festivals - Scènes Magazine

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festivals - Scènes Magazine
scènes
magazine
festival amadeus :
jean-christophe spinosi
crédit photo © Didier Olivre
ISSN 1016-9415
274 / juillet - août 2015
CHF. 12.-- 12 €
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66 cinéma
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cine die / raymond scholer
neuchâtel : international film festival / frank dayen
locarno festival / émilien gür
les films du mois / serge lachat
les cinémas du grütli / christian bernard
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théâtre de carouge : saison 2015-2016 / frank fredenrich
bonlieu, annecy : saison 2015-2016 / frank fredenrich
la comédie : saison 2015-2016 / laurence tièche-chavier
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palerme : un ballo in maschera / françois jestin
munich : lulu / christophe imperiali
new york : fin de saison / frank fredenrich
marseille : falstaff / françois jestin
nice : la juive / françois jestin
saint-étienne : le marchand de venise / françois jestin
avignon : le braci / françois jestin
strasbourg : ariane & barbe-bleue / éric pousaz
turin : i puritani / gabriele bucchi
arènes d’avenches : le barbier de séville / gabriele bucchi
entretien : bernard foccroulle / françois jestin
arènes de vérone / françois jestin
rossini opera festival pesaro / françois jestin
festival de salzbourg / éric pousaz
zurich : la verità in cimento / éric pousaz
théâtre
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opéra
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spectacles
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musique
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théâtre de l’orangerie : été 2015 / laurence tièche chavier
les grands interprètes : saison 2015-2016 / martine duruz
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la roque d’anthéron / maya schautz
arles : rencontres photographiques / bertrand tappolet
la bâtie festival de genève / jérôme zanetta
rencontres musicales d’évian / viviane vuilleumier
la chaise-dieu / christian wasselin
festival berlioz / pierre-rené serna
radio-france & montpellier / françois jestin
montreux jazz festival / frank dayen
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entretien : tobias richter / éric pousaz
portrait : mikhail pletnev / yves allaz
entretien : patrick peikert / régine kopp
l’orchestre national de france / christian wasselin
portrait : frank dupree / pierre jaquet
entretien : edgar moreau / martine duruz
concours geza anda / emmanuèle rüegger
european philharmonic of switzerland / régine kopp
septembre musical
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orchestre français des jeunes / frank fredenrich
portrait : jean-frédéric neuburger / pierre-rené serna
portrait : ivo pogorelich / yves allaz
festivals
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bellerive : 20e édition / christian bernard
tannay : variations musicales / kathereen abhervé
entretien : françois-xavier poizat / christian bernard
entretien : martin t:son engstroem / éric pousaz
verbier : une valeur sûre / michel perret
festival d’ernen / beata zakes
cernier : les jardins musicaux / frank fredenrich
cernier : philippe albera / martine duruz
entretien : jeannette fischer / martine duruz
genève : musiques en été / martine duruz
portrait : stephan genz / françois lesueur
portrait : andreas scholl / françois lesueur
sion festival / yves allaz
en suisse : rencontres musicales de champéry / festival de
musique des haudères / piano à saint-ursanne / yves allaz
festival amadeus : présentation / frank fredenrich
entretien : jean-christophe spinosi / pierre-rené serna
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fondation bodmer : michel butor / émilien gür
fondation beyeler : marlene dumas / nadia el beblawi
mémento beaux-arts : france
musée de l’abbaye, st. claude : pierre lesieur
mémento beaux-arts : ailleurs
musée thyssen-bornemisza, madrid : zurbaran
mémento beaux-arts : suisse romande
genève : peintures italiennes et espagnoles
mémento beaux-arts : suisse alémanique
zurich : la photographie en couleurs avant 1915
musée de l’élysée : reGeneration / nadia el beblawi
musée des beaux-arts, lausanne : kader attia / nadia el beblawi
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jeu de paume : germaine krull, valérie jouve / chr. pictet
théâtre de la ville : golem / stéphanie nègre
théâtre des champs-élysées : still current / stéphanie nègre
opéra : arthus couronné / pierre-rené serna
chronique des concerts / david verdier
mémento expositions
maison européenne de la photographie : lartigue
mémento théâtre
comédie-française : la maison de bernarda alba / p.-r. serna
théâtre des bouffes du nord : le bourgeois gentilhomme
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expositions
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paris
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ailleurs
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93 les mémentos
chronique lyonnaise / frank langlois
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Bulletin de commande à la page 55
SAISON
2015 —2016
Michel Bou jenah, Brigitte Rosset,
Patrick Lapp, Joseph Kessel, Albert Camus,
Jean Racine, Molière, Magie, Théâtre visuel,
Musique classique…
EDITO
L’été
des festivals
en Suisse et ailleurs
direction
Frank Fredenrich
comité de rédaction
Christian Bernard, Serge Bimpage,
Françoise-Hélène Brou, Laurent
Darbellay, Frank Dayen, Martine
Duruz, Frank Fredenrich,
Jérôme Zanetta
éditeur responsable
Frank Fredenrich
publicité
bimpage-communication
Viviane Vuilleumier
secrétaire de rédaction
Julie Bauer
collaborateurs
Kathereen Abhervé, Yves Allaz,
Philippe Baltzer, Julie Bauer,
Eléonore Beck, Nancy Bruchez,
Gabriele Bucchi, Romeo Cini,
Sarah Clar-Boson, Gilles Costaz,
Martina Diaz, Catherine Graf,
Emilien Gür, Bernard Halter,
Christophe Imperiali, Pierre Jaquet,
François Jestin, Régine Kopp,
Serge Lachat, Frank Langlois,
David Leroy, François Lesueur,
Anouk Molendijk, Paola Mori,
Lou Perret, Michel Perret, Eric Pousaz,
Stéphanie Nègre, Christine Pictet,
Christine Ramel, Serene Regard,
Christophe Rime, Julien Roche,
Emmanuèle Rüegger, Maya Schautz,
Rosine Schautz, Raymond Scholer,
Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet,
Laurence Tièche Chavier, David
Verdier, Valérie Vuille,
Christian Wasselin, Beata Zakes
maquette : Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
Les Carrières de Rognes, un lieu de concert de La Roque d’Anthéron, crédit photo : Xavier Antoinet
Le prochain numéro de Scènes Magazine
paraîtra début septembre 2015
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le cinéma au jour le jour
Cine Die
Far East Film Festival 17 (suite)
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Chine
Brotherhood of Blades de Yang Lu se déroule au 17e siècle à la fin
de la dynastie Ming et entrelace la vraie histoire de la chute de l’eunuque
Wei Zhongxian avec des trames inventées de malgouvernance et de
conspirations de palais. Le récit s’attache à trois membres de la police
secrète (Jinyiwei), qui exécutent des assassinats sur ordre supérieur, et que
lient des liens indéfectibles de loyauté. Or, chacun des trois cache un secret inavouable : le leader du groupe, Shen Lian, est amoureux d’une courtisane dont il aimerait racheter la liberté ; l’aîné, Lu Jianxing, est prêt à
débourser des pots-de-vin pour obtenir de l’avancement ; le plus jeune, Jin
Yuchuan est la victime d’un maître-chanteur qu’il a connu par le passé,
lorsqu’il était simple brigand. Ces trois as en arts martiaux ont donc
urgemment besoin d’argent. Parallèlement, le nouvel empereur,
Tchongzhen, veut se débarrasser de l’eunuque Wei qu’il considère comme
une menace pour le trône. Le chef de la police secrète, Zhao, confie l’exécution au trio. Mais le très riche Wei leur offre une fortune, s’ils lui lais-
Cecilia Liu et Chen Chang dans «Brotherhood of Blades»
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HongKong
Gangster Pay Day de Po-Cheung Lee est une délicieuse romance
entre Ghost, gangster débonnaire et vieillissant, auquel Anthony Wong
prête sa tronche mélancolique, et la jeune Mei, qui essaie de maintenir à
flot le snack-bar hérité de son père. Ghost est le patron d’un nightclub à
karaoké convoité par son fourbe cousin Bill qui veut en faire une plaque
tournante de la drogue. Ghost refuse et cherche à investir ailleurs. Il vient
d’enterrer sa mère et s’arrête par hasard dans l’estaminet de Mei. Il découvre qu’elle est également en deuil et criblée de dettes. Les deux se consolent mutuellement et pour conquérir le cœur de la belle, le quinqua rachète ses dettes. Mais Mei lorgne plutôt du côté du bras droit de Ghost, Bill,
un jeune Adonis aux mèches blondes. Le mélange astucieux de tendresse
amoureuse, d’humour bon enfant et décalé, et de drame imprévu constitue
une approche hybride bienvenue qui permet de garder les traditionnels éléments du polar hongkongais, tout en en renouvelant les formes. Les aficionados reconnaîtront ainsi avec plaisir, parmi les nervis de Ghost, Frankie
Ng et Michael Chan qui ont campé des dizaines de mauvais garçons dans
les années 80 et 90 : ici, ils s’efforcent de mijoter des omelettes et des
petits pains.
Alors qu’Anthony Wong doit se contenter de rêver à une femme
jeune, Simon Yam, dans la même tranche d’âge, a le droit au 7e ciel avec
une lycéenne dans Sara de Herman Yau. La petite, violée par son beaupère, s’est enfuie de la maison et vit d’expédients. Un beau jour, elle se
déniche un papa gâteau en la personne de ce placide pêcheur du dimanche
qu’elle observe depuis quelque temps. Quelques gâteries spontanées plus
tard, le monsieur, qui s’avère être un ponte du Département de
l’Instruction Publique, offre à Sara de lui payer ses études et aussi un petit
appartement où elle pourra le recevoir. Mais quand, après avoir fini ses
études de journalisme, elle entend faire valoir des droits plus importants
sur son amant, cet honorable père de famille coupe les ponts. Sara, pour se
consoler, se paie un voyage d’agrément à Bangkok. Afin d’enquêter sur
les dessous de l’esclavage sexuel, elle loue les services d’une adolescente, rachètera celle-ci à son proxénète et la ramènera dans son village natal,
reproduisant en quelque sorte la générosité que lui a prodiguée son bienfaiteur. Au-delà de son côté édifiant, le film aborde de façon assez frontale la question de la prostitution touristique, dont les sources de revenu
principales sont les clients asiatiques, ainsi que celle de la liberté de la
presse, notamment quand le journal où travaille Sara refuse de publier une
enquête de peur de perdre des abonnements.
sent la vie sauve. Zhao n’est pas net non plus, car il est le fils adoptif de
Wei, qui lui demande carrément de liquider les trois policiers. L’ambiguïté
morale qui caractérise l’univers du palais reflète celle de la société chinoise actuelle, où la persécution des adversaires politiques, l’intimidation, les
mandats d’arrêt douteux et la corruption sont monnaie courante.
Contrairement aux tenants du pouvoir, les trois flics sont totalement
exempts de cynisme et mus par des sentiments humains. Leurs petits secrets ne font pas le poids face aux desseins sinistres de leurs supérieurs
comploteurs. Lu n’est décidément pas un cinéaste optimiste. Mais son film
est le plus bouleversant wu xia pian de ces dernières années. Les autres
films chinois d’Udine ne lui arrivaient pas à la cheville. On peut cependant
regarder sans déplaisir les deux road movies entre potes qui déclinaient
l’amitié virile sur un mode mi-anarchique, mi-humoristique : Breakup
Buddies de Hao Ning et The Continent de Han Han.
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Sakura Ando dans «0,5mm»
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Japon
On retrouve les relations entre une jeune femme et des vieillards
divers dans le film 0,5 mm de la cinéaste Momoko Ando, sœur de l’actrice principale, Sakura Ando. Une nurse, Sawa, s’occupe d’un vieil homme
grabataire. Ses gestes précis et empreints de douceur quand elle lui change ses langes ou le lave, dénotent un professionnalisme qui résulte d’années d’expérience. A la demande de la fille du mourant, elle passe une nuit
avec lui, avec l’assurance qu’il n’aurait ni l’envie, ni l’énergie de faire des
choses inconvenables. Promesse évidemment vaine, puisque le désir
taraude toujours et cela d’autant plus que la fin est proche. Mais l’exercice s’avérant excessif pour la constitution du monsieur, celui-ci rend son
dernier souffle et l’infirmière du coup son tablier. Ce n’est que le début de
ses tribulations, qui vont occuper le film trois heures durant, qu’on ne sent
nullement passer. Pleine de ressources psychologiques, elle aborde des
vieux qu’elle peut faire chanter (qui pour vol compulsif de bicyclettes, qui
pour consultation de photos olé olé) et se fait engager comme gouvernante et protectrice. Elle est ainsi logée, nourrie et blanchie jusqu’à ce qu’un
événement imprévu l’oblige à nouveau à quitter son employeur, à qui, à
chaque fois, elle finit par s’attacher. A l’heure où des millions de jeunes
Japonais sont au chômage total ou partiel plutôt qu’en train de construire
une carrière, le film est d’une pertinence évidente. S’il perd de temps à
autre le cap, il garde toujours son humour (noir). Selon le magazine
Kinema Junpo, un des 10 meilleurs films de 2014.
Hélas, en fin de journée, le guide n’a toujours pas réapparu et les 7 téméraires doivent se résigner à passer la nuit en plein air. La mauvaise humeur
initiale disparaîtra à mesure que les nouveaux liens se tissent. Les personnalités des actrices (toutes non professionnelles) et leurs tics sont fascinants. La finesse extrême avec laquelle le cinéaste gère cette psychographie humaine cherche sa pareille.
Make Room de Kei Morikawa (un réalisateur chevronné de vidéos
« pour adultes ») se déroule en un lieu unique, la cabine de maquillage des
cinq interprètes d’un film X, qui sortent ou entrent au gré du tournage, parlent de leurs soucis quotidiens, commentent de façon crue, devant la
maquilleuse imperturbable, la scène qu’elles viennent de tourner ou s’inquiètent d’une imperfection dans leur jeu. La star du film manque à l’appel : son petit ami vient de découvrir sa profession. Au pied levé, deux
actrices sont convoquées, une spécialiste qui reprend sa carrière après une
absence sabbatique, et une jeune, toute peureuse, qui va faire ses débuts.
Bien sûr, les autres lui prodiguent conseils et encouragement, et après son
baptême du feu (on entend ses cris de la pièce voisine), elle devient accro.
C’est que ces dames prennent un plaisir évident à exercer leur métier ! Et
comme ce sont elles qui font vivre toute une industrie, elles sont respectées.
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«Unsung Hero»
«Ecotherapy Getaway Holiday»
Ecotherapy Getaway Holiday de Shuichi Okita est un manifeste
féministe des plus réjouissants et confirme son réalisateur (après The
Woodsman and the Rain de 2011 et A Story of Yonosuke de 2013)
comme une des voix les plus originales du cinéma japonais moderne. Que
faire quand on est perdu en forêt, en train de tourner en rond tandis que la
faim, la soif et le froid vous tenaillent ? C’est le dilemme auquel sont
confrontées les sept héroïnes, qui ont toutes atteint ou dépassé la quarantaine. Tout ce qu’elles voulaient, c’était de faire une jolie promenade vers
une de ces chutes d’eau romantiques dont les Japonais raffolent.
Malheureusement leur guide inexpérimenté a vite perdu son chemin et
recommandé à ses clientes de l’attendre à une bifurcation jusqu’à ce qu’il
ait exploré les lieux. Elles attendent et le temps passe. Pas de réseau pour
leurs portables. Elles décident de se scinder en deux groupes : trois restent
sur place, les quatre autres prennent le chemin que le guide a emprunté.
Une de ces exploratrices est cantatrice et sa voix porte : au cas où il s’agirait de signaler à celles qui restent en arrière. Une autre sème soigneusement des copeaux de céréales sur le sentier à l’instar du Petit Poucet.
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Unsung Hero de Masaharu Take est une ode hautement sympathique
aux « suit actors », ces interprètes anonymes qui jouent dans des costumes
qui les couvrent de la tête aux pieds, qu’il s’agisse de Godzilla ou d’autres créatures/super héros enveloppés de spandex.
Parasyte Part 1 et Parasyte Part 2 de Takashi Yamazaki constituent
l’adaptation live d’un manga best-seller de Hitoshi Iwaaki sur une sournoise invasion de parasites extraterrestres dans la tradition de Invasion of
the Body Snatchers (Don Siegel, 1956). Le personnage principal portait
des écouteurs au moment de son « occupation », de sorte que son parasite
ne pouvait pas entrer dans la tête. Il s’est dans l’urgence logé dans sa main
droite (qu’il parvient à transformer à sa guise, faisant notamment apparaître une bouche sur la paume et un œil sur l’index) et devient un interlocuteur parfaitement rationnel et protecteur de son hôte. Alternant séquences
drolatiques et horrifiques, Yamazaki construit un suspense haletant, malgré une durée de presque 4 heures.
Passez un bel été !
Raymond Scholer
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neuchâtel international fantastic film festival, du 3 au 11 juillet
Les dossiers secrets
du NIFFF
La crème des fans de science-fiction, de sueurs froides et de curiosités
made in Asia accueille le lanceur d'alertes Chris Carter. Père des X-Files et
de ses dérivés, mais aussi de la série Millenium, le réalisateur-scénariste
californien parlera de ce qu'il sait faire le mieux : les séries télévisées. Au
moment où les films des différentes compétitions seront projetés, les rues
de la jadis tranquille Neuchâtel seront envahies par la musique des films
d'exploitation (NIFFF Invasion) et les plaisirs coupables (Guilty Pleasures
en open-air).
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Qui ne se souvient pas de la couleur des
yeux de l'agente Scully (Gillian Anderson) ou
des yeux rieurs de Fox Mulder (David
Duchovny) ? En ce temps-là (la Fox a diffusé
les neuf saisons des X-Files de 1993 à 2002), les
fans de la série n'en pouvaient plus d'attendre
que les deux enquêteurs du paranormal consomment enfin leur liaison, histoire de les rassurer
qu'aucun des deux ne soit un alien. Déclinée en
films, en un jeu vidéo, puis en une autre série
auto-parodique (The Lone Gunmen : Au cœur
du complot), l'œuvre de Chris Carter interroge
notre rapport à la normalité et notre suffisance
humaine face aux grands défis de l'univers.
A l'occasion de sa conférence Storyworlds
sur les arcanes des séries TV, Carter sera rejoint
par différents professionnels du même milieu,
dont Allan Cubitt (créateur de la série The
Fall). Même le romancier et scénariste anglais
Michael Moorcock (Le Cycle d'Elric) est invité à Neuchâtel.
Effets spéciaux
Deux autres rencontres permettront de
décortiquer les effets visuels : ceux du film The
Avengers 2 : Age of Ultron (2015), en compagnie de techniciens européens qui ont participé
à sa production, et ceux utilisés par les studios
VFX dans la mise en image de catastrophes
naturelles et de destruction de villes.
Autre moment fort, le traditionnel symposium Imaging the Future permettra une
incursion dans l'univers des jeux vidéo.
D'abord, des neuroscientifiques décortiqueront les émotions impliquées dans les jeux
vidéo et “la manière dont elles sont captées,
analysées et réutilisées pour rendre l'immersion dans le jeu plus captivante“.
Ensuite, seront expliqués les projets suisses
de jeux vidéo sélectionnés pour le “Call
For Projects : Swiss Games 14/15“ de Pro
Helvetia. Enfin, le NIFFF organisera sa
deuxième game jam (création de jeux vidéo
en 45 heures max. sur une thématique qui
sera annoncée au début du concours, soit le
3 juillet).
Emotions cinéphiles
Côté plaisirs cinématographiques simples,
le NIFFF conserve bien sûr son principe architectural : trois compétitions officielles (internationale de longs-métrages fantastiques, nouveaux films asiatiques et courts-métrages suisses) et des programmes par genres (Films of the
Third Kind, Ultra Movies, Histoire(s) du genre,
courts-métrages fantastiques et asiatiques...).
La nouveauté de cette année réside en la
rétrospective “Guilty Pleasures“, soit une quarantaine de films sous-genrés, de la blaxploitation à l'ecovengeance, en passant par le giallo.
Chris Carter
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Parmi eux : l'exotique Blacula, le vampire noir
(1972) de William Crain, le culte The Warriors
(Les Guerriers de la nuit; 1979) de Walter Hill,
Le Couvent de la bête sacrée (1974), torture
porn (soft) anticlérical du Japonais Noribumi
Suzuki, ou encore le rape and revenge suédois
Thriller : A Cruel Picture de Bo Arne Vibenius,
présenté pour la première fois au Festival de
Cannes en 1973. Les films les plus grand public
de cette programmation seront projetés, gratuitement, sur un écran open-air.
Musiques, dessins et jeux
Parce que le mélange des genres reste sa
spécificité, le festival inaugure cette année l'événement multidisciplinaire NIFFF Invasion,
qui donne la possibilité, à tous et gratuitement,
de se familiariser avec l'univers filmique des 15
glorieuses (entendez les années 1970 à 1985).
Le karaoké géant, avec orchestre, performances
artistiques et Couleur3, rivalisera-t-il avec le
parc de jeux vintage (de Pac Man à Space
Invaders, en passant par quelques flippers) ?
Les visiteurs de la Panic Room (huis clos dans
lequel les participants cherchent à s'échapper
grâce à des indices, matériels, sonores ou
visuels) pourront-ils voir l'exposition de Drew
Michael Moorcock
Struzan, peintre et illustrateur à qui l'on doit les
visuels des Star Wars et Indiana Jones, mais
aussi E.T. et les Harry Potter ?
La pléthore d'activités proposée cette année
témoigne de l'énergie que Neuchâtel déploie
pour sortir de ses frontières ; de même qu'elle
illustre l'impact toujours croissant des mondes
fantastiques sur un imaginaire collectif appauvri
par la globalisation.
Frank Dayen
NIFFF à Neuchâtel, du 3 au 11 juillet; www.nifff.ch.
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locarno
Festival du Film
Du 5 au 15 août, Locarno vibrera au rythme de la soixante-huitième édition du Festival de cinéma que la ville accueille depuis 1946. Une rétrospective consacrée à Sam Peckinpah est au programme, tandis que Marco
Bellochio, Bulle Ogier, Walter Munch et Edward Norton seront récompensés.
Sam Peckinpah
Bellochio, Bulle Ogier, Murch et
les années 1960 que le Festival rend hommage
en accordant à Bulle Ogier le Pardo alla
Carriera. Après avoir récompensé Anna Karina
et Jean-Pierre Léaud, le Festival poursuit ainsi
la série d’hommages qu’il rend depuis deux ans
aux interprètes de la Nouvelle Vague. Quelquesuns des films majeurs de l’actrice, qui s’illustra
chez Rivette, Tanner, Buñuel, Fassbinder et de
Oliveira, figurent dans la programmation du
Festival. C’est en revanche vers le Nouvel
Hollywood que le Festival de Locarno invite à
se tourner en remettant le Vision Award-Nescens
à Walter Munch, ingénieur du son et monteur
que ses collaborations avec George Lucas et
Francis Ford Coppola rendirent célèbre. Le
public et les invités du Festival pourront le rencontrer et découvrir les secrets de son travail au
cours d’une masterclass. Dans un registre plus
contemporain, l’acteur américain Edward
Norton, récemment nominé aux Oscars pour
Birdman d’Iñarritu, recevra l’Excellence Award
Moët & Chandon. En remettant ce prix à l’une
des grandes figures du cinéma hollywoodien
contemporain, le Festival renoue ainsi avec son
autre ambition : révéler le cinéma tel qu’il se
fait en 2015.
Dans le sillage de Cannes, Venise et Berlin, Norton
C’est aussi à travers les prix qu’il remet
Locarno constitue l’un des rendez-vous
incontournables des amateurs de cinéma. Visant que le Festival de Locarno rend hommage à celà faire découvrir au public les réalisateurs d’au- les et ceux qui ont contribué à façonner l’histoijourd’hui, le Festival rend également hommage re du cinéma. Cette année, le Festival distingueau passé de l’art qu’il célèbre. Ainsi, cette ra quatre personnalités : le cinéaste italien
année, c’est au réalisateur et acteur américain Marco Bellochio, l’actrice française Bulle
Sam Peckinpah que le Festival de Locarno Ogier, l’ingénieur du son Walter Munch ainsi
consacre sa traditionnelle rétrospective. Connu que l’acteur américain Edward Norton. Le prepour son tempérament virulent et sa résistance mier, qui recevra le Pardo d’onore Swisscom,
aux normes imposées par le système hollywoo- entretient un lien très fort avec Locarno : en
dien, Peckinpah a su imposer
sa « touche » à travers des titOpen Doors
Le Festival de Locarno
res tels que La Horde sauvage
ne vise toutefois pas unique(1969), Patt Garett et Billy the
ment à donner de la visibilité
Kid (1973) ou Apportez-moi
au cinéma d’aujourd’hui,
la tête d’Alfredo Garcia
mais
également à favoriser
(1974). Son œuvre, peuplée
celui
de
demain. À cet égard,
de personnages solitaires et
le
laboratoire
de coproduction
marginaux, dévoile une vision
du
Festival
Open
Doors joue
crépusculaire d’un monde
un
rôle
important.
Ce proprofondément corrompu et
gramme,
consacré
cette
année
marqué par la brutalité. La
à
quatre
pays
du
Maghreb
noirceur et la violence de ses
(Algérie, Libye, Maroc et
films, qui ont suscité de nomTunisie),
permet aux réalisabreuses controverses, ont su
«Major
Dundee»
de
Sam
Peckinpah
(1965)
©
Courtesy
of
Sony/Park
Circus
teurs
et
producteurs
de douze
inspirer le maître de l’horreur
projets
sélectionnés
de renJohn Carpenter ainsi que
1965,
le
Festival
avait
primé
son
premier
film,
contrer
de
potentiels
partenaires
de
coproducQuentin Tarantino, qui revendique l’héritage de
cet enfant terrible du cinéma. Carlo Chatrian, Les Poings dans les poches, œuvre contestatai- tion. Parmi ces derniers, on citera Aller simple
directeur artistique du Festival, déclare à propos re et dérangeante qui remporta un vif succès. de Nadia Raïs (Tunisie), Dieu reconnaîtra les
de la rétrospective : « Avec Sam Peckinpah, le Après ce premier passage éclatant, le cinéaste siens de Hassan Legzouli (Maroc), En attendant
Festival rend hommage au cinéma classique et est revenu à plusieurs reprises à Locarno : en les hirondelles de Karim Moussaoui (Algérie) et
au cinéma postmoderne, au cinéma de genre et 1976, son film La Marche triomphale figure en The Colonel’s Stray Dogs de Khalid Shamis
au cinéma d’auteur, au cinéma qui se fait mal- compétition ; en 1997, Bellochio est président (Libye/Afrique du Sud).
gré tout et au cinéma qui est plus fort que tou- du jury ; en 1998, le Festival lui consacre une
Emilien Gür
tes les ingérences. » La programmation permet- grande rétrospective. Cinquante ans après la
tra de visionner l’ensemble des films du cinéas- première projection du premier film du cinéaste
te, certains de ses travaux pour la télévision italien, Les Poings dans les poches sera projeté
ainsi que quelques uns des longs métrages dans sur la Piazza Grande dans une version restaurée.
C’est également à une personnalité révélée dans
lesquels il figure à titre d’acteur.
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Les films du mois
Vincent Lindon dans « La Loi du marché » © Xenix
LA LOI DU MARCHE
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un film de Stéphane Brizé, avec Vincent
Lindon, Yves Ory, Karine de Mirbeck,… (FR,
2015)
A l'heure où le cinéma français multiplie les
comédies exposant des histoires de « beaufs »
(On voulait tout casser) ou celles où tout sonne
faux (Qui c'est les plus forts ?), où, malgré les
cocoricos de Cannes (mais ici on n'a pas encore
vu la Palme d'Or), il semble que la plupart des
cinéastes ne savent décidément pas parler la langue du peuple (c'est insupportable dans le film de
Charlotte de Turckheim! Audiard, lui, ruse : ses
protagonistes parlent tamoul et très mal français),
il faut savoir gré à Stéphane Brizé d'avoir réussi
à faire « parler juste » dans La Loi du Marché.
Plongé dans un monde où la parole est rare, difficile, Thierry (Vincent Lindon) est un taiseux à
l'élocution hésitante qui « sonne vrai ». On se dit
qu'enfin un cinéaste français réussit ce que les
Belges (les Dardenne en tête) et les Anglais
(Loach ou MacQueen) semblent atteindre à tous
les coups : un ton juste. D'où aussi l'impression
du spectateur d'être, avec La Loi du marché,
devant un documentaire.
Brizé trouve non seulement le ton juste,
mais il montre clairement ou plutôt fait clairement entendre que la langue est instrument de
pouvoir, qu'elle est maîtrisée par ceux qui veulent
ou savent exercer ce pouvoir : l'exemple le plus
frappant est celui où le DRH du supermarché où
Thierry a trouvé un boulot de vigile vient
convaincre le personnel que personne n'est
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responsable du suicide de la caissière après qu'elle a été licenciée.
Tout le monde a déjà lu et relu le « pitch »
du film : Thierry est un chômeur en quête de travail que, dans un premier temps, le spectateur
suit dans ses échecs successifs, malgré les stages
effectués, les entretiens d'embauche multipliés
(dont celui par Skype se révèle particulièrement
caricatural), les cours suivis pour apprendre à “se
vendre“ (mais qui servent surtout à humilier celui
qui tente l’exercice), il reste sans travail et ses
difficultés économiques le forcent à vendre son
seul “bien“, sa caravane, pour pouvoir payer l'école de son fils handicapé (ce fils handicapé dont
on pouvait craindre qu'il ne plombe le film tirant
trop sur la corde sensible est finalement très
sobrement utilisé par Brizé).
Dans une deuxième partie, Thierry a trouvé,
on ne sait comment, un travail de surveillant dans
un supermarché; d'abord comme observateur des
nombreuses caméras de surveillance, puis au
contact des clients, enfin comme surveillant des
caissières (licenciées à la moindre “faute“, l'entreprise s'étant donné pour but de dégraisser). Après
avoir affronté quelques scènes pénibles où il s'agit
d'extorquer les aveux des « voleurs », il quitte soudain son lieu de travail. Pour aller où, faire quoi ?
Brizé laisse la fin de son film ouverte.
Cette construction de La Loi du marché sur
une succession de scènes (souvent filmées en
plans-séquences) est à la fois une réussite (Brizé
évite ainsi les ficelles d'un scénario à la dramaturgie éculée), mais malheureusement aussi une
limite pour le film. En effet, après un début qui
montre une révolte de Thierry contre les tac-
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tiques dilatoires de Pôle Emploi (qui propose,
voire impose des stages aussi aberrants qu’inutiles) et qui dit son refus de continuer la lutte syndicale perdue à ses yeux, le film ne fait que juxtaposer les scènes qui décrivent la terrible situation des chômeurs de longue durée : la scène
avec le responsable de Pôle Emploi, la scène
avec l'employée de la banque, la scène avec les
autres chômeurs du cours, la scène avec les acheteurs potentiels de la caravane et leur insupportable marchandage. Or toutes ces scènes ne font
que dire et redire la lutte de tous contre tous. La
seule scène « positive », celle du pot de départ
d'une employée du magasin se conclut, après le
discours de circonstance du directeur, par l'annonce de celui-ci qu'après le trop petit nombre de
départs à la retraite anticipée, il va falloir
« dégraisser » en traquant les « fautes » des
employé(e)s.
Le film, après remplacé la lutte des classes
par la lutte de tous contre tous, s'arrête ainsi au
catalogue des difficultés et des humiliations. Pas
le moindre espoir, pas la moindre indication sur
la manière d'engager une résistance… Le spectateur sort du film en se disant que, « oui, c'est terrible, mais on ne peut rien y faire, c'est la loi du
marché ». Ce qui revient finalement à entériner le
discours patronal!
Serge Lachat
VALLEY OF LOVE
un film de Guillaume Nicloux, avec Isabelle
Huppert, Gérard Depardieu, Dan Warner, (FR,
2015)
L’actrice Isabelle arrive dans la « Vallée de
la Mort » pour exaucer le vœu posthume de son
fils Michael qui s’est suicidé quelques mois plus
tôt. Elle y retrouve Gérard, acteur lui aussi, qui a
répondu à contrecœur à ce vœu filial, ne croyant
pas du tout à la promesse de ce fils mort de réapparaître devant ses parents réunis s’ils suivent
scrupuleusement les étapes qu’il a prévues pour
eux. Etonnant point de départ qui fait craindre
toutes sortes de dérives « fantastico-magicoparanormales ». Dérives que Nicloux évite heureusement. Sous le soleil de plomb et dans le
paysage de fin du monde de la Vallée de la Mort,
il observe surtout comment un couple séparé
depuis longtemps se retrouve, comment la requête du fils, la situation de deuil (r)avive de vieilles
tensions, de vieux conflits, de vieux mécanismes
d’agressions, mais aussi de vieilles complicités,
voire de vieux gestes de tendresse. Le cinéaste
filme avec une attention très fine tous ces mouvements de l’âme, si profondément inscrits dans les
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deux partenaires qu’on peut se demander si les
étranges stigmates qui apparaissent aux chevilles
d’Isabelle et plus tard aux poignets de Gérard ne
sont pas l’effet de l’intensité de leurs émotions
bien plus que des signes de l’au-delà.
Pour rendre crédible un scénario aussi
« abracadabrantesque », Nicloux a eu la chance
de pouvoir compter sur deux acteurs au sommet
de leur art, sachant rendre audibles dans des dialogues très forts leurs moindres émotions, leurs
doutes, leurs douleurs, leur culpabilité, leurs
espoirs. Mais sachant aussi les exprimer par leur
corps, elle dans sa trop grande maigreur, sa
sécheresse, sur sa peau parcheminée de rousse
exposée à un soleil d’enfer, lui dans son énormité, dans son corps devenu monstrueux, dans ses
essoufflements au moindre déplacement…
Miracle de deux très grands acteurs complètement investis dans leurs personnages. Et pour
Depardieu, on peut deviner ce que signifie pour
sa personne ce rôle de père dévoré de mauvaise
conscience devant le suicide qu’il n’a pas pressenti d’un fils qu’il n’a pas su rencontrer vraiment… A condition de ne pas rechigner devant
un scénario difficile à « croire », on ne peut que
sortir bouleversé d’une telle rencontre de deux
acteurs qui ne s’étaient plus croisés depuis Les
Valseuses de Blier en 1974 et le Loulou de Pialat
en 1980 !
Serge Lachat
«Un moment d'egarement» © Praesens films
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Isabelle Huppert et Gérard Depardieu dans «The Valley of Love » © Frenetic Films
UN MOMENT
D’EGAREMENT
un film de Jean-François Richet, avec Vincent
Cassel, François Cluzet, Alice Isaaz, Lola Le
Gann… (FR, 2015)
Deux amis de longue date, Antoine et
Laurent passent leurs vacances en Corse, dans la
maison familiale d’Antoine, avec leurs filles,
Marie (18 ans) et Louna (17 ans). Déboussolés
par le comportement des deux adolescentes, les
deux pères ont de la peine à coordonner leurs exigences éducatives, d’autant plus qu’Antoine, très
perturbé par ces premières vacances séparé de sa
femme (partie à Ibiza) est totalement à cran.
Un soir, Louna réussit à séduire Laurent qui
a trop bu. La jeune fille est sincèrement amoureuse, mais lui plaide « un moment d’égarement ».
Le secret ne pourra bien sûr pas être gardé, Marie
qui a tout compris se sent trahie, Antoine à qui sa
fille a avoué être tombée amoureuse d’un
« vieux » ne comprend pas tout de suite qu’il s’agit de son ami, part en ville pour tuer le « pervers »…
Un Moment d’égarement est le remake du
film éponyme de 1977 de Claude Berri, une
comédie gentillette qui surfait sur la vague de la
libération sexuelle, la mode des seins nus et qui
se déroulait à Saint-Tropez. Le principal mérite
de cette première version étant de faire découvrir
Agnès Soral ! Sans être géniale, cette comédie
avait attiré l’attention à Hollywood où Stanley
Donen en avait réalisé un premier remake en
1984 sous le titre de Blame it on Rio/C’est la
faute à Rio avec Michael Caine et Demi Moore
qui ne porta pas chance au réalisateur dont ce fut
le dernier film !
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On peut se demander ce qui a pu pousser un
producteur et un réalisateur à remettre la compresse aujourd’hui. Pour le producteur, on parlera d’un clin d’œil du fils, Thomas Langmann, à
son père, Claude Berri. Pour le cinéaste JeanFrançois Richet, se lancer dans ce remake, c’était
la possibilité de collaborer une fois encore avec
Langmann, ainsi que celle de changer de genre. Il
est en effet surtout connu pour ses films sur les
cités (Ma 6-T va craquer) et sur le monde du
gangstérisme (Mesrine). Peut-être est-ce
d’ailleurs pour cela qu’il s’est associé à Liza
Asuelos pour « actualiser » le scénario de Berri.
Car finalement à quoi servent les remakes sinon
à confronter une même histoire à différents
moments de l’Histoire ?
A condition que le travail soit bien fait ! Ici,
on a plutôt l’impression que Liza Asuelos s‘est
chargée du parler « djeun » alors que Richet s’efforçait de retrouver « des codes d’honneur »
dignes des pires polars en faisant d’Antoine un
Corse selon les pires clichés ! Avec pour effet
que l’on ne croit pas une seconde au langage utilisé par les filles (on est dans la caricature avec
du verlan et des « putain » toutes les phrases !!!),
pas plus qu’aux « pétages de plomb » d’Antoine
(Cluzet en constant surrégime) ou à la lâcheté
d’un Cassel aux atermoiements de fillette à peine
compensés par quelques gestes virils dans les
sports extrêmes…
Et en plus, la Corse sert tout juste de carte
postale en toile de fond, avec une minable chasse aux sangliers et des personnages qui savent
tout, mais savent surtout se taire comme de bons
mafieux… Le film de Richet, décidément, aligne
les stéréotypes à tous les niveaux !
Serge Lachat
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la modernité pointe avec les premières automobiles. Film automnal (superbe photo de Lucien
Ballard) il s’achève sur la mort du héros filmée
comme un retour à la terre. Même amour de la
terre, même obsession de la fin d’un monde, dans
l’élégiaque Un nommé Cable Hogue (The
Ballad of Cable Hogue) (1970) où là aussi, ce
dur à cuire de Cable Hogue, grand amoureux
buveur et analphabet (Jason Robards, un fidèle
Double hommage cet été au Grütli: après Ingrid Berman du 8 au 28 juillet, de Peckinpah) accepte par amour de quitter son
ce sera le tour de Sam Peckinpah du 19 août au 1er septembre, dans la
relais de diligence pour la ville, mais succombe
foulée de la rétrospective programmée au Festival de Locarno.
au départ sous les roues de la première automobile, dont l’apparition à l’horizon l’a rendu d’un
coup, avec tout ce qu’il représente, complèteConsolation pour tous ceux qui n’auront pu critiques se sont déclarés choqués par l’absence ment anachronique.
se rendre à Locarno, la rétrospective Peckinpah de condamnation des comportements montrés,
Tourné l’année suivante en Angleterre, le
présentée par le Festival est immédiatement alors que d’autres admiraient la tranquillité d’un très controversé Les Chiens de paille (Straw
reprise au Grütli à Genève, soit 13 des 14 films regard affranchi de tout présupposé, porté sur le Dogs) (1971) est peut-être le film le plus trouréalisés par le cinéaste (seul manque son premier libre déploiement des instincts, y compris les blant et le plus représentatif de son cinéma. C’est
film New Mexico (The Deadly Companions). plus destructeurs. La force du cinéma de l’histoire de David (Dustin Hoffman), jeune
Cabochard flamboyant connu pour user produc- Peckinpah résiderait alors dans son amoralisme mathématicien américain pacifiste qui a quitté les
teurs et collaborateurs et abuser, entre autres, de pessimiste qui dit oui à la totalité de l’homme, USA pour fuir la violence (ou échapper au
l’alcool et de la cocaïne, Peckinpah est mort pré- part maudite incluse, comme il dit oui à la vie, Vietnam?) et faire sa thèse au calme dans la cammaturément en 1984 à 59 ans. A son
pagne anglaise dont sa femme Amy
enterrement l’acteur Robert Culp
(Susan George) est originaire. Trop
déclara que le plus surprenant n’était
“étranger”
(intello,
citadin,
pas qu’il n’ait fait que 14 films,
Américain) pour les gens du coin, il
mais, qu’au vu de la façon dont il s’y
subit non sans de menues lâchetés
prenait, il ait réussi à en faire
leurs provocations qui vont crescenautant…
do. Le climax sera atteint lorsqu’ils
Les films de Peckinpah sont
feront le siège de la maison de David
souvent ramenés aux séquences très
où l’idiot du village soupçonné d’êtviolentes de carnages sanglants qui
re un assassin pédophile s’est réfuen constituent l’acmé. On n’en
gié. Pour défendre sa maison, plus
retient du reste souvent que l’aspect
encore que pour éviter une “justice
formel le plus visible, en particulier
populaire” digne du Fury de Fritz
les procédés par lesquels les affronLang, David les tuera tous avec l’aitements deviennent des sortes de
de d’Amy. La fable est évidemment
chorégraphies, tels les ralentis et autambigüe, d’où la controverse, mais
res divisions de l’écran permettant
les conditions menant à l’explosion
Jasons Robards et Stella Stevens dans «La Ballade de Cable Hogue»
de voir simultanément la mort de
de violence sont clairement explicideux ou de plusieurs personnages. Ces maniéris- érotisme inclus. Un érotisme qui répondrait à la tées dans une progression parfaitement contrôlée.
mes, nouveaux à l’époque, déservent avec le fameuse définition qu’en donnait Georges Une scène a beaucoup contribué aux accusations
recul ces scènes dont ils affaiblissent paradoxale- Bataille: “l’approbation de la vie jusque dans la de machisme à l’encontre de Peckinpah: Amy,
ment le réalisme, et il est heureux qu’il n’en ait mort”. Il serait pourtant réducteur de s’en tenir à volontiers aguichante, suscite la convoitise de
pas fait un usage exagéré. Car c’est bien le réalis- la seule violence de ses films. Son deuxième son ancien petit ami du temps où elle vivait dans
me qui motive un Peckinpah répondant d’ailleurs film, le très beau Coups de feu dans la Sierra le village. Lorsqu’elle repousse ses avances, il la
aux critiques jugeant ses films trop violents: (Ride the High Country) (1962) qui le fit instan- viole, non sans qu’elle finisse par y prendre du
“tuer un homme n’est pas une chose propre, faci- tanément connaître en Europe, est un western plaisir, d’où le scandale. A quoi Peckinpah réplile et simple. C’est sanguinaire et horrible. Et mettant en scène deux vieux cow-boys interpré- quait en faisant remarquer qu’il s’agit d’un viol
peut-être que si davantage de gens en venaient à tés par Joel McCrea et Randolph Scott (dont ce collectif et que si elle prend du plaisir avec son
réaliser que tirer sur quelqu’un n’est pas que de sera la dernière apparition à l’écran), deux vété- ex, ce n’est plus du tout le cas avec le suivant.
l’amusement, on avancerait peut-être un peu.” rans du genre. Film sur le vieillissement, l’amitié Amis de la poésie, bonsoir…
Christian Bernard
Ceci dit, le sens de cette violence a donné lieu à et le respect de soi-même, où le héros doit chausdes interprétations contradictoires, faisant de ser des lunettes pour lire son contrat, c’est un
Peckinpah un cinéaste controversé. Beaucoup de adieu au genre et à ses mythes dans un Ouest où
cinémas du grütli
Rétrospective
Sam Peckinpah
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théâtre de carouge
Saison 2015-2016
Présentée par un Jean Liermier plus que jamais virevoltant sur
la scène carougeoise devant un public de fidèles abonnés(es), le
menu 2015-2016 s'annonce placé sous le signe du plaisir du jeu.
On retrouvera ainsi en ouverture de saison
le Teatr Semianyki après un premier passage
lors de la saison 2012-2013. Issu du Teatr
Licedei qui avait fait connaître un style de théâtre ludique à la Comédie et également à Forum
Meyrin. Après avoir permis de faire connaissance avec une famille particulièrement déjantée,
les Semianyki préparent un voyage express
empruntant à des genres divers, que ce soit au
cinéma muet ou au cabaret (du 15 au 20 septembre, Salle François Simon).
d'une création de 2001 au Théâtre
Vidy-Lausanne, cette adaptation
de la Nuit des rois sera jouée par
cinq comédiens dans une ambiance échevelée de music-hall et un
cadre contemporain (du 27 octobre au 15 novembre, Salle François
Simon).
Entre deux productions probablement ébouriffantes, le
Théâtre de Carouge proposera une
pause poétique
«Dämonen» avec Cathlen Gawlich, Lars Edinger. Photo Arno Declair
avec Toute-puissance de la poésie
d'après la correspondance de ludique puisque c'est James Thierrée qui sera à
Gustave Roud, Maurice l'affiche avec Ficelle (titre provisoire), spectaChappaz et Philippe Jaccottet cle certainement inclassable comme il se doit,
sur une idée de Guillaume de la part d'un des créateurs les plus originaux
Chenevière servie par quatre de la scène actuelle (du 5 avril au 8 mai, Salle
interprètes (du 10 au 15 novem- François Simon).
bre, Salle Gérard Carrat).
En « avant-saison », la Salle François
Le mois de décembre Simon accueillera deux spectacles de la Bâtie,
risque d'être placé sous le signe This is how you will disappear de Gisèle
du rire avec La Puce à l'oreille Vienne (les 28 et 29 août) et ensuite un des
de Feydeau dans une mise en « musts » de la prochaine saison théâtrale,
scène de Julien George dont on Dämonen (Démons) de Lars Noren dans une
«Semianyki Express» © Giovanni Cittadini Cesi
peut parier qu'elle connaîtra à production de la Schaubühne de Berlin et une
Marivaux sera ensuite à l'honneur pour une nouveau un franc succès puisqu'il s'agit d'une mise en scène de Thomas Ostermeier de retour
coproduction avec le Centre Dramatique reprise d'une version donnée en 2012 et 2014 au sur les rives du Léman. Assurément un événeFribourgeois-Théâtre des Osses, avec une ver- Théâtre du Loup (du 1er au 23 décembre, Salle ment « festivalier » qui sera très couru, et ce,
sion des Acteurs de bonne foi dont la réalisa- François Simon).
non seulement par les germanophones (les 5 et
tion sera signée comme il se doit par les responPlace au maître de maison ensuite avec La 6 septembre).
sables de l'institution fribourgeoise, à savoir Vie que je t'ai donnée de Luigi Pirandello. Jean
En fin de saison, autre événement, la troiGeneviève Pasquier et Nicolas Rossier. Théâtre Liermier s'attaquera ainsi à une œuvre troublan- sième Rencontre du Théâtre Suisse se déroudans le théâtre au menu de cette œuvre qui n'est te du grand écrivain transalpin qu'il proposera lera dans le Canton de Genève et le Théâtre de
pas la plus familière parmi tous les marivauda- dans une scénographie d'Yves Bernard avec Carouge fera partie avec la Comédie, le Poche
ges et dans laquelle un prince et un valet seront Clotilde Mollet dans le rôle principal (du 26 et le Théâtre Forum Meyrin des institutions
les jouets de faux-semblants, puisqu'ils vont janvier au 14 février, Salle François Simon).
permettant de voir ou de revoir des productions
feindre de feindre afin de mieux dissimuler (du
Rendez-vous ensuite avec Yvette remarquées en Suisse durant la saison (du 26 au
22 septembre au 1er novembre, Salle Gérard Théraulaz et son accompagnateur Lee 29 mai).
Frank Fredenrich
Carrat).
Maddeford au piano pour Les Années (du 23
Shake est un produit de la Compagnie Eat février au 23 mars et du 5 au 17 avril, Salle
Rens. Et loc. 022 343 43 43
a crocodile fondée et dirigée depuis Thonon et Gérard Carrat).
la Maison des Arts par Dan Jemmett. Reprise
La fin de saison sera sans doute également www.tcag.ch
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bonlieu : début de saison
Un festival permanent
Lors du « mercato » culturel qui avait eu pour cause les changements de
responsables tant au Théâtre de l'Odéon, au Festival d'Avignon qu'à Vidy,
le nom de Salvador Garcia avait été prononcé au sujet du festival de la Cité
des Papes. On connaît la fin de l'histoire, l'arrivée à l'Odéon de Luc Bondy
eu pour conséquence le « transfert » d'Olivier Py à la direction du Festival
d'Avignon et Vincent Baudriller est désormais installé sur les bords du
Léman. Tant pis pour les festivaliers et tant mieux pour les habitants de la
région, y compris pour les Genevois, lesquels pourraient bien être appâtés
par les nombreuses têtes d'affiches au programme.
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Ce rappel n'est pas sans importance si l'on
considère que la programmation proposée à
Bonlieu ressemble le plus souvent à une sélection digne d'un festival. C'était déjà le cas avant
la refonte du bâtiment, mais désormais avec
trois salles à disposition, le choix de propositions – théâtre, musique, danse – laisse, selon la
formule consacrée, l'embarras du choix, même
si l'abondance de bien n'a jamais nui aux amateurs de culture. Et à en juger par le nombreux
public venu assister à la présentation de la saison par le maître des lieux, on peut penser que
Jean-Quentin Chatelain © Mario Del Curto
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Quentin Châtelain, dont on sait qu'il excelle à
mettre en valeur un texte lorsqu'il est seul en
scène (du mardi 6 au jeudi 15 octobre)
Place ensuite à un chef-d'œuvre de
Pirandello, Les Géants de la montagne.
L'ultime pièce de l'auteur transalpin sera donnée
dans une mise en scène de Stéphane
Braunschweig, responsable en tant que directeur de l'excellente programmation du Théâtre
de la Colline à Paris. Une occasion pour certains
amateurs de se confronter au souvenir des propositions de Giorgio Strehler et Georges
Lavaudant (du mercredi 4 au vendredi 6 novembre).
Deux propositions scéniques de
Dominique Pitoiset, L'Homme qui prenait sa
femme pour un chapeau, sous une forme
ce même public saura répondre
aux nombreuses affiches de la
saison 2015-16.
Sélection :
On aura une bonne idée de la
qualité des propositions théâtrales en annonçant que la saison
sera inaugurée par le passage du
Québecois Robert Lepage,
acteur, metteur en scène et réalisateur qualifié à juste titre de
« géant de la scène
mondiale » puisque
ses spectacles peuvent être vus aussi
bien au Royal
Theatre de Londres
qu'au Japon ou en
Russie, alors qu'il est
également invité à
mettre en scène des
opéras à Aix-enProvence ou au
«L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau»
Metropolitan de New
York. 887 s'annonce
comme un spectacle mettant en lyrique avec une composition de Michel Nyman
oeuvre une technologie hors du (du mardi 3 au samedi 7 novembre) et Le
sommun pour s'interroger su sujet Syndrome d'Alice (du mardi 24 décembre au
« de la multitude d'informations à mardi 1er décembre) permettront une réflexion
laquelle nous sommes confrontés sur des « situations tout à fait stupéfiantes ».
durant notre vie » (du samedi 3 au
The Last supper (en arabe surtitré) s'anmercredi 7 octobre).
nonce comme une « comédie drôle et cinglante
Création d'un auteur autrichien mettant en scène l'élite égyptienne après la
à découvrir ensuite, Peter Turrini révolution ». Dix acteurs jouent une famille
qui a écrit C'est la vie pour le met- égyptienne réunie autour d'une table : au menu
teur en scène Claude Brozzoni, « nihilisme, absurdité, apathie et un impossible
avec comme seul interprète Jean- échange ». De quoi susciter quelques débats
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mis en scène par Cyril Teste (mercredi 16 et
jeudi 17 décembre).
Côté danse, la programmation est tout aussi
ambitieuse et variée, avec l'Australian Dance
Theater et le chorégraphe Garry Stewart présentant Multiverse (vendredi 9 et samedi 10
octobre).
Star du flamenco ensuite avec Bosque
Ardora, une chorégraphie de Rocio Molina (du
jeudi 12 au samedi 14 novembre).
Abou Lagraa présentera ensuite Le
Cantique des cantiques, une chorégraphie pour
six danseurs et deux acteurs réalisée en collaboration avec le metteur en scène Mikaël Serre
(mardi 24 et mercredi 25 novembre).
Mais la danse, ce sera également un grand
format c'est-à-dire un véritable portrait d'artistes
«Multiverse» par l’Australian Dance Theater
autour de la thématique des révolutions du
monde arabe... et des rêves avortés et des illusions perdues ? (mercredi 24 et jeudi 25 novembre)
Quelques jours plus tard, une autre problématique pas très éloignée géographiquement
transportera les spectateurs à Tel Aviv pour une
adaptation de L'Attentat de Yasmina Khadra
avec une thématique autour des motivations
d'une kamikaze (mardi 1er et mercredi 2
décembre).
Falk Richter est un des auteurs de théâtre
essentiels à l'heure actuelle, dans la mesure où il
s'intéresse à la mécanique de l'entreprise et
interroge le rapport au travail, actualisant ainsi
un propos qui a beaucoup interpellé un auteur
bien connu dans la région, Michel Vinaver.
