Les plasmas au GREMI - Délégation Centre Limousin Poitou

Transcription

Les plasmas au GREMI - Délégation Centre Limousin Poitou
> Labo en direct
4/
Les plasmas au GREMI :
des processus fondamentaux aux applications
industrielles
Le Groupe de Recherches sur l’Energétique des Milieux Ionisés (GREMI) est une Unité Mixte de Recherche de
l’Université d’Orléans et du CNRS (UMR 6606). Dirigé par Jean-Michel Pouvesle, ce laboratoire est spécialisé dans
l’étude des plasmas et le développement de leurs diagnostics, modes de production et applications. Il est résolument
engagé dans le transfert technologique de procédés plasmas vers l’industrie tout en poursuivant des recherches
fondamentales.
J.M. Pouvesle,
directeur du GREMI
Un laboratoire dynamique
Créé en 1981, le GREMI est issu du
regroupement thématique de deux équipes, l’une de l’université d’Orléans et
l’autre du CNRS (CRPHT) qui
travaillaient sur les plasmas. Fin 1995,
la moitié du personnel du GREMI est
venue s’installer dans les bâtiments de
la toute nouvelle Ecole Supérieure des
Procédés Electroniques et Optiques
(ESPEO). Le regroupement du laboratoire a eu lieu en 1999 avec l’achèvement des nouveaux locaux financés
conjointement par la Région, l’agglomération et la ville d’Orléans, le Conseil
Général et l’Etat. Actuellement 66
personnes, chercheurs, étudiants, ingénieurs, techniciens et administratifs,
dont 33 permanents travaillent au
GREMI.
Le GREMI est rattaché au département
Microscoop / Numéro 54 – décembre 2007
ST2I (Sciences et Technologies de l’Information et de l’Ingénierie) du CNRS
ainsi qu’au département DSPT8 (Département Sciences pour l’Ingénieur de la
MSTP) du Ministère délégué à l’Ensei-
gnement Supérieur et à la Recherche.
Les activités du laboratoire s’inscrivent
dans deux pôles de compétitivité nationaux (Sciences et Systèmes de l’Energie Electrique et Cosmetic Valley) et trois
/5
pôles régionaux (Centre Imagerie,
Biomasse et AVR). Au cours des quatre
dernières années, les chercheurs ont
développé de nombreuses collaborations
(38 nationales, 40 internationales) et
partenariats (41 industriels). Ils participent à des programmes de type
PREDIT ainsi qu’à 4 ANR dans des
cadres divers comme la fédération Energétique, Propulsion, Espace, Environnement (EPEE), le Centre d’Etudes et
de Recherches Technologiques en
Microélectronique (CERTeM) de Tours,
le projet GIS Soleil Centre et 13 Groupements de Recherche.
Les recherches menées au GREMI
portent sur l’étude de la physique des
plasmas et le développement d’applications en relation avec les propriétés
très particulières de ces milieux. Les
moyens de diagnostic des plasmas
comme les mesures électriques et la
spectroscopie sont communs aux différentes équipes ainsi que la démarche
scientifique consistant à mener des
études fondamentales pour la compréhension de phénomènes physicochimiques afin d’aboutir au développement de procédés contrôlés, donc
fiables. Trois grandes thématiques
peuvent être dégagées.
Plasmas et lasers pour le traitement des
matériaux
Dans cet axe on étudie l’interaction entre
les plasmas et les lasers avec les matériaux dans le but soit de les modifier
en surface, soit de les synthétiser sous
forme de couches minces ou d’agrégats,
soit de les analyser. Les applications très
variées qui se sont développées sur ce
sujet depuis plusieurs années font que
le GREMI possède actuellement une
forte composante « matériaux ».
Gravure plasma pour la microélectronique de puissance
Dans le domaine de la microélectronique
et notamment pour la gravure du silicium, les procédés plasmas sont utilisés depuis longtemps. Actuellement ils
sont développés au laboratoire pour
réaliser des tranchées qui peuvent
atteindre cent microns de profondeur
sur seulement deux microns de large.
Elles servent à l’élaboration de barrières thermiques ou de condensateurs.
Des « vias », c’est à dire des tranchées
traversant les plaques de semi-conducteurs, peuvent également être réalisées,
ce qui permet de faire des structures
empilées, et donc de la microélectronique 3D. Sur ce sujet, une longue collaboration lie le GREMI aux sociétés Alcatel et ST Microélectronique.
