L`humour et le rire : des outils relationnels et

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L`humour et le rire : des outils relationnels et
L’humour et le rire : des outils
relationnels et thérapeutiques en
ergothérapie ?
UE 6.5 S6 : Evaluation de la pratique professionnelle et
recherche
ROLLET Sybile
Mai 2014
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle
faite sans le consentement de l'auteur est illégale.
L’humour et le rire : des outils
relationnels et thérapeutiques en
ergothérapie ?
UE 6.5 S6 : Evaluation de la pratique professionnelle et
recherche
Sous la direction de Mme VILLARD Aline, directrice de mémoire
ROLLET Sybile
Mai 2014
Résumé :
Aujourd’hui, les français rigolent, en moyenne, moins d’une minute par jour, alors que
les médecins recommandent dix minutes pour être en bonne santé. Quel rôle joue donc le rire
sur notre organisme ? Pourquoi rire ? L’ergothérapeute a-t-il un rôle à jouer dans cet accès à la
santé ? La relation soignant-soigné est au cœur de nos prises en soin en ergothérapie. Afin de
l’établir, nous utilisons tous de multiples modes de communication. Ce mémoire étudie
l’utilisation de l’humour avec des patients adultes en situation de handicap. Occupe t-il une
place dans cette relation ? Est-il utile dans nos prises en soin en ergothérapie ?
C’est à travers des recherches, des témoignages de plusieurs ergothérapeutes, et d’un
clown intervenant en soins palliatifs, que nous avons mis en avant la place de l’humour dans
cette relation. Nous verrons que les ergothérapeutes utilisent souvent l’humour mais très peu le
rire, deux notions utilisées de manières complètement différentes…
Abstract :
Today the French laugh, on average, less than one minute per day, while doctors
recommend ten minutes to be healthy. So what role does laughing play on our bodies? Why
laugh? Does the occupational therapist have a role to play in this access to wellbeing? The
caregiver-patient relationship is at the heart of our actions in occupational therapy. To
establish this relationship, we all use multiple modes of communication. This thesis
investigates the use of humor with adult patients with disabilities. Does it have a place in this
relationship? Is it useful in our actions in occupational therapy ?
It is through research and testimony from several occupational therapists and a clown involved
in palliative care that we put forward that humor has its place in this relationship. We will see
that occupational therapists often use humor but little laughter, two concepts used in
completely different ways ...
Mots clés : ergothérapie – relation soignant-soigné – humour - rire
Keywords : occupational therapy – caregiver-patient relationship – humor – laugh
Remerciements
Je tiens à remercier Madame Villard Aline, pour son écoute, ses conseils et sa disponibilité
tout au long de la réalisation de ce mémoire,
Je remercie l’ensemble des ergothérapeutes qui ont bien voulu partager leurs expériences et
répondre à mes questions,
Je remercie Mme M., clown sympathique-empathique qui m’a apporté, elle aussi, une aide
précieuse,
Mes camarades de promotion avec lesquels j’ai partagé trois ans de bonheur,
Je remercie également mes parents, ma Loulou, Chloof, Mahou, mon Doudou, qui travaillent
quotidiennement à ma bonne santé à travers nos fous rires,
Toutes les personnes qui ont pris le temps de relire ce mémoire et de m’apporter leur aide,
A tous ceux qui m’ont encouragée de près ou de loin et soutenue dans la réalisation de ce
mémoire, merci.
« L’humour et les blagues peuvent non seulement avoir un effet
thérapeutique à court terme mais aussi sauver des civilisations tout entières. »
Bernard Werber
« Si vous voulez étudier un homme, ne faites pas attention à la façon dont il se
tait, ou dont il parle, ou il pleure, ou même dont il est ému pas les nobles idées.
Regardez-le plutôt quand il rit. » Dostoïevski
Sommaire
Introduction ..................................................................................................................... 1
1-
Problématique .......................................................................................................... 2
2- Partie conceptuelle ....................................................................................................... 9
2.1 La relation soignant-soigné .............................................................................................. 9
2.2 L’ergothérapeute............................................................................................................ 11
2.2.1 La pratique en ergothérapie .................................................................................... 11
2.2.2 Le modèle humaniste .............................................................................................. 12
2.3 L’humour ........................................................................................................................ 15
2.3.1 Définitions ............................................................................................................... 15
2.3.2 Conditions d’utilisation ............................................................................................ 16
2.4 Le rire.............................................................................................................................. 17
2.4.1 Les mécanismes du rire ........................................................................................... 17
2.4.2 Les bienfaits du rire ................................................................................................. 18
2.4.3 Les limites : les rires pathologiques ......................................................................... 24
3- Recueil de données .................................................................................................... 26
3.1 Choix des outils .............................................................................................................. 26
3.2 Choix du public ............................................................................................................... 27
3.2.1 Les professionnels ergothérapeutes ........................................................................ 27
3.2.2 Le clown entretenu .................................................................................................. 28
3.3 Analyse des résultats ...................................................................................................... 29
3.3.1 Méthode d’exploitation des entretiens ................................................................... 29
3.3.2 Méthode d’exploitation des questionnaires ............................................................ 29
3.3.3 Renseignements sur les ergothérapeutes ayant rempli le questionnaire ............... 29
3.3.4 Analyse des questions ............................................................................................. 30
3.3.5 Analyse des entretiens............................................................................................. 38
4- Discussion ................................................................................................................... 45
4.1 Conclusion de l’enquête et vérifications des hypothèses.............................................. 45
4.2 Critique de la méthode................................................................................................... 48
4.3 Nouvelles pistes de réflexions ........................................................................................ 50
Conclusion ...................................................................................................................... 52
Ressources documentaires .............................................................................................. 53
Annexes.......................................................................................................................... 56
Introduction
« Rire c’est la santé »… Pourtant, les français rient de moins en moins, voire pas du
tout pour 7% d’entre eux. Les médecins recommandent de rire 10 minutes par jour, mais en
connaissons-nous vraiment les raisons ? Et si le rire a des bienfaits sur la santé, est-il utilisé
dans les prises en soins ? Si oui comment ?
C’est lors d’un stage effectué dans le cadre de la formation en ergothérapie, que la
notion d’humour dans les prises en soin m’a questionnée. L’ergothérapeute est un
professionnel de santé qui a pour objectif d’aider les patients à être, au maximum,
autonomes dans les actes de leur vie quotidienne. Pour cela, ce professionnel doit évaluer le
soigné, ainsi que son environnement, puis établir des moyens d’interventions. Ces
observations seront possibles après avoir établi une relation de soin avec le patient, un
échange et une écoute efficients. Ce mémoire s’est donc porté sur cette relation soignantsoigné en ergothérapie, mais plus précisément à travers l’humour. De plus, comme indiqué
précédemment, le rire, associé à ce mode de communication, a des bienfaits sur notre
organisme que nous développerons. Ces deux concepts, très présents dans mon quotidien,
m’ont questionnée sur leur place dans la pratique en ergothérapie.
Dans un premier temps, l’émergence du sujet permettra d’aboutir à la problématique de
ce mémoire d’initiation à la recherche. Deux hypothèses seront émises et guideront les axes
de recherches tout au long de cette enquête. Dans un second temps, les termes et concepts
importants seront définis dans la partie théorique : la relation soignant-soigné,
l’ergothérapeute, le modèle humaniste, l’humour et le rire. Dans un troisième temps, la
méthodologie justifiant les outils choisis sera suivie d’une analyse des différentes données
recueillies à travers des entretiens et un questionnaire. Enfin, la dernière partie de ce
mémoire sera consacrée à la discussion de cette étude qui, après comparaison entre les
données théoriques et les analyses, permettra de vérifier les hypothèses et de répondre à la
problématique. Une critique de la méthode et des nouvelles pistes de réflexion seront aussi
développées dans cette partie.
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1- Problématique
L’humour est un mode de communication que j’utilise quotidiennement, et ce depuis
toujours. En effet j’ai grandi dans une famille très portée sur le rire, qui aime prendre la vie
du bon côté et dédramatiser les situations compliquées ou difficiles avec l’humour.
Toutefois, il m’a également été inculqué la notion de susceptibilité, de moquerie, de
moments inopportuns, qui peuvent mettre un frein ou des limites à l’utilisation de l’humour
avec autrui. C’est pourquoi je n’avais jamais imaginé pouvoir l’utiliser avec les patients que
je rencontrerai dans ma profession, non pas par peur qu’ils n’aient pas d’humour ou
d’autodérision, mais par peur de les « blesser » à un moment difficile à vivre.
Lors d’un stage de deuxième année, en rééducation fonctionnelle, j’ai eu la chance
d’avoir un tuteur, Mr A., qui utilise naturellement et quotidiennement l’humour. En effet,
que ce soit avec l’équipe médicale et paramédicale, ou avec les patients, Mr A. a le don de
redonner le sourire, de motiver à travers des blagues, des taquineries, ou tout simplement
des rires, tout en effectuant sérieusement son travail. Ainsi, mise à l’aise par l’équipe
d’ergothérapeutes et par les patients qui semblaient, pour la plupart, ouverts à cette
attitude et ambiance de rééducation, je suis, moi aussi, entrée dans cette dynamique.
J’ai été très surprise de l’accueil des patients de ce mode de communication, la façon
dont ils sont entrés dans le « jeu », et l’attitude de travail très positive qui s’en est suivie. En
effet, certains d’entre eux exprimaient régulièrement l’envie de venir en séances
d’ergothérapie, afin « d’égayer » des journées souvent trop longues, voire épuisantes, aussi
bien moralement que physiquement, dans le centre de rééducation. J’ai remarqué que
certains patients, et plus particulièrement un, assez angoissé par rapport à son handicap et
son futur retour au domicile ne pensait plus, ou beaucoup moins, à ces facteurs de stress
lorsque l’ambiance dans la salle d’ergothérapie était joviale.
Cela fut d’autant plus étonnant que les activités de rééducation proposées n’étaient
malheureusement pas toujours significatives pour les patients, ce qui aurait pu amener une
démotivation de leur part. En effet le travail de rééducation que nous effectuons en tant
qu’ergothérapeutes est basé autour de l’activité censée être le plus possible signifiante pour
le patient afin qu’il puisse être motivé et acteur de sa prise en soin.
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Or, les activités proposées dans ce centre étaient très analytiques et très souvent
dénuées de sens pour les soignés qui demandaient régulièrement quels bénéfices elles
avaient. Malgré nos explications sur l’intérêt principal de la rééducation dans la récupération
de mouvements fonctionnels en vue de retrouver une indépendance, la plupart des patients
« rechignaient » à réaliser ces activités. L’utilisation de l’humour, une ambiance de travail
agréable, une cohésion des patients dans la salle d’ergothérapie leur permettaient de penser
à d’autres choses et ainsi de « travailler » avec moins de contraintes et de difficultés.
Il me paraît important de garder en tête les objectifs principaux de rééducation afin
d’éviter que les patients viennent en séance uniquement dans le but de « rigoler », mais cela
n’a pas toujours été évident. Comment savoir garder une limite dans l’utilisation de
l’humour ? Comment faire en sorte que cela n’apparaisse pas comme un « jeu » ? Faut-il
éviter dans toutes les situations que le patient vienne seulement pour passer un moment
agréable ?
Ce stage m’a permis aussi de me découvrir un peu plus en tant que future
ergothérapeute. J’ai énormément apprécié de pouvoir travailler avec les collègues mais aussi
les patients dans cette ambiance détendue. Les choses m’ont paru plus simples, j’ai eu le
sentiment d’une meilleure communication entre nous et de pouvoir aborder plus facilement
les sujets délicats du handicap avec les patients. Voir un patient motivé à venir en séance,
avoir une relation soignant-soigné solide, de confiance, et donc une bonne communication,
apportent une satisfaction et une gratification au quotidien en tant que soignant. Je me suis
sentie plus confiante dans ma prise en soin en ergothérapie auprès des patients et plus à
l’aise avec mes tuteurs de stage.
J’ai pu constater de multiples bienfaits, mais je me suis tout de même questionnée
plusieurs fois sur les barrières, la distance à garder, les limites à ne pas dépasser pour ne pas
blesser le patient, mais aussi la durée et l’évolution des bienfaits qu’apporte l’humour. En
effet, lors de ce stage de deuxième année j’ai rencontré un stagiaire kinésithérapeute qui a
eu un problème avec un patient que je suivais. Ce patient rit et plaisante souvent, il a
toujours le sourire, ce qui laisse beaucoup de possibilités dans l’utilisation de l’humour. Ce
stagiaire kinésithérapeute s’est occupé de lui et a également créé une bonne attitude de
travail avec ce patient à travers l’humour.
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Cependant un jour il a fait une blague au patient en pensant qu’il en rirait comme les
jours précédents, mais au contraire cela l’a mis dans une grande colère et il a refusé
catégoriquement de revenir à ses séances de kinésithérapie tant qu’il ne retrouverait pas
son ancienne soignante, et ce malgré les multiples tentatives d’excuses de la part du
stagiaire. Cela m’a beaucoup marquée et j’ai vraiment réalisé à ce moment là l’importance
du choix des mots, de l’attention dont il faut faire preuve lorsque l’on utilise l’humour avec
des patients qui peuvent être parfois plus vulnérables. Une mauvaise utilisation de l’humour
ou une maladresse peut-elle rompre la relation soignant-soigné ? Peut-elle alors interrompre
le travail de rééducation mis en place ? La notion de confiance entre soignant-soigné est-elle
mise en jeu lors de l’utilisation de l’humour ?
Tous ces questionnements que j’ai pu avoir sur l’utilisation de l’humour en
ergothérapie m’ont conduite vers une autre interrogation à savoir les bienfaits procurés par
le rire sur l’organisme et l’esprit. En effet, j’ai toujours entendu dire que « rire c’est la
santé », mais je ne me suis jamais réellement penchée sur ce sujet. Connaître les bienfaits et
apports du rire sur le corps humain pourrait être très intéressant dans ma future pratique
professionnelle en tant qu’ergothérapeute. Les exemples que j’ai pour le moment en tête
sont les effets procurés sur le psychique de l’individu, qui pourraient être utilisés dans des
centres accueillant des patients avec des troubles psychiatriques, ou encore dans l’aide aux
patients pour l’acceptation du handicap. En effet, suite à un accident ou à l’apparition d’une
pathologie, les patients ont des phases de « deuil » à surmonter durant lesquelles l’état
moral et psychique sont perturbés et je me questionne sur l’aide que pourrait apporter
l’utilisation du rire auprès de ces patients.
Je suppose qu’il existe aussi des bienfaits physiologiques qui peuvent contribuer au
meilleur fonctionnement interne du corps humain, aider à une meilleure rééducation, être
un complément lors de la phase de récupération suite à l’apparition du handicap, mais aussi
aider au bon maintien des fonctions vitales. L’humour est-il un moyen, un outil, ou un simple
mode de communication lors des prises en soin en ergothérapie ? Peut-il permettre de créer
un lien interprofessionnel ?
Je vais axer mes recherches sur ce que peut apporter l’utilisation de l’humour dans la
relation entre l’ergothérapeute et le patient, pour l’acceptation du handicap, pour le bien
être psychique et physique. Je souhaite connaître ses limites et évaluer si c’est un moyen
que l’on peut utiliser lors des prises en soin. Ce qui amène ma question de départ :
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Quels sont les bienfaits et limites d’utilisation d’un mode de communication tel que
l’humour lors des prises en soin ergothérapiques et pour la relation soignant-soigné ?
D’après le dictionnaire Larousse la définition de l’humour est sous deux formes :
« Une forme d’esprit qui souligne avec ironie et détachement les aspects plaisants, drôles et
insolites de la réalité. » ou encore « Le caractère d’une situation, d’un événement qui, bien
que comportant un inconvénient peut prêter à rire ». Ces définitions démontrent la difficulté
de définir concrètement ce qu’est l’humour, où il naît, comment il est contrôlé, limité, régi
par la complexité que forme à lui seul le corps humain. De plus la complexité des relations
sociales et humaines met des limites supplémentaires à l’humour qui dépend de
l’appréhension de chacun.
D’un point de vue historique le terme « Humour » a été emprunté à l’anglais
« Humor » au XVIIIème siècle, qui lui-même vient de l’ancien français « humeur ». Nos
voisins anglo-saxons ont défini ce dernier terme plutôt comme une « disposition à la gaieté »
tandis que nous le dirigions plus vers une « disposition à l’irritation ». L’humour sera plutôt
associé au terme « esprit » jusqu’au XIXème siècle en France ; il ne prendra alors qu’à partir
de cette période le sens que lui attribuent les anglais, à savoir « La faculté de présenter la
réalité de manière à en montrer les aspects plaisants, insolites ou parfois absurdes, avec une
attitude empreinte de détachement » (Dictionnaire historique de la langue française).
Finalement, c’est un terme récent dans la langue française, il reste assez difficile à définir.
Comme nous avons pu le voir dans la définition du dictionnaire ce trait d’esprit qu’est
l’humour peut amener au rire. Il est défini de plusieurs façons : « Marquer la gaieté qu’on
éprouve par un mouvement de la bouche et des muscles du visage, accompagnés
d'expirations saccadées plus ou moins sonores » (Hachette), « S’amuser, se divertir » ou
encore « Offrir un aspect souriant, qui semble une image de la bonne humeur » (Le
Larousse). Dans un premier temps on observe que le rire met en jeu des fonctions motrices
du visage et de la respiration pour exprimer une notion de bonne humeur. Dans un second
temps la définition parle de divertissement. La notion de divertir est définie comme le « fait
de détourner quelqu’un de quelque chose, faire que ses pensées se tournent ailleurs ». Dans
la troisième définition le terme « humeur » est repris et plus particulièrement « bonne
humeur ».
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Cette dernière est définie par la « Disposition affective de base dont les variations
entre une tonalité agréable (pôle du plaisir) et une tonalité désagréable (pôle de la douleur)
seraient sous-tendues par une régulation neuro-humorale » ou encore « Disposition affective
passagère d'une personne, liée souvent aux circonstances ». Si l’on se réfère strictement aux
définitions, le rire provoquerait donc une disposition affective positive chez un individu.
L’histoire montre que le rire a toujours été présent. Que ce soit au moment de la
préhistoire où il représentait une émotion liée au soulagement lorsque cessait le danger, à
l’antiquité où les médecins recommandaient de rire pour fortifier les poumons et
l’organisme dans son ensemble. Au XIIIème siècle un chirurgien, Dr. de Mondeville, imposait
à ses patients de rire après les opérations car le corps « se renforce » avec la joie et s’affaiblit
avec la colère ou la tristesse. Ce principe a été repris par bon nombre de médecins aux XVI,
XVIII, et XIXème siècles (cité dans Rubinstein, 1983).
Au début du XXème siècle le docteur américain J.Walsh (cité dans Cosseron, 2009)
écrit que « La santé d’un individu est proportionnelle à la quantité de son rire ». Cependant
les recherches sur le rire en médecine ont été relancées par le livre de N.Cousins (cité dans
Cosseron, 2009) où il expose comment il a été guéri de sa spondylarthrite ankylosante1 à
l’aide du rire et des vitamines C.
La base d’une bonne prise en soin en ergothérapie, notamment, est la relation de
confiance entre le patient et le professionnel de santé. Pour cela il faut établir une bonne
relation soignant-soigné qui joue un rôle important pour le soignant dans l’élaboration de
ses diagnostics et pour induire une confiance dans le traitement ou les prises en soins
proposés. La relation soignant-soigné est basée sur une bonne communication, permettant
un échange entre les deux individus concernés, qu’elle soit verbale ou non. La
communication est définie comme « l’ensemble des phénomènes concernant la possibilité,
pour un sujet, de transmettre une information à un autre sujet, par le langage articulé ou par
d’autres codes. » (Hachette)
Un ergothérapeute a pour objectif principal l’autonomisation de la personne en
situation de handicap dans sa vie quotidienne. Pour cela il doit s’intéresser au patient dans
sa globalité ce qui inclut les besoins physiologiques de son corps et de son esprit.
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« Affection chronique caractérisée par la survenue d'une arthrite touchant principalement les
articulations sacro-iliaques et celles du rachis. » (Larousse)
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Or le docteur RUBINSTEIN H. (2003) écrit dans son livre que le rire est un besoin pour
le corps, qu’il est « inscrit dans le développement de l’espèce, dans le développement de
l’individu, il est aussi inscrit dans les rapports sociaux ». Il considère que si le corps a mis en
place les mécanismes du rire, c’est obligatoirement une fonction utile pour le bon
développement personnel et sociétal. S’il est si nécessaire, pourquoi l’ergothérapeute
n’utiliserait pas le rire comme outil dans sa prise en soin ? Ou tout simplement pourquoi ne
rééduquerait-il pas le rire chez le patient ? Quel impact pouvons-nous avoir sur ce besoin
physiologique, psychologique mais aussi social ? Avons-nous un rôle dans cette
rééducation ?
Pour pouvoir préciser ma question de recherche et pour essayer de cibler ma
problématique j’ai décidé de faire un entretien exploratoire. Pour cela je me suis tournée
vers Dr.T., un professionnel de santé et plus particulièrement docteur en soins palliatifs, qui
lors d’une intervention au sein de l’Institut de Formation en Ergothérapie a indiqué que,
malgré le « public » dont elle s’occupe quotidiennement, elle utilise beaucoup l’humour.
Le but de ma première question (annexe 2) était de connaître les raisons de
l’utilisation de l’humour dans sa pratique professionnelle. Elle m’a indiqué qu’elle utilisait ce
mode de communication comme outil d’explication des techniques médicales afin que les
patients comprennent mieux, donc adhèrent plus facilement, les soins prodigués. L’humour
lui permet aussi de dédramatiser certaines situations et d’avoir une relation de proximité
avec les patients. Lors de cet entretien, elle a insisté sur le côté distrayant de l’humour
lorsqu’elle l’utilise. En effet, elle a constaté que distraire le patient permettait non
seulement qu’il ne pense plus à son trouble et à sa douleur, mais cela aidait aussi à
enclencher une conversation sur la pathologie, les souffrances ou même la mort en passant
par des biais plus simples et plus légers. A long terme, elle a remarqué que l’humour utilisé
avec et par les patients améliorait en général le comportement, le moral de ces derniers qui
sont enclins à être plus sereins face à leur avenir. Le Dr. T. m’a précisé que l’utilisation de
l’humour, comme distraction, était sur le même schéma que le yoga, la relaxation, l’art
thérapie ou encore l’hypnose qui permettent aux patients de s’évader, de se « séparer »,
tout du moins quelques heures, de leurs symptômes.
Je ne parlerai pas de ces moyens de distractions dans ma question de recherche car
je m’éloignerai de la pratique ergothérapique mais je trouve intéressant de prendre en
compte les bienfaits qu’ils procurent et la façon dont ils sont mis en place.
7
Dans un second temps, je lui ai demandé si elle avait déjà eu des effets négatifs après
l’utilisation de l’humour et elle m’a répondu que non puisqu’elle a toujours fait attention à
s’adapter aux patients qu’elle a rencontrés. En général elle attend que le patient soit réceptif
et prêt à utiliser ce mode de communication dans sa prise en soin. Il lui est arrivé d’utiliser,
l’humour noir afin qu’il y ait une réaction, un changement de comportement du patient, ce
qui a fonctionné.
Enfin l’une des questions que je me posais était de savoir si je devais axer mon
mémoire de recherche en ciblant un public particulier. Le médecin m’a confirmé que
l’utilisation de l’humour avec les enfants ne se faisait pas par le même biais qu’avec l’adulte
car ils sont dans le jeu qui n’apporte pas la même chose sur le plan psychologique. De plus
elle trouve qu’il est plus difficile d’évaluer les bienfaits chez un public jeune. Je vais donc
axer ma recherche sur un public adulte mais sans pathologie précise.
Toutes ces réflexions, associées aux informations recueillies lors de cet entretien,
m’ont permis de cibler plus précisément mon enquête et m’ont conduite à une question de
recherche :
En quoi l’utilisation d’un outil relationnel tel que l’humour peut être
bénéfique dans les prises en soins de l’adulte en ergothérapie ?
A partir de cette problématique, j’ai pu émettre deux hypothèses :
 L’humour peut permettre une relation de confiance, une relation soignant-soigné
efficiente, ce qui favorise une bonne prise en soin ergothérapique.
 Le rire a des bienfaits sur le corps humain, tant au niveau psychique que
physiologique, qui peuvent être associés et utilisés dans la prise en soin globale de
l’ergothérapeute auprès des patients adultes en situation de handicap.
Ces hypothèses vont axer mes recherches pour la réalisation de mon mémoire, et
pourront être, après une démarche de recherche efficiente, affirmées ou réfutées.
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2- Partie conceptuelle
2.1 La relation soignant-soigné
« Le rire est le plus court chemin entre deux individus. » Charlie chaplin
Il est très complexe de définir clairement une relation soignant-soigné.
Le dictionnaire encyclopédique des soins infirmiers décrit cette relation comme « Un lien
existant entre deux personnes de statut différent, la personne soignée et le professionnel de
santé. Cette relation nécessite trois attitudes :