Nobody sera interprété par le Collectif MXM
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«Nobody», demandé photos le 16 au matin
dont on peut d'ores et déjà penser qu'il attirera
les foules, puisqu'il est consacré à Philippe
Decouflé. L'occasion donc de voir ou revoir :
- samedi 5 décembre : en compagnie de
DCA/Philippe Decouflé
- du mercredi 9 au samedi 12 décembre :
Contact, chorégraphie Philippe Decouflé
- du vendredi 11 au samedi 12 décembre : Solo
de et par Philippe Decouflé
- lundi 7 et mardi 8 décembre : Marcel
Duchamp mis à nu par sa célibataire, même (par
Philippe Decouflé
- du samedi 5 au dimanche 13 décembre :
Opticon exposition, installation interactive
Frank Fredenrich
Loc. 00334 50 33 44 11
www.bonlieu-annecy.com
«D’eux sens» tiré du «Cantique des cantiques» chorégraphié par Abou Lagraa © Eric Boudet
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la comédie de genève
Saison 2015-2016
C’est un directeur de théâtre en verve et souriant qui a présenté la future
saison de l’institution plus que centenaire à la tête de laquelle il est pour
la cinquième année. Seul sur scène, Hervé Loichemol jubilait d’annoncer
une saison magnifique. Au même moment, heureux hasard, le Conseil
municipal votait le crédit de la Nouvelle Comédie. Qu’on se rassure, la
vieille dame des Philosophes devrait cependant continuer à fonctionner
comme lieu culturel, peut-être dévolu à la danse.
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Treize spectacles forment un corpus extrêmement riche qui se réfléchit dans les beaux
visuels autour du thème de l’œil et du regard
ouvert sur le monde.
Après l’ouverture de saison dans le cadre
de La Bâtie-Festival qui accueillera pour deux
soirées chacune la grande Angélica Liddell
dans son dernier opus Primera carta de
San Pablo a los Corintios et Gisèle
Vienne avec The Ventriloquists
Convention, Hervé Loichemol fera
démarrer sa propre saison en fanfare avec
Fanny Ardant qu’il mettra en scène dans
Cassandre, d’après Christa Wolf, après
avoir présenté le spectacle en primeur au
festival d’Avignon 2015.
Le Belge Philippe Sireuil occupera
une place de choix en mettant en scène
deux spectacles : Voyage au bout de la
nuit de Louis-Ferdinand Céline en
automne, puis Des Mondes meilleurs,
une commande faite à Paul Pourveur dont
il avait mis en scène un autre texte en
2008.
Nous l’avions vue à l’œuvre dans la
mise en scène de Lignes de faille de
Nancy Huston en 2012, la Française
Catherine Marnas revient avec un
Lorenzaccio de Musset nerveux et carnavalesque.
Le Père blanc revenu du Congo avait
fait à La Comédie il y a deux ans une bien
trop courte halte pour tout ce qu’il avait à
dire. Le voici de retour et la salle sera à nouveau
suspendue aux lèvres de l’acteur flamand
Bruno Vanden Broecke et à son récit drôle,
tragique, hypnotique dans Mission de David
Van Reybrouck.
Place à la musique et aux textes de la grande Barbara avec Yvette Théraulaz dont la
a
conversation avec son modèle – Ma Barbara sera mise en scène par Philippe Morand.
Le danseur Foofwa d’Imobilité ponctuait
de ses entrechats moqueurs la présentation du
directeur en ce soir de mai. Il reviendra avec de
jeunes danseurs dans une création iconoclaste,
Redonner corps… aux oubliés de la danse.
Le directeur du festival d’Avignon Olivier
Py sera également présent sur la scène de La
Comédie par la reprise de son Épitre aux jeunes acteurs créé au Châtelard en 2002, mais
dans une mise en scène nouvelle d’Hervé
Loichemol qui n’enlèvera rien à la vigueur subversive du texte.
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De sa rencontre avec les responsables de
Solidarité Femmes, l’auteure Valérie Poirier a
tiré ce Conte cruel qui narre la pernicieuse
mainmise d’un homme sur sa femme et la difficulté de s’affranchir de la passion des débuts
pour y résister. Martine Paschoud mettra en
scène cette douloureuse descente aux enfers
d’une banalité délétère.
Fort du succès rencontré deux saisons
consécutives par son adaptation de Dario
Fo, Joan Mompart s’attaque cette fois au
chef d’œuvre de Brecht, L’Opéra de quat’sous. Faisant fi des notions de bien ou de
mal, cet opéra social voit s’affronter charité et criminalité et trouve un évident écho
dans la société contemporaine qui produit
de plus en plus de laissés-pour-compte.
Avant d’accueillir en mai Commedia,
Festival de Théâtre universitaire de
Genève pour sa deuxième édition et la
troisième édition de Rencontre du théâtre suisse qui permet de découvrir les plus
belles créations suisses de l’année, La
Comédie présentera Le Violon de
Rotschild de Tchekhov, monologue porté
par Ahmed Belbachir et mis en scène par
Hinde Kaddour.
Signalons enfin les échanges fructueux avec Le Poche et son tout nouveau
directeur Matthieu Bertholet – grâce à un
abonnement Passe-Textes - et avec Le
Théâtre Vidy par le biais d’un tarif réduit
permettant d’aller voir Fassbinder mis en
scène par Stanislas Nordey.
Fanny Ardant © Carole Bellaiche
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Emma Dante avait marqué les esprits il y
a un an à Avignon avec Le Sorelle Macaluso,
l’histoire de sept sœurs qui dansent, miment,
racontent. L’occasion de découvrir la forte personnalité de cette auteure et metteure en scène
italienne.
Proust sur scène ? D’autres s’y sont cassé
les dents au cinéma… Gageons que le Polonais
Krzystof Warlikowski, qui revient en Suisse
après plusieurs années d’absence, saura rendre
la complexité et la subtilité du grand œuvre de
l’écrivain et que Les Français rendront justice
À la recherche du temps perdu.
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Laurence Tièche-Chavier
La Comédie de Genève, www.comedie.ch
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Du 26 au 31 janvier 2016 : «Le Sorelle Macaluso» d’Emma Dante © Carmine Maringola
Yvette Théraulaz © Marc Vanappelghem
Foofwa d’Imobilité © Gregory Batardon
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à palerme
bayerische staatsoper de munich
Le majestueux Teatro Massimo de Palerme proposait deux
distributions en alternance, solides à défaut de brillance.
Un spectacle presque classique, mené et interprété
admirablement.
Un ballo in maschera Lulu
18
Et c'est curieusement le second cast qui l'emporte sur le premier, ceci
Contrairement à ce qu'on aurait pu attendre de la part de Dmitri
pour chacun des cinq rôles principaux. En Riccardo, le ténor Roberto Tcherniakov, cette Lulu tient plus de la lecture attentive que de la relecture. Le
Aronica développe certes un métal plus ample sur certains aigus que chez metteur en scène russe ne cherche pas ici, comme il le fait souvent, à détourGiuseppe Gipali, mais ce dernier est plus constant et assuré en intonation ner la pièce pour nous la faire voir autrement ; il la déplie simplement, avec
que son confrère. Deux très beaux timbres de baryton assurent le rôle de une direction d'acteurs très serrée et dans une scénographie efficace à défaut
Renato, avec un volume et un impact bien plus conséquents chez Devid d'être esthétiquement frappante. Le décor unique est constitué d'une simple
Cecconi que pour Giovanni Meoni. Chez les femmes, Oksana Dyka possè- architecture de murs et de portes transparents : façon de dire à la fois le dédade bien le format du soprano dramatique réclamé pour Amelia, mais ce le et l'empiétement des espaces, l'emprise de l'extérieur sur l'intérieur, du
dégagement de décibels sans nuances ne véhicule aucune émotion. On lui public sur le privé. Dans ce décor, rien ne peut être vraiment caché, tout est
préfère Virginia Tola aux moyens sûrement plus réduits, mais engagée et toujours vu – et vu notamment d'une foule de figurants : des couples bourgeois
crédible. En Oscar, il est difficile de départager les deux voix piquantes et qui accompagnent la ligne de destinée de Lulu, entre Eros et Thanatos, jusqu'à
aériennes de Anna Maria Sara et Zuzana Markova, avec peut-être une pré- la perte finale de leur plumage social…
férence pour la fraîcheur de la première, tandis
Ce dispositif scénique engage par
que dans la catégorie contralto Judit Kutasi et
moments une sorte de clivage entre un jeu
Tichina Vaugh se montrent toutes deux profond'acteurs très réaliste et l'inévitable
des et en situation, avec quelques sons plus artiabstraction qu'impose parfois le décor.
ficiels et moins précis chez cette dernière. En
C'est le cas en particulier au début du derrésumé ces réserves mises à part, le Massimo
nier acte : au lieu de représenter un salon
propose tout de même dix voix de qualité, bien
où les discussions s'entrecroisent,
timbrées et musicales, ce qui n'est pas exacteTcherniakov place Lulu seule au centre,
ment le cas des rôles secondaires, Silvano, Tom
tous les autres interlocuteurs étant disperet Samuel insuffisants.
sés dans une foule compacte qui l'entoure
La direction musicale de Paolo Arrivabeni
et la regarde se déliter peu à peu. L'idée
est sérieuse et le chef fait entendre certaines
d'une Lulu comme bête de foire, évoquée
petites phrases aux bois souvent noyées dans le
dans le prologue, prend alors tout son sens,
flot puissant des cordes. Les percussions se
d'autant que l'incarnation de Marlis
montrent particulièrement généreuses, les corPetersen est ici particulièrement saisissandes sont sereines, un très bel orchestre, tout
te : elle est vraiment une bête traquée et
comme le chœur bien fourni en quantité et en
son malaise physique contamine toute la
salle.
qualité. La production de Massimo Gasparon est
Très engagée scéniquement, la soprade facture classique, on admire surtout les
no convainc aussi vocalement ; elle pardécors et costumes de Pier Luigi Samaritani. La
vient à conserver une beauté de timbre
première scène de l'acte I ainsi que celle du III
jusque dans les moments paroxystiques et
ressemblent à des tableaux flamands : rais de
recourt au « cri » avec une louable parcilumière éclairant un décor noir, hommes en
monie. A ses côtés, Bo Skovhus confirme,
costumes noirs et chapeaux, un peu de dentelle
«Lulu» avec Marlies Petersen © Bayerisches Staatsorchester
dans le rôle du Dr. Schön, son incomparablanche. Le tableau chez Ulrica n'évite pas le
kitsch habituel, tandis que le II et son gibet passent mieux, autant dans le ble présence scénique. Parmi les autres interprètes, on relèvera la Comtesse
visuel que pour le jeu des acteurs. La scène finale est bien dans l'imagerie Geschwitz de Daniela Sindram, parfois plus en retrait, mais magnifique dans
traditionnelle du Ballo, des costumes colorés, quelques pas de danse, une la dernière scène – et l'Athlète vocalement musclé de Martin Winkler. Mais
perspective de salle de bal suggérée par des toiles successives, une vision tous méritent des éloges dans cette excellente distribution. Toutefois, le dernier éloge doit revenir à Kirill Petrenko, qui sculpte l'opulente pâte sonore du
sobre et élégante.
François Jestin Bayerisches Staatsorchester avec un rare talent. Déployant une palette de couleurs et un ambitus de nuances particulièrement impressionnants, tour à tour
Verdi : UN BALLO IN MASCHERA – les 26 et 27 mai 2015 au Teatro Massimo de
tendre, lyrique ou explosif, il livre une prestation éblouissante.
Palerme
Christophe Imperiali
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metropolitan opera, new york
Fin de saison
Il est fort probable que James Levine n'a jamais entendu parler des Coulisses
de l'exploit, émission phare de la RTF, puis de l'ORTF (en France les sigles et
acronymes changent au même rythme que les intitulés de partis politiques...)
qui avait pour but de mettre en valeur des «hommes et femmes accomplissant
des prouesses exceptionnelles». Pourtant, à ce compte-là, James Levine
mériterait bien de figurer de figurer en bonne place.
Que penser en effet d'un chef diminué physiquement suite à une maladie dont l'issue
paraissait incertaine – surtout auprès de
quelques maestros impatients de prendre sa
place – et qui n'a pas craint de diriger deux œuvres le même jour lors de la dernière journée de
la saison du Met... En matinée, il officiait lors
d'une plaisante version du Rake's progress,
avant de se remettre à l'ouvrage pour un stimulant Bal masqué.
Rake’s progress
Plutôt que de proposer une allusion au
XVIIIe siècle de Hogarth, inspirateur des librettistes W.H.Auden et Chester Kallman, Jonathan
Miller (dans cette reprise d'une mise en scène de
1997) tente de gommer les aspects ludiques et
fantaisistes de cette « Carrière du libertin » pour
mettre en évidence l'aspect de comédie dramatique parfois négligé. Ainsi les costumes années
1930 de Judy Levin ainsi que les décors de Peter
Davison aux références picturales allant de
Magritte et Hopper à Damien Hirst (hilarité
dans la salle...) font pencher l'œuvre du côté de
l'émotion, Tom Rakewell apparaissant alors
comme un grand adolescent égaré, victime
naïve fascinée par l'éclat du grand monde.
Distribution très convaincante et 100% nordaméricaine pour cette reprise qui n'a pas fait
salle comble avec un Gerald Finley cynique à
souhait dans le rôle de Nick Shadow et Layla
Claire émouvante Anne Trulove, tandis que
Paul Appleby sait mettre en exergue les facettes multiples d'un Tom Rakewell passant de la
lumière aux ténèbres. Quant à Stephanie Blythe,
elle offre une prestation évidemment distrayante en incarnant avec brio Baba la Turque.
Un Ballo in maschera
Autre style bien entendu en soirée avec Un
Ballo is maschera, et autre facette du maestro, à
la subtilité et au souci du détail affirmé pour
Stravinsky, place à l'énergie et à une dynamique
sans relâche pour Verdi. Cette production inau-
gurée en 2012 ne restera sans doute pas dans les
annales, la mise en scène de David Alden étant
desservie par des décors anonymes de Paul
Steinberg ainsi que la présence d'une reproduction d'une Chute d'Icare à la justification improbable. Sur la scène du Met, Un Ballo in maschera a toujours bénéficié de distributions prestigieuses et cette version 2015, sans être mémorable, était d'un excellent niveau. Piotr Beczala
(Gustave III) s'affirmait sans conteste par son
autorité et une voix puissante, tandis que Dolora
Zajick impressionnait en Ulrica et qu'Alexey
Markov interprétait un Comte Anckarström à la
voix homogène. Mais la prestation la plus
impressionnante était celle de Sondra
Radvanovsky, véritablement habitée par le rôle
d'Amelia, offrant une performance d'actrice
digne de l'actor's studio, mais surtout faisant
apprécier une voix majestueuse aux nuances
subtiles mais à la puissance imposante.
Incontestablement une des grandes voix de
soprano dramatique du moment.
Don Carlo
On connaît le challenge de tout directeur
d'opéra désireux de monter Don Carlo, il suffit
d'aligner une demi-douzaine de grandes voix –
soit en quelque sorte deux distributions pour un
seul spectacle - et le tour est joué. Autant dire
que malgré quelques soucis financiers en début
de saison et par l'effet de quelques généreux
mécènes comme habituellement dans ce pays, le
Met a pu présenter une production convaincante vocalement du chef-d'œuvre de Verdi.
Revival d'une version créée en 2010, la mise en
scène sobre de Nicholas Hytner et les costumes
d'époque de Bob Crowley servaient avec pertinence l'affrontement entre un Philippe II âgé, à
savoir Ferruccio Furlaneto, grand spécialiste du
rôle depuis plus de trois décennies dont le « Ella
giammai m'amo » continue d'émouvoir comme
il se doit et son « rival » Don Carlo interprété
par unYonghoon Lee qui révèlait une voix puissante et au timbre séduisant. A ses côtés, Luca
Salsi était un Rodrigo à la vaillance indéniable
et les interprètes féminines - qu'il s'agisse de
Barbara Frittoli à l'impeccable musicalité ou de
Nadia Krasteva dont le « Don fatale » saisissait
par son intensité dramatique - étaient les garants
d'une soirée réussie dont le mérite revenait également à Yannick Nézet-Séguin à la tête de
l'Orchestre et des Chœurs maison.
Frank Fredenrich
Sondra Radvanovsky est Amelia dans «Un Ballo in maschera» © Ken Howard / Metropolitan Opera
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à marseille
à nice
Créé à l’Opéra de Monte-Carlo en 2010 avec Bryn Terfel
dans le rôle-titre, le spectacle de Jean-Louis Grinda
dégage à nouveau la même jubilation.
La nouvelle production de La Juive à l'Opéra de Nice est
une preuve supplémentaire du regain d'intérêt pour le
répertoire du grand opéra français, ainsi que de la difficulté
à monter ce type d'ouvrage.
Falstaff
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La Juive
Les magnifiques décors de Rudy Sabounghi trouvent même un confort
supplémentaire sur la scène phocéenne, tant l’espace extrêmement compté
de l’étroit plateau de la salle Garnier rendait une sensation de trop grande
densité. Les livres géants sont encore manipulés à vue par des machinistes
en noir entre les scènes, opérations rapides qui permettent au spectateur de
ne pas relâcher son attention. Les titres des ouvrages sont toujours aussi bien
choisis, et on sourit à nouveau de bon cœur à la lecture – parmi certains classiques, dont Shakespeare – de « Vengeance à la basse-cour » de Richard
Duck. Les costumes animaliers de Jorge Jara Guarda sont d’un très bon goût
et très drôles : la volaille pour les commères (pintade, paon, …) et les protagonistes, le coq Falstaff « maître » des lieux, mais aussi les chats Pistola
et Bardolfo, un mouton qui passe, quatre vaches qui avancent en sautillant…
Nicola Alaimo dans le rôle-titre domine la distribution et compose un
Falstaff absolument bluffant, tout comme à l’Opéra Comédie de Montpellier
en 2009. Moins agressif dans le style mais au moins aussi truculent que son
aîné Terfel, le baryton italien varie
les couleurs, les volumes, entre un
« L’onore » poussé à pleine voix
et de petites phrases délicieuses.
Jean-François Lapointe (Ford)
projette puissamment, comme
dans son air de la jalousie, et Enea
Scala (Fenton) est robuste et méditerranéen mais sonne un peu pincé.
Pour les seconds rôles, Rodolphe
Briand (Bardolfo) et Patrick
Bolleire (Pistola) sont bien en
place et sonores, qualités un peu
moindres chez Carl Ghazarossina
(Caïus). Côté femmes, après avoir
longtemps fréquenté Nanetta,
Patrizia Ciofi se montre moins
convaincante en Alice Ford, ses
quelques notes aigues superbement aériennes et éthérées ne rattrapant pas tout à fait le déficit de
Nicola Alaimo © Dresse
graves et de largeur de la voix.
Sabine Devieilhe ne fait en revanche qu’une bouchée du rôle de Nanetta,
Annunziata Vestri est sans problèmes dans l’emploi plus réduit de Page et
Nadine Weissmann en Quickly joue très bien, le chant étant moins impressionnant. Lawrence Foster à la baguette garde l’ensemble sous contrôle,
aussi bien pour le rythme plutôt compliqué de la partition verdienne, que
pour les décibels qui évitent de couvrir les chanteurs.
François Jestin
«La Juive» © Jaussein
Même très imparfait vocalement, même avec de nombreuses coupures
– de l'ensemble des ballets il ne reste par exemple qu'un très court extrait de
trois minutes, traité comme un jeu de chaises musicales –, le bilan au final
est positif, le plaisir l'emportant sur la frustration. Et pourtant l'oreille souffre pendant la soirée, d'abord pour Luca Lombardo en Eléazar, voix serrée
et sans séduction, timbre gris ; annoncé malade avant le lever de rideau, le
ténor français fait quand même preuve d'engagement, mais cette difficile
prise de rôle arrive bien tardivement dans sa carrière. L'autre ténor Thomas
Paul (Léopold) est capable de notes éclatantes, mais ses excursions vers l'aigu sont plus qu'aventureuses, avec des passages carrément à côté. Les voix
graves sont bien meilleures, avec la basse profonde et autoritaire de Roberto
Scandiuzzi (Cardinal Brogni), Jean-Luc Ballestra (Ruggiero) superbement
timbré et à la prononciation impeccable, ainsi que l'autre baryton bien assuré Zoltán Nagy (Albert). Côté féminin, Cristina Pasaroiu en Rachel est à la
fois sonore et émouvante, la chanteuse est jeune et pourra encore développer son registre grave ainsi que sa qualité du français. Hélène Le Corre
(Eudoxie) est bien chantante, voix fraîche, musicale, agile, plutôt légère, et
sa diction est un régal. La direction musicale de Frédéric Chaslin semble
mieux réglée pour les passages purement instrumentaux, souvent délicieux,
que pour les moments de paroxysme lyrique comme le finale du premier
acte où les décalages se multiplient et la coordination des chœurs, solistes et
musiciens se relâche. La mise en scène de Gabriele Rech, en coproduction
avec l'Opéra de Nuremberg, est de facture plutôt classique avec quelques
touches de Regietheater. Le premier acte s'ouvre sur des estrades disposées
devant une rosace de cathédrale, le peuple agite des drapeaux rouges et noirs
évoquant les années 1930, puis le II propose vraisemblablement l'image la
plus puissante et inspirée, une grande table en travers du plateau chez
Eléazar sous une ouverture en étoile de David au plafond. On apprécie cette
forte simplicité, d'autant que le metteur en scène est moins heureux lorsqu'il
s'éloigne de cette sobriété, par exemple lors de l'échange de papiers, déchirés ensuite, entre Rachel et Léopold “je suis juif“, “je suis chrétienne“.
François Jestin
Verdi : FALSTAFF – le 4 juin 2015 à l’Opéra de Marseille
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passe, beaucoup d’Allemagne nazie des années 1930, croix gammées, mais
aussi le conflit israélo-palestinien, moult dictateurs (Khadafi, Bokassa,
Franco et ses équivalents sud-américains), jusqu’à la photo de famille des
dirigeants actuels de ce monde. Le problème est que l’œil est soit irrémédiablement attiré par l’image, soit désintéressé lorsque celle-ci devient décorative, comme les nuages ou les vagues qui passent gentiment. L’atmosphère
tourne presque à la soirée diapos, ou mieux encore donne l’impression d’un
magazine de type Paris Match qu’on feuillette. Les meilleurs moments coïncident finalement avec les passages où le plateau est vide et plongé dans le
noir, comme les deux monologues de Shylock.
à sainte-étienne
Le Marchand
de Venise
La 12ème édition du festival Massenet n’a pas inclus
d’opéra du compositeur stéphanois à son affiche, mais
propose une œuvre d’un de ses élèves, Le marchand de
Venise de Reynaldo Hahn.
François Jestin
Hahn : LE MARCHAND DE VENISE – le 31 mai 2015 à l’Opéra-Théâtre de SaintEtienne
Les occasions sont très rares de découvrir l’ouvrage, puisque la dernière française remonte apparemment à 1979 à l’Opéra-Comique, salle Favart.
On connaît d’abord le compositeur par sa Ciboulette, remontée d’ailleurs
ces dernières saisons à l’Opéra-Comique puis à Saint-Etienne, mais il s’agit
ce soir d’un opéra et non plus d’une opérette. La partition en est extrêmement variée pour le style, l’orchestration, et fort séduisante du point de vue
de la mélodie. De très jolis airs se glissent au cours d’une élégante conversation en musique, certains passages sont très suggestifs comme par exemple l’arrivée du prince du Maroc puis celle du Prince d’Aragon au 2ème
acte. Le duo d’amour du II entre Portia et Bassanio évoque très fortement,
voire explicitement Tristan et Isolde, puis très vite dans le quatuor qui suit,
la musique devient plus légère en tirant
vers Ciboulette. En tout cas, c’est une
partition qu’on a envie de réentendre,
surtout aussi bien dirigée par le chef
Franck Villard, avec peut-être un petit
relâchement de l’ensemble au 3ème et
dernier acte, lors des interventions des
chœurs parfois en ordre dispersé. Le festival a su réunir une distribution vocale
de haute qualité et très homogène, tant
pour la qualité du chant que de la diction.
Gabrielle Philiponet est une Portia d’un
joli timbre juvénile, qui manque par
endroits d’un peu d’ampleur, au contraire d’Isabelle Druet (Nérissa), voix qui
porte avec franchise. Magali ArnaultStanczak qui défend le troisième rôle
féminin de Jessica est embarrassée d’un
«Le Marchand de Venise»
© Cauvet
vibratello, tandis que son amoureux
François Rougier (Gratiano) est sans problèmes. L’ensemble de la troupe masculine est solide et bien chantant, à
commencer par le Shylock de Jean-Pierre Pruvot qui déverse sa haine de
manière spectaculaire, puis Guillaume Andrieux (Bassanio), très bel instrument mais qui doit faire attention à soutenir la ligne vocale jusqu’à l’extrême extinction de la note. Frédéric Goncalvès (Antonio) est bien posé, appliqué, et Philippe Talbot (Lorenzo) un ténor de valeur, aux côtés de Harry
Peeters (Tubal), Frédéric Caton (Prince du Maroc, Doge). Le spectacle
pêche tout de même par le traitement d’Arnaud Bernard, chargé de la mise
en scène, des décors et costumes. Est-ce un effet de la contemporanéité du
festival de Cannes, mais toujours est-il que le procédé de projection d’images et de petites séquences filmées est utilisé jusqu’à la démesure. Tout y
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à avignon
Le Braci
Lauréat du dernier ARMEL Opera Competition à Szeged
en Hongrie, Le Braci d’après le roman « Les Braises » de
Sandor Marai, est donné pour une unique représentation
à l’Opéra Grand Avignon.
Ayant assumé entre autres les fonctions de directeur artistique du Teatro
Regio de Turin puis du Comunale de Bologne, le compositeur Marco Tutino
est une personnalité qui compte dans le paysage musical italien. Dans sa
partition d’une heure et 20 minutes environ, on entend une succession de
clins d’œil, voire de quasi citations d’opéras que tout amateur peut reconnaître. Le musicien qui domine est sans doute Britten, avec du Billy Budd mâtiné de Turn of the Screw, mais aussi un peu de Pagliacci, de brèves mesures
dignes d’Elektra de Strauss, et des passages d‘orchestration alla Messiaen,
…, bref tout y passe ou presque ! L’oreille en est évidemment séduite, surtout que l’impeccable orchestre symphonique de Szeged dirigé par Sandor
Gyüdi a fait le déplacement avignonnais, après avoir défendu l’œuvre une
dizaine de fois cette saison en Hongrie. De soudains changements d’atmosphères musicales sont aussi rendus possibles par les nombreux allers et
retours de l’intrigue, entre la présente conversation et les flash-back 40 ans
en arrière. Les deux anciens amis qui se retrouvent sont en fait barbouillés
de blanc, figurant des fantômes, comme le confirme la phrase répétée à l’envi à la toute fin de l’ouvrage « Siamo solo fantasmi ». La production d’Attila
Toronyköy est à la fois simple, efficace et évocatrice de ce huis-clos menaçant, avec en fond de plateau un tableau de la scène de chasse d’antan et ses
personnages réels qui s’y montrent en transparence par moments. Le niveau
vocal reste tout de même bien plus modeste, que ce soit Tamas Altorjay et
Jean-Philippe Biojout, voix caverneuse et peu stables mais finalement en
situation pour incarner les vieux amis fantômes Henri et Conrad, Szilveszter
Szelpal (Henri jeune) et Tivadar Kiss (Conrad Jeune), ou encore côté féminin Krisztina Konya (Christine) et Boglarka Laczak (Nini) à l’ampleur limitée. Au final un spectacle sans temps morts, agréable et intéressant, malheureusement suivi par une salle très clairsemée.
François Jestin
Tutino : LE BRACI – le 3 juin 2015 à l’Opéra Grand Avignon
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opéra du rhin : ariane et barbe-bleue
turin
Ariane et Barbe-Bleue, le seul ouvrage lyrique de Paul
Dukas, est indiscutablement un chef-d'œuvre, mais il reste
fragile, car le livret réduit le rôle de Barbe-Bleue à la
portion congrue; en dépit de ce que laisse attendre le titre,
en effet, le bourreau des cœurs féminins n'a pour ainsi dire
pas droit au chant et laisse le champ libre à Ariane, sa
Nourrice et ses cinq femmes.
Le Théâtre Regio de Turin propose une nouvelle
production en collaboration avec le Maggio Musicale
Fiorentino des Puritains de Bellini, confiée au metteur en
scène italien Fabio Ceresa et au chef Michele Mariotti.
Ariane
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I Puritani
L'orchestration, encline à une emphase quasi wagnérienne, exige du
chef qu'il porte un soin tout particulier à l'allégement des textures, à leurs
miroitements, à leur fluidité s'il veut éviter que la représentation ne sombre
dans la redondance instrumentale pour conserver à la partition son parfum
délibérément français. Quant aux voix des interprètes des deux rôles féminins principaux, elles se voient sollicitées à l'extrême ; l'écriture de Dukas
exige en effet d'elles des réserves infinies de puissance, des raffinements de
phrasés subtils ainsi qu'une endurance scénique hors du commun puisqu'elles ne quittent pour ainsi dire jamais la scène pendant les deux heures que
dure le spectacle, donné ici sans entracte. Et c'est là le premier défaut de
cette réalisation admirable, mais bancale : Ariane est tout simplement absente par la faute d'une chanteuse qui exhibe sans retenue un matériau vocal
mité, acide dans les aigus qu'elle crie sans retenue, mou et creux dans le
médium et tout simplement absent dans le grave. Heureusement, la Nourrice
de Sylvie Brunet-Grupposo relève le défi avec panache : sa voix ample,
généreuse, domine sans peine le dialogue qu'elle engage avec l'orchestre
tout en nous régalant de quelques moments d'une exaltation subjuguante qui
ne vire jamais à l'hystérie tant l'émission et le souffle sont superbes de discipline. Le seul défaut de cette interprétation hors du commun était de mettre crûment en évidence les manques de celle de sa partenaire...
Les rôles secondaires, auxquels il convient d'ajouter les quelques
répliques chevrotantes chantées sans conviction par le Barbe-Bleue éteint de
Marc Barrard, étaient correctement tenus et ne retenaient pas longuement
l'attention alors que la direction de Daniele Callegari, grandiose dans les
moments de déchaînements apocalyptiques qui jalonnent la partition, peinait
à rendre toute leur délicatesse diaphane aux moments d'intimisme dont le
deuxième acte regorge. Néanmoins, l'Orchestre symphonique de Mulhouse
se montrait sous son meilleur jour dans ces scintillantes tapisseries orchestrales que renferment les rares épisodes choraux et surtout les longues introductions à chacun des actes, tissées ici avec une verve et une précision d'intonation qui séduisait sans réserves. Olivier Py, qui signait la mise en scène,
n'aura déçu ni ses admirateurs ni ses détracteurs. On retrouve les exceptionnelles qualités de visionnaire de ce conteur-né qui, avec l'aide de son décorateur et costumier Pierre-André Weitz, habille d'images saisissantes, sans
cesse renouvelées, un livret d'un statisme que d'aucuns pourraient juger désespérant. Mais il faut encore une fois s'accommoder de ses fantasmes qui
deviennent de plus en plus envahissants. Ajoutez à cela une direction d'acteurs étonnamment rudimentaire chez un homme de théâtre, mais des éclairages fulgurants et sublimes en certains moments clefs du drame, et vous
aurez une idée assez précise de ce qui s'est joué sur le plateau alsacien...
(Représentation du 17 mai)
Bien que le répertoire et le style du Belcanto
soit bien familier aux
chanteurs de la nouvelle
génération, les Puritains
sont rarement à l'affiche
des grands théâtres. Le
dernier opéra du compositeur sicilien demande en
effet la présence de quatre
«I Puritani». Photo Ramella & Giannese
solistes exceptionnels et
© Teatro Regio Torino
en particulier un ténor
capable à la fois de tendresse et d'héroïsme. Fabio Ceresa plonge le monde de
la guerre civile entre Cromwell et les Stuarts dans une atmosphère gothique,
sombre et lourdement funéraire, dominée par une énorme voûte ogivale renversée (décors de Tiziano Santi). L'interprétation de l'œuvre comme une fuite de
tous les personnages du domaine du Temps et de la Mort (expliquée par le metteur en scène dans le programme), bien qu’ingénieuse, paraissait excessivement sophistiquée par rapport à la modeste portée philosophique des Puritains,
chef-d'œuvre issu d'un heureux malentendu entre les aspirations politiques du
librettiste et le lyrisme indifférent à toute question idéologique du compositeur.
Le fait de rendre le voile d'Elvira/Enrichetta (noir dans les deux cas!) un objethypostase du temps qui s'écoule était toutefois intéressante. Par contre l'effet de
contraste entre l'atmosphère lugubre de la scène et des costumes clinquants
qu'on aurait dit tirés de la fabrique de chocolat Willy Wonka, produisait un effet
assez modeste sur le plan éstethique. Sur le plateau, le ténor Dmitry Korchak
assurait le redoutable rôle d'Arturo. Doué d'une indiscutable musicalité, d'une
diction excellente et d'un phrasé toujours intéressant, le ténor a toutefois fait
preuve d'une émission assez laborieuse notamment dans les aigus, agressés à
pleine voix et souvent accompagnés de quelques problèmes de justesse. A côté
de lui, Olga Peretyatko était une Elvira assez convaincante, à l'aise plus dans
l'envol lyrique que dans la colorature. Sa voix, plutôt sombre dans le medium,
semble plus appropriée pour des rôles de belcanto dramatique que pour les personnages angéliques et innocents. Dans le rôle de Riccardo, Nicola Alaimo,
malgré de bonnes intentions et une certaine puissance vocale, n'arrivait à rendre de façon convaincante ni la noblesse du soldat de Cromwell ni la tristesse de
l'amant mal aimé. Nicola Ulivieri était un superbe Giorgio. Malgré une voix
assez claire et pas très imposante dans le registre grave, la ligne de chant et le
phrasé de la basse italienne ont conquis le public turinois qui lui a réservé à
juste titre des ovations répétées. Son interprétation de l'air «Cinta di fiori» de
l'acte II a été sans conteste le plus beau moment du spectacle. Le chef Michele
Mariotti était plus soucieux des effets de contraste dynamique dans l'orchestre
que de l'équilibre entre celui-ci et la scène, ce qui a provoqué nombreux décalages avec le chœur et les solistes.
Eric Pousaz
Gabriele Bucchi
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arènes d’avenches
Le Barbiere
C’est sur le plus célèbre des opéras de Rossini, le Barbier
de Seville, que s’est porté le choix de l’Opéra de Lausanne
pour son habituelle production estivale aux Arènes
d’Avenches. Avec une nouveauté d’importance cette année
: les conditions météorologiques ne risqueront pas de perturber les représentations du chef-d’œuvre rossinien, à
l’affiche du 4 au 17 juillet.
par le ténor chinois Yijie Shi, dont l’excellente exécution d’Argirio dans
le récent Tancredi avait suscité l’enthousiasme du public lausannois.
Habituellement confié à des voix de mezzo, le rôle de Rosine a été néanmoins interprété par le passé par des voix plus légères. Forte d’une réputation comme Reine de la Nuit, la soprano croate Lana Kos donnera à l’astucieuse pupille de don Bartolo une couleur brillante assez rare de nos
jours. Le baryton de renommée internationale George Petean (Le Trouvère
à Genève en 2009) prêtera sa voix au rôle titre avec, à côté de lui, Miguel
Sola (Bartolo), Ruben Amoretti (Basilio), sans oublier l’excellente Carine
Séchaye (Berta).
Que ce soit sous un ciel étoilé ou pas, il n’y pas de doute que le
Barbiere, à bientôt deux cents ans de sa création (1816-2016), saura encore une fois ensorceler et amuser le public d’Avenches.
Gabriele Bucchi
En cas de mauvais temps, le public pourra
en effet assister au spectacle à l’intérieur du
grand manège de l'Institut national d'Avenches,
aménagé pour la première fois à cet effet. La
seule pluie qu’on entendra cet été sur scène, ce
sera donc celle prévue par Rossini pour accompagner la tempête qui s’abat sur la maison de
don Bartolo à la fin du deuxième acte…
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L’Orchestre de Chambre Fribourgeois sous
la baguette du chef Nir Kabaretti se chargera de
rendre les effets humoristiques de cette célèbre
page orchestrale ainsi que de toute l’exigeante
partition rossinienne. Sur la scène, ce sera à l’italien Marco Carniti (réalisateur du diptyque
Schauspieldirektor / La Canterina de Mozart /
Haydn en 2006 à Lausanne) de raconter encore
une fois les amours contrastées du comte
d’Almaviva et de la belle Rosine. Le rôle du
grand d’Espagne sera assuré à cette occasion
Nir Kabaretti © David Bazemore
Les 4, 7, 9, 11, 14 & 17 juillet 2015
Chœur de l'Opéra de Lausanne
Orchestre de Chambre Fribourgeois
Direction musicale : Nir Kabaretti
Billetterie sur place :
Lu au ve de 9h à 12h et de 13h30 à 16h
Bureau du festival, Rue Centrale 6, Avenches
T 026 676 06 00
[email protected]
Billetterie en ligne
Commandez et imprimez vos billets chez vous. Paiement
sécurisé par carte de crédit ou par Postcard.
(Frais de prélocation en plus)
A la caisse le soir des représentations
Info météo et lieu de la représentation dès 14h30:
0800 10 10 20
Lana Kos (Rosine)
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En termes de traitement visuel, pensez-vous qu’il y a des limites à ne pas franchir, vis-à-vis de la question du blasphème en
particulier ?
entretien : bernard foccroulle, directeur du festival
Aix-en-Provence
De Haendel et Mozart jusqu'à la création contemporaine, le directeur du
festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence Bernard Foccroulle
nous présente l'édition 2015.
Pour commencer, pouvons-nous évoquer les attentats de janvier à Paris dont
l’attaque meurtrière de Charlie Hebdo ?
Cabu et Wolinski étaient des personnalités
qu’on pouvait régulièrement apercevoir au
festival d’Aix…
24
Oui forcément, l’émotion a été très vivement ressentie. J’étais en Australie à ce moment-là et en
contact avec les équipes ; il y a eu des arrêts de
travail, des participations aux manifestations. Et
puis dans les jours qui ont suivi l’attentat nous
avons mis sur notre site internet les dessins que
Wolinski avait créés lors de ses deniers passages
au festival. Ensuite, toute la thématique qui est
abordée depuis lors était déjà présente de manière sous-jacente dans le festival, les formes de violence, d’intolérance. Ces événements de janvier
ont été particulièrement heurtants, mais ne sont
pas isolés d’un climat plus global qu’on voit se
dégrader depuis un certain temps. La question
qu’on se pose est de savoir quelle est la pertinence du travail que nous menons, par la programmation, par les artistes que nous invitons, par la
lecture des spectacles qui sont proposés, par les
formes de communication que nous établissons
avec les publics, et nous n’avons pas attendu le
mois de janvier pour y travailler.
série de défis absolument majeurs et paradoxalement en étant de plus en plus démunis. Sur le
champ culturel, je pense que nous devons être
modestes quant à notre capacité à influer sur les
choses, et en même temps très ambitieux et en
tout cas très volontaires sur notre mission qui
est d’être attentif à tout ce qui traverse le champ
culturel aujourd’hui, la question de la liberté
d’expression et aussi à tout ce qui peut porter les
rencontres entre cultures, en particulier les éléments de dialogue. De plus l’opéra est par nature et par histoire un art qui repose sur le dialogue entre différents artistes, différentes disciplines, et cela se traduit aussi avec les publics. La
question se posait donc de savoir comment cela
peut influer dans notre travail avec les communautés qui sont présentes sur notre territoire et
qui aussi viennent de plus loin. Pour dire les
choses autrement, je ne suis pas sûr que le
monde culturel aujourd’hui en Europe joue
complètement le rôle qui devrait être le sien, je
crois qu’il y a une vraie prise de conscience qui
doit être faite, à laquelle aucun d’entre nous ne
peut s’en estimer quitte.
La culture en général est-elle une
forme de lutte, de résistance, de voie vers le
progrès ?
Dans un contexte où la culture a un rôle très
important à jouer, en France je pense qu’il y a
encore une certaine conscience de cela, plus élevée que dans beaucoup d’autres pays européens
aujourd’hui où on a le sentiment que le monde
politique, le monde éducatif, la société civile
ont perdu un peu conscience de ce que la culture pouvait apporter dans son rapport à l’éducation. Je ne dis pas que c’est parfait dans ce pays,
mais il y a encore une certaine conscience de
cela. Après, une chose dont je suis absolument
convaincu, c’est qu’il y a des éléments de dérive, on voit que la société se fracture, il y a des
formes de dualisation, nous sommes devant une
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Patricia Petibon (Alcina) © Inge Prader/DG
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C’est une vraie question, parce que je crois qu’il
faut être plus que jamais attentif à la liberté
d’expression, mais je ne pense pas que celle-ci
autorise forcément n’importe quel discours, et
en particulier je trouve qu’elle n’autorise pas les
postures qui sont de nature à blesser profondément des individus ou des communautés. Alors
comment règle-t-on ça ? C’est très compliqué,
mais je ne suis pas sûr qu’on va progresser en
multipliant les blasphèmes. Après, il faut s’entendre sur le blasphème et peut-être travailler
dans les écoles pour montrer que représenter le
Prophète n’est pas forcément un blasphème et
qu’il faut accepter de sortir de tous ces clichés
d’une lecture radicale et superficielle de l’Islam.
Pour moi la liberté d’expression n’est pas la
seule valeur aujourd’hui, il faut pouvoir l’articuler avec d’autres valeurs, et notamment le
respect de diversités culturelles, philosophiques, religieuses.
Pour enchaîner sur l’affiche du festival, l’Enlèvement au Sérail de Mozart peut
relever de la problématique du blasphème,
production confiée à Martin Kusej…
Du coup, la question de l’Enlèvement est délicate ! Nous en avons beaucoup parlé, Martin
Kusej m’avait dit son intention d’en faire une
lecture politique, une lecture d’aujourd’hui dans
des costumes contemporains. A la lumière des
événements de janvier et de la violence de l’impact, il a décidé de retravailler le projet et a souhaité garder son propos mais le distancier dans
le temps. Il a donc choisi des costumes des
années 1930 pour permettre, je pense, à un
public devant un opéra de Mozart de mieux percevoir ce qu’il peut y avoir d’intemporel voire
de contemporain dans la pièce, sans recourir à
un procédé facile qui consisterait à donner aux
chanteurs des costumes tels qu’on les voit
aujourd’hui dans les reportages télévisés qui
traitent des prises d’otage ou de l’état islamique.
En tout cas de sa part, il y a une réflexion en
profondeur sur ce que cette pièce nous raconte
aujourd’hui et il veut la faire avec un très fort
impact théâtral, nous n’aurons donc pas une
mise en scène de type exotique et léger, elle va
tenter d’aller à la racine de l’œuvre en tout cas.
Il y aura une image de désert, une tente, nous ne
serons pas devant le palais du sultan en Turquie
mais beaucoup plus dans le monde arabe, du
coup la question du rapport des civilisations,
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des cultures va se poser sous des formes un peu
différentes de celles que Mozart avait inclus, en
particulier la question du comique présent dans
la pièce, comment va-t-il être traduit ? En tout
cas, il ne change pas une note ni un élément du
texte chanté, en revanche il a fait un travail sur
les dialogues qu’il a en partie réécrits en collaboration avec un écrivain dramaturge allemand,
en considérant que les textes tels quels ont
beaucoup de faiblesses.
à la veille du mariage de l’une d’entre elles, qui
traversent tous les affects, les sentiments de
joie, d’inquiétude, de tendresse qui peuvent être
partagés dans ces moments-là. La compositrice
serbe Ana Sokolovic a été puiser dans le répertoire de musique balkanique, où les chants de
mariage sont très nombreux, des chants porteurs
d’une dimension dramatique. On peut d’ailleurs
comprendre qu’il s’agit d’un mariage forcé, ou
en tout cas pas d’un mariage rêvé par la jeune
fille. C’est vocalement absolument somptueux.
La pièce créée en concert sera cette fois mise en
scène par Ted Huffman et Zack Winokur qui
avaient réglé Les Mamelles de Tirésias ici en
2013. C’est une production qui pourra voyager
aisément, dans des lieux qui ne sont pas des
temples de l’opéra.
Autre opéra donné en nouvelle production, Alcina qui poursuit le cycle
Haendel…
Le cycle démarré l’année dernière est prévu sur
trois ans. Plusieurs éléments justifient le choix
d’Alcina, je pense d’abord que c’est un des opéras de Haendel les plus réussis, avec des airs
formidables mais aussi un livret très intéressant
que Katie Mitchell travaille de manière très littérale, ce qui va étonner car elle prend la dimension de la séduction, et même de la sexualité littéralement. J’avais aussi envie d’inviter
Philippe Jaroussky au festival et le rôle de
Ruggiero était un de ceux qui le tentaient le plus
dans le répertoire haendelien. C’est aussi l’opéra que Haendel a écrit juste après Ariodante
donné l’année dernière, donc il y a une sorte de
continuité naturelle, avec le même orchestre, le
même chef, et Patricia Petibon. Je pense que
nous verrons également deux propositions
contrastées, avec Alcina au Grand Théâtre de
Provence alors qu’Ariodante était à
L’Archevêché ce qui est déjà un changement en
soi, en termes de moyens techniques notamment.
En restant au GTP, nous aurons le
diptyque Iolanta / Perséphone créé à Madrid
sous la direction alors de Gérard Mortier…
Plusieurs choses ont rendu ce projet assez
exceptionnel, d’abord le succès qu’il a remporté à Madrid et auprès de la presse internationale, et aussi l’intérêt de la lecture commune de
Peter Sellars et de Teodor Currentzis. J’ai travaillé plusieurs fois avec Sellars, pour
Currentzis ce sera la première fois, les deux
étant très en harmonie dans leur travail, le chef
étant très présent dans le travail scénique. Ils ont
intégré ensemble dans Iolanta un chœur de
Tchaïkovski qui ne vient pas de l’opéra. Le voisinage avec Perséphone est inattendu, mais une
sorte de fil conducteur traverse la soirée, qui est
évidemment l’attrait de la lecture de Sellars
dans ce qu’elle a à la fois de sobriété et de plongée au cœur des œuvres. S’ajoute à cela le fait
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Lawrence Zazzo (Oberon) © Justin Hyer
que Iolanta est peut-être le seul opéra qui a un
lien avec des personnages historiques aixois et
provençaux, le roi René. Malgré tout, l’invitation d’un spectacle extérieur reste l’exception.
Puis A Midsummer night’s dream créé
ici il y a 25 ans, qui a beaucoup voyagé …
Une série de raisons a milité pour cette décision.
D’abord le désir de Carsen de remonter sa production là où il l’avait créée, il me l’a dit à plusieurs reprises. Ensuite, pour moi c’est un peu
une démarche expérimentale, une production
aussi ancienne – qui a presque un quart de siècle – reprise au festival. Comment a-t-elle traversé ce quart de siècle, qu’est-ce qu’elle va
nous raconter aujourd’hui, il y a un petit côté
« Voyons voir ! » qui est intéressant ! Il y a aussi
une dimension intergénérationnelle ici qui est
très forte, notamment auprès des artistes, il est
intéressant que de jeunes artistes, des membres
de l’académie voient une production iconique,
qui avait vraiment révélé Carsen au monde.
C’est le spectacle dans l’histoire du festival qui
a le plus circulé. Nous recréons la production
ainsi que les costumes, et nous pourrons la faire
voyager en Aise en particulier, où jusqu’à présent elle n’avait jamais été présentée.
La musique contemporaine est présente cette année, avec Svadba, opéra pour 6
voix de femmes a cappella, créée en 2011 à
Toronto…
Egalement Le Monstre du labyrinthe
de Jonathan Dove, une petite forme d’opéra
en durée (1 heure), mais avec orchestre dirigé par Simon Rattle…
Jonathan Dove a composé des opéras et a réduit,
arrangé plusieurs œuvres pour des formations
de taille moyenne, il a écrit pour le festival de
Glyndebourne il y a 3-4 ans, et ici c’est Simon
Rattle qui lui avait passé commande dans un
premier temps pour le Berliner Philharmoniker
et le London Symphony Orchestra. Puis ils
m’ont proposé de nous y joindre, c’est un opéra
qui fait appel à un grand nombre d’amateurs,
c’est un projet qui pour moi est très symbolique
de tout ce que nous avons développé au festival
ces dernières années. Ce projet a une forte
dimension participative puisqu’il y aura 300
amateurs sur scène, l’orchestre sera composé de
21 musiciens du LSO et de 25 musiciens de
l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée,
parce que là aussi Dove et Rattle ont souhaité
qu’il y ait une dimension de transmission entre
les générations. C’est une aventure hors du
commun, l’œuvre sera créée en allemand à
Berlin, reprise en anglais à Londres, puis donnée ici en français, ce qui veut dire des chanteurs différents, des productions différentes
puisque Berlin et Londres n’ont pas de fosse
d’orchestre, ceci de manière très rapproché à
partir de fin juin à Berlin. Il y a un engagement
et une excitation des uns et des autres qui fait
plaisir !
Propos recueillis par François Jestin
Je pense que Svadba va être une forte découverte de cet été, parce que c’est un exemple parfait
de petite forme très réussie. Six voix de femmes
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festival
Arena di Verona
Six opéras au programme pour la 93ème édition du festival dans des
productions déjà proposées ces dernières années : les habituels opéras
d’extérieur Aida, Nabucco, Tosca, mais aussi Don Giovanni, Il Barbiere di
Siviglia et Roméo et Juliette.
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C’est Nabucco qui lancera les festivités
le 19 juin, dans la proposition visuelle de
Gianfranco de Bosio créée en 1991, direction de Riccardo Frizza, avec Luca Salsi et
Martina Serafin pour les premières représentations. Après la reprise de la production
historique de 1913, puis la réalisation du
collectif catalan La Fura dels Baus ces deux
dernières années, Aida sera proposée cette
saison dans la production imposante de
Franco Zeffirelli : 6 sopranos en alternance
dans le rôle-titre, 5 ténors en Radames (dont
Gregory Kunde), 5 mezzos en Amnéris
(dont Rachvelishvili, Gubanova, Komlosi).
pupitre, production de Francesco Micheli.
D’autres soirées de concert et de ballet
sont également au programme.
François Jestin
- Nabucco : les 19, 25 juin, 3, 9, 15, 18, 23 juillet, 13,
18, 22, 26, 29 août, 1er et 5 septembre
- Aida : les 20, 27 juin, 5, 7, 12, 14, 19, 25, 31 juillet,
9, 11, 15, 19, 23, 27, 30 août, 2 et 6 septembre
- Tosca : les 26 juin, 8, 11, 16 juillet, 6 et 14 août
- Don Giovanni : les 4, 10, 17, 30 juillet, 12 août
- Il Barbiere di Siviglia : les 1er, 7, 20, 28 août, 4 septembre
- Roméo et Juliette : les 8, 21 août, 3 septembre
Puis c’est la Tosca réglée par Hugo de
Ana, présentée depuis 2006, qui enchaînera
pour 6 soirées (Hui He et Elena Rossi se
partagent le rôle-titre), avant Don Giovanni
Programme complet sur : www.arena.it
Hui He (Tosca)
mis en scène par Franco
Zeffirelli, sous la baguette de
Stefano Montanari, un chef que
les spectateurs de l’Opéra de
Lyon peuvent entendre régulièrement (Carlos Alvarez et
Ildebrando d’Arcangelo en Don
Giovanni).
Autres titres, Il Barbiere di
Siviglia dirigé par Giacomo
Sagripanti (entendu à Pesaro l’an
dernier) avec les spécialistes
Mario Cassi, Jessica Pratt, Bruno
De Simone sur certaines dates,
mise en scène de Hugo de Ana,
puis pour la 5ème saison consécutive le titre véronais par excellence : Roméo et Juliette de
Gounod, avec Irina Lungu et
Giorgio Berrugi, Daniel Oren au
Gregory Kunde (Radames)
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Daniel Oren
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pesaro
Rossini Opera Festival
La 36ème édition du Rossini Opera Festival (ROF) sera la dernière pour
Alberto Zedda au poste de directeur artistique de la manifestation. L’illustre
chef et musicologue rossinien, qui cédera la place à Ernesto Palacio à partir de
2016, conservera tout de même ses activités auprès des jeunes interprètes de
l’Accademia rossiniana.
Monaco, …), comprenant le quintette de l’acte
1 retrouvé dans une bibliothèque de Palerme en
2012. Le ROF n’en aura pas la primeur puisque
ce morceau a été joué lors d’une série de représentations à Liège en juin 2014. Succédant à la
précédente production de Dario Fo – au cours
de laquelle le quintette était d’ailleurs déclamé
sur un rythme saccadé… un moment assez
étrange à l’opéra ! –, la mise en scène sera
confiée cette fois à Marco Carniti.
