Historique des Grands Moulins de Pantin

Transcription

Historique des Grands Moulins de Pantin
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
SOMMAIRE
Sommaire .................................................................................................................1
Conditions de l’enquête ...........................................................................................2
Documentation.........................................................................................................3
Archives.......................................................................................................... 3
Bibliographie .................................................................................................. 6
Iconographie ................................................................................................... 7
Annexe 1 : Historique et description architecturale.................................................9
Nicolas Pierrot
Annexe 2 : Les Grands Moulins de Pantin, histoire et mémoire de l’usine ..........12
Philippe Charpin
Historique ..................................................................................................... 13
La marche de l’usine .................................................................................... 31
Mémoires de l’usine ..................................................................................... 46
Table des illustrations ............................................................................................ 64
1
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
CONDITIONS DE L’ENQUÊTE
Les deux bâtiments en béton armé des silos et du moulin
dépassent de beaucoup, grâce à leur hauteur exceptionnelle, tous les
autres bâtiments industriels des alentours et constituent l’ornement du
quartier.
« Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie française, 1926, p. 219.
Opération d’urgence menée en août 2001 par le Service régional de
l’Inventaire d’Ile-de-France (Catherine Boulmer, chercheur, et Jean-Bernard
Vialles, photographe) en collaboration avec la Sous-direction des études, de la
documentation et de l’Inventaire (Catherine Chaplain, chercheur). Le service avait
été alerté par Mme Geneviève Michel, archiviste de la ville de Pantin, de
l’imminence de la vente des machines, suite à la cessation d’activité de
l’établissement.
En 2003, une étude monographique reposant notamment sur une enquête
orale, ainsi qu’une campagne photographique ont été confiées par le Conseil
général de Seine-Saint-Denis (Bureau du patrimoine), sous la direction d’Evelyne
Lohr, responsable de l’inventaire, à Philippe Charpin, chercheur (association
Trajectoires), et Laurent Desmoulins, photographe indépendant.
Une recherche complémentaire – inventaire des machines, étude des permis
de construire et des dossiers de la reconstruction, recherche iconographique avec
la collaboration de Geneviève Michel, conception des cartes de synthèse – et la
mise en forme finale du dossier ont été confiés en 2003-2004, dans le cadre du
Protocole de décentralisation culturelle de la Seine-Saint-Denis, à Nicolas Pierrot,
Jean-Bernard Vialles (reproduction des documents iconographiques) et Pascal
Pissot (cartographie), respectivement chercheur et techniciens au Service régional
de l’Inventaire d’Ile-de-France.
2
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
DOCUMENTATION
Archives
Archives nationales
Centre historique des archives nationales (Paris)
F23 110. Blé, ravitaillement du camps retranché de Paris, 1915-1917.
F12 5187. Légion d’Honneur, accession d’Abel Stanislas Leblanc au grade de Chevalier, 28
août 1871.
12
F 5125, Légion d’Honneur, accession d’Ernest-Charles De Mourgues au grade de
Chevalier, 1866.
L 000 3003, Légion d’Honneur, accession d’Abel Edouard Désiré Leblanc au grade de
Chevalier, 11 novembre 1900.
Minutier central des notaires de Paris, Étude XLVIII (maître Jean Dufour), 1109, acte de
constitution de la Société anonyme des Moulins Abel Leblanc, 23 septembre 1879.
F12 110. Commerce et industrie.
830690 1-420. Reconstruction et dommages de guerre (Première Guerre mondiale).
Dossiers de travaux pré-financés par l’Etat. [Aucune information sur les Grands
Moulins de Pantin].
Centre des archives contemporaines (Fontainebleau)
19870678, art. 39-62, 163. Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme
(MRU).Grands Moulins de Pantin-Paris, 1944-1976.
Centre des archives du monde du travail (Roubaix)
1994042006, Grands Moulins de Pantin, rapports d’activité, 1964-1972
1994042007, Grands Moulins de Strasbourg, rapports d’activité, 1964-1972
Archives départementales de la Seine-Saint-Denis
P° 3 vol 3. Plan de la commune de Pantin, dressé par Lefèvre Frère, révisé en 1872.
DO 7 438. Plan d’alignement de la rue du Débarcadère, 20-avril 1899.
10 AT 159/4. Grands Moulins de Pantin, dossier patrimoine industriel.
Archives municipales de Coulommiers
2 L 86, 2 L 88, 2 L 100. Legs Abel Leblanc.
3
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Archives municipales de Pantin
21 W 8. Permis de construire, 2 dossiers :
PC sans n°. Projets, constructions diverses, 1921-1961, plans (Eugène Haug, architecte,
pour les plans de 1921 à 1926).
PC 45 2527. Reconstruction du magasin à farines, 1945, plans (Léon Bailly, architecte).
21 W 13. Permis de construire :
PC sans n°. Magasin à petits blés, Déchargement pneumatique et chargement des
produits finis, 1939, plans (non signés).
43 W 31. Permis de construire :
PC 59.431. Construction des silos à grains de la rue Danton, 1958 [construit en 1961],
plans (Léon Bailly et Alain Bailly, architectes)
43 W 32. Permis de construire, 6 dossiers :
PC 50.3005. Garages et ateliers en bordure de la Ville de Paris, 1949, plans (Léon
Bailly, architecte).
PC 54.3717. Bureaux et logements rue du Débarcadère, 1954, plans (Léon Bailly,
architecte).
PC 57.30. Agrandissement du magasin à farine, 1956, plans(Léon Bailly, architecte).
PC 58.288. Bureaux et habitations, 1955-1956 ; Surélévation des appartements rue du
Débarcadère, 1958, plans (Léon Bailly, puis Alain Bailly après l’autorisation du
préfet, 1959).
PC 62.837. Bâtiment stockage farine en vrac, 1962, plans (J. Quost, ingénieur).
PC 66.1630. Construction d’un silo à issues, 1966, plans (J. Quost, ingénieur).
43 W 33. Permis de construire, 4 dossiers :
PC sans n°. Agrandissement du bâtiment à usage de silos à blé (canal), 1933, plans ;
construction d’un moulin d’essai, d’un laboratoire et d’une école de boulangerie,
1932, plans (signature de l’architecte illisible).
PC 52.3316. Construction de la semoulerie, 1956, plans (Léon Bailly, architecte).
PC 55.3840. Bureaux et habitations rue du Débarcadère, 1955, plans (Léon Bailly,
architecte).
PC 58.231. Construction des silos de la semoulerie (Paris), 1958, plans (Pierre O.
Bauer, architecte).
129 W 16. Permis de construire :
PC 77.94. Agrandissement du Magasin à farines par la construction d’un ensemble de
silos, 1977-1980, plans (François Mathieu, architecte)
271 W 21. Permis de construire :
PC 95.0027. Construction d’un portique de déchargement, 1994 (plan accepté par le
service urbanisme de la ville le 01 août 1995), plans (R. Séguy, architecte, pour le socle
de la machine).
9 W 32. Etablissements dangereux, insalubres ou incommodes, 2 dossiers :
Grands Moulins de Pantin, 1933 et 1957.
Grands Moulins de Strasbourg, 1952.
Matrice des contributions personnelles, immobilières et patentes de Pantin : 1882 , registre
n° 364 ; 1913 registre 380.
4
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Matrices cadastrales, registre 2589, section A, n° 698.
U 002. Plan des terrains de MM. Leroy Frères et Forest à Pantin, vers 1869.
Procès-verbaux du Conseil Municipal. Réclamation de M. Abel Leblanc : 11 novembre
1880, 21 février 1883, 22 juin 1883, 15 novembre 1889, 28 mars 1890. Don de M. Abel
Leblanc : 28 mars 1890.
Dossier photographique relatif au bombardement des Grands Moulins de Pantin, le 19 août
1944.
Dossier Grands Moulins de Pantin : coupure de journaux, brochures de présentation.
Archives de Paris
Annuaires du commerce Didot.
D 32 U 66. Registre des constitutions de sociétés.
VN 4 carton 154. Bien communaux et titres de propriétés.
Préfecture de la Seine-Saint-Denis
Service des établissements classés et de l’environnement : dossier Grands Moulins de
Pantin.
Chambre de Commerce de Paris, département central des archives
2SE 0257. Grands Moulins de Strasbourg, société anonyme Strasbourg-Port du Rhin,
rapports d’activité, exercices 1921, 1930, 1938, 1972, 1976-1985.
2SE 0443. Grands Moulins de Pantin-Paris, puis Grands Moulins de Pantin (1969),
rapports d’activité, exercices 1965 à 1985 (fasc.).
Conservatoire national des Arts et Métiers
8° Xae 176. Exposition Universelle de 1867, listes générales des récompenses décernées
par le jury international.
8° Xae 223, t. 3. Exposition Universelle de 1878, listes générales des récompenses
décernées par le jury international.
8° Xae 371. Exposition Universelle de 1889, listes générales des récompenses décernées
par le jury international.
Archives du site des Grands Moulins de Pantin, bureau du directeur de l’usine (sources
consultées en 2003)
Premier rapport financier des Grands Moulins de Pantin-Paris, 1921-1922.
Photographie des ouvriers dans la cour de l’usine en 1936.
Dossier photographique sur le bombardement des Grands Moulins de Pantin en août 1944.
Photographies des pompiers intervenants sur l’incendie du magasin à farine, 1958.
5
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Photographies des dégâts suite à l’incendie du magasin à farine, Studio Chevojon, 1958.
Photographies de camions vrac.
Photographie de l’inauguration de la livraison vrac farine.
Bibliographie
Sources imprimées
VIGNE Henri, « La mouture à Paris », L’Illustration, 24 déc.1870, p. 423-424.
« Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, juil. 1886, p. 219-221.
« Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, 1890, p. 402-404.
Le Génie civil, n° 522, 11 juin 1892, p. 86-87 (planches).
« Le plus gros moteur à gaz du monde », La Meunerie Française, nov. 1894, p. 275-277.
« Congrès international de la meunerie », La Meunerie Française, septembre 1900.
« Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, 1926, p. 218221.
MARCILLY P., « La Maison d’Alsace », La construction moderne, 13 juin 1926, p. 440-442
[à propos de « la maison d’alsace, réalisée à l’Exposition des Arts décoratifs (1925) par
l’architecte E. Haug, de Strasbourg].
FAVIER J., « Les nouveaux silos des grands moulins de Pantin », L’Architecture française,
oct. 1934, vol. 50.
« Un feu de cave à 30 mètres au-dessus du sol », Allo 18, bulletin mensuel du régiment des
sapeurs pompiers, n° 116, mars 1958, pp. 92-93.
« Les Grands Moulins de Pantin-Paris », Les nouvelles mensuelles, SNCF, Exploitation du 1er
arrondissement-EST, n° 33, déc. 1964.
GERNEZ Pierre, « Les grands meuniers de Pantin », Pantin Mensuel, jan. 1990.
LACADRE Renaud, « Les maîtres du pain lorgnent sur les Grands Moulins », Libération, 16
août 1994, p. 7.
Travaux
ARPIN Marcel, Historique de la meunerie et de la boulangerie, depuis les temps
préhistoriques jusqu’à l’année 1914, tome 1, « Meunerie », Paris, Ed. Le Chancelier,
1948, 396 p.
Association Nationale de la Meunerie Française, L’organisation du marché du blé et produits
dérivés. Réglementation de la production, de la commercialisation et de la
transformation du blé. Mise à jour 1958-1959, Paris, Ed. SEP, 68 p.
BIOT Thierry, La meunerie française en Ile-de-France de 1936 à nos jours, maîtrise
d’archéologie contemporaine, Philippe Bruneau dir., Université Paris IV Sorbonne, 1988,
128 p. dactyl., pl.
6
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
BIOT Thierry, La meunerie contemporaine de 1936 à 1990 : le cas de l’Ile-de-France,
mémoire de D.E.A. d’archéologie contemporaine, Philippe Bruneau dir., Université Paris
IV Sorbonne, 1990, 3 tomes, 346 p. dactyl., 2 vol. de pl. n.p.
BOURNON Fernand, Etat des communes à la fin du XIXe siècle. Pantin, notice historique et
renseignements administratifs, Montévrain, Impr. typographique de l’école d’Alembert,
1901, 160 p.
CAPILLON Jean, « Instrument de recherche pour une histoire de la meunerie : « La meunerie
française » (1885-1940) », L’Archéologie industrielle en France, n° 14, décembre 1986.
CAUE 93 (éd.), Inventaire du patrimoine industriel de Pantin, 1997, 292 p. dactyl.
CHABANON Maurice, La meunerie française, une expérience d’économie dirigée, Paris, Ed.
M.T.Génin ,1955, 298 p.
FIERRO Alfred, Histoire et dictionnaire de 300 moulins de Paris, Paris, 1999, 186 p.
FONTANON Claudine, L’industrialisation de la Région parisienne dans la première moitié
du XXe siècle. Les sources de l’histoire des établissements industriels, Paris, CNAM,
1985, 46 p.
KATZ Cécile, Territoire d’usines, Grâne, Créaphis, 2003, 214 p.
PELLEN Michèle, L’évolution urbaine de Pantin, Mémoire de D.E.S. de géographie présenté
à la faculté des lettres de Paris, 1956.
POURTEAU Roger, Pantin 2000 ans d’histoire, Paris, Temps actuels, 1982, 203 p.
LABORDE Marie-Françoise, Architecture industrielle, Paris et alentours, Paris, Parigramme,
2003, 207 p.
Le meunier de Paris, 75 ans d’histoire des Grands Moulins de Paris, Paris, Somogy, 1996.
TEXIER Simon, « Les Grands Moulins de Pantin », dans Béatrice de Andia et Simon Texier (dir.),
Les canaux de Paris, Paris, Délégation à l’action artistique de la ville de Paris, 1994, p. 159-162.
Iconographie
Les sources imprimées mentionnées en bibliographie, spécialement les articles publiés
dans La Meunerie française, Le Génie civil et L’architecture française comprennent des
gravures (vues, plans) et photographies imprimées, illustrant aussi bien l’évolution
architecturale des Grands Moulins de Pantin que celle des équipements intérieurs, depuis1886
jusqu’à la construction du « silo canal » en 1934. Voir le dossier iconographique (sélection de
documents).
Les plans accompagnant les dossiers de demande d’autorisation de construire,
conservés aux archives municipales de Pantin (voir supra), permettent de suivre avec
précision l’évolution des constructions, depuis les projets d’Eugène Haug (1921 et 1923)
jusqu’à l’aménagement d’un portique de déchargement des grains en bordure du canal (1995).
Voir le dossier iconographique (sélection de documents).
Plusieurs séries de cartes postales sont consultables aux archives municipales de
Pantin (2 Fi) ainsi qu’aux archives départementales de la Seine-Saint-Denis. Voir le dossier
iconographique (sélection de documents).
7
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Les archives municipales de Pantin conservent également une collection de tirages
photographiques en noir et blanc comprenant plusieurs vues de l’incendie du 19 août 1944 et
diverses états des bâtiments jusqu’aux années 1960 (3 Fi 4163 à 4178) ; la copie numérique
d’un document d’entreprise montrant l’état des constructions après l’incendie (16 Z) ; ainsi
qu’une série de diapositives réalisées en 2001 par Daniel Ruhl, photographe de la Ville de
Pantin (16 Z). Voir le dossier iconographique (sélection de documents).
Les Grands Moulins de Pantin ont fait l’objet de plusieurs films ou documentaires,
dont Jeux de joutes sur le canal de l’Ourcq (Actualités Gaumont, 1930) et L’amour existe de
Maurice Pialat, en 1961.
8
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
ANNEXE 1
Historique et description architecturale
Historique
Abel Stanislas Leblanc, minotier de la Brie, s’intéresse au pain des Parisiens : pionnier
de la mécanisation, le notable de Mouroux fait construire en 1882, au seuil de la capitale,
entre le canal de l’Ourcq et les voies du chemin de fer de l’est, un moulin équipé de 24
meules1. A sa mort, en 1883, son fils Abel Désiré Leblanc crée avec le meunier Duval la
société des Moulins de Pantin et choisit d’adopter, dès 1884, le procédé de la mouture
hongroise2. En 1915, à la mort d’Abel D. Leblanc, les Grands Moulins de Pantin assurent une
production de 600 qx/j et se placent au 7e rang pour l’approvisionnement de la capitale (1er
rang, Corbeil, 8000 qx/j)3. La construction de l’actuelle minoterie s’explique en grande partie
par le contexte de l’après-guerre : la stagnation de la production céréalière française, la lenteur
de sa mécanisation, la croissance de la demande urbaine et par suite la cherté des grains
encouragent la concentration de l’activité meunière. Après divers legs et achats, l’un des
principaux acteurs de cette évolution, la société anonyme de Strasbourg - Port du Rhin
(propriétaire des Grands Moulins de Strasbourg) fonde en 1921 la société des Grands Moulins
de Pantin-Paris dont elle devient actionnaire majoritaire4. D’où le choix de l’architecte
strasbourgeois Eugène Haug, successeur (avec son associé Brion) de Paul Friesé sur le
chantier des Grands Moulins de Corbeil5. La construction débute en 1923 par le moulin, suivi
en 1924-1926 par un silo à grains de 10000 quintaux6. La Société anonyme des anciens
établissements Ed. Zublin conçoit en 1927 les quatre premières travées du silo à grains
« canal » (70000 qx), augmenté de trois travées en 1933-1934, ce qui porte la capacité de
stockage à 130000 qx pour une production de 5000 qx/j7. La chaufferie, élevée entre 1924 et
1926, est équipée d’une chaudière de type Babcock et Wilcox (étudiée : IM93000280), et
flanquée d’un silo à charbon d’une capacité de 1200 tonnes. L’ensemble est complété par la
1
A.N., MC, XLVIII (maître Dufour), 1109, acte de constitution de la Société anonyme des Moulins Abel
Leblanc, 23 septembre 1879.
2
« Les Moulins de France. Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, juillet 1886, p. 220.
3
A.N., F12 110.
4
Chambre de Commerce de Paris, département central des archives, 2SE 0257, Vingt-troisième rapport
financier des Grands Moulins de Strasbourg, société anonyme Strasbourg-Port du Rhin, exercice 1921, p. 5.
5
Voir par exemple : Inventaire général des monuments et richesses artistiques de la France, Patrimoine
industriel, cinquante sites en France, Paris, Editions du Patrimoine, 1997, p. 66-67 (double page consacrée aux
Grands Moulins de Corbeil, par Hélène Jantzen).
6
A.M. Pantin, 21W8, dossier sans n° de PC.
7
Ibid.
9
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
construction du quai (1930) et de la « boulangerie » (fournil ou moulin d’essai, 1933)8. Après
l’incendie du 19 août 1944, provoqué par un tir de D.C.A. allemande sur une barge chargée de
mines, l’ancien magasin à farine est arasé9. Sa reconstruction, entre 1945 et 1948, est confiée
à l’architecte Léon Bailly. Le moulin, la chaufferie, les silos « préparation mouture » et les
silos « canal », dont la structure porteuse n’est pas atteinte, sont restaurés10. Léon Bailly
conçoit encore la semoulerie11 (1952, flanquée en 1958 de nouveaux silos12 conçus d’après les
plans de Pierre O. Bauer), les ateliers et garages, le laboratoire, les nouveaux bureaux (19581960, projet repris par Alain Bailly en 1959)13 et le « silo Danton » en 1961 (projet de 1958
revu par Alain Bailly, suite à l’accord du maire en 1959)14. Au cours des années 1960,
l’ingénieur J. Quost fait élever de nouveaux silos à farine (1962)15 et à issues (1969)16. De
6000 qx/j en 1948, le moulin atteint une production de 15 000 qx/j en 1981, employant
jusqu’à 200 ouvriers17. Entre 1970 et 1990, les Grands Moulins de Pantin, contraints
d’accroître leur productivité face à la concurrence des coopératives sur les marchés à
l’exportation, et menacés par la diminution de la consommation de pain en France, s’engagent
dans la boulangerie industrielle (marque « Baguépi »), automatisent la production, et
réduisent leurs effectifs. En 1980, François Mathieu procède à l’extension du magasin
(silos)18. La semoulerie est fermée en 1985. Racheté par le groupe Soufflet en 1996,
l’établissement cesse son activité de meunerie en juin 2001, puis son activité d’ensachage en
mars 2004 : les moyens de production sont concentrés sur le site de Corbeil. Vendu au cours
de l’été 2004 à un promoteur immobilier, l’ensemble doit être, après démolitions partielles,
converti en immeubles de bureaux par le cabinet d’architectes Reichen et Robert.
Description
Etablissement desservi par voie navigable, embranchement ferroviaire et voie
particulière. Les bâtiments de production et de stockage, disposés au sud et à l'est de la cour
centrale, suggèrent, par leur élévation, la circulation verticale des hommes et des produits :
une architecture « parlante », dont les passerelles de liaison horizontale assure la cohérence et
la lisibilité. Le blé, acheminé par le canal, la route ou le rail, est stocké dans le silo « canal ».
8
A.M. Pantin, 43 W 33, PC sans n°, construction d’un moulin d’essai, d’un laboratoire et d’une école de
boulangerie (plans, signature illisible), 1932.
9
A.N., Centre de archives contemporaines, 19870678, art. 39, rapport produit par la société anonyme des Grands
Moulins de Pantin, à l’adresse du MRU, précisant les circonstances et de conséquences de l’incendie du 19 août
1944.
10
Id., art. 39-62, suivi des travaux, 1945-1948.
11
A.M. Pantin, 43 W 33, PC 52.3316.
12
A.M. Pantin, 43 W 33, PC 58.231.
13
A.M. Pantin, 43 W 32, PC 58.288 (Bureaux et habitations, 1955-1956 ; Surélévation des appartements rue du
Débarcadère, 1958) ; 43 W 33, PC 52.3316 (Construction de la semoulerie, 1956), PC 55.3840 (Bureaux et
habitations rue du Débarcadère, 1955), PC 58.231 (Construction des silos de la semoulerie (Paris), 1958).
14
A.M. Pantin, 43 W 31, P.C. 59.431.
15
A.M. Pantin, 43 W 32, PC 62.837.
16
A.M. Pantin, 43 W 32, PC 66.1630.
17
Voir infra Philippe Charpin, « Les Grands Moulins de Pantin, histoire et mémoire de l’usine ».
18
A.M. Pantin, 129 W 16, PC 77.94, agrandissement du Magasin à farines par la construction d’un ensemble de
silos, 1977-1980.
10
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
La société Zublin conçoit un édifice en béton armé paré de brique, composé de sept travées de
stockage vertical surmonté d'un étage carré et coiffé d'un toit à croupes culminant à 52,69 m ;
le vocabulaire d'inspiration militaire est préféré au principe nouveau de la cellule cylindrique
apparente. Lieu de stockage plus récent (1961), le « silo Danton », approvisionné par la route,
présente une structure en béton armé (masquant également les cellules) surmontée d'un toit
terrasse ; il est relié au site principal de l'usine par un système souterrain de bandes
transporteuses. Depuis le silo « canal », le blé emprunte une passerelle couverte en béton armé
surplombant la chaufferie et rejoint, pour y subir l'avant-nettoyage, le « silo préparation
mouture » (premier silo conçu par Eugène Haug). L'élancement vertical de ce silo-forteresse
en béton armé paré de brique, haut de 34,39 m, est accentué par la présence, en son sommet,
d'une tour coiffée d'un toit à croupes. Un système souterrain de bandes transporteuses le relie
au moulin. Retenant le parti de l'architecture régionale alsacienne, le moulin d'Eugène Haug
(en béton armé paré de brique, à cinq étages carrés), présente trois étages de combles couverts
d'un toit à pans brisés et demi-croupe. La tour carrée de 47 m, portant une horloge sur
chacune de ses faces, abrite un escalier tournant et, en son sommet, un château-d'eau ; elle est
couverte d'un toit en pavillon à pans brisés surmonté d'un clocher dressé sur quatre arcs en
plein cintre. Séparé verticalement en deux tranches de production – l'une affectée au
nettoyage, l'autre à la meunerie – le moulin conserve notamment, outre des machines
destinées à être vendues (étudiées), un remarquable système d'élévateurs à godets réalisés par
les services menuiserie et mécanique de l'entreprise (étudié). Ce bâtiment central est relié au
magasin à farine par une passerelle couverte en béton armé portant l'inscription « Grands
Moulins de Pantin ». Elevé après l'incendie de 1944, ce nouveau magasin reprend le
vocabulaire architectural du moulin : béton armé paré de brique, neuf étages carrés, trois de
combles, toit à pans brisés. Il conserve trois toboggans métalliques de manutention
hélicoïdaux (encore en place), dont l'un, remarquable, est à double hélice. La lecture du
process et des bâtiments s'achève avec le chargement des produits : les sacs sont expédiés par
wagons et camions ou empruntent la galerie surmontant le quai de déchargement pour
rejoindre le canal. A l'écart, la semoulerie construite en béton armé et parement de brique,
comprenant cinq étages carrés couverts d'un toit-terrasse, présente une succession de larges
baies horizontales inspirées de l'architecture industrielle américaine du début du XXe siècle.
Les garages et ateliers, en rez-de-chaussée, sont construits en béton armé paré de brique. Le
bâtiment administratif d'entreprise, de mêmes matériaux, est à trois étages carrés couverts d'un
toit-terrasse. Enfin, la « boulangerie », construite parallèlement aux voies de chemin de fer et
marquant ainsi l'entrée du site, offre un corps central à trois étages carrés coiffé d'une corniche
en béton et d'un toit-terrasse ; la façade en parement de brique, dissimulant une structure en
béton armé, porte le monogramme « GMPP » (Grands Moulins de Pantin-Paris).
Nicolas Pierrot, 2004
11
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
ANNEXE 2
Les Grands Moulins de Pantin
Histoire et mémoire de l’usine
Première partie : Historique ................................................................................ 13
Deuxième partie : La marche de l’usine ............................................................. 31
Troisième partie : Mémoires de l’usine .............................................................. 46
12
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Première Partie
Historique
Cette histoire des Grands Moulins de Pantin a été écrite sans les archives de
l’entreprise. Le Groupe Soufflet, leur propriétaire, n’a pas souhaité les mettre à notre
disposition avant d’avoir vendu le site de l’usine. C’est pourquoi des sources capitales
manquent, qui peuvent éclairer et étayer ce périple dans le temps qui va suivre. Néanmoins,
on trouvera dans les grandes lignes, les temps forts qui vont marquer l’évolution d’un
établissement emblématique du patrimoine industriel de la Seine-Saint-Denis.