Un engagement personnel de l’infirmière, le malade étant accepté sans jugement de
valeur

Une objectivité, pour éviter une déformation de ce qui est vu et entendu

Un minimum de disponibilité
Elle a pour but l’aide et le soutien de la personne soignée jusqu’à son retour vers
l’autonomie. Elle permet d’identifier les demandes de la personne et d’analyser les
interactions. »
Tous les auteurs s’accordent à dire que la relation de soin s’instaure, à un moment
donné, entre deux individus qui ont chacun leur propre histoire, leurs expériences, leurs
ressentis ou encore leur caractère. Nathalie Dugravier-Guérin (2010) parle de cette relation
comme une « asymétrie fondamentale ». Le soignant est associé à des connaissances
spécifiques, un « pouvoir », qui jouent un rôle dans les prises en soin du patient plus
vulnérable, et qui donnent ainsi une responsabilité très importante au professionnel de
santé. Il doit sans cesse garder en tête de répondre aux besoins et à la souffrance des
patients. Claude Curchod (2009) décrit dans son livre une relation qui se développe sous
plusieurs formes (civilité, psychologique ou encore éducative) qui sont liées à ces différences
culturelles et sociales entre chaque individu. Le soignant, comme le soigné, font partie de
réseaux relationnels qui peuvent être parfois communs, mais aussi spécifiques, et qui
entrent perpétuellement en compte dans leurs échanges. Pour permettre un bon échange, il
faut alors que les deux parties se comprennent et pour cela, elles doivent établir une bonne
communication entre le soignant et le patient.
La communication, verbale ou non verbale, est le fait de créer une relation, un lien avec
quelqu’un, et ce, à travers trois éléments distincts : un émetteur qui produit le message, un
récepteur, et le message en lui-même.
9
Ce dernier passe une information d’une personne à l’autre, ce qui va permettre de créer
cette relation, cette compréhension entre deux personnes aux univers et cultures
différentes. Cette communication dépend elle aussi des facteurs environnementaux, sociaux
et culturels des individus, et peut donc être altérée pour de multiples raisons, comme un
support mal adapté, un vocabulaire inadéquat, ou encore une écoute distraite. Il faut donc
que le soignant prête attention au type de communication qu’il utilise avec ses patients afin
d’obtenir un échange adéquat, une relation de confiance.
C. Curchod (2009) part du principe que la relation constitue la base essentielle du soin,
du bon soin. La congruence, l’empathie et le respect sont trois éléments essentiels lors d’une
communication, d’un échange, et lorsqu’ils sont tous présents, un dialogue efficace
s’instaure entre les deux personnes. Le patient, une fois compris et écouté par le soignant,
pourra alors exprimer ses besoins, ses envies, ses inquiétudes, ses angoisses ou encore ses
réflexions. Les deux parties pourront alors réfléchir ensemble à des décisions, des solutions
qui pourront être mises en place dans la prise en soin. Pour C. Curchod (2009) cette relation
efficiente mettrait en place un « cercle vertueux », dans la relation soignant-soigné, qui
repose sur trois formes de dialogue :

Un dialogue social entre des individus qui sont dans une situation inégale mais qui
utilise un langage ordinaire

Un dialogue médical pour communiquer à propos du diagnostic, traitements ou
symptômes

Un dialogue souterrain qui comprend tout ce qui est sous-entendu, non-dit, concret.
Lorsque dans un ou plusieurs de ces dialogues, s’introduit un grain de sable, une fêlure,
la relation s’en trouve alors fragilisée. En effet, une mauvaise communication, une
incompréhension peut transformer le cercle vertueux en un cercle vicieux. L’écoute et le
partage entre le patient et le soignant se trouvent faussés, compliqués, et influent alors sur
la confiance qui risque de s’amoindrir ou de disparaître.
« Alors la relation de soin devient relation, tout simplement. La relation de soin n’est en effet
qu’un cas particulier de la relation en général. » (Cité dans Curchod, 2009)
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2.2 L’ergothérapeute
2.2.1 La pratique en ergothérapie
Afin de définir au mieux notre pratique en ergothérapie je me suis appuyée sur le livre de
Sylvie Meyer (2007), qui a fait de multiples recherches sur les différents concepts
internationalement utilisés.
S. Meyer (2007) définit donc l’ergothérapie comme une profession à la limite entre le
social et la santé. En effet l’ergothérapeute a pour objectif d’aider un patient, une famille,
une population, dans la réalisation des actes de leur vie quotidienne qui sont affectés suite à
une pathologie, un traumatisme ou encore au vieillissement naturel qui impactent
directement sur l’environnement culturel, social et physique. Afin de déterminer
précisément l’altération des actes quotidiens, l’ergothérapeute doit établir une relation avec
le patient et l’évaluer, lui et son environnement, afin de développer des objectifs et des
moyens d’interventions. Ces derniers permettront au professionnel, en lien avec le patient,
de modifier, réorganiser l’environnement de ce dernier et de sa famille, et ce à travers une
« activité intentionnelle et volontaire de l’usager » (Meyer, 2007).
La Fédération Mondiale des Ergothérapeutes (World Federation of Occupational
Therapy, WFOT, 2005) répertorie plusieurs définitions de la profession, que présentent les
associations nationales des ergothérapeutes dans le monde. L’auteur expose celles des pays
francophones et celle de la WFOT. On peut remarquer que, hormis le terme « occupational
therapy » qui n’est utilisé par les français pour la signification du terme « occupation »,
décrit comme péjoratif, toutes les définitions de notre pratique sont tournées vers
l’importance de l’activité, concept central de notre profession. En effet, l’activité au sens
large, est décrite comme un moyen que possède l’ergothérapeute pour comprendre et
analyser l’environnement, les capacités et incapacités du patient, mais aussi favoriser,
optimiser, aider à retrouver une indépendance dans sa vie quotidienne. Pour les pays
anglophones, l’occupation représente toutes les activités réalisées quotidiennement par
chacun et qui permettent de se développer, de communiquer, d’interférer dans son
environnement, de donner un sens à sa vie.
L’ergothérapeute doit évaluer, suite à une situation de handicap, les difficultés à réaliser
les occupations quotidiennes et souvent routinières. C’est à travers l’activité et leur
exécution que le professionnel et le patient, vont pouvoir avoir une action concrète.
11
L’auteur met en avant dans son livre, les valeurs professionnelles ainsi que les
croyances qui sont considérées comme essentielles dans notre pratique.
Elles ciblent alors, selon l’association canadienne des ergothérapeutes (cité dans
Meyer, 2007), l’occupation, la personne, l’environnement, la santé et la pratique centrée sur
le patient, ou client au Canada. Ces valeurs sont donc basées sur des notions humanistes. En
effet, l’auteur met en avant, à travers ces valeurs que doivent posséder un ergothérapeute,
la nécessité d’obtenir une confiance mutuelle entre le patient et le soignant et l’importance
des relations humaines mises en jeux lors des prises en soins. Le professionnel a pour
objectif principal, selon Kielhofner (cité dans Meyer, 2007), d’apporter une qualité de vie au
patient, à travers la participation quotidienne de ce dernier dans ses activités quotidiennes.
S’ajoutent à ces valeurs et croyances les convictions personnelles de chaque
professionnel qui peuvent être en accord avec les premières, ou en désaccord, ce qui peut
parfois engendrer des conflits internes ou entre thérapeutes. Il est donc difficile d’établir
une démarche clinique précise pour chaque thérapeute et chaque patient. L’ergothérapeute
va tout de même devoir se baser, en premier lieu, sur les concepts sur lesquels la pratique
est fondée mais auxquels il va ajouter sa propre perception de ce qui est « bon » pour le
patient et son environnement.
Nous avons vu précédemment que l’ergothérapeute est centré sur la personne. Cette
dernière est définie, d’après le modèle canadien du rendement occupationnel selon trois
dimensions : affectives, cognitives et physiques. Le modèle de l’association américaine quant
à lui parle « d’habilités observables » et de « facteurs du client ». Chapparo et Ranka (cités
dans Meyer, 2007) dissocient les composantes biomécaniques, cognitives, sensori-motrices,
intra et interpersonnelles. La vision de la personne en ergothérapie est donc très diverse et
ne dépend pas seulement du modèle sélectionné par le professionnel selon la population et
l’orientation du traitement suivi.
Pour faire le lien avec le thème choisi pour ce mémoire de recherche, j’ai décidé de
développer le modèle humaniste.
2.2.2 Le modèle humaniste
« L’humour supprime les problèmes, il consolide les relations entre les êtres et apporte la joie. » Marlo
Morgan
Les modèles conceptuels ont été développés par Rosemary Hagedorn dans Foundations
for Practice in Occupational Therapy (citée dans Morel-Bracq, 2009).
12
Depuis de nombreux écrits et recherches ont été effectués dans le monde, mais c’est
Marie- Chantal Morel-Bracq (2009) qui les a adaptés à la pratique française de
l’ergothérapie.
Les modèles conceptuels sont d’après cette auteur, « une représentation mentale
simplifiée d’un processus qui intègre la théorie, les idées philosophiques sous-jacentes,
l’épistémologie et la pratique. » (Cité dans Morel-Bracq, 2009). Ces modèles sont donc
dépendants des théories, concepts, courants de chaque pays et de leurs fondements.
Comme nous l’avons explicité auparavant, l’ergothérapie est une profession qui fait le lien
entre le milieu médical et le milieu social, ce qui pointe la complexité pour le thérapeute
d’établir une bonne prise en soin globale. Les modèles apportent, lorsqu’ils sont compris et
utilisés à bon escient, des outils d’évaluation mieux adaptés, des moyens adéquats et une
réflexion argumentée qui donnent un cadre thérapeutique structuré. De plus, les modèles
redéfinissent plus clairement et précisément les fondements en ergothérapie.
Kortman (cité dans Morel-Bracq, 2009) en 1994, classe les modèles en trois catégories
distinctes :

Les modèles généraux adaptés à de nombreuses situations professionnelles et
interprofessionnelles. On y trouve les modèles de rééducation-réadaptation,
interactif, systémique, mais aussi humaniste. Certains ont été développés par des
ergothérapeutes comme le Modèle de l’Occupation Humaine (MOHO) ou la MCRO
(Modèle Canadien du Rendement Occupationnel)

Les modèles appliqués adaptés à des pathologies ou situations précises comme le
biomécanique, cognitif ou encore cognitivo-comportemental. Ceux développés par
les ergothérapeutes sont le modèle ludique et de Mosey

