Le micro dans la classe
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Le micro dans la classe
Qu’apporte de nouveau dans la classe l’utilisation d’un appareil enregistreur de son ? Enjeux et préalables Au cours des réunions de travail, ont émergé des questions essentielles, débordant d’emblée la question de l’oral pour aborder les pratiques de classe dans leur ensemble : - pour quelles pratiques de classe l’enregistrement audio est-il le plus approprié ? - quelle organisation de la classe implique l’introduction de cet outil ? - quels objectifs pédagogiques se fixer en fonction du profil des élèves ? - quelle est la part de l’écrit dans cette pratique orale ? - comment définir le statut particulier des enregistrements sonores par rapport aux écrits ? - enfin, comment se familiariser avec l’appareil enregistreur, tant pour les enseignants que pour les élèves ? L’introduction d’un appareil enregistreur dans la classe est toujours une source de curiosité, d’intérêt et de motivation pour les élèves. Ils comprennent vite que leur voix et leurs paroles vont déborder les murs de la classe par la diffusion des enregistrements sonores dans le cadre d’un projet culturel, d’un atelier radio ou d’un blog par exemple. Dans le même temps, ils sont conscients de l’enjeu et du risque que représente, pour l’image de soi, l’enregistrement de sa propre voix. Pour les élèves allophones, ce risque est accru par le sentiment d’insécurité linguistique qu’ils peuvent parfois éprouver : peur de mal dire, d’être moqué pour un accent ou une erreur de prononciation, deuil de sa propre langue et difficulté à entendre sa voix dans cette nouvelle langue apprise. Ces appréhensions naturelles seront levées par un temps de familiarisation nécessaire avec des outils peu utilisés dans la vie sociale et encore moins dans les pratiques scolaires, excepté dans la didactique des langues. Inutile de souligner que les pratiques de classe induites par l’introduction de cet enregistreur vont participer de façon importante à l’acquisition de compétences du socle commun de compétences et de connaissances : d’une part, pour la maîtrise de la langue, la compétence orale ; d’autre part, l’autonomie et l’initiative ainsi que les compétences sociales et civiques ; et, enfin, bien sûr, la familiarisation avec les technologies de l’information et de la communication. Du côté de la didactique du FLE et du FLS L’enregistrement audio est exploité de longue date dans la didactique des langues, et notamment du FLE : activités de compréhension orale à partir de documents authentiques ou didactisés dans le cadre d’objectifs de communication ; exercices de discrimination auditive en phonétique ; activités de production orale en interaction à l’occasion de jeux de rôle ; exercices de réécoute par l’élève de ses propres productions orales, à l’exemple de l’autoscopie, cette technique d’enregistrement vidéo qui permet une auto-analyse critique. 1 GRP Le micro dans la classe Ces démarches de travail de l’oral, déjà utilisées avec les élèves allophones pour l’apprentissage de la langue en UPE2A, gagneraient à être davantage transposées dans les classes ordinaires pour développer les compétences de maîtrise de la langue pour tous les élèves. Ainsi, on peut mettre à disposition des élèves allophones, sous la forme de documents audio, les textes et leçons à lire ou à mémoriser dans les différentes disciplines (fichiers mp3 téléchargés sur une clé USB, sur un poste informatique ou même sur le téléphone portable de l’élève dans l’esprit de la baladodiffusion). Ces enregistrements sonores seront réalisés aussi bien par les professeurs, que par les assistants pédagogiques ou par les élèves de la classe ordinaire, dans le cadre d’un atelier par exemple. Cette pratique qui pose comme principe un va-et-vient entre l’oral et l’écrit, est d’une importance cruciale pour les élèves allophones rejoignant une classe ordinaire : elle leur offre une transition en prenant en compte le processus habituel de l’apprentissage d’une langue, les compétences orales constituant un tremplin pour progresser encore dans les compétences écrites. Ce travail incontournable de la langue à l’oral reste bien sûr un des objectifs fondamentaux des pratiques pédagogiques présentées dans ce GRP. Une autre organisation de la classe Cependant, au-delà des compétences strictement linguistiques, il nous est apparu que l’outil que constitue