O Syndrome cliniquement isolé
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O Syndrome cliniquement isolé
1 Syndrome cliniquement isolé La prise en charge thérapeutique n Les données de la littérature montrent l’intérêt de débuter un traitement de fond précocement chez les patients ayant présenté un SCI et considérés comme à haut risque de récidive. L’attention doit être portée sur la qualité de la prise en charge de ces patients fragilisés par l’annonce d’une pathologie chronique nécessitant un traitement au long cours. Introduction La forme clinique la plus fréquente de la SEP est la forme rémittenterécurrente (SEP-RR) évoluant par poussées. Le syndrome démyélinisant cliniquement isolé (SCI) peut être inaugural des SEP-RR. Il correspond soit à une atteinte monofocale (neuropathies optiques inflammatoires, myélites partielles et atteintes du tronc cérébral en sont les présentations les plus communes), soit à une atteinte multifocale du système nerveux central. Ces épisodes inauguraux sont cependant cliniquement indiscernables de SCI qui ne seront jamais suivis d’autres épisodes cliniques et qui n’inaugurent pas une SEP. Le diagnostic de SEP ne sera posé qu’après démonstration d’une dissémination spatiale et temporelle clinique (critères de SEP cliniquement définie - SEPCD - selon Poser et al., (1)) et/ou en imagerie (critères de dissémination spatiale de Barkhof-Tintoré (2, 3)). Ce diagnostic repose actuellement sur les critères révisés de McDonald (4) et des critères plus récents ont été proposés (5). Il est actuellement possible de prescrire un traitement immunomodulateur après un SCI si le * Département de Neurologie, CHU de Bordeaux Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148 patient est considéré à haut risque de SEP-CD. Ce haut risque prend en compte le fait que le SCI ait été invalidant et ayant nécessité un traitement par corticoïdes et les données de l’imagerie qui doivent réunir les critères de dissémination spatiale (2, 3). Après avoir abordé le rationnel et l’intérêt d’un traitement de fond précoce, seront détaillées les données de la littérature concernant le type de patients à traiter et les traitements possibles après un SCI. Pourquoi instaurer un traitement de fond après un SCI ? Aurélie Ruet et Bruno Brochet* ciés à un mauvais pronostic dans la cohorte de London (Ontario) (6). Le nombre de poussées au cours des cinq premières années de la maladie, l’intervalle entre les deux premières poussées, ainsi que la qualité de la récupération des poussées ont été identifiés comme étant des facteurs permettant de prédire l’apparition précoce d’un score EDSS à 4 (7). Dans une méta-analyse reprenant 27 études d’histoire naturelle, il existait, parmi les facteurs indépendants prédictifs péjoratifs, une mauvaise récupération après la première poussée (hazard ratio : 1,3 à 3,3) et un intervalle court entre les deux premières poussées (hazard ratio : 1,6 à 1,9) (8). Données épidémiologiques Les données épidémiologiques soulignent l’importance des premières années de la maladie sur le pronostic à long terme. Les études cliniques observationnelles ont montré que l’évolution clinique des patients au cours des premières années de la maladie conditionne le pronostic et le risque d’incapacité à long terme. Une fréquence élevée de poussées dans les deux premières années après un SCI, un intervalle court entre les deux premières poussées et un score EDSS élevé à deux et cinq ans après le SCI étaient asso- Atteinte axonale précoce à l’origine du handicap irréversible La SEP est une pathologie chronique à la fois inflammatoire, démyélinisante et dégénérative avec perte axonale contribuant à l’installation du handicap irréversible des patients. Il est admis que l’activité inflammatoire est maximale au cours des premières années de la maladie. Ainsi, traiter dès le premier évènement démyélinisant permettrait de se situer dans cette période au cours de laquelle le patient pour187 DOSSIER Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements DOSSIER rait tirer un bénéfice maximal d’un traitement immunomodulateur, dont le mode d’action est essentiellement anti-inflammatoire. Les données neuropathologiques suggèrent que le traitement immunomodulateur de la SEP peut potentiellement avoir un effet plus important s’il est administré précocement au cours de la maladie, en inhibant précocement