Cinéfête 4 DIVA
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Cinéfête 4 DIVA
Cinéfête 4 DIVA De Jean-Jacques Beineix Dossier réalisé par Annick Gilles, Institut Français de Berlin. DIVA De Jean-Jacques BEINEIX I. Fiche technique A- Fiche technique et artistique B- Le réalisateur et la place de Diva dans le cinéma français des années 1980 p4 II. Résumé A- Résumé 1 : Pour éveiller la curiosité des élèves et les aider à comprendre l’enchevêtrement des intrigues (avant la projection) B- Résumé 2 : Résumé très bref qui ménage le suspens (avant la projection) C- Résumé 3 : Résumé détaillé p6 III. Les personnages A- Jules B- Cynthia Hawkins C- Gorodish D- Alba E- Saporta F- Nadia G- Krantz H- Les truands I- Les policiers : Paula, Zapotek p8 IV. Introduction du film par l’image A- Observation et analyse des affiches du film B- Observation de quelques images du film p 15 V. Introduction du film par le thème de la Diva A- Définition du mot Diva selon le dictionnaire Larousse B- « Diva » selon le dictionnaire du cinéma Larousse C- Portrait de l’actrice Wilhelmenia Fernandez par J.-J. Beineix D- Le terme « diva » comme métaphore p 18 VI. Extraits des dialogues du film A- Rencontre entre Alba et Jules B- La conférence de presse C- Le zen dans l’art de la tartine D- Confrontation entre la diva et son impresario p 20 VII. Pistes d’observation A- Les différents fils des intrigues B- Caractérisation des personnages C- Description et analyse des lieux de l’action D- Etude de la musique dans le film E- Etude des couleurs dominantes dans le film F- Diva, un film de références, un film culte p 27 2 VIII. Pistes d’exploitation A- Le postier amoureux de la Diva B- Diva, un « polar » C- L’art et la société D- Une poésie urbaine p 30 IX. La critique A- La cantatrice et le postier. Lecture et analyse du document annexe 4 B- Lecture et analyse des documents annexes 5 et 6 C- Meli-Melo D- A vos plumes ! p 32 X. Fiches-outils p 35 A- Lexiques B- Références bibliographiques et sites internet C- Documents annexes • Document annexe 1. Entretien avec Jean-Jacques Beineix paru dans Le Monde du 9 avril 1981 : « La métaphore de l'alpiniste », par Claire Devarrieux. • Document annexe 2. Texte extrait de la pochette du CD : « Wilhelmenia Fernandez », par Jean-Jacques Beineix. • Document annexe 3. Les affiches du film. • Document annexe 4. Article paru dans La Croix du 14 mars 1981 : « La cantatrice et le postier », par Jean Rochereau. • Document annexe 5. Article paru dans L’Express du 3 avril 1981. • Document annexe 6. Article paru dans Le Monde du 18 mars 1981 : « Diva de JeanJacques Beineix », par Jacques Siclier. 3 I. FICHE TECHNIQUE A- Fiche technique et artistique Long métrage français Durée : Année de sortie : Réalisateur : Scénariste : 115 min. 1981 Producteur : Distributeur : Jean-Jacques Beineix Jean-Jacques Beineix et Jean Van Hamme (d’après le roman de Delacorta « DIVA ») Irène Silberman, Greenwich Film Production CCFC Image : Musique: Philippe Rousselot Vladimir Cosma Acteurs : Wilhelmenia Wiggins Fernandez Frédéric Andrei Roland Bertin Richard Bohringer Thy An Luu Jacques Fabbri Anny Romand Patrick Floerscheim Chantal Deruaz Jean-Jacques Moreau Gérard Darmon Dominique Pinon ( la Diva) ( Jules) (L’imprésario) (Gorodish) (Alba) (Le commissaire Saporta) (L’inspecteur Paula) (Zatopek) (Nadia) (Krantz) (L’Antillais, un des deux tueurs) (Spic, dit le Curé, le deuxième tueur ) Prix : Césars en 1982 En outre, Vladimir Cosma a été nominé pour la meilleure musique de film. Genre : Film policier, thriller sur fond de musique d’opéra à partir de 14 ans (classe 9, 10, 11, 12, 13) au moins 3 ans d’apprentissage en français Age cible : Niveau linguistique requis : 4 B- Le réalisateur et la place de Diva dans le cinéma français des années 1980 (voir document annexe 1) Jean-Jacques Beineix est né en octobre 1946 à Paris ; très jeune il acquiert la certitude qu’il ne sera pas tout à fait comme on le voudrait dans sa famille. Après des études de médecine qui ne le convaincront pas vraiment de sa vocation, il fréquente les plateaux de cinéma où il débute dans le métier comme assistant-réalisateur de Jean Decker (1964-1967), de Claude Berri, de René Clément et de Claude Zidi. En 1977, il réalise son premier court-métrage : « Le chien de M. Michel » récompensé par le premier prix du festival de Trouville. Il réalise son premier long métrage, Diva, en 1980, à partir d’une adaptation d’une série noire écrite par Delacorta. Ce premier film aura des débuts difficiles et faillit passer inaperçu auprès du public lors de sa première sortie dans les salles parisiennes en mars 1981. Il divise la critique: certains reconnaissent immédiatement en J.J. Beinex un grand réalisateur, d’autres reprochent au film « son esthétisme maniéré, emphatique, recherché ». Grâce à la persévérance de son réalisateur et de quelques distributeurs, ce film finira par rencontrer son public et sera légitimé par l’obtention de quatre Césars lors du Festival de Cannes en 1982. Il devient alors, malgré ses détracteurs, un film culte révélateur d’un cinéma et d’un public en pleine mutation. En effet, il marque l’émergence d’un nouveau cinéma français, coloré, stylisé, énergique, mystérieux, qui donne la primauté aux pouvoirs suggestifs des images et non plus aux mots et à leurs sens. Diva est l’illustration d’un hyperréalisme délirant correspondant aux goûts de la jeunesse des années 80, bien décidée à se démarquer, en la matière, des choix des adultes et des critiques. Beineix devient alors le père d’une nouvelle « Nouvelle vague » que d’autres réalisateurs, tels que Leo Carax, dans les années suivantes, illustreront aussi à leur manière. Après Diva, Beinex réalise 5 autres films dont il devient très vite le producteur, par souci de préserver son indépendance intellectuelle et artistique : • La Lune dans le Caniveau (en 1983 avec Gerard Depardieu et Nastassja Kinski ) • 37°2 le Matin (en 1986 avec Jean-Hugues Anglade et Béatrice Dalle) • Roselyne et les lions (en 1989 avec Isabelle Pasco et Gérard Sandoz) • IP5 : l’île aux Pachydermse ( en 1992 avec Yves Montand, Olivier Martinez et Sekkou Sall) • Mortel transfert (en 2000) La préoccupation esthétique est constante dans chacun de ses films. On peut notamment percevoir par le soin accordé aux décors, à la musique, à la mise en scène. Elle s’explique certainement par le fait que Beinex pratique aussi avec assiduité d’autres activités artistiques, telles que la peinture ou la photographie. 5 Certains de ces films auront un succès mitigé surtout auprès de la critique qui est souvent dure à son égard. Beinex « l’indomptable » est un réalisateur talentueux, tenace, exigeant et passionné pour son art, dont le parcours atypique en fait une figure notoire du cinéma français depuis les années 1980 (lire document annexe 1 pour des informations complémentaires sur J.J. Beinex) II. RESUME A- Résumé 1 : Pour éveiller la curiosité des élèves avant la projection et les aider à comprendre l’enchevêtrement des intrigues. A faire lire aux élèves avant le visionnement du film en les encourageant à formuler des hypothèses sur l’histoire du film à partir des affiches (prolongement de l’activité proposée dans la rubrique Analyse des affiches). Jules est un jeune postier parisien. Passionné d’opéra, il réussit à faire un enregistrement pirate du concert que donne à Paris la cantatrice Cynthia Hawkins, qu’il admire plus que tout. La diva a toujours refusé d’enregistrer un disque. La bande de Jules attire les convoitises de Chinois de Taïwan prêts à tout pour publier un disque de la diva. Une deuxième cassette vient compliquer un peu plus encore la vie de Jules : avant d’être assassinée en pleine rue, une prostituée a glissé dans la sacoche de sa mobylette une cassette où elle dénonce le commissaire Saporta, tête d’un important réseau de traite de femmes et de prostitution. Bien malgré lui, Jules se retrouve poursuivi dans tout Paris par les Chinois, la police et les truands de Saporta. Mais il croise sur sa route des alliés sûrs : Alba, jeune femme de son âge qui se prend d’affection pour lui, et son ami Gorodish, personnage énigmatique chez qui vit Alba, et enfin Cynthia, la diva adorée... Amour, courses poursuites, malfrats, justiciers : comment s’en sortira Jules ? B- Résumé 2 : Un résumé très bref qui ménage le suspens et aiguise l’appétit de voir et d‘entendre le film A utiliser avant le visionnement comme support pour une activité d‘expression orale en complément des affiches du film pour faire formuler aux élèves des hypothèses sur les liens entre les personnages, les intrigues principales , le lieu de l‘action etc.. 6 Un jeune postier mélomane, une chanteuse d’opéra qui n’accepte pas que l’on enregistre sa voix, un policier véreux, un tueur psychopathe, deux asiatiques à la recherche « d’une voix en or », un couple branché et décalé, bref une intrigue policière sur fond d’air d’opéra, tel est l’univers du film Diva de J.J. Beinex . C- Résumé 3 : Un résumé détaillé à l‘usage de l‘élève qui aurait perdu les fils de l’histoire, subjugué par la beauté des images du film et de la musique !! Ce texte peut être exploité par l’enseignant après le visionnement du film comme support à un travail de compréhension écrite (prolongement de l’activité A proposée dans la rubrique Pistes d’observation) Jules est un jeune postier parisien passionné d’opéra qui voue une admiration sans bornes à la grande cantatrice noire américaine Cynthia Hawkins. A l’occasion d’un de ses concerts à Paris, il fait un enregistrement pirate de son récital sur un magnétophone professionnel puis vole sa robe de scène dans sa loge après le concert. Deux Taiwannais, également présents au récital et désireux de commercialiser les premiers le disque que Cynthia Hawkins s’est toujours refusée à réaliser, vont chercher à récupérer à tout prix cette bande. Avant d’être tuée devant la gare Saint-Lazare, une jeune femme glisse dans la sacoche de la mobylette de Jules, sans qu’il s’en aperçoive, une cassette compromettant le commissaire Saporta qui est le chef d’un réseau de prostitution et de trafic de drogues. Jules fait la connaissance d’Alba, une jeune Asiatique à laquelle il confie la bande magnétique du concert de Cynthia Hawkins pour qu’elle puisse la faire écouter à son ami Gorodish. Les Chinois de Taïwan se rendent dans le loft de Jules pour tenter de récupérer la bande magnétique, dévastant tout sur leur passage. Jules décide de rapporter à Cynthia la robe qu‘il lui a dérobée lors du concert. Celle-ci l‘accueille d‘abord avec réserve, mais se laisse très vite charmer par ce jeune homme passionné ; entre elle et Jules naît une