N°190 du 4 janvier 2017 - Cinéma l`Image, Plougastel

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N°190 du 4 janvier 2017 - Cinéma l`Image, Plougastel
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N° 189 (Décembre 2016)
Semaine du 4 janvier 2017
partir de 10/11 ans.
Franç. (Durée : 1h38). Comédie de Sophie Reine avec Gustave Kervern, Camille
Cottin, Héloïse Dugas…
Denis Patar est un père aimant mais débordé qui se débat seul avec l’éducation de
ses filles, Janis 13 ans et Mercredi 9 ans, deux boulots et une bonne dose de système D. Un
soir Denis oublie, une fois de trop, Mercredi à la sortie de l’école. Une enquêtrice sociale
passe alors le quotidien de la famille Patar à la loupe et oblige Denis à un « stage de
parentalité ». Désormais les Patar vont devoir rentrer dans le rang…
À
C
hez les Patar, on considère David Bowie
comme un membre de la famille, on
porte des chaussettes dépareillées et on
se débrouille avec ce monde « où les
mamans et les cochons d'inde meurent sans
prévenir ». Denis, le père veuf, a deux boulots
et mange des chips au petit déjeuner. Janis, 13
ans, est très fière que sa mère ait été une «
grande compositrice de chansons de manifs ».
Mercredi, 9 ans, fait du catch et trouve marrant
d'avoir des poux. Un jour, Denis oublie, une fois
de plus, sa cadette à la sortie de l'école. Une
enquêtrice sociale le prévient : s'il ne veut pas
perdre la garde de ses deux amours, il va devoir
suivre un « stage de parentalité »...
Monteuse, entre autres, des films de Rémi
Bezançon (Le Premier Jour du reste de ta vie),
Régis Roinsard (Populaire) ou Laurent Cantet
(Foxfire), Sophie Reine passe à la réalisation
avec une comédie mélancolique qui fleure bon
les souvenirs personnels. Les couleurs pop,
pimpantes juste ce qu'il faut, et l'éloge tendre de
la marginalité en famille évoquent Little Miss
Sunchine. Cigarettes et chocolat chaud aborde
aussi, avec une fantaisie réconfortante, une «
différence » rarement traitée au cinéma : le
syndrome de Gilles de la Tourette... Face aux
deux jeunes comédiennes remarquables (dont la
pétulante Fanie Zanini, qui a bien grandi depuis
Suzanne, de Katell Quillévéré), Gustave Kervern
confirme qu'il est le nounours triste le plus
fondant du cinéma français.
Guillemette Odicino, Télérama.
portrait de Denis, veuf qui élève ses deux filles
selon une méthode atypique et, surtout, selon
ses moyens limités. Ancien gauchiste, il privilégie
le bordel et l’autogestion ; employé modeste, il
fait des économies sur tout et n’importe quoi,
recyclant tout ce qu’il peut. Ciblé par une
enquête de l’assistance sociale, il va devoir
rentrer dans le rang sous peine de perdre la
garde de ses filles. Le doux géant Gustave
Kervern est remarquable dans le rôle du papa
gâteau un peu déconnecté de la réalité,
incapable de faire face aux problèmes psy
grandissants rencontrés par son aînée. Le film
aborde la problématique du deuil et de la
reconstruction l’air de rien, avec le souci de
rester à hauteur des personnages que Sophie
Reine regarde avec tendresse. Elle applique le
même traitement au personnage de l’assistante
sociale, joué par Camille Cottin, de moins en
moins caricatural à mesure que l’intrigue avance.
Il y a bien quelques trous d’air dans le scénario,
des maladresses (les affreux tics de l’ado) mais
le caractère touchant et un brin iconoclaste du
film l’emporte sur ses petits défauts.
Christophe Narbonne, Première.
A
M
onteuse attitrée de Rémi
Bezançon (Le premier jour du
reste de ta vie, Zarafa), Sophie
Reine partage avec son mentor
le goût des chroniques intimistes contaminées
par la dinguerie et l’émotion. Elle y fait le
près un court-métrage réussi Jeanine
ou mes parents n’ont rien
d’exceptionnel, Sophie Reine, monteuse
réputée, éprouve désormais l’envie
d’orienter sa carrière vers la réalisation en
signant avec Cigarettes et chocolat chaud une
œuvre non seulement en grande partie
autobiographique, mais surtout drôle et décalée.