la cascade d’évènements conduisant aux lésions axonales irréversibles et au handicap (9). Plusieurs travaux ont montré que l’atteinte axonale Tableau 1 - Etudes thérapeutiques de phase III après un premier évènement démyélinisant évocateur de sclérose en INTERFERON Interféron βb-1a Avonex® Rebif® Rebif® Traitement actif vs placebo Nombre d’injections 30 µg vs placebo 1 IM par semaine 22 µg vs placebo 1 SC par semaine 44 µg 3 SC par semaine vs 44 µg 1 SC par semaine vs placebo 3 SC par semaine Essais pivots (réf.) CHAMPS (17) ETOMS (18) REFLEX (19) Clinique du SCI SCI monofocal (NORB unilatérale, MAP, syndrome cérébelleux ou du tronc cérébral) SCI monofocal (61 %) ou plurifocal SCI monofocal (54 %) ou plurifocal Critère d’inclusion IRM ≥ 2 lésions cérébrales asymptomatiques d’une taille de ≥ 3 mm, dont ≥ 1 ovoïde, périventriculaire ≥ 4 hypersignaux en T2 de la substance blanche, ou ≥ 3 si ≥ 1 hypersignaux infratentoriels ou ≥ 1 prise de contraste ≥ 2 lésions cérébrales asymptomatiques de diamètre > 3 mm à l’IRM en T2 dont ≥1 ovoïde, périventriculaire ou infratentorielle Durée du traitement (mois) 36 24 24 Objectif principal Diagnostic SEP-CD Diagnostic SEP-CD Diagnostic de SEP McDonald 2005 Objectif secondaire NA NA Diagnostic SEP-CD Nombre de patients 383 - IFN : 193 - placebo : 190 309 - IFN : 154 - placebo : 155 517 - IFN 3 fois/sem : 171 - IFN 1 fois/sem : 175 - placebo: 171 Diagnostic SEP-CD RRR1 : 44 % SEP-CD : 38,6 % dans le groupe placebo et 21,1 % dans le groupe IFN RRR2 : 66 % SEP-CD : 56 % dans le groupe placebo et 21 % dans le groupe IFN RRR1 : 35 % SEP-CD : 45 % dans le groupe placebo et 34 % dans le groupe IFN RRR1pour l’IFN 3 fois/sem : 52 % RRR1 pour l’IFN 1 fois/sem : 47 % RRR1 entre les 2 doses d’IFN : 10 % NS 37,5 % de SEP-CD dans le groupe placebo, 20,6 % dans le groupe IFN 3 fois/sem et 21,6 % dans le groupe IFN 1 fois/sem Diagnostic de SEP Mc Donald, 2005 NA NA Réduction du risque de 51 % pour l’IFN 3 fois/sem vs placebo et 29 % vs IFN 1 fois/sem Réduction du risque de 31 % pour l’IFN 1 fois/sem vs placebo CHAMPS : Controlled High risk Avonex Multiple Sclerosis ; ETOMS : Early Treatment Of Multiple Sclerosis ; REFLEX : REbif FLEXible dosing in early MS ; BENEFIT : BEtaferon/betaseron in Newly glatiramer acetate treatment in delaying conversion to clinically definite multiple sclerosis in subjects Presenting with a Clinically Isolated Syndrome ; MAP : myélite aiguë partielle ; SEP-CD : relatif de survenue d’une SEP-CD ; RRR2 : réduction du risque relatif de survenue d’une SEP-CD dans le sous-groupe de patients considérés à haut risque ; NS : non significatif ; NA : non 188 Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148 est précoce dès les premières années de la maladie et serait secondaire aux transections axonales qui surviennent au sein des lésions inflammatoires (9, 10). plaques. Acétate de glatiramère Interféron βb-1b Betaferon® Copaxone® 250 µg vs placebo 1 SC tous les 2 jours 20 mg vs placebo 1 SC tous les jours BENEFITT (20) PReCISe (21) SCI monofocal (53 %) ou plurifocal SCI monofocal (100 %) ≥ 2 lésions cérébrales asymptomatiques d’une taille de ≥ 3 mm, dont ≥ 1 ovoïde, périventriculaire ou infratentorielle ≥ 2 lésions cérébrales de diamètre > 6 mm à l’IRM en T2 24 36 Diagnostic SEP-CD Diagnostic SEP-CD Diagnostic SEP McDonald, 2001 468 - IFN : 292 - placebo : 176 RRR1 : 47 % SEP-CD : 45 % dans le groupe placebo et 28 % dans le groupe IFN NA 481 - AG : 243 - placebo : 238 RRR1 : 45 % SEP-CD 42,9 % dans le groupe placebo et 24,7 % dans le groupe AG RRR2 : 71 % (si ≥ 1 lésion Gd+ à la baseline) NA Emerging multiple sclerosis For Initial Treatment ; PreCISe : early sclérose en plaques cliniquement définie ; RRR1 : réduction du risque applicable ; vs : versus. Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148 Quels patients faut-il traiter ? Si les données de la littérature nous incitent à débuter précocement un traitement ; l’instauration d’un traitement de fond immunomodulateur s’envisage lors de la prise en charge d’un patient ayant présenté un SCI typique évocateur de SEP, après élimination des diagnostics différentiels. En pratique quotidienne, il faut considérer si le patient est à haut risque de récidive et le prendre en charge selon son risque de SEP-CD. Traiter les patients après un SCI à haut risque de sclérose en plaques Selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS), un traitement immunomodulateur « est indiqué dans le traitement des patients ayant présenté un seul évènement démyélinisant, accompagné d’un processus inflammatoire actif, s’il est suffisamment sévère pour nécessiter un traitement par corticostéroïdes par voie intraveineuse, si les diagnostics différentiels possibles ont été exclus et si ces patients sont considérés à haut risque de développer une SEP-CD. » Il n’existe pas de facteur prédictif spécifique d’évolution de la maladie, mais la dissémination spatiale et temporelle des lésions à l’IRM est en faveur d’une forme évolutive de SEP. La charge lésionnelle en T2 et la présence de lésions rehaussées par le gadolinium constituent les critères actuellement retenus pour définir le risque de récidive (critères IRM de McDonald et al. (5), Conférence de Consensus sur la Sclérose en Plaques, ANAES 7 et 8 juin 2001). D’après la commission de Transparence, les patients ayant présenté un seul événement démyélinisant sont considérés à haut risque d’évolution vers une SEP-CD dans les cas suivants : • Les patients monosymptomatiques sont considérés à haut risque de SEP-CD sur les critères IRM suivants : - critères de dissémination dans l’espace avec mise en évidence d’au moins trois des quatre critères suivants (2, 3) : au moins 1 lésion se rehaussant après injection de gadolinium (Gd+) ou 9 lésions hyperintenses en T2 (en l’absence de lésion Gd+), au moins 1 lésion infratentorielle, au moins 1 lésion juxta-corticale et au moins 3 lésions périventriculaires (une lésion médullaire peut être considérée comme équivalente à une lésion infratentorielle ; une lésion médullaire rehaussée par le Gd peut être considérée comme une lésion encéphalique rehaussée par le Gd ; la lésion médullaire peut aussi être utilisée pour atteindre le nombre nécessaire de lésions T2 encéphaliques) ; - critères de dissémination dans le temps avec deux manières de la déterminer : soit détection d’une lésion Gd+ au moins 3 mois après le début de l’évènement clinique initial, si la lésion ne correspond pas à l’évènement initial, soit détection d’une lésion nouvelle en T2 apparue à tout moment après une IRM de référence réalisée au moins 30 jours après l’évènement clinique initial. • Chez les patients polysymptomatiques (au moins deux localisations cliniques), seuls les critères de dissémination dans le temps sont requis. Selon ces recommandations, seule l’IRM permet de réunir les critères de dissémination spatiale (au moins 3 des 4 critères de BarkhofTintoré) pour les patients monosymptomatiques. 189 DOSSIER Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements DOSSIER Les données du liquide cérébrospinal ne sont pas utilisées pour appliquer le critère de dissémination spatiale associant deux lésions évocatrices de SEP et la présence d’une synthèse intrathécale. Après la proposition de nouveaux critères de dissémination spatiale par l’équipe de Swanton (11), de nouveaux critères diagnostiques de SEP ont été proposés en 2011 (5). Cependant, les recommandations de traitement après un SCI n’ont pas encore été actualisées. S’il est possible d’identifier plus tôt les patients à haut risque de SEP-CD après un SCI, il n’est pas autorisé selon la HAS de prescrire un immunomodulateur dans ces situations. SCI et dissémination temporelle en imagerie Il manque des données concernant l’intérêt d’un traitement de fond précoce pour les patients considérés à faible risque de récidive après un SCI. Dans le suivi à 20 ans de la cohorte londonienne, 21 % des patients ayant présenté un SCI avec une IRM encéphalique normale avaient un diagnostic de SEP-CD (12). Par ailleurs, 18 % des patients ayant une IRM encéphalique comportant au moins une lésion évocatrice de SEP n’avaient pas présenté de deuxième poussée clinique à 20 ans. De plus, 10 à 15 % des patients ayant présenté un SCI ont réuni les critères de dissémination spatiotemporelle à partir des données de l’imagerie, mais n’ont pas évolué vers une SEP-CD après cette durée de suivi de 2 décennies (13). Il faut souligner le fait que ces données sont intéressantes à l’échelle d’une cohorte de patients, mais il est plus difficile de les exploiter en pratique quotidienne au niveau individuel. Quel traitement proposer aux patients après un SCI ? Essais thérapeutiques après un SCI Les données des traitements immunomodulateurs