I – Les Moulins Abel Leblanc
Abel Stanislas Leblanc, meunier de la Brie
C’est en 188219 que débute la production du premier moulin de Pantin construit par
Abel Stanislas Leblanc, minotier de la Brie.
Abel Stanislas Leblanc est né à Coulommiers en Seine-et-Marne en 1806. D’origine
modeste – son père est marchand fripier – il débute comme simple ouvrier chez M. Darblay20
(propriétaire des anciens moulins de Corbeil). Fort de l’expérience acquise, il décide de se
lancer à son compte dans la meunerie. Il va acheter et exploiter progressivement quatre
moulins à farine situés sur la rivière du Grand Morin à Coulommiers et Mouroux (commune
limitrophe) en Seine-et-Marne. Sa première acquisition, le 8 avril 1846, le Moulin des
Religieuses, est situé près de la place de l’Hôtel de Ville à Coulommiers. C’est un moulin à
eau équipé de 4 paires de meules « monté d’après le système anglais »21 comme ses futures
acquisitions.
Il faut comprendre par là que des meules de pierre très rapprochées et tournant très vite
écrasent, en une seule fois, le blé. Ce système s’oppose à l’époque à la mouture dite française
19
A.M. Pantin, Registre n°364, Matrice des contributions personnelles, immobilières et patentes de Pantin, 1882.
A.N., F12 5187, Légion d’Honneur, accession d’Abel Stanislas Leblanc au grade de Chevalier, 28 août 1871.
21
A.N., Minutier central, Etude XLVIII, 1109, Acte de constitution de la Société anonyme des Moulins Abel
Leblanc, 23 septembre 1879.
20
13
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
commune dans les petits moulins, où de grandes meules à rotation moins rapide concassent le
blé par passages successifs22.
Puis, sept ans plus tard, le 15 décembre 1853, Abel Leblanc achète le Moulin des Près,
à Coulommiers, également moulin à eaux faisant tourner 10 paires de meules. Mais, l’année
suivante, notre homme se lance dans la meunerie « industrielle » en achetant le Moulin de
Mouroux le 23 décembre 1854. C’est en effet un moulin à eaux mais aussi à vapeur équipé de
16 paires de meules. Enfin, onze ans plus tard il complète cet ensemble par l’achat du Moulin
de Coubertin, sur la commune de Mouroux, comprennant quant à lui de 9 paires de meules23.
En 1867, ces établissements écrasent ensemble 120 à 140 000 quintaux de blé ce qui
fait d’Abel Leblanc l’un des plus importants fabricants de farine de la région. Il obtient en
1851 et 1862 une médaille à l’Exposition de Londres, et en 1867 et 1878, une médaille d’or
aux Expositions Universelles de Paris24 « tant pour la qualité remarquable de ses produits
que par les progrès et améliorations considérables qu’il a fait faire à la meunerie »25. Devenu
notable, maire de Mouroux, Abel Leblanc demande et obtient comme beaucoup de ses pairs
minotiers, la Légion d’Honneur. Le 28 août 1871, il reçoit l’insigne de Chevalier des mains
d’Alphonse Dollez, ancien directeur de l’approvisionnement de la ville de Paris. Il avait été
soutenu dans sa requête par J.-B. Rousseau, député de Seine-et-Marne, lequel déclarait à
propos du meunier : « Sa marque est recherchée à l’égal des six marques. Il vend même sa
farine à un prix supérieur… Il emploie toute l’année entre 80 et 100 ouvriers qu’il loge et
nourrit en grande partie »26.
Lors du siège de Paris de 1870 par les troupes prussiennes, son fils Abel Edouard
Désiré Leblanc participa au ravitaillement de la capitale. Il supervisa la mouture de 150.000
quintaux de blé « sans la moindre rétribution »27 dans le moulin installé en gare du Nord, l’un
des cinq moulins de fortune parant aux besoins des 2 millions d’habitants.
Le catalogue de l’Exposition Universelle de Paris en 1878 donne un bon aperçu de la
profession dans laquelle excelle Abel Leblanc. « De toutes les industries alimentaires, la plus
importante et la plus répandue est la meunerie. La meunerie en France transforme par jour
en farine 300 000 hectolitres de grain. Une paire de meules dans les conditions normales
moud 20 hectolitres par jour […] La meunerie emploie donc en France 15 000 paires de
meules et 60 000 chevaux vapeurs… Aujourd’hui il n’est pas une contrée en France où à côté
de ces petits moulins, on ait élevé plusieurs grandes minoteries réunissant 5 et jusqu’à 10
paires de meules et pourvues à la fois de moteur hydraulique et de moteur à vapeur pour
éviter tout chômage dans les saisons de basses eaux […] La force mécanique y joue le
principal rôle et la main-d’œuvre n’y entre que pour une faible part. Un homme par paire de
meules dans un moulin bien organisé suffit à l’ouvrage avec un rhabilleur pour chaque série
22
Article « Meunerie », La Grande Encyclopédie. Inventaire raisonné des sciences, des lettres et des Art, Paris,
1910.
23
A.N., Minutier central, Etude XLVIII, 1109, Acte de constitution de la Société anonyme des Moulins Abel
Leblanc, 23 septembre 1879.
24
CNAM, 8° Xae 176 et 8° Xae 223.
25
A.N., F12 5187, Légion d’Honneur, accession d’Abel Stanislas Leblanc au grade de Chevalier, 28 août 1871.
26
Ibid.
27
A.N., L 000 3003, Légion d’Honneur, accession d’Abel Edouard Désiré Leblanc au grade de Chevalier, 11
novembre 1900.
14
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
de 5 paires. Aussi, le prix de la farine dépend de celui du grain et varie comme lui […] 1207
boulangers à Paris et 270 boulangers-pâtissiers produisent 700 000 kg de pain par jour. »28
L’implantation à Pantin
Fort de son savoir-faire, l’ambitieux Abel Leblanc, décide de se rapprocher du vaste
marché parisien en construisant un moulin à Pantin.
Le choix du site de Pantin est judicieux. Depuis l’agrandissement de Paris en 1860
avec l’annexion des communes limitrophes, Pantin se trouve désormais aux portes de la
capitale. Remarquablement desservie par le Canal de l’Ourcq et le chemin de fer (la gare de
Pantin est inaugurée en 1864), et disposant d’un bassin de main-d’œuvre important, la
commune va attirer très rapidement de nombreuses industries stimulées par les débouchés du
marché parisien. En 1885, « Pantin devient ainsi la ville la plus industrielle de tout le
secteur »29.
Or le terrain acheté le 5 avril 1880 par Abel Leblanc et sa femme Lucie Françoise
Levesque est idéalement placé. D’une superficie de 10 664 m2, situé au lieu dit Clôture du
Rouvray30, il s’étend entre la rue du Débarcadère et le canal. Proche de la gare, c’est un lieu
stratégique puisque le moulin va pouvoir facilement recevoir et expédier aisément les blés et
farine par wagon et péniche.
Les moulins seront parmi les premiers à s’implanter dans cette zone31 qui va subir une
très forte pression foncière. En 185932, les spéculateurs Leroy Frères et Forest avaient acheté
huit pièces de terrains agricoles d’une superficie totale de 510 267 m2 de part et d’autre du
canal, dépendant de l’ancienne ferme du Rouvray ayant appartenue à l'Abbaye de SaintMartin-des-Champs33. Ils les morcelèrent pour les revendre en parcelles. C’est l’une d’elles,
que vont acheter les époux Leblanc.
Parallèlement, Abel Leblanc achète une parcelle contiguë de 4 326 m2, située sur un
terrain appelé Chantier Forain34 que les Grands Moulins de Paris rachèteront en 1940. Elle
sera l’affaire du fils Leblanc qui, depuis 1879, a obtenu le droit de s’appeler officiellement
Abel-Leblanc. Il s’associe en effet à Louis Ernest Ladurée négociant, en novembre 1879 pour
créer une société35 qui va d’abord exploiter un entrepôt de marchandises attesté en 188036.
Puis l’année suivante37, les associés vont y installer une scierie mécanique à vapeur pour le
bois de construction employant 15 personnes ainsi qu’un entrepôt général de bois. Au
voisinage immédiat, plusieurs marchands de bois s’installent également. C’est surtout le cas
28
CNAM, 8°Xae 223, t. 3.
Pourteau Roger, Pantin , deux mille ans d’histoire, Paris, Messidor/Temps Actuel, 1982, p. 103.
30
A.M. Pantin, Matrice cadastrale, Section A, parcelle 698 ; registre, fol. 2589.
31
A.D. Seine-Saint-Denis, P° 3 vol 3, « Plan de la commune de Pantin », dressé par Lefèvre Frère, révisé en
1872. En 1872, les alentours entre la rue du Débarcadère et le Canal sont encore libres de toute construction.
32
Archives de la Seine, VN 4 / 154.
33
A.M. Pantin, U 002.
34
A.D. Seine-Saint-Denis, Patrimoine Industriel GMP, 10 AT 159/4, document n°2 non inventorié.
35
Archives municipales de Coulommiers, Leg Abel Leblanc, 2 L 100.
36
A.M. Pantin, registre n° 364, matrice des contributions personnelles, immobilières et patentes de Pantin, 1880.
37
A.M. Pantin, 9 W32, Etablissements classés, sommation de la Préfecture auprès du maire de Pantin pour que
l’entreprise lui adresse une demande d’autorisation d’exploitation, 2 octobre 1881.
29
15
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
de la société d’importation de chêne, rue du Débarcadère, qui va faire travailler à façon la
scierie mécanique. Autour de 1900, elle lui demande de fabriquer 80 000 m2 de parquet par an
qu’elle écoule à Paris et en banlieue38.
L’éphémère Société Anonyme des Moulins Abel Leblanc
L’investissement nécessaire à la construction du moulin amène Abel Leblanc à
s’associer avec des partenaires financiers. Le 23 septembre 1879, il fonde la Société Anonyme
des Moulins Abel Leblanc dont le siège est situé 51 rue Jean-Jacques Rousseau à Paris.39 Le
meunier apporte à l’entreprise ses moulins estimés à une valeur de 750 000 francs, auxquels
s’ajoutent « la marque de fabrique, la clientèle et l’achalandage de ses usines, les chevaux,
voitures, charrette, linges etc… » estimés à un million de francs. Son fils, Abel Edouard
Désiré Leblanc (dit Abel-Leblanc), est actionnaire à hauteur de 315 000 francs. Ils s’entourent
de huit autres actionnaires : Alfred Balenski propriétaire, et Ernest Balenski, banquier (qui
souscrivent respectivement pour 500.000 et 100.000 francs), Paul D’Angleys, propriétaire
(10 000 francs), Ernest-Charles De Mourgues, juge au Tribunal de commerce de la Seine40
(500 000 francs), Jules Féder (230 000 francs), Léopold Gaulet, propriétaire (25 000 francs)
Charles Kapferer, négociant (185 000 francs) et Vincent Mariéton (135 000 francs).
Selon l’article premier de ses statuts, la société a pour objet, outre l’exploitation des
moulins, celle de « tous établissements industriels de même genre que la société pourra
acquérir ou affermer ».
Abel Leblanc père meurt le 4 novembre 188341.
Le rôle de cette société dans l’histoire des moulins de Pantin est assez obscur. Nous
savons que le 23 décembre 1884, l’Assemblée générale extraordinaire décide la modification
de son appellation en Société Anonyme des Moulins de Pantin. Elle signale notamment aux
actionnaires que le fonds de roulement d’un million de francs est insuffisant, vu l’importance
des affaires et même « plus insuffisant encore depuis la mise en train du Moulin de Pantin ».
En conséquence, elle réclame un appel de fonds. Cette démarche n’ayant apparemment pas
été suivie d’effet, le 8 mai 1885 l’assemblée générale « décide purement et simplement la
dissolution le jour même de la société »42.
L’installation des cylindres
Désormais seul aux commandes, Abel-Leblanc décide quelques mois plus tard de faire
appel à Gustave Léopold Duval, et son fils, anciens meuniers de la Brie à la Ferté-sousJouarre pour gérer la marche du moulin. Pour ce faire, les Duval, vont constituer une société
en nom collectif le 12 octobre 1885 au capital de 200 000 francs43 et créer parallèlement sous38
Etat des communes à la fin du 19ème siècle, Pantin, Département de la Seine, 1901, p. 133-134.
A.N., Minutier central, XLVIII, 1109.
40
A.N., F12 5125, Légion d’Honneur, accession d’Ernest-Charles de Mourgues au grade de Chevalier, 1866.
41
Archives municipales de Coulommiers, Leg Abel Leblanc, 2 L 100.
42
A.N., Minutier central, XLVIII, 1109.
43
Archives de Paris, Registre des constitutions de société, D 32 U 66.
39
16
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
seing privé avec Abel-Leblanc une société dénommée « Les moulins de Pantin » qui entérine
leur partenariat44.
C’est avec l’arrivée des Duval que le moulin va connaître sa première
amélioration majeure, l’installation de cylindres en remplacement des 12 paires de meules
initiales45. Cette innovation suit en fait un mouvement général et très rapide qui s’impose à
l’ensemble des meuniers industriels de France.
Ce changement radical répond en effet à une nécessité commerciale. Les farines
françaises sont de plus en plus concurrencées par celles obtenues selon le nouveau procédé dit
de « mouture hongroise ». La Hongrie exporte depuis 1875 de belles farines blanches,
moulues par des cylindres de porcelaine ou de métal et que seuls quelques moulins français
possèdent. Installation plus complexe et plus onéreuse, elle permet par passages successifs
dans différents types de cylindres de séparer dans le grain de blé la partie centrale, l’amande,
la plus fine et la meilleure46.
En 1885, s’ouvre à Paris l’Exposition Spéciale de Meunerie et Boulangerie afin
d’affranchir les meuniers sur les nouvelles techniques. Un an plus tard, se crée l’Association
Nationale de la Meunerie Française, syndicat de meunier, qui, avec son journal, La Meunerie
Française, tient la profession au courant des derniers développements technologiques et
soutient les meuniers pour franchir le cap de la coûteuse innovation47.
En 1886, le Moulin de Pantin est déjà équipé de cylindres. Il figure ainsi parmi les
premiers moulins de France à avoir fait cet investissement. Les grands Moulins de Corbeil,
par exemple, leader du marché de la région parisienne, restent équipés de 80 paires de meules
jusqu’en 188848.
L’installation est réalisée au moulin de Pantin par la maison Brault, Tesseit et Gillet de
Paris et Chartres. La première description du moulin datant de juillet 1886, et l’une des rares
disponibles, nous en donne un aperçu49.
Le moulin constitue déjà un grand ensemble comprenant à l’entrée un corps de logis
réservé aux bureaux et à l’habitation, puis au centre d’une vaste cour « où circulent à leur aise
les wagons de chemin de fer et les voitures » un grand bâtiment de 5 étages servant à la fois
de magasin à farine et de silo à blé. Celui-ci est relié au moulin qui compte 5 étages par une
passerelle de 14 mètres de long50.
Le blé arrive en sous-sol, tracté par une vis d’Archimède, jusqu’au nettoyage situé en
annexe du moulin et séparé par un gros mur pour diminuer les risques d’incendie.
La fabrication est un processus complexe au cours duquel le blé va suivre un long
périple pour être transformé en farine et issues (son et remoulages).
Au rez-de-chaussée sont installés les 9 appareils à cylindre du système Ganz disposés
sur 3 lignes, soit 4 broyeurs à 4 cylindres et 5 convertisseurs (équipés de cylindres lisses) qui
44
Archives municipales de Coulommiers, Leg Abel Leblanc, 2 L 100.
« Les Moulins de France. Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, juillet 1886, p. 220.
46
Marcel Arpin, Historique de la meunerie et de la boulangerie, tome 1, « La meunerie », 1948, Ed. Le
Chancelier, p. 200.
47
Capillon Jean, « Instrument de recherche pour une histoire de la meunerie : "La meunerie française" (18851940) », L’Archéologie industrielle en France, n°14, décembre 1986, p. 51-77.
48
Marcel Arpin, Historique de la meunerie et de la boulangerie, tome 1, « La meunerie », 1948, Ed. Le
Chancelier, p. 200.
49
« Les Moulins de France. Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, juillet 1886, p. 220.
50
Ibid.
45
17
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
font subir chacun 6 passages au produit. Entre les différents passages et suivant son état de
transformation, le produit est renvoyé dans les étages sur le circuit pour être centrifugé,
nettoyé, tamisé. Les farines sont emmenées par une vis au magasin dans une grande chambre
où elle sont ensachées. « Une puissante machine, sortant des ateliers de construction de
Pantin fait marcher tout le mécanisme et répand pour ainsi dire la vie dans ce groupement
d’appareil et fait en même temps mouvoir une dynamo distribuant la lumière électrique »51.
Des innovations à la suite d'un incendie
Dans la soirée du 23 janvier 1889, le moulin de Pantin va connaître le premier sinistre
de son histoire. « Les quartiers situés dans l’extrême nord-est de Paris » nous raconte le
chroniqueur de La Meunerie Française « s’éclairaient soudain d’une immense lueur »52. Le
moulin était en feu. « Le bâtiment ne formait plus qu’une immense fournaise. Les flammes
s’échappant de la toiture défoncée et des ouvertures béantes des fenêtres, s’élevaient dans les
airs à des hauteurs prodigieuses, projetant, comme les fusées d’un infernal feu d’artifice, les
gerbes de farine incandescente et crépitante qui retombaient lentement en pluie.». Cet
incendie détruisit totalement le moulin, mais épargna les magasins grâce à la promptitude des
secours. Les assurances aidant, il fut reconstruit à l’identique en moins de sept mois.
Comme il est d’usage en pareil cas, Abel-Leblanc fera un don de 1 000 francs à la
mairie de Pantin pour qu’elle le distribue aux sapeurs pompiers de la commune53.
Cet accident va néanmoins permettre de doter le moulin « de tous les perfectionnements
modernes ». De fait, la maison Brault, Teisset et Gillet, installe sur les cylindres au nombre
désormais de onze, le système de cannelure hélicoïdale breveté par Franck Beall qui semble à
la pointe de la technologie du moment. Un éclairage électrique de 300 lampes permet à
l’usine de fonctionner sans interruption. Au moulin proprement dit, grâce au« triomphe de
l’art mécanique »54 45 tonnes de blé sont transformées chaque jour par seulement deux
équipes de quatre hommes travaillant chacune 12 heures. « Tout dans ce moulin est exécuté
mécaniquement et ceci est un avantage considérable tant au point de vue de la production
qu’à celui de la main-d’œuvre. Cette dernière réduite au minimum n’exige plus que quelques
hommes pour la surveillance générale des appareils, l’ensachage et la livraison des
farines »55. Les silos à blé sont agrandis (4 silos pouvant désormais contenir 1 300 quintaux
chacun), et les farines sont stockées dans 3 chambres qui peuvent en contenir 17 à 18 tonnes
chacune, situées dans le même bâtiment que les silos. Enfin, trois générateurs Weyher et
Richemond (fabriqués à Pantin) fournissent la vapeur nécessaire au moteur de 120 chevaux
construit par la maison Powel de Rouen56.
A la mort de son père, survenue le 3 février 1891, Fernand Duval décide de mettre fin
à sa collaboration avec les moulins de Pantin et dissout la société G. Duval et fils57.
51
« Les Moulins de France. Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, juillet 1886, p. 220.
« Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, 1890, p. 402.
53
A.M. Pantin, Procès-verbaux du Conseil Municipal, 28 mars 1890, reg. 990, fol. 17.
54
Le Génie civil, t. XXI, n° 6, 11.06.1892, p. 86-87, n° 522.
55
La Meunerie Française, novembre 1894, p. 275.
56
« Les Grands Moulins de Pantin », La Meunerie Française, 1890, p. 404.
57
Archives municipales de Coulommiers, 2 L 100, legs Abel Leblanc.
52
18
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Abel-Leblanc se trouve à nouveau et ce jusqu’en 1905 aux commandes du moulin
dont la marche quotidienne semble être assurée par un directeur technique. A la mort de sa
mère (le 18 octobre1892)58, il en devient l’unique héritier.
Les Moulins de Pantin vont être à nouveau au cœur de l’innovation technologique.
C’est en effet entre février et mai 1894 que s’y effectue le premier essai d’un nouveau
moteur à gaz pauvre de type « Simplex » conçu par Delamare-Debouteville et Malandi et
réalisé par les ateliers Matter et Cie de Rouen. C’est le plus gros moteur à gaz du monde. Le
combustible employé est le charbon maigre des mines d’Anzin. Avec une consommation de
103 kg de charbon à l’heure pour une énergie développée de 280 chevaux et 6100 litres d’eau
à l’heure pour le refroidissement du moteur, cette installation va battre des records
d’économie59.
L’arrivée d’Albert Guillon
Il semble que ce ne soit que douze ans plus tard qu’Abel Leblanc cède de nouveau la
gérance de son établissement. Il signe le 9 février 1905 un nouveau bail avec Albert Guillon,
ex-directeur des usines de la Société des Moulins de Corbeil et Myrtil Lucien Chapelain,
directeur des Moulins de Pantin. Les deux hommes ont formé une société en nom collectif
pour l’occasion. Le montant annuel du loyer est de 40.000 francs, à charge pour les locataires
de payer l’impôt foncier et autres charges incombant au propriétaire. Le bail stipule que les
preneurs s’engagent à entretenir et à améliorer le moulin. A l’expiration du bail, le bailleur
conserve tout le matériel ancien et nouveau moyennant, le cas échéant, dédommagement60.
Albert Guillon fait donc son entrée aux moulins de Pantin. Il y restera jusqu’en 1957 !
Transfuge des Grands Moulins de Corbeil, l’un des plus grands moulins de France et de loin
le plus gros de la région parisienne, Albert Guillon va apporter en tant que Directeur de
l’usine une nouvelle caution de qualité à l’établissement.
La collaboration entre Guillon et Chapelain est interrompue suite à la dissolution de
leur société le 6 février 1912. Un nouveau bail est contracté entre Abel-Leblanc et Albert
Guillon désormais seul pour la maintenance du moulin. Mais Abel-Leblanc prend soin de lui
faire signer une reconnaissance de dette de 220 000 francs, remboursable sur 20 ans, qui
correspond aux avances faites « à divers reprises pour le besoin de son industrie »61.
Le moulin, propriété de la ville de Coulommiers
Le 15 décembre 1915 Abel-Leblanc meurt sans héritier. Par testament olographe, il
lègue une fortune considérable à la ville de Coulommiers dont il est natif. L’ensemble des
valeurs immobilières est évalué à 2 933 885 francs. Elles comprennent, notamment outre le
Moulin de Pantin estimé alors à 775 000 francs, des propriétés à Coulommiers, et un
immeuble sis au 125-129 rue de Charenton à Paris dans le XIIe arrondissement. Il y a fait
58
A.D. Seine-Saint-Denis, 10 AT 159/4, dossier GMP.
La Meunerie Française, novembre 1894, p. 275.
60
Archives municipales de Coulommiers, 2 L 100, legs Abel Leblanc.
61
Ibid.
59
19
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
aménager un passage reliant la rue Crozatier dénommé de nos jours Passage Abel-Leblanc
inscrivant ainsi le personnage dans la toponymie parisienne62. A cela s’ajoutent 1 450 575
francs de valeurs mobilières.
S’il lègue pour 855.360 francs de rentes viagères à des relations, Abel-Leblanc, Maire
de Mouroux (une rue y porte son nom), administrateur de l’hospice de Coulommiers depuis
1880, Président d’honneur de la société de secours mutuels de Saint Simon pour les ouvriers
de Coulommiers, il n’a pas manqué de faire des dons charitables, notamment auprès de
l’hospice de Coulommiers63. La municipalité reconnaissante inaugurera, le 2 avril 1924, un
monument situé dans le parc des Capucins dédié à la mémoire de ses généreux donateurs
représentant le buste du père Leblanc, et en médaillon, ceux de sa femme et son fils. Mais
c’est surtout en nommant Hôpital Abel Leblanc son Centre Hospitalier Général, que la
municipalité inscrit cette illustre famille dans la mémoire locale64.
En décembre 1915, durant la Première Guerre mondiale, les Moulins de Pantin,
nommés Moulin Guillon par l’administration, seront rattachés avec une quarantaine d’autres
moulins à la Direction des Approvisionnements de la capitale. En terme de production
journalière, avec 600 quintaux, il arrive en septième position très loin derrière les Moulins de
Corbeil qui avec leur 8 000 quintaux dominent la profession65.
Ayant besoin de liquidité, la Ville de Coulommiers décide le 24 juin 1921 la mise en
adjudication des Moulins de Pantin à la barre du Tribunal civil de la ville pour 500 000 francs.
L’établissement est alors acheté par Henry Chasles, Président de l’Association Nationale de la
Meunerie Française, minotier à Quincy-sous-Sénart (Seine-et-Oise).
II – Les Grands Moulins de Pantin
Création de la Société Anonyme des Grands Moulins de Pantin-Paris
Henry Chasles revend le Moulin à La Société Anonyme des Grands Moulins de
Pantin-Paris, constituée le 18 juillet 1921 par devant Maître HOUOT, notaire à Nancy.
Le conseil d’administration de cette société au capital de 5 millions de francs se
compose d’Henry Chasles, Henry Lévy, industriel à Strasbourg, président de la société,
Achile Baumann, industriel à Illkirch-Graffenstaden (Bas-Rhin), Pierre Chasles, minotier à
Verneuil-l’Etang (Seine-et-Oise), Michel Diebolt-Weber, Sénateur du Bas-Rhin, Eugène
Meyer, banquier à Strasbourg et Paul Petit, administrateur de la Société Générale à Paris.
Si les Alsaciens y sont ainsi fortement représentés c’est que la société est constituée
par les Grands Moulins de Strasbourg66.
62
Jacques Hillaret, Dictionnaire des rues de Paris, t.1, p. 63, 8ème édition, 1985.
A.N., L 000 3003, Légion d’Honneur, accession d’Abel Edouard Désiré Leblanc au grade de Chevalier, 11
novembre 1900.
64
A.D. Seine-Saint-Denis, 10 AT 159/4, GMP, document n° 2.
65
A.N., F12 110, Ministère de l’industrie et du commerce.
66
Bureau du directeur des Grands Moulins de Pantin, premier rapport financier des GMP-Paris, 1921-1922.