Autre opus traditionnel, Il Viaggio a Reims
dans la production d’Emilio Sagi avec les élèves aguerris de l’Accademia Rossiniana, puis la
Messa di Gloria dirigée par Roberto Abbado
qui devrait attirer les inconditionnels de Juan
Diego Florez et Jessica Pratt, avant la conclusion de la manifestation le 22 août par le Stabat
Mater défendu par le chef Michele Mariotti.
A noter également les récitals de belcanto
proposés par Chiara Amarù, Olga Peretyatko et
Nicola Alaimo.
François Jestin
- La gazza ladra : les 10, 13, 16 et 19 août
- La gazzetta : les 11, 14, 17 et 20 août
- L’inganno felice : les 12, 16, 18 et 21 août
- Il viaggio a Reims : les 14 et 17 août
- Messa di Gloria : les 15 et 18 août
- Stabat Mater : le 22 août
- Récitals de Belcanto : les 16, 19 et 21 août
«La Gazza ladra». Production 2007 © Studio Amati Bacciardi
Pas de grand titre d’opera seria pour cette
édition, mais la reprise de deux productions déjà
proposées les années passées, en commençant
par La Gazza ladra dans la réalisation visuelle
de Damiano Michieletto créée en 2007 au ROF.
Celle-ci avait véritablement révélé les talents du
metteur en scène vénitien devenu aujourd’hui
l’une des coqueluches des scènes lyriques mondiales. Sous la baguette de Donato Renzetti, la
distribution vocale semble aussi solide que celle
de 2007 : Simone Alberghini, René Barbera,
Nino Machaidze, Alex Esposito, ce dernier
étant déjà de l’équipe de la création.
Mais la nouveauté « musicologique » de
cet été sera l’exécution de La Gazzetta (Nicola
Alaimo, Maxim Mironov, José Maria Lo
Autre reprise mais d’un spectacle beaucoup plus ancien (créé en 1994 !), L’inganno
felice vu par Graham Vick dont on se souvient
surtout de son splendide Moïse et Pharaon au
Palafestival en 1997. Parmi les interprètes on
relève entre autres les noms de Carlo Lepore et
Mariangela Sicilia, belle voix entendue récemment dans Benvenuto Cellini à Amsterdam.
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Programme complet sur : www.rossinioperafestival.it
Jessica Pratt. Crédit Luis Condrò
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Les reprises et les versions de concert
festival de salzbourg
Prestige
et turbulences
Le Festival de Salzbourg n'est pas épargné par les crises.
Comme partout ailleurs, le manque d'empressement des
sponsors à s'engager durablement et les difficultés que
rencontre l'Etat autrichien à maintenir ses subventions aux
altitudes souhaitées pour les organismes dépendant
directement de lui placent les responsables devant des
difficultés inattendues.
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Les deux derniers directeurs de la manifestation ont d'ailleurs quitté
leur poste avant terme et, actuellement, le Festival est dirigé ad intérim par
deux personnalités du milieu salzbourgeois en attendant l'arrivée programmée en 2017 d'un nouveau directeur qui devrait être la perle rare attendue
depuis longtemps... L'édition 2015, qui s'étend du 18 juillet au 30 août prochains, ne laisse pourtant pas place au doute : le nombre des manifestations est pléthorique avec plus d'un rendez-vous artistique par jour et les
vedettes sont présentes en grand nombre. Seul signe d'un ralentissement
des affaires : les reprises de productions
précédentes ont nettement augmenté par
rapport à l'an passé où toutes les représentations lyriques étaient gratifiées d'un
habillage neuf.
Opéra : Les nouveautés
Trois nouvelles productions sont à
l'affiche. Une nouvelle mouture des Nozze
di Figaro de Mozart mettra un point final
à la nouvelle trilogie Da Ponte commencée il y a deux ans; elle est confiée pour la
mise en scène à Sven-Eric Bechtolf (un
des actuels directeurs intérimaires du
Festival) et sera dirigée par Dan Ettinger.
Luca Pisaroni, Anett Frisch, Martina
Jankova et Adam Plachetka s'y partagent
les rôles principaux. L'affiche de prestige
Martina Jankova (Susanna des
est
réservée cette année au nouveau
«Noces de Figaro»)
Fidelio que monte Claus Guth et que dirige Franz Welser-Möst. Le spectacle fait la une de l'actualité lyrique grâce à
la présence du ténor-vedette actuel Jonas Kaufmann en Florestan, qui sera
accompagné d'Adrianne Pieczonka en Leonore et du Français Ludovic
Tézier dans le rôle du méchant. Inutile de dire que les places sont déjà rares
maintenant et se vendent à des prix défiant toute concurrence au marché
noir. Dernière nouveauté : Die Eroberung von Mexico (La conquête du
Mexique) de Wolfgang Rihm. L'ouvrage, dont la musique est d'une grande
originalité, sera dirigé par Ingo Metzmacher (bien connu des Genevois après
son Macbeth et son Ring des Nibelungen au Grand Théâtre) et mis en scène
par un des enfants terribles du théâtre allemand, Peter Konwitschny. Dans
les rôles principaux : Bo Skovhus et Angela Denoke.
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Quatre productions anciennes font leur réapparition au programme du
festival estival. Il y a d'abord Il trovatore de Verdi avec Anna Netrebko en
Leonora mais sans Placido Domingo en Luna, car le ténor nouvellement
promus baryton semble vouloir faire l'impasse sur un rôle qui lui convient
finalement assez mal. Il sera remplacé par Artur Rucinski, avec Francesco
Meli en trouvère au grand cœur et Ekaterina Semenchuk en gitane vengeresse, l'ensemble étant placé sous la direction de Gianandrea Noseda qui fut
l'un des prétendants-finalistes à la succession de Neeme Järvi à la tête de
l'OSR. Norma de Bellini fera un deuxième tour de piste estival sous la direction de Giovanni Antonini (avec en fosse l'orchestre de La Scintilla en provenance de l'Opéra de Zurich) et dans la mise en scène de Patrice Caurier et
Moshe Leiser. Cecilia Bartoli incarnera de nouveau la prêtresse pécheresse
aux côtés de Rebecca Olvera et de Jon Osborn. Signalons que ce spectacle
figurera quatre fois au programme de l'Opéra zurichois en octobre prochain
avant de faire un crochet à Monte-Carlo où il sera représenté dans l'admirable écrin du petit théâtre conçu par Garnier. Iphigénie en Tauride, incarnée
également par Cecilia Bartoli, sera reprise du Festival de Pentecôte avec
Diego Fasolis et ses Barocchisti tessinois en fosse ainsi que le Chœur de la
Radio-télévision suisse-italienne. Les partenaires de la diva sont Christopher
Maltman et Rolando Villazon, la mise en scène étant de nouveau signée du
duo Caurier et Leiser. Enfin, Der Rosenkavalier revient une deuxième fois
à l'affiche pour quelques représentations en août dans une distribution semblable à celle de la première série l'an passé (Frank Welser-Möst y dirigera
notamment Krassimira Stoyanova, Sophie Koch et Günther Groissböck) .
Signalons toutefois que ce spectacle, qui a déjà fait l'objet d'une publication
en DVD, sera repris à la Scala de Milan en juin 2016 avec quelques légers
aménagements dans la distribution et un autre chef d'orchestre (Zubin
Mehta). Trois versions de concert complètent ce tableau impressionnant :
Werther de Massenet avec Elina Garança en Charlotte et Piotr Beczala en
Werther, Dido ans Aeneas, donné avec une équipe de chanteurs moins
connus mais dirigés par Thomas Hengelbrock et finalement Ernani de Verdi
dirigé par Ricardo Muti et présenté quelques jours plus tard en ouverture de
saison au Grand Théâtre de Genève (31 août).
Concerts et Théâtre
La place manque ici pour détailler tout ce qui entoure ces représentations lyriques. Signalons tout de même les seize concerts regroupés sous l'étiquette 'Ouverture spirituelle', qui offrira la possibilité de confronter des
œuvres musicales d'inspiration chrétienne et hindouiste, les quatre concerts
du Philharmonique de Vienne que dirigeront tour à tour Yannick NezetSzegin, Bernard Haitink, Semyon Bychkov et Daniel Barenboim, ainsi que
les soirées confiées aux ensembles invités : Les Musiciens du Louvre (avec
Marc Minkowski), le Concentus Musicus de Vienne (Nikolaus
Harnoncourt), l'Orchestre de la Radio autrichienne (Cornelius Meister), le
Budapest Festival Orchestra (Invan Fischer), le West-Eastern Divan pour
deux concerts (Barenboim), le Boston Symphony Orchestra dirigé deux fois
par Andris Nelsons, le Mahler Jugendorchester (Herbert Blomstedt), l'Israel
Philharmonic Orchestra (Zubin Mehta) et enfin, last but not least, le
Philharmonique de Berlin avec Sir Simon Rattle. Enfin, les spectacles de
théâtre se multiplient autour de trois productions phares consacrées à la
Comédie des erreurs de Shakespeare, L'Opéra de Quat'sous de Brecht et
l'incontournable Jedermann de Hofmannsthal donné sur la place du Dôme
chaque année depuis la création de la manifestation en 1920 ...
Eric Pousaz
Renseignements supplémentaires : http://www.salzburgerfestspiele.at/spielplan
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événement lyrique à zurich
Première suisse
Le Prêtre roux, comme on surnomme fréquemment l'auteur des fameuses
Quatre saisons, se vantait d'avoir composé 94 opéras. Les musicologues en
dénombrent “seulement“ une petite cinquantaine, alors qu'une petite vingtaine
de titres uniquement ont survécu jusqu'à aujourd'hui sous une forme
suffisamment complète pour qu'une mise à l'affiche d'un théâtre
soit envisageable.
Avec La verità in cimento (La vérité mise à
l'épreuve), l'Opéra de Zurich a inscrit pour la
première fois un titre lyrique de Vivaldi à son
répertoire, montrant la voie aux autres compagnies suisses qui se sont tout au plus intéressées
à l'oratorio Juditha Triumphans jusqu'ici
(comme ce fut le cas au printemps dernier à
Bâle lors d'une soirée chorégraphique). L'œuvre
choisie ne compte pas au nombre des plus célèbres de son auteur et n'a connu qu'une série de
représentations du vivant du musicien, à Venise
en 1720. La partition a ensuite disparu dans une
bibliothèque et n'a été redécouverte qu'au début
de ce siècle par Jean-Christophe Spinosi qui l'a
dirigée en concert dans différentes villes européennes avant de procéder à son enregistrement.
La Rosane de Julie Fuchs, malgré ses
machinations peu glorieuses, attire toutes les
sympathies avec son soprano léger, aérien mais
suffisamment étoffé pour rendre émouvants les
quelques moments où son chant respire la sincérité. Wiebke Lehmkuhl, une Sultane au
chant plein, presque poignant à l'occasion, fait idéalement contraste avec les
scènes d'hystérie de Delphone Galou,
alias la favorite Damira, dont on peut
seulement regretter que le grave
manque de projection au point de déséquilibrer ses vocalises lorsque l'écriture sollicite la partie inférieure de la tessiture. Avec son curieux timbre aux
accents parfois rocailleux, Christophe
Dumaux fait étalage d'un savoir-faire
hors du commun dans ce registre si particulier du haute-contre et remporte à
l'applaudimètre le plus grand succès de
la soirée. Le mezzo doré, chatoyant et
puissant d'Anna Goryachova sied bien
à la personnalité tourmentée du fils
rejeté de la famille alors qu'en Sultan
Mamoud, le ténor de Richard Croft
s'impose avec une évidente simplicité
en dépit de la difficulté de sa musique.
En conclusion : une grande soirée qui
fait espérer de nouvelles incursions
dans ce répertoire avant le 23e siècle...
(Représentation du 13 juin)
«La verità in cimento» avec Christophe Dumaux (Melindo), Anna
Une vraie création donc! Le sujet
est, comme souvent dans les ouvrages
baroques, d'une extrême complexité et
fait la part belle aux coups de théâtre
inattendus et aux retournements de
situation à peine justifiés au plan
psychologique. Mamoud, le sultan de
Cambaja, a eu simultanément deux fils,
l'un de son épouse légitime et l'autre de
sa favorite. Au moment de leurs naissances, il échange les bébés dans leur
berceau pour faire plaisir à la favorite
qui souffre de sa position subalterne
dans le harem et fait élever l'étranger
comme son propre fils alors qu'il confie
l'héritier légitime à sa favorite.
Quelques années plus tard, lorsque le
sultan doit donner en mariage son fils à
l'héritière d'un de ses ennemis avec
lequel il convient de faire la paix,
Mamoud se décide à dire la vérité,
créant une situation des plus confuses
entre les amants, les mères et les prétendants au trône ainsi qu'à l'héritage!
Le metteur en scène Jan Philipp
Gloger n'a que faire de cette intrigue
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tarabiscotée. Il laisse au magasin des accessoires les palais orientaux et leurs riches costumes
pour transplanter l'action à l'époque actuelle au
sein d'une famille 'patchwork' où les relations
entre adultes et enfants sont compliquées par
autant d'associations d'intérêt qui n'ont rien à
voir avec l'état-civil. La révélation de la vérité
sème le trouble, échauffe les passions jusqu'au
final dramatique qui culmine sur un assassinat,
un suicide, une scène de torture et un départ précipité. Dans l'original vivaldien, un happy-end
de dernière minute et fort improbable permet, il
est vrai, d'éviter un tel amoncellement de cadavres!..
Le décor, mobile, glisse d'une pièce à l'autre dans une confortable maison de banlieue
urbaine, qui pourrait être située sur la Goldküste
zurichoise. Dès le début, les comportements des
personnages sont violents et leurs rapports tendus au point que l'on pourrait se croire dans une
pièce de Strindberg. Le jeu des acteurs, d'une
précision millimétrée, ajoute encore une touche
de réalisme provocant à une intrigue qui n'en
demandait pas tant et permet une mise en valeur
inespérée de la musique, grâce notamment à un
très sérieux élagage des interminables récitatifs.
Sous cette forme, l'opéra dure à peine plus de
deux heures et ne relâche pas une seconde son
emprise sur les spectateurs.
Ottavio Dantone dirige avec énergie l'orchestre admirablement disposé de La Scintilla,
mais, pour se mettre au diapason de la mise en
scène, ne se préoccupe pas trop de la sensualité
que dégage cette musique. Souvent carré, son
accompagnement rend excessivement terre-àterre les envolées que constituent les grands airs
à reprises et empêche souvent les chanteurs de
se sentir plus libres dans l'ornementation de
leurs airs.
Eric Pousaz
Goryachova (Zelim) et Richard Croft (Mamoud) © Judith Schlosser
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théâtre de l’orangerie
Saison estivale 2015
Avec des taux d’occupation et de fréquentation en hausse constante depuis que
Valentier Rossier en a repris la direction, le théâtre d’été sis dans le cadre
enchanteur du parc La Grange peut se permettre une ouverture toujours plus
grande aux productions locales et multiplier les partenariats.
Si l’on ajoute à cela un chef qui propose
des spécialités d’Italie du sud, tout est mis en
place pour donner l’envie de fréquenter ce lieu
emblématique d’une certaine qualité de vie
artistique à la genevoise.
Huit spectacles, dont quatre créations, trois
accueils et une reprise suivront la soirée d’ouverture en partenariat avec le trio Ecoutes au
Vert.
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Première création, inattendue, celle de la
chorégraphe Zoé Reverdin qui s’attaque à la
pièce de Tennessee Williams Un Tramway
nommé Désir. Elle apportera à l’expertise de
Valentin Rossier en matière de texte et de direction d’acteurs sa propre maîtrise du rythme, de
l’espace et du geste. Face à un personnage masculin bestial, sensible, déroutant – on se souvient du film d’Elia Kazan - la magnifique
Marie Druc jouera Blanche ou la fêlure, le plus
beau personnage féminin du théâtre étasunien.
Du 23 juin au 11 juillet.
Deuxième création, La Maladie de la
famille M. de l’Italien Fausto Paravidino, dra-
maturge contemporain joué à la Comédie française. Une comédie dramatique familiale, aigredouce, à l’écriture âpre, piquante, enjouée,
cocasse. Le spectacle sera le fruit d’une très
étroite collaboration entre le metteur en scène
Andrea Novicov et la Compagnie Superprod.
Du 14 au 25 juillet.
Autre création d’après Shakespeare mais
également inspirée du film de Lubitsch et même
des prétendus écrits du dictateur coréen, To be
or not to be. Éric Devanthéry assurera la mise
en scène de ce spectacle encore en voie d’écriture. Du 28 juillet au 9 août.
Un accueil ensuite, qui a fait les beaux
jours du Théâtre de Poche en 2011, Noces de
carton du duo romand cher au public genevois
Claude-Inga Barbey et Patrick Lapp, avec leur
complice Claude Blanc. Du 11 au 23 août.
Valentin Rossier reprendra ensuite La
seconde surprise de l’amour de Marivaux crée
en 2014 à l’Orangerie, avant de partir en tournée européenne. Du 25 au 29 août seulement !
«Noces de carton» au Théâtre de Poche en 2011 © Augustin Rebetez
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Autre accueil, Oblomov d’Ivan
Gontcharov, mis en scène par Dorian Rossel
avec un collectif d’acteurs de Reims. Le personnage mythique n’est pas sans rappeler les jeunes
Japonais en repli sur soi dont la question est :
pourquoi faire quelque chose plutôt que rien ?
Du 1er au 12 septembre.
Enfin, une dernière création, Trahisons, de
Harold Pinter. José Guerreiro mettra en scène la
triangulation amoureuse écrite par le grand dramaturge comme une histoire à rebours. Du 15
septembre au 1er octobre.
Le public des enfants de trois à sept ans se
régalera quant à lui avec La poupée dans la
poche par le Teatro delle Briciole de Parme,
véritable institution italienne. Du 21 juillet au 9
août à 11h. dans la petite salle de l’Orangerie.
Vingt concerts de l’AMR animeront les
soirées d’été et deux after-shows prolongeront
les concerts de la scène voisine Ella Fitzgerald.
La saison se terminera par le désormais très
attendu et très fréquenté Grand Bal de
l’Orangerie du 3 octobre sous les serres du
théâtre.
Laurence Tièche-Chavier
TO – Théâtre de l’Orangerie, parc La Grange,
www.theatreorangerie.ch
«La seconde surprise de l’amour» © Vanappelghem
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Les Grands interprètes
Steve Roger et Pedro Kranz sont à l’origine de tous les programmes
qui comprennent toujours quatre récitals de piano, auxquels
s’ajouteront les prestations de trois violonistes, accompagnés soit
par un pianiste, soit par un orchestre.
Le 28 septembre l’excellent et très médiatique Renaud Capuçon aura l’honneur, avec
Nicholas Angelich, du premier concert, dédié à
trois sonates de Brahms.
On retrouvera le 2 novembre Christian
Zacharias, qui a visiblement élargi son répertoire de prédilection, puisque de Scarlatti et
Soler il ira jusqu’à Chopin et Ravel ! Depuis
qu’il a quitté en 2013 son poste de chef de
l’Orchestre de chambre de Lausanne, cet
homme de culture donne de nombreux récitals.
Son interprétation est originale à chaque fois :
elle ne laisse jamais indifférent.
Denis Matsuev
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Les Quatuors au Conservatoire
Le 30 novembre, un autre artiste hors normes, le magnifique pianiste russe, superpuissant
mais aussi délicat, Denis Matsuev. Il a jeté son
dévolu sur Tchaïkovski, Rachmaninov et Liszt.
Comme tous les invités il a eu la liberté de proposer ses choix. Il arrive que deux interprètes
veuillent jouer la même œuvre la même année.
La direction de Caecilia accepte, car il est intéressant parfois de pouvoir comparer différentes
versions. Denis Matsuev fera sa première apparition dans la série des Grands interprètes.
La Chambre Phiharmonique, créée il y a
dix ans par Emmanuel Krivine, s’arrêtera le 14
décembre à Genève pour un concert Brahms sur
instruments d’époque, et ce sera sa seule prestation en Suisse cette saison. On entendra, en plus
de la Symphonie No 3, le concerto en ré
majeur, dans l’interprétation de la violoniste
moldave Patricia Kopatchinskaya, qui a terminé ses études au Conservatoire de Berne et
dont la renommée grandit.
Radu Lupu, un habitué de la série, revient
le 27 janvier, avec la Kremerata Baltica, et
sans chef. Salué comme l’un des plus grands
pianistes de notre temps, il proposera deux
concertos de Mozart, tandis que l’orchestre se
réservera une symphonie de Mendelssohn et la
Sinfonietta No 2 du compositeur d’origine polonaise Mieczyslaw Weinberg (1919-1996), que
l’on est en train de redécouvrir.
Virtuose de son instrument, le violoniste
Maxim Vengerov fera des étincelles dans un
programme varié : Ravel. Chostakovitch,
Enesco, Ysaÿe, Ernst et Paganini. Ayant surmonté ses problèmes d’épaule qui l’ont immobilisé pendant trois ou quatre ans, il a repris une
carrière plus brillante que jamais et dialoguera
le 29 février avec son compatriote le pianiste
Roustem Saïtkoulov.
Nelson Goerner, que Martha Argerich a
beaucoup soutenu, s’attaquera, lui, à deux
monuments : Les Préludes de Debussy et la
Sonate No 29 (Hammerklavier) de Beethoven.
Un pianiste, dit Steve Roger, qui réfléchit beau-
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coup et qui n’arrête pas de progresser ! (21
mars)
Pour clore le bal, Hélène Grimaud a imaginé un programme original construit autour du
thème de l’eau, puisé chez les grands compositeurs du 20ème siècle, pour la plupart. Les pièces s’enchaîneront sans interruption. En deuxième partie, la sonate No2 op.2 de Brahms.
entretien avec steve roger
Une telle présence des violonistes est
exceptionnelle. La spécialité des concerts
Caecilia reste le piano et cette saison encore des
grands noms seront présents, invités fréquents
ou nouvelles recrues de la série des Grands
interprètes.
Steve Roger précise qu’il lui arrive d’inviter des solistes qui ne figurent pas parmi ses préférés. L’important c’est qu’ils sachent défendre
leurs idées, et bien sûr il en faut pour tous les
goûts.
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Dix concerts de musique de chambre sont
annoncés : Les Quatuors Fauré (15 octobre),
Prazak (30 octobre), Ebène (27 novembre),
Capuçon, (22 février) - avec Edgar Moreau au
violoncelle !-, Schumann (jeune quatuor allemand) (4 mars), Pavel Haas (12 mars),
Borodine (19 avril), Hagen (26 avril), le
Cuarteto Casals le 22 janvier, et le Trio composé pour l’occasion de Boris Brovtsyn, Maxim
Rysanov, Kristina Blaumane le 8 décembre.
Un mélange donc de jeunes quatuors et de
quatuors établis, qui attire un public pointu,
dans lequel la jeune génération est heureusement bien représentée.
Helene Grimaud © Mat Hennek / DG
Hors abonnement
Deux concerts hors abonnement sont prévus. Un seul peut être dévoilé aujourd’hui : un
récital de Lang Lang le 6 novembre.
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
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festival international de piano
La Roque d’Anthéron
René Martin présente un nouveau programme, riche de plus de 80 concerts,
fidèle à sa tradition d’organisateur d’un périple musical foisonnant de récitals
de piano, de concertos de piano, de récitals de clavecin, de musique de
chambre, de musique avec orchestre, de jazz, répartis depuis plusieurs années
en 12 lieux différents. La plus grande des scènes restant évidemment le Parc du
Château de Florans aux 365 platanes avec sa merveilleuse conque acoustique.
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Ce Parc fut le coup de foudre de René
Martin, il y a 35 ans. Les autres lieux, tous différents, sont à découvrir dans leur variété !
L’Etang des Aulnes à Saint-Martin-de-Crau, la
belle Abbaye de Silvacane, les Carrières de
Rognes, le Temple protestant de Lourmarin,
l’Eglise de Cucuron, le Musée Granet à Aix-enPovence, le Grand Théâtre de Provence à Aix,
Château-Bas à Mimet, le Théâtre des Terrasses
à Gordes, l’Eglise Notre-Dame de
l’Assomption et Parvis à Lambesc, l’Eglise
Saint-Jean-de-Malte à Aix.
Les festivaliers peuvent venir écouter les
artistes qui répètent le matin au Parc et choisissent le piano “idéal” pour leur récital - parmi
quatre ou cinq pianos exceptionnels - qui correspondra aux œuvres choisies par le pianiste
virtuose du soir ! Ce choix, dans le soleil du
matin, et ces répétitions sont des moments privilégiés du festival, de même que l’écoute des
masterclasses du mois d’août pour les ensembles en résidence !
Les étudiants, dont certains sont déjà au
début d’une carrière de soliste, se produiront à
la fin du mois d’août, le 15 toute la journée, lors
de concerts gratuits, sur les places de La Roque.
Le soir, ils se produiront dans le Parc de Florans
pour une soirée magnifique, qui chaque année
couronne ainsi leur travail de manière festive.
Ils jouent également leur série de concerts
dans les villes et villages, de la Durance aux
Alpilles, dans la semaine précédant le 15.
Comme chaque année des “Nuits” de
musique ont lieu dans le Parc, (avec possibilité
de plateaux repas à commander d’avance).
pianos, avec Sanja Bizjak et Lidija Bizjak. Puis
Claire Désert et Emmanuel Strosser.
- Le jeudi 6 août, une Nuit du piano Beethoven,
avec Rémi Geniet, puis Abdel Rahman El Bacha
et l’orchestre Sinfonia Varsovia.
- Le 10 août, une Nuit du piano Brahms, avec
Adam Laloum, puis Nicholas Angelich et l’orchestre Sinfonia Varsovia.
Les 5 concerts de jazz auront lieu soit 2 fois
dans le Parc, 2 fois dans les Carrières de Rognes,
et une fois à Château-Mimet. Le dernier concert
de jazz clôturera le Festival, le 21 août avec
Monty Alexander, un concert “Harlem Kingston
Express”, allant de Nat King Cole à Bob Marley,
de Louis Amstrong à Marvin Gaye par le plus
légendaire des pianistes de jazz !
Silvacane accueillera 3 concerts à 18h.30, ce
qui permet aux festivaliers de regagner à temps
les concerts du Parc de la même soirée.
Pour les autres lieux, cela n’est pas possible
d’entendre deux concerts le même soir, sauf
quand ils se succèdent au Parc, par exemple à
18h., puis à 21h.
Les professeurs des masterclasses feront un
concert avant leurs élèves, le14 août, à 18h. Ce
sont Olivier Charlier, violon, Lise Berthaud, alto,
Yovan Markovitch, violoncelle, Claire Désert,
piano, Emmanuel Strosser, piano et Christian
Ivaldi, piano. Quant au Trio Wanderer, dont
chaque membre est également formateur, il se
produira, comme les autres professeurs et les étudiants le 15 août. Et en concert le 9 août à
Lambesc.
Beaucoup d’artistes reviennent régulièrement goûter l’été et l’air libre du Festival !
D’autres viennent pour la première fois et
deviennent de nouveaux habitués…
Au mois de juillet, les festivaliers pourront
voir et entendre notamment Boris Berezovsky,
Iddo Bar-Shaï, Andreï Korobeinikov, MarieJosèphe Jude, François-Frédéric Guy, Hervé
Billaut, Alexel Volodin… et en août Frank
Braley, Shani Diluka, Jean-Claude Pennetier,
Daniil Trifonov, Khatia Buniatishvili, Anne
Queffélec, Adam Laloum, Florent Boffard,
Nelson Goerner, Nikolaï Lugansky, Yuri Favorin,
David Kadouch, Pierre Hantaï, Grigory Sokolov,
Renaud Capuçon, Alexandre Tharaud, Arcadi
Volodos… et de nombreux artistes à découvrir…
Maya Schautz
XXXVe Festival international de piano de
La Roque d’Anthéron du 24 juillet au 21 août 2015
Web: www.festival-piano.com
Festival de Piano-Parc du Château de Florans
13640 La Roque d’Anthéron
Tél. : 0033 442 50 51 15
Prix des places de 16 à 55 Euros.
Programme
- Le 27 juillet, une Nuit de musique de chambre, avec le Quatuor Modigliani et les pianistes
Haochen Zhang et Jean-Frédéric Neuburger.
- Le 1er août, une Nuit du piano à 4 mains et 2
a
Marie-Josèphe Jude
Monty Aleander - photo Crush Boone
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rencontres photographiques d’arles
Photographie traversée
Les Rencontres arlésiennes de la photographie propose 33 expositions axées
autour de six rubriques thématiques qui rendent compte notamment
du décloisonnement des pratiques visuelles.
Engloutie dans le régime indifférencié des
flux imagés, l’image photographique est-elle
aujourd’hui en mesure de recouvrir pleinement
une singularité forte ? Désireux de suivre au plus
près l’évolution de la photographie au fil des ans,
le Directeur des Rencontres, Sam Stourdzé, charpente son programme sur plusieurs chapitresrubriques posant que la photo est au cœur de
croisements et refigurations. Ce, de la simple
influence au profond métissage avec d’autres disciplines et formes d’attraction promptes à l’enrichir, la subvertir ou la questionner. Ainsi
Relecture se penche sur l’histoire de la photo,
Résonances interroge les liens polysémiques
avec d’autres champs culturels, Je vous écris
d’un pays lointain se cristallise sur une topographie précise de la planète. Les plateformes du
visible explore la photographie documentaire,
alors que les Collectionneurs et Emergence
(Prix Découverte) réaffirment que la photographie s’est permise, dès ses débuts, de sortir d’elle-même, du constat des choses, états, sujets et
événements pour aborder d’autres horizons, l’introspection, l’analyse, la métaphore entre autres.
Evans en magazines
et dans le métro
La partie historique promet une “redécouverte“, au fil de son travail pour les magazines,
de l’œuvre de Walker Evans qui est, avec Alfred
Stieglitz, Edward Weston et Paul Strand, l'une
des figures majeures de la photographie américaine. L’homme définit les règles d'un style documentaire qu’il appliquera à l'environnement
social et culturel de l'Amérique de son époque et
à ses réalités quotidiennes : architecture, affiches
et graffitis new-yorkais et bostoniens, paysans et
fermes en Pennsylvanie notamment.
Dans son approche méthodique, il s’éloigne
résolument de l’introspection qu’il estimait
romantique. Et s’inspire de Gustave Flaubert,
mettant en avant naturalisme, réalisme et objectivité du traitement. Son regard s’identifie à une
sorte de passion distanciée, entre recul et implication, sans la volonté de réaliser un livre noir
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des injustices criantes de son pays tout en restant
critique de l’American Way of Live consumériste.
On suit ici le travail d’Evans au sein de publications d'avant-garde et de magazines connus tels
que Bazaar, Vogue, Architectural Forum, Life et
Fortune. Fait rare, le photographe a réalisé une
forme de journalisme indépendant et innovateur,
fixant souvent ses propres missions, l'édition, l'écriture et la conception de ses pages.
Ces “essais photographiques“ lui valurent
une audience dépassant largement les espaces
traditionnels du musée et de la galerie, ce dont
rend remarquablement compte l’ouvrage de
David Campany, Walker Evans : the Magazine
Work, en dévoilant la manière dont celui qui
chercha à donner à l’art des airs documentaires
gagna en autonomie et réussit à gagner sa vie. Est
aussi exposée sa célèbre série de portraits initiée
dès 1938 dans le métro de New York grâce à un
appareil dissimulé dans sa poche.
Au pays du mensonge
déconcertant
En Corée du Nord, le régime dynastique des
Kim (Kim Jong-il puis Kim Il-sung en juillet
1994, et enfin Kim Jong-un depuis décembre
2011) qui règne sans partage depuis 1945 repose
sur un pouvoir concentrationnaire et de terreur.
Ce dernier n’a pas hésité à affamer son peuple
pour se doter notamment de l’arme atomique. La
Hollandaise Alice Wielinga a réalisé le projet
multimédia Corée du Nord, une vie entre propagande et réalité. Images officielles et prises de
vue personnelles se mêlent pour mettre en crise
une histoire qui déconstruit le mythe de « l’Etat
le plus isolé au monde ». En avril 2013, au gré
d’un périple dans le pays, étroitement « contrôlé par le gouvernement, mes guides n'ont pu
cacher la pauvreté et les inégalités extrêmes
qu'on peut y trouver. À travers la vitre du van,
j'ai pu saisir un aperçu de la réalité nord-coréenne », explique cette lauréate du prestigieux
concours Photo Folio Review 2014. Dès lors, elle
n’aura de cesse de tenter de distinguer la réalité
authentique de l’écran de fumée propagandiste
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transformant certains
centres
urbains en “village Potemkine“,
en réécrivant
l’histoire, à l’image d’Orwell
dans sa dystopie
1984 et comme
l’a aussi réalisé
l’actuel gouvernement autoritaire tchétchène. Ce
qui marque dès
lors dans le travail de Wielinga
est le fort
Walker Evans, Labor
contraste entre
Anonymous, Detroit, 1946,
magazine Fortune.
des personnages
Avec l’aimable autorisation
Metropolitan
Museum,
du
archétypaux, souNew York.
riants et idéaux
issus de la propagande et les visages et corps
résignés pris lors du voyage de la photographe
dans l’un des pays les plus déshérités d’Asie.
C’est de cet entre-deux que témoigne sa réalisation.
Paradis fiscaux
Avec Paolo Woods, la photographie est un
moyen d'investigation à la fois humain, social,
historique et géopolitique. Du Delaware à Jersey,
des îles Vierges britanniques à la City de
Londres, Paolo Woods et Gabriele Galimberti
nous immergent par leur réalisation Le Paradis.
Rapport annuel, qui donne aussi lieu à un livre,
dans un univers peu connu, objet de nombreux
compte-rendus et investigations dans le cadre
notamment du Conseil de l’Europe sans que rien
ne semble évoluer notablement vers plus de justice fiscale au cœur de ce système de “kleptocratie“ bien organisé. Pendant plus de deux ans, le
tandem a sillonné les centres financiers offshore
(CFO) ou “paradis prudentiels“ qui incarnent
une évasion fiscale jamais en manque d’imagination pour contourner les législations en vigueur
ou en exploiter les failles. D’Apple à Google, ces
paradis fiscaux questionnent avec acuité les relations entre public et privé, entreprises et Etats,
nationalisation de pertes et privatisation d’un
profit sans frein. Le tout dans une économie
mondialisée qui a profondément dévoyé les fondements éthiques, moraux et sociaux des démocraties.
Bertrand Tappolet
Du 6 juillet au 20 septembre.
Rens. : www.rencontres-arles.com
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la bâtie - festival de genève 2015
Vous avez dit
bizarre…
Du 28 août au 12 septembre, les dernières soirées claires et chaudes de l’été
seront rythmées par les habitudes festivalières de la Bâtie qui s’installera en
ville de Genève, dans les communes et sa périphérie transfrontalière.
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pas un simple jeu de name dropping publicitaire,
mais un alléchant aperçu de la galaxie artistique
convoquée par La Bâtie et délicieusement cartographiée « en un coup d’œil » en fin de programme. De quoi s’en mettre plein les mirettes !
L’ouverture des festivités se fera avec le
spectacle chorégraphié par Gisèle Vienne, This is
how you will disappear (2010) d’une parfaite
maîtrise visuelle. Ou comment trois vies se
retrouvent piègées au cœur d’une forêt trop dense
et génératrice d’un fascinant chaos. Les 28 et 29
août au Théâtre de Carouge.
Dans le même temps, Angelica Lidell explore non sans une vivifiante provocation la première lettre de
Saint-Paul aux Corinthiens. Les
corps ont la parole et la parole
se fera corps. Une ferveur qui
heurte les esprits. Comédie de
Genève, les 28 et 29 août.
Sans quoi, si l’inspiration
est plus mélodique et aérienne
ce soir-là, les Girls in Hawaii
se produiront sur la scène du
Théâtre Pitoëff pour le meilleur
de la pop belge indie. Et pour
suivre, à la Maison communale
de Plainpalais, DJ Hell (alias
«This is how you will disappear» © DACM-Seldon Hunt
Helmut Josef Geler), une poinsera entourée de camarades de jeu qui ne sont pas ture de l’électro qu’on ne présente plus.
Les 29 et 30 août, au Musée d’Ethnographie
les derniers quand il s’agit d’engendrer le bizarre
spectaculaire au sein de leurs créations. On de Genève, vous pourrez consulter l’œuvre d’art
risque bien d’en ressortir un peu ébranlé, mais collective et thérapeutique imaginée par Oscar
ravis d’avoir exposés notre perception sensible Gomez Mata, mystères de civilisations ancestrales… ! Le Cromlech (Psychodrame 4).
du monde pour mieux l’appréhender.
Du 29 au 31 août, Amir Reza Koohestani
Thomas Ostermeier, The Divine Comedy,
Benjamin Verdonck et Pieter Ampe, Barbara poursuit ses interrogations dans une université,
Carlotti, Angelica Lidell, Stephan Eicher, TAO au cœur d’un dortoir de jeunes femmes. Hearing,
Dance Theatre, Alain Platel, Jonathan ou la poursuite des illusions perdues par ce jeune
Capdevielle, Koen Augustijnen, Aline, Simon Iranien qui mêle poésie et réalité, au Théâtre du
McBurney, Miguel Gomes, Jérôme Richer, Loup.
Yan Duyvendak fait confiance à la prose de
Philippe Saire, Malcolm Middleton, Oscar
Gomez Mata, Olivier Dubois, etc. Et ceci n’est Christophe Fiat, aux mouvements d’Olivier
Théâtre, danse, concerts, performances,
expositions, ateliers et projections viennent bousculer l’esthétique contemporaine, comme une
immersion salutaire aux cœurs d’univers singuliers. L’occasion de faire le point sur les tendances artistiques du moment et les talents à découvrir, question d’ouvrir le bal des rentrées scéniques. D’abord, dans les feux de la rampe, la
passionnante et déconcertante artiste Gisèle
Vienne, est la grande invitée de cette 39e édition.
Ses multiples projets sauront faire le nécessaire
pour troubler nos repères et dénoncer les dysfonctionnements étranges de nos sociétés. Elle
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Dubois et à la pop d’Andrea Cera pour concevoir
une comédie musicale décadente, avant la disparition du monde, dans l’urgence du temps.
Théâtre du Forum Meyrin, du 29 août au 1er septembre.
Plus tard dans la soirée du 29, à la Maison
communale de Plainpalais, la Mega Night 2 ou
l’autocélébration délirante et puissamment
électro du label Tigershushi Records et de son
chef de file Joakim.
Le 30 août au Pitoëff, et dans un style sensiblement différent, le concert hors-normes de
Kumisho, l’ambassadrice musicale la plus
connue des monstres kawall, créatures aussi
mignonnes qu’adorables, en prise directe avec
l’univers japonisant animé et adoré des enfants.
Les 30 et 31 août au Galpon, la nouvelle
création dansée de Nadia Beugré, artiste féministe engagée qui n’hésite pas à soutenir haut et fort
les luttes des femmes qui se sont sacrifiées pour
leurs droits, leur liberté et leur dignité. Legacy
rend hommage à ces êtres d’exception.
A la salle des Eaux-Vives, deux trublions
contestataires de la scène belge, Benjamin
Verdonck et Pieter Ampe, avec leur dernière
création We don’t speak to be understood ou
comment se mesurer aux Quatre saisons de
Vivaldi dans une ambiance de barnum infernal et
désopilant. Vous n’aviez encore jamais entendu
les cordes orageuses du prêtre roux ! Les 31 août
et 1er septembre.
Le 31, le Mark Lanegan Band écrira encore une belle page de l’histoire du rock indé, avec
cette voix de baryton graveleuse et chaude d’une
figure emblématique de Seattle. Maison communale de Plainpalais.
L’Abri. Federico Leon, le réalisateur et metteur en scène argentin dans un exercice de style
étonnant autour d’une table de ping-pong. Face à
son assistant, il donne à voir la conception en
marche d’une œuvre naissante, pour une partie
serrée dans le mental du créateur. Las Ideas. Du
1er au 3 septembre.
Le 1er septembre, à l’Alhambra fraîchement
réouvert, le concert très attendu de Stephan
Eicher und die Automaten. La performance du
Bernois, déjà saluée par ses pairs, est un rendezvous à ne pas manquer, celui d’un artiste malicieux face un backing band de robots, mais toujours dans les mots de Suter et Djian.
La suite dans le prochain numéro pour
détailler la seconde partie du festival.
Jérôme Zanetta
La Bâtie-Festival de Genève, du 28 août au 12 septembre
Infos sur : www.batie.ch/
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sera interprétée sa Sinfonia pour deux pianos et
percussions, et les Danses symphoniques pour
deux pianos op. 45B de Rachmaninov; il sera
accompagné par Bertrand Chamayou, piano,
Emmanuel Curt et Daniel Ciampolini, percussions.
évian, du 4 au 11 juillet
Rencontres musicales
Un cadre idyllique pour une série de concerts - 9 à La Grange au Lac et 6 au
Théâtre du Casino - servis par une brochette de musiciens à la renommée
internationale ou de jeunes musiciens ‘qui montent’, voilà ce que vous
réserve la deuxième édition des Rencontres musicales d’Evian.
Après une première édition, en 2014, couronnée de succès, les organisateurs, à savoir le
Quatuor Modigliani, ont concocté un programme qui ravira les festivaliers, en associant pour
la première fois de grands interprètes à des
ensembles constitués (le Mahler Chamber
Orchestra & Jennifer Johnston, l’Orchestre des
Pays de Savoie & Fazıl Say…) ; et en célébrant
un des plus grands quatuors de notre temps, le
quatuor Emerson.
Un autre point fort de cette édition sera
l’hommage rendu à des complicités de longue
date, avec les duos entre Maxim Vengerov &
La Grange au Lac à 20h
invitée à Évian, et qui reviendra sur la scène de
la Grange au Lac lors du concert d’ouverture.
Notons encore que le fil rouge de cette édition est la “Vienne du tournant du siècle“, ce qui
permettra de faire découvrir ou réentendre des
piliers de la musique postromantique.
Théâtre du Casino, en journée
Les festivités débutent en ce lieu le 4 juillet
à 11h avec un concert ‘évian Talents’ et deux
quintettes de Mozart No. 2 en do majeur K515)
et Bruckner (en fa majeur WAB 112) servis par
Yossif Ivanov, violon, Raphaëlle Moreau, violon, Léa Hennino, alto,
Adrien La Marca, alto,
et Christian-Pierre La
Marca, violoncelle.
Suivront le Trio Con
Brio & Lise Berthaud,
avec
Schönberg,
Beethoven, Schumann
(6 juillet, 11h); puis
Nicolas Baldeyrou, un
des clarinettistes les
plus demandés à travers
le monde, qui sera
rejoint sur scène par
Gérard Caussé, alto,
Edgar Moreau, violonQuatuor Modigliani © Sylvie Lancrenon
celle,
et
Michel
Dalberto, piano (7 juillet, 16h). Le 9 juillet à
Itamar Golan, Gautier Capuçon & Frank Braley, 11h, Veronika Eberle au violon et Michail Lifits
au piano vous serviront des Sonates de Mozart
ou encore Sol Gabetta & Bertrand Chamayou.
Et le jeune pianiste français Jean-Frédéric et Beethoven, pour terminer avec une Fantaisie
Neuburger sera la figure ‘vivante’ de ces de Schubert.
Un violoniste qui se produit sur les plus
Rencontres musicales; les organisateurs lui ont
en effet passé commande d’une œuvre qui sera grandes scènes est l’invité des Rencontres musicales : Nicolas Dautricourt sera accompagné
créée lors du festival.
Les jeunes musiciens ne seront pas oubliés, pour l’occasion par Julian Steckel, violoncelle,
puisque les talents de demain seront au rendez- et Jean-Frédéric Neuburger, piano, dont l’œuvvous. Qu’on en juge : Edgar Moreau, Veronika re commandée par les organisateurs sera créée
Eberle & Michail Lifits, Adrien & Christian- lors de ce concert (10 juillet).
Jean-Frédéric Neuburger se produira égalePierre La Marca, ou la violoniste japonaise
Sayaka Shoji, que Mstislav Rostropovich avait ment le 11 juillet à 16h, lors d’un concert où
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Le concert d’ouverture du 4 juillet réunira le
violon de Sayaka Shoji, le violoncelle de Henri
Demarquette, le piano de Jonathan Gilad, et le
Quatuor Modigliani pour un programme Mozart,
Brahms, Mahler et Schumann.
Par la suite, et toujours dans le même lieu,
on entendre la pianiste Vanessa Wagner (5 juillet
à 15h) en compagnie du Chœur Accentus dirigé
par Marc Korovitch (Schubert, Liszt, Reger,
Wolf) ; le duo violoncelle-piano Gautier
Capuçon & Frank Braley (5 juillet) avec des
œuvres de Schumann, Beetoven, Webern et
Debussy ; un autre duo, celui formé de Maxim
Vengerov, violon, et Itamar Golan, piano, pour
une interprétation d’œuvres de Elgar, Prokofiev,
Brahms ou Ysaÿe (6 juillet).
Le Quatuor Emerson se produira dans des
œuvres de Haydn, Ives, Webern et Beethoven (7
juillet), avant le retour du Quatuor Modigliano en
compagnie de Lawrence Dutton, alto, et Paul
Walkins, violoncelle pour un programme Mozart,
Dvorak et Schönberg (8 juillet).
Le Mahler Chamber Orchestra, un ensemble
de renommée internationale, sera dirigé par
Antonio Méndez et accueillera la mezzo-soprano
Jennifer Johnston. Au menu : Mahler et Wagner
(9 juillet). L’avant-dernier soir, un remarquable
trio sera sur la scène de La Grange au Lac : Baiba
Skride au violon, Sol Gabetta au violoncelle et
Bertrand Chamayou au piano, avec un menu
Mendelssohn et Schubert (10 juillet).
Le concert de clôture du 11 juillet rassemblera sur scène le pianiste Fazil Say et
l’Orchestre des Pays de Savoie avec son chef
Nicolas Chalvin; le menu servi à cette occasion
est composé du Prologue de Capriccio de Strauss
en entrée, du Concerto pour piano no. 23 en la
majeur K488 de Mozart en plat de résistance et
des Métamorphoses de Strauss en guise de dessert.
Avec un tel programme et de tels musiciens,
nul doute que cette deuxième édition des
Rencontres musicales d’Evian rencontrera un vif
succès.
Viviane Vuilleumier
Tous les détails vous attendent sur :
http://www.rencontres-musicales-evian.fr/
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f e s t i v a l s
la chaise-dieu
la côte-saint-andré
On revient toujours dans l’abbatiale, au milieu des bois et
des monts d’Auvergne.
La prochaine édition du Festival Berlioz, dans le bourg
natal du compositeur, à une soixantaine de kilomètres au
sud de Genève, se veut éclectique. Sous la direction de
Bruno Messina, avec toujours autant d’idées
bouillonnantes et d’initiatives heureuses.
été musical
36
Festival Berlioz
Julien Caron, nommé directeur du festival en 2013, s’est inscrit dans les
pas de ses prédécesseurs, Guy Ramona et Jean-Michel Mathé, tout en apportant
bien sûr un souffle et une personnalité nouvelle à un festival qui fêtera en 2016
ses cinquante ans et sa cinquantième édition (ce qui est mathématiquement possible, le festival n’ayant pas eu lieu, un été, à l’époque lointaine où il se composait seulement d’une poignée de concerts). Il a par exemple mis au point un
système de thématiques centrées sur des compositeurs : Bach, Rameau et
Onslow (compositeur auvergnat !) en 2014, Bach de nouveau, mais aussi
Haendel et Domenico Scarlatti cette année, tous trois nés en 1685. Outre de
grands ouvrages (Israël en Égypte de Haendel par l’orchestre Les Siècles sous
la direction de Geoffroy Jourdain, la Messe en si de Bach par la Chapelle rhénane), Julien Caron a souhaité faire entendre des artistes proposant des concerts
inattendus. Ainsi, le jeune claveciniste Jean Rondeau jouera Scarlatti au clavecin et improvisera au piano à partir du même Scarlatti. Le Trio SR9, pour sa
part, interprétera Bach aux marimbas, cependant que Max Emanuel Cencic
viendra pour la première fois à La Chaise-Dieu à la faveur d’un récital célébrant l’art des castrats. Et un Concert royal de la nuit, le 25 août, reconstituera
une fête musicale conçue par Mazarin pour célébrer la fin de la Fronde et l’avènement de Louis XIV : quatre veilles suivies d’un épilogue, le tout devant
s’achever à minuit. Le Requiem allemand de Brahms dans sa version pour
chœur et deux pianos, la musique écrite
par Purcell pour la reine Mary II, La
Création de Haydn dans une transcription
pour chœur et instruments à vent sont
d’autres jalons de l’édition 2015, sans
oublier le « récital pictural » donné par
Mikhaïl Rudy, qui va faire revivre une version historique des Tableaux d’une exposition avec des images de Kandinsky.
Il est de coutume que le festival propose aussi de grandes œuvres du XIXe siècle, car les amateurs de musique symphoJan Willem de Vriend
© Marcel van den Broek
nique habitant l’Auvergne n’ont guère
l’occasion d’entendre des concerts de ce
type durant la saison. On a cité Beethoven et Moussorgski, mais l’édition 2015
proposera aussi une quasi-intégrale des symphonies de Beethoven (quasi, car
l’été dernier furent données les Cinquième et Sixième Symphonies), toutes sur
instruments modernes, avec des chefs aussi différents que Jacques Mercier,
Alexandre Bloch ou Jan Willem de Vriend. La musique contemporaine ? « Mon
prédécesseur avait mené une politique volontariste avec dix minutes de
musique d’aujourd’hui au début de chaque concert, commente Julien Caron. Je
plaide, moi, pour la rencontre entre la musique contemporaine et le répertoire,
car je tiens aussi à m’assurer de la vie des œuvres nouvelles. » Ainsi, Philippe
Hersant sera plusieurs fois à l’honneur cette année lors d’un concert de
Sequenza 9.3 qui le confrontera à Bach, Dowland et Pärt, mais aussi sous les
doigts du trio SR9.
Cette année, la thématique s’axe « Sur les routes de Napoléon ». En raison du bicentenaire du retour de l’île d’Elbe, quand Napoléon traverse les
Alpes, près de la Côte-Saint-André. Donc, Berlioz et Napoléon, mais aussi
Beethoven, qui fait lien. L’ouverture se fait, le 20 août, par un banquet dans le
style des banquets républicains de la Révolution, sur des musiques de Béranger,
le chansonnier de l’époque. Le lendemain investit le théâtre antique de Vienne :
pour le Te Deum de Berlioz, avec d’importantes masses chorales, dont six cents
enfants chanteurs, et le Jeune Orchestre Européen Hector-Berlioz dirigé par
François-Xavier Roth. Le samedi mène à l’abbaye de Saint-Antoine, avec le
Concert Spirituel sous la direction d’Hervé Niquet et des œuvres de Plantade,
Auber, Berlioz et le Requiem de Cherubini. Le dimanche retrouve la CôteSaint-André, avec John Eliot Gardiner et son Orchestre révolutionnaire et
romantique, pour la Symphonie fantastique et sa suite du monodrame de Lélio,
et Denis Podalydès en récitant.
Le lundi soir, place au XXe siècle, avec Daniel Kawka et son Orchestre
symphonique Ose, pour Ode à Napoléon de Schœnberg, Fanfares sur des proclamations de Napoléon de Jacques Castérède, et la Suite sur le Napoléon
d’Abel Gance d’Honegger et Marius Constant. Le mardi soir reprend une thématique proche : 1812 de Tchaïkovski, Guerre et Paix de Prokofiev, Hary
Janos de Kodaly, et le Concerto de Pierre Rode, violoniste contemporain de
Berlioz, par l’Orchestre national de Lyon dirigé par Fabien Gabel. Le lendemain, Beethoven revient, avec la Bataille de Vitoria et l’Héroïque, en compagnie du Concerto « égyptien » de Saint-Saëns, par Angelich, avec l’Orchestre
des Pays de Savoie sous la direction de Nicolas Chalvin. Le jeudi se livre à la
création : Nabulio, un oratorio sur l’enfance de Napoléon en langue corse,
musique de Jean-Claude Acquaviva et Bruno Coulais. Avec le chœur de polyphonies corses A Filetta, l’Orchestre de Poitou-Charente sous la direction de
Jean-François Heisser, et un récitant, Didier Sandre.
Vendredi, l’Orchestre de chambre de Paris s’associe à François-Frédéric
Guy, piano et direction, pour une intégrale marathon des cinq concertos de
piano de Beethoven. Samedi, l’Orchestre et Chœur de Lyon avec Leonard
Slatkine pour deux pages rares de Berlioz, Scène héroïque et Sardanapale,
achevées sur la IXe de Beethoven. Et le dimanche, en clôture, un écho au destin de Napoléon, avec la Symphonie funèbre et triomphale de Berlioz, par
l’Orchestre de la Garde Républicaine. Le festival se ponctuera aussi de petits
concerts : Harold en Italie dans le version Liszt, des pièces pour guitare, un
récital d’orgue, des concerts ayant pour thématiques les routes de Pologne,
d’Espagne, d’Italie, de l’Allemagne romantique. Sans oublier les Lunaisiens,
qui pratiquent le répertoire du XIXe siècle des cabarets et autres goguettes.
