2.5 L`enrobage des armatures

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2.5 L’enrobage des armatures
2.5.1 - Incidence de la qualité
de l’enrobage
L’enrobage des armatures représente la distance
entre la surface du béton et l’armature la plus proche (cadres, étriers, épingles, armatures de peau,
etc.). Il doit être suffisant pour garantir :
– la bonne protection de l’acier contre la corrosion ;
– la bonne transmission des efforts d’adhérence ;
– une résistance au feu convenable.
L’enrobage des armatures et les caractéristiques du
béton d’enrobage sont les paramètres fondamentaux permettant de maîtriser la pérennité des ouvrages face aux phénomènes de corrosion et donc leur
durée d’utilisation. Ainsi, il est possible de placer les
armatures hors d’atteinte des agents agressifs en les
protégeant par une épaisseur suffisante d’un béton
compact, ayant fait l’objet d’une cure appropriée.
Dans des conditions normales, les armatures enrobées d’un béton compact et non fissuré sont naturellement protégées des risques de corrosion par
un phénomène de passivation qui résulte de la
création, à la surface du métal, d’une pellicule protectrice de ferrite Fe2O3CaO (dite de passivation).
Cette pellicule est formée par l’action de la chaux
libérée par les silicates de calcium sur l’oxyde de fer.
La présence de chaux maintient la basicité du milieu
entourant les armatures (l’hydratation du ciment
produit une solution interstitielle basique de pH
élevé de l’ordre de 13). Tant que les armatures se
trouvent dans un milieu alcalin présentant un pH
compris entre 9 et 13,5, elles sont protégées.
Nota
L’enrobage et la compacité ont un impact
immédiat sur la période de propagation
qui précède l’initiation et le développement de la corrosion des armatures. À titre
d’exemple, il est couramment reconnu
que l’augmentation de l’enrobage minimal
d’une valeur de 10 mm permet d’augmenter la durée d’utilisation de l’ouvrage
pour passer de 50 ans à 100 ans.
2.5.2 - Enrobage minimal
et enrobage nominal
C’est l’enrobage nominal qui est précisé sur les
plans d’exécution de l’ouvrage. Il constitue la référence pour la fabrication et pour la pose des armatures. L’enrobage nominal est égal à la somme de
l’enrobage minimal et d’une « marge de sécurité »
pour tolérances d’exécution.
Nota
Des précisions complémentaires pour la
détermination de l’enrobage pour les
structures en béton conçues avec
l’Eurocode 2 sont données dans le Guide
Technique LCPC « Note Technique sur les
dispositions relatives à l’enrobage pour
l’application en France ».
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• Dimensionnement des structures en béton
ces du béton et la maîtrise du positionnement
des armatures ;
– la régularité de la surface contre laquelle le béton
est coulé ;
– le type d’armatures (précontraintes ou non) et
leur nature (acier au carbone, acier inoxydable) et
d’éventuelles protections complémentaires
contre la corrosion.
2.5.3 - Philosophie de l’enrobage
selon l’Eurocode 2
Les recommandations de l’Eurocode 2 (norme
NF EN 1992-1-1) en matière d’enrobage des
bétons de structures sont novatrices. Elles résultent
d’un retour d’expérience sur la durabilité des
ouvrages construits depuis plusieurs décennies et
sur les recherches récentes en matière de protection des armatures vis-à-vis des risques de corrosion. Elles visent, en conformité avec la norme NF
EN 206-1, à optimiser de manière pertinente la
durabilité des ouvrages. En effet, la détermination
de la valeur de l’enrobage doit prendre en compte
de façon extrêmement détaillée :
– la classe d’exposition dans laquelle se trouve
l’ouvrage (ou la partie d’ouvrage) et qui traduit
les conditions environnementales ;
– la durée de service attendue (ou durée d’utilisation du projet) ;
– la classe de résistance du béton ;
– le type de système de contrôle qualité mis en
œuvre pour assurer la régularité des performan-
La valeur de l’enrobage peut ainsi être optimisée
en particulier :
– si l’on choisit un béton présentant une classe de
résistance à la compression supérieure à la classe
de référence (définie pour chaque classe d’exposition) ;
– s’il existe un système de contrôle de la qualité ;
– si l’on utilise des armatures inox.
L’Eurocode 2 permet aussi de dimensionner l’ouvrage pour une durée d’utilisation supérieure en
augmentant la valeur de l’enrobage.