Les modèles de pratiques qui sont spécifiques à des techniques telles que la méthode
Perfetti2.
Lorsque l’ergothérapeute observe, évalue le patient dans son environnement, beaucoup
de modèles peuvent entrer en jeu selon le contexte, la pathologie, l’entourage…mais dans le
cadre de ce mémoire, j’ai décidé de développer plus particulièrement le modèle humaniste,
qui traite d’un aspect particulier de la personne.
2
« Le principe du concept Perfetti consiste à utiliser les processus cognitifs (attention, mémoire, perception,
langage, imagination, etc.) pour récupérer les fonctions motrices dans un contexte pathologique. Dans ce
concept, le mouvement est considéré comme le moyen fondamental dont dispose notre organisme pour
percevoir le monde qui nous environne. Il se manifeste sous la forme d’un comportement adapté à une
situation. » HAS
13
Ce modèle a été développé aux Etats-Unis dans les années 50, à partir des différentes
recherches et travaux effectués par Carl Rogers, psychologue humaniste. Ce dernier a
travaillé sur l’amélioration de la qualité d’une relation entre thérapeute et patient, à travers
l’empathie, la congruence et le non-jugement.
Ces trois principes forment les fondements théoriques de l’Approche Centrée sur la
Personne, qui se veut positive et bienveillante. Carl Rogers (1962) considère que chaque être
humain a la capacité de savoir ce qui est bon pour lui, et que le thérapeute doit aider le
soigné à définir ses propres objectifs et le déroulement de la prise en soin. Pour ce faire, le
soignant devra être fidèle à ce qu’il est et à ce qu’il pense, être authentique, avoir une vision
du patient toujours positive et sans jugement, et enfin il devra chercher à comprendre le
fonctionnement et les valeurs de ce dernier.
C’est sur les bases de cette théorie que le modèle humaniste est apparu. L’objectif
principal de ce dernier est que la personne ait une autonomie maximale, notamment dans la
décision, le choix des interventions et du déroulement de la prise en soin. Un échange
efficient entre thérapeute et patient sera donc primordial afin que les objectifs soient
réfléchis et parfaitement adaptés aux besoins et demandes du soigné. Ce dernier est pris en
considération dans sa globalité, dans son environnement physique et social, et le soignant
donnera une confiance totale aux jugements personnels qu’aura le patient sur lui-même et
sur ses difficultés dues aux déficiences qu’il présente. Il n’y a donc ni pression, ni jugement
qui est mis sur la personne, le thérapeute sera là pour la guider, l’aider en mettant en avant
ses points forts, ainsi lui permettre de prendre confiance et de gagner en autonomie.
MC. Morel-Bracq (2009) décrit les avantages que présente le modèle humaniste,
notamment l’ubiquité de ce dernier dans la plupart des modèles développés et utilisés en
ergothérapie. Il forme une base pour tous, assez solide, performante, qui permet d’obtenir
une motivation positive de la part des patients. De plus l’auteur note que les résultats
obtenus à travers ce modèle sont en général permanents.
En revanche, quelques inconvénients sont aussi mis en avant. Puisque c’est le patient qui
fait les choix d’objectifs et que le thérapeute à un rôle seulement de guidant, le processus
peut être très lent, voire ne pas aboutir à une autonomie dans les choix de prise en soin.
De plus ce modèle peut parfois s’éloigner de l’activité en elle-même, pilier central de
l’ergothérapie, c’est pourquoi il faudrait l’utiliser en lien avec d’autres modèles conceptuels.
14
Enfin, certains individus peuvent se retrouver en difficulté face à un trop grand nombre
de choix possibles pour leur vie.
L’utilisation de l’humour entre, je pense, dans ce modèle puisqu’il va être une des clés,
un des moyens, pour le soignant d’obtenir une relation efficiente et de connaître plus
précisément certains aspects du patient. Aussi, le thérapeute a pour objectif, à travers ce
modèle, de changer les points négatifs d’après le patient, en points positifs, ce qui est
envisageable grâce à l’humour et au rire qui peut être provoqué. Enfin, l’ergothérapeute doit
faire preuve d’empathie et s’adapter au patient, sur le plan physique mais aussi
psychologique et là encore l’humour peut être un bon outil.
2.3 L’humour
Comme précédemment vu dans la problématique, le terme « humour » est difficile à
définir. Cependant, deux auteurs, H.Patenaude et L. Hamelin-Brabant (2006), ont analysé les
différentes études faites sur l’utilisation de l’humour dans la communication entre
infirmières et patients. A partir de ces dernières elles ont dégagé les caractéristiques et les
conditions d’utilisation de cet outil.
2.3.1 Définitions
Robinson (cité dans Patenaude & Hamelin-Brabant, 2006) fait clairement la
distinction entre humour et rire. Le premier est une « expérience cognitive, une forme de
communication » qui amène une réponse émotionnelle et un comportement physique, le rire.
Astedt-Kurki & Liukkonen, quant à eux, décrivent l’humour comme une « joie de vivre
manifestée dans les interactions humaines dans une forme d’amusement, de plaisanterie, de
jovialité et de rire. ». Une troisième définition, donnée par Sumners, décrit l’humour comme
un « jeu intellectuel » de nature spontanée qui donne un « message d’humanisme ».
En effet, les auteurs s’accordent à dire que cet outil de communication est utilisé de
manière spontanée dans les prises en soin. D’après l’étude de Robinson, dans plus de 80%
des cas, l’utilisation de l’humour n’était pas planifiée par les soignantes. Cependant, il
précise que la spontanéité de ce mode de communication n’empêche pas l’intention
première d’amuser la personne.
15
2.3.2 Conditions d’utilisation
Suite à cette analyse, les auteurs, Patenaude & Hamelin-Brabant, ont répertorié
plusieurs catégories d’utilisation :
 Les conditions liées aux soignants
Les auteurs mettent en avant les circonstances dans lesquelles les soignants peuvent
utiliser l’humour. Elles considèrent qu’ils doivent faire preuve d’empathie pour pouvoir
l’utiliser avec les patients. Celle-ci dépendra de « l’intuition, la sensibilité et du jugement »
(cité dans Patenaude & Hamelin-Brabant, 2006) du soignant qui saura ainsi saisir le moment
opportun pour utiliser l’humour dans les prises en soin. L’expérience du soignant impacte
sur la détermination de ce moment approprié. Robinson écrit que l’utilisation de l’humour
dépend, pour beaucoup, de la personnalité du soignant, de sa perception de l’imaginaire et
de l’ambiguïté des situations rencontrées.
 Les conditions liées aux patients
Astedt-Kurki (2001) explique (cité dans Patenaude & Hamelin-Brabant, 2006) que
pour un patient utilisant déjà l’humour dans sa vie quotidienne et ayant tendance à le
provoquer, ce mode de communication pourrait apporter des bénéfices. Il sera plus apte à le
conserver durant des moments difficiles qui pourraient créer des bouleversements. Ce sont
les croyances et besoins des patients qui vont guider l’utilisation de l’humour. D’après les
différentes analyses, les soignés semblent plébisciter ce mode de communication qu’ils
trouvent bénéfique pour eux et les soignants.
En revanche, les auteurs précisent que certaines circonstances, et des situations
inadéquates, peuvent entraver l’utilisation de l’humour. Dans certains cas ce mode de
communication peut être inadapté, sauf si le patient l’initie.
 Les conditions liées à la situation
Plusieurs chercheurs s’accordent à dire, après leurs études, que lorsqu’une situation
est embarrassante, ou complexe, l’humour peut être intéressant pour diminuer cette gêne
et soutenir le patient.
De plus, lorsque le professionnel, se trouve gêné par une situation, ce mode de
communication permettra de masquer son embarras.
16
Patenaude & Hamelin-Brabant (2006) sont arrivées à la conclusion que la structure et
« l’ambiance » qui y règne peuvent déterminer la fréquence d’utilisation de l’humour entre
soignants et patients, mais aussi entre professionnels, notamment lorsque le stress est
important.
 Les conditions liées à la relation soignant-soigné :
Le respect de l’autre, des valeurs, est primordial dans la relation soignant-soigné. Une
fois que cette base est maintenue, une relation de confiance peut naître et laisser place à
l’humour. (Greenberg 2003) (cité par Patenaude & Hamelin-Brabant, 2006)
2.4 Le rire
« La nature est toujours économe et l’on ne connaît pour ainsi dire aucun organe ni fonction inutiles
dans l’espèce humaine. L’existence même du rire prouve qu’il est nécessaire. » H. Rubinstein
2.4.1 Les mécanismes du rire
Selon le Dr. Rubinstein, le rire serait une « réponse physique involontaire à une
émotion plaisante ». Les manifestations physiques s’expriment selon trois axes différents :
musculaire, respiratoire et neuro-hormonal.
Le rire met en jeu le cortex cérébral, le « cerveau conscient, siège de la pensée, de la
réflexion, de la raison » (Rubinstein, 2003). Le centre cortical du rire se situe dans
l’hémisphère droit, et plus précisément au niveau du cortex préfrontal, lieu de gestion de la
personnalité. Ce dernier est lié au système limbique, centre des émotions, qui fonctionne
différemment selon les personnes, ce qui explique les perceptions inégales de la réalité. Ce
système est, quant à lui, lié à l’hypothalamus qui lui aussi contrôle les émotions, mais
également le rythme cardiaque, la respiration, la tension artérielle, et les sécrétions
hormonales.
L’émotion, soit le rire, serait donc reconnue par le cortex conscient, tandis que
l’intensité de la réponse émotionnelle serait contrôlée par le système limbique.
Ce dernier, quant à lui, va transmettre ce message, via les neurotransmetteurs3, au
système neuro-végétatif qui contrôle de façon involontaire les fonctions de l’organisme.
3
L’acétylcholine (intervient dans les mouvements simples), la dopamine (les mouvements complexes et
l’activité mentale), le GABA (inhibe les mouvements anormaux, joue un rôle dans le comportement et
l’humeur), la sérotonine (déclenche le sommeil) et la noradrénaline (intervient dans le maintien de l’éveil et la
régulation de l’humeur)
17
Ce dernier comprend deux sous systèmes qui s’équilibrent sans cesse « le système
sympathique accélérateur et le système parasympathique freinateur. » Le premier régit les
situations « d’urgence » et provoque les réactions physiques associées, telles que la
transpiration ou la dilatation des pupilles. Le second, quant à lui, est antagoniste et va donc
ralentir le rythme cardiaque, ou contracter les pupilles. En cas de stress, c’est le système
sympathique qui dominera tandis que lors d’un moment de détente, c’est le second qui sera
prépondérant.
Au moment du rire, la première phase d’alerte sera régie par le système
sympathique, puis lors d’une seconde phase, la dominante parasympathique permettra de
ralentir le rythme cardiaque, de baisser la tension artérielle ou encore de régulariser la
respiration et la digestion. Cette deuxième phase est la plus durable, puisque les bénéfices
perdurent après l’acte de rire en lui-même.
« C’est un phénomène humain complet qui joue un rôle fondamental au carrefour des
manifestations musculaires, respiratoires, nerveuses et psychiques de l’individu. »
(Rubinstein, 2003)
2.4.2 Les bienfaits du rire
H.Rubinstein (2003) décrit deux rires différents mais complémentaires.
2.4.2.1 Le rire psychologique
L’auteur décrit le rire comme un réflexe, aux mêmes caractéristiques que tous ceux
du corps humain, mais dont le stimulus n’est pas seulement physique (chatouillement par
exemple) mais aussi psychique et intellectuel. Seulement, ce réflexe est mis en jeu lorsque la
personne est en « humeur de jeu », c'est-à-dire dans un état d’esprit ludique, associé à celui
que l’on a lors de l’enfance, qui donne la capacité de rire de choses désagréables ou très
sérieuses. A contrario, lorsqu’une personne n’est pas dans cette humeur il sera impossible
d’utiliser l’humour.
H. Rubinstein (2003) nous explique à travers son livre que le rire est ancré dans
l’espèce humaine et qu’il est nécessaire à chacun.
En effet des études neuropsychologiques démontrent que le rire permet une
stimulation des centres du plaisir dans des situations agréables mais aussi, à l’inverse
déplaisantes, pour conserver la sensation de joie.
18
Le besoin de rire est ancré en nous, particulièrement dans le système limbique du
cerveau, centre des émotions, positives et négatives, mais également impliqué dans la
formation de la mémoire et de la faculté d’apprentissage. En effet, dès la naissance l’enfant
communique souvent en premier lieu, avec le monde qui l’entoure à travers le rire, et les
adultes sont en perpétuelle recherche de cette émotion pour sa sociabilisation, pour son
développement. Le rire est le meilleur et premier moyen de communiquer, il est donc bien
inscrit dans les rapports sociaux.
Cette recherche du plaisir est nécessaire à l’équilibre de l’organisme c’est pourquoi
nos actes, nos comportements sont régulièrement dirigés vers cette stimulation, et
permettent d’obtenir une connivence entre deux individus. Enfin, l’auteur précise que de
nombreux psychanalystes pensent que la recherche du rire est aussi faite pour contrôler les
pulsions agressives et sexuelles qui font partie intégrante des émotions chez l’espèce
humaine et qui sont situées elles aussi dans le système limbique.
2.4.2.2 Le rire physique
H. Rubinstein (2003) a décrit dans son livre tous les bienfaits que peut provoquer sur
le corps humain le rire, selon les mécanismes qu’il met en jeu.
 Sur l’état général :
L’auteur décrit de nombreux « dérèglements » de l’équilibre général, dûs à une
société qui provoque et augmente de nombreux besoins difficiles à atteindre. Cela s’exprime
par des insomnies, une inattention, des problèmes digestifs, une dépression, des troubles du
métabolisme ou encore une fatigue musculaire. Ces dérèglements sont souvent les signes
d’une asthénie, une fatigue physique extrême de l’organisme, pour laquelle la solution est,
non pas de rester seul chez soi au repos, mais au contraire d’avoir des activités physiques,
réadapter l’effort, lutter contre le stress. Le rire est, à son niveau, un bon moyen
complémentaire pour pallier cette fatigue et ses conséquences.
 Sur l’appareil respiratoire
Lorsqu’une personne rigole, les échanges respiratoires sont en moyenne trois fois
plus importants, ce qui permet d’éliminer les toxines plus efficacement, nettoie les voies
aériennes supérieures, augmente l’apport en oxygène au cerveau, et diminue le taux de
graisse sanguine, donc le cholestérol dans les artères.
19
En effet, les alvéoles pulmonaires réduisent les lipides dans le sang par un système de
combustion, et les échanges plus intenses augmentent l’efficacité de ce système. Aussi, pour
les personnes qui font des crises d’asthme4, le rire permettrait de relâcher les muscles lisses
des bronches par action du système parasympathique.
De même pour les personnes souffrant d’emphysème5, le rire associé à une
rééducation respiratoire augmenterait le volume d’air de réserve expiré et diminuerait alors
l’insuffisance respiratoire. Enfin, les personnes anxieuses ont généralement une respiration
plus courte, la rééducation par le rire dynamiserait le rythme respiratoire selon le Dr H.
Rubinstein (2003).
 Sur l’appareil cardio-vasculaire
Nous avons vu précédemment que le rire avait comme bienfait de diminuer le taux de
cholestérol dans les artères. Deux Dr. en endocrinologie californiens, Lee Berk et Stanley Tan
(cités dans Cosseron, 2009), ont réalisé une expérience qui démontre l’effet positif du rire
sur le diabète. Ils ont demandé à un groupe de patients souffrant d’hypertension artérielle
et d’hypercholestérolémie de visionner quotidiennement, et ce pendant un an, des vidéos
humoristiques durant 30 minutes par jour, tandis qu’à un autre groupe de patients,
souffrant des mêmes troubles, de continuer leurs traitements habituels. Passé le délai de
l’expérience les chercheurs ont analysé le taux de cholestérol et de la protéine C-réactive,
marqueur de la maladie cardiaque, entre les deux groupes de patients.
Les résultats ont été significatifs puisque au sein du groupe du « rire » il y a eu une
augmentation du « bon cholestérol » de 26% tandis que dans le groupe témoin seulement
3% en moyenne.
De plus, 66% des protéines C-réactives ont été supprimées au sein du groupe « rire »
contre 26% de l’autre côté. Les individus souffrant de diabète pourraient donc diminuer leur
taux de cholestérol et leur risque de crise cardiaque en rigolant quotidiennement de bon
cœur.
4
« Affection inflammatoire chronique des bronches, caractérisée par des crises de dyspnée (gêne respiratoire) paroxystique sifflante
témoignant d'une contraction brutale des muscles commandant l'ouverture et la fermeture des bronches, auxquelles s'associent un
œdème et une hypersécrétion des muqueuses des voies aériennes (fosses nasales, pharynx, larynx, trachée, bronches) » Larousse
médical
5
« Affection diffuse des poumons caractérisée par une distension des alvéoles avec destruction de leur paroi. Les emphysèmes
pulmonaires se traduisent par une gêne respiratoire parfois très invalidante. Ils risquent d'évoluer vers une insuffisance respiratoire
chronique retentissant sur le fonctionnement du cœur » Larousse médical
20
Lorsque nous rions, le rythme cardiaque s’accélère dans un premier temps, puis diminue
petit à petit pour venir se stabiliser à une fréquence basse. Le Dr Michael Miller (Cité dans
Cosseron, 2009), affirme que la phase durant laquelle le rythme cardiaque augmente a les
mêmes résultats qu’un jogging, en fortifiant le cœur et améliorant la circulation sanguine et
l’oxygénation du myocarde, ce qui permet de diminuer le risque d’apparition d’un
thrombus6. Lors de la phase de diminution du rythme cardiaque, à prédominance
parasympathique, le calibre des vaisseaux sanguins augmentent, la pression artérielle
diminue et le cœur est donc soumis à un moins grand stress. Le rire est donc un bon moyen
complémentaire pour la prévention des accidents cardio-vasculaires.
 Sur la digestion
Durant la première phase du rire, il va y avoir une augmentation de l’activité
musculaire des abdominaux et du diaphragme qui vont permettre de brasser le tube digestif
dans sa totalité. Ainsi l’estomac, l’intestin, le côlon, l’intestin grêle et le duodénum vont être
massés ce qui va augmenter leur motricité digestive. Ce brassage digestif va permettre de
lutter contre la constipation par contraction des fibres lisses intestinales. De plus, nous
avons vu que le rire avait un effet sur le système parasympathique ce qui provoque une
sécrétion de salive et des sucs digestifs plus importante, améliorant ainsi la digestion qui
sera plus rapide.
Le foie est lui aussi massé par les différents mouvements musculaires provoqués par
le rire, ce qui permet une meilleure sécrétion de la bile et un meilleur travail hépatique. Les
insuffisances hépatiques de l’individu pourraient ainsi être diminuées. De plus une
augmentation du travail du foie permet également de diminuer le taux de cholestérol en
l’éliminant par les voies biliaires.
Comme pour le rythme cardiaque, même lorsque le rire s’arrête il y a un effet
secondaire avec une relaxation du tube digestif et une sécrétion des sucs digestifs plus
importante grâce à la stimulation des enzymes digestives par le système parasympathique.
 Sur la douleur
Elle représente 60% des motifs de consultations médicales et est une aide
primordiale pour le médecin afin qu’il pose un diagnostic.
6
« Caillot sanguin formé dans un vaisseau (artère, veine) et provoquant une thrombose » Larousse médical
21
Le Dr. Rubinstein (2003) précise que pour une douleur aiguë il faut administrer au
patient un traitement adapté tandis que lorsqu’elle est chronique et n’est pas le signal d’une
urgence vitale, on peut essayer d’utiliser le rire pour impacter sur quatre mécanismes :

L’attention : lorsque la douleur est importante et constante elle en devient
angoissante et il est difficile de fixer notre attention sur autre chose. Le rire permettrait alors
de dévier nos pensées, de modifier la douleur ressentie et la diminuer un moment.

La tension musculaire : suite à une blessure, les muscles aux alentours sont
contractés et le rire, par son action sur le système parasympathique réduirait cette tension
et diminuerait la douleur

La production de catécholamines (adrénaline et noradrénaline) et de
l’endorphine. Les premières sont anti-inflammatoires, et leur augmentation va permettre de
diminuer plus rapidement l’inflammation et donc la douleur. L’endorphine, qui est la
morphine naturellement présente dans le corps humain, va être, au même titre qu’avec le
sport, augmenté par le rire, ce qui va diminuer puis interrompre la douleur.