Denis et Caroline formaient un couple hippie
contestataire. Le film s’ouvre sur une scène de
manifestation à laquelle ils participent et qui
scelle leur rencontre. (La musique de David
Bowie, rappel de cette époque de leur jeunesse,
nous accompagne alors agréablement).
-1-
M a lhe ur e us e m e nt,
C a r oline
d is p a r a ît
prématurément laissant à Denis le soin de
s’occuper de leurs deux filles. Le voilà donc
responsable, bien malgré lui, d’une famille de
bric et de broc mais soudée et pleine de vie.
Incarné par un Gustave Kervern touchant, cet
homme nonchalant mais au caractère bien
trempé va devoir assurer le quotidien, lui qui
peine à s’assumer lui-même, qui n’a comme
principe d’éducation que son amour paternel et
qui financièrement a bien du mal à joindre les
deux bouts. Chez les Patar, il est courant de
porter des chaussettes dépareillées ou des
vêtements bariolés, le pantalon de l’un ayant
déteint sur le tee-shirt de l’autre. Ce papa
déboussolé n’a qu’un credo : protéger ses
enfants à tout prix d’un monde brutal « où les
mamans et les cochons d’Inde meurent sans
prévenir ». Incapable d’allier théorie et pratique,
désarçonné par la maladie de sa fille aînée
encore aggravée par le décès de sa mère, il est
jugé parent défaillant par l’administration qui lui
impose un stage de responsabilité parentale.
Mais Denis, anticonformiste depuis son plus
jeune âge, n’a pas l’habitude de se plier aussi
facilement aux injonctions de la loi.
Il devra donc se frotter au mode d’éducation
normé que symbolise l’assistante sociale
Séverine Grellot, dans la peau de laquelle la
désormais incontournable et excellente Camille
Cottin se glisse avec une belle aisance. Cette
confrontation est évidemment prétexte à une
kyrielle de scènes drôles et tendres car s’il l’on
prend d’emblée parti pour la faconde débonnaire
de Denis, on découvre peu à peu, à travers le
personnage de Séverine, un humour délicat, pris
en étau entre devoirs administratifs et désirs
personnels. Les personnalités des deux filles, de
l’aînée qui navigue avec une facilité
déconcertante entre fragilité et humour à la plus
jeune d’une spontanéité naturelle touchante
complètent un casting impeccable. Un récit
sincère, un rythme sans temps mort, une
réalisation efficace et des dialogues à double
niveau de lecture et donc interprétables à la fois
par les parents et par les enfants font de ce film
poétique, entre sourire et gravité, un spectacle
familial par excellence.
Claudine Levanneur, avoir-alire.com.
Semaines du 4 et 11 janvier 2017
partir de 10/11 ans.
Franç. (Durée : 1h15). Film d'animation de Jean-François Laguionie avec la voix
de Dominique Frot, Diane Dassigny, Antony Hickling…
À la fin de l’été, Louise voit le dernier train de la saison, qui dessert la petite
station balnéaire de Biligen, partir sans elle. La ville est désertée. Le temps rapidement
se dégrade, les grandes marées d’équinoxe surviennent condamnant maintenant
électricité et moyens de communication. Fragile et coquette, bien moins armée que
Robinson, Louise ne devrait pas survivre à l’hiver. Mais elle n’a pas peur et considère
son abandon comme un pari. Elle va apprivoiser les éléments naturels et la solitude.
Ses souvenirs profitent de l’occasion pour s’inviter dans l’aventure. Jusqu’à ce qu’une
explication lui soit révélée et que tout rentre dans l’ordre.
À
Le mardi 10
janvier à 14h15
E
n 1979, le huitième court -métrage de Jean-François -Laguionie,
La Traversée de l'Atlantique à la rame, débutait sur une plage.
