fois assurée au genre humain la
perpétuité de sa race, es maintenant adorée dans ton sanctuaire de
Paphos qu’entourent les flots̶que tu sois la sœur de Phébus qui, en
soulageant de tes remèdes apaisants les douleurs des femmes en travail,
as fait naître à la lumière tant et tant de peuples et que l’on vénère
maintenant dans le temple illustre d’Éphèse̶(...) »
(..) Telle était la déesse dans toute sa puissance, lorsque, exhalant
les parfums heureux d’Arabie, elle daigna me faire entendre sa voix
divine : « Me voici, Lucius ; tes prières m’ont touchée, moi, mère
de ce qui est, maîtresse de tous les éléments, origine et souche des
générations, divinité suprêmes, reine des Mânes, moi, la première
parmi ceux d’En-Haut, visage unique des dieux et des déesses ; les
plages lumineuses du ciel, les souffles salutaires de la mer, les silences
pleins de larmes des Enfers, tout est gouverné au gré de ma volonté
; mon être divin est unique et nombreuses sont les formes, divers les
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 99
rites, infinis les noms par lesquels me vénère l’Univers entier. Ici, pour
les Phrygiens, premiers-nés des mortels, je suis Celle de Pessinonte,
mère des dieux, là, pour les Attiques, nés du sol, je suis Minerve
Cécropienne ; ailleurs, (...)61) » »
Quelle était l’importance de cette Déesse ? Depuis l’Antiquité, le temple
d’Éphèse dédié à Diane était considéré comme l’œuvre la plus extraordinaire
de l’art grec. Edward Falkener énumère les éloges de ce temple et de Déesse
dans Ephesus, and the Temple of Diana, publié en 1862, à la même époque où
Flaubert et Moreau s’intéressaient à cette Diane : Hérodote l’a comparé avec
la pyramide et le labyrinthe en Égypte ; Philo l’a placé au sixième rang parmi
les sept merveilles du monde ; Solinus l’a caractérisé comme la gloire d’une
cité le plus noble62). En ce qui concerne la statue de Diane, E.Falkener écrit :
« The great number of breasts of animals with which the statue of
Diana was covered, and from which she was called multimammia,
confirms the opinion of some learned men, that the Egyptian Isis and
the Greek Diana were the same divinity with Rhœa, whose name they
suppose to be derived from the Hebrew word, Rehah, to feed ; and
like Rhœa she was crowned with turrets, to denote her dominion over
terrestrial objects. (…) According to Herodotus, it appears that she was
the same as Bubastis63). »
D’autre part, il semble que les romanciers et les lettrés du dix-neuvième
siècle avaient tendance à considérer cette Arthémis d’Éphèse comme l’un
des symboles de l’Orientalisme en raison de ses trois lignes de mamelles64).
100
Moreau fait ressortir la sensualité et la volupté en choisissant cette célèbre
Arthémis avec ses mamelles multipliées dont l’emphase met en lumière la
fécondité et la féminité. Kaplan souligne cette importance de la fécondité
symbolisée par Arthémis et les deux Mithras qui l’accompagnent65). Flaubert
a-t-il été inspiré par ces idoles de Moreau qu’il avait remarquées au Salon de
1876 ?
Au sujet de l’inspiration de Moreau pour cette déesse, Julius Kaplan
soutient que le peintre aurait pu voir une statue de ce type dans la collection
du Vatican : « The Vatican sculpture had been illustrated in a publication forty
years prior to Moreau’s trip to Rome, and Moreau owned an engraving of it in
a sixteenth-century book. While Moreau’s Diana is not identical to the Vatican
figure, she is of the same basic type66).»
Mais, nous pouvons avancer une autre raison qui a poussé Moreau à choisir
cette déesse. Pierre-Louis Mathieu nous confirme que « Flaubert était un des
auteurs préférés de Moreau », et qui a eu tendance à avoir des tirages tardifs,
« souvent postérieurs à 1885 » à cause de la mort de sa mère (1884) et de son
amie (1890). Si l’on trouve non seulement Madame Bovary et L’Education
sentimentale mais aussi La Tentation de Saint Antoine dans la bibliothèque
de Gustave Moreau67), il est très probable qu’il ait lu la troisième édition (la
dernière édition) de La Tentation de Saint Antoine qui a paru en 1874 (édition
Charpentier), deux ans avant l’exposition de Salomé au Salon : à la différence
de la version de 1849 dans laquelle le catafalque d’Adonis fait son apparition
juste avant la scène de la procession de Cybèle68), c’est la déesse Cybèle
et l’archi-galle qui suivent la description de « la Grande Diane d’Éphèse »
dans la version définitive69). Les deux déesses sont ainsi rapprochées dans
la description flaubertienne. D’ailleurs, la scène représente successivement
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 101
les dieux de la résurrection. Sans doute Moreau aurait-il remarqué ces deux
déesses sur la même page de Flaubert ? « La Grande Diane d’Éphèse » lui
aurait-elle paru préférable à l’esthétique de la femme fatale ?