63
20
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
La création des "Grands Moulins de Pantin-Paris" intervient en effet dans un contexte
économique particulier. Les surfaces cultivées ont diminué en France d’un tiers suite au
conflit mondial. Mais si le prix des céréales et du pain est souvent taxé, le meunier reste libre
d’acheter ou de vendre où bon lui semble, faisant jouer à plein l’économie de marché. Cette
situation encourage la restructuration des grandes entreprises de la profession.67 La meunerie
devient progressivement une grande industrie. De 1896 à 1931, 22 600 moulins vont
disparaître en France soit 60 % de l'ensemble des sites.
Ainsi, les Grands Moulins de Strasbourg décident-ils de s’implanter un peu partout en
France à Paris, Dijon, Lyon, Montélimar, Marseille ou Toulouse. Les Grands Moulins de
Paris démarrent leur production le 14 mai 1921.
Les Grands Moulins de Corbeil, de Pantin et de Strasbourg auront des participations
croisées de capitaux.
Une nouvelle usine
Les Moulins de Pantin, même « dotés de tout l’outillage nécessaire à l’exploitation
d’une minoterie » avec une capacité journalière de 800 quintaux « ne répondent pas aux
exigences modernes », annonce le premier rapport financier de l’entreprise68.
C’est pourquoi les Grands Moulins de Pantin sollicitent dès le 16 août 1921 auprès du
maire de la commune l’autorisation « de construire un bâtiment à usage de moulin avec ses
dépendances à l’emplacement des moulins existants ». Le nouveau moulin ainsi que le
bâtiment du nettoyage qui lui est accolé seront construits sur l’emplacement de l’ancienne
cour 69.
Les plans de cette nouvelle configuration sont confiés à Eugène Haug qui succéda,
avec son associé Brion, à Paul Friesé sur le chantier des Grands Moulins de Corbeil. Cet
architecte alsacien, très attaché au style de cette région, réalisera en 1925 la maison d’Alsace à
l’Exposition des Arts Décoratifs de Paris. La forme qu’il lui donna rappelle dans ses principes
celle des Grands Moulins de Pantin « Contrairement aux toitures en terrasse qui dominent
l’exposition, l’architecture de E. Haug avait tenu à rappeler l’architecture régionale d’Alsace
qui se caractérise par ses combles élevés et des ouvertures en tuiles plates. Un clocheton
conçu dans le goût alsacien couronne cet édifice. »70
Le permis de construire ne sera pas facilement accordé par le Conseil municipal car le
projet de construction dépasse en proportion ce que les règlements sanitaires autorisent 71.
Les premiers plans présentent un moulin de 11 étages dont 4 sous combles réduits en
définitive à 8 étages dont 3 sous combles. La salle des machines et la chaufferie initialement
prévues à l’ouest du moulin contre la parcelle du chantier forain, seront finalement installées à
l’est.
Le 30 janvier 1922, les Grands Moulins de Pantin-Paris présentent les nouveaux plans
au Maire. Ils présentent, accolé au moulin, un château d’eau d'une contenance de 40 000 litres
67
Le meunier de Paris, 75 ans d’histoire des Grands Moulins de Paris, Paris, Somogy, 1996.
Bureau du directeur des Grands Moulins de Pantin, premier rapport financier des GMP-Paris, 1921-1922.
69
A.M. Pantin, 21 W 8, dossier sans n° de PC.
70
La Construction moderne, 13 juin 1926.
71
A.M. Pantin, 21 W 8, dossier sans n° de PC.
68
21
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
prévu pour alimenter les extincteurs automatiques distribués dans l’usine. Le lanterneau qui
surplombe le château d’eau culmine à 47 mètres de hauteur, au lieu des 20 mètres autorisés.
« Nous faisons remarquer respectueusement que nous avons donné à cette construction un
caractère monumental et que les horloges que nous y avons disposées rendront des services à
la population de votre commune »72 .
Le permis est finalement accordé le 17 février 1922 « pour besoin d’industrie ». Ainsi
va commencer à s'élever un ensemble de bâtiments construits en béton armé recouvert de
briques, aux silhouettes très singulières. Dominant de leur masse imposante tous les alentours,
telle une « citadelle », les Grands Moulins de Pantin vont devenir l’un des emblèmes
architecturaux de l’est parisien.
Le 15 janvier 1923 est délivré, par une nouvelle dérogation, le permis de construire
d’un silo à blé permettant d’accueillir la quantité de blé nécessaire à l’augmentation prévue de
la production. Ces silos, dessinés par Eugène Haug sont « d’une dimension extraordinaire ».
« Il a été nécessaire de démolir une grande partie de ces vieux bâtiments pour obtenir une
place suffisante pour les nouveaux silos et la partie du vieux moulin qui existe encore est
employée provisoirement comme magasin à farine. Une passerelle en fer avec deux rubans
transporteurs à sacs fait communiquer les deux magasins à farine »73.
Les silos, achevés en 1926, sont également entièrement construits en béton armé à
parement de briques. Ils ont une capacité de stockage de 100 000 quintaux. Le moulin produit
alors environ 4 000 quintaux de farine par jour.
Mais très vite, ces silos se révèlent encore trop petits. Le 13 décembre 1927 un
nouveau permis de construire est délivré avec une nouvelle dérogation pour un silo à blé
d’une capacité cette fois de 80 000 quintaux, sur les plans du cabinet Ed. Zublin et Cie, dans
le même style que le précédant. Construits au début des années 30, ils sont situés en bordure
du canal à l'emplacement des silos du moulin d’Abel Leblanc démolis à cette occasion. La
verticale du bâtiment atteint 34,39 mètres. Elle est surplombée d’une tour culminant à 52,69
mètres. Cette dernière devait loger à l’origine un réservoir d’eau supplémentaire.74 Un projet
qui ne verra pas le jour consistait à ornementer la façade de ces silos côté canal de fausses
fenêtres et de bandeaux. L’idée sera reprise en 2002 par le cabinet Reichen et Robert qui a
remporté le projet de réhabilitation du site des Grand Moulin de Pantin.
A côté du premier silo élevé entre 1924 et 1926 a été construit, pour alimenter l’usine
en énergie électrique, une centrale thermique d’une puissance de 3 600 CV, flanquée de silos
à charbon d’une contenance de 1 200 tonnes. La chaudière est équipée de grilles mécaniques
provenant des fonderies et ateliers de La Courneuve75.
Pour financer ces travaux considérables la société des Grands Moulins de Paris
procéda dans des temps rapprochés à plusieurs augmentations de capital. Le 16 mai 1924, il
est porté à 10 millions de francs, à 15 millions le 17 mars 1925 et à 30 millions le 29 janvier
192676.
72
A.M. Pantin, 21 W 8, dossier sans n° de PC.
« Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin », La Meunerie française, 1926, p. 218-219.
74
A.M. Pantin, 28 W 8, dossier sans n° de PC.
75
A.D. Seine-Saint-Denis, 10 AT 159/4, document d’entreprise dactylographié, non signé, non daté.
76
Premier rapport financier des GMP-Paris, 1921-1922, Bureau du Directeur de l'usine.
73
22
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Les Grands Moulins de Pantin dans un marché sous contrôle (1930-1950)
A partir des années 30, marquées par la grande crise économique et les tensions
internationales, la meunerie va connaître un bouleversement considérable : l’arrêt de
l’économie de marché. Afin de limiter les effets de la crise sur un produit de première
nécessité, les meuniers se voient imposer leurs fournisseurs, la qualité et la quantité de farine
à produire et leurs débouchés. Le Service de contrôle des céréales et farines panifiables
(1930), l’Office Nationale Interprofessionnel des Céréales (1936) se chargeront de contrôler
cette activité. Un cadre réglementaire étroit prive ainsi la meunerie de sa liberté de manœuvre
qui marqua la décennie précédente.
Les moulins de France se tournent alors vers le rachat des contingents de mouture
auprès d’autres établissements pour accroître leurs capacités de production.
Cette économie dirigée perdure jusqu’au milieu des années 50, lorsque disparaîtront
les pénuries qui succèdent à la Seconde Guerre mondiale et que viendra l’essor des «Trente
Glorieuses ». Dans ce contexte, les Grands Moulins de Pantin entreprennent des
agrandissements qui donneront toutes leur potentialités lors du retour à la libre concurrence.
Vers 1935, Julien Haegel prend la direction des Grands Moulins de Pantin, à la
demande des Grands Moulins de Strasbourg. La famille Haegel restera aux commandes de
l’entreprise jusqu’en 1996.
Les silos sont agrandis en 1935, portant la capacité de stockage à 130 000 quintaux.
Les premiers silos de 1926 ne seront aménagés qu’après-guerre en silos de mélanges de
mouture. Pendant ce temps la capacité de stockage totale de l’usine est donc portée à 200 000
quintaux.
En 1933, un bâtiment est construit à droite de l'entrée pour abriter une école de
boulangerie, qui ne verra jamais le jour. Il accueillera finalement un laboratoire et un moulin
d’essais destinés à contrôler la qualité des blés et la farine produite77.
Cette année-là encore, on construit derrière le laboratoire un garage pour abriter de 5 à
20 voitures et camions automobiles de livraison ainsi qu’un dépôt de 22 500 litres de gasoil78.
En 1936, la production journalière des Grands Moulins de Pantin est de 4 500
quintaux, portée à 5 000 quintaux en 1939. 220 ouvriers répartis en 3 équipes travaillant 8
heures chacune font alors fonctionner l’usine.
Incendié le 19 août 1944, suite à l'explosion d'une péniche minée sur le Canal de
l'Ourcq, les moulins vont connaître le deuxième sinistre de leur histoire79. Le magasin à farine
est entièrement anéanti, le moulin a pris feu et il n’en reste que la carcasse. Toutes les
machines ont été détruites. Seuls les silos et la centrale électrique n'ont été que faiblement
endommagés80.
Malgré le coup très dur qu’ils subissent − l’activité ne reprendra que fin 1948 −, les
Grands Moulins de Pantin vont profiter de la reconstruction pour agrandir et moderniser leur
usine en partie grâce aux aides de l’Etat.
77
A.M. Pantin, 43 W 33, sans n° de permis de construire, plans [signature illisible], 4 mai 1932.
A.M. Pantin, 9 W32, Etablissements classés, demande d’autorisation des Grands Moulins de Pantin-Paris
auprès du préfet, pour installer un établissement compris dans la 2e classe des industries dangereuses, insalubres
ou incommodes, 8 mars 1933.
79
Pourteau Roger, Pantin deux mille ans d’histoire, Paris, Messidor/Temps Actuel, 1982, p. 166.
80
A.M. Pantin, dossier Grands Moulins de Pantin, notes dactylographiées.
78
23
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Le magasin à farine en ruine est reconstruit sur les plans de l’architecte parisien Léon
Bailly, désormais l’architecte attitré de l’entreprise. Prenant modèle sur le précédant, il
comporte désormais 13 étages.
Le matériel du moulin est remplacé par les modèles les plus récents, notamment les
cylindres de marque anglaise Simon. 100 ouvriers travaillent à la reconstruction des
bâtiments. La dépense globale de la restauration est estimée à 300 millions de francs81.
En 1940, la société des Grands Moulins de Paris achète un terrain contigu de 4 326 m2
sur lequel se trouvait la scierie d’Abel-Leblanc82. La superficie de l’usine est ainsi portée à
15 000 m2.
C’est là que les Grands Moulins de Strasbourg après avoir racheté le terrain aux
Grands Moulins de Pantin font construire, en 1952, une semoulerie sur les plans de Léon
Bailly. Elle est destinée à remplacer celle exploitée par les moulins alsaciens et qui fut
détruite en juin 1940 pendant la guerre.
Le choix de la région parisienne est stratégique, dans la mesure où elle constitue le
premier marché de consommation (40 % de la production nationale est destinée à la région
parisienne), tandis que la production se concentre entièrement dans la région de Marseille,
non sinistrée pendant la guerre.
Les facilités d'acheminement des matières premières depuis les ports de Rouen et du
Havre où arrivent d’Afrique du Nord et d’Amérique du Nord les blés durs, renforce le choix
du site de Pantin.
Pour bénéficier de l’aide de l’Etat au titre des dommages de guerre, les Grands
Moulins de Strasbourg font valoir dans un mémorandum daté de décembre 1951, que
l’implantation à Pantin serait beaucoup plus économique qu’une création ex-nihilo car elle
bénéficierait de tout l’équipement existant et représenterait ainsi «un emploi plus judicieux
des fonds de l’Etat »83
Des ateliers pour l’entretien de l’usine et un garage (abritant 12 voitures et 20
camions), destiné à remplacer le précédent, sont également construits au début des années 50
sur la nouvelle parcelle84.
Lorsque, le fils de Julien Haegel, Jules, lui succède au début des années 50, à la tête
des Grands Moulins de Pantin, l’entreprise prend le contrôle des Grands Moulins de Corbeil.
Mais pendant longtemps les deux entités du groupe vont continuer à se concurrencer.
Au seuil d’un nouvel essor, une description de l’usine de Pantin en 1956 permet de
mesurer la modernité de ses installations85.
Les trois-quarts des blés sont acheminés en vrac par péniches, wagons-citernes et
camions, le reste par sacs en wagons. L’usine constitue ainsi le premier client pantinois de la
SNCF. Membre associé de la Compagnie de Transports de Céréales, les Grands Moulins de
Pantin visent à améliorer le pourcentage de blé livré en vrac au fur et à mesure de
l’équipement des coopératives.
81
A.M. Pantin, Dossier « Grands Moulins de Pantin », notes dactylographiées.
A.D. Seine-Saint-Denis, 10 AT 159/4, document d’entreprise dactylographié, non signé, non daté.
83
A.M. Pantin, 43 W 32, P.C. 58288.
84
A.M. Pantin, 43 W 32, P.C. 503005, plans de Léon Bailly, 22 novembre 1949.
85
Bureau de la Direction des Grands Moulins de Pantin, présentation dactylographiée.
82
24
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Le déchargement des péniches s’effectue par aspiration pneumatique à raison de 600
quintaux l’heure. En 8 heures, sont déchargées deux péniches de 2 500 quintaux chacune et
dans le même temps une trentaine de camions ou de wagons, dont le chargement est acheminé
par bande transporteuse aux silos à la cadence de 1 200 quintaux à l’heure.
L’installation de nettoyage du grain fonctionne au rythme de 28 tonnes par heure. Le
blé y est débarrassé des grosses impuretés ; une batterie importante de colonnes sécheuses
permet de le ramener au degré d’humidité voulue ; une série d’appareils spéciaux (tarares,
séparateurs à disques à graines longues ou rondes, toboggans…) nettoie le blé.
Le moulin comprend 71 appareils à cylindres qui écrasent par passages successifs
entre des broyeurs, claqueurs et convertisseurs, 6 000 quintaux de blé par jour. « Aucun autre
moulin français ne possède, à notre connaissance, une longueur de cylindre aussi réduite
pour un rendement aussi élevé. Cela tient au diagramme particulièrement étudié de nos
installations ainsi qu’à une construction de plansichters, propre à notre entreprise et à un
procédé de refroidissement des cylindres, conçu et mis au point par le directeur technique de
la société, M. Guillon. » Le passage d'une canalisation d’eau froide (alimentée par un puits
situé à 108 mètres de profondeur au pied de la tour)86 au milieu des cylindres creux, les
empêchee en effet de surchauffer en surface et d’altérer la mouture.
La capacité totale des chambres à farine et à issues destinées au stockage et à
l’ensachage est de 15 000 quintaux. Les chambres à farines sont dotées de grilles mélangeuses
permettant d’homogénéiser le produit, « les premières réalisées en Europe ».
Actionnées par un ouvrier, le « tireur », des balances ensacheuses-peseuses procèdent
mécaniquement à la mise en sacs qui sont liés à la main ou cousus puis suivant la destination
plombés et étiquetés, puis envoyés par toboggan aux étages inférieurs pour être stockés ou au
rez-de-chaussée pour être chargés à dos d’homme dans les camions ou les wagons. Un tapis
roulant transporte les sacs directement au canal où ils sont chargés dans les péniches. La
capacité d’entreposage du magasin est de 30 000 sacs de 100 kg et 8 000 sacs de 50 kg.
Un parc de camions de 10 à 15 tonnes est affecté à la livraison de la farine pour les
boulangeries. La farine destinée à l’export (dite farine export) est expédiée par train et
péniche. Plus de 5 000 quintaux de produits et sous-produits sont ainsi livrés chaque jour.
350 personnes travaillent alors au moulin. L’importance de la main-d’œuvre sur le site
qui atteindra 500 personnes dans les années 70 s’explique par deux facteurs87.
Si la marche du moulin et du nettoyage, largement automatisée requiert seulement une
dizaine de conducteurs, il en va tout autrement de l’ensachage, du stockage et de la livraison.
Dans les étages du magasin travaillent plusieurs équipes de tireurs (ensacheurs), rouleurs
(transportant les sacs avec un diable), gerbeurs (empilant « cul sur gueule » les sacs). Les
coltineurs chargent à dos d’hommes des sacs qui pèsent 100 kg.
Mais c’est aussi toute une série de corps de métiers affectés à des tâches bien précises
qui concourent à l’entretien de l’usine : corroyeurs (réparant les courroies de transmission),
menuisiers (fabriquant les conduits de bois où circulent les produits), poseurs de soie (sur les
tamis de plansichters), canneleurs (réparant sur les cylindres), graisseurs (huilant les
machines), mécaniciens (affectés à l’entretien des machines), raccommodeuses de sacs…
86
Information fournie par Philippe Aligros (actif aux Grands Moulins de Pantin de 1958 à 1987), entretien du
13 mars 2003.
87
Selon le témoignage de Philippe Aligros.
25
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Mais aussi, maçon, tôlier, soudeur, ferblantier, électricien, magasinier, toupilleurs,
peintre, etc. Presque tout était fabriqué, entretenu et réparé en interne. On visait alors autant
que possible à l’autonomie.
L’usine de Pantin trouve son rythme de croisière (1950-1980)
Dans une économie en pleine expansion, les Grands Moulins de Pantin vont enfin
prendre leur essor sur un marché à nouveau ouvert à la concurrence au début des années 6088.
Soutenu par la croissance de ses débouchés, le moulin de Pantin va progressivement
augmenter sa production. Sous la houlette de M. Frionnet qui dirige l’usine de 1957 au milieu
des années 80, elle va ainsi doubler de 1955 à 1975 pour atteindre 10 000 quintaux l’heure.
L’exportation va devenir l’un des moteurs de la croissance des Grands Moulins de
Pantin. En 1955, ils créent la S.A.V.A. (Société pour l’Achat et la Vente
d’Approvisionnements) qui va prendre à en charge l’exportation des farines de Pantin et
Corbeil. En 1954 la moitié des 134 000 tonnes de blé écrasées à Pantin est exportée à
destination des territoires d’outre-mer ou des pays étrangers, l’autre moitié étant réservée à la
boulangerie parisienne89.
Le développement de l’exportation requiert l’installation d’un circuit d’étuvage afin
que la farine perde une partie de son humidité pour mieux voyager. L’opération est assurée
par 12 étuves, situées au 9ème étage. Il s'agit de tubes cylindriques à double parois entre
lesquelles circule la vapeur, alimentés par deux chaudières installées sous la centrale à
charbon. La chaleur est torride à cet étage. Les hommes y travaillent torse nu et des fontaines
à eau sont installées pour qu’ils puissent se désaltérer. En 1995, ce circuit est remplacé par
une installation ultra moderne deux fois plus rapide.
Jusqu’au début des années 70, l’usine de Pantin imprimait les sacs en coton, puis en
polypropène, destinés à la farine d’exportation. Après cette date, l'imprimerie fut transférée à
Corbeil. Le service comprenait deux machines à trois couleurs pouvant imprimer 12 000 sacs
par jour, installées au 9ème étage. L’usine possédait une collection d’environ 300 modèles de
sacs, représentant plusieurs dessins (L’Obelix, le Bélier, le Perroquet, l’Antilope…) en
fonction de la destination et du choix des clients.
L’introduction du vrac au début des années 60 est une autre étape importante de
l’usine de Pantin. Il va permettre la livraison de grosses quantités de farine chez les
boulangers. Les Grands Moulins de Pantin vont parfois soutenir financièrement leurs clients
afin qu’ils puissent installer la chambre à farine nécessaire dans leur fournil. Les premiers
essais avec un camion muni d’une cuve ont été réalisés à l’usine. On l’appelait le Spoutnick
parce que sa forme rappelait un peu le premier satellite que les Russes avaient lancé en 1958.
Les Grands Moulins de Pantin vont par la suite disposer d’une flotte de camions vracs et
semi-vrac. Ces derniers sont munis de plusieurs cuves chargées directement par aspiration
depuis les cellules du magasin. chaque cuve correspond à la commande d'un boulanger.
L’usine va également élargir sa gamme de production avec le démarrage de « Mélior »
en 1969. Les boulangers constatant à cette époque la diminution globale de la consommation
88
L’ensemble des informations restituées dans cette sous-partie provient des témoignages de Philippe Aligros,
Michel Bélorgey, Mohand Maouche et René Bénard (voir ci-dessous « Mémoire de l’usine »).
89
Bureau de la Direction des Grands Moulins de Pantin, présentation dactylographiée.
26
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
de pain, vont souhaiter diversifier leur production pour attirer de nouveaux clients. La
meunerie va répondre à cet impératif en créant des gammes de mélanges, les mixes, prêt à
l'emploi qui vont relancer la consommation.
De leur côté les Grands Moulins de Pantin rachètent la licence de fabrication
« Mélior » aux Moulins de Bobigny en 1969.
Les mixes vont permettre au boulanger et au pâtissier, artisans ou industriels, de
fabriquer toute une gamme de pains (céréales, complet…) viennoiserie (croissants,
brioches…) et gâteaux (génoise, cake, crêpe) par simple adjonction d’eau et de levure. La
production des mixes démarre à l’usine avec trois mélanges de 1 500 kg par jour. Seigle,
crème d’orge, riz, lait écrémé auxquels sont adjoints des additifs minutieusement dosés, sont
incorporés avec de la farine dans une mélangeuse.
Face au succès de ce genre de préparation, le nombre de mélanges passe à 22 de 2
tonnes chacun. Si la production est minime par rapport à celle de la farine, elle est en
revanche porteuse d’une forte valeur ajoutée et ouvre au meunier le créneau de la boulangerie
industrielle.
Avec la croissance de la production, de nouvelles infrastructures se révèlent vite
nécessaires. Dès 1958, Les Grands Moulins de Pantin demandent un permis de construire
pour un silo à blé situé pour la première fois en dehors du site, rue Danton, à une centaine de
mètres. Devant la réticence du maire, ils font valoir que la guerre a montré l’utilité de
stockage supplémentaire de céréales à proximité immédiate de la capitale pour la sécurité de
son ravitaillement. De plus, un silo trop éloigné se révélerait beaucoup trop onéreux en terme
de transport90.
Ayant obtenu gain de cause, les silos Danton sont construits en 196191 sur les plans
d’Alain Bailly92. Ils contiennent 25 cellules d’une capacité totale de 45 000 quintaux. Le blé
est acheminé à l’usine par une galerie souterraine.
Avec le développement du vrac, la nécessité d’augmenter la capacité de stockage de la
farine se fait rapidement sentir. En 1962, l’entreprise fait une demande pour la construction de
silos à farine supplémentaires sur les plans de J. Quost. Situés derrière le bâtiment du
nettoyage le long du canal d’où leur nom, les Silos Canal sont finalement achevés en
décembre 1966. De même hauteur et de forme similaire à la semoulerie voisine, ils
comprennent 16 chambres à farine d’une capacité totale de 2 000 quintaux93.
En mars 1969 est achevé le silo à issues sur les plans de J. Quost94. D’une capacité de
9 000 quintaux, il est construit au-dessus de l’atelier d’électricité. Il va permettre d’effectuer
de jour, l'ensachage des issues qui s'accomplissait la nuit, mais également de charger en vrac
des camions et des wagons. Avec le silo à issues va progressivement disparaître l’ensachage
de ce type de produit.
Au début des années 60 on construit également une extension des silos de la
semoulerie. Pour ce faire, les Grands Moulins de Strasbourg, sont obligés de louer un terrain
90
A.M. Pantin, 43 W 31, P.C. 59 431.
D’après une photographie portant le timbre de l’agence Chevojon, datée du 10 juin 1961, conservée dans les
archives de l’établissement.
92
A.M. Pantin, 43 W 31, P.C. 59 431, plan daté du 7 septembre 1959.
93
A.M. Pantin, 43 W 32, P.C. 62 837.
94
A.M. Pantin, 43 W 32, P.C. 66 1630.
91
27
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
405 m2 à la Ville de Paris et d’obtenir l’autorisation d’y construire car il est encore grevé des
servitudes zonières non constructibles95.
Enfin, en mars 1980, « l’extension silo », construite sur les plans de François Mathieu,
architecte parisien, répond à la nécessité d’augmenter à nouveau la capacité de stockage.
L’arrivée des boulangers industriels sur le marché entraîne, en effet, une multiplication des
types de farines produites pour satisfaire à leur demande. Cet édifice marque la fin de grands
travaux de l’usine. Situé dans un angle rentrant du magasin à farine, il prolonge le bâtiment
dont il a la même silhouette et la même hauteur (44,45 m au faîtage). Abritant 10 nouvelles
cellules de 1 640 quintaux chacune96.
Au cours de cette période de prospérité, l’usine connut un incident majeur le 6 janvier
1958, son troisième sinistre, l’incendie du magasin à farine : « vers midi et demi un ouvrier
aperçut les flammes entre le coffrage d’une vis de transport et le plafond du 8ème étage ; le feu
s’étendait déjà sur une longueur de 4 mètres. Aussitôt le personnel de l’établissement
entreprit la lutte à l’aide de deux robinets d’incendie mais le feu gagnait vite l’ensemble de
l’installation de l’étage ». Il se propagea jusqu’au 13ème étage et fut stoppé à 15 heures. « Ce
fut un gros travail que d’assurer l’asséchage de tous les étages d’un pareil bâtiment.
Jusqu’au lendemain à midi, le Régiment dut fournir des équipes de déblai pour, de concert
avec les ouvriers de l’établissement écarter tout foyer caché d’incendie »97.
Le magasin s’est arrêté pendant 8 jours. Les circuits de distribution ont été refaits avec
du matériel épargné. « Tout le monde s’est retrouvé au magasin à farine car il fallait nettoyer
les chambres qui avaient pris l’eau. Tout était devenu de la colle »98.
Les années 1980 : modernisation et licenciements
A partir des années 1980, la meunerie française rentre dans une nouvelle zone de
turbulences qui va conduire aux grandes restructurations de la décennie suivante.
Cette activité s’apparente à l’industrie lourde dans la mesure où pour amortir les installations
il faut produire en grande quantité avec des marges peu élevées.