profonde amitié amoureuse que favorise une grande complicité musicale. Lorsque Jules découvre que Cynthia est l’objet d’un chantage de la part des Taiwanais, il quitte l’hôtel de la chanteuse afin de récupérer sa bande. Pris en chasse par la police « officielle » de Saporta, il se réfugie au domicile d’une prostituée noire qu’il a rencontrée la veille et découvre le contenu de la cassette à laquelle il n’avait jamais prêté attention et, par la même occasion, la raison des filatures dont il est l’objet. Retrouvé par les deux tueurs de Saporta, Jules, blessé, appelle Gorodish à son secours. Celui-ci survient à temps pour le sauver et prend les choses en main. Il fixe un rendez-vous à Saporta afin d’échanger la cassette contre des lingots d’or. Les Taiwanais qui le poursuivent tombent dans le piège tendu à Gorodish par Saporta. Ils meurent dans l’explosion d’une voiture piégée. A nouveau 7 menacé par Saporta et ses tueurs, Jules sera sauvé par l’arrivée de Gorodish. Il rapportera la bande à Cynthia qui pour la première fois découvre le son enregistré de sa voix . III. LES PERSONNAGES Cette partie est réservée exclusivement à l’enseignant ; il y trouvera des éléments d’analyse qui pourront l’aider dans le travail de compréhension du film. A- Jules Un facteur, «héros romantique » des années 1980, l’innocent traqué par la pègre, le justicier, l’initié et l’initiateur... Jules est un jeune postier qui mène une vie solitaire dans un garage transformé en loft baroque. Son prénom « Jules » le distingue déjà en faisant de lui un personnage insolite, « décalé » par rapport à son époque car son prénom est un prénom mais qui, comme le souligne la Diva lors de sa deuxième rencontre avec lui, « lui va si mal qu’il lui va très bien ». Il évolue dans un univers hétéroclite, peuplé de belles voitures américaines accidentées, d’images de femmes pop art et de musique classique. Lors de sa rencontre avec Alba, il se définit lui-même ainsi : « je ne suis pas un classique, je suis un lyrique ». A l’origine, le terme « lyrique » désigne une poésie chantée et accompagnée de musique, contrairement à l’épique, ou dramatique, qui met en scène la poésie par le jeu. Par extension, le lyrisme désigne l’exaltation et la passion dans l’expression des sentiments. Le personnage de Jules réconcilie ces deux acceptions du terme. Mélomane amoureux d’une voix et d’une femme cantatrice , Jules assouvit sa passion en faisant un enregistrement pirate de la voix de la diva. « Fan » fétichiste de la Diva, il va même jusqu’à voler sa robe de concert. Cette robe blanche deviendra écharpe à son cou alors qu’il traverse Paris sur sa mobylette. On peut voir dans Jules l’image « moderne » d’un chevalier courtois, amoureux transi, qui porte les couleurs de sa dame et qui est prêt à réaliser des prouesses pour elle. Au début du film, porté par sa passion pour la Diva, Jules semble vivre dans ses rêves : il écoute le chant de la Diva allongé dans son loft, seul ou en compagnie d’Alba, il rend visite à une prostituée noire ce qui lui permet de prolonger le rêve amoureux sur le mode du fantasme érotique. Mais lorsque son appartement est saccagé, Jules, privé de toute possibilité de refuge, est obligé de prendre en main son destin pour vivre ses rêves et non plus les rêver. Il emprunte de l'argent, la moto flambant neuve de son ami et décide de rendre visite à la Diva , franchissant toutes les barrières sociales qui les séparaient. La destinée de Jules n’est pas sans rappeler l’ascension sociale du 8 héros romantique, puisque de postier, il devient l’ami et l’amant de la riche et célèbre diva. Néanmoins, Beineix ne nous raconte pas seulement l’histoire d’un jeune postier, héros romantique et lyrique, car Jules se retrouve au centre de l’intrigue policière qui structure tout le film. Innocent traqué par la pègre, il devient le justicier prêt à affronter tous les risques, jusqu’à la mort, pour sauver sa Diva des griffes de maîtres chanteurs. Enfin, il est celui qui parviendra à confronter la Diva à la réalité de sa voix enregistrée ; de la même manière que la Diva l’initie à la plénitude d’un amour vécu qui réconcilie « luxe, calme, musique, beauté et volupté », il est aussi un initiateur pour la Diva car il la pousse à descendre de sa tour d‘ivoire, à accepter que l’art s’adapte au commerce et à la consommation de masse, que sa voix devienne une marchandise culturelle qui circule et peut ainsi accéder au plus grand nombre. Les attributs du personnage : la mobylette jaune, la moto, le casque rouge, « le Niagra », les voitures américaines accidentées. B- Cynthia Hawkins Une DIVA afro-américaine célèbre, belle, riche, inaccessible, qui s’humanise peu à peu Une cantatrice idéaliste qui descend de « sa tour d’ivoire » Elle est une cantatrice renommée qui mène une carrière internationale sous la direction de son impresario Simon Weinstadt. Elle apparaît comme une cantatrice d’autant plus inaccessible qu’elle a une très haute conception de l’art qu’elle pratique : elle refuse tout enregistrement de sa voix, vivant ses concerts comme des moments uniques et exceptionnels avec son public ; « L’art ne doit pas s’adapter au commerce, mais le commerce à l’art », affirme-t-elle au journaliste qui la questionne, avec une arrogance empreinte d’idéalisme au journaliste Sa rencontre avec Jules qui lui fera découvrir sa voix enregistrée, la pression exercée par les deux Taiwanais l’obligeront à remettre en cause ses principes idéalistes en acceptant de reproduire et de diffuser sa voix, autrement dit de populariser son art. Certains critiques féministes voient dans cette évolution du personnage la soumission finale d’une femme-artiste qui ne peut pas échapper aux règles d’une société de consommation régie avant tout par des hommes pour le profit des hommes (le commerce de l’art étant soumis aux mêmes lois du profit que celui de la prostitution et de la drogue). Une femme belle comme une déesse entre ciel et terre : La beauté de la DIVA est celle d’une femme afro-américaine ; elle est « une déesse noire », une « Reine de l'Afrique », une « Reine de la nuit », ce qui la rend peut-être d’autant plus fascinante aux yeux de Jules. Mais sa beauté est aussi celle de sa voix qu’elle met au service de son art, en chantant les passions humaines et plus particulièrement l’amour. Son apparition 9 sur scène est étroitement associée au chant de la Wally, qui exprime les souffrances d’une femme abandonnée qui se suicide par amour. Ce chant fait de la DIVA une interprète de l’amour passionnel, absolu, idéalisé, celui qu’elle inspire justement à Jules. A un autre moment du film, elle interprétera l’Ave Maria, chant religieux qui relie l’homme au sacré. Ainsi, à travers le regard de Jules, mélomane amoureux, la Diva incarne, par son chant, la beauté et la magie d’un monde inaccessible, la nostalgie de la pureté, une image de la féminité où la sensualité est reliée à la spiritualité. Une déesse qui tombe amoureuse d’un jeune mortel, facteur de son état : Dans sa vie privée, la Diva semble un personnage solitaire qui se consacre en priorité à son art et s’isole pour pouvoir mieux l’exercer. Lorsqu’elle rencontre pour la première fois Jules dans sa loge, elle est frappée par son habit de postier : c’est justement le décalage social qui la frappe ; Jules ne correspond pas au profil habituel des spectateurs d’opéra qui appartiennent en général - du moins en France - à une élite sociale. Peu à peu, la Diva se laisse charmer par la sensibilité du jeune postier, séduire par sa passion absolue pour la musique qui le pousse à accomplir des actes téméraires. Elle accepte un premier rendez-vous amoureux qui l’amènera à faire avec Jules une promenade sentimentale la nuit, dans les rues et les beaux quartiers d’un Paris éternel et magique ; pour lui, elle n’hésite pas à rompre sa solitude de DIVA en acceptant sa présence lors de ses répétitions. On remarquera comment, dans le film, l’idylle amoureuse est traitée avec pudeur, avec délicatesse, sur le ton de la romance (choix de la musique de Satie, ellipse totale de l’acte charnel, promenade sentimentale traitée sur le registre romantique et exotique). La Diva en femme amoureuse intuitive pressent que Jules a des soucis et s’inquiétera de le voir la quitter et de ne pas le voir revenir au moment où elle pense quitter Paris. C’est la scène du théâtre des Bouffes du Nord qui les réunira une nouvelle fois : alors que la Diva ose chanter seule devant un parterre vide, elle retrouve Jules qui lui rapporte l’enregistrement clandestin de sa propre voix. La romance s’achève, sur le lieu même où elle a commencé, par l’image du couple chastement enlacé. Les attributs du personnage : la robe blanche, une voix d’or, sa beauté de femme afroaméricaine, son accent américain quand elle parle français. C- Gorodish Un « métèque », « un mec qui veut arrêter les vagues », un justicier marginal, un James Bond ou un Fantomas nourri à la philosophie « zen » Alba le définit comme un « métèque », « un rasta » (diminutif de rastaquouère). Ces deux termes familiers sont habituellement utilisés dans un sens péjoratif pour désigner un étranger dont les ressorts d’existence restent obscurs. En effet, étranger à la société et au monde, ce personnage reste pour le spectateur une énigme : il est impossible de savoir d’où il vient, ce qu’il fait , de quoi il vit. On 10 apprend simplement qu’il a pris un jour Alba dans sa voiture alors qu’elle faisait du stop; il semble vivre des rapines d’Alba tout en la protégeant. C’est un personnage ambigü, énigmatique, qui reste toujours sympathique. Homme oisif, esthète cultivé, il a comme Jules la passion des belles voitures (il collectionne les tractions Citroën) et de la musique. Mi justicier mi truand, il devient très vite l’ami et le protecteur de Jules mais il sait aussi ménager ses intérêts personnels en utilisant les mêmes armes que les truands qu’il cherche à éliminer (le chantage). L’univers dans lequel il vit est étrange, fantasque, plus asiatique que parisien : il vit dans un grand studio qui donne sur les quais de Seine, très sobre, aux murs peints dans des tons froids (bleu et noir), éclairé par une lumière bleu néon, qui possède pour seuls meubles une baignoire ancienne, un vieux fauteuil récupéré d’un salon de coiffure, un coin lavabo et deux hamacs suspendus, et qui est décoré d’objets asiatiques (vague de méditation…). Souvent immobile, fumant, bercé par une musique de méditation, ce personnage étrange mais tendre est un adepte de la philosophie zen. Un tuba sur la tête, il explique à Jules mi surpris mi amusé sa recette très particulière du sandwich zen, et tout au long du film, il occupe