Pierre-René Serna
Festival Berlioz, du 20 au 30 août. Tél. : 00 33 (0)4 74 20 79. www.festivalberlioz.com
Christian Wasselin
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présentation
Radio-France et
Montpellier
1985-2015… le festival de Radio-France et Montpellier Languedoc-Roussillon
fête ses 30 ans cette année ! Comme depuis sa création par René Koering, la
manifestation met à l’affiche quelques raretés.
38
On note d’abord le retour dans la programmation d’un opéra proposé en version scénique
dans la salle de l’Opéra Comédie pour trois soirées consécutives (15, 16, 17 juillet), il s’agit de
Don Quichotte chez la Duchesse de
Boismortier dans la production de Corinne et
Gilles Benizio, alias Shirley et Dino. Les deux
compères sont des habitués de la scène montpelliéraine – ils y ont déjà monté un bien déjanté King Arthur et La belle Hélène –, et le spectacle créé en début d’année à Metz puis
Versailles convoquera à nouveau Hervé Niquet
et son orchestre du Concert Spirituel, avec dans
les rôles principaux Emiliano Gonzalez Toro,
Marc Labonnette, Chantal Santon Jeffery.
Bello, Michal Partyka, …, ainsi que Julie
Depardieu en récitante.
Autre pièce lyrique mais d’une plus grande
rareté, La Jacquerie d’Edouard Lalo, ultime
composition de l’auteur du Roi d’Ys, sera défendue le 24 par Véronique Gens, Nora Gubisch,
Charles Castronovo, direction de Patrick Davin,
concert en coproduction avec le Palazzetto Bru
Zane Centre de Musique Romantique
Française.
Sarah Connolly © Peter Warren
Autres soirées, le 21 la mezzo Sarah
Connolly interprétera des chants de Zemlinsky,
suivis de la 5ème de Mahler, un programme
napolitain Corelli, Scarlatti le 22, ou encore le
Petit bijou de Jacques Offenbach, Fantasio
sera dirigé le 18 par Friedemann Layer et interprété par une somptueuse distribution :
Marianne Crebassa, Jean-Sébastien Bou, Omo
Katia et Marielle Labèque © Umberto Nicoletti
Piano en vedette
Une plus grande place est toutefois réservée au répertoire symphonique et instrumental
dans lequel le piano se taille la part du lion :
récital Fazil Say le 10, les sœurs Labèque
accompagnées de percussions le 14, Boris
Berezovsky dans une composition de Koering
le 19, récital Piotr Anderszewski le 20,
François-Frédéric Guy dans l’intégrale des
concertos de Beethoven les 23 et 25.
Michał Partyka © DR
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concert de clôture le 25 avec la 9ème de
Beethoven, direction de Christian Arming aux
commandes de l’Orchestre National
Montpellier Languedoc-Roussillon et du chœur
de l’Orfeon Donostiarra.
François Jestin
Programme complet sur :
www.festivalradiofrancemontpellier.com
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MIGROSS
L-CLAS
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POUR-C
16 au Victori
aison 2015/20
SICS
a Hall à 20 h
Jeudi 29 octobre 2015
PHILHARMONIA ORCHESTRA LONDON
Jeudi 26 novembre 2015
ORCHESTRE DE CHAMBRE DE L’ORCHESTRE SYMPHONIQUE
DE LA RADIO BAVAROISE
7 juillet - 4 août 2015
Jeudi 3 décembre 2015
ORCHESTRE DES CHAMPS-ÉLYSÉES
Jeudi 21 janvier 2016
Concert lyrique
Enrique Mazzola
Ekaterina Siurina – Joseph Calleja
Mardi 7 juillet à 21h45
ORCHESTRE SYMPHONIQUE D’INDE
Jeudi 25 février 2016
CAMERATA SALZBURG
Jeudi 17 mars 2016
ORCHESTRE NATIONAL DE RUSSIE
Bizet
Carmen
Mercredi 8 juillet à 21h45
Samedi 11 juillet à 21h45
Mardi 14 juillet à 21h45
Concert symphonique
Mardi 26 avril 2016
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE ROTTERDAM
Vendredi 27 mai 2016
ORCHESTRE DE PARIS
Abonnement huit concerts à Fr. 166.- / Fr. 249.- / Fr. 332.- / Fr. 426.- / Fr. 510.Vente de billets par concert dès le lundi 14 septembre 2015
Billetterie: Service culturel Migros Genève, Rue du Prince 7, Tél. 022 319 61 11
Myung Whun Chung
Martha Argerich – Nicholas Angelich
Vendredi 10 juillet à 21h45
Concert des révélations
classiques de l’Adami
Organisation: Service culturel Migros Genève
www.culturel-migros-geneve.ch www.migros-pour-cent-culturel-classics.ch
Samedi 11 juillet à 18h
Cour Saint-Louis
Récital Nicolas Courjal
Samedi 1er août à 18h
Cour Saint-Louis
Verdi
Il Trovatore
Samedi 1er août à 21h30
Mardi 4 août à 21h30
Concert symphonique
Saluces.com - Licences 1-137284 / 2-1001992 - Visuel : Nathalie Verdier
Bertrand de Billy
Cédric Tiberghien
Lundi 3 août à 21h30
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tél. 04 90 34 24 24
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SAISON 2015-16
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pagné de son fidèle guitariste Eivind Aarset,
formera un ensemble étonnant avec le musicien
d'électro finlandais aux multiples pseudos
Vladislav Delay, ainsi qu'avec le duo jamaïcain
Sly & Robbie (Rhythm Killers), batterie et
basse.
à montreux du 3 au 18 juillet
Montreux Jazz
Tandis que le programme off s'avère très riche et que les grandes stars
affichent complet (Lady Gaga, Lenny Kravitz, John Legend, Al Jarreau), la
programmation du MJF cette année s'annonce brillantissime et plus équilibrée
que jamais, entre jazz, figures marquantes de l'histoire de la musique, vedettes
populaires, projets inédits et découvertes de jeunes talents. Sélections de
quelques promesses.
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Bonnes nouvelles ! Lionel Richie répond
encore (Hello), Dianne Reeves chante que tout
va pour le mieux (Better Days), et, du fond de
son caveau familial, Toto est encore capable de
chanter Hold the Line. La preuve : même si le
groupe de la famille Porcaro s'est dissout suite
au départ de son chanteur en 2008, si la maladie
a finalement eu raison de Mike il y a tout juste
trois mois, Toto vient de sortir d'outre-tombe
son 14e album (Toto XIV).
Abonnés du festival et de ses workshops,
Chick Corea et Herbie Hancock ne sont pas
prêts de perdre leur énergie communicative. Les
deux musiciens qui ont commencé aux côtés de
Miles Davis, figure tutélaire du
Montreux Jazz (en fait, le premier a,
en 1968, remplacé le second au
piano dans le quintet du grand
Miles) jouent ensemble depuis
1978, pour ne remonter qu'à leur
composition commune Button Up.
Chick a conservé sa préférence
pour le jazz fusion tandis que
Herbie, un des premiers à avoir joué
du funk avec des synthétiseurs, n'a
jamais renié Mozart. Autre héritier
d'un pilier du jazz funk, le tromboniste Fred Wesley donnera un
concert au MJF avec The New
JB's, par allusion à The J.B.'s, nom
de la formation mythique de James Brown dont Wesley fut le directeur musical - dans les
années 70.
Audacieux accords
Tandis que Santana (Soul Sacrifice) fera
vibrer les cœurs et pleurer les toujours nostalgiques de Woodstock (1969, faut-il le rappeler ?)-, plusieurs guitaristes iront de leurs cordes les plus sensibles (Georges Benson, Los
Lobos). Cucurucucu ! Le MJF a concocté une
a
superbe surprise musicale : une soirée réunissant Gilberto Gil et Caetano Veloso.
De nombreux autres projets spéciaux sont à
mentionner, dont une soirée hommage à Paco
de Lucia, un concert faisant jouer toute la
famille Chedid (Louis, M - alias Matthieu,
Joseph et Anna) et la rencontre inédite du
Kronos Quartet avec le Trio Da Kali malien.
Depuis ses débuts, le quatuor à cordes s'est distingué par ses importantes prises de risque.
Toujours partant pour les projets les plus fous, il
s'est notamment produit en concert avec le
poète Beat Allen Ginsberg, David Bowie,
Björk, Piazzola ou l'intellectuel Noam
Les jazzistes
Depuis quelques années, le Montreux Jazz,
conscient de reproches liés à une certaine dénaturation de son nom, semble vouloir revenir à
ses racines jazz, terme devenu fourre-tout au fur
et à mesure que le festival a grandi. Privilégiant
ainsi une programmation jazzy au détriment de
stars populaires, il continue à opter pour une
représentativité contemporaine et plutôt pointue
du jazz. Pour preuves, la venue du contrebassiste de Philadelphie Christian McBride (Gettin'
To It) - ici en trio -, ou celle de Jason Moran
(Ten), pianiste de Charles Lloyd, Lee Konitz,
Wayne Shorter ou Steve Coleman.
En plus de David Sanborn, saxo indispensable à David Bowie, Clapton, Wonder ou
Sting, un autre saxophoniste américain, Joshua
Redman (Wish), accompagne à Montreux The
Bad Plus (Never Stop) sur la même scène, au
prétexte de jouer leur dernier album. Plus
dépaysants, parce que farcis d'influences orientales, le contrebassiste israélien Avishai Cohen
revient à Montreux avec son dernier album From Darkness, ainsi
que le chanteur et joueur de oud
tunisien Dhafer Youssef (Birds
Requiem), entendu au Cully Jazz
l'an dernier.
Femmes de musique
Kronos Quartet & Trio Da Kali © Lenny Gonzalez
Chomsky. Il a collaboré avec des peintres et des
DJ, et a composé les bandes originales des films
Dracula, Requiem for a Dream, Heat... Une soirée à ne pas manquer donc !
Un autre habitué des projets décoiffants,
Erik Truffaz, confrontera sa trompette au pianiste prodige Yaron Herman (Follow the White
Rabbit) et aux claviers de l'électro norvégien
Bugge Wesseltoft (It's Snowing On My Piano).
Enfin, son compatriote, trompettiste de nu jazz,
Nils Petter Molvaer (Khmer, Switch), accom-
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Peu de musiciennes parmi les
susmentionnés, direz-vous ? Que
nenni. Lady Gaga n'est pas la
seule à vouloir rivaliser avec le
crooner Tony Bennett (89 ans) pour un concert en duo. Les chanteuses qui donnent de la voix à
Montreux s'illustrent chacune
dans des registres très différents : Mary J. Blige
(RnB), Sinéad O'Connor et Ruthie Foster
(folk), Beth Gibbons (trip hop - ici avec son
groupe Portishead) et Sophie Hunger (popblues).
Frank Dayen
Montreux Jazz Festival, du 3 au 18 juillet, www.montreuxjazzfestival.com. Rés. www.ticketcorner.ch.
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septembre
musical
s e p t e m b r e
m u s i c a l
entretien avec tobias richter
A la recherche d'une
dramaturgie originale
Le Septembre Musical, qui a retrouvé son nom d'origine il y a quelque années
seulement, fête cette année son 70e anniversaire. Pour son directeur actuel,
l'occasion était trop belle d'affiner une formule qui a fait ses preuves au cours
des éditions précédentes mais qui sera encore plus systématiquement
exploitée cette année.
42
Aux côtés de grandes vedettes confirmées figurent à l'affiche divers noms de jeunes musiciens
dont la réputation internationale n'est pas encore à la hauteur de leur réel talent. En outre, l'engagement d'un orchestre en résidence permet
une programmation plus audacieuse qui répond
parfaitement aux préoccupations de M. Richter.
Interrogé sur les partitions mises à l'affiche des
concerts du futur festival, M. Richter s'enthousiasme pour ce rendez-vous musical portant en
lui les germes d'une grande idée qu'il tient à
mettre en oeuvre en dépit des inévitables
contraintes financières qui sont le talon
d'Achille des instances artistiques dans le
monde entier.
Quels sont donc les points forts de
cette future saison automnale ? lui ai-je
demandé en préambule de l'entretien téléphonique qu'il a bien voulu m'accorder. La réponse
fuse immédiatement:
M. Richter : Il importe avant tout de
conserver la confrontation entre artistes
reconnus et musiciens à l'orée d'une
grande carrière. Un festival comme le
nôtre ne peut se contenter d'inviter des
virtuoses que tout le monde s'arrache au
prétexte qu'ils sont connus et que ce
sont eux que le public veut d'abord
entendre. La musique est un monde en
mouvement perpétuel et il faut savoir
rester à l'écoute des talents nouveaux
qui s'imposent progressivement et que
l'on portera aux nues dans quelques
années.
comme le Concours Clara Haskil, le Concours
Tchaïkovski ou encore le Concours Geza Anda,
une manifestation suisse moins connue de ce
côté-ci de la Sarine. Notre chance est de pouvoir
nous assurer la présence à Montreux des lauréats de ces compétitions pour offrir aux auditeurs la possibilité de se faire une idée de l'impressionnant degré de perfection technique et de
maîtrise interprétative de ces jeunes artistes.
Comment établissez-vous vos programmes, dans ces conditions ?
- Il s'agit de développer une stratégie musicale
qui soit propre à Montreux. Je me méfie des
orchestres et ensembles de musiciens qui tournent l'Europe avec un même programme interprété de suite dans diverses capitales. Le pire
ennemi de la vie musicale, c'est bien la routine !
Je préfère obtenir des artistes engagés un programme qu'ils conçoivent exclusivement pour
Montreux, de façon à garantir une certaine fraîcheur dans l'interprétation. De plus, cela me
permet d'infléchir le choix des œuvres exécutées et d'éviter que l'on se concentre chaque
année sur les mêmes partitions les plus célèbres.
Un exemple ?
Prenez le programme du concert d'ouverture. Y
figurent deux concertos de Bach pour piano et
orchestre que Mikhail Pletnev a d'abord hésité à
jouer. Je suis parvenu à le convaincre, car je
tiens absolument à faire entendre Bach comme
je l'aime, c'est-à-dire sur des instruments
modernes destinés aux grandes salles dans lesquelles ces pages archi-célèbres sont le plus
souvent interprétées. Je n'ai bien sûr rien contre
la pratique de cette musique sur instruments
anciens, mais le génie de Bach dépasse largement les effets de mode et je ne vois pas pourquoi une chapelle d'artistes baroques, qui ont
parfois tendance à se comporter comme un
groupe de religieux fanatiques, voire intégristes,
défendant à corps et à cri leur conception du
langage musical de leur idole, devraient faire la
loi dans ce répertoire ! Et c'est d'abord pour
Montreux que le grand pianiste russe s'est finalement décidé à travailler ces partitions...
Quels avantages voyez-vous à l'engagement d'un orchestre en résidence comme
l'European Philharmonic of Switzerland,
après avoir engagé plusieurs années de suite
le Royal Philharmonic Orchestra de Londres
dans cette même fonction ?
Un festival ne devrait pas se limiter à une série
de concerts, encadrés par quelques verres bus en
Le choix n'est-il pas ardu ?
Certes, mais le festival, par tradition, a
établi des liens de confiance avec différents grands concours internationaux,
Les 27 et 28 août : Russian National Orchestra
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bonne compagnie avant ou après la soirée! Les
orchestres qui viennent et restent à Montreux
pendant une petite semaine sont appelés à se
présenter hors les murs, face à des écoliers ou à
des publics qui se tiennent habituellement à l'écart des salles. Un orchestre en résidence est
toujours prêt à inviter des amateurs choisis à
une séance de travail ou à s'investir dans divers
programmes pédagogiques. Prenez cet orches-
L'Orchestre National de France ou l'Orchestre
Français de Jeunes ont déjà figuré plusieurs fois
à l'affiche du festival montreusien, et je suis
heureux qu'ils reviennent ici après une pause
qu'il est légitime de considérer comme trop longue. En outre, l'Orchestre Français des Jeunes
fait un contrepoint idéal à la présence de
l'Orchestre Philharmonique de Suisse, car il est,
lui, formé de jeunes musiciens qui n'ont pas
Le 28 août à l’Auditorium Stravinski : Hartmut Haenchen
tre suisse : il est composé de musiciens qui ont
joué dans le Mahler Jugendorchester et qui ont
dû le quitter lorsqu'ils ont atteint la limite d'âge,
fixée à vingt-six ans en l'occurrence. Désireux
de continuer à prolonger l'expérience de cette
pratique commune de la musique en dehors des
contraintes habituelles, plusieurs musiciens,
pourtant souvent engagés dans de grandes formations orchestrales européennes, ont alors
décidé de fonder cet European Philharmonic of
Switzerland en se réunissant quelques semaines
par année pour mettre au point une série de programmes qu'ils donnent ensuite dans le cadre de
concerts publics. Dans ces conditions, il est plus
facile pour l'organisation qui les engage de discuter la composition des programmes mis à l'affiche car cet ensemble n'a pas à se soucier d'une
politique artistique dictée par les grandes
marques de disques ou par des impératifs économiques draconiens.
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Avez-vous déjà quelques grands axes
de programmation en réserve ?
Cette année, je commence l'exploration des
ouvrages de Saint-Saëns, qui sont injustement
relégués dans les recoins les plus obscurs du
répertoire régulier. J'aimerais également intéresser plus systématiquement le public à l'univers
fascinant des grands concertos de piano russes,
tels ceux d'Arensky ou de Rubinstein, par
exemple. J'ai d'ailleurs eu la surprise de voir que
même les artistes au talent confirmé s'intéressent de plus en plus à ces oeuvres moins
connues et ne s'opposeraient pas, dans de bonnes conditions, à aborder ce type de répertoire
!... Et c'est là que je vois une des missions
essentielles d'une manifestation comme le
Septembre Musical : celle de susciter des rencontres qui sortent de l'ordinaire entre interprètes et compositeurs. Et puis, je ne vous le cache
pas, l'engagement d'un orchestre en résidence
m'est d'autant plus précieux que je souhaite
encore et toujours remettre la création contemporaine au milieu du village. Car la musique ne
peut se contenter de ressasser ce qui s'est fait il
y a plus de cinquante ou soixante-dix ans!...
Propos recueillis au téléphone par
Eric Pousaz
Le 31 août au Château de Chillon : Quatuor Arod (Jordan Victoria, violon Alexandre Vu, violon - Corentin Apparailly, alto - Samy Rachid, violoncelle)
Je tiens d'abord à respecter la tradition.
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chefs d'orchestre actuels avec lesquels ils sont
invités à se produire en salle. Et avec eux, aussi,
il n'y a pas à craindre les préjugés engendrés par
la routine ou le manque d'appétence!...
encore acquis une expérience professionnelle au
sein d'une grande formation. A l'image de ce qui
se fait à Verbier, mais sur une courte période
seulement, cette grande formation instrumentale offre la possibilité aux musiciens de se mesurer sur plusieurs mois aux plus grands solistes et
Quelles sont les grands lignes de la
politique que vous entendez poursuivre à
Montreux dans les futures éditions du
Festival ?
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aussi transcrit pour deux pianos, dédiée à
Martha Argerich, la Suite de Cendrillon de
Prokofiev. On doit également à Mikhaïl Pletnev
compositeur une Symphonie classique, un
Concerto pour piano, ainsi qu’un Concerto
pour alto et orchestre, créé par Yuri Bashmet.
Après avoir donné 4 Sonates de Mozart et
le Concerto pour piano de Scriabine, en compagnie de Manfred Honeck et du Verbier Festival
Orchestra cet été en Valais, Mikhaïl Pletnev
jouera à Montreux les Concertos pour clavier
BWV 1052 et 1056 de J.S. Bach, ainsi que le
Concerto en ré majeur Hob. XVIII :11, la plus
connue des œuvres concertantes
pour clavier que nous a léguées
Joseph Haydn.
en ouverture du festival
Mikhail Pletnev
Fondateur du Russian National Orchestra, Mikhail Pletnev tiendra la partie
solistique de concertos pour piano et orchestre de Bach et de Haydn, mais
cédera sa baguette de chef à Hartmut Haenchen pour les deux soirées
inaugurales de la 70e édition du Septembre Musical, les jeudi 27 et
vendredi 28 août à l’Auditorium Stravinski de Montreux.
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Né en 1957 à Arkhangelsk dans
une famille de musiciens, Mikhail
Pletnev devient à 13 ans l’élève de
deux professeurs prestigieux, Jacob
Flier et Lev Vlasenko, au
Conservatoire de Moscou. Il obtient à
21 ans la médaille d’or du Concours
international de piano Tchaïkovski de
cette ville, ce qui l’autorise à entreprendre des tournées en Europe, au
Japon, aux USA et en Israël, en solo
ou avec orchestre, sous la direction de
chefs aussi connus que Lorin Maazel,
C.M. Giulini, H. Blomstedt ou Kent
Nagano. Il fait lui-même ses débuts
de chef en 1980. En 1988, Mikhaïl
Gorbatchev l’invite à se produire lors
du sommet des grandes puissances à
Washington. En 1990, Mikhail
Pletnev, grâce à la perestroïka, réalise
un de ses rêves : créer le premier
orchestre complètement indépendant
du pouvoir politique de son pays.
C’est le Russian National Orchestra,
une formation appelée à se produire
dans le monde entier, dans les grands
festivals, et déjà présente pour deux
soirs à Montreux l’an dernier.
En 2000, Mikhaïl Pletnev jouait en soliste
à Pékin, sous la direction de Long Yu, au
concert inaugural de l’Orchestre Philharmonique de Chine, et l’année suivante, donnait son
premier concert à Verbier, sous la conduite de
Nagano.
En 1993, Pletnev signait un contrat exclusif avec la Deutsche Grammophon, et peu après
paraissaient les premiers CD : la 2e Symphonie
couplée avec Le Rocher de Rachmaninov,
Manfred et La Tempête de Tchaïkovski. On ne
compte plus les enregistrements qui ont suivi
ces deux premiers, tant ils sont nombreux et
variés. Pianiste polyvalent, Mikhaïl Pletnev a
a
Hartmut Haenchen
Mikhail Pletnev
gravé entre autres des albums de sonates de
Domenico Scarlatti, de Mozart, de Beethoven,
des œuvres de C.P.E. Bach, de Schumann, de
Liszt, de Grieg, de Scriabine, de Prokofiev, de
Taneiev. Avec son orchestre, il a enregistré le
Casse-Noisette, la Belle au bois dormant, et à
deux reprises une intégrale des Symphonies de
Tchaïkovski ( la plus récente en 2012-13 pour le
label Pentatone), ainsi que des concertos de
Haydn, des symphonies de Beethoven et de
Chostakovitch. Il a aussi réalisé des transcriptions pour piano d’extraits du Casse-Noisette,
de la Belle au bois dormant de Tchaïkovski, du
ballet Anna Karénine de Rodion Chédrine. Il a
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Né à Dresde en 1943, Hartmut
Haenchen a longtemps exercé son
métier de chef d’orchestre en exRDA, d’abord à Zwickau, puis entre
Dresde et Berlin-Est, avant de devenir en 1986 le directeur général de
l’Opéra néerlandais, à Amstredam.
C’est dès lors aux Pays-Bas qu’il
déploiera l’essentiel de son activité,
tout en étant l’invité régulier du
Royal Opera House de Covent
Garden, de l’Opéra de Paris et du
Teatro Real de Madrid.
Considéré comme un des plus
fins connaisseurs de l’œuvre de
Richard Wagner et de celle de
Gustav Mahler, Hartmut Haenchen
excelle aussi dans le répertoire
baroque et classique, ce dont témoigne sa discographie, qui, échelonnée
entre 1976 et 2014, compte plus de
135 CD et DVD réalisés pour divers
labels. Hôte du Grand Théâtre de
Genève en janvier dernier pour
l’Iphigénie en Tauride de Gluck, il « a ciselé la
partition en orfèvre, tout en finesse et en nuances, avec des colorations subtiles » (Claudio
Poloni).
A Montreux, le public du Septembre musical pourra apprécier son talent dans une Suite de
la Water Music de Haendel, dans Bach, dans
Haydn, et surtout dans les deux dernières symphonies de Mozart, celle en sol mineur K.550 et
celle en ut majeur K.551, dite Jupiter.
Yves Allaz
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entretien : patrick peikert
Concours Clara Haskil
Patrick Peikert, directeur du concours, a bien voulu répondre à quelques
questions au sujet de l’organisation générale de cette manifestation ainsi que
sur le déroulement de celle-ci.
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Zhang qui a gagné le premier prix en 2011 ne
pensait pas mériter le prix, il a d’abord voulu
continuer sa formation à Berlin. Son prix est
toujours dans mon armoire. Cette année, il y a
plus d’Européens et moins d’Asiatiques.
Longtemps, les Japonais faisaient la moitié des
inscrits mais n’arrivaient pas en finale.
Maintenant il n’y en a que trois mais ils sont
exceptionnels. On arrive ainsi à une moitié
d’Asiatiques et une moitié d’Européens et
Américains.
Sur quelles œuvres vont-ils être sélectionnés ?
Pas d’œuvres de virtuosité comme celles de
Chopin mais un concerto de Mozart a été
demandé en finale. C’est là qu’ils se montrent le
plus vulnérable. Mais il y a aussi une pièce
piano pour orchestre de Schumann, une introduction de concert allegro de dix minutes. Des
œuvres qui dissuadent en général des candidats
aux concours. Et comme Clara Haskil jouait
aussi les compositeurs de son temps, nous
avons demandé à Thomas Adès d’écrire un bis,
une pièce originale pour le concours. Un compositeur très talentueux qui a donné en juin à
Vienne sa création d’après La Tempête de
Shakespeare.
Tous vos lauréats sont-ils garantis de
faire une carrière ?
Orchestre de Chambre de Lausanne
Quelle place occupe le concours Clara
Haskil parmi les autres concours ?
Ce sont des questions qu’on ne se pose pas.
Notre concours a une certaine réputation mais
c’est un concours de musiciens et c’est la
musique qui compte. Nous n’avons jamais
voulu en faire une compétition, nous ne sommes
pas à Roland Garros. C’est par là que nous nous
différencions des autres concours. Nous ne faisons pas dans l’esbroufe. Et notre répertoire
d’œuvres n’est pas fondé sur la virtuosité. Nous
n’avons qu’un seul prix de 25'000 FS et
quelques prix annexes.
Quelles sont les qualités essentielles
d’un membre du jury, qui écoute pendant
des heures d’affilée des musiciens de
talents ?
Il faut être passionné, connaître le répertoire,
avoir le sens de l’écoute et bien sûr le sens critique, des qualités qui se développent avec l’expérience. On a dans notre jury un directeur d’o-
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péra (Antonio Moral de l’opéra de Madrid),
quatre pianistes, un violoniste et deux organisateurs de concerts. Le concours peut être important pour le musicien car il lui fait gagner du
temps, pour obtenir des concerts. C’est pourquoi nous avons aussi mis des organisateurs
dans le jury car ils ont une vision plus pragmatique. Ils savent combien il est important qu’un
musicien soit charismatique car un musicien qui
ne plaît pas, ne sert à rien.
Faites-vous attention à ce qu’il y ait
un équilibre entre les nationalités et pas trop
d’Asiatiques, toujours nombreux à se présenter ?
La présence des Asiatiques est une réalité.
Contrairement aux Européens ou aux
Américains, ils travaillent très dur. Les premiers
Chinois sont arrivés en 2011, il y en a eu quatre
et c’est un Chinois qui a gagné le premier prix
du concours. Les gens ont toujours l’impression que ce sont les mêmes. Le Chinois Chen
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Gagner le prix n’est pas une garantie pour la
carrière. C’est très variable mais si on regarde
l’ensemble des vingt prix Clara Haskil, il y en 6
ou 7 qui continuent de jouer et d’avoir une carrière internationale. Christoph Eschenbach par
exemple, fait la carrière que l’on sait. Steven
Osborne, premier prix 1991, fait une très belle
carrière et il y a ceux qui deviennent des solistes invités un peu partout dans le monde,
comme Till Fellner (prix1993) mais aussi
Martin Helmchen (prix 2001). Ils ont les qualités requises. Mais c’est un métier difficile, comparable à celui des sportifs d’élite, qui exige une
santé de fer. La Française Delphine Bardin, lauréate 1997, en sait quelque chose : trop de voyages, de pression, elle a préféré ne pas se lancer
dans la carrière.
Propos recueillis par Régine Kopp
SAMEDI 29 AOÛT, 20h00, SALLE DEL CASTILLO
Finale Concours Clara Haskil 2015
Orchestre de Chambre de Lausanne
Christian Zacharias, direction
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tournées et enregistrements. A cet égard, outre
de nombreuses pépites (dont un Pelléas et
Mélisande inoubliable dirigé par Bernard
Haitink*), Radio France vient de publier un coffret de huit disques qui raconte l'histoire de
l'Orchestre National à travers quatre-vingts ans
de concerts inédits et captivants.**
C’est cette belle formation qui viendra
jouer à Montreux en compagnie de Bertrand
Chamayou, pianiste français qui, depuis une
dizaine d’années, mène l’une des plus belles
un jeune orchestre de quatre-vingts ans
Orchestre National
de France
L’Orchestre national de France joue Humperdinck, Saint-Saëns et Berlioz,
le 6 septembre, à l’Auditorium Stravinski de Montreux.
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L’Orchestre national de
France vient de fêter ses quatrevingts ans, et à ce titre, est le
dépositaire d’une tradition d’interprétation toujours vivante. Il
fut aussi le premier orchestre
français composé de musiciens
permanents. Certes, il y eut le
Concert spirituel, la Société des
concerts du conservatoire, les
orchestres fondés par Colonne,
Pasdeloup et Lamoureux. Mais le
décret signé par le ministre chargé
des PTT, Jean Mistler, le 18 janvier 1934, inaugura une nouvelle
ère : il s’agissait de nourrir les
ondes et de porter la bonne parole
de la musique dans les foyers
français. Aujourd’hui encore,
bien évidemment, les concerts de
l’Orchestre national sont diffusés
sur les ondes de Radio France, et d’abord sur
France Musique.
On a cité le mot tradition. Un mot, pour
Mahler, qui signifiait paresse et routine ; mais
qui peut aussi désigner un style, une manière de
faire, quelque chose d’irremplaçable. C’est à
Désiré-Émile Inghelbrecht, premier chef titulaire, qu’échut le soin de fonder cette tradition. Il
s’en acquitta avec brio, avant que d’autres, de
Manuel Rosenthal et Roger Désormière à
Charles Munch, jusqu’à Charles Dutoit, Kurt
Masur et Daniele Gatti, ses plus récents directeurs musicaux, suivent ses pas mais tracent
aussi de nouveaux sillons.
Des fruits et des fleurs
Au fil des saisons, l’Orchestre national a
montré sa capacité à passer avec bonheur d’un
univers à l’autre, et les chefs s’enthousiasment
de l’élégance avec laquelle il aborde chaque
partition. « La nature est belle partout mais les
fleurs sont encore plus belles dans les prairies
de l'Orchestre national », confia un jour Kurt
a
Orchestre National de France © Christophe Abramowitz
Masur. Aujourd’hui, Daniele Gatti se félicite du
son de l’orchestre qu’il qualifie de « palpable »,
de sa précision rythmique, de son désir de chanter : « C’est le seul orchestre du monde latin qui
puisse aborder en même temps Verdi et Wagner
avec le son qui convient ».
Orchestre de répertoire, l’Orchestre national a aussi créé bien des œuvres majeures du
XXe siècle : Le Soleil des eaux de Boulez
(1948), Déserts de Varèse (l’un des derniers
scandales éclatants de l’histoire de la musique,
1954) ou Jonchaies de Xenakis (1977) font partie de son palmarès, ainsi qu’un grand nombre
d’œuvres de Dutilleux, de 1951, année de la
création de la Première Symphonie sous la
direction de Désormière, jusqu’au Temps l’horloge avec Renée Fleming et Seiji Ozawa (2009),
en passant par L’Arbre des songes avec le
concours d’Isaac Stern.
Pépites et paysages
Comme toutes les formations de premier
plan, l’Orchestre national de France effectue
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carrières qui soient (il fut lauréat du Concours
Long-Thibaud en 2001). Non pas en ressassant
toujours le même répertoire, mais en s’imposant
des défis : cette intégrale des Années de pèlerinage, par exemple, qu’il joua un peu partout en
2011 à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Liszt. Près de trois heures de voyage et de
paysages musicaux, sans fatigue ni afféterie :
trois heures d’envol.
Christian Wasselin
* Naïve.
** 8 CD Radio France/Ina, distr. Harmonia mundi.
DIMANCHE 6 SEPTEMBRE, 18h00, AUDITORIUM
STRAVINSKI
Orchestre National de France
Emmanuel Krivine, direction
Bertrand Chamayou, piano
Humperdinck - Prélude de Hänsel et Gretel
Saint-Saëns - Concerto pour piano et orchestre nº 2 en sol
mineur op. 22
Berlioz - Symphonie fantastique op.14
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Emmanuel Krivine @ Julien Becker
Bertrnd Chamayou
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Le 29 août à la Salle del Castillo : Christian Zacharias
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portrait
Frank Dupree
Il est né à Rastatt un an, jour pour jour, après la réunification allemande et
incarne une nouvelle génération. Portrait d'un artiste décomplexé
et non dénué d'humour qui va se produire au Château de Chillon.
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Alors qu'il n'a pas encore vingt-cinq ans, ce
pianiste a déjà réuni une expérience impressionnante. Sur les scènes les plus diverses et à de
nombreuses reprises, ce concertiste s’est approprié un répertoire très étendu, et alternant entre
le classique et le moderne. Très jeune, il a souhaité travailler le clavier; à 11-12 ans déjà, il a
voulu en faire sa profession. Sontraud Speidel a
été son professeur et son inspiratrice du début
jusqu'à aujourd'hui. Certes, elle lui a appris à
jouer, mais durant toutes ces années, elle a été
pour lui une guide dans la musique, et dans les
émotions : « Elle m'a aidé à grandir ».
Un musicien hardi... et sans
orgueil
Si des pianistes choisissent de devenir
chefs, c'est généralement dans la seconde partie
de leur carrière. Pour Frank Dupree, les choses
ont débuté tôt : « C'est chose amusante. Ma prof
de piano qui a décelé mon intérêt pour ce
domaine, m'a dit un jour: “Pourquoi ne dirigerais-tu pas? ” Et je l'ai fait, j'ai dirigé un petit
ensemble, puis un orchestre de chambre, et
enfin une formation symphonique. Bientôt je me
suis retrouvé à être l'élève qui dirigeait le plus...
et je n'avais que 14 ans ! »
Piano et orchestre se sont très vite retrouvés associés dans sa vie : Le premier concerto
pour piano de Tchaïkovsky a joué un rôle fétiche. A l’âge de 13 ans, Frank Dupree l’a joué
avec l’Orchestre du Conservatoire à Nancy puis
le SWR-Sinfonieorchester Kaiserslautern à la
“Alte Oper“ à Francfort. De quoi lancer sa réputation ! Mais la partition du maître russe a été
déterminante une deuxième fois : En juillet
2012, le jeune allemand a impressionné le
public en conduisant ce concerto depuis le
piano, avec le Young Generation Orchestra,
phalange - forcément d'âge moyen jeune - qu’il
avait fondée en 2010. Diriger depuis le piano est
aujourd'hui un défi qui l'effraie (un peu) mais
lui offre (surtout) beaucoup de joie !
Si ce parcours a de quoi époustoufler, le
musicien se garde bien d'avoir “la grosse tête“.
Il ne s'est jamais considéré comme un prodige,
ses parents l'ont élevé comme un enfant normal:
« J'ai joué au foot dans la rue avec les copains,
fait des bêtises comme n'importe quel gamin,
mais je n'ai jamais oublié ma passion pour la
musique. Pour moi, faire de la musique, c'est
rester humain. Et je crois que c'est très important. Il ne faut jamais oublier cette dimension.
La musique a été composée par des personnes,
et elle exprime des sentiments. On ne peut
transmettre que des sentiments que l'on a aussi
ressentis : l'amour, par exemple, mais aussi la
déception, en somme tout ce qui fait la complexité de la vie », a-t-il expliqué à un journaliste allemand.
Seul ou avec Edgar Moreau
Le public de la Riviera vaudoise pourra
applaudir l'artiste dans le monde du récital (7
septembre). Ce sera pour l'auditeur l'occasion
de bien cerner son esthétique intérieure !
Egalement intéressante sera la soirée du 9 septembre, puisque l'interprète s'associera avec
Edgar Moreau. Né à Paris en 1994, ce violoncelliste a déjà un impressionnant palmarès. La
carrière de sa sœur Raphaëlle - elle étudie le
violon à Lausanne - s'avère elle aussi prometteuse ! Une nouvelle famille Capuçon ? En
2013, Edgar Moreau a été nommé “Révélation
soliste instrumental de l'année“ aux Victoires de
la musique classique. Un concert donc offert par
deux débridés ?
Pierre Jaquet
Lundi 7 septembre, Château de Chillon à 19h 30
Schubert - Wanderer Fantasie
Gershwin - An American in Paris (transcription pour
piano seul par Frank Dupree)
Ravel - Miroirs
Mercredi 9 septembre, Chillon à 19h 30
Avec Edgar Moreau, violoncelle
Brahms - Sonate pour violoncelle et piano n° 1
Schumann - Fantasiestücke op. 73
Chostakovitch - Sonate pour violoncelle et piano, op. 40
Frank Dupree
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portrait : edgar moreau
Les exemples
Le violoncelle magique
A vingt et un ans Edgar Moreau a déjà reçu un nombre important de
distinctions et de prix. Nous ne mentionnerons que son prix du jeune soliste au
Concours Rostropovitch de 2009, son 2ème prix au Concours Tchaïkovski de
2011, son prix pour la Révélation Soliste aux Victoires de la musique 2013, et
sa Victoire Soliste Instrumental de 2015.
Il est à l’affiche du Festival de Montreux le
9 septembre 2015 et à celle de la série Les
Grands Interprètes le 22 février 2016 au
Conservatoire de Genève, en tant que chambriste.
Le jeune prodige a commencé le violoncelle à l’âge de quatre ans ! Ce fut SON choix et
non celui de ses parents. Le hasard lui a fait rencontrer une petite fille qui prenait une leçon de
musique dans une boutique d’antiquités, et ce
fut le coup de foudre… pour son violoncelle !
Son père, voyant son enthousiasme, eut la présence d’esprit de demander le numéro du professeur, Carlos Beyris, et c’est ainsi qu’il fit ses
premiers pas sur un instrument de la taille d’un
alto, un violoncelle 1/8ème ! Très tôt le maître
s’est rendu compte des facilités de l’enfant et lui
a consacré pendant cinq ans beaucoup de temps
et d’attention afin qu’il progresse rapidement. A
sept ans, Edgar a décidé de compléter sa formation musicale par l’étude du piano, afin d’aller
le plus loin possible. Après un Bac à quinze ans,
il s’est consacré à la musique, avec le soutien de
ses professeurs et de ses parents, qui n’ont pas
reculé devant les risques que comporte une carrière artistique.
L’instrument
Mais pourquoi cette préférence pour le violoncelle ? Edgar Moreau le considère comme
l’instrument le plus sensuel, qui transmet le plus
d’émotion, et qui se rapproche le plus de la voix
humaine, puisqu’il permet comme elle de
façonner le son. Pour lui, le piano, qu’il apprécie et qui permet harmoniquement beaucoup,
est complémentaire. Depuis 2009 il joue un
David Tecchler de 1711, que son père a acheté
il y a environ dix ans. Cet objet exceptionnel
permet de tout faire, d’aller au-delà des limites ;
c’est une chance, un bonheur que de pouvoir en
disposer. A la question : « Federer a dit il y a
quelques années qu’il s’étonnait parfois luimême ; êtes-vous aussi dans ce cas ? » Edgar
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Lorsque qu’il était enfant, son idole
Rostropovitch, Yoyo Ma et Truls Mork l’ont fait
rêver. Aujourd’hui encore ce sont ses favoris,
mais il écoute beaucoup moins d’enregistrements, car il ne veut pas être influencé, même
inconsciemment. Il essaie d’interpréter d’après
ce qu’il lit dans la partition.
Les partenaires
Edgar Moreau dit aimer rencontrer de nouveaux partenaires. Bien sûr il se produit souvent avec son ami Pierre-Yves Hodique, mais il
a volontiers accepté de jouer pour la première
fois avec le jeune pianiste Frank Dupree, proposé par l’organisation du Festival de Montreux, à
qui Edgar fait une entière confiance.
Le quatuor
Edgar Moreau tient la partie du violoncelle
dans le quatuor présenté par l’agence Caecilia
sous le nom de Quatuor Capuçon. C’est pour
nous l’occasion d’apprendre que le Quatuor
Capuçon n’existe plus ! Le nom de la formation
que vous entendrez le 22 février 2016 au
Conservatoire de Genève est le Bush Project,
d’après le nom du fameux Quatuor Bush à qui
les musiciens ont décidé de rendre hommage en
reprenant leurs programmes pendant quatre ou
cinq ans. Quintettes et sextuors sont également
prévus.
Edgar Moreau © DR
répond que non ! En tout cas pas en ce qui
concerne la prouesse instrumentale, car pour
lui, la technique est naturelle. Mais certains de
ses succès l’ont surpris : il ne s’attendait pas à
obtenir le 2ème prix au Concours Tchaïkovski,
puisque son intention était surtout de passer le
premier tour ! Il a compris après la compétition
qu’à 17 ans, il avait atteint le niveau requis.
Les professeurs
Edgar dit avoir eu de la chance avec eux
aussi. Carlos Beyris lui a transmis son amour de
la musique par un enseignement ludique et l’approche d’un large répertoire. Xavier Gagnepain
lui a apporté l’intellectualisation de la musique,
la réflexion, la compréhension des partitions,
avec pour but d’atteindre plus de profondeur ;
Philippe Muller lui a appris à être vigilant quant
à la justesse, à la qualité sonore, aux détails et
Frans Helmerson lui a montré comment lier
intellectualisation, perfectionnisme et amour de
la musique pour donner plus d’ampleur à son
discours. Une formation qu’ Edgar juge parfaite pour lui.
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Musique contemporaine
Elle tient une belle place dans la carrière
d’Edgar Moreau. Il n’y a selon lui que la bonne
et la mauvaise musique, l’époque importe peu.
Si une œuvre lui plaît, il n’hésite pas et se dit
très disponible à la création.
Le trac
A-t-on encore le trac lorsqu’on dispose de
dons si exceptionnels ? Oui, répond Edgar, tous
les musiciens sont anxieux avant d’entrer en
scène, lui y compris. Ce n’est pas une mauvaise
chose car il faut être dans un état différent. Il est
nécessaire cependant de contrôler le stress, afin
qu’il devienne une énergie positive.
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
MERCREDI 9 SEPTEMBRE, 19h30, CHÂTEAU DE
CHILLON.
Edgar Moreau, violoncelle / Frank Dupree, piano
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de zurich à montreux
Concours Géza Anda
Le Septembre Musical accueille, le 2 septembre à l^Hôtel des Trois-Couronnes,
le lauréat du concours Géza Anda 2015
jouaient tout seuls. Le dernier candidat,
l’Américain Andrew Tyson, a fait sensation. Il
s’est emparé du concerto en prenant de grandes
libertés. Il a proposé ses propres cadences. Ce
qui n’est pas toujours du goût des jurés. Et bien
cela a plu. Le jury, présidé par Jesús LópezCobos, a invité l’Américain et le Brésilien à
continuer le concours. Nous aurions choisi le
Français comme troisième finaliste, le jury a
choisi le Russe.
On se pose souvent la question du bienfondé de cette sorte de manifestation et on a tendance à critiquer les « bêtes à concours ».
Toujours est-il que la participation à un
concours de l’envergure du Concours Géza
Anda fait progresser énormément les candidats,
qui ont la possibilité de jouer avec un orchestre.
Par ailleurs, la fondation du concours organise
des concerts pour les lauréats pendant trois ans.
Le concours a été fondé en 1978, deux ans
après la disparition du célèbre pianiste hongrois,
nos jours. Pour cette raison les œuvres du compositeur autrichien constituent une partie importante du Concours. Les demi-finalistes devaient
interpréter un concerto de Mozart, accompagnés en l’occurrence par le Musikkollegium
Winthertur. À la baguette, Theodor
Guschlbauer.
Un candidat ukrainien a ouvert cette étape
du concours. Son jeu ne nous a pas convaincu.
Il était un peu fébrile, courrait après l’orchestre,
tapait trop fort sur le clavier. Il a interprété ce
Premier Prix du Concours Géza Anda : Andrew
Tyson © Priska Ketterer
Premier Prix du Concours Géza Anda : Andrew
Tyson © Priska Ketterer
Premier Prix du Concours Géza Anda : Andrew
Tyson © Priska Ketterer
par son épouse. Il a lieu tous les trois ans. Cette
année, le comité de sélection a reçu 99 candidatures de 20 pays, 27 jeunes pianistes ont été
invités, dont 8 Russes et 5 Coréens du sud.
Après une première audition, 14 candidats ont
été sélectionnées pour le récital, lors duquel six
jeunes pianistes se sont détachés du lot, comme
par exemple le Français, Jean-Paul Gasparian,
jeune candidat de 19 ans.
concerto de Mozart comme si c’était du
Beethoven. Le candidat suivant, le Brésilien
Ronaldo Rolim, était tout le contraire, calme,
souverain, on respirait l’air léger de Mozart. Le
troisième jeune pianiste, un Hongrois, était très
agile, presque un peu nerveux. Vu son jeu austère, il doit être un bon interprète de la musique
d’aujourd’hui.
Le jeune Français a fait très bonne impression. Son phrasé, très classique, mettait en
valeur l’harmonie de la structure mozartienne.
Suivait le Russe Aleksander Shaikin, un grand
virtuose. On avait l’impression que ses doigts
(Interprété pendant les récitals).
C’est des USA qu’est venue la sensation :
Andrew Tyson, élève de la célèbre Julliard
School, a subjugué l’auditoire avec le 1er
La finale
Aleksander Shaikin s’est hissé à la deuxième place, avec un concerto de Brahms interprété avec virtuosité. Le Brésilien qui avait fait si
bonne impression avec Mozart a raté son interprétation du 2e concerto de Rachmaninov. Il
était souvent en désaccord avec l’orchestre (très
bon, l’Orchestre de la Tonhalle dirigé par KarlHeinz Steffens). Il obtient le 3e prix et le prix de
la meilleure interprétation de Schumann.
50
La demi-finale
Les interprétations de Géza Anda des
concertos de Mozart font référence encore de
a
c
t
u
a
concerto de Chopin. Son jeu, d’une sensibilité à
fleur de peau, est très vivant, il dialogue librement avec l’orchestre. C’est donc une vraie
personnalité qui remporte le Concours, un pianiste que l’on brûle d’impatience de revoir.
Emmanuèle Rüegger
l
i
t
é
f e s t i v a l ss e p t e m b r e
entretien avec danilo pia
European Philharmonic
of Switzerland
Après six années en résidence au Septembre Musical, Montreux-Vevey, le
Royal Philharmonic Orchestra de Londres, cède sa place à un autre orchestre
philharmonique, moins connu, plus jeune et gonflé d’ambition. Son nom,
European Philharmonic of Switzerland, à ne confondre ni avec le Chamber
Orchestra of Europe, ni le European Union Youth Orchestra.
Ainsi en a décidé le directeur artistique du
Septembre Musical, Tobias Richter, qui avait
déjà montré avec l’édition 2014 et son invitation du Youth Orchestra of Bahia qu’un festival
pouvait aussi poursuivre d’autres objectifs que
d’inviter des phalanges prestigieuses, habituées
à faire leur tour de piste et repartir vers d’autres
horizons. Jusqu’à présent l’European
Philharmonic of Switzerland n’existait pas vraiment sur la cartographie musicale suisse.
L’édition 2015 portera cette formation sur les
fonts baptismaux.
e
n
t
r
septembre et 40 le 7 septembre ». Un orchestre
aux couleurs de l’Europe, à caractère international, avec une vingtaine de nationalités différentes, une vingtaine de musiciens suisses mais le
premier violon ne sera pas suisse, ajoute-t-il prudemment sans en dire toutefois plus.
Conscient des difficultés de faire exister et
tourner un orchestre, il souhaite que ce European
Philharmonic of Switzerland soit « un orchestre
de projets ». D’ores et déjà, même s’il en est le
directeur, il dit « compter sur le soutien collégial, l’appui de musiciens auxquels il sait pouvoir faire confiance, qui seront autant de relais
au sein de l’orchestre ». Sa ligne artistique sera
« dans la continuité de celle du Gustav Mahler
Jugendorchester » et le répertoire sera symphonique : Mozart, Beethoven, Mahler, Strauss,
Wagner, mais se dit aussi ouvert aux grands compositeurs de XXe siècle.
Direction
Portrait
A sa tête, un jeune homme bien de sa personne, dont toutes les mères rêveraient comme
gendre, au parcours plutôt atypique. Né dans une
famille où la musique fait partie de l’ADN familial, son grand-père maternel n’étant autre que
Karl Richter, légendaire interprète de JeanSébastien Bach, et son frère, un violoncelliste
aguerri, il suit tout d’abord une formation de violoniste au conservatoire de Bâle et obtient un
diplôme de soliste. Cela lui ouvrira les portes de
cet orchestre fondé par Claudio Abbado, le
Gustav Mahler Jugendorchester, où il acquerra
pendant cinq ans ses expériences de musicien
d’orchestre mais établira en même temps
quelques solides liens d’amitié avec d’autres
musiciens, qui lui seront précieux pour la constitution de ce nouvel ensemble. Il décide ensuite
d’entamer en 2009 une formation à l’Ecole des
Hautes Etudes Internationales de Genève. A cela,
il ajoute un passage de deux ans et demi dans une
agence musicale à Zurich, et s’initie au métier
d’assistant de metteur en scène à Dusseldorf,
Londres et Bâle. Un parcours qui l’aidera dans sa
nouvelle aventure, celle de la création d’un
orchestre, qu’il peaufine depuis des mois.
Lorsque nous l’avons rencontré, il a insisté
sur l’idée à la base du Gustav Mahler
m u s i c a l
John Fiore, dircteur musical de l’orchestre
© Alexander Basta
Jugendorchester, tel que l’avait voulu Claudio
Abbado , « réunir la jeunesse musicale dans un
orchestre de toute l’Europe. Mais il y avait la
limite d’âge de 26 ans, et beaucoup avaient envie
que cette histoire musicale continue, malgré les
difficultés dues au marché très compétitif des
orchestres ». Jusqu’à présent il n’y avait pas de
vraie structure juridique, mais des statuts ont été
élaborés cette année. Ce qui compte, dit-il « c’est
que nous avons joué ensemble pendant les dernières années » et de mettre en avant « l’enthousiasme des musiciens, l’atmosphère d’amitiés qui
règne entre eux et un solide engagement », expliquant que « les musiciens avaient un cachet, que
l’hébergement était pris en charge par les organisateurs mais qu’ils payaient eux-mêmes leur
frais de voyage, l’essentiel étant de pouvoir
jouer ». La plupart d’entre eux ont d’ailleurs des
engagements dans de grandes formations symphoniques, comme les orchestres de la Tonhalle
ou du Bayerische Staatsoper. Danilo Pia parle
d’un orchestre à géométrie variable :
« un pool de 160 musiciens, qui sera de 95 musiciens le 1er septembre, 80 le 3 septembre, 60 le 5
e
t
i
e
Mais alors pourquoi un nouvel orchestre ?
« Diriger des musiciens qui se connaissent et
partagent la passion de la musique est plus facile avec un orchestre de jeunes ». Il croit ferme à
ce concept : « cela permet un autre niveau d’interprétation. Avec un orchestre plus institutionnalisé le programme est plus prévisible qu’avec
un orchestre tel que nous le concevons, et sa
volonté d’en découdre est très stimulante ».
Comme directeur musical à la tête de l’orchestre, le choix , dit-il, s’est porté à l’unanimité sur John Fiore, attaché à l’opéra d’Oslo mais
aussi invité au Métropolitan de New York et qui
auparavant a été une dizaine d’années directeur
musical du Deutsche Oper am Rhein à
Dusseldorf. A l’opéra de Genève, en 2014,
c’est sa direction de Nabucco qui a été très
remarqué et à l’opéra de Zurich en février dernier, son interprétation tout en largeur et épaisseur dans Tristan et Isolde a été très applaudie.
A partir du 28 août commenceront les répétitions pour les quatre concerts comportant des
programmes qui ne donnent pas vraiment dans
la facilité comme Pelléas et Mélisande, le
poème symphonique d’Arnold Schönberg ou
les Variations sur un thème original « Enigma »
d’Edward Elgar. Ce sera aussi l’heure de vérité
pour le European Philharmonic of Switzerland.
Son directeur saura alors si son orchestre a des
chances de rivaliser avec le Gustav Mahler
Jugendorchester. Un modèle qui pour l’instant
n’est pas pour lui déplaire !