L’attitude vis-à-vis de cette douleur : nous avons tous une perception
différente de cette dernière par notre culture, nos croyances ou encore notre personnalité ;
le rire va ouvrir à de nouvelles « visions » de la douleur, et à une attitude plus optimiste.
 Sur la spasmophilie
La spasmophilie est un « Syndrome lié à un état d'hyperexcitabilité neuromusculaire
chronique. » (Larousse médical)
Elle se manifeste principalement par des crises de tétanie avec des spasmes, une
hyperventilation, une fatigue importante, des céphalées, de l’anxiété, des douleurs, des
troubles digestifs et un état dépressif associé.
D’après le Dr H. Rubinstein (2003), le rire combattrait mécaniquement et
chimiquement ces symptômes, notamment par l’action des catécholamines dans un premier
temps qui vont faire reculer le stress. Nous avons vu auparavant les bienfaits sur les
différents systèmes de l’organisme, notamment respiratoire et musculaire, qui là encore
agiront sur ce syndrome.
 Sur le stress
Le stress est un « État réactionnel de l'organisme soumis à une agression brusque. » (Le
Larousse).
22
Ces agressions, qui sont très diverses, vont déclencher au niveau de l’hypophyse une
stimulation de sécrétion d’hormones surrénaliennes (cortisol) qui impactent sur l’équilibre
de l’organisme et peuvent provoquer des modifications de ce dernier, comme une
tachycardie, une hyperventilation et une vasoconstriction artérielle. Ces changements
physiologiques peuvent être positifs dans une situation d’agression « mineure » car ils
permettent une adaptation rapide, mais lorsque le stress est plus long, voire chronique, ces
réactions deviennent pathologiques et peuvent entraîner des problèmes psychiques avec
une fatigue voire une dépression. Lors d’un épisode de stress, c’est le système sympathique
qui domine sur le parasympathique.
Le rire rééquilibre ces deux systèmes ce qui le place comme un puissant anti stress,
d’autant plus que dans la deuxième phase du rire, c’est le parasympathique qui est
dominant, ce qui permet de réduire les effets du stress précédemment cités. Le rire peut
donc réduire le risque d’accidents cardiaques graves. De plus, l’action qu’il a sur
l’hypothalamus permet la sécrétion d’endorphines, les « hormones du bonheur », qui vont
donc permettre un apaisement général de l’organisme.
Enfin le rire permet d’avoir une attitude et une réflexion positives qui peuvent permettre
de mettre de côté des pensées ou problèmes du quotidien stressants.
 Sur le sommeil
La vie psychique est caractérisée par une phase d’éveil qui dépend de deux
hormones, la noradrénaline et de la dopamine, suivie de la phase de sommeil associée à la
sérotonine.
Le rire stimule donc la phase d’éveil, réduit les tensions internes, et provoque une
détente musculaire, ce qui laissera place plus rapidement à la phase de sommeil et réduira
donc les insomnies.
 Sur la sexualité
Les déroulements physiologiques du rire et du sexe sont très proches, avec la phase
de désir, puis la phase copulatoire, celle orgastique et enfin la résolutoire. Lorsque, par
exemple, l’orgasme n’est pas atteint, c’est le système parasympathique qui est en cause et
c’est le sympathique qui reprend le dessus et provoque une angoisse.
Le rire permettrait de reproduire ces phases successives et de rétablir un
fonctionnement harmonieux et équilibré du système nerveux autonome.
23
 Sur la longévité
Le lien entre le rire et la longévité n’est fait que d’hypothèses, mais il a été prouvé
que le stress accélérait le vieillissement de l’organisme et nous avons vu précédemment que
le rire, lui, annihilait cette anxiété. Le rire améliorerait la qualité de vie et donc permettrait
de vivre plus longtemps.
 Sur l’immunologie
D’après le Dr. Rubinstein (2003), le rire serait bénéfique sur le système immunitaire par 3
mécanismes différents :
 Une augmentation de lymphocytes au niveau des alvéoles pulmonaires grâce à
l’augmentation de la ventilation
 La diminution du stress qui renforce les défenses et diminue le vieillissement de
l’organisme
 Une façon plus optimiste de voir les choses qui permet d’avoir une barrière
psychologique face aux agressions extérieures.
Des chercheurs américains, et notamment le Dr Lee S.Berk (Cité dans Cosseron, 2009),
ont montré qu’à la suite d’une thérapie par le rire, le taux d’anticorps avait augmenté dans
les muqueuses nasales et les voies respiratoires.
 Sur l’activité intellectuelle
Le Dr. Lewis (Cité sur apprendre à rire, internet) avance que le rire aiderait le cerveau
à mieux apprendre, à mieux travailler grâce aux catécholamines, précédemment citées, qui
permettent de mettre l’esprit en éveil, de réduire l’anxiété face aux difficultés lors de
l’apprentissage et d’améliorer les capacités mnésiques.
2.4.3 Les limites : les rires pathologiques
Le Dr. H. Rubinstein (2003) explique qu’il faut dissocier tous les bienfaits et
fonctionnement du rire cités auparavant des rires pathologiques. Ces derniers ne sont pas
provoqués de la même manière que chez un individu sain et n’ont pas les mêmes effets. Ces
rires peuvent être rencontrés dans différents cas :
24
 Des pathologies dues à des lésions cérébrales comme la sclérose en plaque, ou
certaines formes d’épilepsie (gélastiques). Les rires seront retentissants, étranges et
faux mais sans lien avec la joie.
 Les patients atteints de schizophrénie en phase aiguë auront des rires fulminants,
discordants et inadaptés.
 Les patients présentant des démences préséniles7 ne prennent rien au sérieux, du
fait de leurs troubles cognitifs, et ont tendance à « régresser » vers les plaisanteries
enfantines, plus sommaires.
 Les patients bipolaires, peuvent avoir des rires explosifs, durant leurs phases
maniaques, qui traduisent en général leur agressivité.
Ces rires ne sont plus associés à une notion de plaisir, d’après l’auteur, mais plutôt un
« symptôme morbide ». Le rire n’est plus sous le contrôle conscient du patient.
7
« Affection du cerveau se caractérisant par une dégénérescence (une destruction) dont la cause n'est pas connue avec
certitude, entraînant un affaiblissement survenant progressivement de toutes les activités intellectuelles que ce soit la
mémoire, le jugement, la concentration, le raisonnement, le langage etc.. La caractéristique majeure de la démence
présénile est son début se situant entre l'âge de 40 à 65 ans et son évolution relativement rapide » Vulgaris médical
25
3- Recueil de données
« Amène de la confiance, de la joie, de la légèreté et ça change tout, ça change un monde »
(clown NEZTOILE)
3.1 Choix des outils
Afin d’enrichir, compléter la théorie, et valider ou non les hypothèses, j’ai utilisé deux
types d’outils : le questionnaire et deux entretiens semi-directifs. Le premier entretien fut
réalisé auprès d’un clown sympathique-empathique, fondatrice de l’association NEZTOILES.
Le second, quant à lui, fut celui d’une ergothérapeute diplômée d’état.
Le questionnaire (annexe1) permet d’obtenir des informations quantitatives à travers
des questions fermées, mais aussi qualitatives suite aux réponses données aux questions
ouvertes. Il est dit d’auto-administration car la personne qui y répond est seule face au
questionnaire. Les questions fermées étaient binaires, multichotomiques8 sous forme
d’échelle d’intensité comme l’échelle de Likert. Les questions ouvertes ont donné la
possibilité aux professionnels de s’exprimer plus ouvertement sur le sujet et sur leur
pratique.
Cette méthode de recueil de données permet de mettre en lien les divers avis des
professionnels, et avoir une vision plus globale de la pratique en ergothérapie. Ainsi, le
nombre important de réponses et leur concision permet de faire, principalement, une
analyse statistique. Le questionnaire est disponible en annexe 1.
Les entretiens semi-directifs, quant à eux, apportent des informations qualitatives,
qui aideront, elles aussi, à répondre à la problématique posée. Ces entretiens sont
disponibles en annexe 3 et 4. A travers des questions ouvertes, l’interlocuteur peut exprimer
librement et plus en profondeur ses expériences, observations et réflexions, en rapport avec
le sujet abordé.
Lors de ces entretiens il est nécessaire de trouver l’équilibre entre le fil de la pensée
de l’interlocuteur, et l’objectif premier d’obtenir des données précises pour l’élaboration de
ce mémoire. Par des questionnements et des encouragements à détailler davantage les
réponses, les informations recueillies se veulent les plus précises possible.
8
Questions à choix multiples qui sont des échelles de mesure exprimant l’intensité d’une opinion. L’échelle de
Likert est la plus répandue pour évaluer cette intensité.
26
Ces deux méthodes de recueil de données semblent appropriées dans l’élaboration
de ce mémoire de recherche, car les réponses diverses et variées obtenues permettent une
analyse plus approfondie.
3.2 Choix du public
3.2.1 Les professionnels ergothérapeutes
 Ayant répondu aux questionnaires
Afin de répondre à la problématique et valider, ou non, les hypothèses, les
questionnaires ont été envoyés à des ergothérapeutes travaillant avec un public adulte.
La limitation du public visé par la problématique étant très faible et la quantité
d’ergothérapeutes exerçant en France importante, les envois du questionnaire se sont
révélés nombreux. En effet, je l’ai diffusé à travers un mail vers des structures de soin ou
directement sur les adresses des professionnels en ergothérapie. Toutefois, je me suis aussi
aidée des nouvelles technologies, et notamment des réseaux sociaux sur internet, qui
permettent d’entrer en contact rapidement et plus facilement avec les professionnels, au
niveau national.
Le questionnaire (annexe1) a été réalisé sur internet via l’outil « Google Drive » qui
offre
la possibilité de le remplir directement sur le navigateur. De plus les réponses
obtenues grâce à cet outil sont claires et rapides. Le lien internet, qui dirigeait vers le
questionnaire, était accompagné d’un texte de présentation précisant le délai de quatre
semaines pour y répondre. Toutes les réponses ont été obtenues dans ce temps imparti et
sont au nombre de 139. Cette quantité importante d’avis personnels d’ergothérapeutes sur
leur pratique a permis d’obtenir une analyse plus approfondie en lien avec celles des
entretiens réalisés.
Tableau 1 : Renseignements sur le nombre d’années de pratique en ergothérapie
30
Nombre d'ergothérapeutes
25
20
15
10
5
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33
Nombre d'années après l'obtention du diplôme
27
 Ayant été interrogé
Le choix du professionnel interrogé s’est fait rapidement car c’est la seule
ergothérapeute, tout du moins à ma connaissance, qui est formée à la Rigologie 9 et qui
propose des séances du rire aux patients qu’elle suit.
Grâce à cet entretien, les objectifs ergothérapiques utilisés pour ces types de prises
en soin ont été mis en avant. Suite à un appel téléphonique expliquant ma démarche, elle a
accepté immédiatement de faire cet entretien. Ce dernier s’est effectué par téléphone pour
des raisons géographiques et pratiques, ce qui n’a pas permis une communication optimale
puisque toutes les informations non verbales sont absentes, mais cela n’a pas entravé la
pertinence des informations recueillies. L’ergothérapeute interrogée est diplômée et exerce
dans un hôpital psychiatrique depuis 10 ans. (annexe 4)
3.2.2 Le clown entretenu
La problématique s’articule, notamment, autour des bienfaits psychiques et physiques
de l’humour et du rire sur les patients. Il m’a semblé important d’interroger une personne
qui est extérieure « au soin » en tant que telle mais qui, néanmoins, travaille dans le milieu
médical, avec des patients et qui a pour objectif, à priori, de distraire les patients de leurs
souffrances ou difficultés du moment. Mon choix s’est porté sur un clown qui travaille avec
des adultes en soins palliatifs. Cet entretien m’a semblé approprié pour répondre à la
problématique posée, puisque cette professionnelle est en contact direct avec les patients et
les soignants. Elle garde tout de même une distance et un avis extérieur, peut être plus
objectif, sur les effets positifs ou non du rire.
Cette clown est régulièrement sollicitée du fait de sa particularité à travailler auprès
d’adultes, donc c’est naturellement qu’elle a accepté de répondre à mes questions, et ce par
téléphone, là aussi pour des raisons géographiques.
Elle a une formation de base en art thérapie et a monté l’association NEZTOILES, qui
accompagne les adultes hospitalisés dans de multiples secteurs pour soulager leur
souffrance psychique. Elle exerce en tant que clown dans les hôpitaux depuis 12 ans mais
depuis seulement quelques mois dans un service de soins palliatifs. (annexe 3)
9
Etymologiquement, la rigologie signifie « l’étude de ce qui fait rire et de ses effets ». « La rigologie est un
ensemble de techniques psychocorporelles d’éducation émotionnelle, destiné à stimuler la joie de vivre,
l’optimisme, la créativité et d’une manière générale la bonne santé mental et physique. »
28
3.3 Analyse des résultats
Les résultats obtenus à travers les différents recueils de données doivent être mis en
perspectives et croisés avec la problématique et les hypothèses formulées précédemment.
3.3.1 Méthode d’exploitation des entretiens
Après la retranscription des entretiens (annexes 3 et 4), j’ai fait le choix de réaliser
une analyse descriptive, c'est-à-dire d’exposer la situation après avoir trié et comparé les
différentes informations recueillies auprès des interlocuteurs. Pour cela j’ai organisé les
données similaires de manière à les regrouper sous des thèmes communs pour les
comparer. Cependant, les entretiens étant réalisés auprès de deux personnes de professions
différentes certaines questions ont été adaptées. Pour ces dernières, l’analyse s’est donc
faite en fonction des hypothèses émises précédemment.
3.3.2 Méthode d’exploitation des questionnaires
Pour les analyser, j’ai procédé en deux étapes. En ce qui concerne les questions
fermées, j’ai fait des statistiques simples pour cibler et globaliser les réponses données par
les ergothérapeutes, puis je les ai triées en fonction de leurs années d’expérience et des
structures dans lesquelles ils exercent. Pour les questions ouvertes, j’ai procédé de la même
manière que pour celles posées lors des entretiens semi-directifs, en les organisant et en les
comparant.
3.3.3 Renseignements sur les ergothérapeutes ayant rempli le
questionnaire
Cent trente neuf ergothérapeutes ont répondu au questionnaire ce qui amène une
grande diversité dans le nombre d’années d’expérience, les lieux d’exercices mais aussi tout
simplement les avis sur le sujet.
Comme nous l’avons vu précédemment (tableau 1), le nombre d’années écoulées
depuis l’obtention de leur Diplôme d’Etat varie de 1 à 33 ans, ce qui est assez vaste. Parmi
ces 139 personnes, environ 18% d’entre elles sont dans l’année qui suit la fin de leurs
études. On remarque aussi que 67% des ergothérapeutes sondés exercent depuis moins de
10 ans, 22% entre 10 et 20 ans et enfin 11% depuis plus de 20 ans.
29
En ce qui concerne le lieu d’exercice, là aussi on trouve une grande diversité.
Néanmoins, beaucoup d’entre eux travaillent dans des domaines similaires, comme le
démontre le graphique ci-dessous qui fait état de ces renseignements :
Tableau 2 : Lieu d’exercice des ergothérapeutes interrogés
structures
d'hébergement
14%
autres
5%
Rééducation/
Réadaptation
53%
Personnes âgées
20%
Psychiatrie
8%
La diversité qu’offre la profession d’ergothérapeute permet à de multiples
professionnels d’exercer sur plusieurs structures différentes : Environ 14% des
ergothérapeutes questionnés font partie de ces personnes. D’après le graphique ci-dessus,
on constate qu’il y a principalement trois secteurs de travail : la rééducation/réadaptation
fonctionnelle des adultes, la prise en soin des personnes âgées et les structures
d’hébergement. La rééducation reste majoritaire avec 53% des ergothérapeutes interrogés
qui y travaillent, suivi par les instituts gériatriques, que ce soit au domicile ou dans une
structure médico-sociale, avec 20%, et les structures d’hébergement, type MAS (Maison
d’Accueil Spécialisé) ou FAM (Foyer d’Accueil Médicalisé), avec 14%.
Les ergothérapeutes travaillant en psychiatrie ne représentent que 8% des réponses
obtenues, il sera donc intéressant de faire le lien avec l’entretien effectué auprès de la
professionnelle qui exerce en psychiatrie.
3.3.4 Analyse des questions
Je vais reprendre chaque question fermée posée aux ergothérapeutes afin de faire émerger
les informations principales. Les graphiques représentant les pourcentages en fonction des
années d’expériences et des structures sont en annexe n°5.
 Question n°1 : L'humour fait partie intégrante de votre vie quotidienne. Vous êtes :
Pour cette question, les professionnels avaient une échelle de 1 à 5 qui allait de « pas du tout d’accord » à
« complètement d’accord ».
30
On observe, à l’aide de ce graphique, que 44% des personnes interrogées sont
complètement d’accord avec ça et 43% d’accord, soit 87% qui utilisent quotidiennement
l’humour dans leur vie personnelle. Opposés à ces informations, 4% des ergothérapeutes ne
sont pas d’accord avec cet item, et 9% sont moyennement d’accord.
Parmi les personnes qui considèrent que l’humour fait partie intégrante de leur vie,
on note que les professionnels qui ont moins de 10 ans d’expérience ont, à 44%, voté 4, les
personnes qui ont entre 10 et 20 ans d’expérience 5, à 47%, et ceux de plus de 20 ans 5 à
47%.
Cette question va permettre de faire le lien entre la personnalité de l’individu chez lui
et son positionnement, opposé ou non, en tant que soignant.
 Question n°2 : Pour vous, l’utilisation de l’humour n’est pas professionnelle avec les
patients. Vous êtes :
A l’aide du graphisme ci-dessus, on constate que 57 ergothérapeutes, soit 41%, et 71,
soit 51% ne sont respectivement « pas du tout d’accord » et « pas d’accord » avec le non
professionnalisme dans l’utilisation de l’humour avec les patients. Cela représente en tout
92% qui ne sont pas en accord avec cela. Seulement 7 personnes, soit 5% sont d’accord avec
le fait que ce ne soit pas professionnel.
Nous avons pu constater à partir du tableau d’analyse (annexe 6) et les graphiques
(annexe 5) que les ergothérapeutes qui ont moins de 10 ans d’expériences et entre 10 et 20
ans sont, respectivement, 49% et 60% à être « pas d’accord » avec cet item. Les personnes
de plus de 20 ans d’expériences, quant à elle, ne sont « pas du tout d’accord » à 53%.
31
On constate donc, grâce à ces résultats que plus les ergothérapeutes ont
d’expériences, de pratique, plus ils pensent que l’humour n’empêche pas le
professionnalisme face au patient.
Au niveau des structures dans lesquelles travaillent ces professionnels, on remarque
qu’en rééducation fonctionnelle, les avis divergent entre « pas d’accord » et « pas du tout
d’accord » tandis que dans les structures d’hébergements, ou gériatriques, les
ergothérapeutes sont deux fois plus à répondre « pas d’accord ». De plus, même si les
pourcentages en accord avec cet item sont nettement inférieurs à ceux exprimés
auparavant, ils sont plus présents dans ces structures de soins.
 Question n°3 : Pour vous, l’utilisation de l’humour a des bienfaits sur la santé des patients.
Vous êtes :
Cette question permettra de faire le lien avec les entretiens afin de répondre à la
deuxième hypothèse exposée.
Parmi les 139 ergothérapeutes ayant répondu au questionnaire, 64 d’entre eux, soit
46%, sont « complètement d’accord » et 62 sont « d’accord », ce qui représente en tout
91% de réponses positives, et en lien avec la problématique posée. On constate donc que les
professionnels pensent, pour la plupart, que l’humour, et donc le rire adjacent, peuvent
avoir des bienfaits sur la santé des patients. On note toutefois que 7% ne savent pas si
l’humour est bénéfique sur la santé et 3% des ergothérapeutes ne sont pas en accord avec
cela.
L’analyse approfondie des questionnaires remplis montre que les ergothérapeutes
« jeunes diplômés » sont tous d’accord avec cet item, à 89%, malgré quelques personnes
qui ne connaissent pas la réponse. En revanche, les individus qui ont le plus de pratique
professionnelle ont exprimé un désaccord, faible certes par rapport aux réponses opposées,
mais tout de même présent. On constate que les connaissances sur les bienfaits du rire sur la
santé sont exponentielles à l’expérience des professionnelles, ce qui est logique, et que les
constats positifs restent majoritaires mais tout de même nuancés.
32
En ce qui concerne les établissements de soins, on relève seulement un avis négatif
plus important qu’ailleurs en psychiatrie avec 10% de « pas d’accord ».
 Question n°4 : Pour vous, l’utilisation de l’humour aide les patients dans l’acceptation du
handicap. Vous êtes :
Cette question ciblait donc un objectif dans l’utilisation de l’humour avec les patients.
L’humour et le rire deviendraient, non plus un outil relationnel mais un outil thérapeutique.
On peut constater à l’aide du graphisme ci- dessus, que les réponses données sont
plus partagées que dans les questions précédentes. On observe tout de même que 48%
d’entre eux sont « d’accord » et 60% en tout considère que cet outil aide le patient dans
l’acceptation de son handicap. Seulement, contrairement aux autres questionnements, les
professionnels sont 30% à avoir répondu « ne sais pas », ce qui représente environ un tiers
d’entre eux. Aussi on remarque que 8% des personnes interrogées ont répondu n’être « pas
d’accord » avec cet item, ce qui est un pourcentage, certes faible sur le papier, mais plus
important que ceux évoqués auparavant.
La question d’acceptation du handicap soulève donc plus de débat. Contrairement
aux autres questions, ce sont les personnes qui ont le plus d’expériences qui ont le plus
répondu « ne sais pas ». En revanche ce sont eux aussi qui ont exprimé à 26% être
« complètement d’accord », soit le double, voire le triple, des autres praticiens interrogés.
Au niveau des structures, les avis sont partagés de façon similaire.
 Question n°5 : Pour vous, l’utilisation de l’humour, permet d’obtenir une bonne relation
soignant-soigné. Vous êtes :
33
Les ergothérapeutes évoquent, à 61%, qu’ils sont « d’accord » avec cet item.
Cela se complète avec les personnes « complètement d’accord » qui représentent
31%, soit 92% qui confirment que l’utilisation d’un outil de communication tel que l’humour,
permet d’obtenir une relation efficiente. Seulement 4% ne savent pas et 3% ne sont pas en
accord, ce qui est très positif et permettra de répondre à la première hypothèse.
Les données recueillies selon les années de pratique sont très proches, notamment
pour les réponses positives qui sont majoritaires. On peut observer tout de même que 6%
des ergothérapeutes travaillant depuis plus de 20 ans, ne sont « pas du tout d’accord » avec
cet item. En ce qui concerne les structures où exercent les professionnels sondés, on ne note