Synthèse de matériaux
Deux équipes du GREMI travaillent sur
le dépôt de matériaux par PVD (Physical Vapor Deposition) c’est à dire par
condensation de la phase vapeur sur une
surface, l’une par pulvérisation plasma
magnétron, l’autre par ablation laser.
Cette deuxième technique est plus particulièrement utilisée pour élaborer des
matériaux de composition complexe, ou
présentant une structure cristalline
spécifique. Ils sont utilisés pour l’amélioration des propriétés tribologiques ou
pour la synthèse de nouveaux matériaux
pour la conversion photovoltaïque.
Un procédé magnétron est actuellement
en développement pour une application
dans le domaine des piles à combustible. Un programme est en cours dans
lequel interviennent le Ministère, la
Région, la Communauté d’Agglomération du Drouais, la société XBYBUS, des
équipes universitaires, l’Institut Européen des Membranes à Montpellier.
L’objectif est de réaliser la première pile Motif MEMS gravé sur silicium
à combustible par procédé tout plasma. par plasma
La réactivité des plasmas en phase
gazeuse peut également mener à la
formation de poudres de taille nano ou
micrométrique en phase gazeuse. Des
études fondamentales sont réalisées,
portant sur la croissance de ces poudres et leur comportement dans le
plasma. Des expériences développées
au GREMI ont été réalisées en microgravité sur la station spatiale internationale par Claudie Haigneré. Ce travail
a bénéficié de financements européens.
Ces poudres, selon leur taille et composition chimique, peuvent présenter un
grand intérêt. Par exemple, des cristallites de silicium formées dans un
plasma, déposées dans une matrice
amorphe, présentent de bonnes propriétés de conversion photovoltaïque. Il est
également possible d’injecter des poud-
Plasmas se formant
au dessus de deux
cibles d’aluminium
lors de l’intéraction
laser/matière
Le journal du CNRS en délégation Centre Poitou-Charentes
> Labo en direct
6/
Dispositif pour la production
d’hydrogène par plasma à
l’admission d’un moteur
(Collaboration avec le LME)
res de composition voulue dans un
plasma où elles peuvent être fonctionnalisées durant leur phase de lévitation
dans la phase gazeuse.
Etude transferts d’énergie plasma /
surface
Le but de cette recherche fondamentale
est une meilleure compréhension des
phénomènes de transferts d’énergie
entre un plasma et une surface. L’identification des acteurs de ces transferts
d’énergie permettra de mieux contrôler
les procédés de modification de surface
par plasma. Un projet ANR est en cours
sur ce sujet.
Réacteur plasma
pour l’étude de
poudres en
suspension
Aspects énergétiques
Propulsion plasmique
Les plasmas pour la propulsion spatiale
sont développés au GREMI dans le cadre
du Groupement de Recherche Propulsion spatiale à Plasma, avec tous les
acteurs du domaine, dont la SNECMA,
le CNES et, localement, ICARE où se
situe le moyen national d’essais
Sources de rayonnement X et UV
PIVOINE-2G. Le GREMI s’intéresse plus
particulièrement à la mise au point de On utilise dans ce cas le rayonnement
nouveaux moteurs et aux études électromagnétique émis par les plasmas
pour réaliser des sources dans différents
physiques des moteurs existants.
domaines spectraux. Les études portent
autant sur le milieu plasma lui-même
(nature du gaz, pression) que sur la
façon d’injecter l’énergie dans le gaz
(alimentation électrique).
Un exemple d’application souvent
présenté au grand public, est la mise au
point de nouveaux tubes fluorescents
sans mercure. En effet, les tubes actuels
contiennent une petite goutte de
mercure (métal lourd, poison pour l’environnement) dont une partie se volatilise et émet des rayons UV qui font fluorescer une poudre donnant la couleur
voulue. L’idée est d’obtenir cette émission UV sans mercure. Cette étude est
réalisée dans le cadre d’une collaboration avec une société du Loiret, AUPEM
SEFLI.
Un autre domaine d’application est celui
de l’imagerie du petit animal. Des sour-
Microscoop / Numéro 54 – décembre 2007
ces capables d’émettre un rayonnement
X en impulsions de quelques nanosecondes sont développées. Elles
permettent de s’affranchir de tous les
problèmes liés aux mouvements gênant
la radiographie X traditionnelle. A ce
titre, le GREMI est rattaché au pôle
Centre Imagerie de la Région Centre.
