Regard sur la sélection officielle internationale

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Regard sur la sélection officielle internationale
7e édition : 11-21 novembre 2004
INFO RIDM : www.ridm.qc.ca
Regard sur la sélection officielle internationale
La planète-cinéma du réel
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Sur près de 500 œuvres soumises pour cette 7 édition des RENCONTRES INTERNATIONALES DU
DOCUMENTAIRE DE MONTRÉAL, 63 titres ont été retenus pour faire partie de la sélection officielle,
dont 47 films canadiens et étrangers. Celle-ci investit le domaine de l’intime, du privé, du sacré comme
elle traverse le champ du politique, de l’Histoire et de la culture afin de témoigner de la vérité des êtres
humains et de ces instants de vie où le destin des individus se mêle à celui de l’humanité.
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C’est le cas forcément de ce professeur juif tenant un journal secret sous le 3 Reich qui note amèrement
le détournement de la langue allemande dans le but de servir le projet totalitaire nazi dans le fascinant film
de Stan Neumann, La Langue ne ment pas. Ce film fera d’ailleurs l’objet d’une conférence du
philosophe Georges Leroux dans le cadre de la série État du monde organisée par Écran blanc.
C’est aussi parce qu’elle fut prise dans la tourmente de la guerre de Corée que Young-Ja Wike s’est
retrouvée dans une banlieue du New Jersey où elle vit depuis 43 ans auprès d’un mari brutal et d’enfants
ingrats. C’est la trame du film bouleversant de Hosup Lee, And Thereafter. Dans Justice In Time of
War, Fabrizio Lazzaretti s’insurge contre le sort fait à un jeune ressortissant italien qui paie de sa vie la
militarisation croissante de l’État colombien gangrené par la violence et la corruption.
Quêtes et enquêtes
Le documentariste peut aussi s’improviser détective. Ainsi, le grand cinéaste hollandais Jos de Putter
s’est lancé sur la piste du mystérieux Essad Bey pour tenter de démasquer l’auteur d’un best seller des
années 30. Alias Kurban Said est un passionnant film-enquête aux nombreux rebondissements.
Opération similaire menée par les Israéliens David Ofek et Ron Rotem qui, dans N° 17, mènent une
passionnante investigation afin de déterminer l’identité d’une victime anonyme d’un attentat.
De son côté, avec Histoire d’un secret, la Française Mariana Otero plonge dans sa propre histoire
familiale pour comprendre ce qui s’est passé trente ans plus tôt le jour de la mort de sa mère. Révélations
troublantes sur fond d’obscurantisme. Dans Annie Ong : Lost and Found, le Canadien Stefan
Randström suit les recherches et les émouvantes retrouvailles d’une femme avec sa mère biologique.
Même traque dans le film Tintin et Moi où le cinéaste danois Anders Høgsbro Østergaard cherche à
percer la personnalité de Hergé grâce à une confession thérapeutique obtenue en octobre 1971 qui jette
un éclairage neuf et touchant sur la vie du créateur de l’intrépide reporter dont il enviait la liberté.
Le travail d’autres artistes est scruté à la loupe, notamment l’œuvre épique du documentariste Vittorio De
Seta, grand portraitiste de la Sicile et de la Sardaigne, dans Détour de Seta de Salvo Cuccia ou encore
peut servir de prétexte comme dans Rice Girls qui s’inspire du mythique Riz amer (1949) de Giuseppe
de Santis pour raconter la vie de ces milliers de jeunes filles qui se sont tuées à la tâche d’émondage et
de repiquage du riz.
Travail et précarité
Qui dit travail dit aussi souvent exploitation. On en est le témoin dans Solo un Cargador, magnifique
court métrage méditatif péruvien de Juan Alejandro Ramirez sur un porteur de bagages de touristes
dans les Andes. Dans Shipbreakers, film canadien de Michael Kot, ce sont des ouvriers indiens qui,
acculés, font les frais de la mondialisation, forcés à travailler au recyclage des navires dans des
conditions moyenâgeuses.