Presque quarante ans et quatre longs métrages plus tard, il
dessine toujours la mer. Mais là, plus de bateau : juste une vieille
dame, le sable et l'eau. En vacances dans sa bicoque bleue, Louise loupe
le dernier train de la saison, alors que le ciel, déjà, s'assombrit. La voilà
seule au monde dans cette petite station balnéaire imaginaire aux façades
depuis longtemps délavées. « Ils » sont tous partis, mais « ils »
reviendront, forcément, la chercher. Pourtant, alors que l'océan envahit
les rues vides, et que la tempête bat sur les volets de sa chambre, « ils »
ne reviennent pas. Alors, dès que le temps redevient clément, Louise
prend une décision : elle abandonne sa maison et part s'installer sur la
plage pour passer l'hiver. Commence pour cette mamie, plus résistante
qu'elle ne le croyait elle-même, une vraie vie de Robinsonne. Avec
quelques planches, elle se construit une cabane, et va faire son marché
aux Nouvelles Galeries désertées, dans lesquelles elle pénètre en cassant
une vitre ! Une capeline pour le soleil, un bonnet rouge, des baskets
jaunes et des bottes en caoutchouc, elle a fière allure, Louise, pour partir
pêcher avec Pépère, un chien aussi abandonné qu'elle, et sa seule
compagnie. Et où trouve-t-elle une bonne terre fertile pour planter son
potager ? Au cimetière !
Louise en hiver, le cinquième long métrage de Jean-François Laguionie,
est le plus beau des voyages immobiles, à la fois invitation à la vie et flirt
facétieux avec la mort. Quand Louise se souvient de son enfance, il la
représente petite fille conversant tranquillement avec le cadavre d'un
parachutiste anglais suspendu pour l'éternité dans une forêt. C'est aussi à
cet « ami » que Louise, devenue jeune fille, présentera ses amoureux !
Mais de quoi se souvient exactement Louise ? « On a sûrement dû me
marier. J'ai eu des enfants et des petits-enfants, sans doute... » soliloquet-elle, avec la voix à la fois vigoureuse et un peu flottante de l'étonnante
Dominique Frot. Ses souvenirs sont comme la marée : ils se retirent, puis
reviennent. Et peut-être même a-t-elle perdu la tête depuis
longtemps...La magie du film est dans ce délicat mystère existentiel, ce
temps sus-pendu troué de flash-back et de rêves surréalistes. Qu'importe,
en fait, sa vie passée : avec ses cheveux neigeux, son nez épaté et ses
joues légèrement -rosies, Louise représente toutes les vieilles dames qui
marchent à petits pas dans le monde et que l'on croise sans y prêter
attention. Sans penser une seconde qu'un jour elles ont été jeunes,
amoureuses ou cruelles. Cette impression d'éternité, de merveilleux
flottement vient, aussi, du dessin de Jean-François Laguionie. Quand tous
les studios du monde se repaissent de couleurs et de technologie, cet
héritier de Paul Grimault peint comme on respire et capte l'essence d'une
existence et d'un décor avec des pastels et de la gouache. Grains du
papier, grains de sable, vie égrenée en jaune soleil d'hiver et en bleus qui
se grisent par vagues : chaque image vibre. L'avenir de Louise ? Tel le
cow-boy solitaire, elle a l'horizon devant elle. Et maintenant, elle est
armée pour le prochain hiver. Dans une décharge d'objets abandonnés,
elle a trouvé un couteau suisse, avec toutes les options habituelles... plus
une : il fait aussi pinceau. Guillemette Odicino, Télérama.
Soirée spéciale Jean-François Laguionie :
Le rêveur éveillé, en présence du réalisateur (Jean-Paul
Mathelier) suivi de Louise en Hiver.
Le Jeudi 12 janvier à 20h30.
Rares sont les témoignages de ces rêveurs que sont les
réalisateurs de films d’animation. C’est dans une atmosphère
marine feutrée que Jean-François Laguionie, réalisateur de “L’île
de Black Mor” et “Le Tableau”, nous livre une mémoire pleine
de tendresse et d’onirisme. Dans la maison-atelier se
conjuguent le passé des souvenirs, le présent du chantier en
cours et le futur du film en gestation. Au centre de cet espace,
ponctué par le rythme des marées, le rêveur éveillé façonne son
imaginaire poétique. Portrait d’un homme qui a su porter ses
rêves d’enfant à l’écran. Un hommage à une certaine
conception du cinéma.
Semaine du 11 janvier 2017
E
n Version Originale et Sous-Titrée. À partir de 11/12 ans.