pas de différence distincte puisqu’ils sont tous majoritairement « d’accord ». On note
néanmoins que les ergothérapeutes en structures d’hébergement répondent tous
positivement ou sans avis.
 Question n°6 : Pour vous, l’utilisation de l’humour peut être faite dans les prises en soin
des patients. Vous êtes :
Une fois de plus, seulement 4% des informations recueillies sont opposées à la
question posée. Ce graphique montre que 93% des personnes enquêtées, pensent que
l’humour est un outil utilisable lors des séances en ergothérapie, dont 63% qui sont plus
« d’accord » que « complètement d’accord ». C’est donc un avis net en faveur de son
utilisation avec tout de même quelques réserves.
Les trois catégories d’années d’expérience sont majoritairement « d’accord » avec
l’utilisation dans les prises en soin de l’humour, mais on note que les personnes « jeunes
diplômées » sont plus nombreuses à avoir donné cette réponse, et en conséquence moins
que les autres pour « complètement d’accord ». Le graphisme (annexe 5) montre également
que les réponses négatives ont été données par les ergothérapeutes qui ont plus de
pratique professionnelle. Une fois de plus, les structures d’hébergement ne recueillent pas
de réponses négatives à cet item.
34
 Question n°7 : Pour vous, l’utilisation de l’humour est faite par toute l’équipe
pluridisciplinaire au sein de la structure. Vous êtes :
Cette interrogation permettait de savoir si la dynamique interdisciplinaire était
homogène vis-à-vis du patient. Cela fera le lien avec l’analyse des entretiens.
On constate que les avis donnés sont plus partagés sur ce sujet là. En effet, le nombre
d’ergothérapeutes ayant répondu « d’accord », « ne sais pas » et « pas d’accord » est
sensiblement le même, soit environ 28%. De plus, les réponses extrêmes « complètement
d’accord » et « pas du tout d’accord » sont à peu près équivalentes même si la première est
légèrement au dessus. Il est donc difficile d’étudier cette question et de conclure, si ce n’est
que la diversité dans les structures, sur le plan interdisciplinaire, est importante. On note
néanmoins que les structures psychiatriques sont plus, globalement, en accord avec cet
item, tandis que les instituts gériatriques et d’hébergement sont plus en désaccord.
 Question n°8 : Pour vous l’utilisation de l’humour, est important en tant que soignant.
Vous êtes :
Ce graphisme nous montre que 50% des ergothérapeutes sont « complètement
d’accord » avec cet item, et 92% en tout sont en accord. Seulement 6% d’entre eux ne
considèrent pas avoir besoin d’utiliser l’humour en tant que professionnel. On observe
globalement les mêmes données selon les années d’expériences, avec tout de même une
petite nuance pour les « jeunes diplômés » qui ont seulement 1% de réponses négatives.
Enfin, une fois de plus, les structures d’hébergement n’ont aucune réponse négative.
35
 Question n°9 : Vous utilisez l’humour avec vos patients :
Malgré les réponses négatives obtenues précédemment, il est intéressant de voir
qu’aucune des personnes interrogées n’est dans le refus total d’utiliser l’humour avec les
patients. De plus seulement 1% répondent ne l’utiliser que rarement. Ces résultats montrent
que les ergothérapeutes qui ne trouvaient pas d’intérêts significatifs à l’humour, l’utilisent
avec les patients au minimum « occasionnellement », à 9%.
Le graphique montre que 36% se servent de l’humour lors des prises en soin
« quotidiennement », et 90% en tout, au moins « régulièrement », ce qui correspond aux
données recueillies précédemment. Quelles que soient les années d’expériences, la réponse
« quotidiennement » est dominante, mais elle est majoritaire chez les personnes qui
pratiquent depuis plus de 20 ans. Ce sont ces ergothérapeutes qui utilisent le plus l’humour
avec leurs patients, selon le graphique (annexe 5). Quant au niveau des structures, les
professionnels utilisent tous quotidiennement l’humour, exceptés ceux qui sont en gériatrie
qui ont répondu à 51% « régulièrement » et seulement 12% « quotidiennement ».
 Question n°10 : Avez-vous eu une formation pour l’utilisation de l’humour comme outil
thérapeutique ?
oui
1%
non
99%
Les informations qui ressortent de cette question sont nettes, seulement une
personne a été formée, donc 99% de professionnels qui ne l’ont pas été.
Lorsque j’ai demandé sous quelle forme a été effectuée cette formation, cette
personne a répondu « Lors de la formation principale, j’ai participé à un stage de clown
d’une semaine en équipe. »
36
Cette personne est diplômée depuis moins de 10 ans, et travaille auprès d’un public
principalement adulte au sein d’un hôpital. Cette personne n’est « pas d’accord » avec le
fait que l’utilisation de l’humour soit non professionnelle avec le patient.
En revanche, elle a répondu ne pas connaître les bienfaits de l’humour sur la santé
et l’efficacité de son aide dans l’acceptation du handicap. Pour les items concernant la
relation soignant-soigné, l’utilisation dans les prises en soin, et l’importance pour lui en
tant que soignant, cet ergothérapeute se positionne comme « d’accord ». Enfin, le soignant
utilise ce mode de communication régulièrement avec les patients qu’il suit. Enfin lorsque
j’ai posé une question ouverte sur les limites de l’utilisation de l’humour, cette personne a
signalé « Je pense que l'on sent avec qui on peut faire de l'humour... Pas en tout début de
prise en charge et je ne me permets pas toujours de faire de l'humour avec des personnes qui
ont des troubles des fonctions cognitives, ils n'ont parfois pas le second degré. ».
 Question n°12 : Souhaiteriez-vous en avoir une ?
non
46%
oui
54%
Les 138 ergothérapeutes n’ayant pas reçu de formation répondent à 54% « oui »
pour être formés à l’utilisation de l’humour.
Parmi ces 54%, seuls les jeunes diplômés l’ont exprimé majoritairement. Les
ergothérapeutes qui ont plus de pratique ne souhaitent pas à 66% et 73% être formés à
l’utilisation d’un tel outil de communication, ce qui paraît logique puisque les
ergothérapeutes récemment diplômés sont plus en recherche d’expérience et de formations
diverses afin d’étoffer leurs connaissances et compétences dans le domaine de
l’ergothérapie en général. Enfin les réponses positives le sont au niveau de toutes les
structures rencontrées.
 Conclusion de cette analyse : Globalement, l’outil de communication qu’est l’humour est
plébiscité et utilisé par la plupart des ergothérapeutes interrogés. Ils y trouvent un intérêt au
niveau relationnel mais aussi thérapeutique lors de leurs prises en soin.
37
On note tout de même un pourcentage, faible mais présent, qui est plutôt contre son
utilisation en tant que professionnel. La comparaison des années d’exercice montrent que
les ergothérapeutes qui pratiquent depuis plus de 20 ans sont généralement plus
« complètement d’accord » que les autres, mais apportent aussi le plus de réponses
négatives. Au niveau des structures, aucune information concrète n’en ressort si ce n’est que
les structures d’hébergement, sur trois questions (où les réponses sont majoritairement
positives), n’ont eu aucune réponse négative, et en gériatrie, les ergothérapeutes et l’équipe
pluridisciplinaire utilisent moins l’humour avec les patients.
3.3.5 Analyse des entretiens
« L’utilisation de la thérapeutique du rire ne connait pas de contre indication. » H Rubinstein
Cette analyse mettra en avant les grandes idées qui ressortent de l’enquête et qui
entrent en compte dans la réflexion autour des hypothèses et de la problématique.
 L’utilisation de l’humour
L’ergothérapeute (annexe 4) exprime clairement que son objectif est de « travailler
autour du rire et de l’utiliser de manière thérapeutique. » et non pas le travail de l’humour.
C’est un outil qui peut être utilisé lors des séances car elles sont très ludiques, portées sur
l’imagination, mais les techniques utilisées sont très précises et propres à la rigologie. En
revanche, elle est d’accord avec les ergothérapeutes qui ont répondu au questionnaire sur le
fait que l’humour peut être utilisé lors des prises en soin : « je pense qu’il faut absolument
apporter de la bonne humeur, de la joie. En tout cas oui il faut absolument que quel que soit
le public que l’on prend en charge, il faut garder le sourire, il faut être positif ».
Le clown (annexe 3), quant à lui, est plus dans l’utilisation de l’humour avec les
patients qu’elle rencontre même si elle précise « En fait il n’y a tellement pas de règle, […]
parce qu’en fait toutes les personnes sont tellement différentes que ça m’emmène à chaque
fois dans différents univers, et différentes approches relationnelles aussi ». Elle adapte son
intervention, son échange, avec les patients selon leur disponibilité du moment mais son
objectif principal est d’essayer de changer la vision des difficultés, de la souffrance, ou tout
simplement de la vie. Pour accéder à cela elle utilise plusieurs biais mais elle décrit l’humour
comme « une autre façon de voir la vie, c’est pour ça que c’est tellement puissant ! Ca peut
faire rire de voir cette autre réalité, sourire, ou apaiser…c’est d’une profondeur l’humour ».
38
De plus lorsqu’elle forme les futurs soignants, elle essaye de leur apprendre à être
audacieux avec les patients et elle dit « L’audace dans l’accompagnement bien sûr que c’est
l’humour, mais ce n’est pas de l’humour au dépend de la personne, c’est un humour
partagé ».
 L’utilisation du rire
Les deux personnes entretenues sont à la recherche du rire lors de leurs
interventions, selon les dires du clown « le rire, c’est le cadeau ». En effet, elles décrivent
leurs séances comme des moments où elles donnent des clés aux patients afin qu’ils
arrivent au « lâcher prise ». L’ergothérapeute indique que le patient doit être « capable de
déconnecter son mental pour ne plus penser et pour arriver à lâcher prise », et la clown
« quand c’est une souffrance morale, c’est vraiment une croyance, puisque il y a des choses à
lâcher donc c’est comment je peux aider à lâcher cette croyance ! ». Une fois que le patient a
« lâché prise », alors il pourra laisser place au rire. Les séances de rigologie qu’effectue
l’ergothérapeute sont organisées de façon précise, et ce n’est vraiment qu’en fin de séance
que le fou rire, la méditation du rire, est travaillé.
 La relation soignant-soigné : efficiente ou non ?
Nous avons vu précédemment, grâce aux questionnaires, que les ergothérapeutes
interrogés étaient majoritairement en accord pour dire que l’utilisation d’un outil
relationnel tel que l’humour avait sa place et permettait d’avoir une bonne relation
soignant-soigné.
Lors de l’entretien, l’art thérapeute (annexe 3) reprend l’adage « le rire est la
distance la plus courte entre deux personnes », et ajoute « il n’y a vraiment plus le soignantle soigné et d’un seul coup on est vraiment à égalité », ou encore « si on arrive à mettre ça
dans la relation d’accompagnement, effectivement ça crée une proximité incroyable ». Cela
permettrait, selon elle, de créer un échange, un partage plus intime qui facilite le travail
qu’elle réalise, pour changer la vision de la vie et voire provoquer des rires.
L’ergothérapeute (annexe 4) utilise elle aussi ces rires, et provoque donc cette
proximité lors des séances de rigologie. Néanmoins, lors des séances en ergothérapie dites
« normales », elle déclare que « la relation est parfaitement maintenue » car elle sait poser
un cadre plus distant en dehors des séances de rire.
39
Au contraire, elle dit même que « les séances m’aident à créer une relation de
confiance, plus approfondie, parce qu’ils te font confiance, parce que tu les connais. »
 Les bienfaits sur la santé
Rappelons que le groupe d’ergothérapeutes ayant répondu aux questions est à
environ 90% d’accord pour dire que l’humour, et en l’occurrence le rire, ont des bienfaits
sur la santé.
Lorsqu’il a été demandé au clown si les médecins avec lesquels elle travaille ont
remarqué une différence psychique ou physique depuis son arrivée elle a répondu « Je
pense qu’au niveau physique moins. Mais maintenant j'aimerais bien que dans cette équipe,
vu que maintenant ils sont à fond avec moi, qu'on l’évalue ». On ne peut évaluer les bienfaits
physiques réels qu’elle apporte. En revanche, elle a mis en avant le bien être, le moral, la
perception du moment qui s’améliorent lorsqu’elle intervient. Elle décrit des situations où
les patients sont fermés quand elle arrive, mais qui, après qu’ils ont passé un moment de
partage ensemble, viennent à sourire, rire, lâcher prise. La professionnelle indique même
que dans les secteurs de neurologie, il est important qu’il y ait des clowns qui interviennent
car « ils ont vraiment besoin du moral là bas ».
En ce qui concerne l’ergothérapeute, qui travaille donc en psychiatrie, elle a pu noter
plusieurs bienfaits au niveau sociétal, physiologique et psychologique. Puisque les séances
qu’elle propose se déroulent en groupe, il y a une amélioration des rapports sociaux, une
meilleure intégration dans un groupe, et ça permet une affirmation de soi à travers les
différentes activités proposées.
Sur le plan physiologique, la professionnelle note que la rigologie aide à diminuer
l’anxiété et gérer le stress et les émotions, permet de se redynamiser, et « joue un rôle
antalgique par la sécrétion d’endorphines ». Elle parle « d’éducation émotionnelle » pour
savoir « détecter ses émotions, les stocker de manière à éviter de se retrouver débordé
d’émotions négatives. ». Enfin, elle indique aussi que la diversité des activités proposées et
le dynamisme des séances « peut travailler l’attention, la concentration ».
Pour finir, sur le plan psychologique, l’ergothérapeute précise qu’au début et à la fin
de chaque séance, elle fait la « météo » du moment et « systématiquement une personne
qui était dans le brouillard, maintenant elle est sous le soleil ».
40
En effet la professionnelle évoque que les séances permettent de se décentrer de ses
propres souffrances, favorisent un mieux être, développent la bonne humeur et les
émotions positives et permettent une meilleure estime de soi.
 Le ressenti des patients
Lors de l’entretien effectué avec l’art thérapeute, il lui a été demandé si les patients
ressentaient la différence, elle a répondu positivement en indiquant que beaucoup de
patients ou de familles la remercient pour ce qu’elle a apporté. Elle a aussi précisé qu’une
patiente lui avait dit « je vous en prie revenez, ça change tellement quand vous n’êtes pas
là », car elle avait remarqué, qu’en son absence, les soignants étaient eux aussi beaucoup
moins dans le sourire, le partage, ce qui s’en ressentait lors de leurs soins.
L’ergothérapeute entretenue a voulu connaître l’avis des patients qu’elle suit en
séance du rire, à travers des questionnaires distribués 9 mois après leur commencement.
Elle a gentiment accepté de partager les questions et résultats de ces derniers. Les patients
ont répondu de manière positive sur la durée des séances, la diversité des exercices
proposés, la stimulation de la créativité, les contacts développés avec les autres
participants, et le maintien du respect. De plus, ils ont tous été en accord lorsqu’elle leur a
demandé si les séances développaient la bonne humeur, le rire, la redynamisation et le
décentrage de leurs soucis. Aussi, Ils recommanderaient à d’autres patients de la structure
d’y participer. En revanche, pour la gestion du stress, ils ont répondu plutôt négativement,
ce que l’ergothérapeute explique par un manque de continuité lorsqu’ils retournent dans
leur quotidien, ils ne « s’entraînent » pas suffisamment. C’est donc un bilan plutôt positif
pour les patients et l’ergothérapeute interrogée précise même que beaucoup de patients lui
disent « que c’est plus efficace que la relaxation, ils en sortent plus relaxés, plus détendus ».
 Les limites d’utilisation
Plusieurs limites ont été évoquées lors des entretiens mais aussi dans les questionnaires,
ce qui permettra de faire des liens. Le clown qui intervient en soins palliatifs évoque une
limite face aux souffrances physiques des patients « la souffrance physique je pense qu’il
faut vraiment s’incliner, faut être humble parce qu’on ne sait même pas soi même comment
on réagirait ».
41
Elle explique aussi que tout le monde n’a pas les mêmes disponibilités face à la joie, et
les personnes qui ne sont pas dans la joie et le rire depuis toujours, elle dit qu’elle n’arrivera
pas à changer leur perception des choses.
L’ergothérapeute, quant à elle, soulève le problème des troubles cognitifs qui peuvent
entraver la dynamique de groupe des séances de rire. De plus, dans le cadre de la structure
de soins dans laquelle elle travaille, elle n’intervient pas auprès des patients qui sont dans
des phases aiguës, types psychotiques, car il est difficile de leur donner un cadre.
Néanmoins, elle ne se ferme pas complètement à l’idée de le développer, avec plus
d’expérience et de pratique, auprès de pathologies aiguës.
Cet item me permet donc de faire le lien avec la question n°11 du questionnaire :
Rencontrez-vous des limites dans l'utilisation de l'humour avec les patients ? Beaucoup de
données ont été recueillies et regroupées. La réponse qui a été la plus citée concorde avec
celle de l’ergothérapeute entretenue : les patients avec des troubles cognitifs. En effet, les
professionnels ont parfois décrit plusieurs types de limites, mais ce sont les troubles cognitifs
qui ont été les plus cités. Cette réponse était justifiée, généralement, pas le manque de
compréhension, l’absence de second degré des patients présentant ces types de troubles.
Le deuxième point important, le plus évident est la nécessité de s’adapter à chaque patient
comme avec tous les moyens thérapeutiques utilisés. Cette information est liée à une autre
mise en avant par plusieurs professionnels, qui est l’évaluation de la personne, que ce soit
au niveau culturel, de sa personnalité ou encore de son processus de deuil face aux
pathologies.
Une autre donnée prépondérante est liée aux réponses de l’ergothérapeute entretenue,
les maladies psychiatriques, et plus particulièrement les psychoses et le versant persécutif,
peuvent entraver à la compréhension de l’humour. Parmi les nombreuses réponses, on
constate tout de même que la plupart des professionnels ne considèrent pas avoir de limites
dans l’utilisation de l’humour dans les prises en soin. L’un d’entre eux écrit « ça aide pour
dédramatiser certaines situations ». Les autres limites répertoriées sont le maintien du
cadre thérapeutique, la réceptivité du patient, le stade d’acceptation du handicap ou de la
pathologie, les interprétations différentes de l’humour, lorsque la situation ne s’y prête pas
ou encore la nécessité d’avoir déjà une relation de confiance. Un autre point cité plusieurs
fois est la préoccupation de ne pas blesser le patient, de ne pas se moquer de lui, et ainsi ne
pas rompre la relation de soin.
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D’autres informations ont été données, par un nombre plus restreint d’ergothérapeutes,
mais qui restent néanmoins intéressantes pour approfondir notre analyse. Certains ont
explicité que le propre état du soignant à l’instant T est important « Cela dépend également
de notre état personnel à ce moment là. Faire de l'humour sans y croire, généralement, ça
ne prend pas avec les patients. ». D’autres encore l’utilisent pour observer les réactions des
patients « J'ai déjà rencontré des personnes qui à première vue était hermétiques à l'humour.
Mais souvent cela donnait une piste de travail ou des questionnements sur la raison de cette
non-réaction. »
 Le soignant et l’interdisciplinarité
La place du soignant et son propre bien-être sont des points qui sont ressortis
régulièrement lors de l’entretien du clown. Elle considère que son travail n’est pas qu’auprès
des patients « j’ai l’impression que ma fonction c’est de faire rire les soignants, c’est
d’alléger au maximum leur réalité ». Elle estime que lorsque les soignants sont joyeux, donc
souriants, c’est bénéfique pour les patients et leur relation soignant-soigné : « quelqu’un qui
sourit ça transmet une confiance et puis bon c’est une ouverture ». Certains patients lui
expriment même ce besoin « dites leur au médecin s'il vous plaît que leur sourire ça change
tellement tout ». Cette réflexion est similaire à la question n°8 sur l’importance de
l’utilisation de l’humour en tant que soignant, et où 92% des ergothérapeutes sondés
répondent positivement, ils ont besoin de cet outil pour « alléger leur réalité » et ainsi être
plus efficients.
Une autre thématique du questionnaire a été abordée par la clown :
l’interdisciplinarité. Les réponses étaient très mitigées pour les ergothérapeutes interrogés
mais l’avis de la professionnelle en hôpital est claire « J’insiste vraiment là-dessus c’est un
travail d’équipe ». Avoir le soutien de l’équipe, une bonne communication, permet au clown
d’appuyer sa présence auprès des patients qui acceptent et sont en attente de sa présence
dans le service de soins palliatifs. « Une équipe qui m’intègre complètement, là pour
l’instant je n’ai pas été refusée une seule fois. ».
 Les objectifs en ergothérapie
Mme D. étant la seule, ou en tout cas une des rares ergothérapeutes, à utiliser la
rigologie, des séances de rire avec les patients, il était intéressant de connaître ses objectifs
de prise en soin.
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Puisqu’elle travaille en psychiatrie, ses objectifs sont adaptés au public rencontré. De
plus, ils sont validés par l’hôpital puisque la formation a été financée par ce dernier.
Ses objectifs sont : apprendre aux patients à gérer leur stress, le travail d’affirmation de
soi, de revalorisation, et apprendre à être en groupe. Elle va « leur donner des outils pour
être positifs, pour qu’ils puissent s’affirmer […] et prendre du plaisir».
En ce qui concerne la mise en place de la rigologie dans d’autres types de structures,
Mme D. reste plus perplexe car cette thérapie fonctionne dans un cadre très précis que les
troubles cognitifs ou les incapacités motrices pourraient entraver. Néanmoins, au-delà de la
rigologie, elle précise que stimuler, faire rire les patients permettent une motivation, un
mieux être qui ne peuvent être que bénéfiques pour le patient. De plus, elle précise que ses
séances permettent d’avoir « une vision des patients encore plus globale et
complémentaire », ce qui est un des objectifs en ergothérapie.
Suite à ces analyses, certaines informations vont être pertinentes et sujettes à une
discussion.
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4- Discussion
« Le rire est un phénomène très particulier, dont la valeur thérapeutique et l’incroyable force curative
sont malheureusement encore sous-estimées. » Dr Dyan Sutorius
4.1 Conclusion de l’enquête et vérifications des hypothèses
A travers ces recherches, j’ai voulu montrer, dans un premier temps, l’intérêt