L’optimisation des performances du béton et de
l’enrobage des armatures constitue un facteur
de progrès essentiel pour assurer la durabilité
des ouvrages.
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Étape 1 : prise en compte des classes
dʼexposition
2.5.4 - Enrobage minimal
selon l’Eurocode 2
Un béton peut être soumis à plusieurs classes d’exposition concomitantes qui traduisent avec précision l’ensemble des actions environnementales.
Les classes d’exposition de chaque partie d’ouvrage sont une donnée de base du projet. Elles
sont imposées par les conditions d’environnement du projet. Elles sont définies dans le
tableau 4.1 de l’article 4.2 de l’Eurocode 2 (norme
NF EN 1992-1-1) en conformité avec la norme
NF EN 206-1.
L’enrobage minimal est défini dans la norme
NF EN 1992-1-1, section 4 « Durabilité et enrobage
des armatures » (article 4.4.1). Il doit satisfaire en
particulier aux exigences de transmissions des forces d’adhérences et assurer une protection des
aciers contre la corrosion.
Il est donné par la formule :
Cmin,b
Cmin = max Cmin,dur + ∆ Cdur,y – ∆ Cdurst – Cdur,add
10 mm
Avec :
Cmin,b
Cmin,dur
∆ Cdur,y
∆ Cdur,st
∆ Cdur,add
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Étape 2 : Choix de la classe structurale
Durée d’utilisation du projet
enrobage minimal vis-à-vis des exigences d’adhérence (béton/armature).
enrobage minimal vis-à-vis des conditions environnementales. Cmin,dur tient
compte de la classe d’exposition et de la
classe structurale (qui dépend de la durée
d’utilisation du projet).
marge de sécurité (valeur recommandée 0);
L’Annexe Nationale de l’Eurocode 0 (NF EN 1990
– Base de calcul des structures) définit la durée
d’utilisation de projet : durée pendant laquelle une
structure est censée pouvoir être utilisée en faisant
l’objet de la maintenance escomptée mais sans
qu’il soit nécessaire d’effectuer des réparations
majeures.
réduction de l’enrobage minimal dans le
cas d’utilisation, par exemple, d’acier
inoxydable ;
réduction de l’enrobage minimal dans le
cas de protections complémentaires.
Les bâtiments et les ouvrages de génie civil courants sont dimensionnés pour une durée d’utilisation de projet de 50 ans. Les ponts sont
dimensionnés pour une durée d’utilisation de projet de 100 ans.
Ces durées supposent la mise en œuvre de bétons
conformes aux tableaux N.A.F. 1 ou N.A.F. 2 de la
norme NF EN 206.1. Les documents particuliers du
marché peuvent spécifier des durées d’utilisation
de projet différentes.
Nota
La valeur de Cmin,b est rarement dimensionnante pour la détermination de Cmin.
2.5.5 - Processus de détermination
de l’enrobage nominal suivant
l’Eurocode 2
Classe structurale
La classe structurale (S1 à S6) est un paramètre
permettant d’optimiser la valeur de l’enrobage.
Les modulations possibles de la classe structurale,
en fonction de choix particuliers pour le projet (durée
d’utilisation de projet, classe de résistance du béton,
nature du ciment, compacité du béton d’enrobage),
engageant le maître d’œuvre, sont données dans
le tableau 4.3 N (F) à l’article 4.4.1.2 (5) de l’Annexe Nationale de la norme NF EN 1992-1-1.
Le processus de détermination de l’enrobage des
armatures dans chaque partie d’ouvrage comporte
les huit étapes suivantes qui vont permettre de
prendre successivement en compte :
– la classe d’exposition ;
– la classe structurale et les modulations possibles
en fonction de choix particuliers ;
– le type d’armatures ;
– des contraintes particulières ;
– les tolérances d’exécution.
On admet que la classe structurale S4 correspond
à une durée d’utilisation de 50 ans.