Amér. (Durée : 1h58). Comédie dramatique de Jim Jarmusch avec Adam Driver, Golshifteh
Farahani, Kara Hayward…
Paterson vit à Paterson, New Jersey, cette ville des poètes, de William Carlos Williams à Allen
Ginsberg, aujourd’hui en décrépitude. Chauffeur de bus d’une trentaine d’années, il mène une vie réglée
aux côtés de Laura, qui multiplie projets et expériences avec enthousiasme et de Marvin, bouledogue
anglais. Chaque jour, Paterson écrit des poèmes sur un carnet secret qui ne le quitte pas…
C
e qu'on aime dans le cinéma ? Qu'il
nous transporte. A vitesse plus ou moins
rapide. Celle de ce nouveau film de Jim
Jarmusch est modérée, pépère presque.
C'est Paterson qui conduit : ce grand échalas à
la voix grave est chauffeur de bus dans une
petite ville du New Jersey. Il a l'air d'apprécier
son métier, ne s'en plaint jamais, arrive toujours
à l'heure. Paterson transporte, donc, des
passagers, dont il aime capter au vol les bribes
de conversations. Ainsi, celle de cette jeune
femme qui raconte à son compagnon de voyage
le destin de Gaetano Bresci, anarchiste italien du
début du xxe siècle. Ou celle de ces deux
costauds qui jouent les machos tout en s'avérant
très prudes. Sourire aux lèvres, Paterson écoute
ces mots, qui défilent comme le paysage urbain
derrière la vitre. Peut-être s'en sert-il.
Car Paterson est poète. On ne le voit pas au
premier abord. Il prend des notes, pourtant,
dans un carnet. Des vers libres, qui ne chantent
ni la rose, ni la mer, ni l'infini, ni le passé enfui.
Mais les petits riens du quotidien, des choses
ordinaires comme ces boîtes d'allumettes
désuètes qui traînent sur le bar de sa cuisine. («
Nous avons plein d'allumettes à la maison/Nous
-2-
les gardons à
portée de main/
Actuellement
notre marque
préférée est l'Ohio Blue Tip »). De la poésie
apoétique si l'on veut, sans lyrisme, ou alors très
discret. Ces traces écrites pourraient faire l'objet
d'un livre. Mais Paterson n'y pense pas vraiment.
Au grand dam de son épouse (Golshifteh
Farahani), admiratrice de la première heure, qui
le supplie d'envoyer ses poèmes chez un éditeur.
Un curieux phénomène, cette Laura. Autant
Paterson est un type placide, autant elle
s'enthousiasme au quart de tour. Toquée de
travaux domestiques et de cuisine, elle passe
son temps à redécorer leur petite demeure en
variant à peine les motifs : des cercles ou des
courbes, toujours en noir et blanc. Une
maîtresse de maison un peu kitsch, un peu
zinzin, qui se rêve un jour en reine du cupcake,
un autre en chanteuse country avec une guitare
(noir et blanc !). De ce couple dissemblable mais
complémentaire, Jarmusch tire une fable
conjugale d'autant plus cocasse qu'un troisième
zig habite le foyer avec eux. Un enfant ? Non, un
bouledogue anglais, Marvin, à la fois collant et
rogue, qui a fâcheusement tendance à dicter sa
loi. Ils sont un peu rivaux, Paterson et lui : à
tour de rôle, l'un traîne l'autre comme un boulet.
L'animal donne malgré tout l'occasion à son
maître de sortir, chaque soir, pour rejoindre un
bar bien cosy. Paterson y retrouve le patron, un
ami, avec lequel il discute tranquillement, devant
une bonne bière, de tout et de rien.
Une existence paisible, harmonieuse, réglée
comme du papier à musique. Aux antipodes de
l'image rock associée au cinéaste. Or Jarmusch
loue ce quotidien, qui pourrait paraître
ennuyeux, voire rebutant, avec une suprême
élégance. Question de rythme, de lent
balancement. Sur une semaine pleine, du lundi
au dimanche, le film suit le déroulé de chaque
journée, qui débute de la même manière :
Paterson se réveille avant que le réveil ne sonne,
à 6h15. Un baiser à sa femme qui dort, le petit
déjeuner, le trajet pour aller au travail.
Agréables, structurants rituels. Douce répétition
des jours, des mots, des images, qui devient
musique en soi.