Les meuniers se livrent à une vive concurrence, confrontés aux exigences du
consommateur. Ils vont aider les boulangers dans la commercialisation de leurs produits,
mettant en place une stratégie d’accompagnement et une politique de marque. Les Grands
Moulins de Pantin vont ainsi commercialiser à partir des années 80 une partie de leurs
produits sous le nom générique de « Baguépi ».
Pour parer à leurs difficultés structurelles, les Grands Moulins de Pantin vont
continuer à moderniser leurs outils de production, laquelle sera portée jusqu’à 12 000
quintaux par jour. Mais, dans le même temps, ils vont poursuivre un « dégraissage » de leur
personnel commencé au milieu des années 70. De 1973 à 1987,179 postes seront supprimés99.
95
A.M. Pantin, 43 W 33, P.C. 58 231.
A.M. Pantin, 129 W 16, P.C. 77 94.
97
« Un feu de cave à 30 mètres au-dessus du sol » dans Bulletin mensuel du régiment des sapeurs pompiers, Allo
18, n° 116, mars 1958, p. 92-93.
98
Souvenir de Philippe Aligros, actif aux Grands Moulins de Pantin de 1958 à 1987. Entretien du 5 mars 2003.
99
Les informations utilisées dans cette sous-partie ont, pour l’essentiel, été fournies par les témoins interrogés.
96
28
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Le magasin à farine qui emploie plus de cent personnes en 1970, déjà affecté par la
mise en place du vrac sera durement touché.
Plusieurs générations d’ensacheuses automatiques vont à partir de 1975 supprimer
bons nombres de tireurs et de rouleurs. En 1979, l’installation d’une presse à granulés pour les
issues, qui agglomèrent différentes qualités, va réduire le nombre de produit et va contribuer à
la fin de leur ensachage, les issues étant désormais livrées en vrac.
Les palettiseurs installés à la fin des années 80 vont signer l’arrêt de mort des
coltineurs puisque désormais, les sacs sont chargés dans les camions par des chariots et par
élingues dans les wagons. Par ailleurs, le chargement des péniches est supprimé.
La pose d’aiguillage et de sûretés automatiques sur l’ensemble des circuits de l’usine
va réduire le besoin de l’intervention humaine.
Vers 1987, le moulin est l’objet d’un certain nombre d’améliorations : augmentation
de sa puissance avec le changement des deux moteurs de 500 chevaux par 8 nouveaux
appareils de 200 chacun, remplacement des plansichters en bois fabriqués maison, par l’achat
de nouveaux appareils métalliques plus performants100. Avec l’implantation de nouveaux
pulvérisateurs sur le circuit qui rendent les farines plus lisses, ces installations vont réduire le
nombre de conducteurs chargés de la surveillance et du balayage. En effet, le produit
s’écoulant mieux, les risques de dégorgement, l’un des principaux incidents, se trouvent
diminués.
En 1990, l’usine est l’informatisée achevant de réduire la place de l’homme au strict
minimum. La marche du nettoyage est entièrement couplée sur celle du moulin. Plus personne
n’y est spécifiquement affecté.
Des mélanges de farine remplacent désormais le mélange préalable de blés pour
chaque mouture.
Parallèlement, l’effectif des différents services affectés à l’entretien va également
fondre. La modernisation des matériaux fait que certains corps de métiers n’ont plus de raison
d’être ou sont moins importants. Par exemple, la suppression des sacs de jute entraîne celle
des raccommodeuses de sacs et les personnes affectées à leur nettoyage. Le remplacement de
beaucoup de conduits en bois par des tubes métalliques ou en PVC limite l’intervention des
menuisiers.
L’amélioration de la qualité du matériel entraîne également moins d’interventions
humaines. Mais il y aussi la décision de la direction de recentrer le personnel de l’usine sur
l’activité principale : la meunerie. A la fin des années 1980, la sous-traitance commence à
assurer la maintenance et l’entretien du site, assistée par les techniciens du moulin devenant
de moins en moins nombreux et de plus en plus polyvalents.
En 1988, le service de livraison interne est également supprimé au profit de
transporteurs extérieurs. D’autre part, de plus en plus de matériels autrefois fabriqués par les
différents corps de métiers de l’usine sont achetés à l’extérieur.
A cela, s’ajoute la fermeture de la semoulerie en 1987 suite à l’arrêt de la production
de pâtes alimentaires de Corbeil. Elle entraînera une trentaine de licenciements.
100
Selon Jean-Philippe Aligros, ces achats se seraient échelonnée entre 1976 et 1983 [NP].
29
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
La restructuration des années 90 signe la fin de l’usine de Pantin
Les années 90 voient le marché de l’export à son tour être touché. D’abord parce que
les pays importateurs se dotent de leurs propres moulins et parce que les accords
internationaux de commerce vont limiter le droit à l’exportation des farines européennes par
ailleurs confrontées à la concurrence de farine importées101.
C’est une nouvelle période de concentration dans la meunerie qui commence. En
1992, avec l’arrivé de Laurent Haegel à la tête du Groupe, les Grands Moulins de Pantin
tentent de renforcer leur entreprise en créant la Holding Groupe Pantin reposant sur deux
pôles : Société Française de Meunerie d’un côté et Malterie Franco Belge de l’autre. Le
Groupe compte ainsi sur la haute rentabilité de ce dernier secteur où la réorganisation de la
production est achevée.
D’autre part la décision est prise de faire du Moulin de Corbeil, à la place de celui de
Pantin, l’unité phare du groupe. Cette décision capitale pour la destinée de l’usine de Pantin se
comprend d’une part en raison de l’imposante superficie des Grands Moulins de Corbeil
(5 hectares au lieu d’un et demi) qui lui donne les moyens de devenir un véritable pôle
industriel. Et d’autre part du fait du prix considérable que représente le site de Pantin aux
portes de la capitale.
En difficulté financière, le Groupe des Grands Moulins de Pantin est racheté en 1994
par le Groupe Soufflet pour 440 millions de francs102. C’est l’un des premiers négociants de
céréales en France. Propriétaire de cinq moulins dans l’hexagone, il devient avec cette
acquisition le premier meunier français.
Le recentrage sur le moulin de Corbeil s’accélère. Quatre plans sociaux auront raison
du personnel. En juin 2001, la production de l’usine de Pantin cesse pour ne laisser qu’une
activité d’ensachage et d’entreposage qui va s’arrêter dans les prochains mois.
101
102
Le meunier de Paris, 75 ans d’histoire des Grands Moulins de Paris, Paris, Somogy, 1996, p. 105.
Libération, 16 août 1994, p. 7.
30
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Deuxième Partie
La marche de l’usine
Faute d’avoir pu consulter les archives de l’entreprise ainsi que les documents
techniques afférents aux processus de production de l’usine de Pantin, la description qui va
suivre se fonde essentiellement sur la synthèse des renseignements apportés par les quatre
témoins interrogés, ainsi que par le directeur de l’usine, M. Jean-Philippe Aligros, et les
quelques ouvriers en activité, témoignages complétés par les indications techniques fournies
par le site internet « meunerie.com ». Il s’agit de présenter le fonctionnement de l’usine avant
sa fermeture en juin 2001.
Depuis presque deux ans, à la suite d’une délocalisation, l’usine de Pantin a arrêté de
moudre. Le site sert aujourd’hui et jusqu’à sa fermeture définitive prochaine, de lieu de
stockage et abrite encore deux unités d’ensachage de farine produite essentiellement aux
Grands Moulins de Corbeil.
Alors que, jusque dans les années 70, plus de trois cent personnes étaient employées
aux Moulins, seule une quinzaine travaille encore aujourd’hui dans le magasin à farine. Le
reste du site est plongé dans le silence d’une friche industrielle, d’autant plus pathétique que
la plupart des machines sont encore en place.
Il s’agit de suivre le processus de fabrication mis en œuvres par les Grands Moulins de
Pantin : de la livraison du blé jusqu’au départ des livraisons des farines et des issues. Le
produit va suivre un long parcours, transporté par des élévateurs, des vis d’Archimède, des
pneumatiques. Il va transiter dans plusieurs bâtiments, se reposer, repartir. L’automatisation,
sous la conduite vigilante des opérateurs, y est très poussée.
La conception des bâtiments, tout en hauteur, permet d’accroître la capacité de
stockage et d’utiliser la force de gravitation, un principe essentiel en meunerie où
d’innombrables tuyaux vont ainsi descendre le produit.
I – La livraison des blés
Situés au cœur de la première région céréalière d’Europe, les Grands Moulins de
Pantin reçoivent principalement leurs cargaisons de blé de la Beauce et du Gâtinais sur un
rayon de 100 km à la ronde. La CERAPRO, filiale du Groupe, puissant organisme de collecte
31
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
et de développement des méthodes de culture permet la livraison régulière de produits de
qualité. En moyenne, 12 000 quintaux arrivent quotidiennement soit par train, camion ou
péniche.
Les wagons
Jusqu’au milieu des années 80, les Moulins de Pantin se font livrer du blé par transport
ferroviaire. La desserte des wagons est très minutée car elle nécessite de traverser les voies
principales, lors du raccordement au réseau SNCF. Un tracteur prend le relais de la
locomotive et tire le convoi dans la cour. Les wagons, en général des citernes vrac, sont
d’abord pesés sur un pont-bascule. Puis, ils vont se garer sur le long du quai de déchargement.
Le blé est versé dans deux fosses grillagées qui le précipitent sur une bande transporteuse en
sous-sol, laquelle achemine le produit vers les silos.
Les camions
Jusqu’à une cinquantaine de camions arrivent quotidiennement à l’usine. Ils sont également
pesés sur un pont-bascule situé à l’entrée de l’usine qui présente la particularité d’être coupé
en deux par une voie ferrée. L’arrivée des gros porteurs de 25 tonnes a en effet obligé
l’entreprise à rallonger le pont-bascule pour pouvoir peser d’un seul tenant les cargaisons. De
plus, légèrement en pente, il a demandé une étude très spéciale du constructeur Philips. Les
camions vont ensuite décharger en se positionnant sur un pont levant. Le blé tombe également
sur une bande transporteuse en sous-sol.
Les péniches
Les péniches qui acheminent également des blés d’importation s’arriment le long du quai du
canal de l’Ourcq. Une suceuse pneumatique d’un débit variant entre 500 et 800 quintaux /
heure aspire les 200 à 300 tonnes de blé. A l’entrée du silo, une bascule pèse la quantité de
produit acheminé.
II – Les silos à blés
En fonction des résultats du laboratoire, le blé est orienté dans les différentes cellules
des silos selon sa qualité et sa provenance. C’est le Service des blés, chargé de la réception et
du stockage des blés qui tient toute la comptabilité des silos. Le silo principal d’une capacité
de 130 000 quintaux regroupe 42 cellules. Situé en bordure du canal et culminant à 52 mètres,
il domine le site de sa masse impressionnante. Le silo Danton, construit en 1961 (voir
32
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
l’historique), à l’extérieur du site, de l’autre côté de la rue Danton, comprend 25 cellules
d’une contenance totale de 45 000 quintaux.
Dans le silo principal, le blé est acheminé à raison de 1 000 quintaux à l’heure par trois
élévateurs munis de chaînes à godets jusqu’à la pointe du bâtiment. Là, il tombe dans des
goulottes où des pendulaires électriques, préalablement programmés, assurent l’aiguillage du
produit. En cas d’engorgement, l’ouverture d’une trappe actionne un contacteur électromagnétique qui arrête automatiquement l’acheminement.
Pris en relais par trois bandes transporteuses, le blé est envoyé dans les différentes
cellules des silos.
La programmation des circuits se fait par le service des blés à partir d’un tableau
synoptique situé au rez-de-chaussée du silo. Auparavant, un homme était chargé de régler sur
place chaque aiguillage à la main et surveiller l’écoulement du produit.
L’usine est parcourue par système sophistiqué et très imposant d’aération qui assure
l’évacuation des poussières de blé, hautement inflammables et dont la présence rendrait
l’atmosphère irrespirable et explosive. Des cyclo-filtres évacuent l’air et des écluses tamisent
les particules de produits qui sont réincorporées dans le circuit. Dans la meunerie industrielle,
en effet « on ne jette rien » (Philippe Aligros).
III – Le contrôle qualité
Après avoir été systématiquement pesé, le blé va subir un contrôle qualité strict, opéré
par le Service des blés et le laboratoire. Un ouvrier échantillonneur fait pour chaque livraison
une évaluation visuelle de la qualité ; voir si le blé est propre, s’il n’a pas germé. « S’il n’est
pas bon, discussions, qui peuvent aller jusqu'au retour à l’expéditeur » (Philippe Aligros).
Puis il prélève à la sonde un échantillon immédiatement analysé par le laboratoire ainsi que
d’autres échantillons qui lui seront transmis en fin de journée pour analyses complémentaires.
Le laboratoire
Le laboratoire était situé à l’origine dans les locaux de l’école de boulangerie (qui n’a
jamais fonctionnée) au-dessus du fournil d’essai. Il a été transféré dans les années 80, dans le
bâtiment accolé au devant du moulin.
Une équipe de quatre laborantines pratique dans un premier temps, en quelques
minutes, un test certifiant que le taux de germination éventuel du lot autorise ou non la
panification (indice de chute de Hagberg). Le laboratoire a ensuite pour fonction d’effectuer
une série d’analyses dont les résultats permettent de préparer les mélanges des blés de chaque
mouture : taux d’humidité, teneur en cendre qui donne une indication sur le taux d’extraction
possible, teneur en protéines... Enfin, à l’aide d’un moulin d’essai miniature, il obtient un
échantillon de farine sur lequel il calcule, avec un alvéographe, la « force boulangère » c’està-dire la qualité boulangère. Dans les années 60, le moulin d’essai beaucoup plus gros, se
développait sur 3 étages de l’école de boulangerie.
33
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
En fin de circuit, le laboratoire contrôle également la farine produite par l’usine en
effectuant de nouveau les tests sur chaque mouture.
Le fournil d’essai
Relayant le contrôle du laboratoire, un fournil équipé notamment de pétrins et de fours
reconstitue, à l’identique d’une boulangerie, les conditions de préparation et de cuisson de
différents pains pour s’assurer de la qualité des produits. Le fournil assure également le
service après-vente auprès des boulangers ainsi que la formation des clients sur la préparation
des nouveaux produits.
A l’orée du processus de production rappelons que le moulin était entretenu en interne
par une kyrielle de corps de métiers (canneleur, menuisier, corroyeur, bourrelier, ferblantier,
soudeur, mécanicien, électricien, maçon, graisseur, peintre….) qui constituaient les services
techniques. Modernisation et sous-traitance ont fait fondre les effectifs.
IV – Le nettoyage
Avant d’être moulu, le blé doit être d’une propreté irréprochable. L’opération du
nettoyage consiste à débarrasser la céréale de toutes les impuretés.
Le pré-nettoyage (dans le bâtiment du silo « préparation mouture »)
Avant d’être envoyée au nettoyage, les blés sont préalablement composés103, c’est-àdire que différentes qualités de blé sont mélangées dans des cellules de préparation en
fonction du type de produit à fabriquer. Pour ce faire, les blés sont remontés des cellules des
silos de stockage. Ils sont acheminés par une bande transporteuse, qui emprunte la passerelle
enjambant le bâtiment de la centrale électrique. Puis ils sont envoyés au dernier étage du silo
de préparation et de là, pris en relais par quatre bandes transporteuses, qui vont les diriger vers
les cellules appropriées. Le silo de préparation mouture d’une capacité totale de 45 000
quintaux compte 24 cellules. Au 8ème étage des trappes grillagées permettent de surveiller le
remplissage.
Avant le nettoyage, le blé va subir un pré-nettoyage au 3ème étage. Il va passer dans un
séparateur haut-débit (Marot). Muni d’un cylindre incliné à ouvertures de différents diamètres
il élimine par rotation les impuretés plus grosses et plus petites que le blé. Un petit séparateur
de reprise (Bühler) fignole l’opération. Enfin le blé est pesé au 2ème étage sur une balance
automatique (Chronos Richardson).
103
A partir des années 1990, du fait de l’adoption par les Grands Moulins de Pantin du procédé de mélange de
farines (dans le magasin), les blés acheminés vers le silos « préparation mouture » ne sont plus que d’un type par
livraison. On ne peut donc plus parler de composition des blés.
34
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Il tombe alors au sous-sol où une bande transporteuse passant sous la cour l’amène au
bâtiment du nettoyage accolé à l’arrière du moulin.
Les opérations de nettoyage (dans le bâtiment du nettoyage)
L’opération de nettoyage poursuit en la parachevant, l’élimination de tout ce qui est
impropre à la mouture. Elle vise à ce que n’arrive au moulin que le grain de blé nettoyé
jusqu’au sillon pour obtenir une belle farine blanche. Avec la modernisation à la fin des
années 80, l’opération automatisée est couplée désormais à la conduite du moulin. Du
nettoyage, il n’est resté que le nom du bâtiment et la fonction dans le diagramme mais plus
personne affecté au service.
– Des élévateurs amènent le blé au 8ème et dernier étage du bâtiment. Il commence par
être débarrassé des bouts de ferrailles en passant dans un magnétique (Sangati). A partir de là
débutent trois circuits parallèles d’un débit de 200 quintaux / heure chacun.
– Au 7ème étage une épointeuse (Bühler) fait passer la mouture en rideau où un courant
d’air élimine les éléments plus légers que le blé.
– Au 6ème un granosichter élimine à son tour par tamisage les éléments de poids
similaire au blé mais de forme différente comme le maïs.
– Au 5ème étage, un épierreur (Sangati) sépare les pierres de la même taille que les
grains de blé. Monté sur ressort, il éjecte en vibrant les petits cailloux qui retombent dans une
gamelle vidée toutes les 24 heures.En enlevant les pierres on supprime également les risques
d’incendie, car au moment du passage sur les cylindres de mouture elles pourraient causer des
étincelles. Un petit épierreur reprend le circuit pour l’affinement de l’opération.
– Au 4ème étage, un tarare (Sangati) va à nouveau éliminer par vibration les impuretés
plus légères que le blé. Le rejet part dans le circuit d’aspiration. A côté, un séparateur à disque
(Simon) à graines longues et un second à graines rondes séparent l’orge et l’avoine du blé qui
viennent se loger dans les alvéoles des disques. Un trieur à graine ronde sépare, quant à lui,
les graines plus petites que le blé. Ces céréales seront orientées sans transformation pour
l’alimentation animale, ou broyées et réincorporées dans les issues. Là encore les 3 circuits
sont repris par un petit trieur qui affine l’opération.
– Au 3ème étage, un toboggan (Sangati) sépare par gravitation les germes et brisure de
blé qui s’orientent en fonction de leur densité de l’extérieur à l’intérieur du toboggan. Puis le
blé est encore apprêté en passant dans un séparateur (Simon).
– Au rez-de-chaussée, en fin de chaîne du nettoyage, un mouilleur intensif humidifie
par pulvérisation le blé avec de l’eau de ville. Le taux d’humidification varie en fonction de la
qualité de farine que l’on veut obtenir et du type de blé. Jusque dans les années 60, le blé était
entièrement trempé dans des grosses laveuses et essoré au 2ème étage, procédé exigeant une
grosse consommation d’eau.
– Puis le blé est remonté au 8ème étage où il passe dans une brosse à blé pour un
dernier nettoyage avant d’être entreposée dans l’une des 16 cellules de repos, situées dans le
bâtiment du nettoyage. Là encore, le temps de repos, qui nécessite une connaissance parfaite
du produit diffère selon la variété et l’objectif de mouture. En moyenne, il y séjournera entre
12 et 16 heures.
35
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
V – Le Moulin
Voici enfin l’étape centrale de la transformation du produit. La marche du moulin est
informatisée depuis 1990 (la salle de commande est située au 1er étage). Sous la direction d’un
chef meunier, un conducteur, d’abord un par étage, puis dans les années 90, un seul pour
l’ensemble du moulin ! surveille le bon écoulement du produit, ramasse le « gâchis » en cas
de dégorgement, balaye….
Trois types de produits
Trois types de produits vont sortir du processus de fabrication :
– La farine, issue du broyage de l’amande du blé. Elle représente le produit de qualité
supérieure, la marque de fabrique du moulin destinée à la boulangerie.
– La farine basse, moins pure car moins proche de l’amande. Les enveloppes les plus
externes du grain et qui ont résisté aux assauts mécaniques constituent le gros son, et celles
qui se sont cassées le fin son.
– Les remoulages, sont issus de la mouture des enveloppes intermédiaires entre
l’amande et les enveloppes externes que le broyage a rendu plus fin que le son. Selon leur
degré de finesse, ils se divisent en gros remoulage, remoulage bis et remoulage blanc (proche
de la farine).
Sur 100 kg de blé, en moyenne 78 kg de farine sont produites pour 22 kg d’issues.
Le processus de fabrication
– Au sortir des cellules de repos, le blé est donc enfin dirigé vers le moulin pour être
transformé. Il est d’abord envoyé au 3ème étage, pour être pesé sur une balance Chronos
abritée par un coffrage en bois pour éviter la poussière. Puis il est envoyé sur les cylindres.
C’est le début du processus. Le moulin est alimenté par 8 moteurs de 200 chevaux situés au
rez-de-chaussée.
– Les cylindres sont au 1er étage. Nous sommes au cœur de l’usine où va s’opérer la
magie de la transformation selon un processus très complexe. Le blé va d’abord subir 5
passages sur des broyeurs (cylindres cannelés) situés au fond de l’étage qui, depuis les années
90, sont renforcés par des moteurs individuels. Le grain de blé est écrasé. Chaque broyeur a
deux cylindres qui marchent à des vitesses différentielles, produisant ainsi un effet de
cisaillement. Le produit monte ensuite par les élévateurs à la pointe du moulin et va
redescendre par gravité. Il est tamisé sur les plansichters. Le refus du tamis tombe sur un
deuxième broyeur (B2) plus fin ; il est à son tour écrasé, descend au pied de l’élévateur et
remonte à la pointe du bâtiment pour être à nouveau tamisé. Le refus part au B3. Au fur et à
mesure des passages, les cannelures sont plus fines. En queue de broyage se trouvent ainsi les
gros sons et les sons fins. En cours de route des semoules suffisamment fines sortent du
circuit et sont envoyées sur des claqueurs, appareils à cylindre lisses qui vont aplatir le
produit. Toujours selon le même principe, le produit remonte à la pointe, est tamisé et
36
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
redescend. Il y aura 6 passages sur les claqueurs. Les semoules fines partent à leur tour sur les
convertisseurs, cylindres très lisses. Le produit repart à la pointe à nouveau pour être tamisé.
Il y aura 11 passages en moyenne de convertissage.
– Au 1er étage, une balance Chronos pèse la farine qui sort du moulin. Elle permet de
faire le ratio quintaux de blé entré / quintaux de farine sortie, pour avoir le rendement et donc
ajuster des modifications éventuelles dans la marche du moulin.
– Le 7ème étage abrite la tête des élévateurs (en bois), qui remontent la mouture après
chaque passage sur les cylindres. Le produit se jette dans des distributeurs qui le répartissent
uniformément grâce à des boîtes à clapets, pour que la charge venant sur les plansichters soit
homogène. Les distributeurs, également en bois sont fabriqués maison. Cet étage rappelle que
le bois était un matériau dominant dans le moulin pour le transport de la farine avant que des
tubes métalliques ou de PVC ne prennent le dessus, au cours des années 1980.
– Le 6ème étage est rempli de conduits qui alimentent les plansichters à l’étage du
dessous. La nécessité d’avoir une pente suffisante pour le bon écoulement du produit
constitue l’un des principaux problèmes meuniers. Tous ces conduits étaient autrefois
fabriqués en bois de sapin par l’équipe des menuisiers ; un travail très minutieux.
– L’écrasement d’un produit farineux entre deux cylindres lisses (les claqueurs et les
convertisseurs), entraîne la formation de plaquettes. Envoyées sur un tamis de plansichter,
elles ne pourront pas être tamisées. Pour éviter que des produits propres et bons ne repartent
dans le circuit de broyage, des accélérateurs de mouture ont été installés. Ce sont des
détacheurs, à l’intérieur desquels des plots tournent très vite sur un axe et brisent les
plaquettes. Puis, le produit passe dans un cyclone qui par force centrifuge le fait tourbillonner
et tomber sur une petite écluse qui l’envoie aux plansichters. En 1987, des petits détacheurs
complémentaires (Sangati) ont été installés à cet étage pour désagréger le produit en queue de
mouture.
– Le 5ème étage est consacré à une vingtaine de plansichters (Simon). Le plansichter est
un caisson qui sert à faire le blutage des produits par vibration. Il se compose d’une pile de
tamis carrés avec des mailles de grosseurs différentes. Le produit va sortir par le bas et être
orientés en fonction de sa consistance sur le diagramme de production. C’est ainsi qu’un
produit épais va repartir sur un broyeur, qu’un produit intermédiaire va généralement sur les
claqueurs ou les convertisseurs. Mais à chaque passage de plansichter sort du processus de
fabrication un produit fini, soit farine, soit farine basse. Les plansichters actuels à l’armature
en acier ont été installés il y a une quinzaine d’années. Auparavant existaient des plansichters
en bois qui possédaient des tamis sur toute la longueur de la machine. Avec les nouveaux
plansichters, la surface de tamis est plus importante (6 piles au lieu de 3). Le système de
vibration est également plus virulent.
– Le 4ème étage abrite deux vis sans fin, sous chaque rangée de plansichters qui courent
sur toute la longueur du moulin. L’une recueille la farine basse, l’autre la farine finie. Une
boîte à clapet distribue le produit dans l’une ou l’autre vis. Aujourd’hui équipés de vérins
télécommandés, ces clapets étaient autrefois tournés manuellement par le conducteur qui
devait monter sur un escabeau.
– Un petit tamiseur réincorpore à cet étage dans la mouture les produits tombés à terre
en raison d’un engorgement.
37
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
– Des brosses à sons (Sangati) installées à l’arrière de la batterie de plansichters
séparent à l’aide d’un disque centrifugeur les particules de farine basse qui adhèrent encore au
son. Chacun des produits repart sur un circuit différent.
– Au 3ème et 2ème étage étaient installés les sasseurs qui finissaient le travail des
plansichters. Ils ont été supprimés au fur et à mesure de l’amélioration de ces derniers et de
l’installation des accélérateurs de mouture. Ils épuraient les semoules. Un courant d’air
récupérait au travers d’un tamis de soie les parties les plus fines.
– Une mélangeuse Bühler (installée en 1998) parfait l’homogénéisation de la farine.