après un SCI sont issues des études randomisées contrôlées versus placebo réalisées sur 2 à 3 ans (Tab. 1). Aucune étude clinique contrôlée, prospective, randomisée ou pharmacocinétique n’a été réalisée chez l’enfant, l’adolescent ou chez le sujet âgé. autorisations de mise sur le marché des immunomodulateurs Les extensions d’indication de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) sont résumées dans le tableau 2 et concernent les traitements immmunomodulateurs suivants : Tableau 2 - Autorisation de mise sur le marché des immunomodulateurs après un premier évènement démyélinisant. INTERFERON Interféron β b-1a Avonex® 07/05/2002 Date de l’autorisation de mise sur le marché Libellé de l’autorisation de mise sur le marché et des RCP Acétate de glatiramère Interféron β b-1b Rebif® 18/11/2011 (CHMP) Betaferon® Extavia® Betaferon : 01/06/2006 Extavia : 20/05/2008 Copaxone® 06/04/2011 Après un seul évènement Après un seul évènement Après un seul évènement Après un seul évènement démyélinisant : démyélinisant : démyélinisant : démyélinisant : • Critère clinique : poussée justifiant un bolus de corticoïdes par voie intraveineuse • Critère clinique : SCI • Critère clinique : poussée justifiant un bolus de corticoïdes par voie intraveineuse • Critère clinique : poussée justifiant un bolus de corticoïdes par voie intraveineuse • Critère IRM : critères de dissémination spatiale (≥ 3/4 critères de Barkhof ) et dissémination temporelle selon McDonald (4) • Critère IRM : ≥ 9 HS en T2 et ≥ 1 nouvelle lésion en T2 ou ≥ 1 prise de contraste sur une IRM de suivi faite à 1 mois du SCI. • Critère IRM : • S CI monofocal : ≥ 9 HS en T2 ou ≥1 prise de contraste • S CI plurifocal : aucun critère • Critère IRM : critères de dissémination spatiale (≥ 3/4 critères de Barkhof (3)) et dissémination temporelle selon McDonald (4) CHMP : Committee for Medicinal Products for Human Use. 190 Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148 • interféron β-1a, Avonex® : extension d’indication 07.05.2002 ; • interféron β-1b, Betaferon®: extension d’indication 01.06.2006 ; • interféron β-1b, Extavia® : l’AMM d’Extavia a été obtenue avec le consentement de Bayer Schering autorisant Novartis à se référer à l’AMM de Betaferon 250 μg/ml, 20.05.2008 ; • acétate de glatiramère, Copaxone® : extension d’indication 06.04.2011 ; • interféron β-1a, Rebif® : avis favorable de l’agence européenne (Committee for Medicinal Products for Human Use, CHMP) 18.11.2011 ; en attente de l’extension d’indication en France. Efficacité et tolérance des traitements de fond Données sur le bénéfice à court terme L’objectif principal des essais thérapeutiques après un SCI est de prévenir l’apparition d’une deuxième poussée (stade de SEPCD). Les données issues de ces essais cliniques après un SCI (CHAMPS, BENEFIT, PReCISe et REFLEX) ont montré que les patients traités précocement présentaient un allongement significatif du délai de survenue du deuxième épisode clinique par rapport au groupe placebo (Tab. 1). Le taux annualisé de poussées était plus faible dans le groupe des patients traités par un immunomodulateur comparativement au groupe de patients recevant le placebo. Les immunomodulateurs ont également montré leur efficacité sur les critères d’imagerie utilisés tels que la charge lésionnelle en séquence T2 et le nombre de lésions se rehaussant après injection de gadolinium. Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148 Dans le suivi prévu de l’étude BENEFIT, une analyse à 3 ans a été effectuée concernant l’effet du traitement immédiat par l’interféron bêta-1b versus un traitement différé sur le handicap après un SCI (14). Le traitement immédiat a permis de diminuer de 40 % le risque de progression confirmée de l’EDSS comparativement au traitement différé (0,60 ; 0,39-0,92 ; p = 0,02 ; diminution du risque absolu de 8 %). Ces données suggèrent que l’instauration immédiate d’un traitement par l’interféron bêta-1b retarde la progression confirmée d’un handicap, ce qui corrobore son utilisation après la première manifestation d’une SEP-RR. En d’autres termes, ces données indiquent que le fait de différer le traitement de fond, même d’un seul autre évènement clinique, à ce stade précoce de la maladie, a un effet sur l’accumulation ultérieure du handicap. Dans le suivi prévu de l’étude BENEFIT, une analyse à 5 ans a été effectuée