ses moments libres à reconstituer un puzzle qui se révélera être une fois achevé (à la fin du film), le tableau (japonais) d’une vague arrêtée. Ce puzzle qui se construit au fil de l’histoire peut d’ailleurs être considéré comme une mise en abîme ludique de l’intrigue du film dont les fils se dénouent peu à peu sous les yeux du spectateur. Dans la seconde partie du film, Gorodish, le contemplatif, devient un homme d’action intrépide, un justicier solitaire qui enchaîne les prises de risque pour protéger Jules devenu son ami, sans jamais se départir de son élégance, de « son flegme tout asiatique », de son sens du jeu et d’un certain humour. En effet, il apparaît à deux fois pour sauver Jules au moment où on ne l’attend pas, élimine les truands par la ruse sans se salir les mains (la première fois il endort « Spic » dit « le curé » par un gaz toxique ; la seconde fois il provoque la chute de Saporta dans l’ascenseur par le jeu de la lumière), puis disparaît comme Fantomas, donne un rendez-vous à Saporta dans une usine désaffectée (celle des anciens établissements Citroën) qui prend des allures de jeu de piste théâtralisé, remplace une voiture de luxe par une autre, pareil à un James Bond désinvolte. Gorodish, personnage qui semble à la fois tout droit sorti d’une bande dessinée et d’un conte fantastique donne au film sa touche de polar décalé, une ambiance onirique inimitable ; il annonce d’autres personnages originaux, « marginaux », que les spectateurs auront le plaisir de découvrir dans des films de la même décennie tels que « Le grand bleu », « Nikita » ou « Subway » de Luc Besson. Les attributs du personnage : les Tractions Citroën blanches des années 1930, un grand appartement presque vide, un univers bleu-noir baigné de philosophie « zen », un balancier aquatique, le puzzle d’un tableau japonais, son costume bleu clair. 11 D- Alba La femme-enfant, la Lolita des années 80 Etymologiquement, « alba » vient du Grec ancien et signifie « blanc » (sa signification nous est restée dans le mot « aube », qui associe blancheur et matin). D’origine asiatique, la petite Alba fait partie intégrante de l’univers zen de Gorodish. S’opposant à la femme mûre et accomplie que représente la DIVA noire, Alba incarne davantage la femme-enfant, voleuse, espiègle, lutine, semblable à une Lolita généreuse ou à une fée espiègle des Temps Modernes.Elle parle un langage d’adolescente délurée et malicieuse, presque bisyllabique. Elle se transforme comme une magicienne : elle est une adolescente des années 1980 qui s’habille de vêtements fluos aux couleurs voyantes, se déplace sur patins à roulettes, une petite voleuse délurée qui vole pour faire des cadeaux à ses amis ; une amie intuitive, confidente et complice des amours de Jules et de la Diva, une femme de tête à l’instar de la célèbre Bonny, qui aide son compagnon Clyde dans les moments de crise, une Sheherazade qui, pour sauver la vie de Jules, improvise une histoire à rêver debout, ou une fée des logis échappée d’un conte de fée ou d’un tableau de Vermeer qui apporte le petit déjeuner en haut d’un phare au pauvre Jules blessé. A l’instar de la Diva, mais sur un registre différent, celui de la femme-enfant émancipée et libérée, elle est un personnage féminin qui exerce sur les hommes un fort pouvoir de séduction, qui leur ouvre les portes du rêve et du désir. Ce type de personnage féminin relevant « du complexe Lolita » sera une des caractéristiques du cinéma des années 1980 (voir les films de Zulawski, de Techiné, de Miller et de Blier). Beinex dans son film 37°2 le matin le reprendra en le faisant culminer avec le personnage de Betty, « figure meurtrie par sa condition de femme-objet », cherchant jusque dans l’auto-destruction à échapper à la prison du glamour 1». Les attributs du personnage : Une jupe plastic fluo, un carton à dessin à double fond, un langage de jeune adolescente « branché », des patins à roulette, des auto-portraits en noir et blanc E- Saporta Flic « ripou » (pourri, en verlan) ou, dans un registre de langage plus élevé, policier corrompu, chef d’un réseau de prostitution et de vente de drogues. A la fois commissaire de police et chef du réseau mafieux dit « de l’Antillais », il incarne un personnage typique du film policier, celui du policier corrompu. Chef d’un réseau de prostitution et de vente de drogues qui lui permet de gagner beaucoup d’argent et d’avoir du pouvoir, il apparaît comme un personnage profondément malhonnête et monstrueux. 1 Extrait de l‘article „Chant et contrechamp“ de Jacques Leclère (l‘Avant-scène n°407 déc1991 ) 12 Informé par ses inspecteurs sur l’enquête qui doit mener jusqu’à lui, il a toujours « un métro d’avance » dans la recherche de la cassette qui le compromet. Son langage mélange des termes administratifs et juridiques châtiés à l’argot grossier couramment utilisé par la police ou le milieu mafieux : « Pourquoi nous avoir contactés, nous, la police ? », « Pourquoi t’es venu chercher les flics ! ? » ; ou encore : « Vous n’avez jamais pu produire un seul témoin valable, ils sont tous morts », « Qu’est-ce que vous foutiez à la gare ? ». Censé chercher la vérité pour que justice soit faite, il n’hésite à faire couler le sang pour se protéger. Ainsi, il fera tuer, par ses deux sbires, Nadia la prostituée qui fut aussi son amie, puis un premier témoin gênant du crime, et tentera par tous les moyens de récupérer la cassette compromettante quitte à chercher à tuer de ses propres mains Jules et l’inspectrice Paula quand la situation l’exige. Saporta, par son double rôle de policier et de chef des truands constitue un personnage typique des films de gangsters classiques : il permet de compliquer l’intrigue , de donner au spectateur l’impression d’en savoir plus que les protagonistes du film, tout en augmentant le suspens. Face à Gorodish, personnage énigmatique venu de nulle part, Saporta, figure connue et emblématique de la corruption humaine, ne peut que perdre. Les attributs du personnage : L’imperméable, le pantalon à bretelles, les lunettes noires, le revolver, le bureau d’un commissariat. F- Nadia A peine présente quelques minutes à l’écran, la prostituée assassinée Nadia est un personnage clef de l’énigme policière du film par l‘enregistrement de son témoignage compromettant sur une cassette.Opposée à la voix pure de la Diva qui s’élève dans l’obscurité des salles de concert, la voix rauque, brouillée, haletante de Nadia dénonce les crimes de Saporta, son ignominie. Son récit authentique est tragique à l’instar du chant mythique de la Diva : il dénonce le mal d’une société criminelle, révèle la vérité sur Saporta, parle aussi de trahison amoureuse, de vengeance et de mort. En écoutant par hasard cette cassette qu’il détenait à son insu depuis la veille, Jules est appelé à devenir un héros, à se dépasser pour faire triompher la Justice et le Bien. Les attributs du personnage : sa démarche de femme traquée, marchant pieds nus dans la gare Saint Lazare, la cassette compromettante, sa voix rauque et haletante de femme menacée. G- Krantz L’ex-ami de Nadia, l’informateur de la police, le témoin gênant Krantz apparaît à trois reprises dans le film : la première fois, à la terrasse d’un café près de la gare Saint Lazare, en compagnie de Paula, inspecteur de police. 13 Autrefois arrêté par la police pour un délit, servant parfois d’informateur,il sera un des témoins qui assistent impuissants au meurtre de Nadia par les truands à la solde de Saporta. La deuxième fois, il fait l’objet d’un interrogatoire au cours duquel il avouera que Nadia, son ex-amie, l’avait appelé pour lui demander de l’aide et qu’elle était en possession d’une cassette révélant l’identité du vrai patron du réseau antillais.Cette révélation malheureuse sera la cause de sa propre mort : devenu un témoin trop embarrassant, qui risque d’en savoir plus qu’il ne le laisse paraître, Frantz sera lâchement assassiné d’un coup de poinçon dans le dos par les truands à la solde de Saporta derrière un stand de loterie à Barbès. Ce personnage conventionnel dans un film policier permet par ses révélations de relancer l’action et le suspens du film : l’étau se resserre autour de Jules, qui sera alors à la fois recherché par la police et les truands au service de Saporta. H- Les truands L’Antillais et son complice sont deux personnages indispensables à un film policier, deux truands avec ce qu’on appelle des « sales gueules ». Personnalités sans envergure, ils ne sont que des exécutants jouant les gens importants. A la solde de Saporta, ils ont peur de lui et ne savent faire qu’une chose : tuer. L’un, grand et mince, le cheveu gominé, l’œil mauvais et le ton menaçant, sert de couverture au commissaire Saporta en se faisant passer pour „l‘Antillais“, le chef du réseau mafieux.. L’autre, Spic dit le Curé, plus petit, au crâne rasé et au pantalon para-militaire est un tueur psychopathe qui ne sait dire que « j’aime pas » comme un enfant gâté, ou un stroumpf grognon; il tue ses victimes avec un poinçon, replié dans son monde, les écouteurs d‘un balladeur placés constamment sur les oreilles. Lorsque lui-même se fera tuer par Gorodish, le spectateur découvre non sans amusement qu‘il tuait ses victimes sur des airs populaires d‘accordéon. Lunettes noires sur le nez, la mine patibulaire, ils sont les caricatures de leur rôle et apportent finalement une touche d’humour noir à cette galerie de portraits. Les deux truands taiwanais à la recherche de l‘enregistrement pirate du concert de la Diva contribuent aussi au suspens du film et à son atmosphère d‘humour noir. Le regard caché sous des lunettes noires, ils n‘ont qu‘un souci: récupérer l‘enregistrement pirate de la Diva ou obtenir un contrat d‘enregistrement exclusif avec la cantatrice. Ils emploieront tous les moyens (la fouille, la filature, la pression par l‘argent, le chantage) pour parvenir à leurs fins Moins dangereux et plus naïfs que les truands à la solde de Saporta, ils seront victimes du double piège posé à la fois par Gorodish et par Saporta : ils meurent dans l‘explosion de la Traction Citroën, alors qu‘ils pensaient avoir récupéré l‘enregistrement pirate du concert de la Diva. Les attributs des personnages : Les lunettes noires, les phrases « J’aime pas » que prononce Spic dit « le Curé » (« j’aime pas les 14 bagnoles », « j’aime pas Beethoven », « j’aime pas les ascenseurs », « j’aime pas ça »), le poinçon, les revolvers, la voiture noire aux vitres sombres ou la voiture compromettante détruite à la casse. I- Les policiers : Mortier, Paula, et Zapotek Ils sont le pendant des truands. Alors que le monde des truands est masculin, celui des policiers honnêtes est mixte. On