Deux balances (Chronos et Avery Weiller) pèsent enfin d’un côté la farine et de l’autre la
farine basse avant leur acheminement aux silos et au magasin.
VI –L’ensilage des farines
L’ensachage ou surtout l’étuvage de la farine fonctionnant plus lentement que la
production du moulin obligent donc de stocker la farine. L’usine possède quatre silos, dont un
pour les issues. La farine est ainsi amenée sur le circuit de production au fur et à mesure des
besoins.
Le silo canal
Construit en 1966 en raison de l’accroissement de la production et du développement
du vrac, le silo canal est appelé ainsi parce qu’il est accolé au bâtiment du nettoyage près du
Canal de l’Ourcq. La farine est envoyée par transport pneumatique au sommet du silo. Elle
tombe dans 16 cellules d’une capacité de 1 750 quintaux chacune. Chaque cellule abrite une
seule variété de farine. Au 8ème étage, s’effectue le chargement de bidons de 400 quintaux
chacun, qui alimentent les camions gros porteurs stationnés le long du silo et du bâtiment de
nettoyage.
Le silo extension
Construit en 1980. La farine y est également envoyée par transport pneumatique. Il
abrite 10 cellules de 1 640 quintaux chacune. Des circuits permettent de relier les deux silos
entre eux pour faciliter la gestion des flux. Au sommet, des trappes permettent de surveiller le
remplissage. La quantité de farine est jaugée par intermittence avec un poids attaché à une
sangle graduée (fabrication maison).
Les cellules du magasin
La farine venant du moulin par la passerelle reliant le magasin est transportée par
élévateur au 8ème étage et stockée dans 12 chambres contenant 1 000 quintaux chacune.
38
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Le 8ème étage abrite également les chambres destinées aux circuits exportation, étuvage
et transformation des issues.
Le silo à issues
Ce bâtiment est construit en 1969. Venant du moulin en passant par le magasin, les
issues sont acheminées au-dessus du bâtiment qui abrite l’atelier électrique. Une bande
transporteuse distribue le produit dans les différentes cellules du silo d’une capacité total de
10 000 quintaux.
VII – Le magasin
Le magasin abrite l’ensachage de la farine boulangerie, l’étuvage et l’ensachage des
farines d’exportation, ainsi que la fabrication et l’ensachage des produits Mélior (mélanges
prêts à l’emploi) et des granulés de sons.
Si le moulin est le cœur de la production de l’usine, le magasin en était le point
névralgique. Plus de 100 personnes y travaillaient avant que la modernisation ne fasse fondre
les effectifs et ne le transforme considérablement.
1. Le circuit « farine boulangerie »
Le principe du circuit d’ensachage boulangerie est le même pour tous les produits. La
farine est soutirée de la chambre, et par l’intermédiaire d’élévateurs, de vis d’Archimède et de
bandes transporteuses est montée d’abord à la pointe du bâtiment, avant de tomber dans une
trémie qui alimente l’ensacheuse. Le débit de circulation étant supérieur à celui de
l’ensachage, le surplus est renvoyé à la chambre. Cette pratique permet de constamment
mélanger la farine et en améliore la qualité.
L’introduction d’un certain nombre de nouveautés a bouleversé l’organisation du
magasin : l’ensachage automatique, la palettisation et la mise en place du vrac, puis au début
des années 90, la mise en route du mélange de farines. Dans le même mouvement, un certain
nombre de bluteries et de pulvérisateurs ont été rajoutés au circuit dans les étages du magasin
pour mieux assainir et fluidifier les farines.
Jusque dans les années 70, l’ensachage de sacs en jute de 100 kg se faisait au 10ème
étage du magasin alimenté par les chambres de 1 à 12. Les 12 ensacheuses Weiller, dont 10
marchaient en permanence, étaient alimentées par une vis de 60 cm de large, au 11ème étage,
qui débitait environ 800 quintaux / heure. A chaque ensacheuse, un tireur faisait toutes les
manipulations puis posait une étiquette et un scellé sur chaque sac. Enfin, il allait jeter le sac
sur un tapis roulant qui basculait sur un toboggan vers les étages (du 1er au 7ème). A l’arrivée,
il était repris par l’un des 4 ou 5 rouleurs de l’étage munis d’un chariot fabriqué spécialement
pour les Moulins de Pantin chez Tripette et Renaud, puis empilé par 3 gerbeurs « cul sur
39
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
gueule ». Un étage pouvait entreposer environ 5000 quintaux de farine (soit 5000 sacs). La
farine était stockée en étage de 15 jours à 3 semaines. « Elle se reposait, ce qui faisait à
l’époque la qualité Pantin » (Philippe Aligros).
Lorsque les sacs de 100 kg furent remplacés par ceux de 50 kg, ces ensacheuses
disparurent et on installa d’abord des ensacheuses à deux bouches de marque Bates (4000
sacs/jour). On emmanchait le sac dans une bouche tuyau (système identique aux cimenteries).
Ils furent remplacés assez vite, vers 1973-4, par les premiers carrousels boulangerie installés
au 10ème et au 9ème étage puis en 1990 par la génération actuelle à 4 bouches (Bühler). Un
conducteur appui sur des contacteurs en accrochant le sac qui se remplit automatiquement. La
machine, programmée électroniquement, permet d’obtenir un poids constant (50 kg). Le sac
est ensuite cousu automatiquement par une machine à coudre, les dates de fabrication et de
péremption sont imprimées puis il tombe sur un toboggan.
Le parcours qu’il va suivre est variable selon sa destination. Des tapis amovibles
permettent de l’aiguiller sur d’autres toboggans ou de changer de spire, par exemple la spire
bleue pour les livraisons péniche, la rouge en direction des wagons. Certains tapis roulants
sont à vitesse variable pour mieux réguler la circulation.
Pour éviter des incidents par engorgement de sacs sur les toboggans, une soixantaine
de pédales disséminées sur les parcours et munies de contacteurs électriques stoppent le
circuit de production lorsque la pile de sacs vient s’y appuyer.
Au 1er étage, un palettiseur entièrement automatique empile environ 300 sacs
boulangerie à l’heure qui arrivent par toboggan du 9ème étage. A chaque couche de 3 sacs, le
plateau descend d’un cran pour permettre à la suivante d’être positionnée. Après avoir chargé
8 couches, le plateau descend au rez-de-chaussée, avance sur un tapis roulant dont la dernière
partie s’abaisse au ras du sol. Un chariot prend la palette pour la stocker ou la charger
directement dans les camions.
La farine sans grumeau
Le magasin stocke dans trois bidons en tôle au 5ème étage de la farine sans grumeaux.
C’est en quelque sorte le meilleur de la farine, destiné principalement à la pâtisserie
ménagère. Elle est ensachée au 3ème étage en sacs de 50 kg. L’essentiel de la production se fait
sur une machine à sachet (SIG) au 2ème étage qui produit environ 8 000 sachets de 1 kilo par
jour. Un homme approvisionne la machine en sachets et la surveille en permanence. Un autre
récupère les sachets et les pose sur la fardeuleuse, une machine à piston qu’il actionne pour
empaqueter 10 sachets, un troisième palettise le tout à la main.
Les mélanges de bases
Au 2ème étage, sous les cellules du silo extension, se situe la salle des mélanges qui a
révolutionné la production du moulin. Désormais, les différents types de farines ne résultent
plus d’un mélange de blés préalable à la mouture, mais d’un mélange de farine. Chaque silo
stocke donc une farine résultant de la mouture d’une seule variété de blé appelée base. Un
40
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
circuit informatisé depuis la salle des commandes au 9ème étage procède à l’extraction dans les
cellules de la quantité voulue de base.
Puis les farines partent dans une mélangeuse. Des doseurs, remplis manuellement
permettent de faire les ajouts de produits nécessaires (gluten et acide ascorbique notamment).
Le produit est ensuite stocké dans les chambres de 1 à 12 du magasin. Un échantillonneur
(Bühler) qui remplit 6 bocaux par petites impulsions, permet de faire des prélèvements en
cours de fabrication. Ces derniers sont systématiquement analysés par le laboratoire et le
fournil (moulin d’essais) qui donnent leur accord pour l’ensachage.
2. Le circuit des issues
C’est la construction du silo à issues, et l’installation de presses à granulés (1979) qui
ont considérablement changé le circuit des issues, c'est-à-dire les sous-produits de la mouture
destinés à la consommation animale. Le vrac remplaça progressivement l’ensachage.
Auparavant, on ensachait au 13ème étage les remoulages bis ou blancs, soutirés des
chambres, sur 2 ensacheuses. Tout l’étage, comme ceux du dessous, était couvert de sacs.
Le 12ème étage était consacré à l’ensachage du son fin avec 4 ensacheuses individuelles
pour les grosses commandes mais seules deux marchaient en permanence. « Le tireur
accrochait le sac par la gueule, tirait sur une manette pour enclencher l’écluse qui faisait
tomber le produit. Arrivée au poids donné, l’écluse s’arrête automatiquement et des batteurs
pour tasser le sac se mettent en marche. Puis on décroche le sac (un compte sac était relevé à
chaque faction). Le tireur, après avoir ensaché, avec sa brouette, allait peser le sac sur une
balance (60 kg). Les balances étaient faites maison par les menuisiers et le service
mécanique. Si le poids n’était pas exact il rajoutait ou enlevait du produit d’un sac de réglage
avec une petite pelle (une main de fer). Il fermait le sac avec des fils de fer de 25 cm de long
avec deux petits œilletons à chaque bout. Il prenait le tour de sa gueule de sac et avec une
vrille il tirait dessus pour fermer le sac. Puis il allait stocker le sac dans l’étage. A cette
époque on manipulait issues et farine jusqu’à 10.000 sacs par jour. » (Philippe Aligros)
Le gros son était ensaché au 11ème étage par 4 ensacheuses selon le même principe.
(Une ensacheuse semi automatique Weiller inutilisée constitue le dernier vestige sur le site de
l’ensachage des issues).
Au 10ème étage se trouvaient 2 ensacheuses pour la farine basse dont 223 sacs
remplissaient un wagon.
L’installation des presses à granulés au milieu des années 70 (disparues) a supprimé
les gros sons en tant que produit commercialisé. Elles se situaient au 7ème étage. Elles se
composaient de 3 galets qui tournaient à l’intérieur d’une filière et fabriquaient par pression
des granulés de la grosseur d’une cigarette. A l’origine, le son était ramolli à la vapeur
(envoyée par la chaudière de l’étuvage), avant de passer dans les presses. Par la suite, un
gicleur à eau aspergeait les sons dans une mélangeuse à gros sons - fins sons, placée au-dessus
des presses pour obtenir 15 % d’humidité.
Les granulés étaient ensuite refroidis au 6ème étage par un ventilateur puis sont envoyés
au silo à issues.
41
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
3. Le circuit « farine Export »
Depuis 1955, la SAVA (Société pour l’Achat et la Vente d’Approvisionnement)
fondée par Les Grands Moulins de Pantin prend en charge l’exportation des produits du
Groupe. Jusqu’à la fin des années 90, l’exportation représente un débouché très important des
Grands Moulins de Pantin. Mais les accords du GATT et les règlements de la politique
agricole commune vont fragiliser le marché.
La farine exportée est systématiquement étuvée afin de mieux pouvoir voyager. Elle
doit perdre environ 3 à 4 % d’humidité sur les 16 % qu’elle contient en moyenne en sortant du
moulin.
Auparavant, l’opération était assurée par 12 étuves, situées au 9ème étage. En 1995,
l’installation a été totalement changée et il ne reste aucune trace de la précédente.
Entièrement informatisé et plus performant, tout le circuit se fait désormais par air
comprimé. Alimentant également le circuit boulangerie pour certaines farines comme la
Baguépi, ou des commandes industrielles, l’étuvage peut produire jusqu’à 400 quintaux
l’heure.
Une description détaillée permet de montrer les multiples cheminements du produit
caractéristiques de la meunerie.
La farine remonte des chambres jusqu’au 13ème étage. Elle prend alors deux circuits,
l’un dit « farine chaude » l’autre « farine froide ». Au 10ème étage la farine de chacun des
circuits passe sur une bascule automatique spéciale (transflotrons Bühler) permettant de
réguler la quantité de produit injectée dans ce processus à flux continu. Si le débit du circuit
« farine chaude » est poussé au maximum, celui de la « farine froide» est fonction du taux
d’étuvage souhaité.
Le circuit «farine chaude » retombe alors au 6ème étage où un filtre à air chaud alimenté
par une chaudière située au 11ème étage, chauffe enfin la farine. Elle est ramenée au 11ème
étage où elle passe dans un cyclone à air chaud (un caisson métallique avec une gangue de
laine de verre à l’intérieur pour empêcher la déperdition de chaleur) avant de redescendre au
7ème où elle est refroidie par un filtre. Elle remonte à nouveau au 11ème étage pour passer sur le
cyclone à air froid et retombe au 9ème étage où un homogénéisateur la mélange alors au circuit
« farine froide ». Enfin, au 8ème, un contrôleur d’humidité s’assure de la qualité du produit
avant l’envoi dans les chambres de farines étuvées.
Pour être ensachée, la farine est remontée au 13ème étage, passe sur trois bluteries au
12ème, qui la débarrassent des impuretés, avant d’être pesée au 11ème, sur deux bascules. En
raison du flux continu du produit qui interdit toute rupture de la chaîne, pendant que l’une des
bascules se remplit, l’autre lâche sa pesée. Elle est finalement ensachée au 9ème sur un
carrousel (Chronos) à 6 bouches manipulé par un opérateur.
4. Le circuit « Mélior »
Mélior est le nom générique des mixes fabriqués par les Grands Moulins de Pantin.
Les Grands Moulins de Pantin rachetèrent la licence de fabrication Mélior aux
Moulins de Bobigny en 1969.
42
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Le mixe est un produit prêt à l’emploi, résultat d’un mélange de farine avec d’autres
matières premières : blé, seigle, crème d’orge, de riz, lait écrémé, etc…, auxquels sont
adjoints des additifs minutieusement dosés. Ils permettent au boulanger et au pâtissier, artisan
ou industriel, de fabriquer toute une gamme de pains (céréales, complet…) viennoiserie
(croissants, brioches…) et gâteaux (génoise, cake, crêpe) par simple adjonction d’eau et de
levure.
L’usine produisait, au démarrage de la production, trois mélanges de 1 500 kg par jour
et a fini par en fabriquer jusqu'à 22 de 2 tonnes. Si la production est minime par rapport à
celle de la farine, elle est porteuse en revanche d’une forte valeur ajoutée.
Le circuit commence au 11ème étage. Il est dirigé automatiquement, à l’exception du
versement manuel des ingrédients autres que la farine, dans deux boîtes de revidage
différentes selon leur granulométrie. Une feuille donne à l’opérateur la composition des
mélanges à faire pour chaque fabrication. A côté, quatre bidons de farines de 30 quintaux sont
branchés sur le circuit farine et alimentent la chaîne.
Au 10ème étage deux bluteries tamisent pour la sécurité les produits issus des boîtes de
revidage.
Au 9ème étage tous les composants sont regroupés dans des bidons de préparation.
Puis, un aiguillage oriente sur l’une ou l’autre des deux mélangeuses de 20 quintaux. A cet
étage, se trouve une mélangeuse conique (Gericke) dans laquelle une vis sans fin tournant sur
elle-même et autour de la parois remonte le produit en le mélangeant. Au 8ème étage, une
mélangeuse (Lodiguë, aujourd’hui disparue) est munie d’un axe central moins rapide sur
lequel des « pioches » brassent le produit. Réservée aux mélanges moins collants, elle met 20
minutes (au lieu de 5 pour la mélangeuse conique) pour opérer.
Les mélangeuses et le circuit sont nettoyés manuellement entre chaque production de
produit à consistance différente.
Le mixe est recueilli au 6ème étage dans l’un des 4 bidons de réception. Puis il est pesé
au 5ème étage avant d’être ensaché au 3ème (sac de 25 kg). L’accroissement de la production
obligea à moderniser l’opération : au départ, deux ensacheuses manuelles (Weiller) avec leur
tireur et deux hommes qui palettisaient à la main.
L’ensacheuse actuelle date de 1992104. Fabriquée sur mesure par une entreprise de
Périgueux, elle possède un portillon pour évacuer les sacs non conformes et surtout elle
permet l’ensachage de produits de différente volumétrie. Enfin, on peut y adapter une bouche
pour l’ensachage à 5 kg, opération qui prend tout de même 2 heures et demie.
Le palettiseur Mélior entièrement automatique a été conçu avec l’ensacheuse. Il est
débrayable pour que l’opérateur puisse changer un sac percé au cours de la manipulation. En
moyenne, une quinzaine de palettes de 30 sacs de 25 kg sont confectionnées à l’heure par une
seule personne.
104
Affectées dans un premier temps au circuit Mélior, elle fut employée à partir de juin 2001 pour l’ensachage
de tous les produits.
43
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
VIII – Le Chargement
Comme pour l’arrivée des blés, la production sortant de l’usine est systématiquement
pesée sur les mêmes bascules. La farine est aussi étiquetée. Ces deux mesures répondent non
seulement à un impératif de gestion interne des Grands Moulins de Pantin, mais également à
un souci de transparence et de traçabilité vis-à-vis de leurs clients et du service de la
répression des fraudes.
Jusqu’au milieu des années 80, le chargement des sacs se faisait à dos d’hommes par
les équipes de coltineurs et certains chauffeurs. Là encore, la modernisation a supprimé un
métier emblématique de l’activité du moulin.
Par wagon
La voie la plus proche du magasin sert au chargement des issues, des mixes et des
farines export. Pour ces dernières, les wagons sont souvent tapissés de carton ondulé entre
chaque couche de sac afin de protéger la farine de la condensation.
A partir des années 90, les sacs arrivent sur une plate-forme programmée pour faire
des palans de 21 ou 24 sacs qui sont élingués (entourés de filins) et chargés avec un treuil
dans le wagon où l’on positionne 22 élingues. Une trentaine de wagons sont chargés ainsi
quotidiennement.
Par péniche
Farine et issues, transportées par deux tapis roulants sont préalablement pesées avant
d’emprunter une passerelle (située au dessus des voies ferrées) qui courre jusqu’au canal.
Jusqu’en 1985 où ce type de livraison prit fin, quatre coltineurs chargeaient 12 000 sacs de
22,4 kg par péniche.
Par camion
Pour le « chargement sacs », peu avant la suppression des coltineurs, un tapis
télescopique « le monte-vite » entre dans le camion permettant d’atténuer considérablement la
distance du portage.
Les chariots amènent désormais les palettes dans les camions.
En 1989, les Grands Moulins de Pantin mirent fin à leur service livraison comprenant
une flotte de 25 camions (moitié chargement sacs, moitié vrac) et le remplacèrent par des
transporteurs extérieurs.
Mais c’est surtout le vrac qui révolutionne le chargement. Mis au point au début des
années 60, plus de 60 % de la production est chargée directement des cellules dans les
camions vracs.
44
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Les camions citernes gros porteurs de 25 tonnes sont chargés à partir de 8 bidons
alimentés par le silo canal ou extension ; une quinzaine par jour destinés à la clientèle
industrielle, une dizaine pour alimenter les dépôts du Groupe.
Un alignement de clous sert de repérage aux camions pour se caler à l’aplomb de la
bouche de vidage.
La livraison boulangerie artisanale est assurée par le petit vrac. Ce sont des camions
comportant 3 à 7 cuves de 2 à 3 tonnes qui sont remplis d’une quantité variable en fonction de
chaque commande.
La quantité livrée par le vrac boulangerie artisanal est sensiblement égale à celle en
sacs (environ 800 quintaux par jour).
45
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Troisième Partie
Mémoires de l’usine
Cette enquête a été menée en mars et avril 2003. Elle se fonde sur le témoignage de
quatre retraités. De par leur ancienneté, entre trente et quarante ans « de maison », et en raison
des postes différents qu’ils ont occupé, ces hommes sont porteurs d’une mémoire qui
contribue à éclairer non seulement leurs savoir-faire, mais également, la manière dont les
ouvriers des Grands Moulins de Pantin vivaient ensemble, la façon dont cette communauté de
travailleurs était structurée, les enjeux sociaux qu’elle devait affronter.
Chacun d’entre eux a d’abord reçu l’enquêteur chez lui pour un entretien d’environ
deux heures au cours duquel les questions relatives à leurs parcours professionnel, leur
perception de l’évolution et des temps fort de l’usine ont été évoquées.
Puis dans un second temps, l’enquêteur a accompagné chacun des témoins sur le site.
Ces longues visites ont permis de raviver leurs souvenirs. Elles furent émouvantes, empreintes
de la nostalgie d’une époque d’autant plus révolue que l’usine allait définitivement s’arrêter.
In situ, les témoins ont montré, en présence des machines, les savoir-faire mis en jeu. Enfin,
les parcours sur le site ont permis d’apporter des précisions quant au fonctionnement de
l’usine.
I – Les témoins
Les témoins sont animés d’un sentiment d’appartenance très fort à l’usine où ils ont
passé une grande partie de leur vie. L’un deux résume le sentiment général : « J’avais le
sentiment d’être chez moi. Une deuxième maison. A une époque c’est même le moulin notre
maison, plus que chez nous. On était heureux, on touchait de l’argent, il y avait une bonne
ambiance. On était en bonne santé » (Mohand Maouche).
Philippe Aligros
Entré aux Grands Moulins de Pantin en 1956, il est parti à la retraite en 1987. Il vient
d’une famille de meuniers, son grand père tenait un petit moulin dans la Creuse. Ancien élève
46
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
de l’Ecole de Meunerie, il part d’abord travailler dans des moulins de la Nièvre, « 6 mois par
ci, 6 mois par là » du côté de Decize. Il est ensuite embauché dans une coopérative agricole
de la Creuse comme chef meunier de 1951 à 1956 qui « comme tous les petits moulins de
France et de Navarre a été victime du manque de débouchés ». Ses parents connaissant le
Directeur du Personnel de l’usine de Pantin, il entre à la suite d’un entretien d’embauche
comme contremaître au magasin à farine. Il a eu pour mission principalement de réorganiser
le magasin suite à l’augmentation de la production et à la diversification des produits. Il
terminera sa carrière comme directeur de l’usine.
Michel Bélorgey
Entré aux Grands Moulins de Pantin en 1961, il est parti en pré-retraite en 2001.
Sortant du Centre d’Apprentissage de Pantin, l’un des principaux viviers d’embauche des
entreprises pantoises, et muni d’un CAP de tôlerie, il intègre l’atelier de mécanique comme
tôlier. Petit à petit, il va étendre son champs d’action dans les principaux domaines de
l’entretien du moulin en raison de la baisse progressive des effectifs et de la disparition de la
plupart des corps de métiers. Il deviendra un peu « l’homme à tout réparer » du moulin. Il
participera activement comme délégué à l’aventure syndicale de l’usine.
Mohand Maouche
Entré aux Grands Moulins de Pantin le 12-janvier 1965, il est parti en préretraite en
2001. Son père était meunier en Algérie. Il exploitait un petit moulin à eau dans lequel
Mohand Maouche a travaillé très jeune et qui ferma en 1954 avec la Guerre d’Algérie. Ce
n’est qu’à la fin de sa carrière qu’il a raconté ses « origines » meunières à ses collègues.
D’abord mouleur dans une entreprise de robinetterie, il est licencié économique au
bout d’un an. Comme il avait des cousins qui travaillaient aux Grands Moulins de Pantin
(dont l’un comme ensacheur), il s’y présente. Algérien Kabyle, comme la majorité des
ouvriers employés au magasin à farine embauchés dans les années 60, il aura « la chance »,
comme il dit, de pouvoir travailler dans le bâtiment du moulin : d’abord un an comme
conducteur aux cylindres, puis 21 ans à la semoulerie au même poste jusqu’à sa fermeture en
1987, enfin à nouveau au moulin comme conducteur aux plansichters jusqu’à la fin de sa
carrière. Il a participé également activement comme délégué à l’aventure syndicale de l’usine.
René Bénard
Entré aux Grands Moulins de Pantin en 1962, il est parti en préretraite en 2001.
Titulaire d’un CAP d’ajusteur du Centre d’Apprentissage de Pantin, il resta un an à l’atelier
de mécanique avant de partir à l’armée en septembre 1963 jusqu’en janvier 1965. A son
retour, il est très vite muté à l’imprimerie des sacs exportation au magasin à farine ; en 1970,
il devint chef d’équipe au magasin, où il termina sa carrière comme contremaître.
47
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
II – Un milieu hiérarchisé
Les Grands Moulins de Pantin offraient l’image d’une structure socialement très
hiérarchisée notamment à l’époque où environ 400 personnes y travaillaient.
Monsieur Frionnet
L’un des directeurs de l'usine, Monsieur Frionnet, a fortement marqué la mémoire
collective à en juger par le souvenir des témoins. D’abord en raison de sa longévité : il
remplaça en 1957 Albert Guillon, (connu pour être le père fondateur de l’usine), et quitta ses
fonctions vers 1985. Ensuite parce qu’il dirigea l’usine durant sa pleine croissance, vécue par
les témoins comme un âge d’or, à laquelle il prit une part active. Doué d’une forte
personnalité, c’était « le Patron », « un Caïd » (Mohand Maouche). L’homme impressionnait
par son intégrité : « Il faisait respecter la hiérarchie mais il ne manquait pas de respect à un
ouvrier » (Michel Bélorgey). Il avait une connaissance globale du fonctionnement de l’usine.
« C’était un homme qui connaissait presque tout » (Philippe Aligros). Il a laissé l’image d’un
leader charismatique : « Il savait vous embringuer dans ses idées et regrouper tout le
monde. » (Philippe Aligros), et disponible : « Il arrive à 3 heure du matin (lors de la
construction de l’extension silo) et m’a embringué pendant une heure dans les silos en
m’expliquant ce qu’il se faisait » (René Bénard). « Je lui suis reconnaissant parce qu’il m’a
toujours conseillé et a un eu une confiance énorme dans ce qu’on pouvait faire sachant que
ça allait dans le bon sens » (Philippe Aligros).
Par son implication quotidienne dans le travail qu’il exigeait de ses subordonnés, il
mesurait les difficultés et les efforts à fournir : « Il voulait savoir ce que représentait le travail
qu’il demandait… Un jour il a essayé de réparer du matériel avec nous, il a pris le
chalumeau, avant de voir qu’il fallait changer finalement la pièce comme on lui disait ». Ce
qui marqua beaucoup également c’est qu’il ne reculait devant aucune tâche. « Il n’hésitait pas
à donner un coup de main. Lors de la réfection de la voie ferrée, il a étalé le béton avec les
maçons » (Michel Bélorgey). « Quand ils ont fait le silo à issues ou le silo Danton, Frionnet
mettait les bottes et le casque … Pour l’extension du magasin, c’était pareil. » (René Bénard).