concernant l’effet du traitement immédiat après un SCI par l’interféron bêta-1b versus un traitement différé (16). Il a été retrouvé un allongement significatif du délai de survenue d’une dissémination spatiotemporelle clinique (diagnostic de SEP-CD selon Poser et al. (1) et à partir de l’IRM (diagnostic de SEP selon Polman et al. (4) pour les patients ayant bénéficié du traitement immédiat par interféron béta-1b par rapport à ceux traités de façon différée. Contrairement aux résultats présentés à 3 ans, il n’a pas été retrouvé de différence à 5 ans en terme de progression de l’EDSS entre les 2 groupes. Par contre, les performances au test neuropsychologique PASAT (Paced Auditory Serial Addition Test) étaient meilleures pour les patients traités précocement après le SCI. Dans l’étude PReCISe, évaluant l’efficacité de l’acétate de glatiramère après un SCI, les données issues de la spectroscopie par résonance magnétique de la substance blanche d’apparence normale (rapport NAA/créatine) suggèrent un effet neuroprotecteur de ce traitement. Il reste à évaluer à long terme le bénéfice en pratique clinique (score de handicap). Limites et contraintes liées aux traitements de fond Données sur le bénéfice à long terme Une étude menée sur une cohorte de patients traités par interféron béta a montré qu’une mise en place précoce du traitement immunomodulateur retardait le délai de passage en forme secondairement progressive ainsi que le délai pour atteindre les scores EDSS 4 et 6 après un suivi de 7 ans (15). Il ne faut cependant pas oublier que la mise en place de ces traitements immunomodulateurs est contraignante pour les patients et s’accompagne parfois d’effets secondaires. En effet, il s’agit de traitements injectables, soit par voie sous-cutanée, soit par voie intramusculaire. Avec les traitements par voie souscutanée, les intolérances peuvent être des réactions aux points d’injection avec douleurs et rougeurs et dans de rares cas des nécroses cutanées. Le principal effet indésirable avec les interférons est représenté par le syndrome pseudogrippal. Après 15 à 20 ans d’utilisation, aucun risque majeur n’est apparu et la sécurité d’emploi à long terme de ces traitements reste bonne. 191 DOSSIER Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements Sclérose en plaques / 3e partie - Les traitements Conclusion DOSSIER Les données de la littérature suggèrent que l’instauration précoce d’un traitement immunomodulateur après un SCI permet d’allonger le délai de survenue de la deuxième poussée. Ainsi, l’utilisation d’un traitement par interféron et acétate de glatiramère après un premier évènement inflammatoire évocateur de SEP-RR est recommandée pour les patients à haut risque de SEP-CD. Des études sont en cours concernant l’effica- cité de nouveaux traitements de fond par voie injectable ou orale. Si l’intérêt de débuter un traitement de fond précocement est justifiée chez ces patients ayant présenté un SCI à haut risque de récidive, l’attention doit être portée sur la qualité de la prise en charge de ces patients fragilisés au décours de l’annonce diagnostique d’une pathologie chronique nécessitant un traitement au long cours. Un des objectifs de l’éducation thérapeutique de ces patients sera d’optimi- ser la compliance aux traitements de fond débutés dès les stades prén coces de la pathologie. Correspondance Dr Aurélie RUET Département de Neurologie du CHU de Bordeaux Fédération des Neurosciences Cliniques Hôpital Pellegrin 33076 Bordeaux Cedex E-mail : [email protected] Mots-clés : Sclérose en plaques, Syndrome démyélinisant cliniquement isolé, Immunomodulateurs, Interférons, Acétate de glatiramère, Imagerie cérébrale, IRM, Lésions axonales, Handicap, Recommandations, Critères diagnostiques. Bibliographie 1. Poser CM, Paty DW, Scheinberg L et al. New diagnostic criteria for multiple sclerosis: guidelines for research protocols. Ann Neurol 1983 ; 13 : 227-31. 2. Barkhof F, Filippi M, Miller DH et al. Comparison of MR imaging criteria at first presentation to predict conversion to clinically definite MS. Brain 1997 ; 120 : 2059-269. 3. Tintore M, Rovira A, Martinez M et al. Isolated demyelinating syndromes: comparison of different MR imaging criteria to predict conversion to clinically defi nite multiple sclerosis. Am J Neuroradiol 2000 ; 21 : 702-06. 4. 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