y décèle même des esquisses d’histoires sentimentales, comme dans la « vraie vie », lorsque Zapotek tente de flirter avec Paula alors qu‘ils surveillent les déplacements de Jules. Ils font contrepoids face à la corruption que représente Saporta : ils sont les flics intègres et tenaces, prêts à se sacrifier pour la Vérité et la Justice. Leur présence détermine les séquences traditionnelles et attendues d‘un film policier : le meurtre de la victime sous le regard impuissant du policier, l‘interrogatoire d‘un témoin, les scènes de filature, les scènes de poursuite (celle dans le métro), les scènes de „planque“ dans l‘appartement saccagé de Jules. Personnages aussi stéréotypés à l‘instar des truands, ils apportent aussi une touche d‘humour au film par leurs jeux de mots, par leurs attitudes parfois caricaturales (lorsque Zapotek se vante d‘être le meilleur coureur et le prouve quelques minutes plus tard en poursuivant à pieds, dans le métro, Jules qui fuit à moto), par les moqueries dont ils sont parfois l‘objet (réaction du vieil homme dans le métro qui présente sa carte d‘ancien combattant alors que Zapotek lui présente sa carte professionnelle de policier). Les attributs des personnages : Le langage argotique du monde de la police, la voiture pour les filatures ou les poursuites dans le Paris nocturne, les revolvers. IV. INTRODUCTION DU FILM PAR L’IMAGE A- Observation et analyse des affiches du film L‘enseignant distribuera aux élèves le document annexe 2 pour l‘observation des affiches du film DIVA * Observation et analyse de l’affiche n°1 (affiche française) 1) Relevez et décrivez avec précision tous les éléments réprésentés dans cette affiche et observez la place qu’ils occupent dans l’image: - Les personnages présents - Les objets ou autres éléments représentés - Les couleurs dominantes - Le titre du film et autres informations textuelles 2) Un personnage est particulièrement mis en valeur. Quelle hypothèse peut-on en tirer sur son rôle dans l’histoire du film? 15 3) Quels sont le(s) personnage(s) et les objets ou éléments qui illustrent directement le titre du film? Quels liens peut-on imaginer entre les autres personnages présents et le titre ? 4) Quelles hypothèses peut-on en tirer sur le genre du film (un film policier, un thriller, une comédie musicale, un opéra filmé) et sur son registre (un film drôle, triste, sentimental, tragique, comique, émouvant, qui fait peur, etc.) ? * Comparaison avec les autres affiches 1) Quels sont les personnages de l’affiche n°1 que l’on retrouve dans les affiches n°2, n°3, n°4 ? 2) Certains d’entre eux ne sont pas présentés de la même manière. Décrivez les modifications apportées dans leur présentation. Quelles informations nouvelles peut-on en recueillir sur les personnages, sur leurs relations entre eux ? 3) Dans quelle affiche apparaissent des personnages nouveaux? Imaginez leur lien avec les autres personnages connus. 4) Quelles informations complémentaires sont données par les textes écrits en anglais ou en espagnol qui apparaissent sur les affiches ? 5) Quelle est la couleur dominante commune aux 4 affiches ? Quelles sont les nouvelles couleurs qui apparaissent dans les affiches n°2 et n°4 ? Que suggère l’introduction de ces nouvelles couleurs ? 6) Quelle affiche vous semble la plus attrayante et donne le plus envie d’aller voir le film ? Pour quelles raisons ? B- Observation de quelques images du film A faire observer par les élèves après le travail d’observation et d’analyse des affiches. Image 1 Titre :........................................ Questions 1) Qui est ce personnage dans le film ? 2) Dans quelles affiches du film peut-on la retrouver ? 3) Décrivez l’expression de son visage. 4) Imaginez le lieu où se trouve le personnage et ce qu’il fait. 5) Quels sentiments vous inspire cette image ? 6) Proposez un titre à cette image. 16 Image 2 Titre :............................................ Questions 1) Dans quelles affiches du film avez-vous déjà remarqué ces deux personnages ? 2) Où se passe la scène ? Que font les deux personnages ? 3) Décrivez leurs vêtements et ce qu’ils tiennent dans la ou (les) main(s). Pouvezvous deviner ce qu’ils font dans la vie ? 4) Imaginez un court dialogue entre ces deux personnages. 5) Proposez un titre à cette image. Image 3 Titre :............................................ Questions 1) Décrivez avec précision ces deux personnages (leurs vêtements, l’expression de leur visage). 2) Dans quelles affiches du film peut-on les apercevoir ? 3) Imaginez le lieu où ils se trouvent et ce qu’ils font. 4) Quel est leur rôle, à votre avis, dans le film ? Justifiez votre point de vue. 5) Quels sentiments vous inspirent ces deux personnages ? 6) Trouvez un titre à cette image. Image 4 Titre :………………………….. Questions 1) Décrivez la scène représentée. 2) Où se passe la scène à votre avis ? 3) Qui sont, à votre avis, les deux personnages présents dans la pièce ? 4) Essayez de deviner ce qui a pu se passer dans ce lieu. 5) Trouvez un titre à cette image. 17 V. INTRODUCTION DU FILM PAR LE THEME DE LA DIVA Ces activités de sensibilisation peuvent constituer un prolongement du travail réalisé à partir des affiches et des images du film. A- Voici la définition du mot Diva que l‘on peut trouver dans le dictionnaire Larousse (2001): „Diva (de l’italien déesse) : cantatrice célèbre“. - Et pour vous , qu‘évoque le mot Diva ? - Quels styles de musique écoutez-vous ?Vous arrive-t-il d’aller à l’opéra, d’écouter de la musique dite classique ? Que ressentez-vous quand vous entendez de l’opéra ? - Pouvez-vous citer ou rechercher sur Internet quelques cantatrices très célèbres disparues ou contemporaines qui ont une renommée de DIVA? - Quels sont d‘après vous les qualités artistiques et personnelles que l‘on attribue traditionnellment à une DIVA ? Peut-elle avoir des défauts? - L‘image n°1 du film représente la Diva du film de Beinex. Retrouvez-vous dans cette image les caractéristiques d‘une Diva ? Justifiez votre point de vue. B- Le dictionnaire du cinéma Larousse donne une définition du mot « diva » dans l’histoire du cinéma : „Le film de diva, né en Italie dans les années 1910, a donné naissance à un type de femme fatale. Pour représenter les sentiments tels que la passion ou le désespoir, le film de diva travaille les éclairages, use des gros plans et de musique dite classique. L’œuvre entière tourne autour de la personnalité d’une femme d’un genre nouveau : dominatrice mais soumise à un destin implacable“. - Comment comprenez-vous le concept „de femme fatale“ ? Si cette femme fatale est une chanteuse d’opéra, comment vous imaginez-vous cette femme ? - Regardez le film de J.J. Beinex en ayant en tête cette définition. Peut-elle s‘appliquer au personnage de Cynthia ? Justifiez votre point de vue . 18 C- Le portrait de la cantatrice Wilhemina Fernandez par J.J. Beinex Dans le texte que vous trouverez en annexe 3, J.J. Beinex raconte sa rencontre avec Wilhemenia Ferenandez, la cantatrice afro- américaine qu‘il a choisie pour le rôle de la Diva. Relisez plus particulièrement la fin du texte à partir de „Au quotidien, elle fit preuve d‘une extraordinaire endurance „ jusqu‘à la fin du texte. 1) Questions sur le texte : • Relevez dans le tableau suivant tous les termes qui caractérisent la personnalité de la cantatrice vue par J.J. Beinex Son apparence physique Ses qualités professionnelles Ses traits de caractères Ses goûts • Expliquez la remarque finale de J.J. Beinex à propos de la cantatrice: „Diva elle était et Diva, je la voulais „ • Quels sentiments éprouve J.J. Beinex pour la cantatrice? Justifiez vos remarques en relevant des expressions ou des phrases du texte. 2) Pour aller plus loin : Expression orale : Partagez-vous le point de vue de J.J. Beinex lorsqu‘il écrit: „ L‘art lyrique (est) une ascèse dont beaucoup d‘acteurs du cinéma auraient dû s’inspirer?“ Expression écrite : Faites à votre tour le portrait de votre „star“ préférée (chanteur, musicien, comédien ou acteur préféré) 19 D- Le mot Diva peut être utilisé comme une comparaison ou une métaphore* pour caractériser l‘attitude, le comportement d‘une femme dans un sens laudatif ou dans un sens dépréciatif: Retrouvez pour chacune de ces comparaisons ou métaphores son expression équivalente : 1) Elle est belle comme une DIVA! a) Elle a chanté avec une grande virtuosité. 2) Elle portait une robe de Diva ce soir b) A cause de ses caprices et de ses là; on ne regardait qu’elle! exigences, elle a fini par agacer tout le monde. 3) Elle a chanté comme une DIVA. c) Il n’est pas toujours facile pour une femme de devenir riche et célèbre. 4) A jouer trop la DIVA, elle a fini par d) Elle est d’une beauté extraordinaire, agacer tout le monde. divine ! 5) N‘est pas DIVA qui veut! e) Elle portait une robe de soirée magnifique ce soir là ; on ne regardait qu’elle ! VI. EXTRAITS DES DIALOGUES DU FILM A- La rencontre entre Alba et Jules Dans la séquence précédente, alors qu’il se trouvait dans un magasin de disques, Jules a remarqué le comportement audacieux d’Alba qui a réussi à voler un disque de jazz à l’insu du vendeur. Jules ayant enfourché de nouveau sa mobylette et écoutant de la musique classique reconnaît soudain dans la rue la jeune fille à sa jupe courte plastic fluo. Il décide alors de l’aborder. Le dessin de sa jupe qui représente l’opéra et la musique lui sert de prétexte pour entamer la discussion. Jules faisant allusion au dessin de sa jupe courte : C’est l’opéra ? Alba : Non, c’est mes fesses Jules : T’inquiète pas, je suis pas de la boîte. T’aime le jazz ? Alba : Evidemment sinon je piquerais du mambo. (faisant allusion à la musique que Jules est en train d’écouter) : Dommage, j’aime que le disco. Le classique me fait pas planer. 20 Jules : J’suis pas un classique, j’suis un lyrique. Ca, c’est une ouverture. Alba : Dépêche toi, parce que je vais bientôt fermer. Jules : Hé, t’inquiète pas, ça t’embête pas trop qu’on cause ? Alba : Si pourquoi ? Jules : C’était toi sur la photo Alba : Non, c’était un crocrodile Jules : C’est quoi ton truc ? Alba : Tiens regarde Jules : Pas con ! Alba : Evidemment, c’est artisanal Jules : Et pour les coffrets, tu fais un pont aérien ? Alba : J’ai un autre truc Jules : C’est quoi ? Alba : Hé, dis donc ! Jules : T’en fauche beaucoup comme ca ? Alba : C’est pas pour moi, c’est pour offrir Jules : A qui ? Alba : T’es pas curieux, comme mec, toi ? C’est pour offrir à un mec qui est dans sa période cool Jules : C’est qui ? Alba : C’est un métèque, un rasta. Jules : Marche pas si vite ! Alba : Un mec qui rêve d’arrêter les vagues. 21 Questions : 1. Que recherche Jules en abordant Alba ? A votre avis, réussira-t-il à parvenir à ses fins ? 