FIBRES OPTIQUES MICROSTRUCTURÉES DE HAUT INDICE

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FIBRES OPTIQUES MICROSTRUCTURÉES DE HAUT INDICE
F IBRES OPTIQUES MICROSTRUCTURÉES DE HAUT INDICE :
PERTES ET DISPERSION CHROMATIQUE DU FONDAMENTAL , ET CUTOFF
DU SECOND MODE , COMPARAISON AVEC LA SILICE
Frédéric Bordas, Laurent Provino et Gilles Renversez
Institut Fresnel (UMR 6133) et Université Aix-Marseille III
Faculté des Sciences et Techniques de St Jérôme
13397 Marseille cedex 20, France. Tél: (33) 4 91 28 89 85, Fax: (33) 4 91 67 44 28
[email protected]
R ÉSUMÉ
En utilisant une méthode numérique rigoureuse et précise, la méthode multipolaire, nous décrivons les propriétés des fibres optiques microstructurées à cœur plein de haut indice. Nous
établissons le comportement des pertes et de la dispersion chromatique dû au guide, pour le
mode fondamental en fonction des paramètres géométriques de la structure. Nous terminons
par la caractérisation de la courbe de cutoff du second mode de ces fibres. Nous comparons
ces différents résultats à ceux obtenus précédemment pour les fibres microstructurées en
silice.
M OTS - CLEFS : fibres microstructurées, haut indice, pertes, coupure, transition, modes, dispersion
1.
I NTRODUCTION
De nombreux résultats concernant les fibres optiques microstructurées (FOMs) à cœur plein en
silice ont déjà été publiés[1, 2, 3, 4], ce n’est pas le cas pour les fibres constituées de verres de haut
indice pour lesquelles seuls des résultats partiels sont disponibles[5, 6]. L’intérêt des FOMs de haut
indice est double. Du point de vue théorique, le contraste d’indice au sein des FOMs entre les inclusions
(simples trous le plus souvent) et la matrice est nettement plus élevé (facteur 100 au moins) que le
contraste d’indice existant dans les fibres optiques conventionnelles. L’impact de l’indice de la matrice
de la FOM sur ces propriétés est donc un aspect à ne pas négliger. Du point de vue pratique, certains
verres de haut indice, comme les chalcogènures par exemple, possédent des coefficients de non-linéarité
mille fois plus grands que ceux de la silice, or de nombreuses applications des fibres dans le domaine des
télécommunications sont basées sur des phénomènes non-linéaires. La description et la compréhension
des propriétés linéaires des FOMs de haut indice est une étape préliminaire essentielle à la maîtrise des
effets non-linéaires en leur sein. Dans notre communication, nous aborderons les propriétés essentielles
des FOMS à cœur plein de haut indice à savoir le positionnement relatif des modes à pertes dans le plan
complexe, les pertes et la dispersion chromatique du mode fondamental, ainsi que la caractérisation de la
courbe de cutoff du second mode. Nous comparerons aussi ces résultats à ceux obtenus précédemment
pour les FOMs en silice. Afin de mieux décrire les phénomènes physiques sous-jacents pour le cutoff du
second mode nous donnerons des résultats pour plusieurs indices de la matrice.
2.
2.1
M ODE
FONDAMENTAL ET MODES D ’ ORDRE SUPÉRIEUR
Cartographie des modes
Les FOMs à cœur plein que nous étudions sont constituées d’un nombre fini d’inclusions circulaires de bas indice au sein d’une matrice d’indice plus élevé noté n mat . Les inclusions de diamètre
identique d sont disposées sur les vertex d’un réseau triangulaire de pas Λ. Comme notre méthode [4] ne
nécessite pas de périodisation artificielle de la structure étudiée, un paramètre important est le nombre
de couches d’inclusions Nr entourant le cœur plein. Les modes guidés qui apparaissent dans les FOMs
sont des modes à pertes c’est à dire que leur indice effectif (n eff = β/k0 ) possède une partie imaginaire
strictement positive (on a choisit une dépendance des champs électromagnétiques en exp(i(βz − ωt))).
Cette partie imaginaire =m(neff ) permet de calculer les pertes L exprimées en dB/km par la relation :L =
40π109 =m(neff )/(ln(10)λ).