Chaque unité de l’usine (administration, bureau d’étude, silos, moulin, nettoyage,
magasin à farine, garage, entretien) avait son chef de service, secondé par des contremaîtres
qui dirigeaient les employés et les ouvriers. Hormis évidemment le salaire, un certain nombre
de mesures contribuait à établir une distinction hiérarchique au sein du personnel. Les
témoins, sans généraliser, soulignent la mentalité de garde-chiourme de l’encadrement qui
s’atténua avec le temps et l’action syndicale.
Le vestiaire
Les agents de maîtrise avaient un vestiaire séparé de celui des ouvriers alors que les
chefs de service se changeaient dans leur bureau. Un moment donné, une catégorie
intermédiaire « l’ouvrier pilote » jouissait au sein du vestiaire ouvrier d’un casier à part.
48
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
« C’était le bon ouvrier en qui on avait entière confiance, un très bon professionnel, mais
qu’on n’allait pas faire passer agent de maîtrise, il fallait pas exagérer ! » (Michel Bélorgey).
Le pointage
Cette mesure de contrôle, généralisée dans le monde du travail, était aux Grands
Moulins de Pantin sujet également à ségrégation entre les salariés. Un préposé au pointage,
« le pointeau », contrôlait le bon déroulement de l’opération.
Les ouvriers travaillaient en 3/8 : 7-14 heures, 14-22 heures, 22-7 heures, mais les
services entretien et mécanique travaillaient de jour.
« On pointait avant 7 heures. On montait au vestiaire. A moins 5, il y avait un coup de
sirène qui nous disait faut y aller. A midi, un coup de sirène et on retournait pointer. 13 h 25,
nouveau coup de sirène pour retourner pointer et on repointait le soir en partant. Mais les
cols blancs, c’est-à-dire le personnel d’encadrement, pointaient le matin et le soir. On leur
faisait confiance à eux » (Michel Bélorgey). Des témoins se rappellent du malaise de
l’encadrement lorsque à la fin des années 80, avec la mensualisation, la suppression du
pointage le midi est intervenue. Des discussions ont eu cours pour voir s’il ne fallait pas du
coup supprimer complètement le pointage pour la maîtrise « parce qu’il n’y a plus de
différence entre nous ». Mais les choses en restèrent là.
De façon plus symbolique, mais assez révélatrice, pendant longtemps, la direction ne
fournissait pas les toilettes des ouvriers en papier hygiénique.
Dans les années 60, certains vieux ouvriers manifestaient encore parfois un respect
désuet à cette hiérarchie prégnante. « J’avais un collègue, un ajusteur, quand le directeur
entrait, il retirait son béret, se courbait en deux et reculait de trois pas, et disait la tête
baissée, bonjour M. le directeur ! Nous les jeunes on ne comprenait pas cette attitude »
(Michel Bélorgey).
Les ouvriers du moulin
Parmi les ouvriers affectés à la production, ceux qui travaillaient au moulin (et à la
semoulerie), appelés les conducteurs, avaient un statut à part.
Ils étaient beaucoup moins nombreux, une personne par étage, et avaient la
responsabilité de surveiller le bon écoulement de la production. Ils étaient « au cœur du
l’usine ». « Nous travaillions tout le temps alors qu’au magasin, le rouleur avec sa brouette
pouvait des fois attendre d’avoir du boulot. Il y avait des coupures. Nous on devait surveiller,
balayer et ramasser tout le temps » (Mohand Maouche). Cette distinction était confirmée par
un salaire plus élevé.
A cela s’ajoutait le fait que l’équipe de jour des conducteurs ne mangeait pas à la
cantine lorsque le moulin tournait. Pour parer au moindre problème technique, ils devaient
manger sur une table pliante installée entre deux élévateurs, à un endroit où pouvait s’exercer
le mieux possible leur vigilance. « On allait chercher la gamelle à la cantine ou on amenait
sa gamelle de chez soi qu’on faisait chauffer sur un réchaud électrique à l’étage » (Mohand
49
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Maouche). Par la suite, un local fut aménagé au 3ème étage du moulin où ils purent manger
ensemble.
Au magasin à farine, seuls les tireurs (ensacheurs) qui touchaient une prime de
productivité se démarquaient des autres ouvriers.
Mais conducteurs et tireurs n’en restaient pas moins des ouvriers de l’usine.
Les chauffeurs
Il en allait différemment des chauffeurs. « A Pantin il n’y avait pas beaucoup de
contacts entre les chauffeurs et les autres salariés » (Mohand Maouche). Jusqu’à la
suppression du service de livraison interne aux Grands Moulins de Pantin en 1989, les
chauffeurs firent très nettement bande à part. Leur position stratégique qui les rendait capables
de bloquer la marche de l’usine en stoppant l’écoulement de la production, en est en partie
responsable. « Ils étaient bien soudés et s’ils avaient décidé de ne pas sortir la farine, la
farine ne sortait pas. Ailleurs sur l’usine, en cas de grève, il y avait toujours des gens qui, soit
par conviction, soit forcés, étaient capables de la faire marcher. Mais se posait alors le
problème du stockage si la farine n’était pas enlevée. Les chauffeurs, c’était la bête noire ».
(Michel Bélorgey). Fortement syndiqués jusque la fin des années 60, ils avaient obtenu des
acquis salariaux « proches des petits cadres ».
Les chauffeurs avaient donc les moyens de manger ailleurs qu’à la cantine, ce qu’ils
faisaient souvent, accentuant ainsi la nette distinction avec les ouvriers de l’usine.
III – L’usine, lieu de sociabilité
Il ressort de l’enquête que les ouvriers et employés des Grands Moulins de Pantin
fréquentaient surtout ceux avec qui ils travaillaient dans chaque unité de production ou chaque
étage, lorsque l’usine avait son plein d’effectif. La chute des effectifs a resserré les liens.
Ils ne semblaient non plus se fréquenter les week-end. C’était « chacun chez soi ».
(René Bénard)
D’abord, mis à part les gens du service d’entretien qui devaient aller partout dans
l’usine, la mobilité des salariés était limitée à leur bâtiment. « Il était très mal vu par exemple
par les chefs du moulin de voir un gars de la semoulerie venir dans les étages du moulin »
(Michel Bélorgey). Cependant quelques lieux et moment de convivialité rapprochaient les
salariés.
La cantine
La cantine est bien sûr le premier d’entre eux. Mais tout le monde n’y allait pas.
« Beaucoup de gens venaient en vélo, en solex, ou mobylette et retournaient chez eux manger.
Aligros, Frionnet ne mangeaient pas non plus à la cantine. J’habitais Livry c’était loin. A
50
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
notre table il y avait un ou deux électriciens, des maçons. Il y avait la table des chefs au
milieu (les contremaîtres), les chauffeurs mangeaient à leurs tables (au début) au fond avec le
bourrelier. A gauche il y avait les tireurs, les manœuvres, beaucoup d’Africains. Les gens
mangeaient avec ceux avec qui ils travaillaient. On ne se mélangeait pas trop. On restait
entre nous. Il n’y avait qu’un service » (René Bénard).
« Au début, il fallait amener ses couverts et son pain, la gamelle arrivait sur la table,
des grandes tables de 8 avec des bancs. On lavait notre assiette. Par la suite ça c’est arrangé.
Maintenant le réfectoire est tout à fait correct. » (Michel Bélorgey).
Le déjeuner du samedi
Un déjeuner informel mais devenu une institution se tenait les samedis au cinquième
étage du moulin. L’absence de l’encadrement qui prenait son week-end, facilitait ces élans
conviviaux. Au gré des affinités, les convives de différents services se retrouvaient à l’étage
où les conducteurs restaient attentifs à la production. « Quand on travaillait le samedi, à midi
on installait des tréteaux au centre de l’étage où il n’y a pas de plansichters, on posait des
grandes planches. On était des fois plus de 10 personnes autour de la table, même des gens
de l’usine venaient. On se tapait 2 ou 3 bouteilles de whisky pour l’apéro. On était tranquille
parce qu’il n’y avait que le chef d’équipe qui est avec nous. S’il y a 10 personnes, il y a 10
bouteilles de vins, plus le Ricard…. Et on mangeait ensemble. On a passé de bons moments
quand il y avait du monde. Mais quand ils ont commencé à débaucher ça s’est dégradé »
(Mohand Maouche).
Le café
Autre lieu de sociabilité, bien qu’en dehors de l’usine, le café à l’angle de la rue du
Débarcadère. « Le Café c’était l’annexe de l’usine » (Michel Bélorgey). « On mangeait vite à
la cantine quand on était jeune. Puis on allait boire un jus et jouer au baby au café du coin,
chez le boxeur, comme on disait, parce que le patron avait fait de la boxe. Le soir parfois
aussi. Le samedi c’était un rituel, on allait boire l’apéro en sortant (on ne travaillait pas
l’après-midi sauf exception) ». (René Bénard).
Le café était aussi le lieu de rencontre des ouvriers travaillant aux alentours. « On
jouait au Babyfoot avec les gars de chez Elis, à l’époque Lavaupoids Mage. On était mieux
payé avec une direction moins sévère. On passait le matin avant d’aller au boulot. Certains
jours il y avait 3 rangs derrière le comptoir ! 300 gars du Moulin, 250 ou 300 de chez Mage,
les gars de chez Pénamet, rue Victor Hugo qui venaient manger aussi ! Il y avait plein
d’activité.»
Les pots
Enfin, l’usine n’échappait pas aux inévitables pots de départ en vacances des collègues
du service, occasion de réjouissance « en interne ». Seuls les pots de départ en retraite
51
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
débordaient parfois du cadre du service. Mais avec la multiplication des préretraites et des
licenciements, cette coutume devint de plus en plus brève avant de s’arrêter complètement.
IV – L’usine, lieu de lutte
L’usine fut le théâtre d’un certain nombre de grèves et de débrayages sous l’impulsion
de sa section syndicale CGT, notamment après 1975, date de la création de la première
section CGT à l’usine. Elle a permis aux salariés de conquérir un certain nombre d’avancées
sociales. Elle a aussi contribué à décloisonner les rapports entre les salariés, qui se
rencontrèrent au sein des réunions, et pouvaient exprimer leurs demandes auprès des
délégués.
Auparavant, il existait un syndicat ne regroupant que des chauffeurs. Très corporatiste,
il lutta surtout pour ses propres intérêts. Vers 1966, à la suite d’un débrayage, la direction a
licencié les syndiqués mettant fin du même coup à cette section.
Mai 68
L’usine de Pantin n’échappa point au vaste mouvement contestataire et revendicatif
qui balaya la France entière en mai 1968. Il y eut deux semaines de grève.
« Un jour un chauffeur vient me voir pour m’annoncer qu’on fait grève. Il me dit que
les copains de Corbeil sont arrêtés. Il avait besoin qu’on fasse le tour dans l’usine pour voir
qui voulait faire grève » (Michel Bélorgey).
L’arrêt de travail fut décidé mais ses modalités ont donné lieu à de vives discussions :
« On a négocié pour ne pas arrêter bêtement. Tout circuit de produit commencé devait aller à
son terme. On a été en mouture jusqu’en fin d’après-midi. Pour ne pas gâcher de
marchandise et ne pas mettre en danger le redémarrage parce qu’il aurait fallu tout
renettoyer ».
L’usine était occupée. Des piquets de grève y couchaient à tour de rôle. Comme dans
beaucoup d’endroits le respect de l’outil de production au moulin de Pantin est aussi
important que la lutte.
« On voulait surveiller soit la malveillance de certains de nos collèges ou de la part
de la Direction pour nous faire porter le chapeau par la suite en cas de dégradation de
matériel.
« On laissait rentrer les gars qui avaient peur de faire grève et qui s’occupaient des
mouvements de farine pour qu’elle ne stagne pas, ou dans les silos à blé pour mettre du blé
qui avait été préparé et qu’il a fallu transiler aux sécheurs. Sinon les grévistes l’auraient fait.
Et à la remise en route on a vérifié toute l’installation pour voir s’il n’y avait pas de barre de
fer dans les cylindres ou des trucs comme ça. On a mis une journée. » (Michel Bélorgey).
Fabricant un produit de première nécessité dans un contexte de blocus général, l’usine
a fait l’objet de pressions qui ont posé des problèmes aux grévistes. « Des camions venaient
de Bretagne pour charger, on leur disait qu’on était en grève et ils revenaient avec un ordre
52
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
de réquisition de la mairie. On était gréviste mais on chargeait les camions. Il fallait le faire
sinon les CRS pouvaient intervenir. » (Michel Bélorgey).
La section syndicale CGT
A la fin de l’année 1975, une section CGT se monte à l’usine. Echaudée par le
précédent syndicat des chauffeurs, la Direction a eu du mal à accepter. La première
revendication concerne une augmentation de salaire : «On a fait 3 jours de grève à partir du
13 avril 1976 avec l’arrêt total de l’usine. Tout le monde était d’accord. Frionnet a compris
qu’il devait lâcher. On a demandé 10 % d’augmentation, il a lâché un peu moins. » (Mohand
Maouche). Cette grève a été menée conjointement avec le syndicat des Grands Moulins de
Corbeil.
En 1978, eut lieu un autre mouvement social en vue d’obtenir une nouvelle
augmentation de salaire. Hormis sa longueur, 10 jours, il a marqué les esprits par l’attitude de
certains agents de maîtrise et surtout de membres du siège parisien qui ont tenté de remplacer
les grévistes au pied levé. «Le moulin tournait avec certains chefs d’équipe et chefs de
services. Ils ont fait les rouleurs et les coltineurs. Des représentants du siège sont venus
charger les camions. On était content car on leur disait qu’ils allaient voir ce que c’était que
le travail. Un directeur d’achat de blé est venu avec ses bottes décharger des péniches sur le
canal ! Quand on passait derrière le moulin pour aller à l’Union locale, on le voyait
actionner la suceuse (à blé). On se marrait. » (Mohand Maouche).
La section demanda, avec succès, une prime de jour (inférieure à celle de nuit) pour les
ouvriers qui, travaillant jusqu’à 22 heures ne pouvaient dîner chez eux. Le 13ème mois fut
décidé en commission paritaire mais « accordé là où les syndicats sont assez forts. Dans les
petits moulins, ils n’ont pas encore le 13ème mois. » (Mohand Maouche).
La lutte contre le racisme a mobilisé une fois le syndicat. La majorité des ouvriers,
dans les années 70, étaient Maghrébins, employés surtout au magasin à farine. Il y avait
quelques Africains Mauritaniens et Maliens. La Direction aurait accusé la section, auprès des
délégués français, d’être « un syndicat arabe ».
« Un jour, en 1978-79, il y a eu une insulte. Un chef d’équipe du magasin a manqué
de respect à un Algérien. Le syndicat de l’usine a décidé de faire un tract pour dénoncer le
racisme. Depuis il n’y a pas eu d’autres incidents. » (Mohand Maouche)
Lors de la fermeture de la semoulerie, en 1987, faisant suite à celle de l’usine de pâtes
alimentaires de Corbeil, la section s’est opposée au licenciement des 30 salariés. Si 15 d’entre
eux ont intégré l’usine, 15 autres postes ont été supprimés par départs en préretraite, aides au
retour pour les Maghrébins (disposition indemnisant les candidats souhaitant rentrer dans leur
pays) mais aussi quelques licenciements secs que le syndicat n’a pas pu empêcher. A partir de
1988, le syndicat n’a pas réussi à faire échec aux plans sociaux qui se succèdent à partir de
cette date et a dû se contenter d’aider au reclassement des salariés.
53
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
V – Les métiers disparus
Le témoignage des anciens des Grands Moulins de Pantin atteste que jusque dans les
années 80, plusieurs centaines de personnes y travaillaient. Des dizaines de corps de métiers
concouraient alors à la bonne marche de l’usine. Car, de même que rien ne se perdait (des
poussières de blés réincorporées dans le circuit de production, au vieux balai coupé en deux
pour faire une balayette) l’usine vivait en vase clos. Le principe d’autonomie était très poussé.
Autant que faire se pouvait, le matériel était fabriqué et entretenu par les services techniques.
Le travail était également très compartimenté : « celui qui avait une activité bien précise ne
faisait que ça.» (Michel Bélorgey). Avec la modernisation, les économies d’échelle, les
restructurations, les effectifs se réduisirent comme peau de chagrin. Voici quelques-uns des
métiers aujourd’hui disparus du monde de la minoterie.
Aux services techniques
– Le magasinier distribuait les boulons, les roulements et le matériel nécessaire à
l’entretien. « On nous a dit à un moment, qu’il y aura désormais un chef qui sera responsable
du matériel. On faisait notre commande et il ouvrait de telle heure à telle heure. Mais, s’il y
avait une panne entre deux, on allait voir le chef qui nous disait « vous m’emmerdez, tenez
voilà la clef.» (Michel Bélorgey).
Le peintre. «Vu qu’on ne faisait quasiment plus de fabrication en tôlerie ou
mécanique, les pièces qui arrivaient étaient déjà peintes.» (Michel Bélorgey).
– Le bourrelier. « On ne faisait plus de courroie cuir, que de la courroie collée. Les
chefs meuniers ou les chefs d’équipe sont capables de tailler une courroie en biseau, de
mettre la colle dessus et de les mettre sous la presse pendant 6 heures. Les bourreliers
n’avaient plus les coltins à faire, c’est à dire les empiècements de cuir sur les vestes des
coltineurs qui ont disparu. Le peu qui restait était acheté auprès d’entreprises spécialisées. »
(Michel Bélorgey).
– Le graisseur. Il était le seul habilité à l’entretien des cylindres. « Les techniques
ayant évolué, on n’a plus de ligne d’arbre complète avec des paliers en régule (L’arbre de
transmission était soutenu par un palier et le régule était la partie sur laquelle frottait
l’arbre). On a motorisé certains appareils avec des roulements à bille qui n’avaient plus ou
presque plus besoin d’huile. L’entretien des gros moteurs de 150-200 chevaux était réservé
aux électriciens. » (Michel Bélorgey).
– Le tuyauteur. Il faisait les conduits métalliques qui ont remplacé les conduits bois.
« Avant qu’ils soient usés, il en passe du temps ! » (Michel Bélorgey).
Le ferblantier. Il réalisait toutes les petites pièces en fer blanc, les soudures à l’étain.
« Il arrivait à faire des pièces sans avoir appris le traçage avec le feeling, le coup d’œil, la
chance aussi. Il prenait, regardait, découpait, taillait, mettait en forme, rognait, il rouvrait,
retaillait un petit bout et il arrivait à faire du bon boulot. C’était un peu du bricolage quand
même. » (Michel Bélorgey)
54
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
– La brossière. Elle confectionnait toutes les brosses, pour ramasser la poussière, pour
nettoyer les tamis des plansichters, mais également celles des sasseurs qui faisaient tomber la
farine collée aux parois.
– Le basculeur. Il intervenait sur les bascules à fléaux qui servaient à peser les sacs à
farine. « C’était un ajusteur qui réglait tous les couteaux. Il fallait ajuster, limer, tremper,
segmenter. Lui seul savait le faire. On est passé à des bascules pneumatiques avec des vérins.
Il n’y avait plus toutes ces petites pièces de bascule. » (Michel Bélorgey).
Au magasin à farine
Avant l’arrivée des carrousels, l’ensachage se faisait sac par sac par un « tireur » qui
«après avoir ensaché, avec sa brouette, allait peser le sac sur une balance (Les balances
étaient faites maison par les menuisiers et la mécanique). « Si le poids n’était pas exact il
rajoutait ou enlevait du produit d’un sac de réglage avec une petite pelle (une main de fer). Il
fermait le sac avec des fils de fer de 25 cm de long avec deux petits œilletons à chaque bout. Il
prenait le tour de sa gueule de sac et avec une vrille il tirait dessus pour fermer le sac. On
achetait des lots de 5000 fils de fer » (Philippe Aligros).
Les gerbeurs empilaient les sacs l’un sur l’autre, « cul sur gueule ». « Ils les prenaient
à deux avec un bâton à gerber, un gros tasseau carré de 5 cm de côté et de 50 cm de long
arrondi en bout pour que les gars ne se blessent pas sur les arrêtes. Ils prenaient le sac
chacun de leur côté par la gueule, ils mettaient le bâton à un tiers de hauteur en partant du
bas et ils soulevaient le sac et le posaient sur le sac au plancher» (Michel Bélorgey).
Tous les sacs de 100 kg de jute ou polypropylène étaient consignés à 6 francs. Au
retour, ceux plus ou moins propres ou déchirés étaient amenés au sous-sol du magasin à farine
à l’entretien des sacs. « Les sacs étaient aspirés par un gros tube. S’il y avait des croûtons de
pâte encore accrochés, un gars l’enfournait dans une batteuse à sac (un tambour à lanières).
Le sac était posé entre deux grilles sur lesquelles venaient cogner les lanières. Le gars mettait
les sacs réutilisables sur un chariot et les donnait à 5 raccommodeuses qui travaillaient sur
des Singer 133 4 S ». (Philippe Aligros).
Aux silos à blé
Quatre à cinq personnes étaient affectées à l’ouverture manuelle des trappes et
changeaient les circuits d’orientation du blé vers la direction voulue. « Avec l’informatisation,
toutes les trappes à vérin étaient télécommandées du bureau du service de blés. Le personnel
est passé à la trappe. Il n’y avait plus qu’une personne qui passait voir s’il n’y avait pas une
vanne bloquée, un conduit de percé. » (Philippe Aligros)
55
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
VI – L’expérience professionnelle des témoins
Les témoins sont animés d’une forte conscience professionnelle. Ils sont fiers du
métier qu’ils ont exercé, des savoir-faire mis en jeu, de leur technique. Certains décrivent avec
minutie les gestes précis de leur intervention.
Lorsqu’ils racontent leur expérience, ils montrent que chacun des hommes joue un rôle
spécifique par son poste ou par sa fonction dans la longue chaîne de production de l’usine.
Ces hommes surveillent, entretiennent et réparent, bichonnent même, leur matériel, car on
sent que cette chaîne est fragile, parce qu’elle marche quasi continuellement à flux tendu. La
panne, le problème technique, qui bloque la production sont fréquents.
Philippe Aligros
Parti en 1987, Philippe Aligros n’a pas connu les derniers bouleversements structurels
et technologiques des Grands Moulins de Pantin. Avec lui, on entre de plain-pied dans la
réorganisation de l’usine à partir de la fin des années 50 et surtout du magasin à farine.
L’exportation commençait à prendre beaucoup d’importance. Boulangerie et exportation
confondues, plus de 120 hommes manipulaient jusqu’à 10.000 sacs par jour. Aligros est
embauché pour réorganiser le magasin.
« Electron libre » pendant 6 mois, il reste « pratiquement à ne presque rien faire »
sinon observer comment fonctionnait le service. « Je voulais connaître ce bâtiment, le
moindre tuyau, l’étuvage, l’arrivée des farines, les chambres à farines, tous les circuits ».
L’ensachage et la circulation des sacs (stockage et expédition) représentaient un
« parcours du risque permanent ». « A l’époque il n’y avait pas de silo à son, pas de vrac son.
Au fur et à mesure de la production, le magasin ensachait des issues 24 h./24 h. Aux 13ème
étage les remoulages, 12ème, les sons gros, 11ème les sons fins, 10ème les farines basses. Les
étages étaient recouverts de sacs. Le contremaître qui s’occupait du chargement jonglait
littéralement avec tout ça. Tout était sur plancher, manipulé par une équipe de 12 à 15 gars
avec des brouettes. Les sacs d’exports étaient au 8ème, les ensacheuses au 9ème. Il faisait
l’acrobatie de charger les wagons avec les sacs de farine et les issues de là-haut avant que
l’étage soit complet et qu’on soit coincé. Les gars pirouettaient les sacs dans le toboggan.
Direction les wagons. 4 coltineurs dans les wagons, un chef d’équipe qui contrôlait le
chargement et le tracteur qui était en attente pour tirer le wagon sitôt fini pour en mettre un
autre à la place. Il empilait ses wagons jusqu’au fond vers le canal et il les faisait au fur et à
mesure. Il y avait une deuxième voie pour que le magasin charge à jet continue».
C’est pourquoi, si ses connaissances « farinières » l’ont un peu servi, Aligros reconnaît
que son principal instrument de mesure était « le chronomètre ».
Il fallait que tout soit prêt en temps et en heure. « La SNCF venait faire la desserte des
wagons, à l’heure pile parce que la gare de Pantin était obligée de couper les voies
principales. Donc les créneaux horaires étaient extrêmement rigoureux. Il fallait que les
wagons soient prêts et accrochés sur l’embranchement lorsque le tracteur SNCF venait
chercher la rame. En moyenne, le chargement d’un wagon de 25 tonnes prenait une petite
56
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
demi-heure ». Il est arrivé que des camions soient affrétés pour acheminer un chargement prêt
trop tard pour prendre le train.
La tâche est d’autant plus délicate qu’il faut parallèlement augmenter « la puissance
de feu » du moulin. Aligros fait sienne la devise municipale « Hardy Pantin en avant ». Le
nombre d’élévateurs est augmenté, les godets qui transportent le produit sont agrandis et petit
à petit des pneumatiques sont installés. Constamment à l’affût « de toutes les astuces
possibles et imaginables », il note ses remarques fréquemment dans ses cahiers. Dans le
même temps, de nouveaux circuits de toboggans sont mis en place, ainsi que de nouvelles vis
transporteuses, des tapis roulant intermédiaires qui servent également de distributeur.
Avec l’accroissement de la production des problèmes ont surgi entre le service
livraison et le magasin. De fréquentes incompatibilités entre leurs commandes et les
possibilités du magasin envenimaient les rapports. « On se bagarrait sans arrêt avec les gars
de la livraison en face qui étaient le cul sur leur chaise qui fabriquaient les tours des
camions. Des bagarres éclataient entre les livreurs qui voulaient être chargés tout de suite et
ceux qui préparaient les tours. Des fois c’était épique ! » A la demande d’Aligros, le service
livraison a été transféré sur le quai de chargement « pour qu’il se rende compte que ce qu’il
pond il faut pouvoir le réaliser ».