2. Comment réagit Alba aux questions parfois indiscrètes de Jules ? Quels traits de caractère révèle Alba à travers ses réparties ? 3. Relevez dans le texte tout le vocabulaire ayant trait à la musique. Jules et Alba ont-ils les mêmes goûts musicaux ? 4. Dans ce dialogue, Jules et Alba utilisent un langage familier : relevez au moins quatre mots ou expressions relevant du registre familier et trouvez un équivalent dans le registre courant. B- La Conférence de Presse Lieu : à l’hôtel où réside la cantatrice. Personnages : la Diva et son impresario, les journalistes, les photographes. Un journaliste se lève et pose la première question : Madame, ce n’est un secret pour personne. Vous avez refusé jusqu’à maintenant d’enregistrer. La qualité d’enregistrement est aujourd’hui très proche de la perfection. Que leur reprochez vous ? Diva avec un accent anglo-américain : Je chante parce j’aime chanter. Toute seule je ne peux pas. J’ai besoin du public. Le concert, c’est un moment exceptionnel pour l’artiste et pour le public. C’est un instant unique. Le même journaliste : Donc vous êtes contre le commerce de l’art! La Diva, sur un ton indigné : Non, non! C’est au commerce de s’adapter à l’art et non à l’art de s’adapter au commerce! Le même journaliste, sur un ton légèrement ironique : Qu’en pense M. Weinstadt votre impresario? Diva, agacée : Posez lui vous-même la question! Le même journaliste : Que pensez-vous des enregistrements pirates? La Diva sur un ton indigné : C’est un vol, c’est un viol! Je les méprise! I have no other comments on this subject. 22 Un autre journaliste: On parle de vous comme une Diva. Avez-vous l’impression d’en être une vraiment ? Et si oui, est-ce que vous faites des caprices ? La Diva, se tournant perplexe vers son impresario : Caprices ? Mr Weinstadt : Whims… Diva répète en souriant, songeuse : Whims?? Questions : 1. Quelles sont les raisons données par la cantatrice pour justifier son refus d’enregistrer sa voix? 2. Quelle conception de l’art suppose une telle attitude? Qu’en pensez-vous? Un artiste de nos jours peut-il faire carrière sans enregistrer de disques ? 3. Quel point de vue a-t-elle sur les enregistrements pirates qui peuvent être faits de sa voix? Partagez-vous ce point de vue? 4. Cette question du piratage vous semble-t-elle toujours d’actualité? Justifiez votre point de vue par des exemples précis. C- « Le zen dans l’art de la tartine » La scène se passe dans l’appartement de Gorodish en présence de Jules et d’Alba Gorodish en montrant le beurre à Jules : Faut qu’il soit à la bonne température. Gorodish poursuivant ses explications devant le regard mi amusé, mi étonné de Jules : La baguette, le couteau, pas trop mince pas trop épais. La mie, fraîche, mais pas trop. Ah, c’est tout un art. On nous envie dans le monde entier pour ça, nous autres les Français! Regarde. Tu étales. Y en a qui se défonce à la colle d’avion, à la lessive, enfin des trucs compliqués quoi. Moi, mon Satori, c’est ça : le zen dans l’art de la tartine. 23 Y a plus de couteau. Y a plus de pain. Y a plus de beurre. Y a plus qu’un geste qui se répète, un mouvement, l’espace, le vide... Questions : 1. Comment imaginez-vous le personnage qui dit ce texte ? dans quel lieu ? dans quelle ambiance ? 2. Imaginez les réactions successives de Jules et d’Alba ? 3. Relevez dans cette recette les ingrédients et les ustensiles traditionnels utilisés pour faire un sandwich. 4. A quelle culture autre que française Gorodish fait-il allusion au cours de sa recette ? De quelle philosophie s’inspire-t-il ? * Pour prolonger l’activité après le visionnement du film : jeu de rôle Choisissez un des deux jeux de rôle : a. Présentez à votre tour une autre recette française ou une spécialité de votre région selon « l'art zen ». b. Présentez de manière originale une recette connue française ou de votre région. Exemple : la recette des crêpes bretonnes à la manière rap, rock, hip-hop ou techno, sur un air de tango, de valse etc. Nombre de participants : deux élèves, le présentateur et un observateur Consignes complémentaires : • Le présentateur de la recette originale devra porter sur lui, comme Gorodish, un objet inattendu qui crée un effet de surprise • Le destinataire observateur de la recette devra par des gestes et des mimiques exprimer ses sentiments, ses réactions face à cette recette originale (ex : surpris, étonné, apeuré, choqué, scandalisé, ravi, charmé … mis en appétit, écoeuré, etc.) • Les élèves spectateurs évalueront à chaque fois la performance du groupe sur un plan linguistique et para-verbal et devront caractériser en français les sentiments exprimés par l’observateur témoin. D- Confrontation entre la diva et son imprésario : La scène se passe dans les appartements privés de la Diva, dans un hôtel luxueux de Paris. 24 Personnages présents : la diva, l’imprésario et Jules témoin muet de la discussion, qui était en compagnie de la Diva au moment où son imprésario entre pour lui faire part de la mauvaise nouvelle. L’impresario : Je viens d’être contacté par des Chinois de Taiwan. Ils prétendent disposer d’un enregistrement de votre dernier récital. Je précise que, si je n’avais pas des raisons de croire à l’existence de cette bande… Diva : Ca ne serait pas la première fois. L'impresario : Si, parce que cette fois ci, l’enregistrement est de qualité parfaite, pris du troisième rang au centre avec un matériel de professionnel. Deuxièmement, Taiwan n’a jamais signé les accords internationaux en matière de copyright et de droit de reproduction. Diva : Alors que veulent-ils ? L`impresario : Ils nous mettent le couteau sous la gorge. Ou bien vous signez avec eux un disque officiel en exclusivité… Diva : Ou bien ? L’impresario : Ou ils piratent, ils se passent de votre accord, ils utilisent l’enregistrement et font imprimer un disque et ils inondent le marché, sans aucune garantie de qualité et sans bénéfice pour vous. Diva : C’est un chantage ! Qu’ils le fassent leur disque. Je ne signerai jamais. L’impresario : Ecoutez-moi bien, je comprends parfaitement vos scrupules, je les ai admis jusqu’à maintenant, je vous ai laissé mener votre carrière à votre guise, au gré de vos fantasmes. C’est très beau la pureté, le refus des conceptions, les journalistes aiment ça, très bien. Mais y a un salaud qui a fait un enregistrement. Il existe, vous ne pouvez pas le nier. Ce n’est plus une question de fierté. Alors, soit vous continuez à faire vos caprices de diva, soit vous vous conduisez en artiste responsable et vous faites ce disque. Nous pouvons très bien retourner la situation à votre 25 avantage. Cindy, excusez moi, vous avez 32 ans, vous ne pouvez vous produire que deux fois par mois, et c’est épuisant, vous avez eu une alerte, souvenez-vous de Munich, une voix n’est pas éternelle, sauf par le disque, et c’est maintenant qu’il faut y penser. Le disque à Taiwan serait une tâche insupportable sur l’émail de votre carrière. Et ne croyez pas qu’ils en resteront là. Ce sera sans précèdent. Vous resterez seule. Réfléchissez, j’ai jusqu’à demain pour donner votre réponse. Diva : Simon, s’il vous plaît, je vous prenais pour un ami. L’impresario : Cynthia, je vous en prie, ne mélangez pas les genres, vous avez le droit de vivre vos contradictions mais vivez les seule. Questions : 1. Relevez les différents arguments utilisés par l’impresario pour convaincre Cynthia d’enregistrer un disque. 2. Relevez dans le discours de l’impresario quelques mots articulateurs qui mettent en évidence la progression de son argumentation (conjonctions de coordination, adverbes, locutions). Classez ces articulateurs selon le lien logique exprimé (addition, lien temporel, cause, conséquence, concession, alternative, etc.) 3. Sur quel ton lui parle-t-il ? Justifiez vos remarques par des indices du texte 4. Quelles sont les différentes réactions de Cynthia face à ces arguments ?Que ressentez-vous pour Cynthia ? 5. Imaginez les sentiments et les réactions de Jules, témoin muet de cette discussion ? VII. PISTES D’OBSERVATION A- Les fils des intrigues • Plusieurs intrigues s’entremêlent dans le film. Voici quatre pistes pour mieux vous y retrouver : - l’enregistrement pirate de la voix de la diva - le réseau de prostitution - la relation Jules / Alba - la relation Jules / Cynthia 26 Après le visonnement du film, retrouvez le déroulement de ces quatre intrigues dont chacune aurait pu faire l’objet d’un film. • Pour les élèves qui auraient des difficultés à mobiliser leurs souvenirs : Proposez aux élèves de retrouver l’ordre chronologique du résumé n° 4 dont vous aurez au préalable mis en désordre les paragraphes. B- Les personnages A priori, on pourrait rencontrer tous ces personnages dans nos vies de tous les jours, que ce soit concrètement ou à travers les informations à la télévision ou dans le journal : le postier chaque matin, des policiers dans un commissariat, une chanteuse lyrique à l’opéra, etc. - Repérez des objets fétiches qui caractérisent chacun des personnages. - Relevez des éléments (traits de caractère, attitude, lieu de vie) qui font pourtant d’eux des personnages romanesques, des personnages de fiction, parfois excessifs ou caricaturaux. C- La musique 1) Les différents fonctions de la musique dans DIVA On remarquera que le réalisateur a savamment orchestré son film afin de faire coïncider lieux, personnages, ambiance, musique. • Repérez des lieux où intervient de la musique (par exemple au début du film, lors de la course poursuite dans Paris, dans l’appartement de Gorodish, à l’hôtel avec Cynthia, lors de la promenade sentimentale de Jules et de la Diva dans un Paris nocturne. • Observez comment la musique est introduite par rapport au lieu : - Quelles sont le séquences où la musique joue un rôle traditionel d’accompagnement musical, de fond musical? - Quelles sont les séquences où la musique est entendue par les protagonistes même de l’histoire? - Observez la relation entre le lieu, l’action et la musique. - Y a-t-il parfois un décalage, un contraste, un effet de surprise ou au contraire un effet de redondance ou une harmonie entre la musique, le lieu et l’action qui se déroule ? 