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• Dimensionnement des structures en béton
Tableau 14 : modulation de la classe structurale recommandée
Critère
Classe d’exposition
XO
XC1
XC2, XC3
Durée
d’utilisation
de projet
XC4
XD1 / XS1 / XA1
XD2 / XS2 / XA2
XD3 / XS3 / XA3
≥ C 40/50
≥ C 40/50
≥ C 45/55
≥ C 60/75
≥ C 60/75
≥ C 70/85
-
-
-
100 ans, majoration de 2
25 ans et moins minoration de 1
≥ C 30/37
Classe
de résistance
du béton
≥ C 30/37
≥ C 30/37
≥ C 35/45
Minoration de 1
≥ C 50/60
≥ C 50/60
≥ C 55/67
≥ C 60/75
Minoration de 2
≥ C 35/45
-
Nature
du liant
≥ C 35/45
≥ C 40/50
-
Béton à base de CEM I sans cendres volantes
-
-
-
-
Minoration de 1
-
-
-
Enrobage
compact
Minoration de 1
précontrainte à l’article 4.4.1.2 (5) de la norme
NF EN 1992-1-1.
Ces modulations de la classe structurale, pour déterminer l’enrobage minimal Cmin,dur sont synthétisées
dans le tableau 15 [extraits du tableau 4.3 N (F)].
Pour les classes d’expositions XF1, XF2, XF3 et XF4.
La valeur de Cmin,dur est déterminée en prenant en
compte les classes d’expositions concomitantes
XC1 à XC4 et XD1 à XD3.
Une majoration de 2 consiste, par exemple, à
passer de la classe structurale S4 à S6. Une minoration de 1 consiste à passer de la classe structurale
S6 à S5.
L’Annexe Française de la norme NF EN 1992-1-1
précise comment tenir compte de cette concomitance de classes.
Étape 3 : détermination de lʼenrobage
minimal vis-à-vis de la durabilité Cmin,dur
Tableau 16 : concomitance de classes
Les valeurs de Cmin,dur (en mm) requis vis-à-vis de
la durabilité sont données en fonction de la classe
d’exposition et de la classe structurale dans le
tableau 4.4 N pour les armatures de béton armé et
dans le tableau 4.5NF pour les armatures de
Sous classe d’exposition XF
Type
de salage
Tableau 15 : valeur de Cmin,dur en fonction de la classe
d’exposition et de la classe structurale
dans le cas des armatures de béton armé
XO
XC1
XC2
XC3
XC4
XD1
XS1
XD2
XS2
XD3
XS3
S1
S2
S3
S4
S5
S6
10
10
10
10
15
20
10
10
10
15
20
25
10
15
20
25
30
35
15
20
25
30
35
40
20
25
30
35
40
45
25
30
35
40
45
50
30
35
40
45
50
55
XF2
XF3
XF4
Peu fréquent
XC4
SO
XD1 ou XC4*
SO
Fréquent
SO
XD1 XD3**
SO
XD2 XD3**
Très fréquent
SO
SO
SO
XD3
SO : sans objet
*XD1 : si le béton est formulé avec un entraîneur dʼair
XC4 : si le béton est formulé sans entraîneur dʼair.
** XD3 : pour les éléments très exposés (pour les ponts : corniches,
longrines dʼancrage des dispositifs de retenue, solins des joints de
dilatation).
Classe d’exposition
Classe
structurale
XF1
Pour les classes d’exposition XA1 à XA3, la valeur de
Cmin,dur est aussi déterminée en prenant en compte
les classes d’exposition concomitantes XC ou XD.
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Étape 5 : prise en compte
de contraintes particulières
L’Eurocode 2 et l’Annexe Nationale française prescrivent d’augmenter l’enrobage minimal dans les
cas suivants.
Parements irréguliers
Dans le cas de parements irréguliers (béton à granulat apparent par exemple), l’enrobage minimal
doit être augmenté d’au moins 5 mm.
Abrasion du béton
Dans le cas de béton soumis à une abrasion, il
convient d’augmenter l’enrobage de 5 mm,
10 mm, et 15 mm respectivement pour les classes
d’abrasion XM1, XM2, et XM3 (voir l’EN 1990
Eurocode 0 Base de calcul des structures).
Étape 4 : prise en compte
du type dʼarmature
Béton coulé au contact de surfaces irrégulières
L’Annexe Nationale de la norme NF EN 1992-1-1
dans l’article 4.4.1.2 (7) précise les cas pour lesquels l’enrobage Cmin,dur peut être réduit, d’une
valeur ∆ Cdur.st ou ∆ Cdur.add. Ce choix engage le maître d’œuvre. La valeur est fixée par les documents
particuliers du marché.