Des améliorations de matériel sont également intervenues. Aligros fait fabriquer à son
idée de nouvelles brouettes pour les rouleurs chez Tripette et Renaud. « C’était la forme
Pantin. La forme du bec en bas est arrondie, moins recourbée. Le rouleur arrivait sur le tapis
roulant, il butait sur une barre à terre, le sac faisait un saut et tombait sur le tapis en glissant
sur l’arrondi. Les poignées sont plus maniables, et les roues très costauds. »
Une machine motorisée à imprimer les étiquettes est aussi commandée. « On mettait
sur l’étiquette, Française de Meunerie, l’appellation de la farine, le poids du sac, et un
numéro qui permettait de savoir à quel jour, quel étage, quel ensachage correspondait le sac.
La machine a été faite exprès pour les Moulins de Pantin par Maillet pour qu’on puisse
imprimer le numéro en bas. C’est la deuxième. On en a usé une avant. »
A la fin des années 70, Aligros devient directeur technique de l’usine, sous la
supervision de M. Frionnet.
Un rien moqueur pour les nouvelles technologies, « aujourd’hui vous vivez tous avec
des ordinateurs. Mon fils [actuellement directeur de l’usine] a des tas de listing long comme
ça avec des tas de chiffres », il livre une étonnante description de sa fonction résumée dans un
petit cahier. « Ces vieux calepins, c’était l’usine dans mes poches. Je peux vous dire ce que le
moulin avait écrasé en décembre… je ne sais pas de quelle année. Je devais pouvoir rendre
compte de tout ce qui se passait dans l’usine, n’importe quoi, n’importe quand. Les moutures
de farine, vous voyez, là c’était de l’aide Ethiopie, là de la panifiable pour l’Egypte. Il y a les
quantités de blés à écraser en fonction des besoins de l’export. Connaissant les rendements,
je disais : il me faut telle quantité, tel jour… J’avais l’implantation de l’usine sur ce bout de
papier, les différentes qualités de farines sont là, les quantités aussi, le planning de l’export
est là, journée par journée. Le nom des péniches, les quintaux, l’heure de démarrage… A
partir de là, je crayonnais là-dessus et puis je phosphorais pour dire au moulin il faut ça ».
Car, tout comme au magasin, la gestion des moutures demande une grande maîtrise
gestionnaire. « Une mouture de 2000 quintaux durait en moyenne une petite journée.
J’essayais dans la préparation de les faire les plus grosses possibles pour qu’en passant
d’une qualité donnée à une autre il y ait le moins de disparités possibles ». En effet, si une
57
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
farine se mélange avec la farine précédemment sur le circuit, et de consistance différente, cela
peut endommager sa qualité « Je m’arrangeais pour que les qualités qui se suivent soit assez
proches ».
Dans les années 80, les réunions auparavant quotidiennes deviennent, semble-t-il,
beaucoup moins fréquentes car « chacun travaillait dans son coin ». Dans ces réunions, la
marche de l’usine est passée en revue et coordonnée. « Tous les matins on faisait un briefing
(avec l’ensemble des chefs de service). Il y avait telle mouture à faire. On voyait les
impératifs des uns et des autres. Si le moulin devait s’arrêter, j’étais obligé d’en tenir compte
dans mon planning de production ».
Mohand Maouche
Mohand Maouche était conducteur à l’étage des plansichters (5ème étage du moulin)
qui tamisent le produit après chaque passage sur les cylindres. Il était seul à son étage chargé
de surveiller l’écoulement du produit et de balayer.
Le principal problème auquel est confronté le conducteur est « le gâchis ». Il s’agit du
dégorgement du produit suite à son mauvais écoulement. Pour éviter les risques, une
surveillance constante est requise. Le conducteur doit passer dans les rangs pour voir si
l’installation est conforme ; il doit regarder par exemple si une manche de plansichters n’a pas
sautée (la manche est un conduit en tissu qui relie le plansichter au sol et au plafond).
« Des fois, ça c’est la technique du conducteur, j’arrive à un plansichter, j’ouvre un
bouchon au bas et rien ne vient ce qui n’est pas normal. C’est une intuition, le hasard, c’est le
métier. Alors soit c’est bouché en haut du plansichter, soit aux cylindres, soit c’est l’élévateur
qui est cassé. Il faut chercher. On va à la tête de l’élévateur. Si la marchandise y tombe, c’est
que le problème vient d’ici ou du 6ème ou 7ème étage. Si rien ne vient de l’élévateur c’est au
cylindre qu’il y a problème. Si c’est moi qui ait détecté le problème je pars dans les étages à
sa recherche. »
En cas de dégorgement la farine « dégueule de partout » et très vite. Le conducteur
sonne ses collègues aux étages pour l’aider à ramasser le gâchis qui peut atteindre un tas de
plus d’un mètre très rapidement. « Si on est absent une demi heure et qu’il arrive un problème
on en a pour une demie journée de ramassage à plusieurs surtout si c’est une manche des
plansichters où passent les grosses semoules au début du processus. Parce que ça crache ».
« Avant de descendre au 4ème, on comptait les sorties pour repérer l’endroit
approximatif de la panne à cet étage [une forêt de tuyaux oblige en effet l’opérateur à détecter
celui qui pose problème]. Avec le manche de la boule on tape fort. Le son est différent entre
un tuyau vide et un tuyau plein. S’il est plein on entend un bruit bizarre. C’est comme ça
qu’on repère lequel est bouché. Il faut toujours frapper du côté de la pente, où passe la
farine. C’est la technique. On commence par taper avec la boule. Si on n’arrive pas il faut
démonter les colliers et on déboîte le tuyau. On le fait en marche, donc on est couvert de
farine. Après avoir remonté on ramasse la farine. Du temps des conduits en bois, on ne
démontait pas alors on tapait ou on passait un jonc dedans. C’était plus compliqué ».
L’usine s’arrêtait chaque semaine environ huit heures pour entretenir ou faire les
réparations préventives des machines. Les interventions étaient donc limitées, on ne pouvait
pas réparer tous les plansichters. En fonction du temps d’arrêt programmé, et de l’état des
58
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
tamis, les conducteurs réparaient 2 ou 3 « caisses » (ou cadres) de plansichter par jour et par
personne (environ 2 heures pour faire une rangée de caisses, sachant qu’il y en a 6 par
plansichter).
« On commençait par les priorités parce que la veille on prenait des échantillons de
farine et le chef en regardant où la farine est piquée (avec du son) savait quels tamis étaient
percés […] Des fois, on s’aperçoit alors qu’il n’y a pas de farine ». « On enlève les portes du
plansichter, on dévisse les 4 barres de fer qu’on écarte et on sort les cadres un par un en
commençant par celui du haut (car il est impossible d’enlever le cadre inférieur avant) qu’on
pose par terre. Puis on prend un tabouret à 3 marches (fabriqué à l’usine) qui sert aussi à
monter pour enlever les cadres du haut. Sur la plus haute marche est disposé un cône sur
lequel on pose un angle du cadre d’un tamis que l’on nettoie en le tournant avec une brosse
dure spéciale. A la lumière du jour on regarde si le tamis n’est pas percé. Après on nettoyait
l’intérieur de la caisse du plansichter. Puis on remet les tamis en commençant toujours par le
bas. »
Lorsque le conducteur ne travaille pas aux plansichters, il est affecté à la salle de
réparation des tamis. C’est ici qu’on change leur garniture et qu’on répare les cadres. Les
tamis très fins pour la farine sont remplacés toutes les semaines.
« On avait une agrafeuse à air comprimé. On commençait par dégarnir en enlevant
toutes les agrafes avec un tournevis légèrement recourbé. Puis, on posait deux cadres de
tamis sur un établi (fourni par Simon le fabriquant des plansichters), on serrait avec un
volant sur le côté. Puis on dépliait le rouleau à garniture qu’on posait sur les cadres. On
coinçait le tissu avec 2 barres de fer attachées avec une lanière en caoutchouc sur des
crochets aux 4 coins de l’établi. Après on coupait le tissu, puis on tournait à fond les deux
petits volants latéraux qui faisaient monter les cadres et tendaient le tissu. Après on agrafait,
puis on collait les bords. On laissait sécher, une heure, une heure et demi quand il fait
chaud. […] Avant on le faisait à la main. On coupait la garniture qu’on agrafait d’un côté et
puis on tendait avec une pince spéciale et on agrafait tout autour, puis on collait. »
René Bénard
René Bénard a participé à l’épopée de l’imprimerie, installée au 9ème étage du
magasin, qui jusqu’en 1970 imprima surtout les sacs en coton, puis en polypropène, destinés à
la farine d’exportation.
En moyenne, 12.000 sacs étaient réalisés par série. Certaines étaient imprimées à
60.000 sacs (marque Les Béliers-The Ram). Car le service prit de l’ampleur avec la
croissance de l’exportation mais aussi dans la mesure où l’imprimerie de l’usine de Pantin
travaillait pour d’autres moulins, notamment Corbeil et Strasbourg. On y réalisait sur place les
gélatines reproduisant les motifs à imprimer. « Tous les 15 jours en moyenne, on recevait un
nouveau caoutchouc, c’est-à-dire un nouveau dessin de sac. On le positionnait sur une grosse
table en bois. On clouait tout autour des règles en bois de 5 cm d’épaisseur puis on coulait du
plâtre à l’intérieur. On tapait sur le marbre pour que tout le plâtre rentre bien dans les creux.
On allait faire sécher 3 ou 4 jours le plâtre à la centrale sur des caillebotis. Une fois sec on
démoulait. On ramenait le plâtre et on corrigeait les imperfections avec du mastic et un petit
clou aplati qu’on faisait nous même ; on rebouchait les petits trous. Puis on passait de la
59
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
peinture cellulosique. Une fois sec on refaisait un cadre autour du moule en laissant 5 mm
entre le moule et le bois et on coulait de la gélatine. Tous les matins, les pompiers de la
sécurité qui avaient les clefs branchaient le bac à gélatine. Des pains de gélatine qui
fondaient dans un bain-marie. On puisait la gélatine à la louche et avec un morceau de bois
coupé en pointe on la faisait rentrer partout car on ne pouvait pas la retoucher après coup.
Tous les plâtres et les caoutchoucs étaient répertoriés et rangés dans des casiers. Sur une
plaque de zinc décapée avec de la toile émeri, on plaçait la gélatine comme pour une mise en
page. On composait des lettres coulées également à la gélatine, ainsi que le logo de Pantin
puis on faisait chauffer avec un réchaud la plaque pour que la gélatine fonde juste ce qu’il
faut pour coller. Il fallait que la gélatine soit d’une hauteur uniforme pour ne pas être
uniformément pressée par le cylindre. Matière molle qui s’usait vite si elle était trop pressée.
On décollait au couteau les parties trop basses et on calait en rajoutant de la gélatine chaude
par en dessous ».
Une série de sacs était souvent réimprimée. Réné Bénard se trouva donc confronté au
problème du durcissement de la gélatine, processus qui pouvait durer de 6 mois à un an. A la
suite de plusieurs tentatives, il trouva un remède : « après avoir imprimé, je la nettoyais avec
un chiffon doux et je la talquais et elle pouvait durer plusieurs mois».
Le service disposait de 3 machines : 2 à encres à l’eau pour les sacs en coton
imprimant en 3 couleurs, et une à encres grasses 2 couleurs pour les sacs en toile de jute. Ces
machines étaient rudimentaires : « L’été quand les encres commençaient à coller on rajoutait
de l’alcool à brûler ». Même si c’était « infernal » de travailler dessus, le résultat était de
qualité. « J’aurais voulu qu’on voit les machines qu’on avait et le boulot qu’on arrivait à
sortir avec. (…) Le contremaître de l’imprimerie, on l’appelait Gutenberg au moulin ». Et les
clients en redemandaient. Pour éviter toute réclamation, étant donné que les Grands Moulins
de Corbeil produisaient parfois les mêmes sacs, l’usine de Pantin avait inséré un signe discret,
« un petit carré, dissimulé en bas des sacs pour bien faire la distinction ».
Aussi, le rapatriement de l’imprimerie au moulin de Corbeil, en 1970, fut-il vécu
comme un déchirement par le personnel du service.
Parmi les nombreuses interventions que René Bénard eut à faire dans le magasin, il en
est une qui montre bien que la meunerie est une industrie de précision.
Pour commercialiser de la farine de qualité, il faut notamment qu’elle soit bien
mélangée. Ce processus demande de la vigilance de la part de l’opérateur. « Lorsque le
contremaître nous disait on va tirer maintenant de la Corde Verte (une qualité de farine) on
la mettait sur le circuit en la soutirant du silo à un débit plus important que celui de
l’ensachage pour que la vis de retour qui remuait et ramenait la farine non ensachée dans les
chambres puisse être bien alimenté (on mettait deux chambres en route pour mieux mélanger
les farines). Si on remplissait deux chambres en même temps, mais de contenance inégales, il
fallait faire attention que la farine qu’on ramène du silo ne monte pas plus vite que celle
qu’on tire. On surveillait, on disait, ils tirent 200 quintaux à l’heure, on attendait que la
chambre soit au 5ème étage (vérification avec un bouchon et une pige), 1 étage = 150
quintaux, on avait de la marge pour 450 quintaux. En goupillant, on mettait le soutirage en
route et on mélangeait. Ce que voulait Aligro, qui est un peu le précurseur des mélanges de
farine, c’est quand on faisait un tirage sur les deux chambres de Corde Verte, par exemple,
on ramenait de la farine plus fraîche du silo canal qui était brassée avec l’ancienne, donc ça
60
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
donnait de la farine homogène. Avant c’était moins systématique. Quand il s’est aperçu qu’on
le ne faisait pas toujours, il a fait installer des mouchards sur les moteurs de chambres ».
L’usine de Pantin réalisait également le remplissage de sachet de 1 kg ou de 500 g à
l’aide d’une machine située au 2ème étage du magasin : « Elle marchait bien mais elle nous a
en fait voir de toutes les couleurs. Les sachets se mettaient en travers ou étaient parfois collés
les uns aux autres. C’était l’enfer. Parfois ça marchait comme une pendule et des fois non. Il
y avait un réglage très minutieux à faire et il ne fallait pas trop tripoter. Pour faire des sacs
de 500 g il fallait changer des pièces et refaire des réglages qu’on faisait à la main. On
faisait 8 000 sacs par jour en moyenne ».
Michel Bélorgey
Michel Bélorgey a vécu les grandes évolutions des services techniques de l’usine,
c’est-à-dire la disparition progressive des corps de métiers affectés à l’entretien et l’arrivée de
la sous-traitance. Progressivement, il apprend à changer des cylindres, à réparer les machines
à coudre des carrousels d’ensachages et à changer les roulements des plansichters.
Il se forme sur le tas en travaillant avec son remplaçant. « Je suis arrivé un mois avant
que la personne ne prenne sa retraire. Il m’a expliqué comment faire et j’ai essayé de me
souvenir de tout ça. » Parfois, la transmission est plus délicate, parce que le préposé est
licencié ou bien muté « pour faute professionnelle » et refuse de donner des conseils. « Il
disait : puisque je ne suis plus bon à la mécanique je ne vois pas pourquoi je te dirais
comment ça se marche. Il n’avait pas tort le gars ». Il suit quelques courtes formations :
« J’ai fait un stage d’une journée chez Ficheben (machine à coudre). Le gars a démonté une
machine, j’ai commencé à la remonter, il m’a aidé à finir. Voilà ».
On mesure l’écart entre la période faste de plein emploi à l’usine et les dernières
années lorsque Michel Bélorgey évoque son activité presque en solitaire : « Quand on ne sait
pas comment intervenir, on prend des revues, des bouquins professionnels et puis si on ne sait
pas faire on appelle un professionnel. Au moment où j’ai été licencié, il n’y avait plus de
tourneur, de fraiseur. Si j’avais des pièces de tour à faire, je devais les faire faire à
l’extérieur. Ou, si c’était pas d’une grande précision on les faisait nous même avec les tours
qui restaient. Quand j’avais des pièces que je pensais pouvoir faire, j’appelais mon tourneur
à l’extérieur, il m’expliquait par téléphone. Il pouvait se déplacer dans certains cas. Ca
dépendait de l’importance de la réparation, si c’était une panne avec arrêt du moulin ou juste
en prévision, ou du type d’appareil. »
Le changement de cylindre au 1er étage du moulin est délicat parce qu’il se fait
pendant que les machines tournent : « On était proche d’une courroie d’un autre cylindre en
mouvement. On retirait le garde-corps. On avait un genre de carter, une protection en bois
que l’on mettait pour éviter de se faire happer par la courroie. Mais ça nous réduisait la
place entre les deux appareils. C’était parfois gênant » […] « Il faut démonter la poulie, les
paliers d’un côté. Sur le côté opposé, il faut démonter les carters avec les pignons, et les
paliers également. A l’origine les paliers n’étaient pas avec des roulements à bille mais des
coussinets en bronze qu’il fallait démonter. On enlevait les systèmes de tensions de ressorts
qui permettaient de régler les écartements des cylindres. Puis on mettait des perches, des
grosses barres métalliques qui font environs 5 cm de diamètre et 1,80 m de haut sur lequel on
61
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
accrochait un palan. On avait donc une perche et un palan de chaque côté pour sortir les
cylindres de 200 kg chacun. Puis on remonte le tout. Il faut tirer les deux palans en même
temps, en parallèle sinon on coince le cylindre dans l’appareil. Il y a 2 mm de jeu de chaque
côté, donc sur un diamètre de 25 cm, si on tire pas bien on coince ».
Le temps de l’opération dépendait de l’état dans lequel on trouvait l’appareil à
cylindre, notamment le système de clavetage qui pouvait retarder l’opération. En règle
générale, il fallait compter une petite journée de travail à deux personnes pour démonter,
remonter, faire les réglages et redémarrer.
« Par contre j’ai eu une journée complète à essayer d’extraire une poulie qui était
gelée, c’est-à-dire bloquée sur l’arbre, impossible d’enlever la clavette. On a été obligé
finalement de chauffer le moyeu de la poulie avec un très gros chalumeau, chose qu’on évitait
de faire parce qu’il y a malgré tout toujours un peu de farine en suspension, avec des risques
d’explosion. L’utilisation d’une flamme ou même de la soudure à l’arc était réglementée. A
chaque intervention, on devait remplir en trois exemplaires, un permis de feu. On signalait, le
bâtiment, l’étage, le type d’appareil sur lequel on travaillait, l’intervention (tronçonnage,
soudure, chauffe). On emmenait le permis au poste de garde et la Sécurité devait
normalement voir sur place si elle estimait qu’on pouvait travailler.»
Avec les cylindres, ce sont les plansichters qui posaient le plus de problèmes à Michel
Bélorgey. La description minutieuse qui suit donne un aperçu de la difficulté du dépannage.
« On intervenait sur les plansichters principalement lorsque le roulement central était
défaillant. Ce sont des roulements imposants parce que le plansichter en charge pèse 1,5
tonne. Il fallait commencer par ouvrir les portes de chaque côté pour avoir accès au boîtard,
un gros palier cylindrique avec un gros roulement dans lequel passe un arbre. Sur la partie
basse de cet arbre, est fixé le contrepoids et sur la partie haute un contre-arbre qui, lui, est
relié au moteur. Il fallait travailler quasiment plié dans l’appareil, parce que dès qu’on se
relevait on se cognait la tête au plafond. Le boîtard avec l’arbre est lourd, le roulement à
bille doit faire dans les 30 à 40 kg. On enlevait également les tôles du dessus qui étaient
tenues par une quantité de petites vis de 6 mm ce qui prenait en gros une heure ! Puis on
installait les palans. Bien souvent le roulement était usé, donc il ne retenait plus la graisse, et
toute cette bonne vieille graisse bien sale giclait de partout. On devait changer de bleu après.
Le boîtard était tenu sur le plansichter par 8 boulons à l’origine alésés, donc chaque boulon
de 150 mm de long allait dans son propre trou et on était obligé de les chasser par en dessous
avec un jet en aluminium pour ne pas abîmer le filetage du boulon avec un marteau de 5 kg.
On était assis par terre. Ca pouvait nous prendre 2 bonnes heures. Puis il fallait enlever
également le contrepoids qui tenait par un écrou avec un grand crochet qu’on vissait sur le
bâti à un trou taraudé dans le contrepoids et on le descendait au palan. Il fallait l’ajuster
parce que ça tourne assez vite. Il ne fallait pas qu’il y ait du jeu dans l’accouplement car
comme le contrepoids était en porte-à-faux pour donner le mouvement excentrique de
l’appareil, en descendant il avait tendance à aller en biais et à coincer. Puis défaire le
contre-arbre, c’était un accouplement avec des doigts en caoutchouc, qui pesait 15 kg. Il
fallait réussir à conjuguer tout en même temps au démontage et au remontage. Les premiers
temps, il fallait s’habituer, à 2 ça nous prenait 8 heures. Après, quand chacun sait ce que fait
l’autre à un moment déterminé, on arrivait à le faire en 6 heures quand ça allait bien, dans
les moins mauvaises conditions ».
62
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
La panne est toujours la hantise à l’usine, parce qu’elle arrête ou retarde la production.
C’est sur l’un des plansichters qu’eut lieu un incident mémorable. Le moulin s’est arrêté
puisque qu’il est impossible d’immobiliser seul un plansichter.
« Les bâtis intérieurs était cisaillés. Il y avait eu un défaut de montage, tout avait pris
du jeu si bien que l’appareil n’était plus tenu. Le milieu s’effondrait ». Il a fallu refaire, le
temps de l’intervention, un circuit pour que le moulin puisse redémarrer. On fit venir de
Corbeil une bluterie installée à côté du plansichter en panne. « On a travaillé pendant 25
heures d’affilée avec 3 équipes de 2. Une équipe de sous-traitants extérieurs (MAES)
démontait les tuyaux et faisait les trous dans le plancher, une équipe qui adaptait le matériel
de Corbeil et nous qui réparions ».
« La Direction a été reconnaissante, elle a fait un petit geste symbolique : une prime,
et un jour le directeur a réuni toutes les équipes qui avaient travaillé et on a bu une petite
coupe de champagne ensemble ».
La sous-traitance est arrivée dans les années 90 avec, notamment l’entreprise MAES,
spécialisée dans l’agroalimentaire. Elle entraîna la fin irrémédiable du service EntretienMécanique. « Ils étaient venus nous installer du matériel neuf, un plansichter qu’on appelait la
sûreté par lequel passaient toutes les farines et qui garantissait une qualité irréprochable et
d’autres appareils en amont et en aval. Ils ont changé dans la foulée plein d’appareils qui
commençaient à dater. Dans un premier temps ils sont restés pour la mise en conformité et
puis des chefs meuniers ont trouvé que les gens de MAES travaillaient mieux que le personnel
de Pantin. Certaines personnes des ateliers se sont retrouvées en fabrication. J’ai un collègue
mécanicien qui s’est retrouvé à l’ensachage parce qu’il s’était blessé deux fois. Les gars de
MAES étaient plus disponibles, parce qu’ils habitaient Strasbourg, étaient logés à l’usine dans
des caravanes et ils pouvaient bosser 12 ou 15 heures par jour puisque c’était payé ».
Philippe Charpin
Conseil Général de Seine-Saint-Denis
DCJS - Bureau du Patrimoine
Association Trajectoires
Relectures : Nicolas Pierrot (Drac d’Île-de-France, SRI)
Evelyne Lohr (CG93, Bureau du Patrimoine)
Mise en forme : NP
Septembre 2003
63
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Pl. 1
Plan masse, extrait du plan topographique de 1972
Section O parcelles 45, 48
Echelle : 1/2000e
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Pl. 2
Plan de situation
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Pl. 3
Chronologie de la construction
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Pl. 4
Schéma des principaux flux (1)
Déchargement et stockage des blés (fermeture en juin 2001)
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Pl. 5
Schéma des principaux flux (2)
Nettoyage, mouture, stockage des farines (fermeture en juin 2001)
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Pl. 6
Schéma des principaux flux (3)
Expédition des produits (fermeture en juin 2001)
Nicolas Pierrot, Pascal Pissot 2003
Doc. 1
Plan des Grands Moulins de Pantin en 1926
Extrait de : « Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie Française, 1926, p. 218.
Photocopie
Doc. 2
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un nouveau moulin. Plan
du rez-de-chaussée, élévation des façades (premier projet, non
réalisé), coupe. Signé et daté en bas à droite : « E. Haug / 13
janvier 1922 ».
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir et rehauts de lavis rouge, rose et bleu,
échelle 0.005 p.m., 84,5 x 98,5 cm, 13 janvier 1922.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930472XE
Doc. 3
Plan dressé entre 1952 (construction de la semoulerie) et 1958
(construction des silos de la semoulerie).
Plan, impression en noir, échelle 0.008 p.m.,
19,5 x 32,2 cm, 1952-1958.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930493XE
64
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 4
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un nouveau moulin.
Elévation de la façade est (premier projet, non réalisé). Signé et
daté en bas à droite : « E. Haug / 13 janvier 1922 ».
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, échelle 0.02 p.m., 104 x 104 cm,
13 janvier 1922.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930473X
Doc. 5
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un moulin-neuf. Elévation
de la façade est (deuxième projet : des modifications ont été
apportées au moment de la construction, au couronnement de la
tour château d'eau). Signé et daté en bas à droite : « Strasbourg, 4
janvier 1923 / E. Haug ».
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, rehauts de crayon rouge et jaune,
échelle 0.01 p.m., 61,5 x 75 cm, 04 janvier 1923.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930474XE
Doc. 6
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un bâtiment de moulin et
de nettoyage, plan du rez-de-chaussée (deuxième projet, réalisé).
Signé et daté en bas à droite : « Strasbourg, 4 janvier 1923 /
E. Haug ».
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, rehauts de crayon rouge et jaune,
échelle 0.01 p.m., 46,5 x 49,5 cm, 04 janvier 1923.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930475XE
Doc. 7
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un bâtiment de moulin &
nettoyage, coupe longitudinale (deuxième projet, réalisé). Daté en
bas à droite : « Strasbourg, le 4 janvier 1923 », tampon de
l'architecte.
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, rehauts de crayon rouge et jaune,
échelle 0.01 p.m., 46,5 x 49,5 cm, 04 janvier 1923.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930476XE
Doc. 8
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un bâtiment de moulin et
de nettoyage, coupe transversale (deuxième projet, réalisé). Daté
en bas à droite : « Strasbourg, le 4 janvier 1923 », tampon de
l'architecte.
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, rehauts de crayon rouge et jaune,
échelle 0.01 p.m., 97 x 63 cm (en hauteur), 04 janvier 1923.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930477XE
Doc. 9
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet d'un nouveau moulin,
coupe moulin A-B (projet de moulin dans la continuité des silos,
non réalisé ; projet de silos, réalisé). Daté en bas à droite :
« Strasbourg, janvier 1922 », tampon de l'architecte Eugène Haug.