La description d’Hérodias-Salomé chez Flaubert et Moreau fait donc
référence à la Grande Mère mythologique. À la fois vierge et dévoreuse, la
femme fatale apparaîtra aussi sous l’aspect divin d’une déesse. Les traits
de caractère de Salomé énumérés par Yôko Kudô̶fière, solitaire, cruelle,
refusant de recevoir des autres̶ne tirent-ils pas leur origine de cette
divinité70) ? Cet aspect divin est à l’origine de la femme fatale, et ce serait une
des raisons pour lesquelles les artistes fin-de-siècle écrivaient la Femme fatale
avec une majuscule71). Ainsi, Huysmans décrit Salomé comme « surhumaine
et étrange » :
« Elle n’était plus seulement la baladine qui arrache à un vieillard,
par une torsion corrompue de ses reins, un cri de désir et de rut ; qui
rompt l’énergie, fond la volonté d’un roi, par des remous de seins, des
secousses de ventre, des frissons de cuisse ; elle devenait, en quelque
sorte, la déité symbolique de l’indestructible Luxure, la déesse de
l’immortelle Hystérie, la Beauté maudite, élue entre toutes par la
catalepsie qui lui raidit les chairs et lui durcit les muscles ; la Bête
monstrueuse, indifférente, irrésponsable, insensible, empoisonnant, de
même que l’Hélène antique, tout ce qui l’approche, tout ce qui la voit,
tout ce qu’elle touche72). »
Se pose aussi la question de l’identité problématique des deux autres dieux
qui accompagnent Arthémis au-dessus du trône d’Hérode. S’agit-il de deux
102
Mithras ou de deux Ahrimans ? Julius Kaplan, comme nous venons de le
voir, les considère comme étant deux images de Mithras, dieu du soleil, qui
rend Arthémis plus féconde73), du fait que Moreau aurait trouvé un dessin
de Mithras dans le Magasin Pitttoresque de 1840 dans sa bibliothèque74). Et
R.Van Heyms écrit dans La Défense du 30 mai 1876 :
« Il a peint Salomé dans des conditions tout à fait en dehors de la
tradition habituelle. Les monuments indous, les sculptures de Mithra,
et les avatars de Wishnou, telles sont les données étranges dans
lesquelles M. Moreau a puisé les costumes, les poses, les accessoires,
l’architecture de son tableau75)[sic]. »
Mais, Pierre-Louis Mathieu a assimilé ces deux dieux accompagnant Arthémis
à Ahrimans avec d’autres symboles de luxure et d’envoûtement :
« la fleur de lotus blanc-rose qu’elle tient symbolise la volupté ; à
son bras gauche, un bracelet orné d’un œil immense, l’Oudjat des
anciens Egyptiens, source du fluide magique ; en face d’elle, une
panthère noire, animal de la luxure ; derrière la musicienne aux seins
nus jouant sur son luth, Hérodiade, tenant à la main un éventail fait de
plumes de paon, autre représentation de la luxure ; dominant le trône
d’Hérode, une statue de la grande Diane d’Ephèse à la double rangée
de mamelles, image de la fécondité, flanquée de deux statues figurant
Ahriman, dieu du mal dans le panthéon perse (...)76).»