Dans le cas d’un béton coulé au contact de surfaces irrégulières, il convient généralement de majorer l’enrobage minimal en prenant une marge plus
importante pour le calcul. Il convient de choisir une
majoration en rapport avec la différence causée par
l’irrégularité. L’enrobage minimal doit être au
moins égal à k1 mm pour un béton coulé au
contact d’un sol ayant reçu une préparation (y
compris béton de propreté) et k2 mm pour un
béton coulé au contact direct du sol.
Utilisation d’armatures en acier résistant
à la corrosion : armature inox
« Sur justification spéciale et à condition d’utiliser
des aciers dont la résistance à la corrosion est
éprouvée (certains aciers inox par exemple), pour
la durée d’utilisation et dans les conditions d’exposition du projet, les documents particuliers du marché pourront fixer la valeur de ∆ Cdur.st. En outre, le
choix des matériaux, des paramètres de mise en
œuvre et de maintenance doivent faire l’objet
d’une étude particulière. De même, l’utilisation de
tels aciers ne peut s’effectuer que si les caractéristiques propres de ces aciers (notamment soudabilité, adhérence, dilatation thermique, compatibilité
des aciers de nature différente) sont vérifiées et prises en compte de façon appropriée » extrait de l’article 4.4.1.2 (7).
Les valeurs recommandées par l’Annexe Nationale
française sont : k1 = 30 mm et k2 = 65 mm.
Étape 6 : détermination de lʼenrobage
minimal vis-à-vis de lʼadhérence Cmin,b
L’enrobage minimal vis-à-vis de l’adhérence Cmin,b
est précisé dans le tableau 4.2 article 4.4.1.2 (3) de
la norme NF EN 1992-1-1.
Il convient que Cmin,b ne soit pas inférieur :
– au diamètre de la barre dans le cas d’armature
individuelle ;
– au diamètre équivalent dans le cas de paquet
d’armatures.
Cmin,b est majoré de 5 mm si le diamètre du plus
gros granulat du béton est supérieur à 32 mm.
Mise en place d’une protection complémentaire
En cas de mise en place d’une protection complémentaire, l’enrobage minimal n’est pas diminué,
sauf pour les revêtements adhérents justifiés vis-àvis de la pénétration des agents agressifs pendant
la durée d’utilisation de projet.
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Étape 7 : détermination de lʼenrobage
minimal Cmin
Nota
L’Eurocode 2 attire l’attention sur les deux
points suivants :
– les problèmes de fissuration du béton
auxquels risque de conduire un enrobage
nominal supérieur à 50 mm ;
– les difficultés de bétonnage auxquelles
risque de conduire, un enrobage nominal
inférieur à la dimension nominale de plus
gros granulats.
L’enrobage minimal Cmin est déterminé par la formule donnée au paragraphe 2.5.4. en intégrant les
valeurs de Cmin,b / Cmin,dur / ∆ Cdur,y / ∆ Cdur.st et
∆ Cdur,add
Étape 8 : prise en compte
des tolérances dʼexécution
Nota
L’augmentation de l’enrobage est favorable pour la stabilité au feu. Pour assurer
celle-ci, on peut être amené à prévoir des
dispositions de ferraillage spécifiques telles que :
– des enrobages supérieurs à ceux imposés par la protection contre la corrosion ;
– un fractionnement en plusieurs armatures de faibles diamètres. Certaines d’entre
elles seront plus éloignées des parois
exposées au feu, en particulier près des
angles saillants où la température est plus
élevée. L’espacement de ces armatures
sera parfois plus important que celui habituellement exigé pour permettre un
bétonnage correct.
L’enrobage minimal doit être majoré, pour tenir
compte des tolérances pour écart d’exécution
(∆ Cdev).
La valeur recommandée dans l’article 4.4.1.3 (3) est
∆ Cdev = 10 mm sauf justification particulière. En particulier cette valeur peut être réduite sous réserve
de conditions strictes de contrôle qualité à la fois sur
la conception et l’exécution des ouvrages.
L’enrobage nominal est donné par la formule :
Cnom = Cmin + ∆ Cdev
Si la réalisation ou la conception et l’exécution des
éléments d’ouvrage sont soumis à un système
d’Assurance Qualité (incluant en particulier des
dispositions spécifiques relatives à la conception,
au façonnage ou à la mise en place des armatures).
Il est possible de réduire la valeur de ∆ Cdev à une
valeur comprise entre 5 et 10 mm.
Cette réduction possible de ∆ Cdev permet d’inciter
à un meilleur contrôle du positionnement réel des
armatures et une meilleure qualité de réalisation.
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