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, rehauts de lavis rose, échelle 0.02 p.m.,
108 x 58,5 cm (en hauteur), janvier 1922.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930478XE
65
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 10
Grands Moulins de Pantin-Paris, élévation côté silos (à droite, silos
et chaufferie : projet réalisé). Signé et daté en bas à droite :
« E. Haug / 13 Janvier 1922 ».
Validation par le propriétaire le 20 juin 1925.
Haug, Eugène (architecte)
Plan, impression en noir, échelle 0.01 p.m., 69,5 x 105 cm
13 janvier 1922, validé le 20 juin 1925.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930479XE
Doc. 11
Grands Moulins de Pantin-Paris, vue d'ensemble. Vue perspective
centrée sur les nouveaux silos, depuis le canal de l'Ourcq.
Etablissements Ed. Zublin et Cie.
Zublin, Ed. (constructeur)
Plan, bleu, 39 x 35,5 cm, 29 juillet 1927.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930480XE
Doc. 12
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet de silos à blé. Plans et
coupes des quatre premières travées. Etablissements Ed. Zublin et
Cie.
Zublin, Ed. (constructeur)
Plan, bleu, 92 x 124 cm, 25 août 1927.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930481XE
Doc. 13
Grands Moulins de Pantin-Paris, Silos à blé près du canal,
agrandissement 1933-34 (trois travées supplémentaires). Plan au
sol, façade et coupe. Non signé.
Plan, impression en noir rehaussée de jaune, 52 x 54,5 cm
18 novembre 1933.
AM, Pantin 43 W 33, dossier sans n° PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930482XE
Doc. 14
Grands Moulins de Pantin-Paris, Construction d'un moulin d'essai,
d'un laboratoire et d'une école de boulangerie, façade principale.
Signature illisible. Le toit du corps central n'a pas été réalisé.
Plan, impression en bistre, 80 x 63,5 cm, 4 mai 1932.
AM, Pantin 43 W 33, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930483XE
Doc. 15
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet de silos à blé (il s'agit du
nouveau magasin à farine, construit après l'incendie du 19 août
1944). Signé et daté en haut à gauche : L. Bailly, architecte
S.A.D.G., Paris, le 25 juin 1945 (modifié le 9 octobre 1945). Partie
gauche de la feuille : pignon.
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bleu, échelle 0.01 p.m., 69,5 x 137 cm
25 juin 1945, modifié le 9 octobre 1945.
AM, Pantin 21 W 8, permis de construire n° 45.2527
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930484X
66
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 16
Grands Moulins de Pantin-Paris, projet de silos à blé (il s'agit du
nouveau magasin à farine, construit après l'incendie du 19 août
1944). Signé et daté en haut à gauche : L. Bailly, architecte
S.A.D.G., Paris, le 25 juin 1945 (modifié le 9 octobre 1945). Partie
droite de la feuille : façade ouest.
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bleu, échelle 0.01 p.m., 69,5 x 137 cm
25 juin 1945, modifié le 9 octobre 1945.
AM, Pantin 21 W 8, permis de construire n° 45.2527
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930485X
Doc. 17
Grands Moulins de Strasbourg, garages, ateliers, service sociaux,
façades, coupe. Dressé par L. Bailly arc. S.A.D.G, Paris oct. 1949,
vu et accepté le 22 nov. 1949. Partie droite de la feuille.
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bistre, échelle 0.01 p.m., 69 x 131 cm,
octobre 1945, accepté le 22 novembre 1949.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930486X
Doc. 18
Grands Moulins de Strasbourg, garages, ateliers, service sociaux,
façades, coupe. Dressé par L. Bailly arc. S.A.D.G, Paris oct. 1949,
vu et accepté le 22 nov. 1949. Partie gauche de la feuille.
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bistre, échelle 0.01 p.m., 69 x 131 cm,
octobre 1945, accepté le 22 novembre 1949.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930487X
Doc. 19
Grands Moulins de Strasbourg, semoulerie, façade sur cour des
moulins. En hauit à gauche : Paris le 3.1.1952 / Léon Bailly
architecte S.A.D.G.
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bistre, échelle 0.01 p.m., 54,5 x 99 cm,
03 janvier 1952.
AM, Pantin 43 W 33, permis de construire n° 58.231
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930488X
Doc. 20
Grands Moulins de Pantin-Paris, façade du nettoyage vue côté
canal. En haut à gauche : 779 / Autorisation du 16.10.61. Non
signé.
Plan, impression en bistre, 65,5 x 44 cm, 1961.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930490X
Doc. 21
Grands Moulins de Pantin, magasin à farines (emplacement
erroné), nouveaux silos, perspective (il s'agit des nouveaux silos à
farine «canal» accolé au dos du bâtiment de nettoyage). En haut à
gauche : « J. Quost, Ingénieur E.C .P., Ingénieur conseil (...) » ; en
bas à droite : « le 9 février 1962 ».
Quost, J. (ingénieur)
Plan, impression en bleu, échelle 0.01 p.m., 53,5 x 69 cm,
9 février 1962.
AM, Pantin 43 W 32, permis de construire n° 62.837
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930491X
67
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 22
Grands Moulins de Pantin, surélévation des appartements, façade
Nord. En haut à droite : « Paris le 24.11.1958 / L. Bailly arch.
S.A.D.G ».
Bailly, Léon (architecte)
Plan, impression en bleu, échelle 0.02 p.m., 50,5 x 109 cm,
24 novembre 1958.
AM, Pantin 43 W 32, permis de construire n° 58.288
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930489X
Doc. 23
G.M.P.P., façade des silos à sons (ou à issues) avec chassis
sabla. Daté en haut à droite : « 25.4.66 ». Non signé (J. Quost).
Silos achevés en 1969.
Quost, J. (ingénieur)
Plan, impression en noir rehaussée de jaune, échelle 0.01 p.m.,
55,5 x 32,5 cm, 14 mai 1966.
AM, Pantin 21 W 8, dossier sans n° de PC
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930492XE
Doc. 24
Les Grands Moulins de Pantin en 1886
Extrait de « Les Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie Française, juil. 1886, p. 220.
Photocopie
Doc. 25
Les Grands Moulins de Pantin en 1890
Extrait de « Les Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie Française, 1890, p. 403.
Photocopie
Doc. 26
Vue des « Moulins de Pantin » (raison sociale à la date du
document), identifiables à leur passerelle en surplomb sur le canal
de l'Ourcq, et de la blanchisserie Leducq (fondée en 1883,
blanchisserie Elis à partir de 1967). Sans date, v. 1900-1910.
Carte postale en couleur, 8,8 x 13,5 cm, v. 1900-1910.
AM, Pantin 2 Fi 499
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930494XE
Doc. 27
De gauche à droite, sur le rive sud du canal de l'Ourcq, à son
inflexion : les « Moulins de Pantin » (raison sociale à la date du
document), identifiables à leur passerelle en surplomb pour le
déchargement des péniches, et la blanchisserie Leducq, fondée en
1883 (blanchisserie Elis à partir de 1967), armée de deux
cheminées. Sans date, avant 1905 (oblitération).
Carte postale, 8,9 x 13,9 cm, 1er quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 435
Repro. AM Pantin
03931048NUCB
Doc. 28
De gauche à droite : les Moulins Abel Leblanc (passerelle en
surplomb pour le déchargement des péniches) et la blanchisserie
Leducq. Sans date, v. 1900-1910.
Carte postale, 9 x 13,9 cm, 1er quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 455
Repro. AM Pantin
03931049NUCAB
Doc. 29
Vue des «Moulins de Pantin» et de la blanchisserie Leducq. Sans
date, avant 1906 (date portée au crayon).
Carte postale, 9 x 13,9 cm, avant 1906.
AM, Pantin 2 Fi 567
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930495XB
68
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 30
Vue de l'entrée des «Moulins de Pantin» (raison sociale à la date
du document), prise de la rue du Débarcadère avant 1901
(oblitération). A gauche du portail, le bâtiment de l'administration.
Endommagé lors de l'incendie du 19 août 1944, il fut détruit en
1956 et remplacé par l'actuel bâtiment administratif d'entreprise,
dont la construction s'échelonna entre 1956 et 1960.
Carte postale, 8,8 x 13,8 cm, 1er quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 231
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930496XB
Doc. 31
Les silos des nouveaux moulins (actuels silos « préparation
mouture ») en 1926
Extrait de « Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie Française, 1926, n.p.
Photocopie
Doc. 32
Vues intérieures des silos des nouveaux moulins (actuels silos
« préparation mouture ») en 1926
Extrait de « Les nouveaux silos des Grands Moulins de Pantin »,
La Meunerie Française, 1926, n.p.
Photocopie
Doc. 33
Les Grands Moulins de Pantin, vus de la rue du Débarcadère. De
gauche à droite : le magasin à farine construit vers 1926 ; le
nouveau silo à blé construit entre 1924 et 1926 (actuel silo
« préparation mouture »). Le moulin construit en 1923-24. Le silo
«canal» (1927-1934) n'est pas encore construit. Sans date, entre
1924 et 1927 ; oblitération 1936.
Carte postale, 9 x 14 cm, 2e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 808
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930497XB
Doc. 34
Vue du moulin, des silos à blé et de la chaufferie depuis la rive
gauche du canal de l'Ourcq, vers le Sud-Est. La chaufferie,
surmonté d'une seule cheminée, est en cours d'achèvement. La
construction des silos « canal » (1927) n'a pas encore débuté.
Ainsi peut-on dater cette photographie de 1926.
Carte postale, 9,1 x 13,9 cm, 2e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 570
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930498XB
Doc. 35
Construction des quatre premières travées du silo « canal »
(1927). Sans date.
Carte postale, 8,9 x 13,6 cm, v. 1927.
AM, Pantin 2 Fi 437
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930499XB
Doc. 36
A l'inflexion du canal de l'Ourcq, les Grands Moulins de Pantin et la
blanchisserie Elis flanquée de sa cheminée. Les quatre premières
travées du silo à blé «canal» ont été construites en 1927.
L'élévation des trois dernières travées (1933-1934) n'a pas encore
eu lieu : le pignon du silo s'inscrit dans le prolongement de la tour.
Sans date, entre 1928 et 1933.
Carte postale, 9 x 13,9 cm, 2e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 569
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930500XB
Doc. 37
Paul Signac (1863-1935), Les Grands Moulins de Pantin
Dans Richesses de la France n° 96, 2e trimestre 1973
Sceaux, Musée de l’Ile-de-France, Centre de documentation.
Photocopie
69
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 38
Les Grands Moulins de Pantin-Paris, avril 1932. Au premier plan,
dans la cour de l'usine, un camion de livraison ou d'expédition
fabriqué par les usines Renault. Le camion, comme la passerelle
reliant le moulin (à droite) et le magasin à farine (à gauche) portent
l'inscription «Grands Moulins Pantin-Paris».
Photographie noir et blanc, avril 1932
Photothèque Renault, Série rouge, album n° 86, cliché n° 27715
Repro. Inv. J. B. Vialles
04930003NUCB
Doc. 39
Incendie des Grands Moulins de Pantin, dans la nuit du 19 août
1944. Vue prise depuis la gare de marchandises. Le feu touche
dans un premier temps le magasin à farine. Cliché anonyme, 1944.
Photographie noir et blanc, 8,8 x 13,7 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4171
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930501XB
Doc. 40
L'incendie des Grands Moulins de Pantin, dans la nuit du 19 août
1944. Détail du magasin à farine en flammes. Cliché anonyme,
1944.
Photographie noir et blanc, 8,8 x 13,7 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4178
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930502XB
Doc. 41
L'incendie des Grands Moulins de Pantin, dans la nuit du 19 août
1944. Détail du moulin en flammes. Cliché anonyme, 1944.
Photographie noir et blanc, 8,8 x 13,7 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4174
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930503XB
Doc. 42
Vue générale, prise de l'est, après l'incendie du 19 août 1944. De
gauche à droite : la toiture du magasin à farine s'est effondrée, le
silo de 1924-1926 (actuel silo «préparation mouture») n'a été que
faiblement endommagé, la structure du moulin de 1923 est
conservée.
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4165
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930506XB
Doc. 43
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Vue générale du site depuis le nord. Au premier plan à gauche, le
magasin à farine incendié.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 10,9 x 15,4 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930783NUCB
Doc. 44
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Vue de la passerelle reliant le moulin au magasin, prise du sommet
de la tour.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 10,7 x 15,2 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930785NUCB
70
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 45
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Magasin à farine, vue de la cage d'ascenseur (2e travée).
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 15,1 x 10,7 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930788NUCB
Doc. 46
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Moulin et nettoyage.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 10,7 x 15,1 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930784NUCB
Doc. 47
Vue de la tour abritant le château d'eau, après l'incendie du 19
août 1944.
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4167
Repro. AM Pantin
03931063NUCAB
Doc. 48
La charpente en béton armé du moulin, après l'incendie du 19 août
1944. Vue prise de la tour du silo à blé (actuel silo «préparation
mouture»).
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4164
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930504XB
Doc. 49
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Moulin, sixième étage, vue de la salle des détacheurs prise de la
porte sur tour.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 10,7 x 15,1 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930787NUCB
Doc. 50
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Moulin, 1er étage, vue de la salle des cylindres prise du pignon
côté rue.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 10,7 x 15,1 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930786NUCB
71
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 51
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Nettoyage, toiture vue de la tour du moulin (10e étage). Bluteries à
poussières, tuyauteries des filtres.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 15,4 x 10,9 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930782NUCB
Doc. 52
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Nettoyage, 7e étage, vue prise de la porte sur tour. Au deuxième
plan, le ventilateur du sécheur et son moteur.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 15,4 x 11 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après le
cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930781NUCB
Doc. 53
Les Grands Moulins de Pantin après l'incendie du 19 juin 1944.
Nettoyage, 6e étage, vue plongeante prise du plancher des
ventilateurs du sécheur, côté tour.
Chevojon (photographe)
Copie numérique, 15,3 x 10,7 cm, 4e quart du 20e siècle. D'après
le cliché noir et blanc (1944) conservé dans les archives de
l'entreprise.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03930780NUCB
Doc. 54
Vue d'une galerie couverte, sur le flanc est du magasin à farine (à
droite), après l'incendie du 19 août 1944. A gauche, la
blanchisserie Leducq (blanchisserie Elis à partir de 1967).
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4166
Repro. AM Pantin
03931064NUCAB
Doc. 55
Vue du moulin d'essai, du laboratoire et de l'ancienne école de
boulangerie, après l'incendie du 19 août 1944.
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc
13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4168
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930505XB
Doc. 56
Vue du bâtiment de l'administration après l'incendie du 19 août
1944.
Chevojon (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1944.
AM, Pantin 3 Fi 4163
Repro. AM Pantin
03931065NUCB
Doc. 57
Vue aérienne oblique des Grands Moulins de Pantin, prise depuis
le sud-ouest.
Durandeau (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1er mai 1949
Institut géographique national, photothèque nationale DUR 112,
n° 12.
Repro. Inv. J. B. Vialles
04930002NUCB
72
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 58
Vue aérienne oblique des Grands Moulins de Pantin, prise depuis
le sud.
Durandeau (photographe)
Photographie noir et blanc, 13 x 18 cm, 1er mai 1949
Institut géographique national, photothèque nationale DUR 112,
n° 13.
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930001NUCB
Doc. 59
Vue générale, prise du canal de l'Ourcq, vers l'ouest. A gauche, le
magasin à farine reconstruit de 1945 à 1948 par Léon Bailly. La
semoulerie n'est pas encore construite (1952). Au premier plan,
promenade et bain de soleil le long du canal. Sans date, entre
1948 et 1952.
Photographie noir et blanc, 9 x 14 cm
3e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 720
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930507XB
Doc. 60
Vue aérienne oblique des Grands Moulins de Pantin. A gauche, la
semoulerie élevée en 1852. En haut à droite, à proximité de la voie
ferrée, les bureaux de l'administration, dont les deux étages de
logements viennent d'être achevés (1960).
Carte postale, 8,7 x 13,6 cm
3e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 721
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930508XB
Doc. 61
La semoulerie, flanquée de son «extension silos» construite de
1958 à 1960 sur la commune de Paris. Sans date, années 1960.
Photographie noir et blanc, 12,7 x 9 cm
3e quart 20e siècle
AM, Pantin 3 Fi 4179
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930510XB
Doc. 62
Au second plan, à droite, la semoulerie flanquée de ses nouveaux
silos. Sans date, années 1960.
Photographie noir et blanc, 11,8 x 17 cm,
3e quart 20e siècle.
AM, Pantin 3 Fi 4162 (1)
Repro. AM Pantin
03931066NUCAB
Doc. 63
A l'inflexion du canal de l'Ourcq, les Grands Moulins de Pantin et la
blanchisserie Elis flanquée de sa cheminée. A gauche du silo à blé
«canal», la semoulerie, élevée en 1952. Sans date, années 19601970.
Photographie noir et blanc, 9,1 x 12,2 cm, 3e quart 20e siècle.
AM, Pantin 3 Fi 4169
Repro. Inv. J.-B. Vialles
04930509XB
Doc. 64
A l'inflexion du canal de l'Ourcq, les Grands Moulins de Pantin et la
blanchisserie Elis flanquée de sa cheminée. A gauche du silo à blé
«canal», la semoulerie, élevée en 1952. A droite, se distinguant
par sa façade de béton uni (rehaussé de blanc sur le document), le
silo «Danton», élevé en 1961. Sans date, années 1960-1970.
Carte postale colorisée, 10,5 x 15 cm, 3e quart 20e siècle.
AM, Pantin 2 Fi 495
Repro. AM Pantin
03931052NUCAB
73
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Doc. 65
De gauche à droite : la semoulerie, le silo à farine «canal»
construit de 1962 à 1966 sur les plans de J. Quost, le silo à blé
«canal» construit par Zublin entre 1927 et 1934, et la blanchisserie
Elis. Reproduction sur carte postale (1990) d'un dessin à l'encre
noire de Robert Riou intitulé «Paysage urbain I», 65 x 50 cm,
1984.
Carte postale, 10,3 x 14,5 cm, 1990.
AM, Pantin 8 Fi 584
Repro. AM Pantin
03931068NUCAB
Doc. 66
Les Grands Moulins de Pantin, par Kemal ; s.b.d. : «Kemal 02».
Carte de voeux offerte par la ville de Pantin aux jeunes mariés. De
gauche à droite : la Cité des Sciences et de l'Industrie, la
semoulerie, le silo à farine «canal», le silo à blé «canal», et la
blanchisserie Elis.
Kemal (aquarelliste)
Carte de voeux, 12,3 x 16 cm, 2002.
AM, Pantin 16 Z
Photo. AM Pantin
03931069NUCA
Doc. 67
Les wagons vides sont acheminés vers le quai de chargement, le
long du magasin à farine. Au fond, le bâtiment de l'administration
(construit en 1956 sur les plans de Léon Bailly), surmonté de deux
étages de logements (1959-1960, Léon Bailly) ; à droite, les silos à
farines, ou «extension silos» (1980, François Mathieu) accolés au
magasin à farine.
Daniel Ruhl (photographe), ville de Pantin
Diapositive 24 x 36, 2001.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03931070NUCAB
Doc. 68
Chargement d'un lot de 21 ou 24 sacs de farines élingués
(entourés de filins) dans un wagon.
Daniel Ruhl (photographe), ville de Pantin
Diapositive 24 x 36, 2001.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03931071NUCAB
Doc. 69
La salle des commandes, au 1er étage du moulin.
Daniel Ruhl (photographe), ville de Pantin
Diapositive 24 x 36, 2001.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03931072NUCAB
Doc. 70
Tableau de commande, au 1er étage du moulin.
Daniel Ruhl (photographe), ville de Pantin
Diapositive 24 x 36, 2001.
AM, Pantin 16 Z
Repro. AM Pantin
03931073NUCAB
Fig. 1
Vue générale, prise de la terrasse du Centre national de la Danse,
en direction du nord-ouest.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
03930064XA
Fig. 2
Vue d'ensemble vers l'aval depuis la rive gauche du canal.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930279X
01930280XA
01930281XA
01930282XA
74
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Fig. 3
Vue des parties hautes du silo à blé «canal», du silo à issues et du
silo «préparation mouture».
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930276X
01930277XA
01930278XA
Fig. 4
Vue générale depuis la rive gauche du canal de l'Ourcq. De
gauche à droite : la semoulerie, le silo à farine «canal» (accolés au
dos du moulin), la chaufferie, le silo à issues et le silo à blé
«canal».
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930187V
01930188VA
01930189VA
Fig. 5
Vue de la passerelle pour le déchargement des péniches, prise du
8e étage du moulin. A gauche, accolé au silo à blé «canal», le silo
à issues.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930207X
01930208XA
01930209XA
Fig. 6
Vue intérieure de la passerelle de chargement des péniches,
surplombant le quai. Les bandes transporteuses acheminaient
jusqu'au canal de l'Ourcq les sacs de farines provenant du
magasin.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930231X
Fig. 7
Vue générale depuis l'embranchement ferroviaire longeant la rue
du Débarcadère. Au premier plan, le bâtiment des garages et de la
menuiserie, élevé en 1950 sur les plans de Léon Bailly.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930153XA
04930154XA
Fig. 8
Vue générale depuis l'embranchement ferroviaire longeant la rue
du Débarcadère.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930155XA
04930156XA
Fig. 9
Vue de l'entrée du site depuis la rue du débarcadère. A gauche, le
bâtiment de l'administration, construit entre 1958 et 1960 sur les
plans de Léon et Alain Bailly.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930151XA
04930152XA
Fig. 10
Vue d'ensemble du site depuis l'entrée.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930181V
01930182VA
01930183VA
Fig. 11
Vue d'ensemble depuis la menuiserie. A gauche, la façade
éclairée du magasin à farine. A droite, le moulin (dont les deux
premiers niveaux sont occupés par le laboratoire). La photographie
prend appui, à droite, sur le bâtiment de la semoulerie.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930184V
01930185VA
01930186VA
Fig. 12
Parties hautes de l'ensemble silos-moulin-magasin. De gauche à
droite, le magasin à farine, le silo «préparation mouture» (tour
coiffée d'un toit à croupes), le silo à blé «canal», la passerelle
reliant le moulin au magasin à farine, la tour-château d'eau et le
moulin.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930202X
01930203XA
Fig. 13
Détail du couronnement de la cage d'escalier du moulin, abritant le
château d'eau.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930204X
01930205XA
01930206XA
75
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Fig. 14
Au 6e étage du moulin, sous la charpente en béton apparent. La
circulation verticale des produits est assurée, depuis la «pointe» du
moulin jusqu'au premier étage, par des conduits métalliques ou de
PVC, qui on remplacé les conduits en bois. L'emploi de ce
dispositif façonne l'espace intérieur du moulin. La circulation
verticale du bas vers le haut est assurée par un système de 22
élévateurs à godets : voir la notices «objets» dans la base Palissy
(IM93000272).
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930247X
01930248XA
01930249XA
Fig. 15
Prélèvement de farine en cours de chaîne, dans le moulin.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930253X
Fig. 16
Le quai de déchargement et de chargement des wagons est
surmonté orthogonalement d'une première passerelle, utilisée pour
acheminer les sacs de farine depuis le magasin jusqu'à la
passerelle conduisant vers le canal. La seconde passerelle,
portant l'inscription «Grands Moulins de Pantin», permet
d'acheminer les farines depuis le moulin jusqu'au magasin.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930196X
01930197XA
01930198XA
Fig. 17
Quai et passerelles.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930199X
01930200XA
01930201XA
Fig. 18
A droite, le quai de déchargement des wagons. On distingue les
grilles sur lesquelles était déversé le blé, avant d'être acheminé
jusqu'au silo «canal» par l'intermédiaire de bandes transporteuses
installées sous-sol. A gauche, le quai de chargement des wagons
bordant le magasin à farine.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930210X
01930211XA
01930212XA
Fig. 19
A gauche, le quai de déchargement des wagons précédé de pèses
wagons Philips Industrie. A droite, le quai de chargement des
wagons bordant le magasin à farine.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930213X
Fig. 20
Livraison de farine en 2003 : la fabrication de farine a cessé depuis
juin 2001, mais le site a conservé une activité d'ensachage
jusqu'en mars 2004. A gauche, le revers du bâtiment de
l'administration.
Repro. L. Desmoulins
04930009NUCAB
Fig. 21
Au 8e étage du magasin à farine, le toboggan métallique de
manutention à double hélice, destiné à la descente des sacs après
ensachage.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930225X
01930226XA
01930227XA
Fig. 22
Au rez-de-chaussée du magasin à farine, le quai de chargement
des sacs de farine (transport par camion).
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930228X
01930229XA
01930230XA
76
93 - Pantin, 9, rue du Débarcadère
Minoterie appelée Grands Moulins de Pantin
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Fig. 23
Ensemble de bâtiments situés sur le flanc nord-est de la cour,
comprenant les ateliers de mécanique et de menuiserie, les
garages et la «boulangerie» (fournil et moulin d'essais) surmontée
d'une tourelle.
Phot. Inv. J.-B. Vialles
01930193X
01930194XA
01930195XA
Fig. 24
Façade de la «boulangerie» (fournil et moulin d'essai). Construite
en 1933, parallèlement aux voies de chemin de fer, et marquant
ainsi l'entrée du site, ce bâtiment offre un corps central à trois
étages carrés coiffé d'une corniche en béton et d'un toit-terrasse ;
la façade en parement de brique, dissimulant une structure en
béton armé, porte le monogramme « GMPP » (Grands Moulins de
Pantin-Paris).
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930147XA
04930148XA
Fig. 25
Détail de la façade de la «boulangerie» : monogramme « GMPP »
(Grands Moulins de Pantin-Paris).
Phot. Inv. J.-B. Vialles
04930150XA
04930149XA
Fig. 26
Façade de la semoulerie, prise depuis la terrasse de la menuiserie.
Le bâtiment, construit en 1952 sur les plans de Léon Bailly,
présente une succession de larges baies horizontales inspirées de
l'architecture industrielle américaine du début du XXe siècle.
Repro. L. Desmoulins
04930015NUCAB
Fig. 27
Vue du silo à blé «Danton», prise depuis le sud. Bâtiment achevé
en 1961 sur les plans de Léon Bailly (1958) repris en 1959 par
Alain Bailly.
Repro. L. Desmoulins
04930007NUCAB
77

Documents pareils