Les thèmes de la précarité et de la survie sont aussi au centre de Cartoneros, œuvre d’un collectif qui
filme avec respect les laissés-pour-compte frappés par la crise argentine qui sert de toile de fond à
plusieurs documentaires importants originaires de ce pays, tels que le passionnant Grissinopoli de Dario
Doria (film de clôture) et Oscar de Sergio Morkin (boursier 2002 de la Fondation Alter-Ciné), savoureux
portrait d’un artiste contestataire qui vandalise les panneaux publicitaires en détournant leur message
soyeux et marchand. Maria Arruti, quant à elle, retrace dans Trelew la tentative d’évasion durement
réprimée de prisonniers insurgés révolutionnaires, présage de la terrible dictature militaire qui terrorisera
l’Argentine de 1976 à 1983.
Dérive africaine
Autre région du monde toujours aux prises avec des maux endémiques, l’Afrique, est mise sous
observation par des cinéastes qui cherchent à comprendre le drame de ce continent à la dérive dont Jean
Rouch, autrefois, vantait les vertus et la grâce. Denis Gheerbrant, avec Après, s’interroge avec pudeur
sur le génocide rwandais tandis que dans Closed District, le Belge Pierre-Yves Vandeweerd réfléchit
brillamment, à partir d’images tournées en 1996 au Sud-Soudan, au risque de manipulation qu’un réel
« décontextualisé » peut engendrer.
Dix ans après la fin de l’apartheid, l’Afrique du Sud, de son côté, se débat toujours avec le fléau du sida :
témoignage sensible et pas moralisateur, même drôle par moments, de Teboho Edkins dans Ask me I’m
Positive. Sur la question du sida, comment ne pas mentionner ce document exceptionnel coproduit par
plusieurs pays d’Europe et le Canada, intitulé Les Origines du sida qui défend la thèse d’une possible
erreur médicale dans la propagation du virus. Plus intimiste, Dr Nagesh nous montre un médecin indien
plein de compassion à l’endroit des ses patients sidéens apeurés et ignorants.
Exils
Le choc des cultures et de civilisation est souvent au cœur des préoccupations des documentaristes
interpellés par les thèmes de l’immigration, de l’exil et de la quête de refuge. Dans A Bar at the Victoria
Station, deux Polonais rêvent de s’établir à Londres; dans Welcome to Holland, des clandestins
hébergés dans un camp de transit se rebellent et dans Tarifa Traffic, des réfugiés débarquent en
Espagne dans des embarcations de fortune au péril de leur vie dans l’indifférence du monde. Le Canada,
dès 1914, connaîtra ce même genre d’épisode honteux, tel que reconstitué par Ali Kazimi dans
Continuous Journey, mettant aux prises les autorités canadiennes et des immigrants en provenance des
Indes britanniques refoulés de Vancouver.
Si les peuples s’exilent, c’est aussi parce que chez eux, ils subissent l’oppression et les abus de pouvoir.
Dans les territoires occupés par Israël, l’injustice historique faite aux Palestiniens jette un sort cruel sur les
enfants des camps de réfugiés au bord de l’insurrection générale. Arna’s Children de Juliano Mer
Khamis et de Danniel Danniel raconte le destin tragique de trois garçons qui rêvaient d’être acteurs et
qui deviennent miliciens. Detail de Avi Mograbi montre, de son côté, l’humiliation et l’impuissance vécue
au quotidien par les Palestiniens aux barrages militaires.
Mêmes signes de frustration et de révolte chez les jeunes Algériens qui expriment leur rage sans retenue
devant la caméra de Tariq Teguia dans le surprenant La Clôture, comme s’ils vivaient un terrible exil
intérieur à l’image des personnages de Garden, jeunes adultes de Tel Aviv, livrés à eux-mêmes, révélant
un aspect méconnu de la société israélienne.
La démocratie en question
Que ce soit avec Citizen Berlusconi, brûlot politique qui prend pour cible le leader de Forza Italia ou Pas
assez de volume ! (notes sur l’OMC) de Vincent Glenn, détonante satire du milieu de la finance et
critique acide de l’économie de marché, ou encore Le Génie helvétique de Jean-Stéphane Bron qui
démonte les mécanismes de la politique suisse, le documentaire fait la preuve que la démocratie en
Occident n’est pas à l’abri de déstabilisants soubresauts. La Chine, elle, si elle ne se démocratise pas, se
transforme. Témoins, ces deux films fascinants qui montrent la passion que les Chinois éprouvent pour
leurs couettes dans le splendide Quilts ou encore l’exode rural dans Zhang’s Diner qui trace le portrait
d’un couple opérant clandestinement un restaurant au centre de Pékin dans le dénuement le plus total.
INFO RIDM : www.ridm.qc.ca
MÉDIAS : MARIE MARAIS
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