L’interprétation est d’autant plus compliquée que l’archéologie contemporaine
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 103
a montré que le dessin intitulé « Mithra » dans le Magasin pittoresque ne
serait pas une représentation de « Mithra », ce que confirme Hideo Ogawa,
spécialiste de Mithras et de Cybèle ; en effet, on n’a pas encore exhumé ni les
deux statues de Mithras ensemble, ni celles des Mithras qui accompagnent
Arthémis, ni les deux Ahrimans qui l’accotent. De sorte que c’est une pure
invention de la part de Moreau77). En outre, nous retrouvons une réplique
de la même image léontocéphale dans les planches rétablies par Frédéric
Creuzer pour les Religions de l’Antiquité, qui était une des sources principales
de La Tentation de Saint Antoine78). Selon Franz Cumont, le dieu à la tête
de lion, rappellerait plutôt « Zervan Akarana », soit « Chronos » dans la
mythologie grecque, soit « Saturne » dans la mythologie romaine79). Certains
l’assimilent à Ahriman, en raison de la présence du terme « Arimanio » gravé
sur une statue exhumée à York, en Angleterre. Ce qui est intéressant pour
notre analyse, c’est que ces deux « chronos » ont pu donner aux spectateurs
l’impression d’Ahriman, dieu du Mal. Moreau s’est largement inspiré des
revues populaires dont le Magasin pittoresque comme une des sources de son
image, si bien que ces idoles constituent un amalgame préfigurant l’esthétique
fin de siècle. Accompagnée des deux « Chronos » ou deux « Ahrimans » dans
un cadre dénué de lumière, l’Arthémis d’Éphèse aux nombreuses mamelles
dominant la salle du sacrifice renforce l’impression de perversité et de luxure.
Ou plutôt, ces trois idoles symbolisent le plaisir et la concupiscence de la chair
devant un Hérode totalement impassible, comme Hérodias en Cybèle domine
la salle du festin chez Flaubert.
Avec la sensualité d’Arthémis d’Éphèse et la perversité des deux idoles,
Salomés de Gustave Moreau sont essentielles dans la représentation de
Salomé en femme fatale. Soit « Mithra léontocéphale », selon l’appelation
104
de l’époque, soit Ahriman, les deux idoles dominent la salle dans laquelle la
tête de Iaokanann sera présentée en sacrifice. Quant à Arthémis d’Éphèse ou
Cybèle, elle apparaît comme la déesse de la lune. D’où le fait que le soleil
est moins dominateur à l’intérieur du sombre sanctuaire. Dans Hérodias de
Flaubert, le mythe du soleil est placé au centre du récit et Salomé exécutant la
danse du scarabée symbolise aussi la gloire de Dieu. À l’opposé de Flaubert,
Moreau insiste sur la luxure et la spontanéité de Salomé dont la danse ne
symbolise pas le soleil ; issue de Salammbô, Salomé de Moreau, sibylle
d’Arthémis, symbolise la lune et rappelle plutôt Salomé d’Oscar Wilde et
Hérodiade de Mallarmé.
Notes
1) Correspondance de Gustave Flaubert, Supplément (1872-juin 1877), recueillie, clasée
et annotée par MM. René Dumesnil, Jean Pommier et Claude Digeon, Paris, Conard,
1954, p. 250 (lettre à Tourgueneff portant la date du 2 mai 1876).
2) Ibid .
3) Adrianne Tooke, Flaubert and the pictorial arts, Oxford University Press, New York,
2000, p. 46.
4) Pierre-Marc de Biasi, introduction aux Trois Contes, Édition de Pierre-Marc de Biasi,
Librairie Générale Française, Le livre de Poche classique, Paris, 1999, pp. 33-34.
5) Cf. Œuvres complètes de Gustave Flaubert, t. 15, Club de l’Honnête Homme, Paris,
1975, p. 448.
6) Corr., cinquième série, op. cit., p. 380 (lettre à Ernest Chesneau datée de juin ou juillet
1868) : « Je vous remercie d’avoir rendu justice à Gustave Moreau, que beaucoup
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 105
de nos amis n’ont pas, selon moi, suffisamment admiré ! » ; Quant à « nos amis »,
Shigeru Kashima remarque que Flaubert entend ici Maxime du Camp et Gautier.
(Shigeru Kashima, Gustave Moreau̶Littérature peinte avec les couleurs, titre traduit
en français, Rokuyô-sha, 2001, p. 61)
7) Gustave Larroumet, « Le Symbolisme de Gustave Moreau », in La Revue de Paris, 1er
sept. 1985, p. 419.