Propos recueillis par Régine Kopp
n
51
s e p t e m b r e
m u s i c a l
portrait
Orchestre français
des Jeunes
Fondé en 1982, l'Orchestre Français des Jeunes a été dirigé successivement par
Emmanuel Krivine, Sylvain Cambreling, Marek Janowski, Jesus Lopez Cobos,
Jean-Claude Casadesus, Dennis Russel Davies. David Zinman a pris la relève
cette année et c'est lui qui dirigera le concert du 8 septembre à l'Auditorium
Stravinski.
52
Et si des chefs d'orchestre connus pour leur
talent pédagogique ont été à la tête de cette phalange dont les membres tout naturellement sont
fréquemment renouvelés, l'activité de l'ONJ est
placée sous les meilleurs auspices puisque le
conseil d'administration placé sous la présidence de Hugues Gall compte
parmi ses membres des
responsables d'institutions,
ainsi Dominique Meyer,
directeur de l'Opéra de
Vienne, Laurent Bayle, directeur de la Cité de la Musique,
Anne Blanchard, directrice
artistique du Festival de
Beaune, Didier de Cottignies,
directeur de l'Orchestre de
Paris ou encore Serge Dorny,
directeur de l'Opéra National
de Lyon.
Âgés de 16 à 25 ans, les jeunes musiciens
bénéficient donc pour certains d'entre eux d'une
première expérience pour ainsi dire professionnelle débouchant sur plusieurs concerts, notamment à Montreux, au Festival de Besançon et à
la Philharmonie de Paris. Il existe également
des possibilités d'échanges avec d'autres formations du même genre dans d'autres pays européens, permettant ainsi de créer de nouvelles
options de carrière pour les musiciens. Un de
buts de cette brève formation consiste également à ouvrir des perspectives de réflexions
concernant la pratique musicale, incluant la pratique de la médiation auprès de publics néophytes et donc de manière générale de former aux
nouveaux aspects du métier de musicien. De
même, soucieux de former aux divers aspects de
la musique « savante », les jeunes interprètes
sont également invités à pratiquer en formations
de chambre et à collaborer avec
des musicologues, metteurs en
scène et comédiens dans le but
de les inciter à développer une
approche pédagogique au
contact avec le public. De plus,
depuis 2006 un ensemble
baroque a été créé, dirigé
actuellement par Leonardo
Garcia Alarcon, répondant ainsi
à une forte demande tant de
point de vue des musiciens que
du public pour un genre désormais très apprécié.
Sélection
Frank Fredenrich
On peut imaginer que
certains interprètes sélectionnés peuvent avoir une chance
supplémentaire de se faire
connaître auprès de ces
responsables institutionnels,
d'autant qu'il est probable que
les concerts sont d'autres
opportunités de se faire entendre par des professionnels
pour ces jeunes musiciens
encadrés durant trois semaines au Grand Théâtre de
Provence d'Aix-en-Provence
par une équipe pédagogique
comprenant un « cadre »
expérimenté pour chacun des
instruments de l'orchestre.
MARDI 8 SEPTEMBRE, 19h30,
AUDITORIUM STRAVINSKI
Orchestre Français des Jeunes
David Zinman, direction (photo)
Jean-Frédéric Neuburger, piano
Berlioz - Ouverture : Carnaval
Romain
Beethoven - Symphonie n° 4 en si
bémol majeur op. 60
Brahms - Concerto pour piano et
orchestre n° 2 en si bémol majeur op.
83
David Zinman © Priska Ketterer
a
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u
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s e p t e m b r e
m u s i c a l
ce ». Qu’entendez-vous par là ?
entretien
Jean-Frédéric
Neuburger
C’est le pianiste dont on parle : âgé de seulement 28 ans, Jean-Frédéric
Neuburger est réclamé sur toutes les estrades des concerts et festivals.
Il sera à Meinier pour le Festival Amadeus le 2 septembre, et le 8 septembre
à Montreux pour le Septembre musical. Deux concerts sous l’égide des « trois
B », mais non pas forcément ceux que l’on croit. Entretien.
Il est vrai que dans un concerto, il y a une
confrontation, presque un combat, entre la
masse orchestrale et le soliste. Mais le compositeur peut jouer sur deux tableaux au moment
d’écrire son concerto : soit en opposition des
deux parties, avec des réponses alternées,
comme le Concerto pour la main gauche de
Ravel, commencé par un grand tutti, une cadence, une autre cadence etc., où l’aspect effectivement corrida est très présent ; soit alors en
mélange, en fusion, entre les groupes et le soliste, comme le concerto pour piano de
Schoenberg, le concerto de Schumann…
Et qu’en est-il dans le
Deuxième Concerto de Brahms, que
vous donnerez ?...
Vous êtes Parisien, mais avez
quelque peu vécu à Genève. Pouvezvous nous en dire plus ?
On serait plutôt dans la fusion. L’aspect
corrida comme je disais, l’opposition
presque théâtrale, par grands blocs, est
estompée. Sauf en de rares endroits. On
penserait presque à une symphonie
avec piano obligé. Dont témoigne aussi
ses quatre mouvements ; et non pas
trois comme dans l’héritage baroque
d’où vient la forme du concerto, dont
Vivaldi reste le modèle. Il y a ainsi une
grande importance du dialogue avec
l’orchestre. Avec de belles parties
orchestrales, comme la partie de violoncelle qui fait le solo du thème du
troisième mouvement.
Après mes études à Paris, au
Conservatoire, j’ai décidé d’aller étudier la direction d’orchestre. Et je me
suis orienté assez rapidement vers la
classe de Laurent Gay, excellent professeur et chef d’orchestre, qui enseigne à
Genève et dont j’avais entendu dire le
plus grand bien. J’ai ainsi passé trois
ans entre Paris et Genève. Ce qui m’a
permis de découvrir la Haute École de
Musique, où par exemple j’ai rencontré
Michael Jarrell, avec qui j’ai pris également des cours de composition. C’était
un peu mes années genevoises, qui
viennent juste de se terminer. Un
ensemble de circonstances m’avait
poussé à Genève, dont l’idée de découvrir de nouveaux horizons musicaux
hors de Paris, et aussi, accessoirement,
le fait d’avoir des amis dans cette ville.
Venons-en à vos deux
concerts, où vous retrouvez donc
Genève et ses environs. Pouvez-vous tout
d’abord évoquer le concert le plus proche,
chronologiquement, celui dans le cadre du
Festival Amadeus ?
Les œuvres entourent l’œuvre finale et phare de
ce concert, qui est le trio de Brahms pour violoncelle, clarinette et piano. Une de ses dernières œuvres. On sait que Brahms a rencontré la
clarinette assez tardivement, et que c’était devenu une sorte de passion ; puisqu’il avait écrit ce
trio en même temps que le quintette et les deux
sonates. Ensuite, avec François Salque, violoncelle, et Raphaël Sévère, clarinette, nous avons
décidé des pièces de la première partie. La première chose à laquelle nous avions pensé, c’est
les quatre pièces de Berg pour clarinette et
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Jean-Frédéric Neuburger © Carole Bellaiche
piano ; parce qu’il y a une relation évidente
entre le romantisme tardif de Brahms et l’expressionnisme de ces quatre pages des débuts de
Berg. Des bijoux, dans la pureté de la forme, la
concision, qui annoncent Webern. Nous voulions aussi un duo entre violoncelle et piano, et
nous sommes tournés vers la deuxième Sonate
de Beethoven. Quant à la Sonate pour clarinette et piano de Bernstein, que je n’avais jamais
jouée, c’est Raphaël qui me l’a proposé. Et j’ai
sauté dessus, sachant en outre que le langage de
Bernstein plaît toujours au public.
Après ce concert de musique de
chambre, vous vous lancez à Montreux dans
un autre exercice, celui du concerto. Vous
dites aimer « l’aspect corrida de cet exerci-
e
t
i
e
Avec cette œuvre de caractère
symphonique, nous nous trouvons
cette fois au sein d’un concert symphonique. En compagnie de deux
autres ouvrages, qui sont l’ouverture
du Carnaval romain de Berlioz et la
Quatrième de Beethoven. En dehors
de la référence à trois B, que pensezvous de cette association ?
Du bien, évidemment. J’approuve ce choix, qui
ne m’incombe pas bien sûr, mais à David
Zinman. Entre ce Beethoven et ce Brahms, il y
a aussi un autre point commun, qui est la tonalité principale, Si bémol majeur. Et donc une
atmosphère générale.
Propos recueillis par Pierre-René Serna
MERCREDI 2 SEPTEMBRE, 20h30, FESTIVAL
AMADEUS. Raphaël Sévère clarinette, Jean-Frédéric
Neuburger piano, François Salque violoncelle
MARDI 8 SEPTEMBRE, 19h30, AUDITORIUM
STRAVINSKI
n
53
s e p t e m b r e
m u s i c a l
portrait
Ivo Pogorelich
Six ans après son mémorable récital de 2009, le pianiste Ivo Pogorelich sera de
retour au Septembre Musical pour la soirée de clôture du festival, le jeudi 10
septembre à Vevey, à la Salle del Castillo. Son programme comporte des œuvres
de Liszt, de Schumann, de Stravinsky et de Brahms.
54
D’origine croate, né à Belgrade en 1958,
Ivo Pogorelich reçoit à 7 ans ses premières
leçons de piano. A 12 ans, il suit à Moscou les
cours de l’Ecole spéciale de musique, puis ceux
du Conservatoire Tchaïkovski. A 17 ans, il
devient le disciple de la pianiste géorgienne
Aliza Kezeradze, qui avait été l’élève
d’Alexandre Siloti, lui-même élève de Franz
Liszt. Il l’épouse cinq ans plus tard et elle restera son mentor jusqu’à sa mort prématurée en
1996. Premier prix de deux concours, à Terni
(Italie) et à Montréal, Ivo Pogorelich est éliminé en 1980 au second tour du Concours Chopin
de Varsovie, ce qui provoque sur le champ la
démission de Martha Argerich, membre du jury,
qui s’exclame : « C’est un génie ». Rendu célèbre du jour au lendemain par cet esclandre, Pogorelich donne l’année suivante
son premier récital au Carnegie Hall, ce
qui fait dire au New York Times qu’il
joue « avec un tel sentiment, une telle
expression qu’il est à lui seul tout un
orchestre, comme s’il avait 200 ans d’avance sur notre temps. » Le jeune pianiste signe avec la Deutsche
Gramophon un contrat d’exclusivité et
réalise une série d’enregistrements qui
viennent d’être réédités dans un gros
coffret de 14 CD. Quelques-uns ont
valeur mythique. Ses gravures de
Sonates de Scarlatti, de Gaspard de la
Nuit de Ravel, du Concerto No 1 de
Tchaïkovski avec Abbado, de Chopin,
de Liszt, sont des références indiscutables. Sur scène, adulé par une partie du
public et de la critique, Pogorelich, qui
conçoit le piano à la fois comme une
voix humaine et comme un orchestre
aux multiples couleurs, sait mieux que
personne capter l’attention de l’auditeur par la précision de son jeu, la
richesse de sa sonorité et la puissance
expressive d’interprétations qui s’ap-
a
puient toujours sur une réflexion approfondie
sur le sens même de l’oeuvre. Il en résulte des
exécutions très personnelles et différenciées,
fascinantes pour les uns, déroutantes pour d’autres.
La rupture et le retour
A la suite du décès de son épouse en 1996,
Ivo Pogorelich renonce presque complètement à
se produire en public et n’enregistre plus de
disque. « Je devais me réinventer », confiera-til au quotidien allemand « Die Welt » une dizaine d’années plus tard, au sortir d’un long silence, après avoir repensé, dira-t-il, toute sa technique. Mais les interprétations du pianiste croate restent sujettes à controverse, même à
Montreux, où son récital au Septembre Musical
de 2009 suscita aussi bien enthousiasme que
réprobation, alors même qu’il était consacré à
des œuvres de Chopin, de Liszt et de Ravel
emblématiques de son génie. Reste que c’est un
privilège de pouvoir entendre à nouveau cette
année cet artiste si peu conventionnel, dont les
concerts demeurent rares : six seulement en tout
et pour tout cet été, de juin à fin août.
Il faut dire que Pogorelich, qui se dit éternel insatisfait, est un artiste d’une grande sévérité envers lui-même, qui travaille en profondeur, cherche toujours à traduire ce que le compositeur avait en tête quand il composait, et ne
prépare pour cela qu’un programme par année.
Celui de 2015 - qu’il présentera donc à Vevey comprend Après une lecture de Dante de Liszt,
la Fantaisie op. 17 de Schumann, Petrouchka
de Stravinsky et les Variations sur un thème de
Paganini de Brahms. A propose de ces
Variations, Pogorelich déclarait dans un entretien accordé à Eric Dahan, journaliste à
« Libération » (le 11.12. 2013) que selon lui « le
thème avait été écrit de toute évidence sur une
guitare, dont Paganini se servait en privé, et non
sur un violon, ce qui implique qu’il doit être
joué avec un caractère intime » Si les œuvres
jouées à Vevey donnent lieu à des traductions
s’écartant résolument des sentiers battus, sous
les doigts de ce musicien hors norme,
cela n’aura rien de surprenant.
Relevons enfin le souci que
Pogorelich a toujours eu de venir en
aide aux jeunes musiciens. En 1986
déjà, il créait en Croatie une fondation
à leur intention. Un festival en
Allemagne (de 1987 à 1997), un
concours en Californie, une autre fondation à Sarajevo, poursuivaient le
même but.. Nommé ambassadeur de
l’UNESCO en 1988, Pogorelich offre
aussi à Lugano, où il s’est établi, un
concert bisannuel pour promouvoir de
jeunes talents.
Yves Allaz
JEUDI 10 SEPTEMBRE, 19h30,
SALLE DEL CASTILLO
Liszt - Après une lecture du Dante : Fantasia
quasi sonata
Schumann - Fantaisie en do majeur op. 17
Stravinski - Petrouchka
Brahms - Variations sur un thème de Paganini
op. 35
Ivo Pogorelich © Bernard Martinez
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SAISON1516
OPÉRA
GRAND THÉÂTRE
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DU GRAND THÉÂTRE
ORCHESTRE
DE LA SUISSE ROMANDE
11 > 21.0
21.09.2015
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MI EN SCÈNE
MISE
DAVID POUNTNEY
WWW.GENEVEOPERA.CH
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22 5050
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festival de bellerive / genève
20ème édition
Dans le cadre idyllique de la Ferme de Saint-Maurice
surplombant le lac, avec les champs en premier plan et
le Jura en toile de fond, le traditionnel rendez-vous
musical donné par Lesley de Senger et son mari
Gabor Takacs-Nagy accueille un public fidèle et averti.
Ce sera du 6 au 16 juillet.
A tout seigneur tout honneur, dans ce qui ressemble de plus en plus à
une tradition bien établie, le festival s’ouvre et se clôt par des concerts
symphoniques placés sous la direction de Gábor Takács-Nagy. En ouverture, l’Orchestre de Chambre de Genève sera rejoint par le violoncelliste
István Várdai, tandis que le concert de clôture permettra d’entendre le
Verbier Festival Chamber Orchestra avec le pianiste Zoltán Fejérvári.
Poursuivant son exploration des Symphonies de Beethoven commencée
l’année dernière avec les n°2 et n°3 “Eroica”, Gábor Takács-Nagy a
inscrit au programme de cette année les n°4 et n°6 “Pastorale”.
Dans l’intervalle, au gré de concerts de musique de chambre, les
mélomanes voyageront de Vienne à la Russie, ou de Leipzig à l’Amérique
latine, en compagnie de chambristes confirmés tels le violoniste Kirill
Troussov, le violoncelliste István Várdai déjà nommé, ou le pianiste Julien
Quentin, tous des habitués des lieux. L’occasion d’entendre des formations comme le Trio Dali, le Signum Saxophon Quartett ou le Quatuor
Aviv. Une occasion à ne pas manquer si vous n’êtes pas partis en vacances, d’autant que les prix pratiqués sont plus que raisonnables pour un festival de ce niveau.
Alexandra Conunova
- Lundi 13 juillet à 20h30 : KIRILL TROUSSOV, violon, ISTVáN VáRDAI, violoncelle, JULIEN QUENTIN, piano, SIGNUM SAXOPHON QUARTETT
RACHMANINOV Vocalise pour violoncelle et piano op. 34 N°14
RIMSKY-KORSAKOV Shéhérazade op. 35
TCHAIKOVSKY Trio pour piano, violon et violoncelle op. 50
- Mercredi 15 juillet à 20h30 : QUATUOR AVIV, SHANI DILUKA, piano
LISZT Sonnet de Petrarque 104 Rhapsodie espagnole
BRAHMS Quatuor à cordes op. 51 N°1
SCHUMANN Quintette pour piano et cordes op. 44
- Jeudi 16 juillet à 20h30 : VERBIER FESTIVAL CHAMBER ORCHESTRA,
GáBOR TAKáCS-NAGY, direction, ZOLTáN FEJÉRVáRI, piano
HAYDN Symphonie N°94, dite “Surprise”
BARTÓK Concerto pour piano N°3
BEETHOVEN Symphonie N°6, dite “Pastorale”
Christian Bernard
Renseignements: +41 76 308 03 99
www.bellerive-festival.ch
Location: [email protected]
Programme
- Lundi 6 juillet à 20h30 : L’ORCHESTRE DE CHAMBRE DE GENèVE
GáBOR TAKáCS-NAGY, direction. ISTVáN VáRDAI, violoncelle
ST-SAËNS Concerto pour violoncelle op. 33
PROKOFIEV Symphonie Classique
BEETHOVEN Symphonie N°4 op. 60
- Mercredi 8 juillet à 20h30 : ALEXANDRA CONUNOVA, violon, KIRILL
TROUSSOV, violon, BLYTHE TEH ENGSTROEM, alto, ISTVáN VáRDAI, violoncelle, ZSOLT FEJÉRVáRI, contrebasse, FINGHIN COLLINS, piano
MAHLER Mouvement de quatuor avec piano
SCHUBERT Quintette pour piano et cordes “la Truite” op. 114
BRAHMS Quintette pour piano et cordes op. 34
- Vendredi 10 juillet à 20h30 : TRIO DALI, ALEXANDRA CONUNOVA, violon, BLYTHE TEH ENGSTROEM, alto, JULIEN BLISS, clarinette
SCHUMANN Trio pour piano et cordes N°1 op. 63
MENDELSSOHN Trio pour piano et cordes N°2 op. 66
MOZART Quintette pour clarinette et cordes KV 581
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Finghin Collins © Colm Hogan
Concerts en matinée
- Dimanche 12 juillet à 11h30 : MICHEL TIRABOSCO, flûte de pan, ISABELLE
MEYER, violon, BALáZS FULEI, piano, ZSOLT FEJÉRVáRI, contrebasse,
MARTYNAS LEVICKIS, accordéon, SIGNUM SAXOPHON QUARTETT
Oeuvres de PIAZZOLA, PEDRO ITURRALDE, JOAQUIN NIN,
GORKA HERMOSA
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57
Chine, un opéra pour enfants d'Isabelle
Aboulker (29 août, 16h30).
les « variations musicales de tannay »
Concerts au château
Grands noms
Cette année encore à l'été finissant, le château de Tannay offrira le cadre
champêtre de son parc au plus classique des festivals des bords du Léman.
Un rendez-vous incontournable pour tous ceux qui recherchent la qualité,
le raffinement, en un mot le meilleur de la musique.
Retour dans la cour des grands avec le violoniste Renaud Capuçon, un habitué de la manifestation qui, avec le pianiste Jérôme Ducros,
proposera un programme de Mozart à Korngold
(23 août, 17h). La jeune pianiste virtuose Laure
Favre-Khan accompagnée par la voix de
Ce festival n'a que cinq ans mais laisse
augurer une ascension royale. Dès sa première
édition en août 2011, il affichait déjà sa volonté
d'offrir le meilleur de la musique avec des musiciens de haut vol comme le pianiste Alexandre
Tharaud. On l'aura compris les « Variations
Musicales de Tannay » sont en train de devenir
l'un des maillons phares du paysage musical
estival romand.
Prestige
Pour sa 5e édition, le festival qui se déroulera du 22 au 30 août 2015, a invité des artistes
prestigieux tels que Renaud Capuçon, Boris
Berezovsky, Anne Gastinel et Laure FavreKhan. C'est néanmoins la jeune violoncelliste
Camille Thomas, révélation soliste instrumentale aux Victoires de la Musique en 2014 qui,
avec l'Orchestre du festival constitué de musiciens de l'OSR, ouvrira les festivités sous la
direction de Jonathan Haskell (11 août, 20h).
Camille Thomas © Aline Fournier
a
Renaud Capuçon. Photo Marc Ribes © FLC- ADAGP
Sous la tente du festival dressée sur la pelouse
du parc, les concerts ont lieu par tous
les temps et attirent mélomanes avertis,
auditeurs néophytes, public curieux
arrivant avec les enfants. Tous viennent
pour écouter avec la même gourmandise des artistes de renommée internationale ou de jeunes talents promis pour la
plupart à une grande carrière comme la
jeune violoniste Alexandra Conunova,
lauréate de nombreux concours internationaux et premier prix au Concours
International
Joseph
Joachim
Hannover en 2012. Elle se produira
avec la Camerata Bern dans un
Concerto pour violon de Mendelssohn
(28 août, 20h). Les jeunes sont
d'ailleurs l'une des priorités du festival
qui propose l'entrée gratuite à tous les
concerts aux enfants jusqu'à 16 ans et
un concert qui leur est particulièrement
destiné. Cet été, l'Ensemble Intermezzo
et l'artiste Joan Mompart vont faire le
bonheur des enfants et de leur parents
avec Marco Polo et la Princesse de
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Charles Berling, offrira quant à elle, un portrait
de Chopin (27 aout, 21h). Avant que le festival
ne s'achève avec la talentueuse violoncelliste
Anne Gastinel et l'Orchestre des Pays de Savoie
dirigé par Nicolas Chalvin (30 août, 17h), le
pianiste Boris Berezovsky s'annonce avec
quelques pièces choisies de Grieg, Scarlatti et
Stravinsky (29 août, 20h).
Si vous recherchez le meilleur de la
musique classique, les lieux d'exception, les
artistes de haut niveau, une ambiance raffinée et
conviviale, des tarifs abordables, le festival Les
Variations Musicales de Tannay est fait pour
vous.
Kathereen Abhervé
Variations Musicales de Tannay
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Réservation : www.ticketcorner.ch et aux points de vente
ticketcorner ou par téléphone au 0900 800 800
l
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f e s t i v a l s
entretien
François-Xavier
Poizat
Le pianiste franco-suisse François-Xavier Poizat, Prix spécial du jury au
Concours Tchaikovsky 2011, dirige depuis sa création en 2010 le Festival
Puplinge Classique. Il présente l’édition 2015 qui se déroule
du 18 juillet au 22 août.
Quels aspects du programme aimeriez-vous mettre en évidence ?
Le 18 juillet, lors du concert d’ouverture, Luc
Baghdassarian, chef bien connu à Genève,
dirigera Le Carnaval des Animaux, une œuvre
pleine d’humour. C’est donc à un humoriste très
apprécié des auditeurs de la Radio romande,
Thierry Meury, que j’ai fait appel pour être le
récitant. Le 8 août, le Festival invite pour la troisième année consécutive l’Orchestre de chambre national d’Arménie qui s’arrêtera à Puplinge dans le cadre d’une
tournée européenne. Le 15 août, la
grande pianiste russe Anna
Vinnitskaïa, dont le triomphe au
Concours Reine-Elizabeth 2007 a
marqué le début d’une carrière lui
ouvrant les portes des salles les plus
prestigieuses, donnera un récital qui
sera à n’en pas douter un grand
moment. Le 20 août, nous aurons le
plaisir d’accueillir à nouveau l’Aviv
Quartet qui avait donné en 2012 ce
que je considère avoir été le meilleur
concert de cette édition du festival. Ils
donneront un concert Brahms avec
Damien Bachmann pour le Quintette
pour clarinette en si mineur, et j’aurai
le plaisir d’être à leurs côtés pour le
Quintette pour piano en fa mineur. Le concert
de clôture le 22 août verra la venue pour la cinquième année consécutive de l’Orchestre des
Jeunes de la Suisse Romande dirigé par le
Quatuor Sine Nomine, avec en soliste le prodigieux Teddi Papavrami. Un autre grand moment
en perspective!
Pourriez-vous nous retracer l’évolution de Puplinge Classique, à l’évidence le
jeune festival qui monte ?
En 2010, lorsque le festival a été créé sous mon
impulsion, il a proposé quatre concerts, l’occa-
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sion de se faire connaître pour de jeunes musiciens dont certains achevaient leurs études. Dès
la deuxième édition la collaboration du Quatuor
Sine Nomine nous a été assurée. Le développement a été effectivement rapide puisque dès
2012 nous programmons 12 concerts, à l’exception de 2014 qui a vu 17 concerts dont un au
Victoria Hall, pour fêter notre cinquième anniversaire. Notre budget a ainsi doublé chaque
année jusqu’en 2012 et depuis il augmente
François-Xavier Poizat © F.X. Poizat
annuellement d’une fois et demi. Nous pouvons
ainsi proposer davantage de concerts-événements avec de grands interprètes. Une autre
évolution est de faire une large place aux quatuors. Sinon nous restons fidèles à la formule
d’un festival sur cinq semaines avec deux ou
trois concerts par semaine, la moitié des
concerts étant gratuits.
Le pianiste que vous êtes a bien sûr
des projets…
pé en 2011. Je présenterai deux récitals et trois
concertos de Mozart, Tchaikovsky et Prokoviev.
Après ce sera deux concerts à l’Eglise SaintGermain à Genève avec la violoncelliste
Nadège Rochat, les 5 et 6 juillet, puis le 1er
Concerto de Chopin à Norderney en Allemagne
le 22 juillet, et un récital à Foshan en Chine le
30 juillet. Sans oublier les concerts à Puplinge,
avec Vladyslava Luchenko, violon et Beatriz
Blanco, violoncelle, le 25 juillet, le pianiste de
jazz Moncef Genoud le 18 août et l’Aviv
Quartet le 20 août. Sinon mon troisième CD
vient de sortir chez Piano Classics, consacré à
des œuvres de Ginastera. On sait que le compositeur argentin est décédé à Genève en 1983, et
le fait d’avoir eu le privilège de connaître sa
veuve m’a encouragé à enregistrer une musique
encore en bonne partie à découvrir.
Propos recueillis par Christian Bernard
u Samedi 18 juillet : Sébastian Jacot, flûte. Florence von
Burg, violon. Thierry Meury, récitant. Luc
Baghdassarian, direction. Orchestre des Variations
Symphoniques (JS Bach, Hindemith, Saint-Saëns)
u Mardi 21 juillet : Valentina Gheorghiu piano. Dinu
Mihailescu, piano. Pascal Chenu, chant et
piano. Niccolo Vacchi, saxophone (Brahms,
Enesco, Rachmaninov)
u Samedi 25 juillet : Vladyslava Luchenko,
violon. Beatriz Blanco, violoncelle.
François-Xavier
Poizat,
piano
(Chostakovitch, Stravinski, Prokofiev,
Rachmaninov)
u Mardi 28 juillet : Sini Simonen, violon.
Alexandre Foster, violoncelle. Jun
Bouterey-Ishido, piano (Beethoven, Sandor
Veress, Ravel)
u Dimanche 2 août : Svetlana Makarova,
violon. Estelle Revaz, violoncelle. Irina
Chkourindina, piano (Villa-Lobos,
Ginastera, Dvorak, Piazzolla)
u Mardi 4 août : Emilie Weibel, violon.
Darryl Bachmann, alto. Gabriel Esteban,
violoncelle. Margarita Ilieva, piano
u Samedi 8 août : Vahan Mardirossian,
direction. National Chamber Orchestra of
Armenia
u Mardi 11 août : Tamara Smirnova,
soprano. Iryna Gintova, violon. Anna Fedorova, piano
(Beethoven, Chopin, Chansons populaires ukrainiennes,
C. Franck)
u Samedi 15 août : Anna Vinnitskaïa, piano (JS
Bach/Brahms, Brahms, Chostakovitch, Prokofiev)
u Mardi 18 août : Moncef Genoud, piano et batterie.
François-Xavier Poizat, piano
u Jeudi 20 août : Aviv Quartet. Damien Bachmann, clarinette. François-Xavier Poizat, piano (Haydn, Brahms)
u Samedi 22 août : Tedi Papavrami, violon. Quatuor
Sine Nomine, direction. Orchestre des Jeunes de la Suisse
Romande (JS Bach, Honegger)
Oui, je participe à nouveau au Concours
Tchaikovsky de Moscou auquel j’ai déjà partici-
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entretien avec martin engstroem, directeur
Grandir
avec les artistes...
Le Festival de Verbier a atteint l'âge adulte après avoir célébré avec
panache ses vingt années d'existence il y a deux ans. En quelques éditions,
la manifestation a acquis une réputation qui dépasse largement les
frontières de la Suisse et fait souvent la 'une' des rubriques musicales dans
les revues spécialisées ou lors d'émissions de télévision consacrées à la
musique classique. De plus, ses productions sont régulièrement
programmées sur les écrans publics ou privés quand elles ne sont pas tout
simplement rendues accessibles gratuitement en streaming sur divers sites.
L'occasion semblait donc idéale de poser à son directeur et fondateur
quelques questions sur l'évolution de ce festival hors norme.
60
La particularité de la manifestation valaisanne réside dans le volet pédagogique de ses
programmes. Au fil des éditions passées, des
centaines d'étudiants se sont en effet vus offrir
la possibilité de se former dans le cadre de
stages intensifs qui se déroulent pendant les dixsept jours de ce rendez-vous musical alpestre.
En parallèle, les musiciens en formation sont
invités à venir se mettre gratuitement à l'écoute
des plus grandes vedettes du moment. Notre
première question porte précisément sur
ce volet des plus originaux qui constitue le
socle artistique du Verbier Festival.
départ un rendez-vous, une mise en commun de
talents destinés à susciter la réflexion, favoriser
le perfectionnement personnel et inviter à une
confrontation stimulante de conceptions artistiques et de savoir-faire techniques divers.
Quels sont les possibilités offertes ici
aux jeunes talents de demain ?
Il y a d'abord les deux orchestres constitués (le
Verbier Festival Orchestra et le Verbier Festival
Verbier s'est fait une spécialité
de donner aux jeunes musiciens l'occasion de se perfectionner dans leur art
tout en côtoyant les plus grands interprètes actuels de la musique classique.
Comment procédez vous à la sélection
des quelques élus invités à venir se former en Valais ?
Martin Engstroem : Dès le départ, il m'a
semblé nécessaire de faire quelque chose
pour la jeune génération de musiciens
classiques. La pratique de la musique, on
le sait, est un art exigeant qui nécessite un
long investissement en temps et en argent.
Or, pendant sa période de formation, le
musicien se sent souvent seul et, hormis
les cours qu'il suit dans un conservatoire
ou avec un maître particulier, il a parfois
l'impression de livrer un combat inégal
contre un monde dont les lois inflexibles
le dépassent. Verbier a donc été dès le
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Chamber Orchestra) qui proposent chacun une
série de programmes complets sur la grande
scène en plus de divers projets musicaux donnés
dans des cadres plus intimistes. L'accès des
musiciens à ces formations se fait sur concours
où les exigences sont très élevées. Ainsi, plus de
1200 jeunes artistes ont participé aux auditions
pour venir à Verbier et seuls quelques-uns ont
été sélectionnés. Afin de donner un maximum
de chances aux nouveaux venus, nous renouvelons le tiers des effectifs de l'orchestre chaque
année, soit entre trente-cinq et quarante musiciens.
Et il y a encore la formation réservée
aux très jeunes talents ?
En effet, nous constituons pour chaque édition
du festival des académies consacrées aux divers
instruments de l'orchestre auxquelles sont invités à participer des artistes encore trop jeunes
pour se produire dans le cadre d'une formation
qui part ensuite en tournée. Huit jeunes élèves
sont ainsi appelés à venir à Verbier pour se perfectionner dans la pratique de leur art dans
chaque catégorie d'instrument présent dans un
orchestre symphonique. En plus des cours dont
ils bénéficient et des possibilités de se produire
sur scène qui leur sont offertes, ils peuvent
assister gratuitement à toutes les manifestations
au programme et emmagasiner une foule d'impressions qui seront utiles à leur formation future. Pour nous, le choix n'est pas toujours
facile: pensez, par exemple, que non moins
de deux-cent-cinquante pianistes avaient
souhaité venir ici cette année, et nous n'en
avons finalement conservé que huit!...
Nous avons pourtant la satisfaction de voir
que les résultats ne se sont pas faits
attendre, si vous pensez qu'un Daniel
Harding ou un Yannick Nezet-Seguin, par
exemple, sont venus un été à Verbier pendant leur adolescence!...
Où classeriez-vous le Festival de
Verbier dans la longue liste de manifestations qui mêlent le pédagogique et
l'artistique ?
Parmi les meilleurs, et je le dis sans fausse
coquetterie... De fait, les journalistes de la
presse spécialisée nous octroient souvent
la première place, avent les festivals
d'Aspen, de Tanglewood ou du SchleswigHolstein. Mais l'important n'est bien sûr
pas dans le classement, forcément toujours
subjectif, du niveau de qualité de tels rendez-vous musicaux de formation. Il nous
Martin T:son Engstroem © Fred Hatt
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importe avant tout de savoir que les jeunes artistes que nous invitons se sentent
ici à leur aise et progressent dans la pratique de leur instrument. Et il ne faut
pas oublier que nous n'en restons pas au
pur projet musical de ces étudiants.
Dans la mesure du possible, nous
essayons de leur trouver des bourses
qui leur permettent ensuite de continuer
dans la voie qu'ils se sont tracée ou de
leur procurer l'accès à des instruments
de bonne qualité, condition nécessaire
à un vrai développement artistique. En
outre, lorsque le talent d'un participant
nous paraît vraiment prometteur, nous
allons jusqu'à lui chercher un agent qui
soit capable de favoriser son intégration
dans les circuits assez fermés de la pratique musicale de haut niveau.
Pour en venir à l'aspect purement artistique du festival :
Comment concevez-vous vos programmes ? L'édition 2015 se caractérise par un nombre impressionnant
de concerts donnés sur dix-sept jours
et, à la vue de la liste des artistes invités lors des précédentes éditions, il
semble que vous ayez carte blanche pour
faire monter les plus grands interprètes du
moment à Verbier ...
La programmation de notre festival ne se fait
pas selon un plan clairement défini. Je ne cherche par exemple pas à donner un thème précis
aux divers concerts mis à l'affiche (comme cela
se fait par exemple à Lucerne ou Gstaad qui
misent cette année sur l'humour en musique).
J'assume la totale subjectivité de mes choix et
admets volontiers que je pourrais inviter
Murray Perahia au lieu d'Evgeny Kissin ou
Cecilia Bartoli au lieu d'Angela Gheorghiu! A
vrai dire, je me laisse guider par mes coups de
cœur et j'aime donner aux artistes qui me fascinent la possibilité de venir présenter au fil des
ans les différentes facettes de leur art. Prenez le
baryton-basse allemand Thomas Quasthoff. Il
s'est bien sûr produit chez nous en tant que
chanteur, d'abord. Et lorsqu'il a dû renoncer à se
produire sur scène, je n'ai pas voulu me passer
de ses services mais ai tenu à l'accompagner
dans les nouvelles orientations de sa carrière,
C'est ainsi qu'il a été invité à offrir au public une
soirée de mélodrames et qu'il a également
donné des cours d'interprétation; cette année,
nous lui offrons même la possibilité de diriger
pour la première fois un orchestre et des
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Pour rester sérieux : il importe de
varier les plaisirs au maximum de
façon à susciter l'intérêt, voire la surprise à chaque occasion. En outre,
Verbier est et veut rester un lieu
accueillant, où toutes les portes sont
ouvertes. Celui qui le désire peut
vivre des expériences musicales du
matin au soir. Ce qui contribue à rendre unique l'expérience d'un concert à
Verbier c'est la proximité des exécutants avec leur public et la présence
systématique de musiciens en salle
venus écouter leurs collègues et partager leurs coups de cœur avec les
autres auditeurs. Verbier, c'est d'abord
un festival destiné à un public curieux
qui vient non pour entendre ce qu'il
connaît déjà, mais pour découvrir ce
qui fondera peut-être l'intensité de ses
émotions artistiques futures!
Votre festival a atteint l'âge
adulte récemment. Quelles sont les
perspectives d'avenir auxquelles
vous travaillez, - s'il y en a ?
En ouverture le 17 juillet : Joye DiDonato
choeurs dans une grande passion de Bach. Le
but n'est donc pas seulement pour moi d'aligner
les grands noms pour rendre mon affiche aussi
alléchante que possible; il s'agit plutôt de grandir avec les artistes en qui j'ai confiance et de les
accompagner dans la découverte de nouveaux
territoires artistiques.
Pourtant, vous devez aussi songer à la
mission pédagogique des orchestres formés
pour la circonstance.
Cela va de soi. Il est vital d'éviter une spécialisation à outrance dans le choix des répertoires et
de veiller à faire alterner les partitions techniquement difficiles et celles qui nécessitent un
travail de mise au point plus léger. Elektra de
Strauss ou la Symphonie Résurrection de
Mahler sont des sommets ardus à conquérir
pour de jeunes musiciens et il convient de les
distribuer avec parcimonie dans un programme
aussi dense qui aligne autant de concerts sur si
peu de jours.
Il me semble vital de renforcer encore l'aspect pédagogique du festival en
travaillant à l'élargissement constant des académies réservées aux jeunes musiciens. Mais je ne
puis cacher le fait que les temps sont devenus
plus durs pour nous comme pour toutes les
institutions musicales du monde au vu des problèmes financiers toujours plus aigus qui se
posent à nous sur un mode foncièrement agressif. Dans les premières éditions du festival, j'ai
eu par exemple plaisir à programmer des rencontres inédites entre les musiciens et des
acteurs de la trempe d'une Vanessa Redgrave,
d'un Jeremy Irons, d'une Irène Pappas ou encore de Juliette Binoche. Je me souviens notamment d'une Médée sur un pâturage de la Croixde Cœur ou d'une Electre jouée en pleine forêt à
la lueur des torches. Maintenant je dois être plus
prudent pour éviter de mettre en péril l'équilibre du budget. Je m'accommode certes sans trop
de peine de cette situation mais regrette tout de
même ce temps où l'expérimentation n'était pas
systématiquement freinée par les contraintes
financières du moment....
Propos recueillis par
Eric Pousaz
Et puis, il y a le public!...
Bien évidemment. Beaucoup de gens montent à
Verbier pour toute la période du festival et je ne
peux concevoir de leur imposer une intégrale
des œuvres de Bruckner sur dix-sept jours!...
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f e s t i v a l s
dirigera le concert de clôture avec un très attendu Château de Barbe–Bleue de Bartok. Retour
également des grands chefs Zubin Metha et
Valéry Gergiev.
festival de verbier 2015
Une valeur sûre !
Le Festival de Verbier a 22 ans cette année et a depuis longtemps atteint sa
vitesse de croisière. Si l’idée d’un festival de musique à la montagne était
nouvelle en 1994, ce n’est plus guère le cas aujourd’hui et nombre de
stations s’y mettent avec plus ou moins de bonheur.
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Il fallait à cette époque une sacrée dose de
courage et de culot à Martin T:son Engstroem
pour lancer une manifestation de cette ampleur
dans un endroit certes magnifique, mais culturellement désert. En plaçant immédiatement la
barre très haut il a fait tout juste, malgré les
risques financiers alors encourus. Aujourd’hui
encore les artistes acceptent de venir à Verbier
avec des cachets plus bas qu’ailleurs. Et si
Verbier fonctionne toujours, c’est que l’idée de
départ, qui consiste à faire harmonieusement
cohabiter des master class avec de jeunes musiciens en devenir, des récitals, des concerts gratuits et de grands noms, n’a jamais été remise en
question ! Les amateurs apprécient le choix proposé et les lieux d’accueil même si les conditions atmosphériques posent parfois problème
dans la grande salle des Combins… Le public
est varié et n’a nul besoin d’être très argenté
pour aller à Verbier. On est loin de l’image élitiste qui colle encore et toujours à Lucerne.
Surprises
Cette nouvelle édition 2015 fera bien sûr la
part belle aux meilleurs musiciens qui ont fait la
Vive le piano !
Verbier a toujours entretenu un rapport
étroit avec le piano et Daniil Trifonov, Denis
Matsuev et Andras Schiff régaleront les amateurs avec des programmes surprenants. Faire
réputation de Verbier ces dernières années. Mais
à côté, que de surprises et de découvertes ! Le
meilleur moyen est de se laisser guider par sa
propre curiosité et l’on est en général très rarement déçu. Où alors peut-être déçu d’avoir raté
un moment exceptionnel car nul n’a le don d’ubiquité, plusieurs concerts étant donné simultanément ! Certains jours l’offre musicale peut
s’avérer pléthorique pour ceux qui ne veulent
rien rater.
Impossible bien entendu de mentionner
tous les artistes et concerts mais les habitués des
premières heures du festival noteront le retour
attendu de James Levine, éloigné depuis plusieurs années des scènes et concerts européens
pour des raisons de santé. Le festival et son
orchestre de jeunes lui doivent énormément.
C’est grâce à lui que dans les années 2000 la
qualité de l’orchestre a vraiment décollé !
Thomas Quasthoff, autre pilier du festival,
revient lui aussi, non plus comme chanteur mais
comme chef d’orchestre avec la Passion selon
St Matthieu de Bach. D’autres chefs réputés
répondront présent et notre Charles Dutoit
national, toujours directeur musical du festival,
Andras Schiff © Birgitta Kowsky
régulièrement revenir les mêmes artistes est une
chose mais ne pas tomber dans la facilité d’une
programmation trop convenue est aussi une
marque de Verbier !
L’opéra a fait son apparition depuis plusieurs années déjà et l’on pourra entendre des
extraits de Luisa Miller de Verdi, Barbe-Bleue
de Bartok déjà mentionné et la Bohème de
Puccini par les élèves de l’Académie. Cela nous
mène aux récitals de Angela Gheorghiu et Katia
Buniatishvili. Enfin, parenthèse cubaine avec le
Buena Vista Social Club qui entame cette année
une tournée d’adieu.
Michel Perret
Programme détaillé sur verbierfestival.com.
Orquesta Buena Vista Social Club et Omara Portuondo © Alejandro Perez
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festival d’ernen 2015
De l’inouï
Du 4 juillet au 15 août, le village d’Ernen se transformera en Musikdorf,
pour un festival «petit, mais sophistiqué» qui, en février dernier, s’est vu
accorder le Prix Doron. Aux côtés de Ruedi Lüthy, un médecin alémanique
et… Bertrand Piccard !
Qu’ont donc en commun la paisible bourgade d’Ernen, l’aviateur Piccard et le docteur
Lüthy ? Depuis 30 ans, la Fondation suisse pour
le Prix Doron récompense des « actions remarquables dans les domaines de la culture, de l’intérêt général et de la science ». Alors que le
monde entier suit le périple de Solar Impulse et
se préoccupe des grandes épidémies frappant la
société moderne (Ruedi Lüthy travaille auprès
des malades du sida dans le sud de
l’Afrique), Ernen offre de la musique. Celui
qui prétend ne rien trouver dans cette programmation hautement innovante, ne sait
pas apprécier ce cadre magnifique combinant baroque, montagnes et terroir… n'est
franchement pas digne de prétendre au titre
de “mélomane et bon vivant“ ! Encore
moins à celui de “vacancier cultivé“, alliant
avec plaisir repos estival et activités intellectuelles: conférences, lectures et diverses
découvertes inouïes. A vos agendas donc,
mélomanes-aventuriers, ce festival est pour
vous !
Cette édition du Musikdorf s’articule en
divers volets, évoqués au travers de personnalités et moments forts.
Argentine ! En dehors de sa palpitante activité
musicale (son disque Schumann lui vaut une
comparaison avec Horovitz !), elle prépare… une
licence de pilote, d’où le nom du trio : «SaintExupéry», qu’elle forme avec un… autre pilote,
Lorenzo Gatto et Camille Thomas.
Quant à Han Chi Ho, malgré son jeune âge
(23 ans à peine), c’est un véritable marathonien
des concours et festivals; il s’est formé en
Piano
La formule “piano“ est simple : “deux
plus deux“; il y a deux pianistes déjà chevronnés et habitués (Konstantin Scherbakov
et Pietro de Maria), ainsi que deux jeunes, dont le
nom commence à se profiler, et qu'il faut absolument présenter ! La Valaisanne Beatrice Berrut une pianiste bien de chez nous, - et un SudCoréen, Han Chi Ho, forment une combinaison
improbable, laquelle reflète pourtant bien l’esprit
du festival. Née en 1985 à Genève, Beatrice
Berrut a déjà dans ses bagages de nombreux prix
indicateurs de son talent et sa polyvalence :
Concours Eurovision pour les jeunes musiciens
en 2002, prix Jean-Sébastien Bach à Wiesbaden
ou encore prix Revelación octroyé par
l’Association des critiques musicaux en
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Beatrice Berrut © Aline fournier
Allemagne et a déjà côtoyé des grands.
A Ernen, B. Berrut interprétera un programme varié qui unira Bach-Busoni, Chopin,
Brahms, Liszt et Thierry Escaich, alors que le
Coréen se lancera dans un récital de tubes pour
clavier (de Beethoven, La Kreisleriana, et une
poignée de préludes de Chopin).
et leurs contemporains, parfois revus dans les
couleurs du jazz) et interprètes-spécialistes,
autour d’une table musicale richement garnie.
Deux sopranos se font étoiles dans cette constellation de stars. Ana Quintans — interprète d’une
belle palette de rôles d’opéra baroque, qui a travaillé notamment avec William Christie et
Michel Corboz — et Maria Koehane, une cantatrice suédoise au large répertoire allant de la
musique ancienne à l’univers contemporain.
Musique de chambre
en deux variantes
Alors que la formule Plus est consacrée à
deux compositeurs devenus sourds (inutile de
préciser, il s’agit bien de Ludwig van Beethoven
et Gabriel Fauré), la direction artistique du volet
“Musique de chambre compacte“ a été confié au
Quatuor Schumann, un ensemble dont on pourrait dire qu’il mérite largement son nom… s’il ne
s’agissait pas du véritable nom de famille d’Erik,
Ken et Mark Schumann, membres fondateurs du quatuor, trois frères originaires de
Cologne qui ont invité à la collaboration une
charmante violoniste estonienne, Liisa
Randalu. “Une très haute intelligence émotionnelle“, ainsi qu’une “maîtrise technique
suprême“ sont les deux qualificatifs amenant les critiques à affirmer que “le futur
appartient“ à ces quatre archets. En invité
spécial de ce volet, un autre Coréen, le pianiste Da Sol Kim, apportera son coup de
(deux) mains dans le Quintette de Brahms.
Avec ces profils d'interprètes, cette dernière partie de la programmation d’Ernen
risque d’être la plus haute en couleurs, pour
ne pas dire, la plus explosive… de quoi perturber le calme paisible du village hautvalaisan !
A tout cela s’ajoutent des projections
(Unerhört ! Unerhört ? Unerhört…, un
documentaire consacré au fondateur du
Festival, György Sebök), des lectures et conférences, le séminaire d’écriture de Donna Leon et
l’atelier bibliographique de Brigitte Boothe…
De quoi se mettre à rêver d’acquérir un chalet à
Ernen, ou, au moins en louer un — l’espace d’un
été culturel — en ce lieu !
Beata Zakes
Baroque
Du 9 au 30 juillet, la programmation
baroque du festival tourne autour du pastiche.
C’est un véritable festin unissant compositeurs
incontournables (Bach, Haendel, Purcell, Lully
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Programme et réservations: www.musikdorf.ch
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f e s t i v a l s
entretien avec maryse fuhrmann
Les Jardins musicaux
de Cernier
Le rendez-vous annuel estival du côté des Jardins musicaux annonce son
lot habituel et surprenant d’œuvres classique et contemporaines.
Les Jardins musicaux sont placés une
fois de plus sous le signe de la musique d'aujourd'hui...
64
Avec son cortège de ressources, d’inventions, mais aussi de références au passé, la
musique d’aujourd’hui est bien sûr le point de
départ de la programmation. Mais chaque
année, nous explorons aux Jardins Musicaux
des aspects, des voies vers d’autres origines ou
particularités musicales.
Cette année, « l’assemblage » des œuvres
qui jalonneront le Festival dévoilent un lien
particulier avec l’écriture. Poèmes, texte théâtral, fragments d’écriture, livret ou références
littéraires traversent la programmation. Cela
nous réjouit car le décloisonnement des disciplines artistiques nous tient à cœur (notre lien avec
l’Art brut en est un autre exemple) ; il apporte
un éclairage, un angle de réflexion parfois plus
accessible pour le spectateur - auditeur.
Par ailleurs, nous essayons toujours de
trouver une adéquation entre les œuvres et les
interprètes… il me semble que cette édition s’en
approche.
Par exemple, le fabuleux JACK Quartet
qui nous rejoint pour la deuxième année (on le
retrouvera aussi au Festival de Lucerne). Après
Nono et Xenakis l’année dernière, il interprétera The Alchemist et The Remedy of Fortune –
cette dernière en création européenne - de John
Zorn, ainsi que Livre pour quatuor de Pierre
Boulez. Jeune phalange américaine, le JACK
s’est formé aux côtés des Quatuors Arditi et
Kronos. Sa virtuosité, l’énergie du son, la cohésion et la musicalité du groupe sont portés à la
perfection. Il est l’interprète idéal d’un John
Zorn, figure centrale de la scène musicale à
New York, saxophoniste, compositeur et producteur, qui poursuit son exploration - parfois
controversée mais toujours influente - en manifestant une défiance sans pareille devant les
catégories académiques ! Le JACK sera aussi
l’interprète rêvé du Livre de Boulez longtemps
e
considéré comme injouable.
Autre exemple, le programme Happy New
Ears avec les Sonates et Interludes de John
Cage pour piano préparé, interprétées par
Antoine Françoise, jeune pianiste neuchâtelois
de grand talent.
Roger Muraro nous revient. Ami de longue date du Festival, il y a interprété Messiaen,
Berlioz, Ives et Debussy pour le plus grand bonheur du public. Cet été, complice de l’Orchestre
des Jardins Musicaux, il jouera – une première
pour lui - les Nuits dans les jardins d’Espagne
de Manuel de Falla et un de ses grands classiques, le Concerto en sol de Maurice Ravel.
Pour Philippe Albèra (qui présentera les
concerts Happy New Ears et Livre pour quatuor), grand spécialiste de l’œuvre de György
Kurtág, le cycle Kafka-Fragmente est l'un des
chefs-d'œuvre de la musique récente. Avec cette
composition fondée sur de brefs extraits de textes de Kafka, Kurtág nous conduit et nous guide
dans le labyrinthe de pensées et d'émotions que
constitue l’univers de l’écrivain. Caroline
Melzer et Nurit Stark, qui viennent d’enregistrer les Kafka-Fragmente, en seront les magnifiques protagonistes.
Les McGonagall Lieder (que nous avons
intitulés Le Pont de la rivière argentée) est une
œuvre très originale composée par le
Néerlandais Robert Zuidam sur des poèmes de
William McGonagall. Porteur d’une force inspiratrice extraordinaire, ce « poète de pub » écossais (une sorte de précurseur du slam au 19e siècle) a passé à la postérité comme « le pire écrivain de langue anglaise » ! Accompagnée par
Valentin Reymond et l’Orchestre des Jardins
Musicaux, la jeune soprano Katrien Baerts,
qui a créé l’œuvre, en sera l’interprète. Une
découverte pour le public… et la profession.
Une adaptation française des textes, réalisée par Gilbert Pingeon, sera lue par Ahmed
Belbachir.
Il faudrait citer encore une bonne partie des
œuvres et des interprètes que nous avons la joie
d’accueillir à Cernier cet été : le prince du tabla,
Sanju Sahai venu de Benarès, le Quartet de
Daniel Humair, Nik Bärtsch, grand pianiste et
compositeur zürichois, le rarissime Nocturne de
Artur Schnabel sur un texte de Richard Dehmel,
Ecuatorial de Varèse, Les Esprits Animaux
avec Turcaria, une vision baroque des mystères
et dangers de l’Orient etc…
L'accent est parfois mis sur les artistes de la région...
Mais oui, et c’est un choix parce que nombre de musiciens, plasticiens, metteurs en scène
et techniciens de la région sont de merveilleux
artistes !
Jack WQuartet @ Justin Bernhaut
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Ainsi la grande partie des musiciens de
l’orchestre sont neuchâtelois et suisses,
plusieurs chanteurs, le metteur en scène
Robert Sandoz, la scénographe Nicole
Gredy, le directeur technique et éclairagiste
Jean-Philippe Roy, plusieurs ensembles
etc…
Nous accueillons aussi le NEC
(Nouvel Ensemble Contemporain) qui
interprètera Secret Theatre, une grande
réussite de Harrison Birtwistle.
Patterson, Charles Johnston, Frédéric
Gindraux et Grzegorz Rózycki sont réunis
autour de l’équipe de l’Outil de la
Ressemblance et dirigés par Valentin
Reymond.
Il y a désormais des ateliers...