Enfin, pour la lithographie et la métrologie, des sources EUV (extrême ultra
violet) sont mises au point. L’une d’entre elles, par exemple, dont les caractéristiques sont proches du rayonnement
Synchrotron présente donc un très grand
intérêt pour les industriels ou les chercheurs. Un plateau scientifique et technologique a également été créé en collaboration avec la société INEL où
travaillent de manière contractuelle des
industriels et des laboratoires sur des
projets financés par le Ministère, la
Région, l’industriel, le conseil général
du Loiret et l’ANR. De nouvelles applications médicales de ces sources sont
à l’étude.
Interview <
/7
Plasmas Hautes Pressions
Un des intérêts de l’utilisation des plasmas froids à pression atmosphérique,
est l’absence de système de pompage,
ce qui peut être intéressant pour les
applications. Ces plasmas sont souvent
utilisés pour leur aspect réactif.
Chimie des plasmas
Lorsque des gaz réactifs sont introduits
dans un plasma, des réactions
chimiques ont lieu en phase gazeuse.
La chimie des plasmas concerne différentes applications telles que la dépollution des gaz, la synthèse d’hydrogène,
la valorisation de la biomasse.
L’aspect production d’hydrogène est
particulièrement important puisque ce
gaz est un vecteur d’énergie prometteur
pour l’avenir. Les recherches actuelles
portent sur des moyens de la produire
à bas coût ; les procédés plasmas sont
de bons candidats.
Des plasmas haute pression, sont également étudiés pour l’initiation de la
combustion dans les moteurs thermiques.
LME et ICARE, un projet a été lancé
sur l’étude des modifications d’écoulement engendrées par plasma avec des
applications en aérodynamique et en
aéronautique. Il est en effet possible
d’influer sur l’écoulement le long d’une
surface et d’avoir des actions sur la traînée ou les turbulences engendrées.
Allumage d’un mélange méthane/air par décharge
Plasmas d’arc
Depuis 25 ans, une action est menée
en étroite collaboration avec l’entreprise
SCHNEIDER sur l’étude des plasmas
d’arc apparaissant lors des coupures de
courant dans les disjoncteurs. C’est
l’exemple même d’une fidélisation des
relations entre une entreprise et un laboratoire.
Le laboratoire est toujours en pleine
expansion que ce soit en terme de
personnels ou de nouveaux projets. Pour
que cette dynamique perdure, il est
absolument nécessaire de maintenir un
haut niveau en recherche fondamentale,
ce qui permet de conserver une force de
proposition aussi bien pour répondre aux
appels à programme qu’aux besoins des
industriels. Il faut que le laboratoire
Aérodynamique
Il y a trois ans, dans le cadre de la Fédé- travaille toujours en limite de ses possiration EPEE, en collaboration avec le bilités afin de progresser. Le laboratoire
électrique (les quatre derniers encarts: propagation
de la flamme)
doit rester attractif vis à vis des jeunes,
doctorants, post-docs etc. qui constituent sa force vive. D’un point de vue
thématique, l’accent sera mis à court
terme sur les applications biologiques
et le médicales qui seront des secteurs
clés du développement des procédés
plasmas dans les années à venir.
Claude FOUGERE
Anne-Lise THOMANN
Qu’est-ce qu’un plasma ?
Le plasma est le 4ème état de la matière
(solide, liquide, gaz, plasma), il constitue 99% de l’univers visible. Les plasmas naturels les plus connus sont les
éclairs, les aurores boréales, les étoiles.
Le plasma est un gaz auquel on a fourni
de l’énergie, ce qui provoque l’excitation et l’ionisation des atomes ou molécules présentes. Il contient donc des
électrons, des ions des espèces réactives et des photons. Ce milieu est réactif, énergétique et lumineux. Les plasmas de laboratoires sont créés en
apportant l’énergie au gaz par décharge
électrique (continue, pulsée, micro-onde
etc.) ou en faisant interagir un laser avec
un matériau. Ils sont classés en deux
grandes catégories : plasmas chauds
(toutes les espèces sont à la même
température, ils sont à l’équilibre
thermodynamique) et plasmas froids (les
électrons sont énergétiques, mais le gaz
reste froid).
Intérieur d’une chambre de dépôt par pulvérisation
plasma. L’une des trois cibles est en cours de
pulvérisation
Le journal du CNRS en délégation Centre Poitou-Charentes