Dans le plan complexe, le mode fondamental est clairement identifié comme étant celui d’indice
effectif ayant la plus grande partie réelle et la plus petite partie imaginaire (mode de classe de symétrie
C3/4 noté C3/4-a), les trois modes d’ordre supérieur les plus proches du fondamental formant un pseudotriplet (C1-a, C2-a, C5/6-a, la nomenclature proposée est basée sur les résultats théoriques obtenus par
McIsaac sur la classification des modes en fonction de leurs propriétés de symétrie pour un guide d’onde
donné[7, 8]). Nous avons constaté que cette répartition des premiers modes est similaire pour les indices
1.444024 (silice) et 2.5 (verre de haut indice), et que le mode possédant les pertes les plus faibles aux
grandes longueurs d’onde, mis à part le fondamental, est dans les deux cas le mode de classe de symétrie
2. C’est ce mode qui sera étudié dans la section 2.3.
2.2
Pertes et dispersion chromatique du mode fondamental
1e+08
80
1e+00
1e+06
Nr=2 (18 holes)
1e+02
Nr=3 (36 holes)
1e+00
DW (ps/nm/km)
1e-01
1e+04
1e-02
Nr=4 (60 holes)
Nr=6 (126 holes)
Nr=5 (90 holes)
1e-04
0.25 0.3 0.35 0.4 0.45 0.5 0.55 0.6
d/Λ
(a) Pertes en dB/km avec une
échelle logarithmique en fonction
du nombre de couches d’inclusions
Nr et du rapport d/Λ pour une
FOM avec nmat = 2.5 à λ =
1.55 µm. Le pas du réseau Λ est
égal à 2.3 µm.
nmat=1.444024, d/Λ=0.8/2.3
40
nmat=1.444024, d/Λ=1.0/2.3
20
nmat=2.5, d/Λ=0.6/2.3
nmat=2.5, d/Λ=0.8/2.3
0
nmat=2.5, d/Λ=1.0/2.3
-20
-40
-60
1e-03
1e-02
nmat=1.444024, d/Λ=0.6/2.3
60
α(Nr+1)/α(Nr)
confinement losses (dB/km)
Nr=1 (6 holes)
nmat=2.5
nmat=1.444024
1e-04
0.25 0.30 0.35 0.40 0.45 0.50 0.55 0.60
d/Λ
(b) Rapport des pertes pour une
FOM avec Nr =N+1 (αN+1 ) et pour
une FOM avec Nr =N (αN ) en fonction de d/Λ pour les indices de la
matrice nmat = 1.444024 et nmat =
2.5. (Λ = 2.3µm et λ = 1.55 µm).
-80
-100
-120
0
2
4
6
8
10
Wavelength (µm)
(c) Comparaison des dispersions
chromatiques du guide pour des
FOMs d’indice nmat =1.444024 et
nmat =2.5 pour plusieurs valeurs du
rapport dΛ pour des structures avec
Nr = 3.
Le comportement des pertes est globalement le même que celui observé pour une FOM basée sur
une matrice en silice (voir figure (a)) mais le plus fort contraste d’indice permet une réduction des pertes
plus importante pour chaque nouvelle couche d’inclusions (typiquement d’un ordre de grandeur) comme
le montre la figure (b). Il peut ainsi être possible d’obtenir des pertes inférieures au dB/km avec des
FOMs de haut indice ayant un nombre relativement faible d’inclusions.
Nous avons aussi calculé la dispersion chromatique D W engendrée par le guide d’onde qu’est la
FOM, pour cela nous prenons un indice de la matrice indépendant de la longueur d’onde. Cette approche
permet de mieux cerner quel type de dispersion chromatique totale il est par la suite envisageable d’obtenir avec des matrices constituées de verre de haut indice. Comme on peut le constater sur la figure (c),
l’amplitude et la plage de variation de la dispersion chromatique du guide s’accroît avec l’indice optique.
Ceci signifie qu’il est certainement possible de compenser la dispersion matérielle très négative présente
dans de nombreux verres de haut indice tout au moins à certaines longueurs d’onde.
2.3
Cutoff du second mode
Il a déjà été établi que le second mode des FOMs à cœur plein en silice possède une longueur
d’onde de coupure associée à une transition entre un état confiné dans le cœur et un état déconfiné[9].