d’utiliser un outil de communication tel que l’humour, dans les prises en soin. Le croisement
entre les informations de la partie théorique et les données recueillies lors de l’enquête,
m’ont permis de faire ressortir des points qui me semblent importants.
Nous avons pu observer dans notre étude théorique que la relation soignant-soigné
était basée sur la communication entre deux individus. C’est le message transmis qui va
permettre aux deux parties de se comprendre et de créer cette liaison que forme la relation.
En effet nous avons vu que chaque personne arrive avec son histoire, sa culture, ses
croyances et différents facteurs environnementaux qui peuvent fragiliser cette
communication. C’est donc le rôle du soignant de trouver le bon support, la bonne façon
d’entrer en relation avec le patient. Il existe de nombreuses techniques de communication,
qu’elles soient non verbales ou verbales, et lorsqu’elles sont bien utilisées et adaptées au
patient, par le soignant, en l’occurrence l’ergothérapeute, alors la relation de confiance peut
être établie.
D’après les résultats obtenus aux questionnaires, les ergothérapeutes sont
majoritairement pour l’utilisation de cet outil au niveau relationnel. En effet ils estiment que
la relation soignant-soigné est efficiente, de confiance, lorsque cet outil est utilisé. Les
limites citées par ces professionnels coïncident avec les définitions décrites précédemment.
En effet, les troubles cognitifs ont été prédominants dans les données recueillies, puisque
certains entravent la compréhension du patient du message transmis par le soignant. Ainsi,
si ce message est sur un ton humoristique, le soigné ne comprendra pas forcément la
subtilité de l’ergothérapeute. La communication s’en voit alors entachée, et la relation de
soin fragilisée. C’est pourquoi les professionnels sont nombreux à avoir répondu faire
attention à s’adapter à chaque patient, voire les « évaluer », tant au niveau de leur culture
que de leur perception de l’humour. Cela leur permet de ne jamais rompre cette
communication si importante dans leur relation soignant-soigné.
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Cette adaptation constante explique les réponses majoritairement très positives des
ergothérapeutes qui, pour la plupart, n’ont jamais eu de « rupture » de communication.
Evaluer le patient et le laisser exprimer ses ressentis, ses besoins, sont des clés que
l’ergothérapeute utilise dans sa profession et notamment avec le modèle humaniste. Le
professionnel va chercher à aider le patient à être autonome dans ses choix, dans
l’élaboration de ses objectifs de vie et donc de prise en soin. L’ergothérapeute, pour cela, va
favoriser la motivation du patient en mettant en avant les points positifs sur lesquels ce
dernier va pouvoir s’appuyer. L’humour peut donc être un biais utilisé afin de mettre le
patient dans une attitude positive vis-à-vis de son handicap. Néanmoins on a vu que le
modèle humaniste doit être complémentaire d’un autre modèle, car très peu centré sur une
activité. L’humour ne remplace donc pas les séances proposées par l’ergothérapeute mais
peut aider à les mettre en avant, et à favoriser la motivation du patient.
L’ergothérapeute entretenue a soulevé un autre point important, (que les
professionnels interrogés par les questionnaires ont appuyé), pour les patients atteints de
psychose qui ne sont pas encore stabilisés, donc toujours en phase de délire, il est difficile de
poser un cadre. De plus certains versants que peut présenter cette pathologie, comme le
versant persécutif, peuvent même accentuer les difficultés de communication et enrayer la
prise en soin. Je pense effectivement que l’humour peut être utilisé dans les structures
psychiatriques mais seulement avec les patients qui sont stabilisés, pas dans des pathologies
aigues. On observe d’ailleurs, grâce aux résultats des questionnaires, que ces structures
utilisent volontiers ce mode de communication, notamment en équipe pluridisciplinaire.
Le clown interrogé m’a indiqué qu’utiliser l’humour permettait de changer la vision
que l’on a sur sa souffrance, sa douleur ou tout simplement sa vie. Ses dires sont appuyés
par les résultats obtenus sur la question de l’acceptation du handicap. Un handicap
bouleverse l’environnement, tant social que familial, et souvent des changements doivent
être opérés à court, moyen et/ou long terme. Durant cette phase de changements, le
patient doit réapprendre ou se réhabituer à certains actes de la vie quotidienne tout en
acceptant l’arrivée de ce handicap. Nous avons vu dans la partie théorique que
l’ergothérapeute est à mi chemin entre le social et la santé. En effet, dans notre pratique,
nous nous centrons sur la globalité de la personne, donc l’aspect physique, cognitif mais
aussi affectif, selon la MCRO (Modèle Canadien du Rendement Occupationnel).
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L’ergothérapeute va donc intervenir dans l’environnement du patient, à travers des
activités, afin d’améliorer l’autonomie de ce dernier, mais il va aussi accompagner le patient
dans l’acceptation de son handicap. Sur cet aspect, l’humour va être un outil utilisable dans
les prises en soin en ergothérapie, mais toujours en l’adaptant au patient.
Ces réflexions me permettent de valider la première hypothèse. L’humour est un
outil de communication qui a sa place dans les prises en soin en ergothérapie. La plupart des
professionnels interrogés y trouvent un intérêt sur le plan relationnel mais aussi pour le
patient en situation de handicap. Néanmoins, il y a une réserve à cette utilisation, pour les
patients qui n’ont pas ou plus la faculté de comprendre les subtilités et subjectivités de
l’humour. L’ergothérapeute doit s’adapter à l’état d’esprit et aux capacités de la personne
prise en soin. De plus, ce moyen de communication est un complément, et pas un
remplacement, des prises en soin en ergothérapie afin d’obtenir une vision globale du
patient et une relation efficiente, deux objectifs majeurs de la pratique ergothérapique.
Dans un second temps, j’ai voulu démontrer l’utilité du rire dans les prises en soin en
ergothérapie. Dans la partie théorique, les bienfaits physiologiques et psychologiques décrits
ont été nombreux. Il était donc intéressant d’observer si dans la pratique, ces bienfaits sont
notables, et en conséquence, utilisables dans notre profession. En effet, nous avons vu
précédemment que l’ergothérapeute doit prendre en compte le patient dans sa globalité
afin d’avoir une prise en soin complète et efficiente. Les professionnels ayant répondu aux
questionnaires sont en accord, globalement, pour dire que l’humour, et donc le rire
engendré, a des bienfaits sur la santé.
Comme je le note plus loin dans la critique de la méthode, je n’ai malheureusement
pas demandé quels types de bénéfices ils avaient notés depuis le début de leur pratique. Je
ne peux donc pas analyser plus précisément sur quel domaine le rire agit vraiment.
En revanche, les entretiens permettent d’avoir une opinion plus précise sur ces
bienfaits. Le clown m’a clairement expliqué qu’elle ne pense pas que les médecins aient
réellement observé des améliorations physiques concrètes entre le début des soins et son
arrivée dans le service. Elle note tout de même qu’il serait intéressant de commencer à
l’évaluer en équipe. En revanche, elle décrit des bienfaits psychologiques apparents à la
suite de ses interventions.
47
Il en est de même pour l’ergothérapeute qui effectue des séances de rire, qui note
principalement des bénéfices pour les patients sur le plan psychologique, pas physique. Elle
décrit tout de même une action antalgique qui soulage certains patients.
En général, le moral des soignés est meilleur, ils sont revalorisés, redynamisés, le
stress et l’anxiété diminuent, et la bonne humeur et la positivité augmentent. De plus le
travail en groupe permet aux patients d’améliorer leurs rapports sociaux mais aussi de gérer
leurs émotions afin de ne pas se laisser déborder.
Toutes ces données me permettent de valider partiellement ma deuxième
hypothèse. Partiellement, car la pratique n’a pu vérifier la théorie. Il apparait très compliqué
d’évaluer les bienfaits physiques réels dans les prises en soin des patients. Scientifiquement,
il est prouvé que le rire a une action sur le corps humain mais je n’ai pas su trouver
concrètement des preuves de ces bienfaits. En revanche, mes différentes recherches, l’avis
des ergothérapeutes, de la professionnelle qui propose des séances de rire et du clown qui
intervient en soins palliatifs, se recoupent pour affirmer une amélioration au niveau
psychologique.
Le rire, et ses conséquences positives, permettent aux patients, en général, d’avoir
une autre vision sur leur situation de handicap ou leur pathologie et d’obtenir un mieux être,
un lâcher prise. Ces apports positifs ne peuvent qu’améliorer le bon déroulement des prises
en soin, et je pense, entrent dans le domaine de l’ergothérapeute, le soignant, qui a pour
compétences d’évaluer et d’accompagner le patient dans son environnement global. Le bien
être du soigné, dans son environnement est un élément essentiel à prendre en compte en
ergothérapie. D’autant plus que le rire est, comme nous l’avons vu dans la partie théorique,
un réflexe du corps humain dont nous avons besoin.
4.2 Critique de la méthode
Mon premier obstacle à la réalisation de ce mémoire a été le peu d’écrits sur l’humour et
l’ergothérapie. Pour palier à ses difficultés je les ai complétés par des ouvrages, et articles
issus d’autres métiers médicaux et paramédicaux. Mon enquête auprès de plusieurs
ergothérapeutes a aussi permis de cibler un peu plus mes hypothèses.
Les différents échanges que j’ai eus durant cette enquête m’ont permis de comprendre
en quoi le questionnaire aurait pu être plus clair et plus explicite. Cela m’aurait permis d’être
plus précise et plus avisée dans ma réflexion sur le sujet.
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En effet, sur l’item de l’acceptation du handicap, j’aurais pu demander aux
ergothérapeutes, à travers une question ouverte, de quelle manière ils utilisent l’humour
pour cet objectif.
De même, pour l’item sur les bienfaits, je n’ai pas pu utiliser leurs apports pour ma
deuxième hypothèse, car je n’ai pas assez de précisions. De plus, la conception de mon
thème de mémoire a évolué durant l’année écoulée, notamment après la réalisation des
entretiens qui m’ont dirigée plus vers le rire en lui-même que l’humour qui le provoque.
Mon questionnaire aurait été peut être plus précis et aurait peut être apporté davantage de
réponses.
Malgré le nombre important de réponses à mon questionnaire j’ai conscience que cette
enquête ne permet pas de généraliser les données recueillies à la pratique ergothérapique.
En ce qui concerne les entretiens, il m’a été plus difficile, que je ne le pensais, de les
mener correctement. La préparation préalable n’a pas été assez rigoureuse, aussi par
manque d’expérience, ce qui a entraîné des omissions de questions qui auraient pu être plus
pertinentes. De plus, mon intérêt pour les pratiques des deux professionnelles interrogées a
parfois dévié la conversation des objectifs du départ. Il eût été intéressant de me préparer
de façon plus « assidue » à ses entretiens.
Comme je l’ai expliqué précédemment, je n’ai pas tout de suite ciblé mon sujet de
mémoire sur le rire. Je l’avais seulement associé à une réponse physique à l’humour, et ce
travail de recherche, à travers les lectures et les entretiens, m’a permis de découvrir les
différentes techniques qui permettent de le provoquer pour accéder à ses bienfaits.
De plus j’ai fait le choix de ne pas interroger les patients, car j’ai préféré cibler en priorité
les avis et expériences précieuses des professionnels, et le temps m’est apparu trop court
pour tout effectuer. Cependant, avec le recul, je comprends qu’il aurait été très intéressant
d’interroger des patients avec tout type de handicap, sur leur ressenti vis-à-vis de
l’utilisation de l’humour lors de leurs séances en ergothérapie. J’aurais ainsi pu comparer les
avis des professionnels et des patients pour compléter les connaissances sur ce sujet.
Enfin, je pense que les connaissances, recherches et fonctionnements des autres pays
dans l’utilisation de l’humour et du rire apporteraient une vision différente, ou
complémentaire et cibleraient plus leur place en ergothérapie.
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4.3 Nouvelles pistes de réflexions
 Chez les enfants
Dans le cadre de ce mémoire, j’ai axé mes recherches sur les patients adultes en
situation de handicap. En effet, les mécanismes du rire ne sont pas les mêmes chez l’enfant
ou chez l’adulte.
Il m’avait été judicieusement conseillé de ne pas faire cette enquête auprès de ce
public, où l’utilisation de l’humour paraît plus facile du fait de « l’insouciance » des enfants.
Néanmoins, je pense qu’il serait intéressant désormais de connaître ces mécanismes
chez les enfants et qui laissent, à priori, plus facilement une place à l’humour et au rire. En
effet, il est à priori plus aisé de les amuser, les distraire, et ce, avec moins de barrières dues
aux normes sociétales. Les bénéfices sont-ils différents ? Peut-on aller encore plus loin dans
l’utilisation de l’humour avec les enfants ? Le modèle utilisé par l’ergothérapeute serait-il
alors le modèle ludique ?
De plus j’ai rencontré lors d’un stage en libéral des parents et professionnels de
scolarité, qui, à plusieurs reprises, ont mis en avant comme point positif l’utilisation de
l’humour et la compréhension du second degré par l’enfant. Je me suis donc questionnée
sur
l’importance et la place qu’a l’humour dans les rapports sociaux que l’on tente
d’inculquer aux enfants.
 Expérimentation en ergothérapie
A travers ce mémoire, nous avons vu ce que peuvent apporter l’humour et le rire en
ergothérapie. Il serait peut être intéressant, désormais, d’expérimenter ces différents
apports, afin d’évaluer concrètement les bienfaits possibles. Ces expérimentations
pourraient être faites à plusieurs niveaux. Dans un premier temps on pourrait évaluer la
façon et l’intérêt de l’utiliser selon les structures de soin, afin d’adapter l’humour aux publics
accueillis. Dans un second temps, nous pourrions observer et adapter l’utilisation du rire
selon un type de pathologie précis. Ainsi, les séances seraient travaillées de manière à
pouvoir accueillir des patients à mobilité réduite, par exemple, difficulté qu’avait décrit
l’ergothérapeute entretenue.
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La mise en place de ce type d’expérimentation autour de l’humour et du rire
permettrait de comprendre les mécanismes mis en jeu dans la relation, les bienfaits
physiologiques réels, mais aussi et surtout l’avis des patients. En effet, je pense qu’il serait
important de connaître leurs ressentis, leurs besoins face au rire, afin de modifier et adapter
nos prises en soin.
 Formations
Dans le questionnaire envoyé aux ergothérapeutes, un item ciblait la formation sur
l’utilisation de l’humour. En effet, le clown rencontré effectue des formations auprès des
étudiants médicaux et paramédicaux, mais aussi auprès de soignants diplômés. Lors de ses
conférences, ou séances avec ces (futurs) professionnels, elle essaye de leur transmettre des
clés pour leur permettre d’être des soignants plus à l’écoute des patients. Elle considère que
pour pouvoir gérer les émotions des soignés il faut déjà pouvoir gérer les siennes, et c’est à
travers des formations qu’elle va tenter de leur donner ces clés, qui feront d’eux des
professionnels plus efficients, car à l’écoute. Le conseil que Mme M. donne à ses « élèves »
est d’avoir de l’audace avec les patients, et que cette audace c’est l’humour. Je me demande
donc s’il ne serait pas intéressant que, nous aussi étudiants ergothérapeutes et diplômés
d’état, soyons formés à cette gestion des émotions.
Nous avons une formation très riche en ergothérapie, où plusieurs techniques,
modèles, courants, nous sont inculqués. Est-il envisageable d’avoir une formation de ce
type, dans notre cursus de professionnalisation, afin de renforcer encore nos compétences
et donc nos prises en soin ?
Dans les questionnaires proposés aux professionnels, ils sont plusieurs, et surtout les
plus « jeunes diplômés » à souhaiter avoir une formation sur cet outil qu’ils utilisent déjà et
pour la plupart quotidiennement. Ils sont donc en recherche d’évolution et d’apprentissage
dans la mise en place de leurs relations de soin. Je me demande donc s’il serait intéressant
de se former aussi à la rigologie afin de développer cette dernière en ergothérapie et ainsi
compléter nos prises en soin.
51
Conclusion
« Sourire c’est offrir sans rien dire. » Kinou
La rédaction de ce mémoire n’a pas toujours été évidente du fait de la particularité
du sujet. Les quelques hésitations et remarques constructives émises par mes camarades ou
formateurs au début de la réflexion, m’ont permis de me remettre en question. L’humour en
ergothérapie est-il vraiment si important ? Je me suis donc penchée plus précisément sur les
ouvrages, j’ai ouvert des discussions avec des professionnels, j’ai repensé aux situations
rencontrées durant mes stages, et j’ai écouté mes camarades de promotion qui ont partagé
avec moi leurs expériences avec les patients sur ce thème. Oui, l’humour avait à priori une
place dans la pratique en ergothérapie, c’est pourquoi j’ai effectué mes recherches sur ce
sujet.
Les nombreux ergothérapeutes interrogés ont exprimé leur intérêt pour cet outil,
qu’ils utilisent, pour la plupart, quotidiennement dans leur relation de soin. Cette dernière
est, selon les résultats obtenus, améliorée par l’humour et rarement entachée puisque les
ergothérapeutes s’adaptent en permanence à leurs patients. Cette enquête a soulevé
d’autres facettes auxquelles je n’avais pas pensé au tout début de ma réflexion : les bienfaits
sur notre organisme. Les deux entretiens effectués auprès de professionnels et les lectures
des différents ouvrages ont révélé des bénéfices qui m’étaient inconnus et qui s’avèrent être
très positifs pour les patients en situation de handicap. Néanmoins, il est difficile de
quantifier réellement les améliorations physiques apportées par le rire, il serait donc
intéressant de les observer et de les évaluer par la suite. J’ai tout de même conscience que
ces outils relationnels et thérapeutiques ne remplacent pas les traitements et nos prises en
soin. Mais ils les complètent, en revanche, merveilleusement bien.
Ce mémoire a vraiment été pour moi une expérience enrichissante. J’ai pu
approfondir mes connaissances sur ce sujet qui me tenait à cœur et qui je pense tient un
rôle dans la profession que j’ai choisi d’exercer. Le partage avec mes camarades, mais
surtout les personnes interrogées, m’a beaucoup appris tant au niveau personnel que
professionnel. Je mesure d’autant plus, désormais, l’importance de l’écoute d’autrui, de la
remise en question perpétuelle dont on doit faire preuve en tant qu’ergothérapeute, afin
d’adapter continuellement notre pratique aux besoins des patients. Je ferai tout pour être
une soignante efficiente, mais ce qui est sûr c’est que je serai une ergothérapeute souriante.
52
Ressources documentaires
Ouvrages
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l’humour. Marseille : Solal.
 COSSERON, Corinne, 2009. Remettre du rire dans sa vie : Rigologie mode d’emploi.
Paris : Robert Laffont.
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formidable thérapie. Paris : Lanore.
 CURCHOD, Claude, 2009. Relation soignant soigné : Prévenir et dépasser les conflits.
Issy les Moulineaux : Masson.
 DUGRAVIER-GUERIN, Nathalie, 2010. La relation de soin, approches éthiques et
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 FREUD, Sigmund, 1930. Le mot d’esprit et ses rapports avec l’inconscient. Traduction
de l’allemand. Paris : Gallimard. pp. 400-408.
 MANOUKIAN, Alexandre & MASSEBEUF, Anne, 2008. La relation soignant-soigné.
3ème éd. Rueil Malmaison : Lamarre.
 MEYER, Sylvie, 2007. Démarches et raisonnements en ergothérapie. Les cahiers
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 MOREL-BRACQ, Marie-Chantal, 2009. Modèles conceptuels en ergothérapie :
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Articles ou périodiques
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 BOURDEUX, Christian, 2004. Rire et humour, une affaire sérieuse ? Soins psychiatrie,
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53
 CATEAU, Chantal, 2003. Quand rire et soins infirmiers s’articulent. Soins cadres, 47,
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 DANNION, C., IPCAR, C., THIBAULT, S., 2004. Enseigner la fonction du rire. Soins
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55
Annexes
 Annexe n°1 : Grille du questionnaire
 Annexe n°2 : Grille d’entretien
 Annexe n°3 : Retranscription de l’entretien avec le clown
 Annexe n°4 : retranscription de l’entretien avec l’ergothérapeute
 Annexe n°5 : Graphiques de l’analyse des questionnaires
 Annexe n°6 : Tableau d’analyse des résultats
Annexe 1 : Questionnaire
Annexe 2 : Grille d’entretien avec le Dr.T. et explication des objectifs de chaque question.
Pourquoi utilisez-vous l’humour ?
L’objectif de cette question est de découvrir des raisons d’utilisation de l’humour
auxquelles je n’aurais pas pensé.
Comment utilisez-vous l’humour ? Attendez vous que les patients le fassent en premier ou le
provoquez-vous ?
Dans la continuité de la première question, j’ai voulu connaitre des modes
d’utilisation et leurs approches.
L’utilisez-vous avec tous les patients ?
Cette question permettait de connaitre le type de personnes que le Dr. T. cible pour
utiliser l’humour.
Avez-vous connu une situation où l’humour a provoqué des effets négatifs ? lesquels ?
Le public avec lequel travaille le Dr. T. étant particulier, j’ai voulu savoir si des
patients avaient déjà été « blessés » par certains propos humoristiques.
Quelles sont vos limites dans l’utilisation de l’humour ?
Cette question avait pour but de découvrir les limites que peut rencontrer cette
professionnelle dans l’utilisation de l’humour avec les patients en soins palliatifs.
Quels bienfaits avez-vous notés grâce à l’utilisation de l’humour ?
Sans induire de réponses je voulais savoir si elle observait des améliorations
psychologiques et physiques.
Que vous apporte personnellement l’utilisation de l’humour ?
L’objectif de cette question était de savoir si, en tant que soignante dans un service
de soins palliatifs, elle ressentait le besoin de l’utiliser afin d’alléger le quotidien.
Est-ce le même travail avec les enfants ? Si non quelle est la différence pour vous ?
Cette question permettait de cibler ou non mon sujet sur un public particulier, les
adultes ou les enfants.
Annexe 3 : Entretien avec S.M. art thérapeute et fondatrice de l’association Neztoile. Entretien
de 45 minutes.