8) On dit que Moreau a disposé de toute une série de ce magazine : « Enfin, la
revue illustrée Le Magasin pittoresque est là, complète depuis la première
année de parution, 1833, lui apportant par le texte et l’image une connaissance
encyclopédique. » (Geneviève Lacambre, Gustave Moreau Maître sorcier,
Gallimard, Réunion des Musées Nationaux, 1997, p. 14) Voir aussi : Maison d’artiste
maison-musée : l’exemple de Gustave Moreau, catalogue établi et rédigé par
Geneviève Lacambre, Ministère de la culture et de la communication, Éditions de la
Réunion des Musées Nationaux, 1987, p. 35 : « À côté des livres illustrés ou non et
des revues, notamment Le Magasin pittoresque, auquel s’ajoutent des index sélectifs
des illustrations établis par Gustave Moreau et recopiés, il y a des plâtres (...). »
9) Corr., sixième série, op.cit., p. 404. (lettre à sa nièce Caroline, le 22 août 1872).
10) Shigeru Kashima, op. cit., p. 61.
11) Pierre-Louis Mathieu, Gustave Moreau : sa vie, son œuvre, catalogue raisonné de
l’œuvre achevé, Office du Livre, Fribourg, 1976, p. 122.
12) Françoise Meltzer, op. cit., pp. 17-18.
13) Ibid., p. 19.
14) Pierre-Louis Mathieu, « La Bibliothèque de Gustave Moreau », in Gazette des
Beaux-Arts, avril 1978, pp. 155-162.
15) Voir le Catalogue d’Exposition : Gustave Moreau, au profit des œuvres du Travail et
des Pauvres honteux, Paris, 1906, Galerie Georges Petit, p. 37, n° 64, « Salammbô »,
106
dans la Collection de Mme la Comtesse Greffulhe.
16) Voir l’explication sur Salomé (en huile sur toile), annotée par Chikashi Kitazaki
(ex-conservateur au Musée National d’Art Occidental, Tokyo) : Catalogue de
l’Exposition de Gustave Moreau, mars-mai 1995, Musée National d’Art Occidental,
Tokyo, p. 158. Voir aussi le Catalogue d’exposition : Gustave Moreau, Paris, Galerie
Georges Petit, 1906.
17) Gustave Moreau, L’Assembleur de rêves, écrits complets de Gustave Moreau, texte
établi et annoté par Pierre-Louis Mathieu, Bibliothèque artistique & littéraire, Fata
Morgana, 1984, p. 78. C’est nous qui soulignons.
18) Larroumet, op. cit., pp, 425-426.
19) Chikashi Kitazaki, op. cit., p. 22. Pour ce qui est de l’évocation orientale, Edward W.
Said remarque l’intérêt pour la dissection dans l’orientalisme de Flaubert : « The lurid
detail of this scene is related to many scenes in Flaubert’s novels, in which illness is
presented to us as if in a clinical theater. His fascination with dissection and beauty
recalls, for instance, the final scene of Salammbô, culminating in Mâtho’s ceremonial
death. In such scenes, sentiments of repulsion or sympathy are repressed entirely ;
what matters is the correct rendering of exact detail. » (Cf. Orientalism, 1st Vintage
Books, 1979, p. 186 ) En fait, nous pourrions assimiler Mâtho au sacrifice à Moloch,
offrande au soleil, à la dernière scène de Salammbô. (Cf. Gustave Flaubert, Salammbô,
Garnier-Flammarion, 1964, p. 311.)
20) W.R.Smith, La religion de la race Sem, traduction en japonais, deuxième partie,
1943, p. 9. Voir aussi : Henri Hubert and Marcel Mauss, Sacrifice : It’s Nature and
Function, translated by W.D. Halls, Cohen & West, 1898, pp. 93-94 : « We may
suppose that regular recurrence of sacrifice persisted when sacrifice was heroified
at this level. The recurrent onslaughts of chaos and evil unceasingly required new
sacrifices, creative and redemptive. Thus transformed and, so to speak, purified,
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 107
sacrifice has been preserved by Christian theology. Its efficacy has simply been
transferred from the physical world to the moral. The redemptive sacrifice of the god
is perpetuated in the daily Mass » ; en ce qui concerne la relation entre ces études
de R.W.Smith et celles de Hubert et Mauss, voir : Hiroshi Yoshida, « Chercheur
de l’extase », titre traduit en japonais in HUMANITAS, published annually by The
Waseda University Law Association, Tokyo, n° 39, 2001, pp. 232-246.
21) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., p.124. Cf. Planche I.
22) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., traduction en japonais, Tokyo, Sanseido Co., Ltd.,
1980, p. 122.
23) Cf. Atsuko Ogane, « Mythes, symboles, résonances Le « festin » comme rite de
sacrifice dans Hérodias de Gustave Flaubert», in Études de Langue et Littérature
Françaises, n° 76, Société Japonaise de Langue et Littérature Françaises, Tokyo,
2000, pp. 44-56.
24) L’Inde de Gustave Moreau, (Musée Cernuschi, Paris, 15 février-17 mai 1997),
Paris-musées, 1997, pp. 60-61 : voir la planche n° 61, « Feuille d’études pour Salomé
dansant devant Hérode » avec l’inscription de Moreau à la plume et encre brune.
[Musée Gustave Moreau, Des. 2275] Cf. Planches II, III.
25) Corr., septième série, p. 296, fin avril 1876.
26) Giovanni Bonaccorsso, Corpus Flau bertianum, tome II, p. 340, f° 361 (637v),
esquisse.
27) L’Inde de Gustave Moreau, op. cit., p. 86. L’explication de « Salomé » n° 52 (M.G.M.
Cat. 880) est signée par « G.L ». C’est nous qui soulignons.
28) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., p. 122.
29) J.-K. Huysmans, A Rebourd, Lettres Françaises, 1981, p. 126.
30) Maria L. Assad, op. cit., p. 68.
31) L’Assembleur de rêves, op. cit., p.124. C’est nous qui soulignons.
108
32) TC, op. cit., p. 172.
33) Shigeru Kashima, op. cit., p. 68. Kashima donne la référence de l’inscription de
Moreau sur la toile intitulée Les Chimères : « La femme dans son essence première.
L’Être inconscient, folle de l’inconnu, du mystère, éprise du mal sous la forme de
séduction perverse et diabolique. Rêves d’enfants, rêves des sens, rêves monstrueux,
rêves mélancoliques, rêves transportant l’esprit et l’âme dans le vague des espaces,
dans le mystère de l’ombre, tout doit ressentir l’influence des sept péchés capitaux.
Tout se trouve dans cette enceinte satanique, dans ce cercle des vices et des ardeurs
coupables. » (L’Assembleur de rêves, op. cit., p. 99)
34) Mario Praz, La Chair, la mort et le diable dans la littérarture du 19 e siècle, le
romantisme noir, p. 198.
35) Izumiko Aöyagï , L’innocence, Hakusuï-sha, 2002, pp. 156-157.
36) Ibid., pp. 163-243 ; voir chapitre 4 « La belle dame sans merci ».
37) L’Inde de Gustave Moreau, op. cit., p. 53.
38) Ibid. C’est nous qui soulignons.
39) Chikashi Kitazaki, op. cit., pp. 22-23.
40) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., p. 124.
41) Nous modifions l’expression de Mario Praz : « avec Flaubert, nous sommes déjà
entrés sous le règne de la femme fatale » (op. cit., p. 152)
43) Gustave Moreau, op. cit., p. 60.
43) Atsuko Ogane, op. cit.
44) J.-K. Huysmans, op. cit., p. 124.
45) L’Assembleur de rêves, op. cit., 1984, pp. 60-61, «Œdipe et le sphinx». Cf. Planche
IV.
46) Yôko Kudô, op.cit., pp. 67.
47) Corr., cinquième série, p. 380 ; juin ou juillet 1868.
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 109
48) Gustave Moreau, L’Assembleur de rêves. op. cit., p. 60.
49) Cf. Yôko Kudô , op. cit., pp. 67-68. Kudô remarque que l’expression « femme fatale »
évoque « la femme » mûre ainsi que « le sexe », tandis que l’héroïne mythique se
rapporte toujours à la femme dont l’image profonde et énigmatique ne renvoie pas à
une seule image.
50) Ibid., p. 61, «Œdipe voyageur, le voyageur ».
51) Shigeru Kashima, op. cit., pp. 28-32.
52) Atsuko Ogane, op. cit.
53) Cf. Atsuko Ogane, « Re-lecture d’Hérodias (1)̶Identification et séparation chez
Hérodias et Salomé», in Revue de Hiyoshi, Langue et Littérature Françaises, n° 27,
1998, Yokohama, Japon, pp. 16-45.