Cette démarche a été proposée et assumée, il y a trois ans, par Emilie Brisedou,
musicienne et collaboratrice du festival
depuis treize ans. La fréquentation de ces
Ateliers augmente d’année en année. A ce
jour, nous refusons déjà des classes ; nous
sommes aussi très sollicités par les enfants
et les familles. Avec la démarche De la sensibilisation à l’interprétation, Emilie a su
tirer parti de la programmation de chaque
édition et s’en inspirer pour intégrer les
enfants à l’esprit du Festival.
Y a-t-il des collaborations avec
des institutions romandes ou suisses ?
Cette été, ou plus tard dans la saison, nous
collaborerons avec plusieurs institutions du
pays, le Théâtre du Crochetan, le Parc
régional Chasseral, le Stadt Theater de
Bienne, la Cinémathèque Suisse, Cinemont
(nouveau complexe de cinéma de
Delémont), le Théâtre Benno Besson, Les
Concerts de la Collégiale, la Lanterne
Magique, le Théâtre du Passage, la Saline
royale d’Arc et Senans, la Haute Ecole de
musique de Genève-Neuchâtel etc…
Les Ateliers des Jardins Musicaux
sont des espaces d’expérimentation, de
découverte et de création. Ils permettent
aux enfants de partager l’effervescence du
Festival. Des passerelles entre leur univers et la
programmation du Festival sont créées spécialement pour eux. Cette année, pour la première
fois, ils expérimenteront la scène non seulement
pour en découvrir les coulisses mais aussi pour
s’y produire.
Katrien Baerts © Claudia Hansen
Et cette année, retour d'un spectacle
lyrique mis en scène par Robert Sandoz...
C’est en effet le « retour » d’un spectacle
lyrique. L’Opéra Décentralisé - qui produit les
Jardins Musicaux - est né de cette forme de
spectacle et nous y tenons beaucoup. Mais cela
implique des moyens - toujours difficiles à
réunir et probablement plus encore dans notre
région. En coproduction avec la compagnie de
Robert Sandoz, L’Outil de la Ressemblance,
nous montons une rareté, le dernier opéra de
Hindemith - compositeur injustement “mal
aimé“ en Suisse - Le Long Dîner de Noël, sur un
Livret de Thornton N. Wilder.
Chaplin est une fois de plus à l'affiche : collaboration avec la cinémathèque...
Eh oui ! Lors de cette édition, c’est La
Ruée vers l’Or. Nous aurons abordé avec un
immense plaisir – partagé par un public fervent
- l’œuvre de Charles Chaplin, ses films muets
qui rayonnent encore comme au premier jour.
La collaboration avec La Lanterne Magique, la
Cinémathèque et d’autres partenaires et fondations nous ont permis de sillonner la Suisse avec
ces chefs-d’œuvre ; nous arrivons en fin d’année au terme de cette aventure (qui aura comporté une soixantaine de représentation) ; peutêtre aborderons-nous encore les quelques
courts-métrages muets l’an prochain afin de terminer une intégrale de la merveilleuse musique
de Chaplin.
L’histoire raconte, en un seul repas, nonante dîners de Noël célébrés dans l’ouest des
Etats-Unis. On y retrace la vie de quatre générations d’une famille de notables, les Bayard, leur
arrivée dans l’Ouest, les pionniers, le développement de l’entreprise familiale, la notoriété,
les guerres, la fortune, les naissances, les morts,
les mariages...
Propos recueillis par Frank Fredenrich
Pour la distribution, voilà encore un exemple d’adéquation dont nous parlions tout-àl’heure. Ainsi, Jeannette Fischer, Clara Meloni,
Frances McCafferty, Carine Séchaye, Stuart
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Antoine Françoise
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les jardins musicaux de cernier
Philippe Albera
Le musicologue et professeur Philippe Albera donnera deux conférences
cet été à Cernier, avant les concerts de musique contemporaine dont il va
être question ici.
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Les Kafka-Fragmente de Gyorgy Kurtag
sont annoncés pour le 20 août. Il s’agit de l’une
des plus grandes œuvres de Kurtag, nous dit
Philippe Albera, un véritable chef-d’œuvre.
Deux musiciens, une voix féminine et un violon
nous embarquent dans un voyage extraordinaire
de près d’une heure. Il n’y a pas de développement, ni d’emphase, pas de linéarité dans les textes éclatés, aphorismes ou bribes de phrases tirés
du journal ou de la correspondance de Kafka.
Musicalement, il y a une couleur et une intensité
propres à chaque moment. Les idées musicales
sont exprimées une fois seulement, ce qui contribue à la puissance de ces fragments, qui constituent un cycle fait de petites formes, comme un
Caroline Melzer
cycle de Lieder. C’est une musique basée sur
l’expressivité (ce qui le distingue de Boulez), liée
à la tradition, avec même des allusions au romantisme, et en même temps un élément populaire
que Kurtag a conservé, contrairement à Ligeti.
Dans le dernier « Lied » on passe du chant des
oiseaux, évoqué par les aigus du violon ressurgis
de la musique populaire, à la reptation des serpents, auxquels Kurtag assimile sa femme et luimême. Il y a toujours une distance ironique, très
juive. C’est aussi une musique de l’élémentaire,
des gestes bruts, du corps. Par exemple le thème
de la marche, qui parcourt l’œuvre. Au début,
« Les bons marchent d’un même pas », mais peu
à peu les voix se décalent et tout ne « marche »
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plus comme prévu. A la fin, on rampe ! La violence est aussi présente ; tout est construit, pensé,
subtil, mais éclate parfois avec une force qui
cherche à dépasser toute limite. L’érotisme, la
sexualité font également partie des éléments
constitutifs. C’est une musique qui aspire à la
pureté en passant par l’impur.
Kurtag est un compositeur tourmenté, juif
hongrois qui a connu le nazisme, l’antisémitisme.
Son écriture d’une exigence extrême est une
lutte, un corps à corps : il faut mériter, gagner
chaque note, qui doit être nécessaire. L’idéal
serait d’atteindre la perfection en une composition de deux notes. Le minimalisme de Kurtag est
proche de la parole rare de Kafka. Il n’a trouvé
son langage que tardivement, vers
l’âge de trente ans. Avant son séjour
de six mois à Paris en 1958-59, il
avait peu écrit, dans le sillage de
Bartok. En retard sur son époque, il
connut une crise qui l’amena chez la
psychologue Marianne Stein. Elle
lui conseilla de se concentrer sur l’élémentaire, ce qui fut en quelque
sorte son salut : il revint de Paris
avec le Quatuor à cordes No1, sa
première œuvre officielle. Il y est
encore proche du style de Webern,
mais le coup d’envoi est donné. Il
n’y aura pas de rupture, plutôt une
continuation des gestes musicaux « traditionnels » : il transforme en réduisant, et conserve les
notes et les rythmes (par opposition aux bruits et
aux effets sonores). Philippe Albera connaît bien
le compositeur. Il l’a invité plusieurs fois à
Genève dans le cadre de Contrechamps, du
Festival Archipel et de la HEM.
« Happy new ears »
C’est ce que John Cage lui-même souhaitait
à son public, pour qu’il ouvre ses oreilles à la
nouveauté, et c’est le titre choisi pour le concert
du 24 août : Sonates et Interludes pour piano préparé. Environ cinquante minutes de musique
jouée par Antoine Françoise sur un piano dont on
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a modifié le spectre harmonique par l’insertion
entre les cordes de divers objets en bois, métal,
gomme, grâce auxquels on obtient la sonorité des
cymbales, des petites cloches, du tambour, du
bloc chinois etc. Cage voulait que ce piano remplace un ensemble de percussions qui devait
accompagner des danseurs mais ne disposait pas
d’une place suffisante. Il a donc inventé ce nouvel instrument en 1940, pour des raisons pratiques. Les endroits où les objets seront situés
sont indiqués précisément, mais chaque pianiste
les place lui-même : des différences de quelques
millimètres sont inévitables, et cela change les
sons ! La plupart des touches du piano sont affectées. C’est une sorte de gamelan imaginaire.
Cage a travaillé la philosophie indienne pour tenter d’exprimer les différents états émotionnels
dans la recherche de l’harmonie, de la sérénité,
de la douceur. Il veut une musique sans intention,
l’inverse de Kurtag. Laisser vivre les sons, abandonner la volonté, le désir, dépasser l’ego,
rechercher la sérénité, l’empathie, la fusion.
Après les Sonates et Interludes il utilise des
procédures de hasard. Par exemple, il repère les
défauts d’une feuille de papier et leur position va
déterminer celle des notes sur la partition. Même
procédé à partir de la position des étoiles. Par
ailleurs, le silence le fascine : il fait partie de
l’œuvre. Cage lisait volontiers des textes en
public, dont certains écrits par lui-même, faisant
intervenir de fréquents silences au cours de la
lecture. Anarchiste, écologiste, végétarien,
mycologue, il reste en dehors du système. En
1949 il a rencontré Boulez, qui l’a présenté au
public. Une amitié est née, confirmée par une
abondante correspondance. Elle a pris fin lorsque
Boulez a compris que Cage s’engageait dans une
autre direction, attiré par le recours au hasard et
par une philosophie musicale différente. Ce n’était pas acceptable pour Boulez, qui, parti de la
musique sérielle, essaie de tout structurer, timbres, rythmes, durée, intervalles, dynamique.
Pour lui, chaque élément a une fonction.
Livre pour Quatuor
Le 24 août, Pierre Boulez sera justement à
l’honneur, en compagnie du compositeur John
Zorn, dont deux quatuors seront à découvrir.
Philippe Albera choisit de nous parler de Boulez,
qui n’a pour lui aucun secret. Le Livre pour
Quatuor est une œuvre austère, qui ne lui plaisait
pas ! Il l’a réécrit pour orchestre à cordes, mais
retiré cette version par la suite. En 2011 il n’y a
apporté que quelques aménagements. L’un des
mouvements n’est d’ailleurs pas jouable ! C’est
de la musique pure, dans laquelle il a essayé de
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trouver un substitut au langage tonal.
Un peu plus tard il répond à Cage
avec Le Marteau sans maître, après
une autocritique et un dépassement
de ses œuvres précédentes. Il y repense la série du point de vue harmonique.
Après la guerre, le néo-classicisme domine. Mais Auschwitz et
Hiroshima ne sont pas oubliés. C’est
une époque tragique et les jeunes
compositeurs radicaux ont une exigence éthique : on ne peut pas faire de
la musique divertissante après ça, on
doit reconstruire le langage sans s’appuyer sur la tradition, mais sur le phénomène sonore en soi (hauteurs, rythmes, intensité, durée, etc.) La
musique ne sera responsable que par
rapport à elle-même, ce qui ne signifie pas qu’elle ne produira pas d’émotions. Il n’y a pas de compromission
possible : Boulez veut trouver un langage et déboucher sur une poétique
qui fonctionne. Convaincu par le
structuralisme, il estime que la structure crée la signification. Il veut que
la musique vive de sa loi interne. Il
n’y a plus d’objets qui portent en euxmêmes un sens, plus de figures de
rhétorique. Il est proche des théories
philosophique de Foucault, Deleuze,
Derrida et accepte que les lois du
monde se trouvent au-delà ou en deçà
de l’homme. Il revendique la fin de
l’anthropomorphisme et le refus de
l’existentialisme sartrien.
Les Jardins musicaux ont l’immense mérite d’avoir ouvert la programmation à la musique contemporaine, mérite dont une grande partie
revient à Jean Prévost, associé à la
direction artistique, et que Philippe
Albera tient à remercier. Le public
curieux de Cernier est friand de
découvertes et les salles sont pleines.
Dépêchez-vous donc de réserver vos
places !
D’après des propos recueillis
par Martine Duruz
entretien
Jeannette Fischer
La soprano Jeannette Fischer est une habituée des
Jardins musicaux. Domiciliée à Neuchâtel et professeur à
Lausanne, elle participera cet été à deux spectacles
inattendus à la Grange aux Concerts de Cernier.
Le Long Dîner de Noël
Martin Pring, Jeannette
Fischer,
Frances
McCafferty,
Stuart
Patterson et Charles
Johnson se partageront
les « tubes » que sont
devenus The Man I love,
Embraceable You, Slap
that Bass et Let’s Call
the Whole Thing off,
Jeannette Fischer
ainsi que les hits de
Porgy and Bess : Summertime, My Man’s gone Now, It
ain’t necessarily so, I Got plenty o’ Nutting et A woman
is a Sometime Thing. Jeannette Fischer ne voit pas
d’inconvénient à chanter avec une voix de formation
classique ce genre de musique, pour peu que l’on sache
s’adapter au style jazzy des compositions de Gershwin.
Il faut savoir oser des sons qui sortent du domaine classique, mais cette musique ne met pas en danger la santé
vocale, même si elle se distingue de ce que la soprano
a l’habitude de chanter. Au fait, que chante-t-elle ?
L’opéra en un acte de Paul Hindemith sur un livret de Thornton N. Wilder sera d’abord représenté en
création suisse le 25 août, puis repris au Théâtre municipal de Bienne le 28 août. L’argument est le suivant :
au cours d’un dîner de Noël, 90 précédents repas sont
évoqués. La vie de quatre générations d’une famille de
notables est racontée : l’arrivée dans l’Ouest des EtatsUnis, le développement de l’entreprise familiale, les
guerres, la fortune, les naissances, les morts… Une
réflexion sur le temps qui passe.
Jeannette Fischer y joue le rôle de Lucia 1, puis de
Lucia 2. Jeune au début, elle est mariée à Roderick 1,
donne naissance à deux enfants, Charles et Geneviève,
vieillit puis meurt. Elle incarne ensuite le personnage
de la fille de Charles (Lucia 2).
La pièce de Wilder n’est pas une comédie, le sujet
est sérieux, mais on remarque une certaine ironie qui,
à l’occasion, peut faire sourire. Hindemith indique que
les « morts » doivent sortir de scène par la porte noire,
et les nouveaux arrivants par l’autre porte. Lorsque
l’un des fils part à la guerre, il emprunte la porte noire
et l’on devine qu’il ne reviendra pas malgré ses espoirs
de prompt retour. Il y a des poncifs sur le temps qui
passe…
Ce court opéra d’une heure est rarement monté.
L’histoire ne séduit pas, pense Jeannette Fischer, mais
elle-même est fascinée par le thème des générations
qui se succèdent, convaincues de faire mieux que les
précédentes, et reproduisant toujours les mêmes
erreurs, les mêmes disputes, les mêmes réconciliations.
La musique est fraîche, par moments peu accessible,
par moments lyrique. Elle rappelle Britten, mais en
douceur. Les répétitions n’ayant pas encore commencé, la cantatrice est curieuse de savoir comment le metteur en scène s’arrangera pour la faire vieillir sur le plateau, qu’elle n’a aucune occasion de quitter pour une
éventuelle transformation en coulisses !
Un répertoire particulier
Soprano, léger au début et maintenant lyrique,
Jeannette Fischer n’est pas attirée par les rôles de
prima donna qui font rêver la plupart des divas. Elle
préfère les rôles de caractère, les personnages qui ne
sont pas « lisses » : certains se trouvent chez Rossini,
dans les opérettes, chez Mozart (Despina, Papagena,
Marcellina), Poulenc (Madame Lidoine),
Humperdinck (la sorcière) ou même Debussy
(Mélisande). Elle a adoré le personnage hors du commun de Gelsomina dans La Strada du compositeur
belge Luc van Hoeve.
Elle ne pratique pas la danse, ce que l’on pourrait
croire après le légendaire grand écart dont elle a fait
démonstration sur scène, mais beaucoup de sport :
musculation, marche, escalade, escrime, judo, danse
de salon. Sa souplesse est naturelle. Il est essentiel,
pense-t-elle, de mettre le corps en éveil, car le chant
n’est pas seulement une affaire de cordes vocales !
Crazy Girl
KAFKA-FRAGMENTE
Grange aux Concerts, Cernier, le 20 août à
19h
Avec Caroline Melzer et Nurit Stark
Crazy Girl annonce le programme, mais la comédie musicale dont seront tirés certains extraits chantés
de la soirée a pour titre Girl Crazy, ce qui peut surprendre évidemment. Ce musical créé à Broadway en 1930
a fait de Ginger Rogers une star. Sous la direction de
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D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
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agenda genevois
Musiques en été
Si les grandes institutions se reposent pendant l’été genevois, la musique,
en revanche, ne part pas en vacances : la série des Musiques en été propose
des soirées où des notes classiques, d’opéra, de jazz et d’autres partitions
colorées agrémenteront les nuits de la bout du lac.
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Notons d’abord la venue, le mercredi 8
juillet au Victoria Hall, d’Anne-Sophie Mutter
au violon, accompagnée par Lambert Orkis au
piano. Au programme : des sonates de Béla
Bartók, Beethoven, Respighi, ainsi que la
Tzigane – Rapsodie pour violon et piano de
Ravel. Côté classique, Kazuki Yamada et
l’Orchestre de la Suisse Romande ouvriront la
saison estivale de la Ville de Genève le 2 juillet,
sur la scène Ella Fitzgerald, avec au programme
Le Lac des cygnes de Tchaïkovski, The Age of
Gold de Chostakovitch, les Valses de concert No
1 et 2 de Glazounov et Circus Polka de
Stravinski.
Le 16 juillet, l’on retrouvera la Geneva
Camerata dirigée par David Greilsammer dans la
Cour de l’Hôtel de Ville. Elle accompagnera le
contre-ténor Andreas Scholl pour un programme
autour de Haendel, Schubert et Mozart, dont le
Concerto pour piano No 27 sera exécuté au
piano par Greilsammer lui-même. L’Orchestre
des Continents, composé de jeunes musiciens des
conservatoires suisses et asiatiques, interprétera
le 25 juillet des partitions de Mozart, Debussy,
Emily Koh et Schubert. L’Orchestre de Chambre
de Genève se produira aussi le 4 août sur la scène
Ella Fitzgerald. Dirigé par Arie van Beek, le programme comporte des airs de Mozart, Rossini et
Donizetti, interprété par T. Gevorgyan, M.
Jaermann, R. Ramgobin. Il Giardino Armonico,
dirigé par Giovanni Antonini, viendra quant à lui
le 11 août à la Cour de l’Hôtel de Ville pour
accompagner la mezzo-soprano Marie-Claude
Chappuis dans des œuvres de Monteverdi,
Josquin de Prés et Gombert - entre autres.
Côté musique de chambre, le Quatuor de
Genève propose d’entendre le 9 juillet le
Quatuor en sol mineur de Debussy, puis le
Quintette à deux violoncelles de Schubert, grâce
au renfort de François Guye. Le 14 juillet, David
Grimal (violon), Anne Gastinel (violoncelle) et
Philippe Cassard (piano – et animateur de l’excellent “Notes du traducteur“ sur France
Musique) seront dans la cour de l’Hôtel de Ville
a
pour donner à entendre des trios de Chausson,
Schubert et une création de Baptiste Trotignon.
Le Quatuor Sine Nomine exécutera le 30 juillet
au même endroit des quatuors de Haydn, Bartók
et Beethoven. Enfin, le Quatuor Terpsycordes
jouera le 13 août des œuvres de Haydn,
Mendelssohn et Dvorák. Par ailleurs, le duo
constitué par Elsa Grether au violon et David
Lively au piano interprétera le 23 juillet des œuvres de Prokofiev, Copland et Ravel, tandis que le
baryton Stephen Genz, accompagné par Michel
Dalberto, envoûtera la nuit du 28 juillet grâce au
Dichterliebe de Schumann.
Côté récitals, deux pianistes sont à découvrir
ou à réentendre. D’abord, Béatrice Rana interprétera le 21 juillet à la Cour de l’Hôtel de Ville
la Partita No 2 de Bach, Pour le piano de
Debussy, la Sonate No 2 de Chopin et La Valse de
Ravel. Puis, Nelson Goerner jouera le 6 août la
Chaconne de Haendel, la Fantaisie de
Schumann, Deux poèmes op. 32 de Scriabine et
des œuvres de Chopin.
Mais l’opéra n’est pas en reste : l’Opéra de
Chambre de Genève présentera les 7, 8, 10 et 11
Grégoire Maret
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juillet Pomme d'Api et Monsieur Choufleuri
restera chez lui le... de Jacques Offenbach. Dans
une mise en scène de Pierre-Emannuel Rousseau,
Marion Grange sera Catherine (Pomme d’Api) et
Ernestine (Monsieur Choufleuri) ; André Gass –
Gustave et Babylas ; Richard Rittelmann Rabastens et Choufleuri. Franco Trinca dirigera
l’Orchestre de Chambre de Genève qui promet
d’être pétillant.
L’été Jazz sera inauguré à la Cour de l’Hôtel
de Ville le 6 juillet par le Brad Mehldau Trio,
réputé pour ses improvisations. Le 13 juillet,
l’harmoniciste genevois Grégoire Maret sera
accompagné par divers musiciens, dont Jeff
« Tain » Watts à la batterie. Soulignons ensuite la
venue du Bill Frisell Quartet le 20 juillet pour
une soirée dédiée aux grands guitaristes des
décennies 1950-1960, ainsi que du Roy Hargrove
Quintet le 27 juillet, pour une nuit de swing. Le 3
août, il faudra courir découvrir le jazz britannique avec Sons of Kemet, tandis que le 10 août
Root 70 with strings propose d’entremêler tradition et modernité jazzy. La saison sera clôturée
par Sun Ra Arkestra qui proposera un gratuit
« cosmic jazz » le 14 août, sur la scène Ella
Fitzgerald. Ne pas manquer toutes les autres couleurs musicales de l’été sur http://www.villege.ch/culture/musiques/ !!!
Martina Díaz
Andreas Scholl
La Geneva Camerata dirigée par David
Greilsammer donnera un concert exceptionnel
le 16 juillet dans la Cour de l'Hôtel de Ville de
Genève en compagnie du contre-ténor Andreas
Scholl : au programme Mozart, Schubert,
Haendel et Pärt. Un conseil : réservez cette date
sans tarder.
Faut-il encore présenter Andreas Scholl,
l'un des plus célèbres contre-ténor de notre
époque ? Son impressionnante carrière débutée
il y a plus de vingt ans, est là pour nous en dissuader. Et pourtant, malgré ses succès à la scène
comme au disque, dans l'opéra comme dans l'oratorio, le public qui le suit connaît sa réserve et
sa grande modestie qui explique ce manque
relatif de notoriété.
Né en 1967 à Eltville en Allemagne, dans
une famille de musiciens (ses parents sont chanteurs) il commence sa formation musicale à
l'âge de 7 ans au Kiedricher Chorbuben, un
chœur de garçons qui perpétue une tradition
chorale vieille de six cent cinquante ans. De
1987 à 1993 il est l'élève de Richard Levitt et de
René Jacobs à la Schola Cantorum et obtient un
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contemporains), Cantates pour alto de
Bach avec Herreweghe et le Stabat
Mater de Vivaldi avec l'Ensemble 415
placé sous la direction de Chiara
Bianchini, tous trois publiés par
Harmonia Mundi.
François Lesueur
Andreas Scholl © Decca / James McMillan
diplôme de musique ancienne. Dès 1988, il
chante le répertoire baroque dont les Passions et
les Cantates de Bach avec Jacobs ou
Herreweghe, ainsi que des opéras de Haendel.
Contre-ténor, il possède une voix dont le large
ambitus est proche de celui de l'alto féminin,
couvrant près de trois octaves et parvenant aux
aigus en voix de tête ou en mixant voix de tête
et de poitrine. Fasciné par Alfred Deller et fervent admirateur de James Bowman qui ont tant
fait pour ce répertoire et ce type de voix aiguës
et androgynes, Andreas Scholl travaille sa diction, perfectionne sa technique et profite du
renouveau baroque pour se faire connaître grâce
à des chefs tels que Christie, Gardiner, Coin,
Minkowski ou Alessandrini qui explorent cette
musique longtemps oubliée. Si Bach, Vivaldi ou
Dowland lui permettent de s'illustrer dans un
vaste répertoire où il développe ses aptitudes et
sa sensibilité, il ne tarde pas à être programmé
dans les opéras de Haendel, qui vont devenir ses
œuvres de prédilection : ainsi aborde-t-il Arsace
de Partenope à Glyndebourne en 1998, avant
d'endosser celui de Giulio Cesare notamment à
Lausanne et à Salzbourg avec Cecilia Bartoli en
2012, puis d'accepter l'invitation du Met pour
chanter Rodelinda avec Renée Fleming en
2011(dvd Decca), également interprétée au
Châtelet en 2002 avec Anna Caterina
Antonacci, Christie à la baguette dans une mise
en scène de Villégier.
Après son concert genevois où il interprétera des airs de Haendel dirigés par David
Greilsammer le 16 juillet, Andreas Scholl sera à
Paris en décembre chanteur et chef d'orchestre
pour des Cantates de Bach (TCE) et retrouvera
l'opéra de Francfort en février et mars 2016
pour tenir le rôle-titre de Giulio Cesare avec
Brenda Rae et Jamie Barton, dirigés par Erik
Nielsen.
Pour retrouver cet interprète au disque, son
album Crystal Tears (airs de Dowland et de ses
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Le 16 juillet. GENEVA CAMERATA, dir. et piano
DAVID GREILSAMMER, ANDREAS SCHOLL, contre-ténor (Mozart, Schubert, Haendel, Pärt)
(rens. 0800.418.418 / loc. Maison des arts du
Grütli / Espace Ville de Genève / Cité Seniors
/ Genève Tourisme)
Stephan Genz
Le baryton allemand Stephan Genz sera en
concert à l'Hôtel de Ville de Genève le 28 juillet
prochain accompagné par le pianiste Michel
Dalberto. Au programme le Dichterliebe de
Schumann et des extraits du Chant du cygne de
Schubert, un rendez-vous à retenir et à ne pas
rater.
Bien que le baryton allemand ait à ses
débuts beaucoup chanté l’opéra sur les
plus grandes scènes, invité à Berlin,
Paris, Milan, Strasbourg ou Lausanne, il
s'est rapidement consacré au récital,
devenant en quelques années un liedersänger de tout premier ordre.
Né à Erfurten 1973, Stephan Genz
démarre sa formation musicale en tant
que membre du Chœur de l'Eglise de
Saint-Thomas de Leipzig à 7 ans, avant
d'intégrer la Faculté de musique de la
ville et de devenir l'élève de Hans
Joachim Beyer et de se perfectionner
auprès de la mezzo Mitsuko Shirai et de
son mari Harmut Höll à Karlsruhe à partir de
1994. Il suit ensuite les cours d'interprétation de
deux éminentes personnalités du monde
lyrique, deux géants du lied, Dietrich FischerDieskau et Elisabeth Schwarzkopf qui l'initient
à l'art de la miniature. Les précieux conseils
qu'il reçoit lui permettent de remporter plusieurs
prix aux concours Brahms et Wolf, tout en se
faisant remarquer par la critique belge en 2000
qui le sacre Jeune Artiste de l'année. Ses débuts
au Wigmore Hall de Londres en 1997 sont un
succès immédiatement suivi par une tournée
aux Etats-Unis et dans toute l'Europe.
Fin diseur, grand amateur de poésie, le
baryton ne tarde pas à s’attaquer aux cycles
allemands écrits pas Schubert (dont le
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Winterreise) et Schumann, se révélant un interprète très raffiné de Wolf. L'opéra de Strauss
Capriccio lui offre un rôle en or avec Olivier, le
poète amoureux de Madeleine et rival du musicien Flamand, qu'il chante en concert notamment à Mannheim en mai 1999 sous la direction
envoûtante de Georges Prêtre, aux côtés de la
merveilleuse Comtesse de Felicity Lott et du
Flamand de Gregory Kunde (édité par Forlane).
Ces dernières années on a pu l'entendre sur
scène incarner Einsenstein dans Die
Fledermaus au Bolchoï, dans Guglielmo de
Cosi fan tutte à Baden-Baden avec Véronique
Gens et Teodor Currentzis dans la fosse, et dans
Papageno (Die Zauberflöte) à Cologne et à
Genève, ainsi que dans le double rôle de Frank
et de Fritz dans Die tote Stadt de Korngold, à
Venise dans une mise en scène par Pier-Luigi
Pizzi (dvd Dynamic 2009), œuvre dans laquelle
il s’était fait remarquer en 2001 au Châtelet à
Paris, auprès de Torsten Kerl et de Angela
Denoke dans une production signée Inga Levant
avec Jan Latham-Koenig dans la fosse.
En dehors de ses activités musicales, le
baryton enseigne depuis 2012 au Conservatoire
National de Paris le répertoire allemand.
stephan Genz
Le 28 juillet 2015, Stephan Genz retrouvera son complice, le célèbre pianiste Michel
Dalberto qui l'accompagnera à nouveau pour
interpréter le Dichterliebe de Schumann, couplé
à des extraits du Chant du cygne de Schubert,
tous les des composés sur des textes de Heinrich
Heine.
François Lesueur
Le 28 juillet. STEPHAN GENZ, baryton, MICHEL DALBERTO,
piano (Schumann, Schubert)
(rens. 0800.418.418 / loc. Maison des arts du Grütli /
Espace Ville de Genève / Cité Seniors / Genève Tourisme)
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du 14 au 30 août
Sion Festival
La 51e édition du Sion Festival - la 3e mise sur pied par Pavel Vernikov,
violoniste et directeur artistique de la manifestation – déroulera son fil
rouge traditionnel « Voix & violon » dans la deuxième quinzaine d’août.
La Ferme-Asile, un endroit plein de charme bénéficiant d’une excellente
acoustique, accueillera la plupart des concerts.
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Des professeurs et étudiants de l’Académie
de Musique Tibor Varga animeront la soirée
d’ouverture du festival, avec les violonistes
Pavel Vernikov et Svetlana Makarova, l’accordéoniste Stéphane Chapuis et la violoncelliste
Estelle Revaz (ve 14 à 20h).
Le ténor Dmitry Korchak et le Chœur de la
Philharmonie de la région de Moscou présenteront un programme de musique sacrée et d’airs
populaires russes, avec des pages de
Tchaïkovski, de Fédor Stepanov (né en 1985), de
F. Miasnikov, de Pavel Chesnokov (1877-1943),
et de Rachmaninov, avec des extraits des Vêpres
et de la Liturgie de saint Jean Chrysostome
(Cathédrale de Sion, di 16 à 17h).
Daniela Fally. Photo Sepp Gallauer
L’affiche est copieuse pour le concert de la
Kremerata Baltica, avec les sœurs Katia et
Marielle Labèque et le très jeune Danill
Bulayev en solistes. Après deux œuvres de
Mozart - une Ouverture et le Concerto pour 2
pianos K. 365 , le concert se poursuivra avec la
Symphonie No 1 de Weinberg, Souvenirs de
a
Florence de Tchaïkovski,
Flowering Jasmine pour
violon et orchestre de
Geogs Pelecis (né en 1947)
et enfin Les Quatre Saisons
de Vivaldi.
Né à Varsovie,
Mieczyslaw
Weinberg
(1919-1996), réfugié en
URSS pour fuir le régime
nazi en raison de son ascendance juive et grand ami de
Chostakovitch, laisse une
œuvre considérable et injustement méconnue. Il a écrit
26 symphonies, dont cette juvénile et plaisante
Première que jouera la Kremerata Baltica (ma 18
à 20h).
A l’enseigne d’ « Imperial Sounds », le
Janoska Ensemble (Quatuor avec piano) se produira en compagnie de ses invités, la soprano
Daniela Fally et le ténor Michael Schade, pour
une immersion à sa manière dans le monde de
l’opérette viennoise (me 19 à 20h).
La violoniste Janine Jansen, le violoncelliste Nicolas Altstaedt et l’altiste Nimrod Guez
mettront leur talent au service des Variations
Goldberg BWV 988 de J.S.Bach, dans une adaptation due au violoniste Dmitry Sitkovetsky (je
20 à 20h)
Fabio Biondi (direction et violon), Marina
de Liso (mezzo-soprano) et l’orchestre baroque
Europa Galante proposent une soirée à Venise au
début du XVIIIe siècle, plus particulièrement à
l’Ospedale della Pieta, où se trouvait Chiara, une
jeune pensionnaire si douée pour la musique que
Vivaldi et d’autres composèrent plusieurs œuvres
pour elle. Au programme figurent des Sinfonias,
une Cantate, un Motet et des Concertos de Porta,
Porpora, Martinelli, Perotti, Bernasconi et
Vivaldi, dont le Concerto pour violon RV 222
« per la Signora Chiara » (ve 21 à 20h).
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Les musiciens du Gomalan Brass Quintett,
en véritables hommes-orchestre, jouent, chantent
et dansent une version inédite et surprenante de
l’opéra Aïda de Verdi, dans un arrangement
d’une heure qui devrait plaire aussi bien aux
adultes qu’aux enfants (sa 22 à 17h).
L’Orchestre de Chambre de Lausanne,
conduit par Gilbert Varga, accompagnera les trois
finalistes du Concours international de violon
Tibor Varga (me 26 à 18h).
Julian Rachlin
Les clowns de Slava Polunin, le violoniste
Gidon Kremer et la Kremerata Baltica présentent leur « Slow Symphony », qui fait depuis dixhuit ans pleurer de joie des milliers de spectateurs dans des centaines de villes et des dizaines
de pays à travers le globe (jeudi 27 au Crochetan
Monthey à 20h). Et aussi mercredi 26 dans le
cadre du Théâtre du Crochetan (www.crochetan.ch). En hommage aux victimes du génocide
de 1905, le Hover Chamber Choir interprétera
des chants liturgiques arméniens, ainsi qu’une
partition Everlasting Life, pour chœur et quintette, du compositeur Vache Sharafyan, né en 1966
à Yerevan, avec le Trio Tchaïkovski et Svetlana
Makarova au violon et Lyda Chen-Argerich à
l’alto. Le Trio avec piano en la mineur de
Tchaïkovski complétera le programme (ve 28 à
20h). « La folle journée d’Igudesman & Joo »
marquera le retour à Sion du facétieux duo (sa 29
dès 11h à la Ferme-Asile et en ville).
L’excellent Orchestre de la Suisse Italienne,
avec Julian Rachlin au violon et à la direction,
donnera le concert de clôture du festival. Au programme figurent le Concerto pour violon de
Beethoven et la Symphonie No 4 « Italienne » de
Mendelssohn. (di 30 à 17h à la Ferme-Asile).
Yves Allaz
www.sion-festival.ch
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du valais au jura
Champéry, Les
Haudères, St-Ursanne
Situés dans un cadre enchanteur, ces trois festivals permettent de découvrir
quelques-uns des musiciens les plus en vue de la jeune génération, aux
côtés d’artistes réputés, tous au service de chefs-d’œuvre de la musique de
chambre d’hier et d’aujourd’hui.
Les Rencontres Musicales
de Champéry, du 2 au 6 août
Ces Rencontres ont lieu au Temple du village et s’ouvriront par un concert-lecture de la
comédienne Brigitte Fossey et du pianiste
Masakatsu Nakano, qui dévoileront les états
d’âme de Franz Liszt et de Marie d’Agoult (di 2).
Le Trio Colomba, avec Svetlana Makarova au
violon, Estelle Revaz au violoncelle et Irina
Chkourindina au piano, envoûtera l’auditoire
« de la Dumka au Tango » (ma 4). Le jeune baryton allemand Benjamin Appl chantera le bouleversant Winterreise de Schubert, avec le soutien
de Fabrizio Chiovetta au piano (je 6). Estelle
Revaz et Christian Chamorel au piano entoureront le clarinettiste Damien Bachmann « Au tour
de la clarinette » (sa 8). Les Solistes de
l’Académie Menuhin, guidés du violon par Oleg
Kaskiv (lu 10) précéderont la Camerata Pierre
Amoyal, qui associera « Divertimento, cinéma &
jazz » (ve 14). Le clarinettiste belge Marc
Grauwels et le pianiste Stéphane De May se présenteront à l’enseigne de « Flûtissima « (me 12).
Le Trio Nota Bene, avec deux trios avec piano,
de Beethoven et de Dvorak, mettra un terme à
cette 16e édition des Rencontres (di 16).
Infos sur : www.festivalhauderes.ch
Piano à Saint-Ursanne,
du 2 au 12 août
Martina Filjack © Romano Grozich
de 25 ans (lu 3). Une carte blanche est donnée à
des jeunes de l’Académie Tibor Varga (à 17h),
Infos sur : www.rencontres-musicales.ch
14e Festival de musique des
Haudères, du 31 juillet au 9 août
C’est par une invitation à une « Nuit d’ivresse », due à l’Ensemble vocal de Poche et à l’accordéoniste Nikita Pfister que débute le festival
(ve 31). Suivra le récital de deux lauréats du
Concours de Genève, la flûtiste Adriana Ferreira
et le pianiste Lorenzo Soulès (sa 1er août). La
soprano Céline Scheen et le Ricercar Consort
de Philippe Pierlot nous emmèneront aux sources
du baroque (di 2), Trois membres du Quatuor
Schumann joueront un Trio de Beethoven, puis,
avec François Grin un Quatuor d’Arensky, et le
Trio de Gideon Klein, mort à Auschwitz à l’âge
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avant le concert du soir, confié au célèbre
Quatuor de Leipzig (ma 4). L’excellent Trio
Rafale de Zurich offrira des œuvres de Mozart,
de Schubert, de Schumann et de Takemitsu (me
5). Le pianiste Finghin Collins donnera un récital d’œuvres de Chopin (je 6) et se produira aussi
en compagnie du Quatuor Terpsycordes, qui
jouera le Quatuor No 1 « de ma vie » de Smetana
et le Quintette No 2 de Dvorak (sa 8). Le Geneva
Brass Quintet présentera un programme adapté à
l’intimité de la chapelle des Haudères (ve 7). Le
violon baroque d’Amandine Beyer et ses
fameux Gli Incogniti mettront une fin en
« Apothéoses » au festival, avec des œuvres de
Couperin, de Rebel et d’Elisabeth Jacquet de La
Guerre (di 9 à 18h).
Pour sa 12e édition, le festival affiche 13
concerts « Autour de la Variation », dans le cadre
magique du cloître de la Collégiale. Au jeune
Lorenzo Soulès est confiée la soirée d’ouverture
(di 2). Le lendemain, Mikhail Sporov rendra
hommage à Scriabine, mort il y a cent ans (lu 3).
Alexei Volodine proposera notamment la Sonate
“Reminiscenza“ de Medtner et la Grande Sonate
Op.37 de Tchaïkovski (ma 4). A la pianiste croate Martina Filjak (me 5) succédera Philippe
Cassard (je 5). Le duo jurassien de Jessica
Marquis et Dominique Schwimmer présentera
des pièces à 4 mains et en solo (à 17h), avant la
carte blanche donnée à la Présidente de la
Confédération Simonetta Sommaruga, pour le
concert du soir (ve 7 à 20h30). Christine BaumeSanglard et Dana Ciocarlie, piano à 4 mains, et le
jeune quatuor à cordes Van Kuijk se produiront à
deux reprises, avec deux créations de Roger
Meier (sa 8 à 16h et di 9 à 14h). Le spectacle Une
femme en guerre verra la comédienne MarieChristine Barrault lire des textes de Colette et
Clara Malraux et le pianiste Hugues Leclère
jouer des pièces de compositrices des années
1911 à 1919 (sa 8 à 20h30). Nelson Goerner sera
l’ invité spécial du festival (di 9 à 17h). Une tribune de jeunes artistes se tiendra de 11h à 17h,
avant le récital du soir de Michel Dalberto (ma
à 20h30). Enfin, l’Orchestre international de
Genève, conduit par Alexei Ogrintchouk, animera la « Nuit du concerto » qui conclut chaque
année le festival (me à 20h à la Collégiale).
Infos sur : www.crescendo-jura.ch
Yves Allaz
Céline Scheen
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festival amadeus
Fin de partie de
campagne
Ainsi, les meilleures choses ont parfois une fin. En effet,
la quinzième édition du Festival Amadeus sera la dernière du nom, ultime occasion de retrouver la Grange
de la Touvière à Meinier. Puisque ce lieu sera voué désormais uniquement à son activité agricole.
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Programme :
- vendredi 28 août à 20h30 : ENSEMBLE MATHEUS, dir. et violon JeanChristophe Spinosi (Vivaldi, Telemann)
- samedi 29 août à 20h30 : QUATUOR BELCEA & VALENTIN ERBEN violoncelle (Mozart, Webern, Schubert)
- dimanche 30 août à 19h : ADAM LALOUM, piano (Mozart, Schubert,
Schumann)
- mardi 1er septembre à 20h30 : ENSEMBLE LES DISSONANCES & DAVID
GRIMAL violon (Mozart)
- mercredi 2 septembre à 20h30 : RAPHAËL SÉVèRE, clarinette, JEANFRÉDÉRIC NEUBURGER, piano, FRANçOIS SALQUE, violoncelle (Beethoven,
Berg, Bernstein, Brahms)
Avant de lever quelques derniers verres au souvenir des festivals passés, après 28 années de labeur et de bénévolat biennal sous les directions
successives de William Naboré, Jérôme Capeille, Catherine Courvoisier,
François Hudry, Karine et Saskia Lethiec, Alexandre Tharaud, Claire
Brawand et Eve-Anouk Jebejian, on prendra donc rendez-vous dès fin
août dans la campagne genevoise pour ce programme concocté par EveAnouk Jebejian.
C'est une programmation éclectique qui est proposée, mêlant les genres et les époques, du baroque au contemporain, classique bien sûr mais
avec une incursion vers le jazz. Et si Mozart bien entendu sera à l'affiche,
Schubert sera souvent au programme. Côté contemporain, William Blank
proposera un projet spécifique pour le festival que l'on pourra entendre
également à la Biennale de Venise grâce à la collaboration avec le compositeur Ivan Fedele.
Adam Laloum
- jeudi 3 septembre à 20h30 : ENSEMBLE RARO & OLIVIER DARBELLAY cor
(Schreker, Brahms, von Dohnanyi)
- vendredi 4 septembre à 20h30 : EKLEKTO (Reich)
- samedi 5 septembre à 20h30 : COMPAGNIE ARCOEM
- dimanche 6 septembre à 9h : petit déjeuner en musique
- dimanche 6 septembre à 12 h : CHœUR DE MEINIER & MICHEL
TIRABOSCO, flûte de pan (Vivaldi, baroque mexicain)
- dimanche 6 septembre à 17h : CABARET FRIMOUSSE
- mardi 8 septembre à 20h30 : ENSEMBLE VOCAL DE POCHE & MARGARET
HARMER, cloches médiévales (Pärt, Byrd)
- mercredi 9 septembre à 20h30 : WERNER GüRA, ténor, FABRIZIO
CHIOVETTA, piano (Schumann, Schubert)
- jeudi 10 septembre à 17h : LÉMANIC ENSEMBLE, dir. William Blank,
MATTHIAS ARTER, hautbois (Antignani, Blank, Riparbelli, Benjamin)
- jeudi 10 septembre à 20h30 : TRIO WANDERER (Schubert)
- vendredi 11 septembre à 20h30 : JAN LUNDGREN TRIO & GREGOIRE
MARET, harmonica
- samedi 12 septembre à 20h30 : CAMERATA ARMIN JORDAN, dir. Benoît
Willman, PHILIPPE CASSARD, piano (Ibert, Mozart, Schubert)
Frank Fredenrich
Loc. Très Classic 022 781 57 60
Quatuor Belcea © Ronald Knapp
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entretien
Jean-Christophe Spinosi
Chef d’orchestre et violoniste, Jean-Christophe Spinosi revient à ses
premières amours pour le concert d’ouverture du Festival Amadeus : la
musique baroque, dans laquelle il avait fait ses premières armes, avec un
florilège d’œuvres concertantes. Une sorte de retour aussi à ce festival, et à
son esprit, ce festival où lui et son ensemble Matheus avaient déjà fait leur
apparition il y a une vingtaine d’années.
Pouvez-vous présenter les idées qui
ont gouverné le programme de ce concert
d’ouverture du Festival Amadeus ?
C’est un programme très dense, avec beaucoup
d’engagement, à travers ces concertos qui sont
tout à la fois virtuoses et expressifs. L’idée aussi
de ce programme est de revenir sur ce que l’on
avait fait il y a fort longtemps au Festival
Amadeus, à la fin des années 90. Le lieu est
extraordinaire, et je me souvenais de sa bonne
ambiance ; j’ai alors pensé qu’il
fallait que l’on reste dans un sujet
festif. Ce sont donc des œuvres qui
demandent une grande participation des interprètes, propre à mettre le public en joie si je puis dire.
Le programme est ainsi de la première moitié du XVIIIe siècle, du
grand baroque. Comme nous faisons beaucoup d’opéras avec mon
ensemble Matheus, ici nous
essayerons de reconstituer une
sorte de dramaturgie, à partir de
musique purement instrumentale
certes, mais dans un sens presque
opératique avec nos solistes. Ainsi pour les flûtistes des concertos de Vivaldi et du concerto de
Telemann, et les deux violonistes du concerto
de Vivaldi, qui est le plus beau de tous les
concertos pour deux violons de Vivaldi. Très
peu connu pourtant. Une œuvre magnifique
qu’on n’entend jamais, ni au concert ni au
disque.
Alors, vous-même, comment avezvous mis la main sur cette œuvre si peu
connue ?...
Dans les années 90, justement, aux débuts de
notre groupe Matheus, je cherchais la matière à
un répertoire personnel, et donc des choses intéressantes mais que l’on n’avait pas l’habitude
d’entendre. Ce qui a donné lieu à différentes
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redécouvertes, dans le domaine de l’opéra mais
aussi du concerto. C’est le cas de ce concerto,
aujourd’hui encore quasi inconnu. Il présente la
particularité d’avoir une grande cadence finale
pour deux violons. Une cadence complètement
délirante, où les deux violons donnent l’impression d’improviser, alors que ce n’est aucunement improvisé. Une chose unique dans l’œuvre de Vivaldi, comme dans le répertoire des
concertos.
Jean-Christophe Spinosi © Jean-Baptiste Millot
Et pour les autres œuvres ?...
Vous savez que notre ensemble Matheus s’attaque à tous les répertoires, de Monteverdi jusqu’à la musique contemporaine. Et à chaque
fois en faisant appel à des instruments appropriés : ancien, classique, romantique, moderne,
en fonction du répertoire. Nous avons donc
voulu, dans ce cas, un retour au baroque combiné à ce retour au Festival Amadeus. À la façon
d’un aria da capo, avec son retour à la partie
initiale. Mais ce retour est légèrement différent,
riche de l’information précédente. Il y a donc
ces pages concertantes de Vivaldi, mais aussi de
Telemann. Telemann est cas un particulier, en
ce sens qu’il était encore plus prolifique de
Vivaldi. On parle d’un millier d’œuvres ! Ces
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gens composaient vite, plus vite qu’à notre
époque. Vivaldi se vantait de composer un
concerto plus rapidement que le copiste mettait
à le recopier ! Une capacité de produire incroyable ! Dans sa multitude de concertos, Telemann
s’est donc essayé à des combinaisons différentes. Et souvent sans frein dans l’imagination de
formules qui sortaient des habitudes. On pense
que cela provient de sa formation, en partie
autodidacte. Ainsi de ce concerto, assez génial,
avec deux flûtes qui prennent des chemins inattendus. Un feu d’artifice annoncé !
Dans ces œuvres, il y a des solistes :
deux flûtistes et deux violonistes. L’un des
violonistes solistes, est-ce vous ?
Oui. Car je suis violoniste. Et c’est aussi pourquoi je me suis tant intéressé à Vivaldi, qui était
également violoniste.
Vous dirigez donc à partir du violon…
Tout à fait. Mais je serai en compagnie de l’autre
violoniste soliste, Laurence Paugam. Pour les
concertos pour flûtes, j’aurai Alexis
Kossenko et Julie Huguet. Ce sont
des gens qui travaillent régulièrement avec nous. Alexis a aussi la
particularité d’être par ailleurs chef
d’orchestre. Les instrumentistes
deviennent aujourd’hui de plus en
plus polyvalents, un peu comme au
XVIIIe siècle. Ce qui serait aussi
mon cas. Par exemple, pour ce
concert, je dirigerai à partir du violon, et parfois le lâcherai. Dans une
manière qui paraîtra improvisée,
mais qui ne l’est pas du tout.
J’essaye de retrouver cet esprit multitâche qui était celui de l’époque. Et qui en général provoque une certaine énergie.
Avez-vous, à la suite, d’autres projets
en Suisse ?
Je dois diriger la saison prochaine le Comte Ory
de Rossini, avec Cecilia Bartoli, à l’Opéra de
Zurich. Mais je serai cette fois à la tête de l’orchestre La Scintilla. Pour la Suisse romande, en
revanche, rien ne semble prévu dans un avenir
proche.
Propos recueillis par Pierre-René Serna
28 août à 20h30. Ensemble Matheus
& Jean-Christophe Spinosi direction
Loc. Très Classic 022 781 57 60
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tion, suscite donc inévitablement une forme de
frustration.
fondation martin bodmer, cologny
Butor et le livre
d’artiste
Qu’est-ce qui vous pousse à poursuivre ces collaborations ?
À mon âge, je pourrais décider de prendre ma
retraite et de cesser d’écrire. Mais ces collaborations avec des artistes me rajeunissent. Elles
m’aident à rester vivant. Les dialogues que j’entretiens avec ces artistes à travers ces collaborations me poussent toujours à faire quelque
chose de différent.
Depuis le 12 juin, la Fondation Martin Bodmer expose une sélection de
quarante livres objets et livres d’artistes offerts par Michel Butor à la
Fondation. L’écrivain, qui depuis Degrés, a tourné le dos à la forme
romanesque, évoque sa pratique du livre objet et du livre d’artiste.
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Où se situe la différence entre un livre
objet et un livre d’artiste ?
À quand remonte votre première collaboration avec un artiste ?
On parle de livre objet pour définir un objet
dont l’apparence ressemble peu à celle d’un
livre, bien qu’il en soit un. Par exemple, un livre
en forme de colonne sera appelé livre objet. En
revanche, on utilise le terme « livre d’artiste »
pour désigner un livre de dialogue entre un écrivain et un artiste. Il arrive parfois que les deux
partenaires n’en fassent qu’un. C’est le cas des
écrivains qui sont également les illustrateurs de
leurs propres livres. Toutefois, les définitions de
ces deux termes sont très étanches.
En 1962, Enrique Zanartu exposait à Paris à la
Galerie du Dragon, devant laquelle je passais
très souvent lorsque je me rendais aux Editions
de Minuit. Un jour, un marchand m’a proposé
d’écrire un texte pour accompagner le tirage
d’une série d’eaux-fortes de l’artiste. J’ai accepté et nous avons fait un livre ensemble, qui s’appelle Rencontre. Mais ma première collaboration remonte il y a plus loin encore : pendant
l’Occupation, lorsque j’étais soutier, j’avais
réalisé un livre à propos de Noël avec un ami.
Nous avions gravé les
images et les textes sur
lino. C’était déjà une sorte
de livre d’artiste !
Comment
se
déroulent les collaborations ?
Chaque collaboration est
une aventure différente.
Elles sont toujours le fruit
d’une rencontre. Souvent,
un artiste fait un livre et
me le soumet. Ces livres
sont pour moi des sortes
de questions auxquelles je
suis invité à répondre. Le
défi est de parvenir à s’installer à l’intérieur du livre.
Ce sont toujours sa
contemplation et sa manipulation qui stimulent
mon écriture. La différence essentielle du livre, par
rapport à d’autres supports
comme l’estampe, est d’être manipulable. Il invite
au mouvement. Voir des
livres derrière des vitrines,
comme dans cette exposi-
Un des livres d’artiste de Michel Butor
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Dans Les Mots dans la peinture, publié
chez Skira en 1969, vous avez montré qu’il
n’existe pas de vision pure et que l’image est
toujours encadrée par du discours. Votre
pratique du livre d’artiste l’illustre parfaitement.
Il n’y jamais rien de pur, et encore moins de
vision pure (rires)! On oppose souvent le texte à
la peinture, mais ces deux domaines ne cessent
en réalité d’interagir. Au Moyen Âge, les textes
étaient accompagnés d’illustrations et les initiales elles-mêmes étaient décorées. De même, les
livres d’images, comme les atlas de géographie,
contiennent toujours des légendes qui nous
aident à décoder les illustrations.
À l’ère du numérique, la pratique du
livre objet et du livre d’artiste vous permet
d’affirmer la singularité de l’objet livre, dont
vous mettez en évidence la matérialité.
Nous nous trouvons à un tournant majeur de
l’histoire du livre. Le support numérique représente quelque chose de totalement neuf. Pour
prendre conscience de la nouveauté de ce support, il me paraît utile d’étudier ce qui l’a précédé. À mes yeux, le livre d’artiste représente justement une bonne manière de réfléchir au support livresque traditionnel que nous avons
connu, d’en explorer les potentialités qui jusque
alors n’avaient pas été révélées. Il permet d’attirer l’attention sur le médium lui-même, que
l’on a tendance à oublier pour se concentrer sur
le message. Or, il est parfois bénéfique d’arriver
plus lentement au contenu, en s’attardant d’abord sur l’objet livre.
L’exploration des possibles qu’offre le
livre numérique vous attire-t-elle ?
Ce serait passionnant, mais je suis trop vieux. Je
laisse cela à mes petits-enfants (rires).