Moi : Alors j’aimerais savoir comment vous fonctionnez avec les patients, comment vous fonctionnez, vous les voyez
une fois par semaine c’est ça ?
Mme M : Oui c’est complètement ça
Et du coup vous intervenez combien de temps auprès d’eux ?
Euh en fait il n’y a pas de règle c’est en fonction des personnes, de ce qui se passe, de ce qui se vit en fait euh..
Alors en plus c’est sûr que je fais une conférence spectacle sur « Rire et soin est-ce bien sérieux ? » mais en même
temps c’est un titre qui est un petit peu euh et puis en même temps au fur et à mesure de la séance on comprend que
c’est important…euh En tout cas dans mon métier, c’est pas forcément amener le rire à tout prix c’est aussi amener la joie
donc vraiment mon métier c’est amener de la joie. Donc ça peut paraître fou parce que bon après mon personnage peut
soulever des rires, et puis bien sur je suis dans le décalage, bien sûr j’ai le sens de la répartie et tout ça qui est en jeu, mais
après faut voir l’état des personnes. Bon là je suis en soins palliatifs, je ne me trouve pas à mourir de rire, façon de parler,
mais par contre je reconnais que les personnes ont de la joie, ça c’est certain. Mais maintenant, il y en a qui rient et puis
le rire c’est bah faut distinguer le rire, du sourire parce que le rire c’est quand même déjà assez fort hein quand même le
rire, alors après voyez il peut y avoir beaucoup de sourires, mais bon il peut aussi y avoir des rires.
Et vous les menez comment vos moments avec ces patients ? Comment vous créez cette joie avec ces patients ?
Et bien oui, donc j’arrive en, effectivement en personnage, et c’est ce personnage qui va, qui va rencontrer l’autre
donc du coup ça peut créer une surprise, une émotion, donc en général des sourires parce que j’arrive en personnage
donc euh…Et puis après de ce regard je demande à l’autre comment il se sent… En fait ce qui m’intéresse c’est la
profondeur de la relation et vraiment tout le bien être, où en est la personne, mais je vais amener d’une manière voilà un
petit peu décalée, sinon je ne serais pas en étoile, mais euh… En fait il y a tellement pas de règle, c’est difficile pour moi
de donner des règles parce qu’en fait toutes les personnes sont tellement différentes que ça m’emmène à chaque fois
dans différents univers quoi, et différentes approches relationnelles aussi.
D’accord mais du coup des fois vous en venez à parler de la pathologie, et en plus en soins palliatifs, de la mort…
Alors la pathologie et bien pas vraiment mais de la mort oui. Mais si je parle de la mort c’est en métaphore, c’est que
je veux savoir où en est la personne par rapport à sa croyance de son état, parce qu’il y en a beaucoup quand même qui
sont dans le déni. Donc je peux pas aller violenter ça, et donc j’interroge, je demande souvent où il en est sur le chemin,
ou je prends souvent la métaphore du voyage, parce que je dis « je suis consultante en voyage » et je dis « alors toi tu es
en voyage là ! » bah il me dit « pas vraiment » et je dis « bah quand même c’est un grand voyage là ! ». Puis après ils
peuvent aussi répondre sur où ils en sont, où ils croient en être par rapport à ce voyage. Il y en a qui disent qu’ils en sont à
la fin du voyage, et il y en a même s’ils sont à la fin du voyage, ils n’osent pas se le dire, ils n’osent pas se le reconnaitre. Ils
disent « oh je ne sais pas vraiment ». Donc je ne vais pas dire le contraire, je dis « ah oui d’accord » enfin je ne le
contredis pas bien sûr.
Et vous avez un lien avec les soignants à ce moment là, est ce qu’il y a un partage sur ce qui est fait, de ce que vous
avez…
Alors là j’ai vraiment beaucoup de chance, depuis début janvier je retravaille en soins palliatifs, parce que j’avais déjà
travaillé en soins palliatifs, mais j’ai aussi essayé d’ouvrir en cancérologie, donc j’ai travaillé pas mal de temps en
cancérologie, euh deux ans. Et là il se trouve qu’il y a une unité qui voulait absolument que je travaille en soins palliatifs
dans leur service. Et alors ce que ça fait c’est qu’il y a une équipe qui est complètement avec moi et c’est, ça fait 12 ans
que je travaille, mais là c’est la première fois que c’est aussi étroit comme lien, et alors, et ça s’en ressent à
l’accompagnement des patients. C'est-à-dire que, avant que j’arrive, ils vont dire à tous les patients quand même, qu’il y a
une étoile qui va venir les voir dans leur chambre, c’est un peu barré quand même ! Les gens sont étonnés quand même
« qu’est ce que c’est qu’une étoile ?».
Oui parce que vous n‘utilisez pas le terme clown ?
Non je n’utilise jamais ce terme là, par expérience. Ca fait peut être deux ans que je dis que je m’appelle une étoile et
que j’ai enlevé le mot clown, parce que moi je travaille chez des adultes et que parfois il y a un à priori qui est très fort sur
le clown et on pense qu’on va infantiliser alors qu’en fait pas du tout. Pourtant j’ai quand même le bout du nez rouge
mais les patients ne vont pas voir forcément le clown ils vont voir le personnage. On m’appelle plus souvent la fée que le
clown alors que j’ai un nez rouge. Je n’ai pas vraiment un costume de fée je trouve et en plus j’ai des grosses chaussures
vertes, alors si je suis une fée je suis une fée contemporaine (rires).
Mais vous avez une baguette magique, vous apportez la joie, c’est ça votre côté fée peut être.
C’est ça, ce côté, ce côté, humm voilà, changer un état. Moi c’est ça qui m’intéresse quand même changer l’état
d’une personne, alors par l’humour ça peut être un biais, mais ce n’est pas tout le temps possible parce que les gens ne
rient pas forcément et puis il y en a ça va se passer vraiment dans l’humour.
Les patients, vous les suivez jusqu’au bout ?
Bah là oui, complètement, comme avant je travaillais en cancéro je travaillais une fois par semaine donc je les
revoyais pas mais bon la cancéro c’est particulier parce qu’ils viennent faire leur chimio, après ils viennent deux semaines
plus tard… puis les soins palliatif hum ce qui est fantastique c’est quand ils restent quelques semaines parce que des fois
ça arrive et ça c’est super, c’est un vrai suivi. Puis sinon oui c’est jusqu’au bout mais des fois c’est qu’une fois…
Ca vous est déjà arrivé ça qu’un patient refuse et vous… ?
Alors ça arrive et puis j’ai remarqué que les patients qui pouvaient pas euh les patients qui étaient comme ça,
c’étaient des patients qui souffrent trop, ou physiquement ou psychiquement on va dire et puis et qui humm…
Qui ne sont pas encore prêts ?
C’est plus possible quoi, ils croient que c’est plus possible, c’est une croyance hein ! Enfin c’est une croyance, sauf
quand vraiment on souffre trop physiquement là faut s’’incliner quand même, la souffrance physique je pense qu’il faut
vraiment s’incliner, faut être humble parce qu’on ne sait même pas soi même comment on réagirait. Les patients quand
ils souffrent trop c’est une chose…Maintenant quand c’est une souffrance morale, c’est vraiment une croyance, puisque
il y a des choses à lâcher donc c’est comment je peux aider à lâcher cette croyance. En fait j’écris régulièrement des
histoires, j’écris des histoires pour ma mémoire, et parce que je transmets cette pratique à d’autres étoiles, et puis que je
forme les soignants. Je vais souvent aux colloques de soins palliatifs, je raconte ce que je fais pour, en fait euh voilà
interroger sur l’accompagnement dans la joie ! Mais alors ce qui est sympa c’est que les histoires ne se ressemblent pas.
Donc finalement il y a pas mal de rires des fois, par exemple euh une patiente quand elle me raconte, c’était la fin de
séance, au début elle est plombée bien sûr elle ne va pas rire, elle va sourire quand même, elle montre son ouverture,
puis à la fin elle me raconte qu’elle a des problèmes de mémorisation des noms et que son médecin elle ne savait plus
comment il s’appelait alors qu’en fait il avait un nom espagnol.
Elle me dit « c’est terrible je ne savais plus son nom » alors elle l’appelait Speedy Gonzales. C’était drôle. Donc voilà
finalement on rit de sa gaucherie et puis à plusieurs reprises elle a rit dans la séance, le rire c’est le cadeau, c’est…
Ce n’est pas à toutes les séances ?
Non, il faut voir la disponibilité des patients. Et puis et alors par contre après je vais voir une autre personne de 90
ans voilà qui est en fin de parcours, elle, elle sourit beaucoup à présent parce qu’elle me connait déjà de la semaine
dernière et puis finalement je ne sais pas pourquoi on en est venu à parler de la valse, et puis finalement j’ai dansé la
valse pour elle dans sa chambre, elle était très contente. Donc vous voyez là c’est là c’est, c’est le côté vie, mais c’est elle
qui est incroyable, voilà puis c’est vrai que après il y a ses petits enfants qui sont venus donc là j’ai fait l’animation aussi
pour eux donc elle était super contente quoi.
Dans ces cas là vous ne regarder pas l’heure, pour pouvez rester autant que vous le voulez avec les patients ?
Ah c’est super, moi j’ai tout le temps parce que je reste toute l’après midi, sachant qu’il y a des personnes qui sont
très fatiguées que je ne peux pas voir et moi je n’ai pas la notion du temps, je ne la prends pas en compte même si je
devais rester une heure avec un patient je reste cette heure avec. Ca c’est ma priorité et puis tout le monde est d’accord
avec ça.
Donc l’hôpital est aussi dans la même optique ?
Oui et là du coup je sens que les soignants sont avec moi. Alors d’abord ils sont, comment dire, très enthousiastes et
puis du coup je sens bien que j’amène un vent de fantaisie, je suis déjà habillée en étoile donc c’est sûr qu’ils ont envie de
rire un petit peu, et puis dans les couloirs, on se croise et puis je me dis j’ai aussi une fonction pour eux, pour les alléger
des fois je leur raconte des trucs drôles qui les fait rire.
Vous participez aux transmissions avec les soignants ?
Oui ça c’est important je suis aux transmissions
Vous utilisez ce mode là avec les soignants et vous ressentez qu’il y a un… ?
J’ai l’impression que vraiment le mode propre de l’humour que j’utilise beaucoup plus avec les soignants j’ai
l’impression que suis là pour les faire rire, j’ai l’impression que ma fonction c’est de faire rire les soignants, c’est
d’alléger au maximum leur réalité. Et faire en sorte de répondre à leurs attentes parce que s’ils sont pour un clown dans
leur service c’est que quand même bien sûr ils pensent que je peux alléger la vie des patients, mais que quand même
quelque part il y a une demande pour eux et je le sens bien. Donc là régulièrement je leur fais des blagues, je ris, mais
c’est beaucoup plus facile de faire rire une soignant qu’un patient d’ailleurs !
Il y a peut être moins de limites aussi ?
Mais c’est ça ils sont disponibles mais c’est sûr que pour avoir réfléchi à la place de l’humour et du rire chez les
patients, j’avais analysé qu’il y avait 3 cas de patients : le patient, qui rit avant que je le fasse rire parce qu’il a une
disponibilité au rire, il suffit juste qu’il me voie pour que ça y est, il commence à se marrer. Faut voir des fois ils ont une
énergie juste parce qu’ils me voient en personnage, mais alors ils rient vraiment c’est trop fort ça ! Donc il y a ce type de
patients et en même temps il y a le patient qui est plus intériorisé, et là je me connecte sur lui et je me dis, non ce patient
là, il a le potentiel pour rire mais il ne le fait pas vraiment. Mais c’est une écoute de l’autre, puis savoir trouver les bons
mots pour le faire sourire et rire. Et il y a le troisième type de patients qui n’a pas du tout envie de rire et celui là ne rira
jamais. Il faut toujours se rappeler quand même que les patients qui rient, bien sûr on est là pour les faire rire, mais
c’est parce que avant tout ce sont des gens drôles dans la vie, on ne peut pas faire des miracles, quelqu’un qui ne rit pas
on ne va pas le faire marrer.
Je pensais que ça aurait pu être des patients qui ne rient pas parce que ce sont des étapes de leur vie qui sont
compliquées, difficiles, qu’ils sont dans le déni et que peut être par votre biais il y avait quelque chose qui pouvait se
développer, revenir…
Bah oui complètement et ça peut arriver, mais ça voudrait dire que c’est le type de patients où je sens qu’il peut
quand même rire avec ce qui se passe, ça heureusement ça peut se passer et j’ai des gens qui sont très fermés ,des gens
en colère. C’est très drôle quelqu’un en colère, parce qu’en même temps on peut mettre de l’humour là dedans, dans le
respect bien sûr, le plus important c’est de respecter la colère, mais commencer à imiter ou à faire des trucs drôles dans
la chambre et puis le patient il lâche quelque chose puis il commence à rire. Des retournements de situation peuvent se
faire par l’humour ça c’est certain.
Comment vous êtes vous formée ? Et comment vous formez ?
Je n’ai pas eu de formation, j’ai créé tout ce mouvement donc en fait je n’ai pas été formée à ça, on va dire que c’est
une nature que j’ai. (Rires) Et d’expérience un peu malheureuse où moi-même j’étais de l’autre coté, j’ai pu être patiente.
Et puis bon toutes mes réflexions sur les livres… La force, la joie et l’humour c’est le plus de certains, il y en a qui l’ont il y
en a qui ne l’ont pas et c’est en fait ce que je remarque dans l’accompagnement, il n’y a pas d’égalité. Et l’inégalité elle
n’est pas forcément au niveau de l’argent, au niveau social, en tout cas elle n’est pas que là l’inégalité, elle est par rapport
à la joie. Alors on l’a du départ comme ressource, cette humour, cette joie, cette force c’est une force hein !
Mais du coup je me disais que par vos formations avec les infirmiers, vous arrivez à développer ça chez eux.
Mais alors ça c’est clair moi je donne des formations en fait pour les futurs soignants, pour les étudiants notamment
dans les IFSI, mais sinon pour les soignants de terrain et ça c’est extraordinaire ! Mais oh ils rient, mais ils rient ! Mais
aussi qu’est ce qu’ils pleurent ! Donc bien sûr, ce que je leur impulse c’est l’audace et l’humour, bien sûr, en fait partie.
L’audace dans l’accompagnement bien sûr que c’est l’humour, mais ce n’est pas de l’humour au dépend de la
personne, c’est un humour partagé. D’ailleurs il y a toute une réflexion par rapport à ça, le fait qu’on enlève les barrières
sociales quand on rit, il y a vraiment plus le soignant-le soigné et d’un seul coup on est vraiment à égalité. C’est une
réflexion vraiment intéressante donc du coup ça fait tomber les barrières, il y a une proximité d’où cette phrase : « le rire
est la distance la plus courte entre deux personnes ». Ca veut vraiment dire que si on arrive à mettre ça dans la relation
d’accompagnement effectivement ça crée une proximité incroyable…Alors c’est sûr que je donne des clés comme plutôt
une grande écoute de l’autre en fait parce que ça ne sera pas vraiment des clés d’humour. Bah l’humour on va le voir
parce que quand je fais des stages, les stagiaires deviennent clowns, alors c’est sûr qu’ils rient, après on voit pourquoi on
rit. Pourquoi d’un seul coup, et en fait on rit de l’intime, on rit de choses vraiment étonnantes. Donc en fait ils vont s’en
rendre compte et puis après du coup, oui bah peut être qu’ils rient d’avantage avec les patients enfin j’espère en tout cas,
c’est l’idée d’amener plus de légèreté.
A l’hôpital où vous êtes, est ce qu’il y a un changement vis-à-vis des soignants ? Est ce que les patients l’ont remarqué
avec ce que vous avez apporté, votre joie?
Alors en USP ça ne fait pas longtemps que j’y suis et ça serait intéressant de savoir. Je pense que l’on s’en rend compte
en cancéro, là où j’ai travaillé pendant deux ans. Parce que j’avais une patiente dont je vous ai parlé, elle m’a dit des fois
« je t’en pris reviens, ça change tellement quand vous n’êtes pas là » donc elle voit vraiment la différence en tant que
patiente, elle trouve que ça avait allégé les soignants, qu’ils riaient d’avantage, plein de légèreté. Il y avait un ton qui est
donné et je vois bien que ce n‘est pas indécent.
Dans les salles d’attentes, c’est horrible, parce que les patients attendent ou la salle de chimio ou leur médecin donc il
y a une tension rare. Et forcément oui mon personnage arrive et je ne veux pas du tout être indécente, je veux vraiment
faire en sorte que les gens se parlent, mais du coup je leur dis que je suis leur respirateur, je les fais respirer. Mais rien
que des termes comme ça, ça va les faire sourire, et puis après ils commencent à comprendre pourquoi je suis là, parce
que je suis assistante du moral de troupe ! Donc voilà, ce sont des mots assez drôles mais toujours très justes, c’est à dire
que je suis vraiment assistante du moral de troupe, ils ont vraiment besoin du moral là bas et en même temps ça peut
les faire marrer.
Puis après il y a tellement de choses qui peuvent arriver. Je me souviens de cette salle d’attente par exemple il n’y a
pas longtemps, et ça c’est une infirmière qui m’avait soufflé ça. J’ai donné une formation à la maison médicale Jeanne
Garnier à Paris, et c’était 10 séances de 3h à des soignants de terrain. Il y en a une elle a adoré et du coup elle va faire son
mémoire de DU de soins palliatifs sur la créativité et l’humour. Elle avait inventé, la « bullothérapie » : il y a un patient qui
n’allait pas bien, qui avait des problèmes pour respirer, il appelle en alerte en disant « ça ne va pas du tout donnez moi un
médoc, donnez moi ce qu’il faut » ! Là l’infirmière a formulé que c’était psychologique, que c’était une peur et lui a dit
« écoutez il y a deux médicaments : un c’est le classique et un autre c’est une pratique alternative mais ça devrait vous
plaire » ; « bah donnez-moi la deuxième alors » ! Elle arrive avec des bulles et elle m’a dit « je lui en fais plein » ! Et elle a
dit « Respirez c’est de l’oxygène ». Et le patient à fait ça et il n’a pas eu besoin d’oxygène, il s’est calmé, c’est incroyable !
Moi j’aurais jamais osé faire ça, c’est la parole de la soignante qui dit que ça va marcher, donc cette croyance et cette
fantaisie, enfin bref donc moi j’arrive dans la salle d’attente et je me suis nourrie de cette expérience.
Donc un jour j'avais dans mon sac un gros truc de bulles, et c'était très lourd dans la salle d'attente. Un patient n’allait
vraiment pas bien, il n'avait pas du tout envie de rire : "c'est pas drôle on n'est pas là pour rigoler". Donc je suis arrivée
avec dans la salle d'attente et j'ai dit « d'accord non ce n’est pas drôle ». Donc j'étais vraiment embarrassée parce que j'ai
dit que ce n'est pas drôle alors que j'ai une tête de clown ! Enfin bref, il y avait une personne de 90 ans à peu près et qui
me regarde et elle me trouve magnifique ! Elle me dit « que est-ce que vous avez dans votre sac c'est une tétine ? »
Comme elle me pose la question je dis : « non ce n’est pas une tétine c'est de la bullothérapie ». Et du coup elle ne calcule
même pas que c'est moi qui invente ce mot, pour elle c'est évident. Elle dit que c’est super et elle s'est mise à faire des
bulles. C'était complètement surréaliste, et puis elle souriait et elle m'a dit « Vous savez pourquoi c'est bien de faire des
bulles ? » - « bah non » - « C'est parce qu'on ne pense à rien pendant ce temps la ». Puis du coup il y avait une personne
qui a voulu aussi faire des bulles et donc du coup la salle d'attente est devenue un endroit où on fait des bulles ! Bon ce
n’est pas pour ça que les gens qui ne voulaient pas rire ont ri, mais en tout cas cette ressource de rire et de fantaisie et
bien c'est elle qui l'a fait. Moi je suis à disposition, j'ai tout ce qu'il faut pour qu'on passe un moment sympathique,
pourquoi pas qu'on rit qu'on sourit, qu’on fasse des bulles… vous voyez à quel point ça appartient au patient ?
Et vous vous jouez avec ce qu'il vous apporte?
Exactement et je pense que c'est fondamentalement ça l'accompagnement. On ne peut pas aller plus loin que là où
est la personne, par contre on réveille. Si on travaille nous-mêmes notre joie, on va la réveiller, c'est à dire pas la donner
mais la réveiller. Elle est un peu endormie et s'est un peu effacée mais elle n'attend que ça la joie, l'humour, la fantaisie.
C'est une rencontre, on fait tout les deux la moitié du chemin et ça c'est très important ! C'est-à-dire que le jour où
vous allez fait rire le patient, vous ferez tous les deux la moitié du chemin. Ils attendent beaucoup en fait et ce sont les
patients qui sont incroyables. Alors par contre ce qui est fantastique c'est que nous on a notre réserve et que l’on puisse
fournir ça, et que quelqu'un qui a envie de rire, qu'on puisse le faire rire. Donc il faut développer son originalité, mais
l'originalité du regard sur la vie. D'ailleurs les plus grands comiques sont ceux qui posent des questions au public, parce
qu'on n'y avait pas pensé à quand on va rigoler, donc il faut savoir poser les bonnes questions. C'est tout un art, c'est tout
un travail, et en même temps des fois je dévoile la question qui fait rire et puis tant mieux quand j'arrive à les faire
sourire, à les apaiser, enfin les apaiser, leur donner de la joie. J'adore.
En général les clowns interviennent auprès des enfants pourquoi avez-vous choisi de le faire auprès des adultes?
Car c'est un destin et un choix. C'est un destin parce qu’au début lorsque j'étais art thérapeute j'avais réussi à entrer en
neurologie donc j'amenais mon clown en neurologie adulte, et j'ai trouvé que c'était d’une pertinence ! Alors en
neurologie c'est l'endroit où il faut mettre des clowns. C'est dur la neurologie, beaucoup plus difficile que les soins
palliatifs, parce qu'en neurologie c'est des maladies longues, dégénératives, avec beaucoup d'incertitudes.
Et puis je pense que les soignants ne sont pas très heureux d'être là, il faudrait qu'ils tournent, il faudrait qu'ils
changent de service de temps en temps, parce que souvent ils ne sont pas très heureux, ils restent longtemps je trouve.
Enfin c’est personnel comme idée, et en fait donc ça a été une opportunité. Et ce qui m'intéresse pour moi, c'est vraiment
l'enfant intérieur chez l'adulte. D'ailleurs les adultes des fois ils me disent « mais vous devez aller chez les enfants ou..? ».
Et là moi je dis bien que je viens chercher l'enfant intérieur et là ils sourient et...oui parce que l'enfant intérieur c'est
quoi, c'est notre partie qui sait s’émerveiller et qui est contente, c'est l'autre partie de la joie. Ca veut dire qu'il y a des
gens qui l'ont perdue cette joie là, bien sûr ils ne supportent pas, les gens qui l’ont perdue ils sont bien tristes dans la vie
et en fait je vais aller la réveiller chez ces gens-là, mais s’ils l'ont perdue je ne peux pas... J'en ai déjà croisé des gens qui
ont la vie excessivement difficile et qui ne sont pas du tout nourris d'amour, alors là je suis mais une extraterrestre pour
eux. Il faut avoir un peu nourri un espace intérieur, il faut avoir eu cette chance de l'avoir nourri un petit peu quand
même. Non mais après j'ai des rires, du sourire, j'ai plein de reconnaissance.
