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SPÉCIAL IMMOBILIER BORDEAUX Un renouveau salutaire La mutation de la rive droite a redonné confiance aux investisseurs. D’une manière générale, les transactions reprennent dans la ville, même si les acquéreurs hésitent encore à s’engager confiants qu’il y a dix ans pour investir. Avec le dispositif de défiscalisation type Scellier, des investisseurs ont acheté, en vue de leur retraite, un pied-à-terre en ville ou un logement pour leurs enfants étudiants. Un investisseur sur cinq provient de Gironde. Même chose pour de jeunes ménages de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB), attirés par des programmes en accession sociale. Bref, une mixité devenue réalité. Stéphane et Nathalie, tous deux dans l’informatique, ont cherché où s’installer. A Belcier ? « Les projets en sont encore à leurs débuts. Et, dans le neuf, il faut compter 3 500 euros/m2. Trop cher pour nous », estime Nathalie. C’est à Lormont qu’ils ont trouvé une maison de 110 m2, pour 200 000 euros. « Nous sommes près du tram et des axes autoroutiers., tout en bénéficiant d’une grande diversité de paysages. C’est un secteur très vert. En plus, on sent sur cette rive droite le foisonnement de projets liés à la création de nouveaux quartiers, de nouvelles structures dédiées à la culture. » Les bailleurs sociaux multiplient les opérations sur le secteur. A Floirac, dans la ZAC des Quais, Mésolia Habitat va construire des logements BBC (bâtiment basse consomma- ☛ Photos : D. Schneider / Urba Images Server L e pari est gagné. La rive droite a conquis une identité. « Nous avons remporté la bataille de l’image », s’enthousiasme Etienne Parin, le directeur du Grand Projet de ville (GPV), groupement d’intérêt public lancé en 2000, liant les communes de Floirac, Lormont, Cenon et Bassens pour revitaliser un territoire très populaire. Des quartiers naissent – des ZAC au pied des coteaux, des constructions neuves de qualité – et des axes de communication (pont Bacalan-Bastide, pont Jean-Jacques-Bosc) sont créés. Résultat : les particuliers sont plus ●I DR Spécial immobilier MARIE-CLAUDE NOËL Conseillère municipale de Bordeaux, élue Verte, conseillère communautaire, à la tête d’une agence d’urbanisme Le Nouvel Observateur. – Quelle est la situation du logement dans l’agglomération bordelaise ? Marie-Claude Noël. – La production de logements n’est pas conforme aux besoins. A’Urba, l’agence d’urbanisme de la métropole bordelaise, a calculé que, dans la CUB, un T3 de 70 m2 dans l’ancien, d’une valeur de 162 000 euros, était inaccessible pour 76% des ménages. Dans le neuf, la même surface, vendue 207 000 euros, est inaccessible pour 85% des ménages. On voit bien que le logement est la priorité. Entre 2006 et 2009, l’engagement de la CUB au titre des aides à la pierre a atteint 37 millions d’euros. Dans le même temps, l’Etat mettait 30 millions. Son effort est inférieur à celui de la CUB, et on peut craindre qu’il ne diminue encore. Or c’est lui qui a la compétence en matière de logement. Faut-il créer plus de ZAC pour éviter l’étalement urbain ? M.-C. Noël – La CUB a déjà investi dans un nombre important de ZAC. Il faut mettre en œuvre d’autres outils. Je pense notamment à une politique qui viserait à avoir une maîtrise foncière. Les collectivités pourraient se doter d’un établissement public foncier qui identifierait les gisements fonciers sur la CUB et qui en ferait l’acquisition pour constituer des réserves pour demain. Or ce dossier n’est pas mûr politiquement. Mais si on veut produire de l’accession et de la location à des coûts raisonnables, c’est la solution. Aucun accord politique au sein de la CUB n’est en vue. Nous, les Verts, souhaitons cet établissement public foncier. Vous venez d’intégrer le conseil d’administration d’InCité. Quel est votre constat ? M.