Qui dit répétitions dit variations, plus ou moins
infimes. La beauté se niche dans ce qui se
ressemble, se différencie et s'assemble. La
poésie est un art de l'analogie, de la déclinaison
et du redoublement que Jarmusch illustre avec
beaucoup de simplicité et de malice : Paterson
ne cesse de croiser des jumelles ou des
jumeaux, un peu partout. Et puis il y a ce
patronyme, -Paterson, qui renvoie à un livre de
William Carlos Williams, mais aussi à cette petite
ville, non loin de New York, que le chauffeur
sillonne avec son bus ou arpente à pied. Une
cité chargée d'histoire, berceau de nombre
d'artistes (en effigie derrière le comptoir du bar).
Comme à son habitude, la caméra de Jarmusch,
grand filmeur urbain (Tanger ou Detroit dans
Only lovers left alive) glisse en douceur, pour
nous faire traverser toutes sortes de lieux, en
prenant leur pouls. Grâce à lui, même un bus
pansu qui tourne à un carrefour peut dessiner
une perspective sensuelle. Le cinéaste fait
coïncider le corps de la ville, son passé, sa
géographie, avec les personnages. Un homme
sur le banc d'un parc, face à une cascade, le
même qui marche dans la rue, sa gamelle à la
main, sur un fond de briques : voilà le genre
d'instantanés qui restent gravés en nous.
Dans ces eaux tranquilles du quotidien, il arrive
qu'il y ait de l'imprévu. Des incidents, dont un
semble d'abord catastrophique, avant d'être
relativisé. C'est que Paterson n'est pas homme à
se laisser démonter. Etranger aux modes,
presque démodé, ce poète sans portable et sans
oeuvre avance, confiant dans la vie. A son
image, le film a la valeur d'un vade-mecum. Qui
ne prône ni méthode ni discipline pour trouver le
bonheur ou la santé — Jarmusch ne vend pas de
ces choses. Il vante seulement un certain art de
vivre et de voir. Jacques Morice, Télérama.
Ouest France Gilles Kerdreux
Jim Jarmusch signe, sans nul doute,
le film le plus poétique de l'année.
Le Figaro - Eric Neuhoff
Jim Jarmush, touché par la grâce,
signe un film d'une délicatesse
bienveillante, un petit miracle de
poésie.
Semaine du 18 janvier 2017
E
n Version Originale et Sous-Titrée.
Amer. (Durée : 2h18). Drame de Kenneth Lonergan avec Casey Affleck, Michelle
Williams, Kyle Chandler...
MANCHESTER BY THE SEA nous raconte l’histoire des Chandler, une famille de
classe ouvrière, du Massachusetts. Après le décès soudain de son frère Joe (Kyle Chandler),
Lee (Casey Affleck) est désigné comme le tuteur de son neveu Patrick (Lucas Hedges). Il se
retrouve confronté à un passé tragique qui l’a séparé de sa femme Randi (Michelle Williams)
et de la communauté où il est né et a grandi.
PORTÉ PAR UN
P
UN PUR CHEF-D’ŒUVRE,
CASEY AFFLECK INOUBLIABLE DANS LE RÔLE D'UN HOMME BRISÉ.
our les Américains de la
côte Est, Manchester by
the Sea est un port de
pêche et une station
balnéaire. Mais pour le héros
trentenaire, Lee, c'est un champ de
ruines. Homme à tout faire dans
une boîte de plomberie, en banlieue
de Boston, il a fui le monde de sa
jeunesse. A la mort de son grand
frère, il doit pourtant reprendre en
urgence la route de son village
natal, où il est désigné tuteur de
son neveu adolescent. Un voyage
dans le passé commence : Lee
revient sur les lieux de l'effroyable
tragédie qui a détruit sa vie et l'a
lesté à jamais d'un sentiment de
culpabilité.
Entre Hollywood, où la pénible
multiplication des superhéros vire à
l'hégémonie, et le cinéma américain
dit indépendant, paupérisé, souvent
atone, il y a donc une voie médiane
séduisante. Kenneth Lonergan a
coécrit le scénario de Gangs of New
York, de Martin Scorsese (2002). Il
a dirigé naguère la star Matt Damon
(lequel produit Manchester by the
Sea). Ce flirt avec le grand public le
positionne au croisement de
l'auteurisme et du divertissement.
La beauté presque classique de
Manchester by the Sea évoque ces
drames destinés à un public adulte,
que Holywood produisait encore
jusque dans les années 1980, avec
des Al Pacino, Dustin Hoffman,
Robert De Niro...
