Guimarães - WordPress.com

Transcription

Guimarães - WordPress.com
Portugal
75
Guimarães
Capitale européenne de la culture
Praça da Oliveira
En 2012, il y deux capitales européennes de la culture,
l’une est Maribor en Slovénie, l’autre est Guimarães au
Portugal, dans la région la plus verte : le Minho, à 20 kilomètres de la frontière avec sa voisine le Douro.
C’est au nord, à 50 kilomètres au-dessus de Porto, l’exubérante végétation prouve que le ciel n’est pas avare d’eau.
Après Lisbonne en 1994 et Porto en 2001, Guimarães,
paisible cité médiévale de 50 000 habitants, aux maisons
de granit (où vécut et batailla contre les Maures et les
Espagnols du comté de León le roi Don Afonso Henriques)
est la troisième ville du Portugal à porter l’étendard de la
culture. Une étape agréable en venant de Porto, ou encore
sur le route des vins du Douro.
Portugal
76
Portugal
économiques de la cité ont été réhabilitées : dans l’ancien
quartier des tanneurs, l’Institut de design propose depuis
le 14 juillet expositions et ateliers. On a gardé les anciens
fouloirs, des roues de bois géantes où les peaux de cuir
tournaient dans l’eau et les bains chimiques assurant leur
traitement. Ce lieu rend accessible un laboratoire équipé qui
permettra de concevoir et créer ses propres objets du quotidien (avec une imprimante 3D) et une école pour 30 élèves.
Paço dos Duques de Bragança
Guimarães, Pousada, Santa Marinha
Praça da Oliveira, Centre historique
Plataforma das Artes e da Criatividade
Pourquoi a-t-elle été choisie ? Pour son art de vivre et de
renaître, serait-on tenté de dire. Retour en arrière. Il y a 30
ans, le centre historique se vide, il est très dégradé. Restaurer s’impose, d’accord. Mais de préférence sans transformer
les lieux en une énième ville musée, vidée de ses classes
populaires. Telle est l’option choisie par la municipalité, qui
acquiert de nombreux bâtiments dégradés qu’elle a soigneusement restaurés avant de les rendre à leurs habitants,
maintenant ainsi le tissu social. Marchands de légumes,
tailleurs, cordonniers… Tous les artisans qui donnent de
l’humain sont toujours là. En plus, les ordres religieux ayant
été désappropriés en 1834, Guimarães s’est trouvée à la
tête d’un patrimoine architectural de premier ordre, transformé en espaces publics. C’est en reconnaissance de ce
travail que la ville est classée Unesco en 2001, puis élue
« C apitale de la Culture 2012 ».
les voitures ne battent plus le pavé vibrant, on entend les
grenouilles croasser dans les jardins). On a ajouté une aile
contemporaine comportant un auditorium, en choisissant
pour cela un cabinet d’architecture local, Pythagore. Qui a
également mené à bien un autre projet de taille ouvert fin
juin : la Plate-forme des Arts située, elle en plein centre historique. De beaux rectangles d’or, verre noir et béton. Qui
abritent entre autres 2000 objets de la collection d’un peintre portugais vivant, José de Guimarães. Le bâtiment est
accolé à un ancien marché Art Déco abritant un laboratoire
d’idées, une pépinière de jeunes créateurs et un lieu d’exposition où l’on se demandait cet été-là « Q ue signifie être
européen ? ». Carte blanche vidéo ayant été confiée pour
cela à des artistes d’une douzaine de pays. À chacun sa
salle. Tout cela sent un peu la peinture fraîche et la reconstruction intellectuelle à postériori. Intéressant en tout cas,
à l’heure où cette question cherche plus que jamais sa réponse, au-delà des désarrois conjoncturels économiques…
Ainsi, un ancien Palais devient le Centre culturel Villa Flor
(CCVL), lieu d’exposition ouvert en début d’année sur l’avenue pavée Don Afonso Henriques, qui héberge aussi les
25 permanents de l’équipe Guimarães 2012 (la nuit, quand
Dans le même esprit, d’anciennes manufactures (tanneries,
coutelleries, usines textiles) qui ont fait les riches heures
À quelques minutes de bus de la ville, le centre Asa, reconverti à l’art contemporain, investit une ancienne usine de
textile. Du 16 juin au 8 septembre, Christian Boltanski posait
sa sombre vision du monde au premier étage, sous forme
de garde-robe volante et coulissante, devant un compteur
géant marquant les minutes depuis sa naissance. À voir
également, le très original CA A A (Centre pour l’art et
l’archi­tecture), ouvert en octobre dernier à l’initiative d’un
collectif d’artistes et architectes. Si l’on transforme en lieux
d’art, c’est pour l’année de la Culture européenne, mais surtout pour la pérennisation du tissu culturel, social et artistique ainsi créé. Car Carlos Martins, directeur exécutif de