Propos recueillis par Emilien Gür
Butor et le livre d’artiste, Fondation Martin Bodmer, 1921 route Martin Bodmer, 1223 Cologny
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expos itions
fondation beyeler, riehen
Marlene Dumas
L'exposition rétrospective présentée à la Fondation Beyeler célèbre 40 ans de
l'œuvre de Marlene Dumas. Un remarquable ensemble d'une centaine de toiles
et dessins montre le trajet original de cette peintre sud-africaine installée aux
Pays-Bas. La présentation à Bâle est l'aboutissement d'une collaboration
exceptionnelle entre l'artiste, le Stedelijk Museum d'Amsterdam et la Tate
Modern de Londres.
Cette rétrospective, considérée comme la
plus vaste jamais consacrée en Europe à Marlene
Dumas, confirme le succès de cette sexagénaire
devenue, depuis sa participation remarquée à la
Biennale de Venise en 1995, une leader du marché de l'art. Pourtant son œuvre est née à contrecourant du contexte résolument abstrait des
années 1980, elle s'est fait une place à part en
choisissant de peindre uniquement la figure
humaine. Dumas propose non pas une figuration
à vif inspirée directement d'un modèle vivant,
mais plutôt celle tirée des images. C'est du reste
un aspect que souligne l'exposition de Bâle en
aménageant une salle exclusivement consacrée
aux documents de travail de l'artiste. En effet,
celle-ci a régulièrement constitué des archives
personnelles composées de polaroïds, de coupures de presse, de photos de revues et d'images de
films, qui ont pour la plupart servis de sources
aux œuvres exposées. Souvent annotées et redessinées, ces notes iconographiques mêlent autant
des événements de la société contemporaine que
des informations people. Une habitude qu'elle
développe dès 1976, lorsqu'elle quitte à l'âge de
23 ans l'Afrique du sud sous l'apartheid et s'installe à Amsterdam où elle découvre fascinée le
pouvoir des médias et son flot d’images.
(1994) qui représente une enfant nue debout, le
visage figé et le regard sombre, avec des mains
colorées dans des teintes allant du rouge saturé
au violet et le ventre dans un bleu délavé.
Dumas s'est inspirée d'une photographie personnelle, l'image devient non pas simplement
celle de sa fille aux mains couvertes de peinture, mais peut-être celle d'une meurtrière aux
corps et les physionomies en fonction des turbulences de leurs sentiments. Une dramaturgie
sans superflu qui dégage une émotion bien souvent tragique. Que ce soit ces petits portraits
Black Drawings (1991/92) - quasi intimistes réalisés au lavis à l'encre de Chine, ces figures
déclinées en des masques de couleurs vives
peints à l'huile dans The Teacher (1987), ces
impressionnantes séries Jesus Serene (1994) ou
Magdalena (1995), dans laquelle des nudités
féminines se mêlent à divers visages dont celui,
fameux, de Naomi Campbell, les représentations demeurent à chaque fois étonnamment
inquiétantes. Un aspect que Dumas développe
de manière puissante dans ses portraits, tel celui
de cette femme déchirée par les larmes, ceux
plus ambigus des figures de Phil Spector,
Osama Ben Laden, Amy Winehouse, ou lorsqu'elle utilise une palette rouge et noir pour
peindre la tête renversée d'une terroriste abattue
dans Dead Girl (2002). La mort est à l'évidence
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The Image as Burden
Ce laboratoire d'idées révèle que Marlene
Dumas est aussi une infatigable dessinatrice.
Même si sa peinture ne s'appuie sur aucun croquis ou dessin préparatoire, son art pictural procède de cet exercice. Déjà dans ses œuvres de
jeunesse, elle s'exprime sur le papier; l'aquarelle
et le lavis à l'encre servant d'abord une œuvre
abstraite qu'elle abandonne pour placer définitivement la figure au cœur de son expression. Un
choix qui va élargir son travail vers des sujets
parfois tragiques et une approche torturée et souvent énigmatique de la représentation humaine.
L'exposition reprend des œuvres majeurs,
dont bien sûr la fameuse toile The Painter
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Marlene Dumas «The Teacher (Sub A)», 1987 . Huile sur toile, 160 x 200 cm
Collection privée © Marlene Dumas. Photo: Peter Cox, © 2015, ProLitteris, Zurich
mains couvertes de sang. Ce sont ces glissements de sens et de perception qui intéressent
l'artiste. Elle a d'ailleurs intitulé cette rétrospective, The Image as Burden (l'image comme fardeau) inspiré du titre d'un petit tableau de 1993
représentant une personne portant quelqu'un
dans ses bras, un peu comme une pietà.
Les sujets flirtent bien fréquemment avec
des données politiques ou religieuses, mais l'artiste se refuse à relater pour autant un message,
elle transforme, fractionne, disproportionne les
a
l
i
t
une préoccupation latente à tout son travail,
qu'elle a mise à l'honneur actuellement au
pavillon central de la Biennale de Venise avec
une série de petites huiles représentant des crânes.
Nadia El Beblawi
Fondation Beyeler, Riehen. Marlene Dumas, The Image
as Burden, jusqu'au 6 septembre 2015
é
expos itions
FRANCE
en
franc e
magicien de la dentelle. Jusqu’au
31 août.
Le
Cannet
Musée Bonnard : Henri Manguin
Cassel
Annemasse
Musée de Flandre : La Flandre
Villa du Parc : Constellation.
l
l
Jusqu’au 20 septembre.
Arles
Divers lieux : Les Rencontres
l
photographiques - premier festival
international de photographie. Du
6 juillet au 20 sept.
et la mer - de Pieter l’Ancien à Jan
Brueghel de Velours. Jusqu’au 12
juillet.
Cateau-Cambrésis
Musée Matisse : Geneviève
l
Claisse. Jusqu’au 20 septembre
Evian
Avignon
Palais Lumière : Jacques-Emile
Collection Lambert : Patrice
l
l
Chéreau, un musée imaginaire. Du
4 juillet au 11 octobre.
Blanche. Peintre, ecrivain, homme
du monde. Jusqu’au 6 sept.
Giverny
Bastia
Musée des impressionnismes :
Musée : 130 ans de création
l
l
joaillière à Bastia - l’atelier Filippi.
Jusqu’au 19 juillet 2016
Beauvais
Galerie nationale de la tapisserie:
l
Amour. Tours & Détours. Jusqu’au
16 août.
76 Bordeaux
Galerie des Beaux-Arts
:
Bordeaux – Italie. Echanges &
visions artistiques - XVIIe-XXe siècles. Jusqu’au 7 septembre
l
Calais
Cité internationale de la den-
Degas, un peintre impressionniste?
Jusqu’au 19 juillet. Photographier
les jardins de Monet. Cinq regards
contemporains. Du 31 juillet au 1er
novembre
Grenoble
Musée de Grenoble : De
l
Picasso à Warhol - Une décennie
d'enrichissement des collections.
Jusqu’au 30 août.
Landerneau
Fonds H. et E. Leclerc : Alberto
l
Giacometti. Jusqu’au 25 octobre.
l
telle et de la mode : Balenciaga,
l
- Un Fauve chez Bonnard. Jusqu’au
31 octobre.
Lens
Le Louvre : D’Or et d’ivoire l
relations artistiques entre Paris et
la Toscane, 2e moitié du 13e s.
Jusqu’au 28 sept. Métamorphoses.
Carte blanche à Bruno Gaudichon.
Narcisse, Arachné et les autres....
Du 1er juillet 2015 au 21 mars 2016
Limoges
Galerie des Hospices
:
L’amour, la mort, le diable.
Jusqu’au 18 octobre
l
Musée Cantini : Hervé
Télémaque. Jusqu’au 20 sept.
l
Metz
Centre Pompidou-Metz
:
Rétrospective Tania Mouraud.
Jusqu’au 5 octobre. Leiris & Co. Picasso, Masson, Miró, Giacometti,
Lam, Bacon…. Jusqu’au 14 sept.
l
Meudon
Musée Rodin : Robert Doisneau
l
(1912-1994). Sculpteurs et sculptures. Jusqu’au 19 novembre
Montpellier
Musée Fabre : L’Âge d’or de la
l
Peinture à Naples - de Ribera à
Giordano. Jusqu’au 11 octobre
Nice
Lyon
Musée national Marc Chagall :
Musée d'Art Contemporain :
l
l
Antoine Catala. Jusqu’au 12 juillet
l Musée des confluences : Les
trésors d’Emile Guimet & Dans la
chambre des merveilles. Jusqu’au
26 juillet. A la Conquête du pôle
Sud. Jusqu’au 28 juin.
Marseille
MuCEM : Lieux saints partagés.
l
Jusqu‘au 31 août. Traces Fragments d’une tunisie contemporaine. Jusqu’au 28 sept.
Migrations divines. Jusqu’au 16
novembre.
Nice, soleil, fleurs - Marc Chagall et
la Baie des Anges. Du 4 juillet au 21
septembre
Ornans
Musée Courbet :
l
Sensations de
nature - Courbet, Pissaro, Cézanne,
Van Gogh, Bonnard, Hartung, Pénone.
Du 4 juillet au 12 oct.
Rodez
Musée Soulages
: Claude
Leveque, Le Bleu de l’œil. Jusqu’au
28 septembre
l
Musée de l’Abbaye, Saint-Claude
Pierre Lesieur (1922-2011)
Ne désespérons pas, car il reste des directeurs de musée curieux,
indépendants, courageux, qui programment des expositions avec des
artistes que l’histoire de l’art après la seconde guerre mondiale, sous
influence américaine, a relégué au second plan. Véronique Serrano,
conservateur en chef du musée Bonnard du Cannet est de cette
trempe. Elle a décidé de consacrer une exposition à Pierre Lesueur
(1928-2011), en réunissant une soixantaine de tableaux, mais aussi
dessins et carnets, autour d’une thématique régulièrement explorée
par le peintre, les “Fenêtres“ et “Ouvertures“. Pierre Lesueur est un
peintre atypique, issu de la seconde Ecole de Paris, qui n’a jamais
sacrifié aux modes, ni aux compromis. Chez lui, le figuratif confine à
l’abstraction. Le peu d’intérêt témoigné par les musées français pour
son œuvre n’oblitère en rien la qualité de sa peinture, qui prend ses
racines dans la grande tradition française. Des galeries ont régulièrement exposées son œuvre et de prestigieuses collections internationales ont reconnu très tôt la solidité de l’univers de l’artiste. Il connaît l’art matisséen des aplats colorés et sait comme Bonnard
l’alchimie des couleurs. Son sens de l’espace, la fluidité du trait, son
dessin si singulier, « cet art de l’éblouissement devant le quotidien »,
tout ceci enchante le spectateur. L’œil du visiteur est convié à prendre sa place dans la poétique de l’œuvre, à respirer avec elle.
Pierre Lesieur
«Porte ouverte sur jardin, grand mur jaune», vers 2010
Huile et pastel sur toile, Collection particulière, Adagp, Paris, 2015.
a
g
. jusqu’au 18 octobre 2015
e
n
d
a
expos itions
en
europe
Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid
Zurbaran
Une nouvelle perspective
L’exposition d’été du musée Thyssen-Bornemisza est consacrée au talentueux peintre du siècle d'or espagnol que fut Francisco de Zurbarán, un artiste
contemporain et ami de Vélasquez qui s’est distingué dans les peintures
religieuses — où son art révèle une grande force visuelle et un profond mysticisme.
Cet événement est l’occasion de proposer une nouvelle évaluation du travail
de ce peintre grâce aux nombreuses découvertes et études entreprises durant ces
dernières décennies, qui ont eu pour conséquence d’enrichir notre connaissance
de l’artiste et de son œuvre.
Zurbarán a fait l’objet de nombreuses expositions, depuis la première qui a
eu lieu à Madrid en 1905 jusqu’aux multiples événements qui ont marqué le
400ème anniversaire de sa naissance en 1998, et qui ont culminé avec l’importante exposition monographique présentée à Séville. En 1988, la rétrospective
organisée par le musée du Prado a offert un nouvel éclairage des études sur le
peintre et sa personnalité artistique, tout en révélant des ‘trous’ touchant par
exemple à la datation de quelques œuvres et à certaines périodes de sa vie. Tous
ces aspets sont maintenant mieux connus grâce aux recherches entreprises depuis
lors. L’exposition permet également de présenter des peintures qui n’ont pas
encore été publiées ou d’autres récemment attribuées au peintre, ou d’autres
encore spécialement restaurées pour l’occasion
. Jusqu’au 13 septembre 2015
Zurbarán «Santa Marina», vers 1640-1650. Huile sur toile, 111 x 88 cm. Collection
Carmen Thyssen-Bornemisza en prêt gratuit au Musée CarmenThyssen de Malaga
Bruxelles
Rouen
Bozar : Les Belges. Une histoire
Musée dest beaux-arts : Trésors
l
l
de Sienne. Aux origines de la
Renaissance. Jusqu’au 17 août.
de mode inattendue. Jusqu’au 13
septembre.
Ferrare
Wingen
Palazzo dei Diamanti : La rose de
Musée Lalique : 1715 - 2015 : les
l
l
300 ans du Hochberg. Jusqu’au 1er
novembre
feu. La Barcelone de Piccaso et
Gaudi. Jusqu’au 19 juillet.
l
l
Florence
Yerres
Galleria degli Uffizi
Propriété Caillebotte : Les
Rouart. De l’impressionnisme au réalisme magique. Jusqu’au 5 juillet
AILLEURS
: La
Barcelone de Picasso et Gaudi.
Jusqu’au 19 juillet.
Francfort
Städelmuseum : William Hogarth.
l
Jusqu’au 6 septembre.
Aoste
Londres
Centre Saint-Bénin : Antonio
British Museum : Définir la beaul
Canova. Jusqu’au 11 octobre.
Bilbao
Musée Guggenheim : Jeff Koons,
l
rétrospective. Jusqu’au 27 sept.
Jean-Michel Basquiat - Le moment
est venu. Du 3 juillet au 1er nov.
Brescia
Musée de Sainte Julie : Brixia
l
- Rome et les gens du Po. Une rencontre de la culture - 3e au Ier s. av
JC. Jusqu’au 17 janvier 2016.
a
g
l
té - le corps dans l’art de la Grèce
antique. Jusqu’au 5 juillet. Histoire
des Indigères australiens. Jusqu’au
2 août. Bonaparte et les Anglais propagande et imprimés d’époque. Jusqu’au 16 août
l Courtauld Gallery : Jonathan
Richardson
par
lui-même.
Jusqu’au 20 septembre.
l National Gallery : Frames in
Focus - Sansovino Frames.
Jusqu’au 13 septembre.
e
n
National Portrait Gallery : BP
Portrait Award 2015. Jusqu’au 20
septembre.
l
Amour et vie. Jusqu’au 27 juillet
Musée Capitolin : L’âge de
l’angoisse. De Commode à
Dioclétien. Jusqu’au 4 octobre.
l
Lucques
Villa Le Pianore, Camaiore : This Venise
is Picasso, photographies de David
Giardino di Palazzo Soranzo
l
Douglas Duncan. Jusqu’au 13 septembre.
Madrid
Musée du Prado : Monumental
l
Views of Spanish Cities. The
Romantic Painter Genaro Pérez
Villaamil. Jusqu’au 6 septembre.
l Musée Thyssen-Bornemisza :
Zurbaran. Jusqu’au 13 septembre.
Milan
Palazzo Reale : Léonard de Vinci
l
1452-1519. Jusqu’au 19 juillet.
Pinacoteca di Brera : Pérugin
et Raphaël. Le mariage de la
Vierge. Dialogue entre maître et
élève. Jusqu’au 12 juillet
l
Parme
Fondazione Magnani
l
Rocca,
Mamiano di Traversetolo : “Vues de
France“ - Renoir, Monet, Cézanne,
Matisse, De Staël. Jusqu’au 13 sept.
Rome
Chiostro del Bramante : Chagall.
l
d
a
l
Cappello : Roberto Sebastian Matta,
sculpture. Jusqu’au 15 octobre.
l Le Stanze del Vetro : Verre de
Finlande, 1932 – 1973, de la Collection
Bischofberger. Jusqu’au 2 août
l Palazzo Grassi : Martial Raysse.
Jusqu’au 30 novembre.
l Peggy Guggenheim Collection:
Charles Pollock - une rétrospective.
Jusqu’au 14 septembre
l Punta della Dogana : Slip of the
Tongue. Jusqu’au 31 décembre.
l Scoletta dei Battioro : Antoni
Clavé. Jusqu’au 31 octobre.
Vienne
Albertina (Albertinapl.)
Lee
Miller. Jusqu’au 16 août. Bacon,
Warhol, Richter. Jusqu’au 23 août.
Art abstrait autrichien. Jusqu’au 6
septembre.
l Osterreichische Galerie Belvedere :
Rembrandt, Titien, Bellotto : esprit et
splendeurs de la Gemäldegalerie de
Dresde. Du 3 juillet au 11 octobre.
l
77
expos itions
Genève
Art Bärtschi & Cie : Khaled Jarrar.
l
78
Jusqu’au 11 juillet.
l Art en île - Halle Nord (pl. de l’île
1) Open Oppenheim. Du 4 juillet au
30 août.
l Blondeau & Cie (Muse 5) Mai-Thu
Perret. Jusqu’au 18 juillet.
l Centre d'art Contemporain (VieuxGrenadiers 10) Giorgio Griffa & Reto
Pulfer. Jusqu’au 23 août.
l Centre d'édition contemporaine
(Saint-Léger 18) Jason Dodge.
Jusqu’au 5 septembre.
l Centre de la Photographie (Bains
28) Fred Lonidier. Jusqu’au 30 août
l Espace JB (Noirettes 32) Cortis &
Sonderegger. Jusqu’au 31 août.
l Espace L (rte Jeunes 43) Vivanne
van Singer. Jusqu’au 17 juillet.
l Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle)
Christine Boillat, Isabelle Ménéan,
Pierre Toma, Stéphanie Jeannet L’autre réalité. Jusqu’au 19 juillet
l Fondation Bodmer (Cologny) Les
livres de la liberté. Jusqu’au 13 septembre.
l Galerie de la Béraudière (E.Dumont 2) Hommage à Lucien
Clergue, photographies. Jusqu’au
31 juillet.
l Galerie Patrick Cramer (Vieux-
en
Billard 2) André du Besset.
Jusqu’au 18 juillet
l Galerie Mezzanin (63, Maraîchers)
Dove Allouche, Ulla von
Brandenburg, Hans Walter Müller.
Jusqu’au 11 juillet
l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers
9) Claudio Moser. Jusqu’au 11 juill.
l Maison Tavel (Puits-St-Pierre 6)
Devenir Suisse – GE 200. Jusqu’au
10 janvier 2016.
l Mamco (Vieux-Granadiers 10)
Cycle Des histoires sans fin, été
2015. Jusqu’au 13 septembre.
l Médiathèque du Fonds d'Art
Contemporain (Bains 34) Histoires
en devenir. Jusqu’au 29 août.
l Musée Ariana (Av. Paix 10) Anna
Dickinson - Harmonies de verre &
Luxe, calme et volupté - Concours
swissceramics. Jusqu’au 1er nov.
l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Peintures italiennes et
espagnoles. Jusqu’au 31 décembre.
Aimer la matière. Un regard mis à
l'honneur. Jusqu’au 31 déc.
l Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin
10) Arts du Nigeria. Jusqu’au 30
août.
l Musée de Carouge (pl. Sardaigne)
Collectif Le Gac – Jean Pleinemer.
Jusqu’au 30 août.
l Musée international de la CroixRouge (Paix 17) Expériences de
vérité - Gandhi et l’art de la non-
s uis s e
violence. Jusqu’au 3 janvier 2016
Musée Rath (pl. Neuve) ‘J’aime
les panoramas’. Appropriations du
monde. Jusqu’au 27 septembre.
l Musée de la Réforme (Maison
Mallet) Le ciel devant soi. Jusqu’au
25 octobre.
l Musée des Suisses dans le monde:
Suisse-Arménie. Jusqu’au 20 sept.
l Red Zone Arts (r. Bains 40) Le
Jardin du Lettre - solo de Qiu Jie.
Jusqu’au 29 août.
l Xippas Art Contemporain (Sablons 6) Peter Halley. Jusqu’au 31
juillet.
l
Lausanne
Collection de l’Art brut (Bergières
l
11) Guy Brunet réalisateur - Les
studios Paravisio. Jusqu’au 4 oct.
l Fondation de l’Hermitage (2, rte
Signal) Marius Borgeaud. Jusqu’au
25 octobre.
l Mudac (pl. Cathédrale 6) Le verre
vivant II. Jusqu’au 1er nov. L'Eloge
de l'heure. Jusqu’au 27 septembre.
l Musée cantonal des beaux-arts (pl.
Riponne) Kader Attia. Les blessures
sont là. Jusqu’au 30 août.
l Musée de l’Elysée (Elysée 18)
reGeneration 3. Jusqu’au 23 août.
Fribourg
Espace Tinguely - Saint-Phalle :
l
Sculpture et architecture dans
l’oeuvre de Niki de Saint Phalle.
Jusqu’au 31 décembre
Mézières
Musée du papier peint : Fusions
l
- œuvres en verre contemporaines.
Jusqu’au 3 novembre.
Martigny
Fondation Pierre Gianadda :
l
Matisse en son siècle. Jusqu’au 22
novembre.
l Fondation Louis Moret (Barrières
33) Vera Molnar - Papiers. Jusqu’au
16 août.
l Manoir de la Ville : Come Closer L’art vu sous différents angles.
Jusqu’au 9 août.
Neuchâtel
Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut
l
74) Dürrenmatt à Neuchâtel.
Jusqu’au 6 septembre
l Musée d'art et d'histoire (espl.
Léopold-Robert 1) 14/18 La Suisse et
la Grande Guerre. Jusqu’au 18 oct.
l Musée d'ethnographie (St Nicolas
4 ) Secrets. Jusqu’au 18 octobre.
Vevey
Alimentarium (quai Perdonnet)
l
DETOX. Croyances autour de la
nutrition. Jusqu’au 23 août
Musée d’art et d’histoire, Genève
Peintures italiennes et espagnoles
Le Musée d’art et d’histoire possède plus de 260 peintures italiennes et une dizaine de
tableaux espagnols, du XIVe au XVIIIe siècle, qui constituent l’ensemble le plus important
d’œuvres de ces écoles en Suisse. Le MAH propose de parcourir cet été un nouvel
accrochage de ces peintures. Une sélection qui permet de redécouvrir des œuvres aussi
remarquables que méconnues.
La première salle présente quelques peintures italiennes du XIVe au XVIe siècle, en
dialogue avec la production européenne. Elle est complétée, dans la deuxième salle, par un
choix d’œuvres italiennes et espagnoles de la même période, redécouvertes dans les
réserves du musée. L’histoire des collections est racontée dans les salles sui-vantes. Une
salle consacrée à la donation napoléonienne permet de mesurer la part de l’Italie parmi les
21 tableaux offerts en 1804/1805 à la Ville, tandis que la salle suivante propose un choix
de grands tableaux du Seicento, mettant en évidence un changement de goût dès la fin du
XVIIIe siècle chez des collectionneurs privés.
Rappelons que le Musée d’art et d’histoire possède un corpus de peintures italiennes
et espagnoles à peu près équivalent à celui des peintures flamandes et hollandaises, et
représente près du double de celui des peintures françaises produites avant 1800. Il couvre
l’ensemble de la peinture italienne avec un point fort sur le XVIIe siècle, reflétant un âge
d’or dans l’histoire des collections genevoises, c’est-à-dire la fin du XVIIIe et le début du
XIXe siècle.
Francisco José de Goya y Lucientes (1746-1828)
«Le Marchand de marionnettes», vers 1793 .
Huile sur fer blanc, 44 x 33.5 cm © Musées d'art et d'histoire de Genève,
photo : Bettina Jacot-Descombes
a
g
. Jusqu’au 31 décembre 2015
e
n
d
a
expos itions
en
s uis s e
Museum Rietberg, Zürich
Un monde chatoyant
L’exposition d’été du Musée Rietberg se propose de faire découvrir au public la photographie en couleurs avant 1915, grâce aux clichés récoltés il y a cent ans par
un philanthrope français, le banquier Albert Kahn. Celui-ci a dépêché une vingtaine de photographes en Europe, en Asie, en Afrique et en Amérique, afin qu’ils documentent les différents peuples, les paysages et les monuments au
moyen d’un toute nouveau procédé technique de photographie en
couleurs, l’autochrome.
Ces 72’000 autochromes – longtemps oubliés – sont aujourd’hui
considérés comme un important jalon dans l’histoire de la photographie documentaire ainsi que de la compréhension entre les peuples.
Pour la première fois en Suisse, le Musée Rietberg présente un
choix de ce trésor prodigieusement intéressant pour l’histoire de la
photo. L’exposition permet de redécouvrir un monde à jamais révolu,
que nous ne connaissions que par des clichés en noir et blanc, et que
nous pouvons admirer ici dans des couleurs somptueuses.
Stéphane Passet, Mongolie près de Oulan-Bator, « incarnation du Jalkhanz Kuthugtu mongol »,
1 juillet 1913 - Albert Kahn, Les archives de la planète
© Musée Albert-Khan, Département des Hauts-de-Seine
Techniquement, la réalisation de ces clichés demandait un travail considérable. Il s’agissait tout d’abord d’enduire très soigneusement la plaque de verre de grains de fécule de pomme de terre teintés
en orange, vert et violet, et d’une couche d’émulsion photosensible.
Les filtres épais et la pellicule du film insensible exigeaient une
lumière solaire directe et une immobilité absolue lors de la prise. Les
poses figées et l’expression rêveuse des visages des personnes photographiées ainsi que les couleurs délicatement irisées deviendront la
marque de fabrique des archives d’Albert Kahn. Les plaques
autochromes sont très fragiles à la lumière et ne peuvent plus, pour
des raisons de conservation, être exposées.
L’exposition présente environ 80 photographies en couleurs provenant des «Archives de la planète». La plupart ont été prises en 1913/14, donc peu avant le début
de la Première Guerre mondiale. La majeure partie d’entre elles ont été réalisées par le photographe Stéphane Passet (1875–?), lequel avait entrepris en 1913 un voyage en Asie qui allait le conduire de la Grèce à la Turquie jusqu’à la Chine et la Mongolie, et finalement en Inde.
. Jusqu’au 27 septembre 2015
Musée Jenisch : L'infini du geste
- Ferdinand Hodler dans la collection Rudolf Schindler. Jusqu’au 4
octobre. Wallpaper Liberation - les
carnets de Jean-Luc Manz.
Jusqu’au 16 août.
l
OUTRE SARINE
Bâle
Cartoon Museum (St. Albanl
Vorstadt 28) Atak (Georg Barber).
Spécial, la collection de caricatures
et de bandes dessinées - le nouvel
accrochage signé Atak. Du 3 juillet
au 25 octobre.
l Fondation Beyeler (Riehen)
Alexander Calder Gallery III.
Jusqu’au 6 sept. Marlene Dumas.
Jusqu’au 6 septembre.
l Kunsthalle : Anicka Yi. Jusqu’au
16 août. Vincent Fecteau. Jusqu’au
23 août.
l Musée des cultures : Holbein.
Cranach. Grünewald. Chefs-d'œuvre du Kunstmuseum Basel - invité
du MKB. Jusqu’au 28 février
l Museum für Gegenwartskunst
a
g
(St. Alban-Rheinweg 60) De
Cézanne à Richter. Jusqu’au 21
février. Frank Stella. Peinture &
Dessin. Jusqu’au 30 août.
l Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Haroon Mirza/hrm199
Ltd. Jusqu’au 6 septembre.
l Schaulager (Ruchfeldstr. 19,
Münchenstein) The Collection of the
Emanuel Hoffmann Foundation.
Jusqu’au 31 janvier 2016
croit que je suis vivant. Du 4 juillet
au 23 août.
Interlaken
Kunsthaus : Les Caran D'Ache de
l
Picasso. Jusqu’au 30 août.
Riggisberg
Abegg-Stiftung : Le triomphe
l
des ornements. Tissus de soie du
XVe siècle italien. Jusqu’au 8 nov.
Berne
Saint-Gall
Centre Paul Klee (Monument im
Kunstmuseum : Isabelle Lartault l
Fruchtland 3) Klee à Berne. Jusqu’au
17 janvier 2016
l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr.
8-12) Max Gubler - Toute une vie.
Jusqu’au 2 août. Pierre de lumière.
Visions du cristal dans l'art. Jusqu’au
6 septembre
Bienne
CentrePasqu’Art (fbg Lac 71-75)
l
Michael Sailstorfer. Du 5 juillet au 13
septembre.
l PhotoforumPasqu’Art : Cécile
Hummel - Open Spaces &
Alexandra Catiere - Personne ne
e
n
l
Michel Verjux. Jusqu’au 26 juillet.
Soleure
Kunstmuseum : Peter Stoffel.
l
Jusqu’au 14 juin.
Spiez
Schloss : Picasso -
Des arlequins, des femmes et des corridas. Du 5 juillet au 27 septembre.
l
Weil
/ Rhein
Vitra Design Museum : Making
l
Africa. A Continent of Contemporary
Design. Jusqu’au 13 septembre.
d
a
Winterthur
Fotomuseum : Beastly / Tierisch.
l
Jusqu’au 4 octobre.
l Museum Oskar Reinhart
(Stadthausstr. 6) The English Face Portraits miniatures. Jusqu’au 15
juillet.
Zurich
Kunsthaus (Heimpl.1) Europe ...
l
l’avenir de l’histoire. Jusqu’au 6
septembre. Incertitude de la conscience - une collection privée.
Jusqu’au 4 octobre. John Waters How much can you take ? Du 14
août au 1er novembre. Un âge d’or.
Du 28 août au 29 novembre.
l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Cose fragili - Verre de
Murano. Jusqu’au 13 septembre.
l Museum Rietberg (Gablerstr.
15) À cordes et à corps - Instruments
de musique de l'Inde. Jusqu’au 9
août. Un monde chatoyant - la
photographie en couleurs avant
1915. Jusqu’au 27 septembre. SEPIK
- Art de Papouasie - Nouvelle
Guinée. Du 10 juillet au 4 octobre.
79
expos itions
musée de l’élysée, lausanne
La photographie sous
le signe de la diversité
80
phie avec le risque que l'image à force d'être trop
assise dans une réflexion manque parfois de
spontanéité. Cette tendance n'échappe guère à
une globalisation de l'expression artistique, mais
est aussi un écho fascinant de notre époque.
Affabulation
Le jeu de l'affabulation dans l'image est
abordé avec beaucoup de légèreté par Silin Liu
(Chine) qui se met en scène avec des célébrités
Le musée de l'Elysée célèbre ses 30 ans en prévoyant son installation à
disparues. On y reconnaît Simone de Beauvoir,
quelques pas de la gare et en organisant une exposition qui donne la parole à
Andy Warhol, Charlie Chaplin, Grâce Kelly…
une cinquantaine de jeunes photographes sélectionnés dans des écoles du
des souvenirs et des sensations que quiconque
monde entier. Cette nouvelle génération ne pose plus forcément son regard à
évalue facilement. Plus poétique est la transfigutravers un viseur photographique, elle préfère construire l'image et la
ration des souvenirs d'Emilie de Battista (Suisse)
mettre en situation.
qui projette des photos de famille sur des plaques
C'est avec une belle perspective d'avenir que représentent pourtant 25 nationalités. Ils étudient de glace en train de fondre. Dans ses clichés
le Musée de l'Elysée fête ses 30 ans. L'institution dans des pays aussi différents que l'Inde, la Nobukho Nqaba (Afrique du Sud) se joue des
lausannoise a en effet le privilège, avec le Musée Pologne, la République Tchèque, le Cambodge symboles de l'errance et de la pauvreté que sont
cantonal des Beaux-Arts et le Musée de design et ou la Nouvelle Zélande, sans oublier la Suisse, devenus ces gros sacs en plastique à motif de tard’arts appliqués contemporains, de faire partie du les Etats-Unis et le Royaume-Uni, mais se régé- tan rouge, blanc et bleu fabriqués en Chine.
fameux Pôle muséal prévu
Murs, table et lit, la jeune
à l'horizon 2018-2022 et
femme tapisse son intérieur
dont le premier coup de
de ces sacs ou, à l'inverse,
pioche sera donné cet été.
l'ensemble de ses affaires y
Un écrin architectural de
sont empaquetés. Les quesquelques 22'000m2 qui
tions autour de l'identité
servira les ambitions cultusexuelle tout comme le clivarelles européennes de la
ge des cultures occidentale et
capitale vaudoise et fera,
orientale sont mises en paralsans doute, rêver la
lèle dans une vision lancinanGenève internationale dont
te et presque dérangeante de
la rénovation et l’agrandisMichael Liani (Israël). Quant
sement du musée d'art et
à Piotr Zbierski (Pologne), il
d'histoire peinent toujours
mêle avec une très belle sensià se faire entendre.
bilité des anciennes techMais la promesse d'un
niques photographiques au
nouveau lieu va de paire
son et à la vidéo pour réinventer des instants sentimentaux.
avec la poursuite d'une
Au fil des propositions se
interrogation sur la photodessinent de véritables petits
graphie contemporaine,
mondes où se brouillent les
notamment à travers ce
pistes entre réalité et fiction.
troisième volet d'un projet
Une diversité qui peut déraninternational entamé en
ger, mais qui pose un jalon
2005.
Rachel Cox, «Don’t Smile, Smile», de la serie «Shiny Ghostst», 2012 © Rachel Cox
intéressant dans le paysage de
L'exposition
la photographie contemporaireGeneration préfigure de
ce que pourrait être la création de demain en s'ap- nèrent pourtant aux mêmes sources. L'image ne. Du reste une tournée internationale de l'expopuyant sur les travaux de candidats choisis parmi photographique se dématérialise au profit du sition est prévue, comme pour ces deux précéles meilleures écoles d’art et de photographie.
multimédia, une tendance certainement liée à un dentes éditions présentées à la galerie d'Aperture
La sélection 2015 réunit des expressions type d'enseignement et à ce que certains définis- Fondation à New York, au Caochangdi
associant l'image à une grande variété de tech- sent comme les Visual Studies qui amènent ces Photospring Festival à Pékin et aux Rencontres
niques et de disciplines, la photographie est pen- apprenants à s'interroger sur la pluralité des sens d’Arles.
Nadia El Beblawi
sée le plus souvent dans le contexte d'une instal- de l'œuvre artistique et a y inclure nécessairelation. Une approche quelque peu uniforme du ment la perception du spectateur. Une approche
processus artistique pour ces jeunes talents qui relativement nouvelle dans l'art de la photogra- reGeneration3, jusqu'au 23 août 2015
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expos itions
Inspiration-Conversation (2010) annonce en un
discours sans mot le thème central.
musée cantonal des beaux-arts, lausanne
Kader Attia
Pour la première fois en Suisse une exposition personnelle est consacrée à
Kader Attia. L'artiste franco-algérien revient sur son thème de prédilection, la
réparation, qu'il décortique à travers le prisme des rapports entre la pensée
occidentale et les cultures extra-occidentales. Son art affirme qu'entre les
strates de l'histoire il y a de quoi critiquer et de quoi rebondir.
L’exposition réalisée en étroite collaboration avec Kader Attia rassemble des œuvres
réalisées pour l'occasion et des travaux de ces
dix dernières années. Cette figure reconnue de
l'art contemporain s'exprime autant par des
installations, la sculpture, des photographies et
des vidéos. Dans cette présentation, le musée
cantonal des beaux-arts de Lausanne donne la
parole à un artiste acquis au discours intellectuel, une démarche qui ne pèse en aucun cas sur
l'exposition dont le parcours est évident. Son
œuvre interroge les rapports entre la culture, la
politique et l'identité, des notions en lien avec
son vécu franco-algérien. Il sonde ses propres
expériences entre l'Occident chrétien et le
Maghreb islamique, ainsi que les années qu'il a
passé au Venezuela et au Congo.
Réappropriation
En titrant son exposition Les blessures sont
là, Kader Attia formule l'idée que la réparation
prend la forme d'une réappropriation pour les
cultures extra-occidentales, tandis que la pensée
occidentale s'attache à effacer les blessures. De
ce paradigme, l'artiste décline des œuvres où les
objets, à l'image des blessures physique et
morale, se réparent “visiblement“.
L'entrée de l'exposition est dominée par des
bruits dont on ne découvre la provenance qu'en
atteignant la première salle. Une double projection montre deux personnes se faisant face, chacune inspirant et expirant avec force dans une
bouteille en plastique. C'est un fascinant duel,
un effort physique répétitif qui ramène pour un
court instant l'objet à son état initial.
Au bruit et au mouvement de cette première pièce s'oppose le silence de l'installation
Asesinos! Asesinos! (2014) qui fait référence
aux étudiants disparus au Mexique en septembre dernier. Paradoxe d'une foule hiératique,
formée d'une centaine de portes dressées et surplombées de mégaphones, elle semble prête à
clamer justice. Mimétisme de l'être humain ici,
ou simple témoin privilégié du discours politique et culturel de l'homme, l'objet joue un rôle
essentiel dans le travail d'Attia.
Avec Artificial Nature et Repair, Culture’s
Agency (2014) l'objet devient symbolique.
L'artiste a disposé au sol, en forme de rosace,
des prothèses de jambes des deux Guerres mondiales et tout autour une série de bustes en marbre blanc qui représentent des visages de gueules cassées de la Grande Guerre, terriblement
défigurés puis “réparés“ avec des moyens médicaux d'urgence. Attia confronte ceux-ci à des
masques africains marqués par des cicatrices,
interrogeant la proximité plastique et symbolique avec notamment l'utilisation du bois ou du
marbre selon la culture. Une ambiance perturbante mais qui ne bascule pas pour autant dans
le tragique. Cette confrontation est étayée par
un impressionnant diaporama rapprochant les
sutures des “gueules cassées“ à des objets réparés ou des cicatrices rituelles.
L'exposition est extrêmement
riche de références, comme dans
cette salle réservée aux archives de
la “culture de la peur“ ou lorsque
qu'il s'appuie sur des images de la
collection ethnographique du
Vatican pour mettre en exergue quatre entretiens soulevant des questions sur la légitimité et l'implication
historique de posséder des objets
provenant d’autres cultures. La
richesse de ses travaux répond pour
Attia a son vœu que « l'art doit amener les spectateurs à se poser des
questions, les aider à voir le monde
autrement. Une œuvre, une exposition doit avoir un message ».
Nadia El Beblawi
Musée cantonal des beaux-arts, Lausanne.
Kader Attia, Les blessures sont là, jusqu'au
30 août 2015
Kader Attia «Untitled (Couscous)», 2009
Installation. Courtoisie l’artiste et Collection FRAC Centre, Orleans Credits photo: Francois Fernandez
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musée du jeu de paume
Germaine Krull
Germaine Krull (1897-1985), bien que connue à son époque pour son travail
éditorial, n'a pas laissé de souvenirs dans l'histoire de la photographie en tant
qu'artiste créatrice. En effet, son œuvre est l’une des moins étudiées, à la différence de celle de Man Ray, Moholy-Nagy ou Kertész, ses contemporains.
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sont symptomatiques de sa vision et sa recherche formalistique:
- L’architecture métallique : grues, échafaudages, ponts, silos, vision moderniste de
l'environnement pour l'époque (1928).
- Le nu féminin : belles images, étranges
cadrages, formes plus sculpturales que « parlantes ».
- Les femmes : Germaine Krull s'intéresse
aux femmes artistes, d'où des portraits de
Colette, Berthe Bovy et autres. Ces portraits,
(est-ce le fait de l'époque ?) sont plutôt le fruit
Sa carrière, essentiellement en France, fut
courte – une vingtaine d’années. Cet « oubli »
fut aussi dû à la dispersion de ses tirages,
comme à l’absence d’un fonds d’archives complet et bien identifié. De son vivant, il y eut peu
d’expositions de son travail.
L’œuvre éditoriale de Krull est ainsi profondément marquée de formalisme, que ce soit
dans le reportage ou l’illustration ; ce qui n’exclut pas, au contraire, de participer avec les
mêmes images à des expositions où la photographie est reconnue comme une activité artistique
autonome.
Le magazine VU, lancé en 1928, auquel
elle participe dès le début (280 photographies y
sont reproduites), lui permet d’élaborer, avec
Kertész et Lotar, cette forme du « reportage »
qui lui convient tellement : une vision artistique
intégrée à l’avant-garde et une fonction médiatique et illustrative (de laquelle se nourrissent
aussi les mouvements de l'époque comme le
surréalisme ou le constructivisme).
Un destin de photographe
Dans l'accrochage du Jeu de Paume, il s’agit aujourd’hui de rendre compte de l’œuvre
multiple d’une photographe énergique, engagée
politiquement à gauche, ne craignant pas de
voyager (la carrière de Germaine Krull se termine après une longue période en Asie du Sud-Est
et au Tibet). Son travail frappe par une recherche esthétique évidente, en particulier dans ses
portraits et ses nus, cela en dépit de sa déclaration que « l’engagement photographique est à
l’opposé d’une revendication artistique ou
interprétative du type Bauhaus ou surréalisme »
(un propos qui paradoxalement ouvre son
livre Études de nu, en 1930) .
L’exposition est constituée d’environ 130
tirages d’époque, et de nombreux extraits de livres et magazines.
La présentation chronologique s’articule
autour des thèmes propres à Germaine Krull qui
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Germaine Krull, Nu féminin, 1928
Tirage gélatino-argentique, 21,6 x 14,4 cm.. Achat grâce au mécénat de Yves Rocher, 2011. Ancienne collection
Christian Bouqueret. Centre Pompidou, Paris. Musée national d'art moderne/Centre de création industrielle.
© Estate Germaine Krull, Museum Folkwang, Essen.
Photo : © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Guy Carrard
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d'une démarche plastique que psychologique
ou anthropologique comme ils le seraient
aujourd'hui.
- Les vues urbaines, notamment à Paris :
Grands magasins, vitrines, facades. Ce travail
comporte essentiellement des vues de rues et de
bâtiments, mais peu ou pas de passants, à l'opposé de la vision humaniste d'un Doisneau.
- Les mains : elle est manifestement plus
fascinée par la gestuelle de ses sujets qu'à la
recherche d'une véritable étude du potentiel
sculptural de mains.
- La partie « esprit fantasque » semble rassembler un peu tout ce qui n'entrait pas dans les
autres rubriques...
C'est avec l'œil porté sur la vie d'une
femme photographe à l'esprit indépendant pour
son époque qu'il faut voir cet accrochage dont
les tirages ont visiblement été rassemblés à
partir d'archives hétéroclites.
Les situation créées, que ce soit en une
seule prise de vue ou encore dans les combinaisons d'images des différents accrochages, sont
toutes construites sur la confrontation des corps
et de l’espace, de l’humain et du paysage. A la
manière d'un doumentaire social, ses personnages représentent plutôt des catégories que des
individus pris sur le vif : les manières d'être
dans les rues, les passants, les parcours, les sorties de bureau, etc. Les corps sont habités par
l’espace qu’ils parcourent, et vice-versa : les
paysages, même sans présence humaine, sont
façonnés par l'humain. Dans des espaces
urbains, périphériques ou en friches superbement choisis et cadrés, ils évoquent des manières alternatives d’habiter la ville, comme partagés entre l'espace intérieur et l'espace public.
Les prises de vue ne sont pas des portraits, mais
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mouvement, évoquant ce que l’artiste appelle «
la puissance du vivant ».
Cependant, Valérie Jouve ne se veut pas
dans la compassion, loin de là, mais dans l'action. Dans la construction des situations qu'elle
crée, il est visible qu'elle exprime parfois sa
colère en mettant en avant la tension entre les
distances émotionnelles, sociales, culturelles,
économiques ou politiques mises en présence.
Dans la partie de son travail intitulée « on hold »
(« en attente »), s'étant installée pour un an à
Jérusalem-Est, elle utilise sa vision pour explorer le territoire palestinien. Fascinée, elle entame un long travail, à travers la photographie et
le film : son second film, Traversée (2012), est
une forme de « roadmovie enfantin » à travers
six villes palestiniennes.captant des personnages à travers leur vie quotidienne.
Valérie Jouve :
Corps en résistance
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Valérie Jouve appartient à la génération
de ces artistes qui, en France, se sont éloignés
de la grande tradition humaniste des reportages photographiques, sans pour autant en
rejeter complètement les éléments essentiels.
Ses photographies et ses films relèvent à la
fois de l’art contemporain et du documentaire
de création.
Dans son travail elle fait jouer personnages, présents ou non, et environnement, urbain
surtout. Cette étude approfondie, intitulée
Corps en résistance, est la philosophie que
propose l'artiste dans une recherche qu'ellemême qualifie d'explorer avec des images
l'au-delà des mots et des idées reçues. Cette
exposition permet de découvrir un ensemble
conséquent d’œuvres réalisées entre la fin des
années 1980 et aujourd’hui. C'est dans les
accrochages des différentes salles, de même que
dans plusieurs vidéos et films, que l'on entre
dans la démarche de l'artiste.
Valérie Jouve parle de son travail en le
définissant par la portée de ses images :
Chaque image est une narration, chacun y trouve ce qui peut lui convenir. C'est la structure
interne de l'image qui parle et non juste « montrer des choses ». L'image est un lieu d'expérience, faite pour se projeter soi-même, se poser
des questions, une façon de se situer dans ce
monde, un questionnement très actif.
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Valérie Jouve, Sans titre (Les Personnages avec Marie Mendy), 1994-1996
Photographie couleur, 110 x 148 cm.
Collection FRAC Ile-de-France. © Valérie Jouve / ADAGP, Paris 2015
le fruit d’une étroite collaboration de l’artiste
avec un ou ses modèles autour d’une idée commune. Pour la plupart mis en scène, ils prennent
la pose au cours d’actions singulières et affirmées, de face ou souvent de dos invitant le
spectateur à prendre sa place. Ainsi, dans la
densité de situations urbaines, apparemment
anodines s'organisent des scènes hautement
chorégraphiées.
Pour résumer sa démarche et son implication dans un « art engagé », Valérie cite cette
phrase d'Hannah Arendt : l'homme est a-politique. La politique prend naissance dans l'espace qui est entre les hommes, donc dans quelque
chose de fondamentalement extérieur à l'homme.
C'est bien ce concept qui ressort de ce travail.
Christine Pictet
Quelques films de Valérie Jouve sont présentés, dont Grand Littoral réalisé à Marseille
(où elle a vécu 10 ans). Commencé en 2001 et
achevé en 2003, il propose une traversée en
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Musée du Jeu de Paume jusqu’au 27 septembre 2015
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théâtre de la ville
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théâtre des champs-élysées
Golem
Still Current
En moins de dix ans, Internet a révolutionné
comportements et mentalités. Le collectif anglais 1927
nous livre une lecture mordante de l’arrivée de ce média
dans Golem, performance pluridisciplinaire présentée
du 26 mai au 4 juin au Théâtre des Abbesses, salle
montmartroise du Théâtre de la Ville.
Le théâtre des Champs-Elysées accueillait les 19 et 20 mai
la Russel Maliphant Company pour un programme
réunissant cinq pièces courtes, Still, Afterlight, Two,
Critical mass et Still current.
Dans un décor à l’esthétique déjantée de tableaux kitsch et d’animation en pâte à modeler, les artistes du collectif 127 donnent vie à une
famille de la classe moyenne anglaise bouleversée par l’arrivée d’un
humanoïde d’argile, Golem, acheté par le fils pour exécuter les corvées.
Au gré des montées de version – pour reprendre la merveilleuse expression des éditeurs de logiciels -, Golem va ouvrir de nouveaux horizons à
l’adolescent complexé : réseaux sociaux, sites de rencontres… La version
2 fait mieux que répondre aux besoins, elle les devance et en les devançant, elle les crée. Golem est moderne, permet d’être efficace au travail,
offre un champ des possibles virtuels vertigineux mais, concrètement,
Golem isole - le garçon abandonne le groupe punk de sa sœur -, pousse à
la consommation - la grand-mère s’offre une machine à coudre aussi
sophistiquée qu’inutile. A mesure qu’il devient incontournable, Golem
«Still Current» - Photo Warren Du Preez et Nick Thornton Jones
rend passif. On ne lui sous-traite plus l’exécution de tâches mais la conduite de sa vie. Avec cette satyre émaillée de situations comiques burlesques
où musique, théâtre et danse se mêlent dans l’esprit des Monty Python, la
compagnie 127 décrypte les mécanismes des applications web et autres
réseaux sociaux et pose la question : Qui contrôle Golem - son utilisateur,
son fabricant, l’hébergeur des données qu’il centralise… – ? Surtout, qui
contrôle l’utilisateur de Golem ? Cette question ne doit pas nous laisser
indifférent alors que nous confions chaque jour à la toile, nos goûts, nos
préoccupations, notre identité.
Russel Maliphant occupe une place à part dans le paysage chorégraphique contemporain avec son style particulier issu d’une collaboration de
plus de vingt ans avec l’éclairagiste Michael Hulls où les mouvements athlétiques jouent avec la lumière. Formé à la danse classique et passionné
d’arts martiaux, le chorégraphe anglais ne cesse de se nourrir de nouvelles influences. Les œuvres ici présentées, solos et duos, sont des exemples.
Dans Still, création pour un homme et une femme, la gestuelle intègre des
mouvements issus de la street dance américaine et les corps jouent avec
une projection de lumière stroboscopique pour créer des illusions d’optique. Two est un solo rendu célèbre par Sylvie Guillem où la danseuse
cherche à s’extraire d’un cube de lumière qui la retient prisonnière.
Critical mass est un duo masculin très marquée par la dance contact et les
arts martiaux. Les mouvements sont nerveux et puissants. Ecrit pour un
homme et une femme, Still current exprime une nouvelle fois les recherches du chorégraphe sur les équilibres et la lumière. Ces courtes pièces
sont raffinées mais la recherche esthétique semble parfois prendre le pas
sur l’émotion. Conçu dans le cadre d’une commande du Sadler’s Wells de
Londres d’une soirée hommage aux ballets russes, Afterlight est d’une
autre veine. Sur la mélodie envoutante des Gymnopédies d’Erik Satie,
Thomasin Gulgec se glisse dans la peau de Vaslav Nijinski perdant la raison. Piégé par un cercle de lumière, l’artiste tourne sur lui-même comme
enfermé dans ses souvenirs. Au sol, des ombres rappellent les formes que
le danseur chorégraphe a laissées dans ses carnets. L’œuvre traduit l’enfermement et la solitude de l’artiste. L’ensemble est poignant et n’a rien
perdu de sa force.
Stéphanie Nègre
Stéphanie Nègre
La danse en été :
Rendez-vous incontournable, les Étés de la danse accueilleront cette
année du 7 juillet au 1er aout la compagnie américaine Alvin Ailey (voir le
numéro 246 de Scènes magazine). L’Opéra de Paris reprendra, du 4 au 16
juillet, L’Anatomie de la sensation de Wayne McGregor, ballet inspiré par les
toiles de Francis Bacon.
«Golem» - Photo B Mueller
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idoine style français. Seule Sophie Koch
(Genièvre) dépare, avec ses cris flottants et
faux, en force certainement mais inappropriés
au lyrisme de son rôle. Philippe Jordan suit ici
les pas de son père, Armin Jordan, qui en 1986
fut l’auteur du tout premier enregistrement de
l’opéra (faisant toujours référence). À part les
incertitudes mentionnées du premier acte, il
défend avec une science profonde, face à un
orchestre puissamment délicat, les mille détails
de la partition. Une réhabilitation tardive, mais
menée à bon terme.
opéra
Arthus couronné
Le Roi Arthus fait une entrée remarquée à la Bastille. L’opéra de Chausson y
bénéficie de solides ingrédients, côté mise en scène et restitution musicale,
propres à lui rendre pleine réparation.
Toute Belle Hélène
«Le Roi Arthus» © Andrea-Messana / Opéra national de Paris
L’Opéra de Paris reçoit le Roi Arthus.
Enfin ! Cent-vingt ans après sa composition et
plus de cent-dix après sa création. Car l’opéra
d’Ernest Chausson (1855-1899) fut achevé en
1895, mais créé au Théâtre de la Monnaie de
Bruxelles en 1903, quatre ans après la mort du
compositeur. Par la suite, l’œuvre disparut quasiment des scènes ; jusqu’à des représentations
dans nos temps actuels, comme à Dortmund en
1996, puis Montpellier, Cologne, le festival de
Bregenz, de nouveau la Monnaie (pour le centenaire de la création), et Strasbourg l’an passé.
La Bastille figure ainsi bonne dernière à offrir
cet opéra, pourtant pensé expressément pour
Paris. Il s’agit, nonobstant, d’un opéra majeur
du répertoire français ; peut-être le chef-d’œuvre de la période qui va des Troyens à Pelléas,
avec une musique qui précisément fait lien entre
Berlioz et Debussy, d’une subtile et grande
inspiration. En tout état de cause, une œuvre
très supérieure au contemporain Cid de
Massenet, vu récemment à Garnier (voir Scènes
Magazine de mai).