27 2) Le chant de la Wally Dans le film Diva, la musique joue un rôle privilégié car non seulement elle sert à illustrer des séquences en créant une atmosphère particulière mais elle joue aussi un rôle au niveau de l’action même du film puiqu’avec l’air de la WALLY elle est objet de désir pour de nombreux protagonistes (Jules, Alba, les taïwanais). • Repérez les séquences où l’on entend l’air de La Wally, morceau chanté par la cantatrice noire, la diva du film. • Jules traduit à Alba les paroles de l’air de la Wally lorsqu’ils sont dans son appartement. Qui est la Wally ? Quels sentiments exprime ce chant ? Faites une recherche personnelle pour en savoir plus sur l’oeuvre dont est extrait ce chant. • Quels sont les différents personnages dans le film qui entendent cet air ? Quel effet produit-il sur les différents personnages ? Comment le cinéaste at-il traduit par l’image l’effet produit sur les divers auditeurs? • Cet air participe-t-il à la création d’une atmosphère particulière ? Comment la décririez-vous ? • Pourquoi le réalisateur a-t-il choisi cet extrait d’opéra comme pivot de son œuvre ? D- Les voix Concentrez vous sur les voix, les intonations et registres de langue des personnages, notamment les voix des trois femmes : la cantatrice, Alba, et la prostituée assassinée. - Qualifiez ces voix et cherchez dans quelle mesure elles correspondent parfaitement aux personnages. Quels contrastes remarquez-vous ? E- Les lieux 1) Les appartements de Jules et de Gorodish : ce sont des lieux très particuliers, originaux, qui contribuent à l’ambiance onirique ou baroque du film. • Décrivez chacun d’eux (espace, couleurs, décoration, meubles, etc.) • Que révèlent ces lieux sur les personnages qui y vivent ? 2) Le film présente trois visages de Paris : un Paris souterrain (le métro), un Paris quotidien avec ses quartiers populaires ou animé à la lumière du jour (la gare Saint Lazare), un Paris nocturne avec ses beaux quartiers, ses monuments touristiques bien connus. 28 • Repérez ces trois visages de Paris dans le film. A quelles actions et intrigues sont-ils associés ? 3) Un lieu en dehors de Paris constitue une rupture dans le déroulement de l’histoire. • Quel est ce lieu ? • Quelle signification symbolique a ce nouveau lieu par rapport à Paris qui constitue l’univers principal du film? F- Les couleurs Jean-Jacques Beineix a écrit à propos de la genèse de Diva : « Le concept de départ était la réalisation d’un film bleu ». - Dans quelle mesure le réalisateur met-il en œuvre son idée de départ ? - Que vous évoquent les bleus du film ? - Comment les bleus sont-ils nuancés en fonction des lieux et des personnages ? - Quelles autres dominantes de couleur vous semblent importantes ? A quels moments rompent-elles l’harmonie bleue générale ? Quel effet cela produit sur le spectateur ? G- Film de référence, film culte Diva est constitué de nombreux clins d’œil à des films plus anciens et au quotidien des années 1980. Essayez de repérer les références : - aux films français de gangsters de l’après-guerre - à Hollywood de l’âge d’or - aux modes des années 1980 VIII. PISTES D’EXPLOITATION A- Le postier amoureux de la diva Diva est une variation sur le thème maintes fois traité du „ver de terre amoureux d’une étoile“. Tout oppose Jules et Cynthia, sauf l’amour de la musique qui au contraire les unit. - Que trouve Jules en Cynthia et dans sa voix ? - Pourquoi Cynthia accueille-t-elle avec bienveillance l’amour admiratif de Jules ? 29 - En quoi leur amour les fait évoluer ? - En quoi cette relation relève-t-elle presque du conte de fées ? B- Diva, „un polar“ • „Le polar“, c’est un truand ou un escroc et une victime, des bons et des méchants, des policiers et „des indics“, des bandes de malfaiteurs, des milieux pas fréquentables, des commissariats et les bas-fonds de la ville, des coups de feux, des traquenards, etc. - Pourquoi peut-on parler de Diva comme d’un polar ? • Le film policier est assez présent dans le cinéma français des années 1980, notamment l’opposition flic corrompu / policier modèle. - Recherchez d’autres films de cette époque ayant traité ces thèmes, en France ou ailleurs (exemple le plus célèbre en France : les ripoux, comédie de Claude Zidi) et relevez les différentes approches d’une même thématique. • Le film est sorti au début de l’année 1981. Dans son enregistrement, la prostituée Nadia souhaite que Saporta soit condammné à la peine de mort, c’est à dire à la guillotine. C’est une référence qui permet, comme dans tout bon polar, de situer sur un plan culturel et temporel le film. - Que dirait Nadia si l’action du film se passait de nos jours? • Le 10 mai 1981, après la sortie du film, François Mitterrand a été élu président de la République française. - Quelle a été sa première mesure symbolique et spectaculaire ? - Tous les pays du monde n’ont pas adopté cette mesure. Citez quelques exemples. Et chez vous ? - En quoi cette mesure peut-elle être considérée comme un progrès de et pour l’humanité ? C- L’art et la société Dans une interview, le réalisateur Jean-Jacques Beineix évoque Diva et affirme que le thème principal du film, ce sont les enregistrements pirates. • Jules a réalisé un enregistrement pirate de la voix de Cynthia. Elle a toujours refusé d’être enregistrée. - Pourquoi Jules tenait-il à avoir la voix de Cynthia gravée sur une bande ? 30 • Relisez les dialogues de Cynthia avec le journaliste et ceux de Cynthia avec son impresario. Il y est avant tout question de commerce et d’argent. Cynthia y défend au contraire une conception de l’art sans concession. - Pourquoi peut-elle considérer l’enregistrement de sa voix comme la vente de son âme ou comme un viol ? - En quoi un enregistrement peut rompre la magie provoquée par le chant en direct ? - En quoi le point de vue défendu par Cynthia peut apparaître idéaliste ? • Ces dernières années, la possibilité de télécharger des morceaux de musique via Internet et de graver des disques a réveillé le débat sur la propriété intellectuelle. - En quoi ces nouvelles techniques accessibles au plus grand nombre peuvent-elles constituer un danger pour les artistes et pour l’industrie du disque ? - Pensez-vous qu’il soit bon de prendre des mesures pour lutter contre le développement de circuits parallèles du marché de la musique via le Net ? Pourquoi ? • Les Chinois de Diva cherchent à mettre sur le marché mondial l’enregistrement pirate unique effectué par Jules, contre l’avis de l’artiste. - En quoi l’individu qui grave un CD par Internet peut être ou non assimilé aux Chinois du film ? - Et vous, téléchargez-vous régulièrement des morceaux ? Avez-vous mauvaise conscience ? D- Une poésie urbaine Pierre Billard, critique cinéma du magazine Le Point, a évoqué Jules comme un jeune homme réinstallant au cœur sauvage des villes d’aujourd’hui une poésie urbaine. - Comment comprenez-vous cette expression ? Que peut-elle avoir de contradictoire ? - Que pourriez-vous faire pour installer, à votre façon, une poésie urbaine dans votre ville ? E- Un film d’images • « Ce n’est pas le récit qui m’intéressait, mais les images. Diva est un film destiné avant tout à procurer des sensations. Pour moi, le cinéma n’est pas une représentation de la vie, réelle ou fictive. C’est un jeu avec la sensibilité 31 et l’imagination qu’on n’a pas à justifier avec la raison ». Jean-Jacques Beineix à propos de Diva. Pensez-vous que le réalisateur ait atteint son objectif ? Qu’avez-vous ressenti pendant le film ? • Les critiques opposent souvent le cinéma populaire de divertissement au cinéma plus exigeant dit d’auteur où le spectateur peut trouver diverses interprétations de tels ou tels thèmes. - Pensez-vous que Diva appartienne à l’une des deux catégories ? - Au regard de ce que dit le réalisateur dans la citation ci-dessus, en quoi Diva est-il un film à part, difficile classifier ? - Comment comprenez-vous que Diva soit devenu un film culte des années 1980 ? Qu’est-ce qui, selon vous, a caractérisé les années 1980 ? Connaissez-vous des objets cultes des années 80 (séries et émissions télé, objets divers, films, chansons, artistes, etc.) ? Pourquoi sont-ils cultes aujourd’hui ? - Pensez-vous que l’Europe des années 2000 est très différente d’il y a 20 ans ? IX. LA CRITIQUE A- Lecture et analyse du document annexe 4 : La cantatrice et le postier Questions : 1) De quel journal est extrait cet article de presse ? Qui en est l’auteur ? A quelle date a-t-il été écrit ? 2) Relevez les autres indices dans la mise en page du texte qui permettent d’identifier le texte comme un article de presse. 3) Cet article se compose de trois parties bien distinctes : repérez les et donner un titre à chacune d’elle. Quelles conclusions en tirez-vous sur les fonctions d’un article critique sur un film ? 4) L’auteur porte un jugement sur le film Diva : est-il dans l’ensemble positif (appréciatif) ou au contraire négatif (dépréciatif) ? Justifiez votre réponse en relevant avec précision les diverses appréciations du critique. 32 5) Identifiez et expliquez la figure de style utilisée par le critique dans les phrases suivantes : « Delacorta, auteur du roman qui servit de base au scénario, avait servi la soupe. Reste que le cinéaste l'a poivrée excellemment ». B- Lecture et analyse des documents annexes 5 et 6 Questions : 1) Comparez le point de vue des auteurs de ces deux articles avec le point de vue donné dans le document annexe 4. Est-il le même ? 2) Justifiez votre réponse en relevant et en classant dans le tableau suivant les diverses appréciations données par les deux auteurs sur les différentes caractéristiques du film. Caractéristiques du film L’intrigue Appréciations des critiques relevées dans les documents annexes 5 et 6 La mise en scène /l’adaptation cinématographique Le décor Les images Les acteurs /leur jeu /leur performance C- MELI-MELO Associez l’adjectif qui convient au nom pour retrouver les appréciations que vous avez lues dans les articles précedents. Choisissez en quatre et réutilisez chacune d’elle dans une phrase. Noms Adjectifs Une intrigue artistique Des décors admirable Un garage amoureux Une logique hyperréaliste 33 Une cantatrice d’une beauté Une soupe Un couple Une mise en scène Des scènes de poursuite Un travail photographique Une mégalomanie Un jeune postier imperturbable grandiose incroyable frénétiques bien poivrée compliqué peu banal baroques D- A vos plumes ! • Et vous, avez-vous aimé le film DIVA ? Donnez votre réponse en utilisant un adverbe ou une locution du tableau suivant : Pas du tout Sans plus Un peu Très peu Comme çi, comme Beaucoup ça Moyennement Passionnément A la folie Enormément Follement AIMER OU NE PAS AIMER DIVA Vraiment beaucoup • Rédigez un court texte de dix lignes maximum dans lequel vous justifierez votre point de vue personnel sur le film en développant au moins trois arguments. X. FICHES-OUTILS A- Lexiques 1) Lexique musical (d’après le Petit Robert) Opéra : poème, ouvrage dramatique mis en musique, dépourvu de dialogue parlé, qui est composé de récitatifs, d’airs, de chœurs et parfois de danses avec accompagnement d’orchestre. Jazz : musique issue de la musique profane des Noirs des Etats-Unis. Mambo : danse et musique à deux temps, apparentée à la rumba. Disco : musique d’origine américaine, inspirée du jazz et du rock, simple et directe, appréciée pour la danse Classique : musique des grands auteurs de la tradition musicale occidentale. 