le p`tit barbey3

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le p`tit barbey3
LE P’TIT
BARBEY
Journal du collège Barbey d’Aurevilly de Saint
Sauveur le Vicomte. NUMERO 3
Edition du lundi 12 octobre 2009
LA BETE DU GEVAUDAN
EDITORIAL
Il y a des noms qui réveillent
l’imaginaire, qui nous ramènent vers
des temps anciens où l’histoire
côtoyait la légende.
La bête du Gévaudan. Ce nouveau
numéro vous invite à (re)découvrir
cette bête mystérieuse à travers les
différents travaux de nos élèves et
professeurs.
Bête mystérieuse ? Ce n’est pas
l’avis de Jean-Marc MORICEAU,
professeur à l’université de Caen,
qui a accepté, après Hubert REEVES,
d’être notre second grand témoin.
Son dernier livre La bête du
Gévaudan propose une nouvelle
lecture de ce tragique épisode de
l’histoire qui aurait causé la mort de
78 à 99 personnes et blessé entre 50
et 250. Bonne lecture à tous !
La Bête du Gévaudan : retour sur les faits…
Par Mme SICCARD, enseignante d’histoire-géographie
Le 3 juillet 1764, une jeune fille de 14 ans fut tuée par un animal « de
l’apparence d’un loup, mais semblant plus agile et plus fort », dans la
paroisse de Saint Etienne de Lugdarès. A partir de ce jour, la Bête
tuera plusieurs personnes par mois, parfois même par semaine,
jusqu’à l’été 1767.
Elle attaquait principalement les enfants et les femmes, souvent
isolés car ils gardaient les vaches dans les champs. Elle parvint même
à perturber l’approvisionnement des bourgs, les gens n’osant plus
sortir seuls ! Elle sévit dans les régions du Gévaudan, du Vivarais et
de l’Auvergne.
En janvier 1765, devant l’ampleur des méfaits de l’animal (qui
s’enhardit jusqu’à attaquer les gens dans leur jardin, parfois même
sur le seuil des maisons !), le roi promit 6000 livres à qui tuerait la
Bête. Des soldats furent placés dans les villages les plus exposés, et
les habitants furent armés. Le 7 février 1765, une gigantesque battue,
qui s’étendit sur plus d’une centaine de paroisses et mobilisa plus de
2000 hommes, fut organisée ; elle se solda par un échec, ainsi que les
nombreux autres pièges, traques et battues organisés tant par la
population que par les autorités.
En effet, la nature de terrain, composé de gorges profondes, de
ravins escarpés, de rochers et de bourbiers, rendait difficile la chasse
de l’animal. De même, les armes de l’époque, trop imprécises,
n’occasionnèrent à la Bête (touchée à plusieurs reprises) que des
blessures sans gravité. Le roi envoya alors ses propres chasseurs, qui
tuèrent un loup gigantesque fin 1765 ; les attaques s’espacèrent ,
mais ne cessèrent définitivement qu’en juin 1767, lorsqu’un grand
loup et sa louve furent tués…
(suite de l’article)
Au total, la Bête aurait attaqué 157 personnes entre le 30 juin 1764 et le
17 juin 1767. Il est difficile d’en faire un décompte exact ; en effet,
beaucoup ne sont pas comptabilisées : elles n’ont pas déclaré avoir été
attaquées, ou encore elles n’ont pas été enregistrées sur les registres
d’inhumations (leurs restes n’ayant pas été retrouvés).
Par ailleurs, des indemnités ayant été allouées aux familles des victimes ou
aux blessés, certains ont pu faire de fausses déclarations. Sur ces 157
victimes près des deux tiers avaient moins de 16 ans ; 81 personnes sont
mortes, et 27 ont été gravement blessées.
Plusieurs hypothèses ont été émises quant à la nature de la Bête, certaines
écartées car peu vraisemblables. Les témoins la décrivent comme un
animal très grand, « de la taille d’un veau d’un an », très allongé, le poil
roux, les oreilles courtes. On a parlé d’un léopard, d’un ours, d’un loup ou
même de plusieurs (le monstre attaquant parfois dans des lieux très
éloignés dans des laps de temps très courts). La coïncidence entre la mort
des loups en juin 1767 et la fin des attaques plaiderait en faveur de cette
dernière hypothèse, qui peut cependant être réfutée. Le doute plane
aujourd’hui encore.