À la Bastille, Graham Vick signe la mise en
scène. Dans une vision actuelle qui replace
l’histoire du roi Arthus (ou Arthur ) et de son
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fidèle chevalier Lancelot, énamouré de l’épouse
d’Arthus selon ce livret un peu simple du compositeur lui-même, comme une aventure de tous
les temps : l’époux, la femme et l’amant. Le
décor, une maison et son mobilier d’aujourd’hui, les costumes, également actuels, tous vivement colorés et illuminés (chose rare, et difficile, dans les mises en scène), donnent la vérité
des mouvements et des sentiments, immédiatement transmissibles et accessibles. D’obsédantes épées marquent l’indispensable référence
légendaire, et le prétexte des combats. Suffisant
pour donner de la trame une évocation forte,
sans verser dans un incongru cinémascope (du
film Excalibur, par exemple, et que certains
peut-être attendaient…). Bien vu !
Après un premier acte assez confus, l’interprétation musicale prend son envol. Roberto
Alagna plante un Lancelot, rôle principal
davantage que le rôle-titre, de prégnante présence vocale comme il sait le faire. Thomas
Hampson livre un Arthus émouvant, malgré une
émission parfois réduite. Parmi les rôles secondaires, Stanislas de Barbeyrac (Lyonnel), Peter
Sidhom (Merlin) et Cyrille Dubois (le
Laboureur) s’acquittent parfaitement dans un
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Le Châtelet s’ouvre à Offenbach. Bien lui
en prend ! dans le cadre d’un répertoire qui
s’impose dans ce théâtre, en regard de son histoire et de sa vocation dans le panorama lyrique
parisien. La Belle Hélène, scie obligée de tous
les théâtres de France et de Navarre, trouve
donc un cadre des plus appropriés. Puisque, de
surcroît, c’est presque une lecture philologique
qui est proposée. À partir de la partition critique
récemment éditée, et avec un soutien musical ad
hoc. L’Orchestre Prométhée, un peu sec en raison sans doute de son effectif réduit, l’excellent
Chœur du Châtelet, un plateau vocal adéquat, et
une direction vive, celle de Lorenzo Viotti : et le
tour est joué, qui offre à se délecter de la veine,
souvent inspirée, d’Offenbach. Car si le bouffe
ou le grotesque domine, c’est davantage dans
les paroles et le sujet que dans la musique, sensible si on la retire de son texte et de son contexte. Gaëlle Arquez est la belle Hélène, belle par
sa prestance et son chant : la pleine et entière
justification de cette production. À côté, le Pâris
de Merto Sungu fait plus pâle figure, mais se
libère honorablement, le spectacle avançant,
dans ses traits et jolis airs de ténor léger. Gilles
Ragon mène un crédible Ménélas, quand JeanPhilippe Lafont se démène pour un Calchas
quelque peu bourbeux. Très bien venus et en
place, se situent tous les petits rôles.
La réalisation scénique de Giorgio
Barberio Corsetti et Pierrick Sorin, leur ressemble (comme dans les précédents Pop’pea et La
pietra del paragone, vus en ce même Châtelet):
avec ces images dédoublées par un écran vidéo,
d’une action sur scène minimale, mais enjouée.
Un spectacle qui honore la programmation du
Châtelet.
Lohengrin et Avenida
Le Théâtre de l’Athénée présente un diptyque lyrique contemporain, réunissant
Lohengrin, mais de Salvatore Sciarrino (né en
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«Avenida de los incas 3518» © Pierre Grosbois
«Lohengrin» © Pierre Grosbois
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1947), et Avenida de los incas 3518 de
Fernando Fiszbein (né en 1977). L’ouvrage de
Sciarrino date de 1982, depuis régulièrement
repris. Il s’agit d’un mélodrame à un seul personnage, d’après une nouvelle de Jules
Laforgue, au-dessus d’une instrumentation
toute en effluves et scintillements. La pièce de
Fiszbein est, elle, récente, de 2010 ; qui égrène
les péripéties domestiques des habitants d’un
immeuble de Buenos Aires, où vécut justement
Fiszbein, entre folie débridée et satire ; à travers
une musique cette fois acerbe et drue. La mise
en scène de Jacques Osinski se fait onirique
dans un noir ténébreux pour la première pièce,
puis trépidante comme il se doit pour la seconde, devant une vidéo ébouriffée défilant tous les
étages et toutes les situations des personnages.
Ceux-ci bénéficient de bons chanteurs, à en
croire le rendu sonore général, mais dont on
peut mal juger des qualités individuelles à travers la transmission forcée et déformée des
microphones. De même pour l’acteur Johan
Leysen, l’unique interprète de Lohengrin, pour
lequel Sciarrino n’avait au reste prévu aucune
amplification. Car c’est l’ensemble le Balcon
qui officie, avec sa mauvaise manie des sonorisations artificielles. Mais son mentor, Maxime
Pascal, ne s’en donne pas moins avec conviction dans une direction toujours assurée. On
retiendra de la soirée combien Sciarrino reste un
beau musicien, quand Fiszbein s’affirme un
librettiste particulièrement imaginatif.
son Falstaff, créé en
1799 à Vienne, qui revient sur le devant de la
scène. Ici au Théâtre Roger Barat d’Herblay, en
banlieue parisienne. Un opéra dans le style des
Mozart de Da Ponte et annonçant Rossini, loin
de la tragédie des Danaïdes. Car Falstaff recèle
bien des joyaux. À commencer par son livret,
savoureux ; qui narre les mésaventures du
bedonnant héros, à partir de trois pièces différentes de Shakespeare, dans l’exacte trame
échafaudée un siècle plus tard par l’opéra éponyme de Verdi. À croire que ce dernier et son
complice Boito sont de vulgaires plagiaires !
La musique cependant diffère, on s’en
serait douté, mais sans déchoir face à celle son
rival plus célèbre : enroulant airs et ensembles
enlevés, orchestration fine, dans une veine
Utile Uthal
Poursuivant sa quête du répertoire dit
« romantique français », le Palazzetto Bru Zane
ressort Uthal. Cet opéra-comique oublié d’un
Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817) qui l’est
presque autant, sinon pour être associé aux cérémonies révolutionnaires ou napoléoniennes et
pour son Chant du Départ, a été créé en 1806.
Festif Falstaff
L’heure d’Antonio Salieri (1750-1825)
aurait-elle sonné ? Après les Danaïdes, victorieusement ressuscitées il y a plus d’un an, c’est
a
changeante et tournoyante, conclue par de
grands finals à chacun des deux actes. Le résultat est plus que probant, servi à Herblay par un
plateau vocal aguerri et une cohérence d’ensemble qui doit au chef d’orchestre Iñaki Encina
Oyón, mais aussi à Johannes Pramsohler, premier violon et directeur des instruments d’époque du remarquable Ensemble Diderot, et à
Philippe Grisvard, chef de chant et pianofortiste. Et nous ne tarirons pas d’éloges sur Philippe
Brocard, incarnant un rôle-titre lourd (dans tous
les sens) dont il s’empare avec un brio et une
assurance exemplaires. Maria Virginia
Savastano n’est pas en reste, tant dans l’abatage
scénique que vocal. Claudia Moulin, Sébastian
Monti, Éléonore Pancrazi, Wiard Witholt et
Olivier Déjean, leur rendent fière réplique.
Le metteur en scène Camille Germser vise
au mieux et au juste. Pour retrouver l’esprit
« giocoso », il transpose ainsi l’action à notre
époque, ou plutôt une époque proche, les années
80 avec ses Freaks façon bandes dessinées
underground de Robert Crumb (Falstaff et son
acolyte) et ses bourgeois bcbg (les couples Ford
et Slender, et leur femme de chambre). Et tout
ce petit monde parfaitement campé et grimé,
dans des décors de bric-à-brac et situations croquignolettes. En plein accord avec la trame
mouvementée de l’ouvrage !
«Falstaff»
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On ne saurait parler, en l’espèce, d’un oubli
injuste, pour un ouvrage d’assez faible souffle
musical et de structure. La formule en est pourtant originale, par son orchestration d’où les
violons sont exclus, comme les aigus parmi les
voix, à l’exception d’une seule mezzo. Il en
résulte, hélas !, une couleur générale assez
monocorde, sourde plutôt que sombre. On
retient une belle ouverture tumultueuse, une
complainte d’un original style modal (le
« Chant des Bardes ») et un joli ensemble histoire de bien finir. Le mezzo solitaire Malvina
possèderait des emportements qui font songer à
Gluck, mais amoindri. Pour ce rôle qui tourne
court, comme l’œuvre : une heure quinze, y
compris de pesants dialogues parlés ; au fil
d’une histoire extravagante, d’après Ossian
(alias James Macpherson), d’un vieux chef
écossais trahi par son subalterne, Uthal, qui finit
toutefois par épouser la fille du chef…
Il n’empêche qu’il était utile de redécouvrir
«Uthal» - photo Gaelle Astier-Perret
le temps d’un concert, ici dans le cadre approprié de l’Opéra royal de Versailles, un ouvrage
seulement cité par les monographies. D’autant
que l’interprétation n’appelle que des éloges.
Jean-Sébastien Brou présente un Larmor, le
vieux chef ossianique, bien senti. Pour Uthal,
Yann Beuron distille une technique vocale de
ténor baroqueux français, avec de beaux aigus
en voix de tête. Une mention particulière pour
Philippe Nicolas Martin, le Chef des Bardes et
baryton assuré. Karine Deshayes dispense le
seul rôle féminin avec l’ardeur qu’on lui
connait. Et tous de s’avérer pareillement excellents pour les longues tirades parlées. Dépourvu
de ses pupitres féminins, le Chœur de chambre
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de Namur reste égal à lui-même ; autrement dit,
parfait. Tout comme les Talens Lyriques, sous la
vaillante battue de Christophe Rousset.
Tintagiles tintinnabulant
Dans une programmation toujours affriolante, le Théâtre des Bouffes du Nord accueille
la Mort de Tintagiles. Il s’agit de la pièce de
Maeterlinck écrite en 1894 pour un théâtre de
marionnettes, mais revisitée sous forme de théâtre musical. C’est avec son complice Christophe
Coin que Denis Podalydès conçoit le spectacle.
Avec l’incomparable talent qui lui est coutumier. Dès les premiers instants, parmi la pénombre, la musique s’installe : puisée à une quinzaine de pages, de Satie à Tobias Hume, de Bartók
à Berio, mais aussi de Jean Nougues (18751932) à Charles Loeffler (1861-1935) et Eugène
Cools (1877-1936), compositeurs qui s’étaient
inspirés de Tintagiles. Elles sont transmises et
transposées par le violoncelle d’amour et baryton à cordes de Coin, l’alto
d’amour et viole de Garth
Knox, vibrant par « sympathie », pour constituer le
halo sonore continu de la
soirée. Déjà, une part de
rêve.
Les acteurs (Adrien
Gamba Gontard, Leslie
Menu, Clara Noël et Knox
lui-même), livrent alors la
pièce dans un jeu évanescent, qui tient du murmure et
de la méditation, pour conter
les destin funeste du petit
enfant Tintagiles de retour
dans un château fantomatique. Les images de cette
allégorie à peine esquissée
oscillent dans un clair-obscur baroque, tout juste éclairé d’une bougie et
de vagues projecteurs, à travers une esthétique
picturale qui évoque Murillo ou Georges de La
Tour. Du grand art !
Ventre d’opérettes
En ouverture de son troisième festival, le
Palazzetto Bru Zane présente le Ventre de Paris.
Ou une fantaisie gastronomique, servie aux
Bouffes (sic) du Nord, sur des musiques traitant
du thème culinaire tirées d’opérettes d’Hervé,
Offenbach, Lecocq, Audran… Ou plutôt sur des
transpositions de ces musiques et de leurs traces
dans les archives, pour piano (Daniel Isoir), violoncelle (Isabelle Saint-Yves), flageolet et bas-
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son (Mélanie Flahaut), face à quatre chanteurs
autant qu’acteurs. Une appétissante comédie,
depuis les entrées jusqu’à la digestion, conçue
par le baryton de la soirée, Arnaud Marzotti.
Avec la soprano Camille Poul, la mezzo
Caroline Meng et le ténor David Ghilardi complètent avec délice le menu. À croquer !
Lyrisme suisse
L’ambassade de Suisse à Paris se permet un
concert dans un de ses beaux salons, en partenariat avec la Fondation Royaumont, avec des
mélodies d’inspiration exotique de Xavier
Dayer (compositeur maison, donc suisse, avec
des extraits de son récent opéra Contes de la
lune vague après la pluie), Maurice Delage,
Ravel et Roussel. La soprano Judith Fa et le pianiste Alphonse Cemin en délivrent tous les sortilèges. Pour rechercher, l’espace d’un soir, le
temps proustien des salons et de leurs musiques.
Le Geneva Camerata fait un saut au
Théâtre de l’Atelier, pour un vivifiant concert
intitulé « Balkan-Baroque ». Sous la battue
vigoureuse de David Greilsammer, Bach et
Vivaldi s’alternent de pages tziganes d’égale
virtuosité, servies par la dextérité du clarinettiste Gilad Harel.
Métamorphose et Guitare
Avant une fermeture d’un an (pour travaux), le Théâtre de l’Athénée clôt en beauté
avec la Métamorphose. L’opéra de Michaël
Levinas d’après Kafka, créé en 2011 à Lille,
jouit d’une imagerie somptueuse, selon l’imagination folle du vidéaste-plasticien Nieto. On
serait moins séduit par la musique lancinante
d’un Levinas mal inspiré, en dépit de l’appoint
de la technique Ircam, de chanteurs adaptés
(aux voix traitées électroniquement) et de l’ensemble le Balcon dirigé efficacement par
Maxime Pascal.
Le Guitarrero revit l’espace d’une soirée
au Théâtre de la Porte Saint-Martin. L’opéracomique de Fromental Halévy avait été créé en
1841, et mérite bien de ce retour : pour sa
musique fine et élaborée, entre jolis airs et
ensembles bien construits. Un plateau vocal
idoine, dont sortent vainqueurs Marc Larcher et
Julie Robard-Gendre, un ensemble instrumental, celui des Frivolités Parisiennes, bien animé
par la battue d’Alexandra Cravero, un scène
meublée par Vincent Tavernier de toiles et
costumes pittoresques pour cet argument dans
un Portugal de conventions : et le public de faire
un triomphe mérité.
Pierre-René Serna
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énergie à l'ampleur très confortable et très large. La sonorité si singulière
des cuivres colore d'intentions très esthétisantes l'épanchement du mouvement médian. Le chef dissimule mal une envie d'en découdre qui fait par
exemple de l'allegro con brio un corps-à-corps avec le massif vibrant des
cordes. Symbiose parfaite dans le Troisième concerto de Beethoven, avec
Emmanuel Ax au clavier. Le jeu de questions-réponses du Rondo ou la
plénitude du Largo sont autant de moments précieux que l'auditeur emporte avec enthousiasme. Cerise sur le gâteau : La Suite extraite du Chevalier
à la rose qui, à trop vouloir séduire, finissent paradoxalement par s'égarer
dans une lecture à vue (et parfois périlleuse).
Evénement multiforme et multi-lieux, le festival
Entre deux représentations du Roi Arthus, Philippe Jordan et
Manifeste-Ircam ouvre ses portes cette année avec le rare
l’Orchestre de l’Opéra de Paris proposent à Bastille un avant-dernier volet
et puissant Requiem pour un jeune poète de Bernd Alois
de leur intégrale Beethoven avec les Symphonies 6 et 8. Le couplage ne
Zimmermann, sous la baguette de Michel Tabachnik à la
surprendra personne et il faut reconnaître qu'il séduit sans réserve.
tête de la SWR de Stuttgart.
Philippe Jordan sait organiser les forces antagonistes qui font de la
Huitième symphonie une ellipse mystérieuse placée entre le mysticisme de
la Septième et la cosmogonie de la Neuvième. L'ensemble gagne progresIl n'était certainement pas nécessaire, vu la dimension déjà généreuse sivement en tension et en intensité. La battue énergique de l'allegro scherde l'œuvre, de lui adjoindre en première partie Photoptosis, partition à la zando répond à l'impeccable splendeur du Tempo di menuetto. Splendeur
vision et à l'écriture très différentes. Le Requiem trouve avec la grande également dans une Pastorale de premier ordre. L'enchâssement très
salle de la Philharmonie de Paris un écrin idéal à sa dimension monumen- architectural font de l'orage un épisode dramatique très théâtral et qu'on
tale. L'auditeur se trouve littéralement noyé dans une masse sonore multi- aurait pu croire écrit par Carl Maria von Weber ou Felix Mendelssohn.
ple et sans cesse proliférante. L'effectif démentiel présente en plus d'un
Dernier regard vers le Théâtre des Champs-Elysées avec ce premier
orchestre classique, un jazz band, un orgue, deux pianos et quatre groupes récital parisien du ténor wagnérien Klaus Florian Vogt, accompagné par le
vocaux répartis aux points cardinaux et secondés par un puissant disposi- jeune et talentueux Andris Nelsons et l'Orchestre de Birmingham. On ne
tif électronique. Les chanteurs se font également récitants pour croiser peut reprocher au programme l'inconfort d'entendre des extraits sympholeurs interventions à des enregisniques de Wagner mis bout à bout
trements dont la violence histoavec des airs célèbres. Surmontant
rique fait éclater les limites d'une
l'obstacle, le ténor allemand sait
œuvre classique. Ainsi, Joyce diacomme nul autre immerger l'audilogue avec Eschyle, Maïakovski,
teur dans le climat de recueilletandis que se mêlent les discours
ment du dernier acte de Parsifal
de Mao, Goebbels, Chamberlain…
(“Amfortas, die Wunde“ et l'ultisur fond de 9e de Beethoven et
me “Nun eine Waffe taugt“). Le fil
Hey Jude des Beatles (!).
d'argent de la voix se déploie
Contraste total au Théâtre des
admirablement dans les extraits de
Champs-Elysées, avec la lecture
Lohengrin, rôle qu'on dirait écrit
assourdissante de la Turangalîlapour lui tant il sait négocier tous
Symphonie d'Olivier Messiaen par
les pièges redoutables de la respiEsa-Pekka Salonen et son orchestration pour offrir une interprétare Philadelphia. Le chef scandination de haut vol. “Höchstes
Klaus Florian Vogt
ve prend à revers les options d'un
Vertrauen hast du mir schon zu
Mariss Jansons, entendu la saison précédente dans ce même lieu. Adieu danken“ ou, bien sûr, le très attendu “In fernem Land“ sont accueillis dans
donc, les couleurs et les variations chatoyantes de cette partition inclassa- un impressionnant silence de salle et des salves d'applaudissements
ble qui convie sur le devant de la scène un duo piano-ondes Martenot ininterrompus dès la dernière barre de mesure. Pour un peu, on en oublieassez désuet. Depuis les premiers coups de marteau en guise de percus- rait presque la Septième symphonie de Dvořák qui suivit. Est-ce l'effet de
sion, jusqu'aux écrasements bruitistes de la petite harmonie, rien ne sem- la première partie ? L'impression fut atténuée par des cordes incapables
ble résister à ce déluge d'énergie qui semble fondre sur le public comme d'élever l'Allegro maestoso initial à un niveau expressif passionnant. Les
un barrage sonore qui aurait cédé sous le poids des intentions spectaculai- deux mouvements conclusifs firent remonter une tension rythmique qui
res. On sort de cette expérience avec l'épuisement consécutif à l'effort qu'il menaçait de disparaître. Andris Nelsons profita de cette éclaircie pour
aura fallu supporter. L'affiche promettait beaucoup, mais il faut malheu- offrir en bis une danse Slave en forme de figure pyrotechnique qui sût
reusement reconnaître qu'il s'agit d'un échec.
emporter l'adhésion d'un public comblé.
Toujours au TCE, l'orchestre de Philadelphie en tournée avec le chef
David Verdier
canadien Yannick Nézet-Séguin, dans un programme Brahms-StraussBeethoven dont l'interprétation fait mentir le parfum classique de l'affiche.
Cette célébrissime Troisième Symphonie de Brahms est parcourue d'une
chronique des concerts
L'été avant
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Maison Européenne de la photographie
Jacques Henri Lartigue
L’exposition “Lartigue, la vie en couleurs“ dévoile un pan inédit de l’œuvre du
photographe et peintre français. Bien que la couleur représente plus d’un tiers de la
totalité de ses clichés, celle-ci n’a jamais été montrée ou exposée en tant que telle. Il
s’agit d’une réelle découverte pour le public, non seulement parce que les photos
exposées le sont pour la première fois ou presque mais aussi parce qu’elles révèlent
un Lartigue inconnu et surprenant.
Lartigue a pratiqué la couleur à deux périodes de sa vie. Une première fois de
1912 à 1927, et il en est résulté une série d’autochromes - 87 plus précisément, qui
sont conservés à la Donation Lartigue - dont une trentaine est montrée dans l’exposition. Lartigue a alors 18 ans et il est très enthousiasmé par ‘les nouvelles technologies’; il expérimente donc le procédé autochrome, mais la lourdeur de l’équipement
et la lenteur du temps de pose le font délaisser cette technique.
A partir de 1949, soit après vingt ans de photographie en noir et blanc, Lartigue
s’intéresse de nouveau à la couleur. Avec son Rolleiflex, il privilégie le format carré
jusque dans les années soixante-dix tout en pratiquant avec son Leica le format
24x36.
Toute sa vie, Lartigue a conservé une fraîcheur enfantine, une curiosité et un
émerveillement comparables. Est-ce cela qui explique la modernité évidente de ses
photographies ? Une modernité – faut-il le préciser – que la couleur exa-cerbe au
Florette dans la Morgan. Provence, mai 1954
Photographie J. H. Lartigue © Ministere de la Culture - France / AAJHL
point de lui donner une sensibilité quasi contemporaine.
. Jusqu’au 23 août 2015
Bibliothèque Nationale
l PiAF – jusqu’au 23 août
Centre Pompidou
l LE CORBUSiER - Mesures de l’homme – jusqu’au 3 août
l UNE HiSTOiRE, art, architecture et
design, des années 80 à aujourd'hui
– jusqu’au 11 janvier 2016
Cinémathèque française
l ANTONONi, AUX ORiGiNES DU POP –
jusqu’au 19 juillet
Cité de l’Architecture
l CHAGALL, SOULAGES, BENZAKEN…
LE ViTRAiL CONTEMPORAiN – jusqu’au
21 septembre.
Fondation Cartier
l BEAUTé CONGO – 1926-2015 –
CONGO KiTOKO – Du 11 juillet au 15
novembre
Fondation Louis Vuitton
l LES CLEFS D’UNE PASSiON – jusqu’au 6 juillet
Galerie des Gobelins
l CARTE BLANCHE à OLiViER ROLLER –
jusqu’au 26 juillet
l L’ESPRiT ET LA MAiN. Héritage et
savoir-faire des ateliers du Mobilier
national – jusqu’au 17 janvier 2016
Grand Palais
l VELáZqUEZ – jusqu’au 13 juillet
l JEAN PAUL GAULTiER – jusqu’au 3
août
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Jeu de Paume
l KHVAy SAMNANG, L’homme-caoutchouc / VALéRiE JOUVE, Corps en
résistance / GERMAiNE KRULL (18971985), un destin de photographe –
jusqu’au 27 septembre.
Maison de l'Amérique latine
l PABLO REiNOSO – jusqu’au 5 sept.
Maison du Japon
l FiBER FUTURES. Les explorateurs de
la création textile au Japon – jusqu’au 11 juillet.
Maison de la Photographie
l LARTiGUE, la vie en couleurs /
MARCOS BOiSSO, Arpoador / ALiCE
SPRiNGS / PHiLiPPE COMETTi, DOMiNiqUE
qUESSADA / LE CHAT ET SES PHOTOGRAPHES – jusqu’au 23 août
Maison Rouge
l My BUENOS AiRES – jusqu’au 20
septembre.
Monnaie de Paris
l MARCEL BROODTHAERS – jusqu’au
5 juillet
Musée des Archives Nationales
l MéSOPOTAMiE, Carrefour des cultures – jusqu’au 24 août
Musée des arts décoratifs
l TRéSORS DE SABLE ET DE FEU Verre et cristal – jusqu’au 15 nov.
Musée d’art du judaïsme
l MAGiE, Anges et démons dans la
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n
tradition juive – jusqu’au 19 juillet
l MyRiAM TANGi, Mehitza. Ce que
femme voit – jusqu’au 26 juillet
Musée d’art moderne
l LA PASSiON SELON CAROL RAMA –
jusqu’au 12 juillet
l MARKUS LüPERTZ. Une rétrospective – jusqu’au 19 juillet
l HENRy DARGER – jusqu’au 11 oct.
Musée Bourdelle
l MANNEqUiNS D'ARTiSTE, MANNEqUiNS
FéTiCHES – jusqu’au 12 juillet
Musée Cognacq-Jay
l THé, CAFé OU CHOCOLAT ? L’essor
des boissons exotiques au XViiie
siècle – jusqu’au 27 septembre
Musée Dapper
l L’ART DE MANGER - Rites et traditions – jusqu’au 12 juillet
Musée Jacquemart-André
l DE GiOTTO à CARAVAGE - Les passions de Roberto Longhi – jusqu’au
20 juillet
Musée du Louvre
l L’éPOPéE DES ROiS THRACES – jusqu’au 20 juillet
l MARK LEwiS - invention au
Louvre – jusqu’au 31 août
Musée du Luxembourg
l LES TUDORS – jusqu’au 19 juillet
Musée Marmottan-Monet
l LA TOiLETTE. Naissance de l’intime
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– jusqu’au 5 juillet
Musée de Montmartre
l L’ESPRiT DE MONTMARTRE ET L’ART
MODERNE 1875-1910 – jusqu’au 25
septembre
Musée de l’Orangerie
l ADOLFO wiLDT (1868-1931) – jusqu’au 13 juillet
Musée d’Orsay
l PiERRE BONNARD. Peindre l’Arcadie
– jusqu’au 19 juillet
l DOLCE ViTA - Art décoratif italien
1900-1940 – jusqu’au 13 sept.
Musée du Quai Branly
l LES MAîTRES DE LA SCULPTURE DE
CôTE D’iVOiRE – jusqu’au 26 juillet
l TATOUEUR, TATOUéS – jusqu’au 18
octobre
Musée Rodin
l RODiN, le laboratoire de la création – jusqu’au 27 septembre
Palais Galliera
l JEANNE LANViN – jusqu’au 23 août
Petit Palais
l THOMAS LOROOy – jusqu’au 5 juillet
Pinacothèque
l LE PRESSiONNiSME 1970 - 1990,
les chefs-d’œuvre du graffiti sur
toile de Basquiat à Bando – jusqu’au 13 septembre.
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La Comédie Française
La maison de Bernarda Alba
La Comédie-Française s’éprend de Garcia Lorca, avec sa “Maison de Bernarda Alba“ qui fait une entrée
fulgurante au répertoire. Dans une adaptation française, bien évidemment et due à Fabrice Melquiot, mais qui
en garde tout le propos décapant. Car il s’agit d’une pièce prémonitoire et révolutionnaire, mais pas exactement
dans le sens que l’on imagine.
Puisque la pièce est l’une des toutes rares au théâtre, à ne faire intervenir que des personnages féminins.
« Une pièce de femmes, donc universelle » pour citer Lilo Baur. Bernarda Alba est donc la maîtresse-femme,
tyrannique, la figure d’un matriarcat implacable. Celle qui impose à ses cinq filles et à ses servantes une vie
monacale recluse dans sa maison, pour (fausse) raison d’un deuil de huit ans à respecter. Les hommes sont exclus,
sinon par la pensée et ses obsessions. L’aînée des filles, Angustias, est toutefois la seule promise à un prochain
mariage, à Pepe le Romano. Ce qui provoque la jalousie et la convoitise de ses sœurs, dont l’une, Adela, mettra
en pratique ses intentions. Avec Pepe, précisément. La mort en sera le fruit, issu du fruit défendu.
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À la salle Richelieu, les comédiennes du Français se glissent dans leurs personnages avec une force et une
intensité rentrée qui font froid dans le dos. Céline Brune est Bernarda, omniprésente, omnipotente, dictant à
toutes la conduite à tenir : une grande actrice, dans l’expression, peut-être davantage que dans la diction, par
trop intériorisée. Quand Claude Mathieu, la Servante, Elsa Lepoivre, la vétérane Poncia, Florence Viala, la
«La maison de Bernarda Alba»
grand-mère Maria Josefa, donnent libre cours à une déclamation franche, que leur autorisent leurs rôles en
rodomontades non dépourvus d’humour. Véronique Vella et Adeline d’Hermy s’affrontent en Angustias et Adela
avec une acrimonie directement sensible. Lilo Baur enserre ce petit monde recroquevillé sur lui-même devant un mur noir de caillebotis, d’où le monde, libre et
ouvert, n’apparaît qu’en profilé. Comme un songe inaccessible… Le jeu est alors à nu, sans autre élément de décor hormis une large table et des chaises sous de
sinistres éclairages, sombre et glacé. Puisque chez Lorca, le soleil est hors les murs. Tout comme l’espérance.
Pierre-René Serna
. Jusqu’au 25 juillet 2015
Réservations : 01.44.58.15.15
COMéDiE FRANçAiSE
SALLE RiCHELiEU (01.44.58.15.15)
u Lucrèce Borgia de Victor Hugo m.e.s. Denis Podalydès - jusqu’au 19
juillet
u La Maison de Bernarda Alba de
Federico Garcia Lorca - m.e.s. Lilo
Baur - jusqu’au 25 juillet
u La Tragédie d’Hamlet de
Shakespeare - m.e.s. Dan Jemmett jusqu’au 26 juillet
u Un Fil à la patte de Feydeau m.e.s. Jérôme Deschamps - jusqu’au
26 juillet
ViEUX-COLOMBiER (01.44.39.87.00)
u Le système Ribadier de Feydeau m.e.s. Zabou Breitman - jusqu’au 17
juillet
COMéDiE SAiNT-MiCHEL
(loc. 01.55.42.92.97)
u L’ours & Une demande en mariage
de Tchekhov - m.e.s. Alexandre
Bonneau, Delo - jusqu’au 5 juillet
EDGAR (01.42.79.97.97)
u Commis d’office d'Olivier Maille et
Guillaume Labbé - m.e.s. Olivier
Maille - jusqu’au 15 août
u Marié à tout prix ! de Nicolas
Hirgair - m.e.s. Luq Hamett - jusqu’au 16 août.
GAîTé-MONTPARNASSE
(01.43.22.16.18)
u Molière malgré moi de et avec
Francis Perrin - jusqu’au 29 août.
POCHE-MONTPARNASSE
(01.45.48.92.97)
u The Servant de Robin Maugham m.e.s. Thierry Harcourt - jusqu’au
12 juillet
RiVE GAUCHE (01 43 35 32 31)
u 24h de la vie d'une femme de
Stefan Zweig - m.e.s. Steve Suissa avec Clémentine Célarié - jusqu’au
29 août
u Le Joueur d'échecs de Stefan
Zweig - m.e.s. Steve Suissa - avec
Francis Huster - jusqu’au 29 août
THéâTRE DE PARiS
(01.48.74.25.37)
u Open Space de et m.e.s.
Mathilda May - jusqu’au 12 juillet
TRiSTAN BERNARD
(01.45.22.08.40)
u Les Faux British de Henry Lewis,
Jonathan Sayer, Henry Shields m.e.s. Gwen Aduh - jusqu’au 31
juillet
Bouffes du Nord
Le Bourgeois gentilhomme
Cette comédie-ballet de Molière mise en scène par Denis Podalydès
revient au Théâtre des Bouffes du Nord. La musique de Lully qui l’accompagne est dirigée par Christophe Coin.
Bourgeois gentilhomme©Pascal Victor ArtComArt
Dans cette œuvre, Molière tire le portrait d’un aventurier de l’esprit
n’ayant d’autre désir que d’échapper à sa condition de roturier pour poser
le pied sur des territoires dont il est exclu... la découverte d’une terra incognita qui, de par sa naissance, lui est interdite.. il s’attelle donc au vaste
chantier de vivre ses rêves... Et qu’importe si ces rêves sont ceux d’un
homme ridicule.
. Jusqu’au 26 juillet
Les réservations de billets peuvent être
effectuées par l’intermédiaire du site :
theatreonline.com
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Réservations : 01.46.07.34.50
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chronique lyonnaise
Pépites de Fourvière
En ce mois de juin, les institutions pérennes (Théâtre des Célestins et Les
Subsistances) et les festivals (les Nuits de Fourvière ouvrent le bal) se croisent.
Dans le premier cas, des jeunes et revigorantes troupes ; dans le second, des
équipes prestigieuses, françaises et internationales.
Pour clore sa saison, le Théâtre des
Célestins a accueilli le collectif La Meute, dirigé par Thierry Jolivet, dans Belgrade. La dramaturge espagnole Angelica Liddell y a créé
une forme limpide : Agnès, journaliste occidentale, se rend à Belgrade où se tiennent les funérailles de Milošević. Elle y rencontre cinq figures (en autant de monologues) que la récente
Guerre des Balkans a marquées : un apparatchik
et nationaliste serbe ; un anti-Milošević réduit à
la misère ; un croque-mort qui, hagard devant
cet amas de morts, abandonne son métier ; et un
jeune soldat, dont elle s’enamoure. Durant les
quatre premiers solos, la véhémence qui la gifle
la laisse mutique ; in fine, elle constate qu’écrire lui est impossible. Au long de la représentation, la langue évolue, de l’insoutenable à une
méditation, quasi-philosophique, sur l’amour.
La scénographie est à deux niveaux : l’espace
de jeu, en bas, que coiffe un plateau où jouent
deux musiciens (un batteur et un claviériste-guitariste). À ce texte bouleversant qui nous hurle
que nous, Occidentaux, avons refusé de voir,
dans cette guerre à deux heures d’avion de
Paris, que la culture européenne s’y est fracassée, La Meute donne une densité stupéfiante.
Fabriquant, avec âpre lucidité, son propre art
théâtral, chacun des cinq acteurs, à l’énergie
radicale, profère son monologue en un inéluctable crescendo qui laisse le spectateur KO. Un
bémol : la musique qui, réduite à deux accords,
signalétique et prévisible, accompagne chaque
monologue, endommage le texte de Liddell :
elle pousse les comédiens au-delà de leurs limites vocales et, in fine, rend le texte inintelligible ; et elle abîme tant les tympans du spectateur
qu’une demi-journée est nécessaire que disparaissent les acouphènes ainsi suscités.
Les Nuits de Fourvière
Chaque juin voit arriver les Nuits de
Fourvière. Pour ouvrir ce festival, A midsummer night’s dream (avec sur-titrages) de
Shakespeare par une équipe californienne : Tim
Robbins (au cinéma, acteur, scénariste et réalisateur ; au théâtre, comédien et metteur en
scène ; enfin, musicien) et son Actor’s Gang.
Dans une élégiaque nuit de plein-air, à l’Odéon
(un des théâtres de ce site remontant à la Rome
antique), les coulisses sont latérales au plateau :
changer vêtures et accessoires se fait à vue. The
Actor’s Gang est singulier : il établit un contact
immédiat avec chaque spectateur qu’il mobilise
grâce à un haut niveau d’énergie (vocale et physique), tandis que
comprendre les subtilités du texte (surtout
ce Songe) appartient
au seul spectateur,
mais à condition que
ce dernier dispose de
la culture générale
nécessaire.
Quelques jours
auparavant, entendre
le
Philadelphia
Orchestra,
à
l’Auditorium
de
Lyon, a laissé la
même impression :
Les Chiens de Navarre & «Les Armoires normandes» © Philippe Lebruman
une virtuosité à agrip-
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per le spectateur grâce à une large gamme de
dynamiques dans des sonorités toujours pleines ; et un texte non-fouillé, au risque de frustrer. Probablement cette impression doit-t-elle
être relativisée : le système de production étasunien correspond à la philosophie politique libérale qui y règne (à chacun son chemin et sa
compréhension des situations). Nous autres en
Europe, où la pensée politique privilégie le bien
public et le service public, attendons que les
interprètes (comédiens et équipe scénique) aient
tant lu et fouaillé le texte que chaque spectateur
y créé son propre entendement. “Frustration”
est donc à tempérer : lui substituer des différences culturelles, bienvenues et essentielles, l’emporte.
Chroniquer un second spectacle (Les femmes savantes de Molière, par Macha Makieff)
des Nuits de Fourvière, également joué à
l’Odéon, était prévu : las, l’orage a englouti les
deux premières représentations. La place ainsi
laissée vacante permet de saluer l’activité, par
petits festivals tout au long de la saison, que
produisent Les Subsistances, pluridisciplinaire
“laboratoire international de création”. En ce
présent juin, son festival Livraisons d’été propose Les armoires normandes par le collectif
Les chiens de Navarre (il en sera traité à l’automne prochain, lorsque ce spectacle sera donné
Du mardi 26 au samedi 30 janvier 2016 au théâtre Forum de Meyrin et une pépite : Paris tiré du
subtil et profond roman Mélo (éd. Verticales) de
Frédéric Ciriez, mis en scène par David Bobée.
Ce dernier, depuis peu directeur du Centre dramatique de Haute-Normandie, est un des talents
montants du théâtre hexagonal : Paris l’atteste.
Trois rôles sur la scène, dont le principal
(Parfait de Paris) conduit un camion-poubelle
dans le quartier Barbès. Cette pièce est en trois
parties : il est samedi, Parfait effectue et commente son travail ; puis il rentre chez lui et se
sape (un blazer en croco vert électrique, un pantalon jaune et une cravate courte en lézard
argenté) pour parader ; car il a loué une Rolls
Royce, avec chauffeur, qui le conduit dans une
boîte que fréquentent de nombreux Africains.
Avec une mise en scène aussi fouillée que le
texte est chatoyant, Marc Agbedjidji campe un
inoubliable (mélancolique, drôle et touchant)
Parfait. Sans réserve aucune, suivons ces deux
hautes personnalités : David Bobée et de Marc
Agbedjidji.
Frank Langlois
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Novarina
Erik Truffaz
Maurane
Akram Khan
Sound Of Music
Preljocaj
Gilles Jobin
Piazzolla
Circus Incognitus
Andromaque
Les Chiens de Navarre
Gilles Privat
Platonov
Contes chinois
Crack in the Sky
Terpsycordes
Figaro divorce
Théâtre
Danse
Musique
Cirque
Saison 2015–2016
forum-meyrin.ch
m é m e n t o
GENEVE jazz
concerts
u 8.7. : LAMBERT ORkiS, piano &
ANNE-SOPHiE MuTTER, violon (Bartok,
Beethoven, Respighi, Ravel). Victoria
Hall à 20h (loc. TicketCorner, Fnac)
classique
MuSiquES EN éTé CLASSiquE
(rens. 0800.418.418 / loc. Maison
des arts du Grütli / Espace Ville de
Genève / Cité Seniors / Genève
Tourisme)
Scène Ella Fitzgerald à 20h30 :
u 2.7. : OSR, dir. kazuki Yamada
(Tchaïkovski, Glazounov, Chostakovitch, Stravinski). Concert gratuit.
u 4.8. : L’ORCHESTRE DE CHAMBRE DE
GENèVE, dir. Arie van Beek. TEREZA
GEVORGYAN,
soprano,
MARiE
JAERMANN, soprano, ROSS RAMGOBiN,
baryton
(Mozart,
Rossini,
Mendelssohn). Concert gratuit.
Cour de l’Hôtel de Ville à 20h30
(rocade : Alhambra) :
u 9.7. : quATuOR DE GENèVE (Debussy,
Schubert)
u 14.7. : DAViD GRiMAL, violon, ANNE
GASTiNEL, violoncelle, PHiLiPPE
CASSARD, piano (Chausson, Trotignon,
Schubert)
u 16.7. : GENEVA CAMERATA, dir. et
piano DAViD GREiLSAMMER, ANDREAS
SCHOLL, contre-ténor (Mozart,
Schubert, Haendel, Pärt)
u 21.7. : BéATRiCE RANA, piano (Bach,
Debussy, Chopin, Ravel)
u 23.7. : ELSA GRETHER, violon, DAViD
LiVELY, piano (Prokofiev, Copland,
Ravel)
u 25.7. : ORCHESTRE DES CONTiNENTS
(Mozart, Debussy, koh, Schubert)
u 28.7. : STEPHAN GENZ, baryton,
MiCHEL DALBERTO, piano (Schumann,
Schubert)
u 30.7. : quATuOR SiNE NOMiNE
(Haydn, Barok, Beethoven)
u 6.8. : NELSON GOERNER, piano
(Haendel, Schumann, Chopin,
Scriabine),
u 11.8. : iL GiARDiBO ARMONiCO, dir.
Giovanni Antonini, MARiE-CLAuDE
CHAPPuiS,
mezzo-soprano
(Monteverdi, Josquin des Prés,
Gombert, Ockegem, Luzzaschi, Rore)
u 13.8. : quATuOR TERPSYCORDES
(Haydn, Meldelssohn, Dvorak)
a
g
MuSiquES EN éTé
(rens. 0800.418.418 / loc. Maison
des arts du Grütli / Espace Ville de
Genève / Cité Seniors / Genève
Tourisme)
Cour de l’Hôtel de Ville à 20h30
(rocade : Alhambra) :
u 6.7. : BRAD MEHLDAu TRiO
u 13.7. : MARET / «TAiN» WATTS / HAYS
/ kuBiSZYN
u 20.7. : BiLL FRiSELL quARTET, Guitar
in the space age !
u 27.7. : ROY HARGROVE quiNTET
u 3.8. : SONS OF kEMET
u 10.8. : ROOT 70 WiTH SPRiNGS
théâtre divers
u Jusqu’au 5.7. : BESOiN DE
CONSOLATiON de Stig Dagerman et
Rodrigo Garcia, m.e.s. Marcela san
Pedro, danse et théâtre. Le Galpon
(rés. au 022/321.21.76 au plus tard 2
heures avant le début de l’événement - mail : [email protected])
divers
u 4 et 5.7. : FESTiVAL OPENAiRE.
Festival de cultures urbaine qui combine sport, musique, danse et performances. Esplanade Marignac à
Lancy ( rés. 022/794 55 33 )
u Du 7 au 12.7. : FESTiVAL DE LA CiTé,
festival des arts et de la découverte.
En ville, gratuit
AILLEURS
cernier
FESTiVAL POéSiE EN ARROSOiR, Evologia,
Grange aux Concerts (rés. 032 889
36 05, [email protected])
u 9.7. à 19h : CYRiL MOkAiESH &
GiOVANNi MiRABASSi chantent les
grands naufragés.
u 14.7. à 19h : POéSiE DE GiLLES
VACHON & MuSiquE éLéCTRONiquE
musiques LAUSANNE les diablerets
colorées concerts
MuSiquES EN éTé
(rens. 0800.418.418)
Concerts gratuits
Scène Ella Fitzgerald à 20h30 :
u 3.7. : AZiZ SAHMAOui & uNiVERSiTY OF
GNAWA, Maroc
u 8.7. : TOTO LA MOMPOSiNA,
Colombie, cumbia
u 10.7. : LiSA LEBLANC, Canada, folk
trash
u 15.7. : BkO quiNTET, Mali, tradimoderne
u 17.7. : ALViN ‘YOuNGBLOOD’ HART’S
MuSCLE THEORY, uSA, blues
u 22.7. : EDDY AFRO, Ethiopie, pop
éthiopienne
u 24.7. : CuRTiS HARDiNG, uSA, soul
u 29.7. : ANTONiO ZAMBuJO, Portugal,
fado
u 31.7. : GAYE Su AkYOL, Turquie, folk
psychédélique
u 5.8. : PuNCH BROTHERS, uSA, progressive bluegrass
u 7.8. : CHEB LAkHDAR & MAZALDA,
Algérie / France, raï
u 12.8. : i kONG & ALPHEuS feat.
NAJAViBES, Jamaïque /Royaume-uni /
Suisse, reggae
u 14.8. : SuN RA ARkESTRA, uSA, cosmic jazz
u 19.8. : MARCELO D2, Brésil, hip-hop
opéra
MuSiquES EN éTé CLASSiquE
(rens. 0800.418.418 / loc. Maison
des arts du Grütli / Espace Ville de
Genève / Cité Seniors / Genève
Tourisme)
Cour de l’Hôtel de Ville à 20h45 :
u 7, 8, 10, 11.7. : POMME D’APi &
MONSiEuR CHOuFLEuRi RESTERA CHEZ Lui
LE... d’Offenbach. Opéra de Chambre
de Genève, dir. Franco Trinca
e
n
u Du 8 au 11.7. : MuSiquE CLASSiquE
MARiuS BORGEAuD. Cour
de la Fondation de l’Hermitage à
18h. Le 8 : CLAiRE DASSESSE, violon &
DEBORAH LEE, piano / Le 9 : DEBORAH
LEE, piano / Le 10 : ANNA MiNTEN,
violoncelle & DEBORAH LEE, piano /
Le 11 : CAPuCiNE kELLER, chant &
DEBORAH LEE, piano.
Au TEMPS DE
FESTiVAL D’éTé MuSiquE-MONTAGNE,
Eglise catholique, salle principale
(rés. +41 24 492 00 10et à l'entrée
des concerts)
u Du 14 au 25.7. avec ASTRYD
COTTET, soprano ET BENJAMiN FAu,
guitare, le 14 juillet, et La Misatango
"Misa A Buenos Aires" de Martin
Palmeri et “Le Requiem en C, MH
155“ de J.M. Haydn, les 23, 24 et 25
juillet
Nyon
far°, festival des arts vivants
En 2013, Gunilla Heilborn présentait «This is not a Love Story»
© Stefan Bohlin
Une nouvelle fois, la ville de Nyon sera délicieusement perturbée au
mois d’août car, durant deux semaines, le far° se profilera à nouveau comme
un “rassembleur“ pour les amateurs d’arts scéniques.
Comme chaque année, théâtre, danse et performance seront au menu
de cette manifestation estivale unique dans la région, qui explore les nouveaux territoires des arts vivants en accueillant des artistes suisses et internationaux, et en proposant une programmation originale et exigeante avec,
pour but, de sensibiliser le public romand aux esthétiques contemporaines
les plus radicales.
. Du 12 au 22 août 2015
d
a
93
m
é
m
martigny
n
t
u 3, 4, et 5.7. : DiSNEY-PixAR EN
Projections sur grand
écran, accompagnées du Sinfonietta
de Lausanne, dir. Constantin Roults
u 10.7. : PLAZA FRANCiA - A NEW
TANGO SONG. Catherine Ringer (des
Rita Mitsouko) chante Müller &
Makaroff (de Gotan Project).
CONCERT.
AMPHiTHéâTRE ROMAiN (infos et rés. :
www.tell2015.ch ou auprès de
Martigny Tourisme ou de l'Espace
clients Sinergy.)
u Les 2, 5, 8, 12, 15.8. : GuiLLAuME
TELL de Rossini, par L’Opéra du
Rhône.
meinier
FESTiVAL AMADEuS. Grange de la
Touvière (billetterie : Très Classic,
022 781 57 60 / Grange de la
Touvière dès le 21.8. au 022 750 20
20 / tous les soirs, 2 h avant le
concert)
u 28.8. à 20h30 : ENSEMBLE MATHEuS
& JEAN-CHRiSTOPHE SPiNOSi, direction
(Vivaldi, Telemann)
u 29.8. à 20h30 : quATuOR BELCEA &
VALENTiN ERBEN, violoncelle (Mozart,
Webern)
u 30.8. à 19h : ADAM LALOuM piano
(Mozart, Webern, Schumann)
94
e
mézières
THéâTRE Du JORAT à 20h, dim à 17h
(loc.
021/903.07.55
ou
[email protected])
montreux
MONTREux JAZZ FESTiVAL 2015
du 3 au 18 juillet (Contact /
Réservation : 021/962 21 19
http://www.montreuxjazz.com )
SEPTEMBRE MuSiCAL 2015
du 27 août au 10 septembre
(Réservation : 021/962.80.05, ou
TicketCorner, Fnac, ou réservation
en ligne : www.septmus.ch/fr/billetterie/)
u 27.8. : RuSSiAN NATiONAL
ORCHESTRA dir. Hartmut Haenchen &
MikHAiL PLETNEV, piano (Händel, JS
Bach). Auditorium Stravinski à 19h30
u 28.8. : RuSSiAN NATiONAL
ORCHESTRA dir. Hartmut Haenchen &
MikHAiL PLETNEV, piano (Mozart,
Haydn). Auditorium Stravinski à
19h30
u 29.8. : FiNALE CONCOuRS CLARA
HASkiL 2015. Orchestre de Chambre
o
de Lausanne, dir. Christian
Zacharias. Salle del Castillo à 20h
u 30.8. : EuROPEAN PHiLHARMONiC OF
SWiTZERLAND. Jam Session. Salle des
Congrès du Fairmont Montreux
Palace à 18h
u 31.8. : quATuOR AROD (Haydn,
Ligeti, Schubert). Château de Chillon
à 19h30
st.légier
Eglise de La Chiésaz
u Du 14 au 22.8. : 26E SEMAiNE iNTERNATiONAL DE PiANO ET MuSiquE DE CHAMBRE (infos : http://www.sipiano.com)
sierre
BLuES FESTiVAL 2015. Plaine Bellevue
(rés. [email protected] / infos :
http://www.sierreblues.ch/fr/ )
u du 8 au 12.7., avec NAZARETH,
PHiLiPP FRANkHAuSER, HENRi DèS,
JéRôME PiéTRi, FANNY BLuES, ETC.
siviez
CHAPELLE Du BLEuSY, HAuTE-NENDAZ
(Réservation : [email protected] )
u Du 10.7. au 14.8. : FESTiVAL iNTERNATiONAL DE GuiTARE CLASSiquE. Tous
En Bauges
Ophélie Gaillare © DR
Et la liste des musiciens
qui feront le déplacement
mérite amplement que l’on s’y
intéresse : Chœur Accentus,
Ophélie Gaillard, Trio
Karenine, Quatuor Prazak ou
Quatuor Modiglani, par exemple.... des musiciens qui vous
enchanteront avec des œuvres
de Villa-Lobos, Vivaldi, Elgar,
Dvorak, Schumann ou
Beethoven.
Signalons encore que la quasi totalité des concerts auront lieu dans différentes églises du Parc naturel régional du Massif des Bauges, d’ou l’appellation Musique & Nature de la manifestation.
. Du 4 juillet au 15 août 2015
tannay
VARiATiONS MuSiCALES
(Billetterie : Points de vente
TicketCorner, au 0900.800.800 / rés.
[email protected].)
u 22.8. à 20h : CAMiLLE THOMAS &
ORCHESTRE Du FESTiVAL, musiciens de
l'OSR dir. Jonathan Haskell
(Beethoven, Dvorak, St-Saëns)
u 23.8. à 17h : RENAuD CAPuçON, violon ET JéRôME DuCROS, piano, en duo
(Mozart, korngold, Strauss)
u 27.8. à 21h : LAuRE FAVRE-kAHN,
piano & SON spectacle Chopin...
Confidences, accompagnée par la
voix de Charles Berling
u 28.8. à 20h : ALExANDRA
CONuNOVA, violon & CAMERATA BERN
dir. Susan Meesun Hong Coleman
(Mozart, Mendelssohn, Schubert)
u 29.8. à 20h : BORiS BEREZOVSkY,
piano en récital (Grieg, Scarlatti,
Stravinsky)
u 30.8. à 17h : ANNE GASTiNEL, violoncelle & ORCHESTRE DES PAYS DE
SAVOiE « Vienne 1800 » dir. Nicolas
Chalvin (Mozart, Haydn, Schubert,
Elgar)
Annecy
Musique & Nature 2015
Annecy, La Thuile,
Rumilly, Le Châtelard ou St.
Jean d’Arvey figurent parmi les
agglomérations dont les églises
accueilleront les concerts liés
au 17ème festival Musique &
Nature en Bauges.
les vendredis à 20h
Classique Festival 2015
Bertrand Chamayou,
Jean-Christophe Spinosi,
Alexandre
Tharaud,
Leonidas Kavakos ou Denis
Matsuev,... vous pourrez
entendre ces musiciens virtuoses, et bien d’autres
encore, lors de l’édition
2015 du Annecy Classique
Festival.
Le violiniste grec
Leonidas Kavakos retrouvera le chef Yuri
Temirkanov et l’Orchestre
Philharmonique de SaintPétersbourg (28 août).
Portés par le chef
d’orchestre
JeanChristophe Spinosi, les
musiciens de l’Ensemble
Leonidas Kavakos © Marco Borggreve
Matheus et les artistes du
Chœur de chambre
Mélisme(s) dépasseront leurs limites pour donner vie à la “Missa Solemnis“
(26 août).
. Du 24 au 30 août 3015
Toutes les informations vous attendent sur : www.annecyclassicfestival.com/fr/
Réservations : Par téléphone au +33 (0)4 50 51 67 67 / Par email à
[email protected], ou sur le site
Renseignements et réservation : 04 79 54 84 28 – [email protected] –
www.musiqueetnature.fr
a
g
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n
d
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JAZZ
CLASSIQUEOPERA
COLOREES
design—lavalley.eckell.wierzbicki @ c’est à voir
28.06
—19.08
2015

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