34 Lyrique : destiné à être mis en musique et chanté avec accompagnement, joué sur scène. Ouverture : morceau, généralement conçu pour un orchestre, par lequel débute le plus souvent un ouvrage lyrique. 2) Lexique de la criminalité dans Diva • Noms : Le chantage : action d’exiger de quelqu’un de l’argent ou quelque avantage sous la menace d’une imputation diffamatoire, de la révélation d’un scandale Un enregistrement pirate : enregistrement clandestin, illicite Une filature : action de filer, de suivre quelqu’un pour le surveiller Un flic : terme argotique désignant un policier L’intégrité : état d’une personne intègre ; honnêteté, incorruptibilité. Une intrigue : ensemble des événements qui forment le noeud d’une pièce de théâtre, d’un roman, d’un film Un justicier : personne qui agit en redresseur de torts, vengeur des innocents et punisseur des coupables Un polar : roman policier La pègre : voleurs, escrocs considérés comme formant une sorte de classe sociale Une rapine : vol, pillage La traite des femmes (ou traite des blanches) : délit consistant à entraîner ou détourner des femmes en vue de la prostitution Un traquenard : piège, embûche Un truand : homme du « milieu », souteneur ou voleur • Verbes : Compromettre : nuire à la réputation de Corrompre : engager quelqu’un par des dons, des promesses ou par la persuasion, à agir contre sa conscience, son devoir Dénoncer : faire connaître une mauvaise action, désigner comme coupable. Etre à la solde de quelqu’un : être payé par quelqu’un, acheté par quelqu’un Saccager : mettre en désordre, bouleverser Sauver : faire échapper quelqu’un à un danger Traquer : poursuivre quelqu’un, le poursuivre dans sa retraite • Adjectifs : Véreux : malhonnête Patibulaire (une mine patibulaire) : inquiétant, sinistre 35 3) Lexique pour analyser un texte Comparaison : rapport établi entre un objet et un autre terme, dans le langage Laudatif : qui contient une éloge, élogieux, louangeur ; antonyme de dépréciatif Métaphore : comparaison qui ne comprend aucun mot de comparaison. La métaphore établit une relation d’identité entre le comparant et le comparé. Critiquer : faire l’examen des ouvrages d’art et d’esprit pour en faire ressortir les qualités et les défauts Une critique : jugement porté sur un ouvrage de l’esprit, sur une oeuvre d’art Un critique : personne qui exerce la critique, qui juge des ouvrages de l’esprit, des oeuvres d’art ; on parle de critique littéraire, de critique d’art, de critique du cinéma. B- Références bibliographiques et sites internet 1) Bibliographie L’Avant-Scène, n°407, décembre 1991 Cinéma, n°269, mai 1981 Le Canard enchaîné, n°3151, 18 mars 1981 Combat Socialiste, 24 mars 1981 La Croix, 14 mars 1981 L’Express, 3 avril 1981 Le Figaro, 11 mars 1981 Le Figaro, 8 mars 1982 Film français, n°1855, 24 avril 1989 Herald Tribune, 6 août 1982 L’Humanité, 11 mars 1981 L’Humanité, 20 mars 1981 International Herald Tribune, 4 février 1981 Le Matin, 11 mars 1981 Le Matin, 14 mars 1981 Le Matin, 25 décembre 1984 Minute, 18 mars 1981 Le Monde, 18 mars 1981 Le Monde, 9 avril 1981 Les Nouvelles littéraires, 13 mars 1981 Le Point, n°444, 23 mars 1981 Positif, n°243, juin 1981 La Revue du cinéma, n°361, mai 1981 2) Sites Internet • Sites sur le film Diva www.bifi.fr/cgi/cinesource/0.sh?radiobutton=F&langue=francais&textfield=diva www.cinefil.com/newsiteweb/FicheFilmImpression.cfm?ref=3363 www.cinemapassion.com www.ecrannoir.fr/real/france/beineix.htm www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=2989.html www.cinema-francais.net/Beineix1.html www.filmfestivals.com/directorscut/jjbeineix/fr_index.html www.sitescraper.co.uk/dvd/Diva.html www.dvd-narr.info/kritiken/diva_rc2.html www.culturalianet.com/art/ver.php?art=15384 36 • Sites permettant d’élargir la recherche à partir du film - • Sur l’opéra Présentation de l’opéra national de Paris : www.opera-de-paris.fr Les plus grandes cantatrices d’avant et d’après-guerre selon un sondage du mensuel opéra international : http://perso.wanadoo.fr/operavivi/pagesl/sond_%20opi.htm Rétrospective sur la carrière de Wilhelmenia Fernandez (Cynthia dans Diva de J.-J. Beineix) : www.fezfestival.org/prg2000/frartistes/fernandez.html Concernant Maria Callas : www.callas.it • Sur le roman policier - Références bibliographiques sur le roman policier d’expression française : www.membres.lycos.fr/bernadac/roman12.html - Sur le roman policier de Delacorta : www.sdm.qc.ca/txtdoc/pol/adu/DELACORTA.html • Sur l’utilisation du cinéma en classe - www.ac-nantes.fr/peda/disc/lettres/ressourc/college/painchoc/painchoc.html - www.artsculture.education.fr/cinema/default.htm 3) Documents annexes • Document annexe 1. Entretien avec Jean-Jacques Beineix paru dans Le Monde du 9 avril 1981 : « La métaphore de l'alpiniste », par Claire Devarrieux. • Document annexe 2. Les affiches du film. • Document annexe 3. Texte extrait de la pochette du CD concernant la rencontre de Jean-Jacques Beineix avec Wilhelmenia Fernandez : « Wilhelmenia Fernandez », par Jean-Jacques Beineix. • Document annexe 4. Article paru dans La Croix du 14 mars 1981 : « La cantatrice et le postier », par Jean Rochereau. • Document annexe 5. Article paru dans L’Express du 3 avril 1981. • Document annexe 6. Article paru dans Le Monde du 18 mars 1981 : « Diva de Jean-Jacques Beineix », par Jacques Siclier. 37 Document annexe 1. Entretien avec Jean-Jacques Beineix paru dans Le Monde du 9 avril 1981 : « La métaphore de l'alpiniste », par Claire Devarrieux. Avec Jean-Jacques Beineix, réalisateur de „Diva“ La métaphore de l’alpiniste „Je n’ai pas d’antécédents particuliers, dit JeanJacques Beineix, j’ai eu des liens avec des gens, donc avec des vies exceptionnelles. Ma seule qualité de départ a été de savoir ouvrir mon regard. J’ai eu une enfance objectivement heureuse. J’ai été „vidé“ des lycées et des cours, ce qui ne m’a pas empêché d’avoir mon bac. J’ai commencé des études de médecine, je ne suis pas allé jusqu’au bout, à cause d’une grande immaturité – je suis toujours arrivé trop tôt, à l’école, à l’université – et j’étais trop fasciné par le monde extérieur. Mes grandsparents me racontaient des histoires. Mon grand-père m’a fait traverser deux guerres, c’est pourquoi les gens d’une autre époque, je peux parler avec eux, je les comprends tellement mieux qu’ils ne le pensent. Mon père me montrait des expositions, il m’a donné envie d’apprendre. Ma mère était plus artiste. Il y a eu les cours de dessin, de musique, le cinéma de quartier, la cinémathèque d’arrondissement. Il y a eu le premier appareil photo, la première caméra, mon goût des objets, des ambiances et des climats, cette question de l’utilité, ou non, de reproduire. Et les premières inhibitions, l’écart entre le désir de représenter, le plaisir et l’obligation. Je suis devenu un voyeur qui ne sait pas communiquer et qui a besoin de médiatiser sa tendresse, ses sentiments. C’est une infirmité, le cinéma, et si je pouvais faire un pacte avec le diable, je ne serais pas cinéaste. Pour cette raison, je suis très touché par la violence avec laquelle on a accuilli Diva. Dans les deux sens. C’est une communication terriblement dérisoire, puisqu’elle a lieu à travers un objet, mais sur cet objet, les gens me parlent, et certains me détestent. Avec d’autres, j’ai un langage commun: des images, des histoires, sans souci de la logique, sans respect de la structure policière, en en gardant les constituants. 38 Un homme-travelling Le cinéma correspond à mon incompétence. On peut appliquer cette métaphore: un des plus grands alpinistes actuels grimpe en solitaire sur une paroi lisse. Tout à coup, il ne peut plus ni avancer ni reculer. Et pourtant, il faut qu’il monte. Il plante un clou, qui ne tient pas. Un deuxième qui ne tient pas. Ni le troisième. Il faut qu’il ait une inspiration géniale. Alors il met les trois clous ensemble, il obtient un polygone de forces, il est sauvé. Moi, je ne suis pas complètement peintre, ni architecte, directeur d’acteurs, photographe. J’ai seulement plus de contacts avec les volumes, la lumière, et les êtres, je les considère trop de cette façon. Je vais de plus en plus travailler la philosophie, l’esthétique, mes rapports avec les gens. Peut-être, un jour, arriverai-je ainsi à un degré supérieur. On m’a dit que mon film avait un côté „pub“. Mais quand on s’exprime, c’est avec le vocabulaire de l’époque. La pub, c’est aussi une application des sciences humaines, ça existe, ça fait partie de l’environnement, dont j’intègre ce que je perçois. Par quel hasard aurais-je été mis à l’abri? Comment passer à côté de l’ère de la hifi et des automobiles? Je me promène avec ma caméra parce que je vis en automobile depuis trente-quatre ans, je suis un „homme travelling“. Les paysages, je ne les vois que furtivement. Alors au lieu de regarder mes voitures de luxe détruites, porteuses de messages, on parle d’hyperréalisme. Le cinéma a trente ans de retard sur les arts plastiques. C’est l’art le plus réactionnaire, le plus rétrograde. Et si on intègre les connaissances de son temps, on devient „mode“! On subit encore trois tares: la littérature, une vieille perversion chez les réalisateurs. Le cinéma d’auteur (être un homme-orchestre, faire oeuvre personnelle, autobiographique, Diva est un film de commande, Irène Silbermann m’a fait lire le livre de Delacorta, j’ai fait aussi oeuvre personnelle). Enfin, le réalisme, la réalité, morts, tués légitimement par le direct et la télévision. Qu’est-ce qu’on peut faire de mieux que BorgMcEnroe, un hélicoptère au dessus de Saigon, le premier pas de l’homme sur la lune, la Pologne en direct, la mort en direct? Qu’est-ce qu’on peut faire de mieux? S’échapper. Le réalisme des années 80 est né du besoin d’échapper à une réalité, celle d’un cinéma archaïque, de 39 s’évader du roman. On m’a dit: on va briser cette architecture classique, on est sorti dans la rue, la caméra s’est allégée. Tout à coup, on s’apercevait que les gens ne s’embrassaient pas comme dans les films. Aujourd’hui, ces structures ont vieilli à leur tour, le cinéma est redevenu une routine. Il faut donc s’en sortir et cette nouvelle vague arrive“. Propos recueillis par Claire Devarrieux 40 Document annexe 2. Introduction du film par les affiches Affiche 1 d’origine française Affiche2 d’origine anglo-saxonne Affiche 3 d’origine anglo-saxonne Affiche 4 d’origine espagnole 41 Document annexe 3. Texte extrait