Photographier la violence extrême - Université Paris

Transcription

Photographier la violence extrême - Université Paris
Journée d’études
Photographier la violence extrême
Samedi 12 décembre 2015
9h30 – 18h
Université Paris-Sorbonne, 17, rue de la Sorbonne, 75005 Paris
Salle F 366 (entrée par la galerie Richelieu, escalier F, 2e étage)
Cette rencontre fait suite à celle intitulée « Témoigner par l’image » qui, en décembre 2013, fut consacrée à des œuvres
d’artistes témoins de violences extrêmes.
Nous proposons de poursuivre la réflexion initiée alors, autour d’images photographiques.
De très nombreux clichés ont été réalisés par les auteurs des violences eux-mêmes sur les sites de concentration,
d’extermination ou de massacre dans les territoires occupés par l’Allemagne nazie. Photographies privées destinées aux
archives personnelles des criminels ou à leurs proches, portées en guise de « talismans » ou produites devant la
communauté en guise de « preuves » de triomphe sur l’ennemi. À cela s’ajoutent les photographies de propagande dont
l’objectif était de duper le monde concernant le sort des victimes des ghettos et des camps ou des détenus travaillant sur les
chantiers staliniens ainsi que les photographies anthropométriques servant à identifier la victime au moment de son
exécution, dans les prisons cambodgiennes ou soviétiques.
Alors que la violence, sous les régimes de terreur, demeure cachée, ces images montrent qu’elle émerge
immanquablement dans le champ du visible, clandestinement ou configurée par les dispositifs de propagande. Quand bien
même se voudrait-elle invisible, elle est consubstantielle à ses représentations, créatrices de constructions mythologiques ou
de réalités factices. Il s’agira d’analyser cette trace photographique constituée parallèlement au projet d’effacement des
traces, voire pensée au sein de ces stratégies.
D’autres images, réalisées par les vainqueurs du régime nazi, américains, britanniques et soviétiques, ont pour but de
documenter les crimes au moment de leur découverte : photographies des camps lors de leur libération, reportages sur les
charniers dans les territoires soviétiques reconquis. Présentées comme une capture de la réalité objective, elles n’en sont
pas moins le résultat de mises en scènes susceptibles d’être instrumentalisées. Nous en déconstruirons les dispositifs
techniques, idéologiques ou axiologiques pour mieux discerner comment le réel y est inféré.
À côté de ces usages de la photographie inhérents à l’exercice de la violence ou convoqués pour la démasquer, nous
nous pencherons sur sa dimension d’outil mémoriel en analysant les dispositifs esthétiques qui, aujourd’hui, sous-tendent
des projets documentalistes ou artistiques, qu’il s’agisse d’images donnant à voir l’absence de trace du Goulag ou de
constructions visuelles visant à montrer la disparition.
En regroupant ici des questionnements sur ces différents usages de l’image photographique, nous souhaitons faire le
point sur la représentation des violences dans notre culture et ce, en décloisonnant résolument les approches disciplinaires.
Comprendre la généalogie de ces images ainsi que l’économie de la mise en représentation du réel dans les situations
paroxystiques nous semble une étape nécessaire pour analyser les mécanismes de la terreur. Se pencher sur l’usage
mémoriel de la photographie permettra d’interroger les liens spéculaires entre les événements et leur postérité ainsi que les
façons de les déjouer.
Programme
Matinée 9h30 – 12h30
9h30 : Ouverture : Jean-Marie Schaeffer (CRAL/EHESS)
10h15 : Philippe Mesnard (CELIS/Université Blaise Bascal, Clermont-Ferrand) : Dans l’objectif des bourreaux
(photographies effectuées par les nazis et, plus particulièrement les SS dans les ghettos, les camps, ou sur les lieux de
tueries
11h : Delphine Bechtel (Eur’ORBEM/CIRCE/Paris-IV) : Les Juifs dans l'objectif des soldats allemands de la Première
Guerre mondiale à la Seconde.
11h45 : Vicente Sánchez-Biosca (CRIMIC/Université de Valence) : La dialectique des images de bourreaux et des images
de libérateurs dans la construction de la mémoire du génocide cambodgien.
Discussion
Déjeuner
Après-midi 14h30 – 18h
14h30 : Paul Bernard-Nouraud (CRAL/EHESS) : La Peinture à l'épreuve de la photographie. Art d'après-guerre - Art
d'après photographies ?
15h15 : Luba Jurgenson (Eur’ORBEM/CRAL/Paris-IV) : Le grand chantier : mobilisation photographique au service de la
« construction » dans les régimes de terreur
16h : Jean-Louis Comolli (réalisateur, scénariste, théoricien du cinéma) : Éducation photographique à la mort violente
16h45: Tomasz Kizny (photographe) : Gulag Photographs: Image and Memory
Discussion
Cocktail
Journée d’études organisée par Paul Bernard-Nouraud (CRAL/EHESS) et Luba Jurgenson (Eur’ORBEM/CRAL/Paris-IV)