Article rédigé d’après F. FABRE, La bête du Gévaudan
Le Gévaudan est une région au sud de l’Auvergne dans le département de
la Lozère :
La bête au cinéma
Plusieurs films s’en sont inspirés (Le pacte des loups de Christophe Gans) ou
racontent cette histoire (La bête du Gévaudan de Patrick Volson)
La bête dans les livres
La bête du Gévaudan de François Fabre
La bête du Gévaudan : l’innocence des loups de Michel Louis
« La bête du Gévaudan, une exploitation
médiatique …»
Jean-Marc MORICEAU, professeur d’histoire moderne à l’Université de Caen, spécialiste des rapports entre l’homme
et le loup, est l’auteur du livre La bête du Gévaudan, Dans cet ouvrage, J.M. MORICEAU avance la thèse d’un ou de
plusieurs loups. Il s’appuie pour cela sur les attaques touchant la population humaine de la région où sévissait la
Bête entre 1764 et 1767. J.M. MORICEAU juge fiables les témoignages parlant de plusieurs grands loups, des loups
ordinaires mais de bonne corpulence, prédateurs, qui auraient développé des comportements d’attaque sur l’homme
dans des contextes particuliers. Toutes les traces de pas observées renvoient aux loups, ce qui exclue selon lui
l’hypothèse d’hommes ou d’autres animaux.
Le professeur MORICEAU a bien voulu répondre aux questions du P’tit Barbey.
Le P’tit Barbey : Pourriez-vous nous rappeler quand est née l’histoire de la Bête du Gévaudan ?
J.M. MORICEAU : L’histoire de la Bête est née dès 1764 en raison d’une exploitation médiatique du fait divers
par la presse. « La Bête qui mangeait le monde » fut en effet un des premiers cas de diffusion
de l’information à l’échelle nationale et européenne. Lors de la première attaque, l’épisode fut
très médiatisé. Mais après quelques semaines d’accalmie, lorsque les attaques de la bête ont
repris, l’attention médiatique est retombée. Pour Paris, le problème était réglé et ce nouvel
épisode n’intéressait plus personne en dehors du Gévaudan.
Le P’tit Barbey : Quelles sont les hypothèses couramment avancées sur la nature de la Bête ?
J.M. MORICEAU : Les hypothèses forgées, surtout au 20è siècle, sont les suivantes :
- un sorcier
- une hyène
- un hybride chien-loup
- un ou des loups
- un animal sauvage dressé à tuer et commandé par l’homme
Le P’tit Barbey : Selon vous, il s’agirait plutôt d’un ou de loups. Quels sont les éléments qui permettent d’appuyer
votre thèse ?
J.M. MORICEAU : La nature des attaques (étranglement et consommation), la typologie des victimes (femmes
et enfants gardant des vaches), les empreintes relevées, les loups effectivement touchés ou
abattus, la réalité des autres attaques de loups mangeurs d’hommes dans l’histoire, l’absence
de toute preuve relative aux autres hypothèses.
Qui étaient les chasseurs ?
Le capitaine Duhamel : c’est le premier chasseur à avoir chassé la bête
Messiers Denneval : Jean est venu avec son fils Jean-François. Jean est
un grand chasseur de loup.
François Antoine : né vers 1695, François-Antoine était arquebusier* du
roi Louis XV. Il était également grand louvetier** du royaume.
* personne qui utilisait une arquebuse (arme à feu qu’on faisait partir à
l’aide d’une mèche)
** personne chargée de la chasse des loups
Une bête du Gévaudan… ou plusieurs ?
La bête a enfin été tuée ! Pourtant elle réapparaît, est à nouveau chassée,
puis réapparaît encore !
La bête du Gévaudan a-t-elle réellement été chassée ? Ou bien y avait-il
finalement plusieurs bêtes ? Nous vous proposons un bref retour sur les
différentes chasses.
Le capitaine Duhamel chasse le premier la bête avec des dragons (c’està-dire des cavaliers). Elle réussit quand même à s’enfuir (1764)
Denneval remplace Duhamel. La chasse est râtée. La bête fut quand même
touchée par deux chasseurs mais elle s’enfuit dans les bois (1765)
Antoine un autre chasseur remplace Denneval. Il réussit à tuer une bête
avec l’aide d’un garde. La bête est présentée au roi (1765)
Quelques temps après, de nouvelles attaques sont commises à Saugues.
Jean Chastel fait une battue ; il touche la bête à l’épaule et les chiens
achèvent la bête (1767)
Les hypothèses
Un fou, un loup, un loup à la peau de sanglier, une hyène, un fléau de Dieu,
une panthère… Selon certains, la bête serait un groupe d’assassins du fait
d’indices qui ne concordent pas. On ne sait pas vraiment ce que fut la bête
et ça restera sûrement un mystère…
Un grand merci à tous les élèves, en particulier à Hugo et Lucas BODIN, et
Laurent WATRIN, sans oublier Mlle BORDERON, professeur documentaliste,
et Mme SICCARD, professeur d’histoire-géographie.
Arquebuse