Casey Affleck (petit frère de Ben,
qui se laisse étrangement oublier
entre deux grands rôles) est l'acteur
fascinant qui donne au film sa
dignité. Alors que tout, rencontres
et réminiscences, devrait provoquer
des torrents de larmes ou des cris
de douleur chez Lee, le comédien
résiste, lointain, impassible. C'est
une éthique de jeu (on l'a souvent
vu ainsi intériorisé), mais qui, en
l'occurrence, dessine un personnage
endurci jusqu'à l'os, minéralisé par
le chagrin, sans plaisirs ni désirs. Le
contraste est saisissant avec
l'expressivité de Michelle Williams
(l'ex-femme de Lee), toujours au
bord des pleurs derrière le masque
de la résilience.
La galerie des endeuillés recèle un
autre spécimen passionnant :
l'adolescent désormais sans père
Les Inrockuptibles (l'excellent Lucas Hedges, vu chez
Serge Kaganski
Wes Anderson), dont Lee est Loin de la machine à faire pleurer
supposé devenir le tuteur. Ce neveu
dans les chaumières, loin des
se montre cynique, revêche, tout
facilités du feel good movie,
occupé à sa collection de copines et
bouleversant grâce à sa tenue à
à une sexualité compulsive, avant distance du pathos, à son absence
une volte-face remarquablement de putasserie, à son exigence de
imprévisible et émouvante, moment justesse et à sa précision dans les
de bascule du récit... Car
cuissons émotionnelles,
Manchester by the Sea dépasse la
"Manchester by the Sea" réussit
chronique d'un retour au pays. Au(...). Kenneth Lonergan vient de
delà de son ancrage réaliste —
pondre, en toute humilité, un
communauté de marins prolétaires,
grand et superbe spécimen de
lumière hivernale —, c'est bien un
cette espèce en voie de
conte. A la fois rugueux et lyrique.
disparition : le mélodrame.
Ouvert sur le seul horizon que
Le Monde - Jacques
méritent tous ces personnages
Mandelbaum
fracassés : la consolation.
Auteur d’un cinéma intimiste d’une
Louis Guichard, Télérama.
amplitude et d’une sensibilité
devenues rarissimes dans le
cinéma américain, Lonergan livre
avec "Manchester by The Sea" un
récit bouleversant, mélodrame
noueux et cristallin comme un
matin d’hiver, débarrassé des
canons comme des facilités du
genre.
-3-
Semaine du 25 janvier 2017
E
n Version Originale et Sous-Titrée. À partir de 14/15 ans.
Franco-italien. (Durée : 2h10). Drame de Marco Bellocchio avec Valerio Mastandrea,
Bérénice Bejo, Guido Caprino…
Turin, 1969. Massimo, un jeune garçon de neuf ans, perd sa mère dans des
circonstances mystérieuses. Quelques jours après, son père le conduit auprès d’un prêtre qui
lui explique qu’elle est désormais au Paradis. Massimo refuse d’accepter cette disparition
brutale. Année 1990. Massimo est devenu un journaliste accompli, mais son passé le hante.
Alors qu’il doit vendre l’appartement de ses parents, les blessures de son enfance tournent à
l’obsession…
sûr tourné dans les rues de Turin, la villa
Le film est adapté de Fais de beaux rêves, mon enfant, un livre sur la colline, l’hôpital c’est Turin aussi. Cela paraissait logique puisque le
autobiographique écrit par Massimo Gramellini. Paru en 2013 en France, il récit se passe là", raconte Marco Bellocchio. Certains trucages numériques
ont également été nécessaires, afin de donner vie aux extérieurs visibles
a été un best-seller en Italie.
depuis l'appartement. "On a même dû reconstituer le stade car celui
Histoire fascinante
d’aujourd’hui est très différent".