Donc c'est plutôt positif vos interventions ? Il y a rarement des patients qui ne réagissent pas ?
Maintenant que je travaille dans une équipe qui m'intègre complètement, là pour l'instant je n'ai pas été refusée une
seule fois. Là je me dis que c'est la force de l'équipe parce qu’en général les gens ne refusent pas. On va dire qu'il y a 75 %
des gens qui m'acceptent selon les états intérieurs et là j'ai eu 100 %.
Même les médecins travaillent avec vous ?
Alors c'est incroyable de travailler dans ces conditions là. J'ai toujours travaillé de manière solitaire et puis au
bout de deux ans de travail je suis allé frapper à une chambre et je vois des médecins dans le couloir, 4 infirmiers, et ils
me regardent. Et là je suis allée dans le bureau et j'ai dit "vous vous voulez une transmission" "mais oui, on veut savoir ce
qui se passe » Alors je leur ai raconté de chambre en chambre et puis là bien sûr ils riaient, ils souriaient. Même des fois
quand je suis en difficulté avec un patient, ils savent très bien pourquoi ça ne marche pas. Ca peut aussi les toucher quand
ils voient finalement qu’il y a eu un oui, quand ils voient le travail que je fais, ça met une super ambiance.
Est-ce que les médecins voient les bienfaits psychologiques ? Au niveau physique ? Est-ce qu’ils voient des répercussions
par exemple sur les soins qu'ils sont en train d'apporter aux patients ?
Je pense qu’au niveau physique moins. Mais maintenant j'aimerais bien que dans cette équipe, vu que
maintenant ils sont à fond avec moi, qu'on l’évalue. J'insiste vraiment là-dessus c'est un travail d'équipe, quand il y a les
soignants derrière c'est génial quoi, quand une infirmière vous annonce que ça va vous faire du bien c’est génial l’effet
que ça a sur eux. C'est ce que je dis dans ma conférence, humour amour il y a très peu de lettre de différence (rires) et
c'est vrai que c'est un acte d'amour et je le sens comme ça, c'est-à-dire qu'une personne qui peut sourire déjà c'est
l'ouverture et alors là après on peut y aller dans l'accompagnement, c'est extraordinaire.
Donc vous au départ pour entrer dans la relation avec le patient c'est vraiment le sourire, c'est ce qui va vous aider à
déterminer comment vous allez entretenir cette relation avec le patient ?
Ah oui c'est le sourire le sourire est fondamental et c'est ce que je dis d'ailleurs aux soignants. C'est le message
que parfois les patients me disent « dites leur au médecin s'il vous plaît que leur sourire ça change tellement tout ».
Bien sûr avec une tête d'enterrement…quelqu’un qui sourit ça transmet une confiance et puis bon c'est une ouverture.
Parce que l'humour qu'est-ce que c'est ? C'est simplement une autre façon de voir la vie c'est pour ça que c'est
tellement puissant ! Ca peut faire rire de voir cette autre réalité, ou sourire ou apaiser…c’est d'une profondeur
l'humour… il y a les mimiques, tout ça, je peux aussi pas mal faire rire avec ma présence, ma tête bizarre, mais sinon dans
les propos c'est vraiment voir la vie autrement. Je suis allée voir une patiente, elle était touchée par mon sourire, et le
sourire en résonance c'est important, elle se met à sourire.
Quand les gens ont une tumeur cérébrale, là où ils sont complètement désinhibés, c'est très particulier parce que
là ils peuvent dire, ils disent des paroles mais insoupçonnables on n'y aurait jamais pensé. Il y avait une femme comme ça
je suis allée la voir, et elle était à moitié débraillée, elle avait je ne sais pas peut-être 80 ans. Elle déballait tout et sa
meilleure amie qui était là, qui était gênée et moi je n'ai pas à être gênée parce que moi j'ai à faire à quelqu'un qui est
complètement désinhibé. En n’étant pas du tout déstabilisée et ça a aidé complètement la visite.
Donc il y a souvent un lien que vous faites avec la famille ?
Oui je fais un lien avec la famille, avec les visiteurs, complètement. Ca je pense que c'est drôlement important.
Notamment par rapport à cette patiente qui était complètement désinhibée, moi je peux dire c'est pas grave tout ce
qu’elle dit ou fait, parce que je ne la connais pas ! C'est complètement apaisant pour une personne qui dit ça d'avoir un
soignant à côté qui pense que vraiment ça peut alléger, et puis du coup pour l'autre ça allège aussi. Alors je me souviens
que cette patiente, du coup la fois suivante, j’étais dans mon local pour me changer et là une infirmière qui me dit
« Annabelle tu peux venir là, il y a la dame qui est avec moi qui t'attends » « la dame ? » « oui tu sais l'amie de la
chambre 50, tu sais tu étais avec la dernière fois. Elle a besoin de toi pour voir son amie parce qu'avec toi elle me dit que
c'est tellement léger ». Amener de la légèreté, et mettre de l'énergie parce que c'est pas grave, parce que qu'est-ce qui
est grave ? Il y a des fois des choses qui sont très graves dans la vie, elles sont personnelles, en tout cas moi ce n'est pas
mon rôle de dire que c'est grave. Pour moi ce n’est pas grave donc je dois arriver avec cette énergie-là. Et donc du coup je
ressors elle me dit « je suis drôlement content de vous voir » et on va la voir et du coup ça a été super léger, elles riaient
quoi, la patiente, elle m'a vue et s'est mise à rire.
Encore une fois tout dépend du regard, c'est-à-dire qu'en ce moment il se passe des choses à la fois terribles et à
la fois des choses magnifiques, tout dépend de là où va s'arrêter, là où on va attacher le regard. C'est toujours pareil par
rapport à sa propre maladie, par rapport à sa propre mort, sa propre vie. C'est où est ce qu'on va attacher le plus
d'importance et c’est là qu’on intervient pour dire « mais tu n'as pas regardé là, c'est pas mal de regarder aussi de ce
côté-là ». Mais je pense que et c'est toujours ce que je dis aux soignants, on n'est pas obligé d’être des étoiles pour faire
rire, pour apaiser. Mettez toute l'énergie comme moi ce que je fais dans mon métier, mettez-la dans votre métier ! Le
plus important c'est de mettre toute cette conscience dans son métier, on peut être un super dirigeant même d'une
banque si on met cette énergie là c'est extraordinaire. C'est pas le métier qui est extraordinaire c'est la manière dont les
gens sont extraordinaires. Donc amène de la confiance, de la joie, de la légèreté et ça change tout, ça change un
monde ! C'est la vraie vie, c'est la vraie révolution, c'est de l'intérieur c'est pas chez les autres c'est chez nous quoi ! C'est
motivant, c'est important, parce que ça allège tellement la vie, il faut l'alléger la vie c'est vrai que c'est ma devise : « si on
ne peut pas la changer, on peut peut-être l'alléger » et c'est ma croyance, ma croyance personnelle.
Je tâcherai de m’en souvenir dans ma pratique. Merci pour le temps que vous m’avez accordé et pour vos réponses
enrichissantes.
Annexes 4 : Entretien avec Mme D., ergothérapeute. Réalisé le 08.05.14. Durée : 30 minutes.
Moi : Bonjour, vous êtes ergothérapeute en psychiatrie et vous avez été formée à la Rigologie. Pouvez-vous
me redire ce qu’est la Rigologie ?
Mme D : Alors en fait déjà pour la rigologie il n’y a que l’école internationale du rire qui le fait. Moi j’ai
été formée par eux donc. En fait c’est une méthode qui propose une utilisation thérapeutique du groupe, elle
est proposée à des professionnels de la santé et elle regroupe différentes disciplines issues du monde : des
techniques corporelles et psychologiques qui viennent d’Inde ; il y a la sophrologie ludique qui vient de
Colombie ; il y a l’éducation émotionnelle ; psychologie positive des USA ; des exercices d’évacuation des
émotions négatives, du stress ; des jeux qui sont issus de l’entraînement au théâtre ; du travail de clown ;
des exercices ludiques, d’ancrage, de respiration. Voilà c’est le vocabulaire spécifique à la rigologie, plein de
petites pratiques choppées à droite à gauche qui permettent de travailler autour du rire et de l’utiliser de
manière thérapeutique. Ce sont des techniques très ludiques, on parle de sophrologie ludique car se sont des
respirations abdominales mais faites de façon ludique, dans le sens où les exercices vont être très joyeux, on
va utiliser l’imagination pour, voilà, pour respirer, apprendre un petit peu tout un tas de choses. On n’a pas
d’accessoire, ce sont des exercices qui favorisent le rire et le lâcher prise, ce sont des séances très structurées
qui répondent à des objectifs très précis.
Depuis quand faites vous les séances de rire avec vos patients ?
J’ai été formée en septembre 2012, c’est assez récent. Et je l’ai proposé à des patients en début 2013.
A quelle fréquence proposer vous ces séances ?
Au niveau du cadre, je fais des séances sur prescription médicale, des groupes de 5 à 15 patients, une
fois par semaine 1 heure, dans une salle fermée avec des tapis.
Avec quel type de patients travaillez-vous ? Et comment se déroulent vos séances ?
Je fais avec des personnes qui souffrent de dépression, avec des pathologies névrotiques, avec les
troubles addictifs, mais je ne fais pas avec les psychotiques. Je ne fais pas tout ce qui est aigu évidemment
parce qu’il faut quand même des gens qui soient un peu canalisables, parce que sinon on ne travaille plus la
même chose.
Alors les séances se déroulent de telle manière : il y a à peu près 20 minutes où je travaille autour de
l’appropriation de l’espace, la prise de conscience de l’autre, des exercices d’ancrage, d’enracinement. Ce
sont des techniques particulières. Il faut être bien ancré dans le sol pour évacuer le stress. Puis il y a 15-20
minutes de respiration abdominale. Puis après je fais 20 min de yoga du rire, c’est du rire forcé, j’en fais un
petit peu, je fais des exercices d’applaudissement pour gagner en énergie. Je travaille le rire là, avec des jeux,
aussi encore de respiration car c’est assez dynamique. Et après je fais 10 min de méditation du rire, alors là
c’est du fou rire collectif allongé, c’est-à-dire c’est un moment où il faut être capable de déconnecter son
mental pour ne plus penser et pour arriver à lâcher prise. Après avoir stimulé le rire on se couche, on éteint
un peu les lumières, on ferme les yeux et on laisse échapper ses rires si on en a. En fait la méditation du rire
c’est ce qu’on souhaite obtenir, c’est la cerise sur le gâteau, et c’est à ce moment là qui il y a des rires évacués.
C’est le lâcher prise par excellence. Les rires des autres nous font rire et on fait un fou rire collectif et ça
marche. Après ce n’est pas une obligation on n’est pas obligé de rire, mais en général ils rient tout au long de
la séance car c’est très ludique. Il faut avoir une ligne d’animation avec du peps et de l’énergie, parce que je
fais des jeux qui favorisent des rires spontanés, des rires forcés, mais le fou rire arrive à la fin. Ca ne dure pas
plus de 10 min parce qu’après on décompense je pense. On revient après à une phase de relaxation, on fait un
retour des ressentis du moment, en début et fin de séance. Et systématiquement une personne qui était dans
le brouillard maintenant elle est sous le soleil.
Quels sont vos objectifs en ergothérapie ?
Mon approche ergo ca va être de leur apprendre à gérer vraiment leur stress, leur donner des outils
pour être positif, pour qu’ils puissent s’affirmer. On fait un travail d’affirmation de soi, parce qu’il y a des
exercices où il faut s’exposer, courir, où il faut s’impliquer. Il y a des jeux de cohésion mais aussi des jeux de
compétition donc euh je ne les lâche pas dans des jeux de conscience, pendant une heure je ne les lâche pas.
Oui il y a pas mal d’objectifs. Travailler vraiment autour de la revalorisation, voilà, de mettre des choses
positives, ils arrivent autant à jouer que tout le monde, et on arrive à prendre du plaisir, à être en groupe
même si on est malade, voilà il y a l’effet de groupe qui veut ça aussi.
A votre avis la rigologie peut-elle être mise en place dans d’autres structures que celles en psychiatrie et
convenir aux objectifs en ergothérapie ?
Le problème c’est que là ça va être des exercices plus…il ne faut pas trop de troubles cognitifs…par
exemple il faut adapter les jeux quoi parce que moi toute la dimension physique je n’ai pas à la prendre en
compte en psy. Je me dis que en rééducation fonctionnelle bah si on veut faire les jeux faut qu’ils soient un
peu mobiles, faut pas qu’il y ait trop de troubles cognitifs car la consigne doit être comprise assez rapidement
parce que sinon ça plombe la dynamique de groupe. Au niveau de la concentration ce n’est pas trop gênant
parce que les exercices varient régulièrement, donc justement ça peut travailler l’attention, la concentration.
C’est sûr qu’ils en ont les dépressifs aussi mais euh mais moins qu’en neurologie et surtout une personne
immobilisée à ce moment là on fait d’autres exercices mais euh….donc dans le cadre de rééducation
fonctionnelle je ne sais pas trop à quoi ça peut leur servir si ce n’est remettre du rire dans leur vie mais en
général ils ne sont pas trop là pour ça.
Oui, mais je me disais en complément pour le stress, le moral, la motivation. Comme le Dr. Rubinstein en
parle comme un reflexe, comme c’est ancré en nous et que les ergothérapeutes considèrent la personne dans
sa globalité, je pensais que l’on peut y trouver des objectifs ergothérapique en complément des prises en
soin.
Tout à fait oui dans ce cas là oui ! Vous pouvez toujours faire en début de séance un peu de
stimulation, amener un peu de rire, faire quelques exercices avant la séance de rééducation oui ! Mais à ce
moment là je ne sais pas si on peut appeler ça de la rigologie. On peut apporter quelques notions de rire,
quelques exercices de rire euh parce que la rigologie c’est bien structuré avec la méditation. Après moi je
pense, je suis assez d’accord, je pense qu’il faut absolument apporter de la bonne humeur, de la joie. En tout
cas oui il faut absolument que quel que soit le public que l’on prend en charge, il faut garder le sourire, il faut
être positif, l’hôpital c’est déjà assez triste, donc euh je pense que ça aide à la motivation c’est sûr. Et puis
animer un groupe c’est quand même propre aux ergothérapeutes, donc ça rentre dans nos objectifs.
Quels bénéfices avez-vous constaté depuis la mise en place de ces séances ?
Ce sont des points que j’ai repris avec les patients pour voir si effectivement entre la théorie et la
pratique il y avait un lien. La rigologie ça développe la bonne humeur, les émotions positives ; ça lutte contre
les états dépressifs et l’anxiété ; ça permet de se redynamiser ; de retrouver de l’énergie et de l’élan vital ;
ça permet de se décentrer des souffrances ; ça favorise un mieux être ; ça joue un rôle antalgique par la
sécrétion d’endorphines ; ça permet une meilleure gestion du stress et des émotions ; ça favorise une
meilleure estime de soi par la valorisation ; ça améliore les rapports sociaux ; ça favorise l’intégration entre
les membres du groupe ; ça stimule la créativité et enfin le fait de rire en groupe. L’idée c’est de rire
ensemble, pas de l’autre, mais avec l’autre. Il ya beaucoup de bienveillance, de respect, et grâce à ça, ça
permet de travailler autour du lâcher prise. Ca contribue à l’éducation émotionnelle, parce qu’il y a un peu de
théorie autour de ça, de savoir détecter ses émotions, les stocker de manière à éviter de se retrouver
débordé d’émotions négatives.
Est-ce que les bénéfices se prolongent dans la journée, la semaine, au quotidien ?
En général ça se prolonge quand même oui. Quand je le fais le matin, ça se prolonge sur la journée,
euh c’est comme quand ils sortent d’une séance de sport ou de relaxation. Il y en a beaucoup qui me disent,
pour ceux qui font de la relaxation en parallèle, que c’est plus efficace que la relaxation, ils en sortent plus
relaxés, plus détendus, donc je me dis que ça dure plus longtemps. Mais après voilà quand ils retournent
dans leur service ou au domicile bah voilà quoi, ça revient ! Mais en tout cas de pratiquer régulièrement ça
aide à apprendre à être positif, je leur demande toutes les semaines toutes les petites choses qui leur
semblent positives qui leur sont arrivées dans la semaine. Il faut chercher, même si pour eux il n’y a rien, on
trouve toujours, il y a ce côté valorisant.
Arrivez-vous à maintenir une relation soignant –soigné efficiente avec les patients que vous suivez en
ergothérapie ?
Bah complètement. De toute façon, quelle que soit la médiation qu’on va avoir avec eux ça va nous
donner une vision d’eux encore plus globale et encore plus complémentaire. Oui les patients que je suis, oui
la relation elle est parfaitement maintenue elle n’est pas du tout biaisée. Parce qu’il y a un cadre, une fois
qu’il y a un cadre tu fais ce que tu veux ! Même ça m’aide pour certains qui ne sont pas trop accessibles en
ergo parce qu’ils sont complètement fermés. Les séances m’aident à avoir une relation de confiance. Il n’y a
pas de soucis. Après ça dépend comment on se positionne. Pendant la séance on s’appelle par nos prénoms, il
y a de la convivialité etc. Et en sortant de la séance on se rappelle par nos noms il n’y a pas de problème. Mais
le fait de les faire participer à ces séances ça permet de créer une relation de confiance, plus approfondie,
parce qu’ils te font confiance, parce que tu les connais, parce que tu peux dire « bah voyez là vous pouvez
faire ça je sais que vous y arrivez ça parce que je le vois en rigologie ». Ça me donne du support
supplémentaire donc c’est mieux. De toute façon avec les patients, plus tu fais des choses différentes avec eux
et mieux c’est. C’est plus complémentaire parce que tu travailles la prise en charge de manière globale,
parce que tu as une relation avec eux à chaque fois un peu différente et tu as une bonne relation avec le
patient.
Avez-vous eu des barrières mises par votre employeur ou d’autres professionnels de santé pour la mise en
place de ces séances ?
Non, non. Non pas du tout, ils m’avaient payé la formation pour que je le mette en pratique, c’était l’idée.
D’accord. Merci pour l’aide que vous m’avez apportée.
Annexe 5 :
Graphiques représentant, pour chaque question, les réponses des ergothérapeutes
selon leurs années d’expériences puis le type de structure dans lequel ils exercent. Pour tous les
graphiques les légendes ont été simplifiées pour une question d’esthétisme afin de mieux visualiser les courbes. Désormais,
R représente la « rééducation/réadaptation », G les « structures gériatriques », H les « structures d’hébergement » et P les
« structures psychiatriques ». Pour les informations en ordonnées, PTDT représente le choix « pas du tout d’accord », PD
« pas d’accord », NSP « ne sais pas », D « d’accord » et CD « complètement d’accord ».
Question n°1 :
5
4
>20 ans
3
10-20 ans
2
<10 ans
1
0
10
20
30
40
50
Question n°2 :
PDTD
>20
PD
<10-20>
D
<10
CD
0
10
20
30
40
50
60
70
PDTD
P
PD
NSP
H
D
G
CD
R
0
10
20
30
40
50
60
70
Question n°3 :
PDTD
PD
>20
NSP
10-20 ans
D
<10
CD
0
10
20
30
40
50
60
PDTD
P
PD
NSP
H
D
G
CD
R
0
10
20
30
40
50
60
70
Question n°4 :
PDTD
PD
NSP
>20
10-20 ans
D
CD
0
10
20
30
40
50
60
PDTD
P
PD
NSP
H
D
G
CD
R
0
10
20
30
40
50
60
70
Question n°5 :
PDTD
>20
PD
10-20
ans
<10
NSP
D
CD
0
10
20
30
40
50
60
70
PDTD
P
PD
H
NSP
D
G
CD
R
0
10
20
30
40
50
60
70
80
Question n°6 :
PDTD
PD
>20
NSP
10-20 ans
D
<10
CD
0
20
40
60
80
PDTD
PD
P
H
G
R
NSP
D
CD
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
Question n°7 :
PDTD
PD
>20
NSP
10-20 ans
D
<10
CD
0
10
20
30
40
50
PDTD
P
PS
NSP
H
D
G
CD
R
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
Question n°8 :
PDTD
>20
PD
NSP
10-20
ans
<10
D
CD
0
10
20
30
40
50
60
PDTD
P
PD
NSP
H
D
G
CD
0
Question n°9 :
10
20
30
40
50
60
70
R
Quotidiennement
Régulièrement
Souvent
Occasionnellement
Rarement
Pas du tout
>20
10-20
ans
<10
0
10
20
30
40
50
60
Quotidiennement
P
Régulièrement
Souvent
H
Occasionellement
G
Rarement
R
Pas du tout
0
10
20
30
40
50
60
Question n°10 :
Non
>20
10-20 ans
Oui
<10
0
20
40
60
80
100
120
P
Non
H
Oui
G
0
20
40
60
80
100
120
R
Question n°12 :
Non
>20
10-20 ans
Oui
<10
0
10
20
30
40
50
60
70
80
P
Non
H
Oui
G
0
10
20
30
40
50
60
70
80
R
0
1
2
4 / 3%
4
0
0
3
13 / 9%
7
4
2
4
60 / 43%
42
13
5
5Complètement
d’accord
Complètement
d’accord
61 / 44%
40
14
7
1 / 1%
1
0
0
0
0
0
1
D’accord
6 / 4%
6
0
0
2
4
0
0
Pas d’accord
71 / 51%
46
18
7
34
20
12
5
Pas du tout
d’accord
57 / 40%
38
11
8
35
9
7
3
Complètement
d’accord
64 / 45%
46
12
6
36
16
7
3
D’accord
62 / 45%
40
15
7
30
12
12
6
Ne sais pas
10 / 7%
8
2
0
5
4
1
0
Pas d’accord
1 / 1%
0
1
0
0
0
0
1
Pas du tout
d’accord
2 / 2%
0
1
1
1
1
0
0
Complètement
d’accord
17 / 12%
12
1
4
10
2
5
0
D’accord
68 / 48%
49
16
3
33
20
9
4
Ne sais pas
42 / 30%
27
9
6
22
9
5
4
Pas d’accord
11 / 8%
6
4
1
6
2
1
2
Pas du tout
d’accord
1 / 1%
0
0
1
1
0
0
0
11%
21%
68%
Psychiatrie
8%
0
>20 ans
1 / 1%
10-20 ans
1- Pas du tout
d’accord
0-10 ans
Structures
d’hébergement
14%
Types de structure
Prises en soin
gériatrique
20%
Nombre d’années
d’expérience
Rééducation/r
éadaptation
53%
4Pour vous l’humour, aide
dans l’acceptation du
handicap.
3- Pour vous,
l’utilisation de
l’humour a des
bienfaits sur la santé
des patients.
2- Pour vous,
l’utilisation de
l’humour n’est
pas
professionnelle
avec les patients
1- L'humour fait partie
intégrante de votre vie
quotidienne.
Questions posées :
Nombre de réponses
/ pourcentages
Annexe 6 : Tableau d’analyse des questionnaires.
5- Pour vous, l’utilisation de
l’humour permet d’obtenir une
bonne relation soignant-soigné.
l’humour est importante, pour
vous, en tant que soignant.
est faite par tout l’équipe
pluridisciplinaire au sein de la
structure.
6- Pour vous, l’utilisation de
l’humour peut être faite dans les
prises en soin.
7-Pour vous, l’utilisation de l’humour
8- Pour vous, l’utilisation de
Complètement
d’accord
44 / 31%
30
8
6
22
12
5
4
D’accord
85 / 61%
58
19
8
46
18
14
4
Ne sais pas
6 / 4%
5
1
0
2
2
1
1
Pas d’accord
2 / 2%
1
1
0
1
0
0
1
Pas du tout
d’accord
2 / 2%
0
1
1
1
1
0
0
Complètement
d’accord
D’accord
43 / 30%
25
12
6
29
6
3
5
88 / 63%
66
14
8
41
23
16
4
Ne sais pas
4 / 3%
2
2
0
1
2
1
0
Pas d’accord
1 / 1%
1
0
0
0
1
0
0
Pas du tout
d’accord
3 / 3%
0
2
1
1
1
0
1
Complètement
d’accord
15 / 11%
10
1
4
7
2
2
2
D’accord
39 / 28%
30
6
3
21
7
6
4
Ne sais pas
37 / 26%
20
13
4
23
6
4
2
Pas d’accord
39 / 28%
29
7
3
19
12
7
2
Pas du tout
d’accord
9 / 7%
5
3
1
2
6
1
0
Complètement
d’accord
70 / 50%
51
11
8
39
10
13
4
D’accord
58 / 42%
39
14
5
28
19
7
4
Ne sais pas
4 / 3%
3
1
0
2
2
0
0
Pas d’accord
4 / 3%
1
2
1
2
1
0
1
Pas du tout
d’accord
3 / 2%
0
2
1
1
1
0
1
9- Vous utilisez l’humour avec vos patients :
10- Avez-vous eu une
formation pour
l’utilisation de
l’humour comme outil
thérapeutique ?
12Souhaiteriezvous en avoir
une ?
Pas du tout
0 / 0%
0
0
0
0
0
0
0
Rarement
2 / 1%
1
1
0
0
1
1
0
Occasionnellem
ent
12 / 9%
8
3
1
5
5
0
2
Régulièrement
45 / 32%
33
8
4
20
17
6
1
Souvent
30 / 22%
19
9
2
14
6
5
3
Quotidienneme
nt
50 / 36%
33
9
8
31
4
8
4
oui
1 / 1%
1
0
0
1
0
0
0
non
138 / 99%
93
30
15
71
33
20
10
oui
75 / 54%
60
10
4
38
18
10
7
non
63 / 46%
33
20
11
34
15
10
3

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