54) Gustave Moreau, 1826-1898, catalogue d’exposition de Paris (Galeries
nationales du Grand Palais, 29 septembre 1998- 4 janvier 1999), Réunion des
Musées Nationaux, 1998, p. 150. Souligné par nous.
55) Julius Kaplan, The art of Gustave Moreau, Theory, Style and Content, Ann Arbor,
Michigan, 1982, p. 63. Kimié Imura remarque que Moreau a reproduit un ancien livre
romain, Antiquarium Statuarum Urbis Romae (De Cavallerii, Rome, 1954) Cf. Kimié
Imura, « La transition de l’image de Salomé dans l’art », titre traduit en français, in
Revue de l’Université Tsurumi, 1975, n° 12, 1975, p. 57-59.
56) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., p. 124.
57) The Ephesus Museum, catalogue du musée d’Éphèsus, édité par Sabahattin Türkoğlu,
directeur du musée Éphésus, en anglais, pp. 34-39. « It was thought that they
represented the breasts of the Goddess and so the Ephesian Artemis became known as
“the many-breasted Goddess”. (…) However, it was apparently necessary to enforce
the faith of their belief in motherhood, and so to the people of Anatolia this statue of
Artemis stressed the Goddess as being the source of progeny and great abundance. »
110
(p. 35)
58) Hideo Ogawa a remarqué la similitude entre ces deux déesses, excepté les pleines
mamelles : cette Arthémis correspond sur le plan temporel à la propagation du culte
de Cybèle parmi les Grecs ; pourtant, peu d’archéologues ont assimilé Arthémis
d’Éphèse à Cybèle, d’une part parce que les autres statues de Cybèle ne possèdent pas
de pleines mamelles, d’autre part parce que ces pleines mamelles elles-mêmes n’ont
pas encore été suffisamment étudiées, sur le plan mythologique ou archéologique.
(2002)
59) Cf. Ildikó Lrinszky, op.cit., p. 362.
60) Edward Falkener, Ephesus, and the Temple of Diana, London, Day & Son,
Lithographiers to the queen, 1862, p. 292.
61) Apulée, L’Ane d’or ou, Les métamorphoses, traduction et notes de Pierre Grimal,
Gallimard, 1988, pp. 260-263. Cf. « Livre XI ».
62) Edward Falkener, op. cit., pp. 187-196.
63) Ibid., p. 290.
64) Sur les interprétations de l’époque concernant cette déesse, Hideo Ogawa signale :
l’Arthémision d’Éphèse, temple d’Arthémis, a été exhumé d’une façon scientifique
par les archéologues allemands à partir du milieu du dix-neuvième siècle, mais il
semble que la statue de cette déesse d’Éphèse était connue depuis le dix-neuvième
siècle et devient un des symboles littéraires. Cf. Ekrem Akurgal, Ancient civilizations
and ruins of Turkey, from prehistoric times until the end of the roman empire,
Istanbul, 1978, pp. 142-157 ; pp. 378-383 ; p. 58 : « Before the coming of the Greeks,
the site of the temple of Artemis was occupied by an area sacred to the Anatolian
mother goddess Kybele, who was worshipped by the local inhabitants. » (p. 147)
65) Julius Kaplan, op. cit., p. 63.
66) Ibid.
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 111
67) Pierre-Louis Mathieu, « La Bibliothèque de Gustave Moreau», op. cit., pp. 155-162.
68) La Tentation de Saint Antoine, version de 1849, op. cit., pp. 268-269. Cf. Haruyuki
Kanasaki, « Le mythe d’Adonis dans la Tentation de saint Antoine », titre traduit en
français, in Studies in Language and Culture, n° 26, Faculty of Language and Culture
Graduate School of Language and Culture, Osaka University, 2000, pp. 233-250.
Kanasaki souligne la diversité des mythologies concernant la mort d’Adonis.
69) La Tentation de Saint Antoine, version définitive, Club de l’Honnête Homme, t. 4, op.
cit., pp. 128-129.
70) Yôko Kudô, op. cit., pp. 67-68.
71) Shûji Takashina, « Une étude sur l’imagination du dix-neuvième siècle̶l’adoration
de la tête coupée », in Revue de l’histoire des beaux-arts,vol. 2, 1985, p. 295.
72) J.-K. Huysmans, op. cit., p. 126.
73) Julius Kaplan, op. cit., p. 63. Kaplan donne une autre source à l’interprétation de la
fécondité: la lecture d’Hérodote.