Marco Bellocchio a été fasciné par cette histoire vraie, en tous points
différente de la sienne. S'il n'avait pas lu le livre, c'est le producteur Beppe Des doutes vite dissipés
Caschetto, qui en avait les droits, qui le lui a fait découvrir. "L’histoire de Au départ, Marco Bellocchio avait quelques doutes sur le choix de Valerio
cet enfant et des vicissitudes de sa vie d’adulte m’a profondément Mastandrea comme acteur principal. Bien qu'il soit un excellent comédien,
intéressé, c’est clairement un contrepoint flagrant à ma propre le réalisateur redoutait en effet que son origine romaine, soit un handicap
biographie", analyse-t-il. "Ce type de lien, de rapport à la mère n’a jamais pour jouer un personnage turinois. Bellocchio s'est finalement laissé
existé dans ma vie et j’avais beaucoup de curiosité pour cette relation convaincre par le regard de l'acteur, empreint de tristesse malgré une
d’amour absolu, qui prendra fin brutalement avec son décès. Je me crois force de caractère évidente ; un contraste qui sied selon lui finalement
assez vacciné contre un certain sentimentalisme, contre le pathos, mais je bien au film.
Belle rencontre
ne voulais pas pour autant aller contre le livre. Le film lui reste fidèle".
Fan de cinéma italien, Bérénice Bejo a particulièrement apprécié de
De Belphégor à Bellocchio
Si le réalisateur a été fidèle pour retracer l'enfance et l'adolescence du tourner pour Marco Bellocchio. Pendant le Festival de Cannes 2016,
personnage principal, il s'est permis plus de libertés en ce qui concerne sa l'actrice a notamment confié au micro d'AlloCiné : "Il adore les acteurs, il
vie d'adulte. Comme dans le livre, Marco Bellocchio a toutefois introduit la veut toujours les mettre en valeur, il est très généreux... C'est un homme
série Belphégor avec Juliette Gréco, comme contrepoint aux tourments du qui est dans la
héros : "Il y a cette analogie, assez importante, au niveau du récit, le recherche du plaisir.
suicide de Juliette Gréco. Nous avons fait apparaître cette scène comme Ce n'est pas un film
une révélation partielle : si ce n’est la découverte de la vérité, c’est au de plus, il a envie de
quelque
moins une première intuition concernant la mort de la mère", explique-t-il. raconter
chose et va défendre
Tournage à Turin
son
sujet.
C'est
Fais de beaux rêves a été entièrement tourné à Turin, aussi bien les
vraiment
très
extérieurs que les intérieurs. "Même l’appartement a été reconstitué dans
agréable".
un petit studio de Turin, pas très loin des usines de FIAT. (...) On a bien
Adaptation littéraire
:
Programme des Court-Métrages du mois du mois, en partenariat avec
Semaine du 4 janvier :
A la française de Morrigane Boyer. Animation. (Durée : 7min). C'est un après-midi à Versailles, du temps de Louis XIV.
Semaine du 4 et 11 janvier :
La belle fille et le sorcier de Michel Ocelot. Animation. (Durée : 4min). Je suis moche, je suis seule, je m'ennuie'. Dans trois secondes, tout
va changer...
Semaine du 11 janvier :
Gratte papier de Guillaume Martinez. Fiction. (Durée : 8min). Une journée comme toutes les autres dans le métro parisien en
apparence du moins…
Semaine du 25 janvier :
Viejo pascuero (Une petite histoire de Noël) de Jean-Baptiste Huber. Fiction. (Durée : 3min). Au lendemain des fêtes de
Noël, un gamin des bidonvilles de Santiago écrit au Père Noël pour se plaindre des cadeaux qu'il a reçus.
Prochainement sur nos écrans :
Dalida Biopic de Lisa Azuelos avec Sveva Alviti, Riccardo Scamarcio,
Jean-Paul Rouve... (en sortie nationale)
Norm Film d'animation de Trevor Wall avec Omar Sy, Med Hondo, Lucien JeanBaptiste... (à partir de 5/6 ans)
Il a déjà tes yeux Comédie de et avec Lucien Jean-Baptiste avec aussi Aïssa
Maïga, Zabou Breitman... (en sortie nationale)
Ouvert la nuit Comédie dramatique de et avec Edouard Baer avec aussi Sabrina
Ouazani, Audrey Tautou...
Tous en scène Film d'animation de Garth Jennings et Christophe Lourdelet avec
les voix de Patrick Bruel, Jenifer Bartoli, Elodie Martelet ... (en sortie nationale, à partir
de 5/6 ans, en 2D et 3D)
-4-
P o u r
p l u s
d’information sur la
programmation
du
cinéma
Image,
consultez son site
internet :
www.imagecinema.org