-C. Noël – Il faut soutenir ces opérations dans le cœur historique, qui permettent de limiter les logements vacants, de réduire l’insalubrité et de lutter contre les marchands de sommeil. Mais il est difficile de faire du logement social dans le centre historique. Ce sont de petites opérations qui coûtent cher. InCité doit faire un travail de pédagogie auprès des propriétaires occupants qui sont contraints par un cahier des charges imposé pour réaliser des travaux. Il faut plus de financements publics. Propos recueillis par C. G. II ● LE NOUVEL OBSERVATEUR Place de la Victoire tion) de huit étages, commercialisés autour de 2 000 euros/m2. A Lormont, les dix pavillons de son programme Les Allées de la Ramée se sont vendus comme des petits pains. « En trois mois, tout était commercialisé. Le mythe de la maison individuelle est toujours bien présent », indique Arnaud Lecroart, le directeur de Mésolia Habitat. Eric et Patricia ont ainsi pu acheter, pour 157 000 euros, un pavillon de 84 m2, avec garage, jardin de 60 m2 et terrasse. Lucie et Mehdi, 38 ans, ont aussi profité du même programme et sont maintenant propriétaires d’un pavillon de 82 m2 avec un terrain de L’OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DE LA COMMUNAUTÉ URBAINE DE BORDEAUX VEUT BOOSTER SES EFFORTS DANS L’ACCESSION SOCIALE 160 m2. « C’est une maison dans laquelle je veux rester pour vieillir », confie Lucie. Aquitanis, l’office public de l’habitat de la Communauté urbaine de Bordeaux, veut booster ses efforts dans l’accession sociale, en passant de 50 lots par an à 150 en 2011. « Nous voulons développer une offre de proximité urbaine, en construisant des logements qui préservent l’intimité tout en offrant de larges espaces à l’extérieur. Pas question pour nous d’aller construire des petites maisons à 40 km de Bordeaux, au fin fond du Médoc », répète Bernard Blanc, son directeur général. Reste que le désir d’espace est vivace. Yannick Billoux, directeur de l’Agence nationale pour l’Information sur le Logement (Adil) en Gironde a fait les comptes : « Les deux tiers de ceux qui viennent nous voir plébiscitent la maison individuelle. Et 60% des projets portent sur des 4-pièces et plus. Avec une enveloppe de 170 000 euros, soit ces personnes reportent leur projet, soit elles vont dans le rural profond. » La Communauté urbaine de Bordeaux s’est promis d’augmenter la cadence des constructions. Son président, le socialiste Vincent Feltesse, s’est fixé pour objectif un rythme annuel de 8 000 à 9 000 logements. Dont 30% de logements sociaux. Tout en prévenant qu’il n’était pas question de suppléer au désengagement de l’Etat ! En attendant, à Bordeaux, le marché frémit… Après une baisse des prix de l’ancien de 6,2% l’an dernier – d’après la chambre des notaires, il faut compter en moyenne 2 344 euros/m2 pour un appartement – et une chute de 20% des ventes dans le neuf, la reprise s’amorce. « Depuis deux mois, on sent que ça bouge. Mais les gens ont peur de l’avenir. Ils ne s’engagent pas facilement », estime Alain Gaudicheau, de l’agence Grand Sud Immobilier. De plus en plus, ceux qui disposent d’un budget confortable font leurs calculs : pour résoudre l’équation maison + jardin + tram, il faut suivre la direction des communes qui jouxtent Bordeaux et s’installer à Mérignac, Bègles ou Pessac. Benjamin voulait un jardinet pour y mettre son barbecue. Il a trouvé à Pessac une maison à rénover de 60 m2, avec un jardin de 40 m2, pour 140 000 euros. « Je ne suis pas coincé dans un appartement. Et je suis bien placé pour rejoindre facilement l’hypercentre de Bordeaux », se réjouit-il. Sylvie, jeune infirmière, a craqué pour un appartement de 32 m2, payé 65 000 euros, proche du tram, dans le centre de Pessac, qu’elle a loué à un étudiant pour 410 euros hors charges. A Pessac, où s’est implantée une partie du campus universitaire, l’investissement locatif a de beaux jours devant lui. Ici, comme à Mérignac et à Bègles, le moindre terrain s’arrache. « C’est un marché très actif. Les petits constructeurs et les promoteurs sont friands de foncier situé dans des quartiers desservis par le tram, pas trop éloignés du cœur des villes », note Cyrille Berger, de la Bourse de l’Immobilier. Dans le quartier du Chiquet, à Pessac, 3 000 m2 se sont vendus 600 000 euros. Enfin, il y a ceux qui anticipent l’arrivée du TGV qui mettra Bordeaux à deux heures de Paris. Cette infographiste et son époux architecte, parisiens, visitent des échoppes à Bègles. Leur budget : 440 000 euros. Une échoppe rénovée de 140 m2, avec un jardin de 300 m2, leur est proposée à 309 000 euros. Ils ont pris position. COLETTE GOINERE