74) Magasin Pittoresque, Première livraison, 1840, « L’Inde », pp. 75-76. Bien qu’il
s’agisse peut-être d’un « chronos », cette revue présente ce dessin comme une des
statues concernant le « mithras » : « Les simulacres semblables à celui que nous
reproduisons sont beaucoup plus rares. Voici comment on explique les différents
attributs dont ils sont composés : la tête, qui a les traits du lion, fait allusion à
la puissance que le soleil manifeste surtout dans ce signe ; les ailes indiquent le
mouvement éternel et rapide de cet astre ; la foudre sculptée sur la poitrine rappelle le
feu(...) » (Cf. Planche V). Hidéo Ogawa révèle que ce dessin est l’inverse de la copie
de la statue blanche en marbre exhumée du Mithraeum, Mitrei Ostia, mais ce qui est
frappant, c’est la suppression de l’inscription se trouvant au-dessus d’un pied. (Cf.
M.J.Vermaseren, Corpus Inscriptionum et Monumentorum Religionis Mithriacae,
Martinus Nÿhoff, The Hague, vol. 1, 1956, pp. 141-144 ; voir Fig. 85-Mon.312.
112
Voir aussi : Hidéo Ogawa, « The Concept of Time in the Mithraic Mysteries »,
Study of Time III, 1978, pp. 668-670. D’après Félix Lajard, « le nombre total des
représentantions figurées de Mithra léontocéphale qui, en 1839, se conservaient dans
divers lieux, ne s’élevait pas au-dessus de dix. En 1840, ce nombre s’augmenta d’un
bas-relief important (...) ». (Recherches sur le culte public et les mystères de Mithra
en Orient et en Occident, p. 587) Ainsi, nous pouvons constater que les statues
léontocéphales sont déjà connues au milieu du 19e siècle, au moment de la jeunesse
de Flaubert et de Moreau. D’autre part, on a pu retrouver un dessin similaire de cette
statue de « mithra léontocéphale » par Creuzer, une des sources importantes pour La
Tentation de Saint Antoine de Flaubert (Cf. Georg Friedrich Creuzer, Religions de
l’Antiquité, tome 1, première partie, livre second, chapitre IV, op. cit., pp. 349-353 ;
voir aussi l’explication des planches, p. LVIII, n° 239.)
75) Geneviève Lacambre, « Gustave Moreau, un Italien primitif ou quelque peintre
hindou », L’Inde de Gustave Moreau, op. cit., p. 35. Souligné par nous.
76) Pierre-Louis Mathieu, op. cit., pp. 122-124. Souligné par nous.
77) Cf. Hidéo Ogawa, Recherches de la Religion de Mithras, titre traduit en français,
Liton, 1993, p. 227-231 : La position d’Arimanius, « 3. アリマニウスの地位 ». Cf.
Planche VI. « White marble statue found in the Mithraeum on the right side. Beside
the entrance of the Biblioteca Vaticana. » (Cf. M.J.Vermaseren, Corpus Inscriptionum
et Monumentorum Religionis Mithriacae, Martinus Nÿhoff, The Hague, vol 1, 1956,
pp. 141-144.)
78) Georg Friedrich Creuzer, op. cit., t. 4, deuxième partie, planches, p. LVIII, n° 239. Cf.
Planche VII.
79) Ibid., p.230 ; Franz Cumont, Les Religions Orientales dans le Paganisme Romain,
Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1963, pp. 131-149 ; « Elle [la théologie du
mithriacisme] place à la tête de la hiérarchie divine et regarde comme la cause
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 113
première une abstraction, le Temps divinisé, le Zervan Akarana de l’Avesta, qui,
réglant les révolutions des astres, est le maître absolu de toutes choses. » (p. 140)
114
Planche I : Salomé dansant devant Hérode (Gustave Moreau)
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 115
Planche II : Esquisse pour la mitre d’Antipas (Gustave moreau)
116
Planche III : Esauisse pour la mitre de Salomé (Gustave Moreau)
L’image de Salomé—Gustave Moreau et Gustave Flaubert 117
Plache IV : Œdipe et sphinx (Gustave Moreau)
118
Plache V : Statue du dieu Mithra (Magasin Pitoresque)
Plache VI : Chronos (marbre statue found in the Mithraeum)
Plache VII : Æon ou le Temps (marbre statue found in the Mithraeum)

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