de la pochette du CD sur la bande originale du film DIVA : « Wilhelmenia Fernandez », par Jean-Jacques Beineix. Wilhelmenia Fernandez par Jean-Jacques Beineix La première fois que je l’ai vue, elle brisait avec une autorité sans égal des assiettes sur l’immense scène de l’Opéra de Paris. Musetta noire et capricieuse, habillée de velours rouge, belle et violente, elle me fascinait déjà, et puis il y a eu la voix ronde et veloutée, l’engagement physique dans le chant... J’avais découvert ma DIVA. Plusieurs mois de recherches, d’errances, de rencontres, les divas noires de Londres, Munich, NewYork, une liste que nous croyions complète et toujours à laquelle il fallait ajouter un nom. Après le spectacle je ne suis pas allé la voir: il fallait attendre que l’émotion se calme, alors seulement je saurais si le rêve était réalité. Réalité du lendemain, dans mon bureau anonyme, elle est apparue, robe rouge, immense châle violet, elle était simple et je me trouvais soudain très compliqué de demander à cette femme de jouer une diva. Elle était accompagnée de sa fille, Sheena, espiègle, rieuse, d’une insatiable curiosité, d’un incoercicible besoin de vie. Nous avons parlé; elle ne connaissait rien du cinéma, je ne connaissais rien de l’opéra, tout était donc possible, pourquoi ne pas faire un opéra policier? Au café, elle a commandé la plus américaine des salades françaises; en vrac, je lui parlais de cinéma, de musique, de la passion que les chanteuses provoquaient; elle m’écoutait, racontait l’église où elle avait appris le chant, ses voyages, la difficulté d’être chanteuse et mère à la fois. Sheena ne parvenait pas à finir une glace aussi haute que les buildings de Manhattan. J’expliquais à Wilhelmenia les risques de l’entreprise que je lui proposais; aucune garantie pour elle, mon total manque de notoriété, l’aspect tout à fait non conventionnel que je voulais donner au film, les risques que le jugement du milieu de l’opéra pourrait ultérieurement lui faire courir; je lui expliquais aussi les raisons qui me poussaient à faire appel à une véritable chanteuse plus qu’à une actrice de cinéma. Nous avons remonté la rue royale vers l’église de la Madeleine; elle tenait contre son châle le script et 42 je me demandais si Diva vaudrait pour elle une messe, même chantée? Assis à l’ombre lumineuse d’une terrasse chic je regardais le visage de Wilhelmenia, il y avait une nappe blanche entre nous, sur sa peau noire jouaient des reflets, elle portait une robe jaune. Sheena faisait du patin à roulettes entre les tables du restaurant, cela provoquait une certaine effevescence car elle n’avait pas de patins à roulettes aux pieds... En regardant Wilhelmenia je pensais qu’elle était Cynthia Hawkins, la diva et que personne d’autre ne jouerait le rôle. Elle pensait autrement, je lui posais incidemment la question: „Alors le script?“ Elle avait une expression que je devais souvent retrouver, une façon de plisser les yeux, un moue des lèvres, quelque chose qui se situait entre le désarroi et l’incompréhension. Elle me déclara qu’elle trouvait le script trop „black“. Il y avait de quoi, une histoire trop „noire“, faite par un blanc, une chanteuse sophistiquée qui ne lui ressemblait pas, des prostituées noires, un univers de nuit aux sombres implications, et puis aussi la peur qu’elle avait d’une récupération, d’une utilisation raciale, Divas noires, monstres sacrés d’un monde de blancs. Je comprenais tout cela, mais je savais aussi que personne d’autre ne ferait le film. J’aimais son refus; combien étaientelles, celles qui auraient décliné l’offre d’un rôle important au cinéma, même avec un inconnu, même avec l’incertitude de l’issue. Elle était honnête et c’était un trait de son caractère que j’aimais; Wilhelmenia avait un système de valeurs auxquelles elle croyait, elle croyait en Dieu, elle croyait au travail, en la musique, à l’universalité du chant. Je lui expliquais une seule chose, ma sincérité et nous sommes devenus complices, nous avons ri des gens, de nous même et de notre chance d’être en vie au milieu d’un système qui voulait des monstres et n’avait de cesse que de les faire entrer dans des boîtes dûment étiquetées pour qu’ils n’en sortent jamais. Nous avons tenu nos engagements l’un envers l’autre: le film a été une belle histoire. Cinéma, tournage:aventure de l’exceptionnel conjugué au quotidien. En Wilhelmenia cohabitaient deux femmes, deux passions, celle de l’art lyrique et celle d’être mère; elle vivait pour Sheena et l’opéra était sa raison de vivre. Au quotidien, elle fit preuve d’une extraordinaire endurance, elle travaillait en véritable professionnelle, ponctuelle, digne, assidue. Je comprenais à travers elle que l’art lyrique était une ascèse dont beaucoup d’acteurs du cinéma auraient dû s’inspirer. Elle faisait d’immenses efforts pour améliorer son français dont elle ne comprenait pas un mot avant le tournage. 43 Qualités, défauts, qualité des défauts, défauts des qualités. Elle aimait le violet qui lui allait à ravir, elle aimait les chaussures dorées, elle avait une force de vie, un entrain absolument extraordinaire et parfois elle perdait l’un et l’autre en l’epace d’un instant, sans raison apparente, pour les retrouver l’instant d‘après. Elle n’aimait pas trop la cuisine française, elle trouvait barbares ces choses mortes dont nous garnissions nos assiettes avec ostentation, elle préférait une bonne pizza. Elle avait une peur farouche de la saleté. Elle trimballait avec elle un incroyable bazar d’objets, de souvenirs, collectionneuse et fétichiste. Elle changeait de coiffure, de vêtements avec une facilité déconcertante, tout lui allait. Elle était courageuse, je l’ai vue chanter Luisa Miller avec une forte fièvre. Elle était aussi facétieuse, joueuse et coquette, imprévisible, timide à l’excès, féminine et prude. Il est impossible de réduire un être à quelques qualités et défauts, je garde le souvenir d’une femme passionnée, envoûtée par la musique, terrorisée avant un concert, endiablée après, toujours prête à s’enflammer pour une note. Diva elle était et Diva, je la voulais. Je n’oublierai jamais, quand nous allâmes à Londres, avant le film, pour l’enregistrement de la musique, son émotion et la mienne lorsqu’elle s’est avancée, seule, face aux quatre-vingt musiciens de l’orchestre de Londres, et lorsque, enfin libérée du trac qui l’oppressait, sa voix s’est élevée... Pour cette „Wally“ je lui serai toujours reconnaissant. J.J.B 44 Document annexe 4. Article paru dans La Croix du 14 mars 1981 : « La cantatrice et le postier », par Jean Rochereau. La cantatrice et le postier „Diva“, de Jean-Jacques Beineix, ne ressemble à rien de connu Décidément, la toute dernière génération de cinéastes est prometteuse. Peu de temps après Une salle affaire, d’Alain Bonnot, qui ressuscitait le „film noir“ français, voici Diva, premier film de JeanJacques Beineix, dont l’originalité est d’amalgamer le genre „polar“ à la grande musique. Bien sûr, Delacorta, auteur du roman qui servit de base au scénario, avait „servi la soupe“. Reste que le cinéaste l’a poivrée excellement. Soit donc une cantatrice noire, d’une incroyable beauté, qui s’est toujours refusée à enregistrer un seul disque. Le récital, et rien d’autre. Alors, forcément, les amateurs de „cassettes pirates“ la prennent en filature. L’un d’eux – qui le croira? – est un jeune postier, mélomane fou d’opéra. Au théâtre des Bouffes-duNord (sic!), il réussit à capter, merveilleusement, la voix de Diva. En prime, il subtilise sa robe de scène. Au fil de sa tournée, il recueille (sans le savoir) dans la sacoche de son vélomoteur une autre cassette, celle enregistrée par une prostituée dénonçant, comme proxénète et trafiquant de drogue, rien de moins qu’un „divisionnaire“ de la criminelle. A partir de là, tout s’embrouille, apparemment; tout s’organise, au vrai, avec une imperturbable logique. En butte aux poursuites de deux groupes d’ennemis: des chinois de Taïwan, pour la voix de la diva; les complices du flic véreux, pour les aveux de la prostituée, le postier s’en sort merveilleusement. Puissamment aidé, il est vrai, par un couple peu banal: une jeune vietnamienne, un „dingue“ de musique, plus ou moins truand. Tourné dans des décors baroques, aux franges du cauchemardesque, bien que la destination initiale des lieux soit banale (un garage en étages, un entrepôt désaffecté), Diva vous fait aller de surprise en ébahissement. Le „suspense“ y est aussi bien servi que l’art lyrique. La soprano Wilhelmenia Wiggins Fernandez a vraiment une „voix d’or“ et le jeune Frédéric Andrei (le postier) beaucoup de talent. Jean Rochereau 45 Document annexe 5. Article paru dans L’Express du 3 avril 1981. Diva L’exercice de la mise en scène considéré comme un délire de brocanteur. La diva en question se produit dans un théâtre en ruine, son fan le postier vit dans un garage hyperréaliste, chez l’aventurier de service on circule en patins à roulettes, 20000 mètres carrés de verrière surplombent le moindre tête-à-tête, et si l’on part en week-end, c’est évidemment dans un phare. Résultat: le propos du film disparaît sous le fatras du décor. De Hitchcock, sur les traces de qui il semble vouloir boiter, Jean-Jacques Beineix aurait dû retenir qu’une image se compose, qu’elle ne se meuble pas. P. Th. 46 Document annexe 6. Article paru dans Le Monde du 18 mars 1981 : « Diva de Jean-Jacques Beineix », par Jacques Siclier. „DIVA“ De Jean-Jacques Beineix „Diva“, roman policier de Delacorta – qui appartient d’ailleurs à une trilogie dont le premier volet est „Nana“ et le troisième „Luna“, - est construit, écrit, un peu à la manière de Dashiell Hammett. Il semble tout préparé pour un „film noir“ d’action, de comportement, qui n’aurait pas besoin de fioritures. L’adaptation cinématographique qu’en propose Jean-Jacques Beineix est aberrante, moins par les changements de l’intrigue (inutilement compliquée) que par la prétention d’une mise en scène se voulant grandiose, lyrique, démesurée dans l’hyperréalisme des décors, la frénésie des scènes de poursuite et de violence. C’est super-chic, avec un travail photographique admirable qui semble avoir été mis - comme le budget sans doute très important – au service d’une mégalomanie „artistique“. Les amateurs d’opéra peuvent être séduits, fascinés par la beauté, l’allure, la voix de la cantatrice Wilhelmenia Wiggins Ferandez dans le rôle de la diva Cynthia Hawkins, dont un jeune postier amoureux (Frédéric Andrei) prend l’enregistrement pirate d’un concert. Si l’on pouvait „pirater“ les images de ce film, on garderait les scènes où apparaît la chanteuse et on mettrait le reste au panier. Jacques Siclier 47