Cette transition, qui est d’autant plus accentuée que le nombre de couches d’inclusions N r est élevé,
se produit de façon similaire pour les FOMS à cœur plein en verre de haut indice comme le montre la
figure (d). Nous avons pu établir que, pour N r fixé, cette transition est d’autant accentuée que le contraste
d’indice entre les inclusions et la matrice est faible. La figure (e) décrit la position de cette transition
dans l’espace des paramètres de la FOM pour plusieurs valeurs de n mat . On peut constater que comme
attendu la courbe se décale vers les grandes longueurs d’onde pour les verres de haut indice par rapport à
la silice (et mutatis mutandis pour une matrice d’indice optique égal à 1.1). Le phénomère remarquable
est que la valeur critique du rapport d/Λ en deçà de laquelle la transition ne se produit plus varie très
peu en fonction de l’indice de la matrice (0.403 pour n mat =2.5, 0.412 pour nmat =1.444024, et 0.431 pour
nmat =1.1). Cela signifie que l’on peut conserver le caractère "infiniment" monomode d’une FOM en verre
de haut indice dans une région de l’espace des paramètres géométriques de la FOM équivalente à celle
associée à une FOM en silice, ce qui peut s’avérer très utile pour les applications.
1.0e-02
2nd mode deconfine,
fibre monomode
Nr=7 (168 holes)
n=2.5
1.0e-04
1.0e+00
Fibre
infiniment
monomode
λ/Λ
Im(neff)
1.0e-06
d/Λ=0.4
d/Λ=0.75
nd
1.0e-01
2 mode confine,
fibre multimode
1.0e-08
1.0e-10
1.0e-02
0.300
0.400
0.500
0.600
0.700
0.800
d/Λ
1.0e-12
0.010
0.100
λ/Λ
Q minimum nmat=1.1
Q minimum nmat=1.44
1.000
(d) =m(neff ) du second mode en fonction du rapport λ/Λ
pour une FOM avec Nr = 7, nmat = 2.5, et λ = 1.55 µm.
=m(ne f f ) décroît de façon monotone pour des valeur
croissante de d/λ (ici comprises entre 0.4 et 0.75).
3.
Q minimum nmat=2.5
(e) Courbes de cutoff du second mode pour trois valeurs
de l’indice de la matrice. Chaque courbe partitionne l’espace des paramètres de la FOM à cœur plein en trois régions : "infiniment" monomode, monomode, multimode.
C ONCLUSION
Les résultats de cette première étude systématique des propriétés linéaires des FOMs de haut indice montrent leurs fortes potentialités (pertes, dispersion chromatique, et caractère monomode). Nous
concluerons notre présentation par nos derniers résultats concernant le contrôle de la dispersion chromatique totale dans ces fibres pour des structures innovantes similaires à celles proposées pour la silice[4].
R ÉFÉRENCES
[1] T. A. Birks, J. C. Knight, and P. J. Russel. Opt. Lett., 22(13) :961–963, 1997.
[2] A. Ferrando, E. Silvestre, J.-J. Miret, and P. Andrés. Opt. Lett., 25(11) :790–792, 2000.
[3] T. P. White, R. C. McPhedran, C. M. de Sterke, L. C. Botten, and M. J. Steel. Opt. Lett.,
26(21) :1660–1662, 2001.
[4] G. Renversez, B. Kuhlmey, and R. McPhedran. Optics Letters, 28(12) :989–991, 2003.
[5] T. M. Monro, Y. D. West, D. W. Hewak, N. G. R. Broderick, and D. J. Richardson. Electronics
Letters, 36(24) :1998–2000, 2000.
[6] K. M. Kiang, K. Frampton, T.M. Monro, R. Moore, J. Tucknott, D. W. Newak, D. J. Richardson, and
H. N. Rutt. Electronics Letters, 38(12) :546–547, 2002.
[7] P. R. Mc Isaac. IEEE Trans. on Microwave Theory Tech., 23(5) :421–429, 1975.
[8] F. Zolla, G. Renversez, A. Nicolet, K. Kuhlmey, S. Guenneau, and D. Felbacq. Foundations of
Photonic Crystal Fibres. Imperial College Press, to be published in september 2004.
[9] B. Kuhlmey, R. C. McPhedran, and C. M. de Sterke. Optics Letters, 27(19) :1684–1686, 2002.