1-Période historique :

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1-Période historique :
1-Période historique : La guerre civile espagnole 1936-1939
2- Domaine artistique : Art du langage
Présentation générale
Titre : « Mise au Point » (« Explico algunas cosas »)
Artiste, Auteur, Réalisateur ou autre : Pablo Neruda,
poète et écrivain chilien (1904-1973)
Date : 1937
3-Nature : Poème
Mouvement artistique : Art engagé durant la guerre
civile espagnole.
Contexte (historique, culturel, politique) : Pablo
Neruda a joué un rôle important durant la guerre
civile espagnole par sa critique très dure envers le
fascisme et son soutien indéniable à la République
espagnole. Cela influencera beaucoup sa
littérature, notamment la série de poèmes dont fait
partie « Mise au Point » qu’on peut lire dans le
recueil « España en el corazón » (l’Espagne au
cœur)
[…] Je vivais dans un quartier
de Madrid, avec des cloches,
avec des horloges, avec des arbres.
De là, on apercevait
le visage sec de la Castille
comme un océan de cuir.
Ma maison était appelée
la maison des fleurs, parce que de tous côtés
éclataient les géraniums: c’était
une belle maison
avec des chiens et des enfants.
Raoul, te souviens-tu?
Te souviens-tu, Rafael?
Federico, te souviens-tu,
sous la terre,
te souviens-tu de ma maison et des balcons où
la lumière de juin noyait des fleurs sur ta bouche?
[…]
Et un matin tout était en flamme
et un matin les foyers
sortaient de terre
dévorant les vivants,
et dès lors ce fut le feu,
ce fut la poudre dès lors,
et dès lors ce fut le sang.
Des bandits avec des avions, avec des maures,
des bandits avec des bagues et des duchesses,
des bandits avec des moines noirs pour bénir
venaient du ciel pour tuer des enfants,
et à travers les rues le sang des enfants
coulait simplement, comme du sang d’enfants.
[…]
Vous demanderez :
pourquoi votre poésie ne parle-t-elle pas du rêve, des
feuilles,
des grands volcans de votre pays natal?
Venez voir le sang dans les rues,
venez voir
le sang dans les rues,
venez voir le sang
dans les rues !
Pablo Neruda, Mise au point (« Explico algunas cosas »)
1937
Présentation détaillée
4-Description (Forme, technique, signification, usage)
Ce poème, entrecoupé, se constitue de sept strophes de longueurs différentes. Les vers sont libres. Pablo
Neruda écrivit ce poème en 1937 en pleine guerre civile afin de critiquer les troupes fascistes. Dans ce poème,
il évoque les raisons du changement que va connaître l’Espagne, et plus particulièrement la Castille, durant la
guerre. Il commence par évoquer dans une première partie un paradis où le bonheur et la joie se mêlaient à la
beauté des paysages pour passer ensuite à la description de l’horreur, par l’irruption d’une tragédie provoquée
par des « bandits ».
5-Présentation, thématique (joindre dans la pochette plastifiée les documents complémentaires)
Dans la première strophe, le poète réalise un « flashback » en présentant ce qu’était sa vie quotidienne avant le
conflit : tranquille, normale. Une vie entourée de calme, d’arbres…
Dans la 2 e et 3e strophe Le poète se souvient du bonheur qui l’entourait et dans lequel il vivait. Tout d’abord, cet
« océan de cuir » qu’il apercevait et qui faisait référence aux champs de Castille. Ensuite, sa maison (« la maison des
fleurs ») était le reflet de la vie et de la beauté du Madrid de cette époque. La nature est très présente et souligne ce
bonheur idyllique : « arbres », « océan », « fleurs »… Sa maison respirait la vie par la présence des enfants et des
chiens. Une ambiance paradisiaque que le poète partageait avec plusieurs poètes de l’époque qu’il prend en témoin
comme Raúl González Tuñón (argentin), Rafael Alberti, et surtout Federico García Lorca, dont la mort marquera
fortement la guerre civile espagnole. Elle restera un souvenir amer et douloureux pour Pablo Neruda.
Mais à partir de la 5 e strophe, tout Madrid va baigner dans la tristesse, l’horreur, la famine. Le bonheur de son
quartier se transforme en une profonde douleur. D’ailleurs, la coupure est nette et radicale « Et un matin tout était en
flamme ». Le poème se transforme en enfer (« foyers », «flamme », « dévorant », « feu »). Les répétitions anaphoriques
en début de vers « Et un matin », celles à l’intérieur des vers comme « et dès lors » ou encore les accumulations
insistent sur le chaos dans lequel est plongé Madrid et tout ceci à cause des « bandits ».
Le poète est vraiment un poète « engagé » car il critique sévèrement ceux qui selon lui sont coupables de cette
horreur :
- les allemands et les italiens avec leurs « avions ».
- les Maures qui soutenaient la monarchie.
- La bourgeoisie avec les bagues et les duchesses qui soutenait Franco.
- L’Eglise avec les « moines noirs » qui soutenait Franco.
Pour Neruda ils représentaient tous l’ennemi fasciste, qui était à l’origine du massacre d’innocents. Ces bandits sont de
cruels assassins car leur tâche était de « tuer des enfants », tuer des êtres sans défense, des êtres innocents… et ont
commis des actes indignes et barbares. Ces deux vers (28 et 29) peuvent faire référence au tableau « Guernica » de
Picasso étant donné que le poète fait référence à des avions qui sont venus tuer des enfants. Justement, dans le tableau
« Guernica » nous pouvons apercevoir des enfants morts, et tout le monde sait que ce bombardement avait été causé par
l’aviation allemande d’Hitler.
Dans la 6e strophe, le poète s’adresse au lecteur : « Vous demanderez » afin de les interpeller davantage. Il mélange
également deux types de poésies : la poésie romantique qui permet au poète de se perdre dans ses rêves, dans la nature
(feuilles, volcans) et l’autre réaliste qui consiste à témoigner de la réalité de la guerre.
Devant cette tragédie, le poète ne peut plus rêver et évoquer de beaux paysages. Il apparait comme le porte-parole de
cette douloureuse réalité et doit en témoigner. Il nous invite à voir ce qu’il a vu, ce qu’il a découvert.
La dernière strophe montre la cause de ce changement à travers une triple répétition de vers, mais à la structure
différente. Il veut affirmer que ceux qui n’ont pas vu Madrid et l’Espagne n’auront pas vu l’horreur et la désolation et
que ceux qui l’auront vu ne seront plus jamais comme avant. Il invite d’ailleurs ses lecteurs à venir voir cette horreur
pour qu’ils en témoignent à leur tour.
De plus, cette coupure dans le poème se remarque également lorsqu’on repère le champ lexical de la nature et de la
joie de vivre (des vers 1 à 17) et celui de la guerre, de l’enfer et de la violence (des vers 18 à 37). Le poème est coupé
en deux parties : le bonheur d’avant guerre et l’horreur d’après guerre.
La guerre civile espagnole a eu un grand impact dans la poésie de Pablo Neruda. Sa thématique a changé pour être le
reflet des douleurs de l’Espagne. Il apparait comme un artiste engagé qui n’a pas hésité à utiliser son art au service de la
critique d’un système fasciste qui causait énormément de morts.
Classe : 3e LV2 espagnol EURO
Professeur : M. Straub