l’appareil enregistreur favorise et encourage la mise en œuvre de principes pédagogiques essentiels dans les différentes disciplines scolaires. Par l’observation et l’analyse des expériences menées dans les classes, que ce soit dans des pratiques de classe quotidiennes (lecture à voix haute ou offerte, débat grammatical, exercices de ou de réécoute) ou plus ponctuelles (atelier philo, atelier radio, blog de la classe), on peut constater que l’utilisation de l’appareil enregistreur implique forcément une autre organisation de la classe que la situation pédagogique usuelle du face-à-face. La disposition des élèves en petits groupes ou en binômes s’impose, amenant des échanges fructueux entre pairs et des relations d’entraide et de collaboration : les élèves s’entraînent et apprennent à écouter, concéder, négocier, argumenter, convaincre, pour construire à plusieurs leur réflexion et aboutir à une production. Avec cette autre façon de travailler, chaque élève devient plus actif et responsable de son apprentissage, dans un esprit de partage de compétences et de confiance mutuelle. Du côté des élèves L’enregistrement audio faisant prendre conscience des imperfections et des erreurs de langue (débit, hauteur de voix, prononciation, éléments de prosodie, expressivité), une exigence supplémentaire est portée par les élèves sur leur propre parole et sur celle des autres. C’est ce qu’on peut observer, par exemple, dans le rituel des lectures offertes ou dans la pratique des lectures à voix haute destinées à être publiées sur un blog, l’enjeu final de la publication sur Internet d’une production collective constituant, dans ce type d’activité, une source de plaisir et de motivation. Finalement, c’est à une attitude réflexive que les élèves sont conduits par l’utilisation de cet outil : rendant visible le cheminement intellectuel, l’enregistrement audio donne la possibilité à chaque élève de retravailler ses « brouillons » d’oral, d’un oral de travail à une production finale, comme il retravaillerait plusieurs jets d’un écrit. 2 GRP Le micro dans la classe Du côté des enseignants Si les élèves ont accès à leurs brouillons d’oral grâce aux enregistrements audio, les enseignants eux aussi peuvent exploiter ces traces sonores pour mieux analyser les étapes d’élaboration des productions de leurs élèves et prévoir ainsi des remédiations, tant sur le plan linguistique que discursif. L’intérêt de l’utilisation de cet outil, c’est la mise au jour du processus de construction des savoirs, la « boîte noire » de chaque élève. Une autre piste prometteuse a émergé à l’occasion de ce GRP où l’oral, grâce à l’enregistrement, se substitue à l’écrit comme restitution des savoirs et contrôle des connaissances. Cette pratique, familière des professeurs de langues vivantes, est transposable à toutes les disciplines scolaires. La trace sonore donne alors la possibilité aux élèves, notamment ceux qui sont moins à l’aise à l’écrit, non seulement de s’entraîner à organiser leurs idées, mais aussi de montrer leurs capacités à raisonner par le biais de l’oral. Conclusion Ce GRP a renforcé notre conviction que l’oral a un statut aussi important que l’écrit dans la formation intellectuelle des élèves. Ce sont deux domaines interdépendants qui nécessitent un travail construit, régulier, équilibré. Au fil de nos échanges, notre réflexion s’est approfondie et affinée en découvrant toute la palette des pratiques que permet l’appareil enregistreur. Par la mise à disposition de documents audio variés, à l’exemple des différents documents proposés à l’écrit, cet appareil permet de travailler à la fois la compréhension, la production, la restitution, la mémorisation et le contrôle de connaissances. Au-delà des pratiques, l’utilisation du micro dans la classe présente un intérêt majeur. Par l’organisation différente qu’il implique dans la classe, il favorise une plus grande proximité dans la relation pédagogique : relation entre pairs, relation entre enseignant et élèves. De ce fait, il instaure un climat de confiance propice à l’apprentissage de l’autonomie, au respect de la parole de l’autre et au rythme de travail de chacun. Les pratiques qui sont présentées par ce groupe de travail ont été expérimentées dans des UPE2A et dans des classes ordinaires. Elles apportent des pistes de travail à explorer dans les différentes disciplines, au collège ou au lycée. 3 GRP Le micro dans la classe