l’année de la culture, s’efforce de voir plus loin que son nez
festif annuel. On le rencontre dans le cadre de l’Historico,
beau et surtout savoureux restaurant patrimonial aménagé
dans une ancienne église, à l’orée de la vieille ville, marquée
par la superbe place du Toural.
Il est pressé : 15 minutes après, il va présenter les résultats
des six premiers mois de l’année à la Mairie et au Conseil
régional, qui les répercutera le soir venu aux journalistes lors
d’une conférence de presse. Bon, il est satisfait : 600 000
personnes sont déjà venues, sur 1.5 million attendues en un
an. Les touristes étrangers sont en augmentation de 65% et
les nationaux de 400%. Pas si mal dans un contexte de crise,
rappellera un élu. 110 millions de budget (30% provenant
de la ville et 70 de l’UE) soit l’une des plus faibles dotations
parmi les capitales pour ce type d’événements. Dont en
gros 60 millions pour les infrastructures et la régénération
publique, 40 pour le programme et 8 pour la communication. Carlos Martins, fier que 8000 habitants aient pris part
à des événements, estime aussi « qu’on peut faire populaire
et de grande qualité à la fois, mobiliser les capacités ainsi
créées pour mieux en construire de durables, assurer la
continuité dans les années à venir. » Plutôt qu’un simple feu
d’artifice événementiel. Et puisqu’on est conscient d’être
une petite ville, on organise une réflexion avec d’autres
sur ce que la culture apporte et ce qui en demeure. On se
garde bien de rivaliser avec les grandes villes, parfois prises
au piège d’une certaine folie des grandeurs…
L’année sera tout de même touffue : près de 1500 événements et workshops, 25 000 intervenants mandatés, 50
films commandés aux plus grands cinéastes l’émailleront.
Et, en première, Jean-Luc Godard a livré en juillet son premier film en 3D, commandé par la ville : entre autres (car
Jean-Luc est complexe, pluriel, à la façon des 80 « m oi »
hétéronymes du grand poète lisboète Fernando Pessoa)
77
une réflexion sur ce que la 3D peut apporter – ou non – à
une vision historique.
Mais c’est en 2D, toutes antennes dehors, qu’on vous con­
seille de flâner dans le patrimoine historique de Guimarães,
en regardant les façades ouvragées des ruelles serpentant
vers le Palais des ducs de Bragance, puis le château, découvrant le musée d’Alberto Sampaio (sculptures et peintures du XI e au XVIII e siècle, avec en contrepoint des œuvres
contemporaines, en guise de stimuli ? ). Croisant les deux
places contiguës charmantes, bourrées de terrasses où, le
soir l’habitant se balade ou prend un verre (place des Oliviers
et de Santiago). On peut aussi envisager un tour de téléphérique en 10 minutes jusqu’au sommet de la colline de la
Penha. Redescendre à pied, passer manger ou dormir près
de là, à la Pousada (Relais & Châteaux portugais) de Santa
Martha, aménagée dans un ancien couvent à cloître. C’est
beau et raffiné comme un décor d’opéra capucin !
Chaque saison de l’année est inaugurée par le spectacle
Tempo de Encontros de la Fura dels Baus : des acrobates
catalans bien connus, la rencontre entre un géant et un cheval métallique, une roue s’élevant dans la nuit étoilée. Et
le 22 décembre aura lieu une grande fête sans nom, baptisée de « n on-clôture ». Histoire de marquer « U n temps
pour renaître », titre de la dernière saison culturelle jusqu’à
décembre. Tout un symbole pour cette ville berceau de
la nationalité portugaise : l’indépendance du royaume du
Portugal y a été reconnue en 1143 avec Alphonse 1er comme
roi, et Guimarães comme première capitale. « AQUI NASCEU
PORTUGAL » – le Portugal est né ici, peut-on lire en lettres
majuscules sur un vestige des remparts du centre histo­
rique classé Unesco. Et aujourd’hui ce pays, entre autres, se
demande un peu à quelle sauce le futur le mangera…
Christophe Riedel
Renseignements
www.guimaraes2012.pt
www.pousadas.pt
Photos
© Guimaraes 2012, Pousadas de
Portugal

Documents pareils

Sous le charme du Portugal – Les Villes et Villages

Sous le charme du Portugal – Les Villes et Villages — Vous visiterez le berceau de la nation portugais , Guimarães , à travers sa première capitale , la capitale ecclésiastique, le centre de la zone céramique. Puis vous passerez par Guimarães ( cent...

Plus en détail

information utile - Guimarães Turismo

information utile - Guimarães Turismo ce majestueux manoir a été construit par D. Afonso, bâtard du roi D. João I, 8e comte de Barcelos et 1er duc de Bragança, à l’époque l’un des hommes les plus riches et puissants du Portugal. C’est ...

Plus en détail