Océanographie physique, niveau L3 Table des mati`eres

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Océanographie physique, niveau L3 Table des mati`eres
Océanographie physique, niveau L3
Table des matières
I
Introduction
3
1 Objectifs et plan du cours
3
2 Environnement de l’océan
2.1 Morphologie des océans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.2 L’atmosphère et l’océan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
4
II
5
Circulation océanique forcée par le vent
3 Les
3.1
3.2
3.3
équations de la dynamique de l’océan
Rappels mathématiques généraux . . . . . . . . . . . . . . .
La dérivée particulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Conservation de la masse . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.1 Formulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.2 L’approximation de Boussinesq . . . . . . . . . . . .
3.4 Equation du mouvement : Ecriture générale . . . . . . . . .
3.5 Equation du mouvement : Approximations et simplifications
3.5.1 Le système de coordonnées . . . . . . . . . . . . . .
3.5.2 La force centrifuge . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.3 La rotation locale et la force de Coriolis . . . . . . .
3.5.4 L’approximation hydrostatique . . . . . . . . . . . .
3.5.5 Turbulence et viscosité turbulente . . . . . . . . . .
3.5.6 Forme finale des équations du mouvement . . . . . .
3.6 Autres équations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4 Dynamiques des courants
4.1 Courants géostrophiques . . . . . . . . . .
4.2 La dérive d’Ekman . . . . . . . . . . . . .
4.2.1 Action du vent à la surface . . . .
4.2.2 Couche d’Ekman, spirale d’Ekman
4.2.3 Transport d’Ekman . . . . . . . .
4.3 Pompage d’Ekman . . . . . . . . . . . . .
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5 Circulation forcée par le vent
5.1 Circulation dans les régions subtropicales :
5.1.1 Présentation du Gulf Stream . . .
5.1.2 Transport de Sverdrup . . . . . . .
5.1.3 Modèle de Stommel . . . . . . . .
5.2 Circulation dans la région Arctique . . . .
5.3 Circulation dans la région Antarctique . .
cas de
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1
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5
5
5
5
5
5
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6
6
6
6
7
7
8
8
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9
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Nord
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l’Atlantique
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11
11
11
11
12
13
13
III Circulation forcée par les échanges de température et d’eau avec
l’atmosphère
14
6 Caractéristiques de l’eau de mer
6.1 Salinité . . . . . . . . . . . . . . .
6.2 Température potentielle . . . . . .
6.3 Densité et densité potentielle . . .
6.4 Absorption du rayonnement solaire
6.5 La glace de mer . . . . . . . . . . .
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7 Notion de masse d’eau
7.1 Variabilité spatio-temporelle de T et S . . . . . .
7.2 Masses d’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7.2.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7.2.2 Diagramme T-S . . . . . . . . . . . . . . .
7.2.3 Mélange de masses d’eau et caballing . . .
7.3 Les principales masses d’eau . . . . . . . . . . . .
7.3.1 Masses d’eau de surface et intermédiaires
7.3.2 Masses d’eau profondes et de fond . . . .
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8 La circulation thermohaline
20
8.1 Description . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
8.2 Un modèle simple de la circulation thermohaline . . . . . . . . . . . . . . . 20
IV
Compléments
21
2
Première partie
Introduction
1
Objectifs et plan du cours
Les objectifs du cours sont :
- d’acquérir des connaissances élémentaires en océanographie physique de grande échelle ;
- de se familiariser aux équations de base des fluides géophysiques au travers de leurs applications dans ce domaine ;
- de se sensibiliser aux exercices d’approximation des équations et de modélisation de
systèmes géodynamiques.
Ces objectifs dépassent la simple description phénoménologique des processus océaniques.
Cette approche est nécessaire à l’étudiant qui souhaite poursuivre en océanographie. Elle
est aussi bénéfique à l’étudiant qui se destine à un autre domaine de la géophysique.
Le cours concerne l’océanographie physique (à distinguer de la chimique, biologique,
géologique, etc) dont relèvent les phénomène de circulation, d’interaction avec l’atmosphère,
et le climat (des ponts existent bien sûr avec la biologie et la chimie).
La circulation océanique est complexe mais organisée. C’est cette organisation que nous
allons étudier. La partie I situe le cours et situe l’océan dans le système climatique. Dans
les parties II et III nous étudions les deux grands types de circulation : celui forcé par le
vent (nous détaillons plus particulièrement le cas des moyennes latitudes) et celui forcé
par les échanges de température et d’eau avec l’atmosphère.
La description de la circulation forcée par le vent s’appuie sur les équations physiques
qui décrivent la dynamique de l’océan. Ces équations sont présentées en section 3. Dans
la même section, des approximations et simplifications sont introduites pour simplifier
ces équations sans les dénaturer : il faut qu’elles puissent encore décrire les processus
océaniques qui nous intéressent. L’application de ces équations pour décrire des processus
réalistes de circulation océanique est présentée en section 4. La circulation forcée par le
vent sera alors présentée comme une combinaison de ces processus, en section 5.
La circulation forcée par les effets thermohalins est difficile à décrire à partir des
équations physiques, comme celle forcée par le vent. Ce type de circulation est complètement
lié aux caractŕistiques de l’eau de mer ; celles-ci sont présentées en section 6. En section
7 nous présentons la notion de ¡¡masse d’eau¿¿ abondamment utilisée pour caractériser
la circulation de grande échelle, surtout la thermohaline. En section 8, nous étudions la
circulation thermohaline : sa description réaliste, puis par le développement d’un petit
modèle simple (en apparence).
Enfin, la partie IV, qui sera abordée seulement si le temps le permet, présente quelques
éléments liés à l’étude de l’océan.
2
2.1
Environnement de l’océan
Morphologie des océans
L’océan global se décompose en 4 grandes parties : le Pacifique, l’Atlantique, l’océan
Indien et l’océan Austral. L’océan couvre environ 71% de la surface terrestre. La plus
grande partie se trouve entre 3000 et 6000 m de profondeur, avec une moyenne d’environ
3
3730 m. Les plateaux continentaux couvrent 8% de la surface océanique.
L’océanographie cotière est une discipline importante pour l’homme (impact de l’élévation
du niveau des mers, pêche, etc) mais les questions de climat relèvent surtout de l’océanographie
hauturière (circulation à l’échelle des grands bassins).
2.2
L’atmosphère et l’océan
L’atmosphère et l’océan sont les deux principaux fluides géophysiques déterminant
pour le climat (le troisième étant la glace, présente surtout aux pôles). L’atmosphère et
l’océan sont les principaux agents de la redistribution de l’énergie sur le globe (transport
de chaleur de léquateur vers les pôles, 50% chacun).
Des différences fondamentales les caractérisent :
– leur capacité à stocker de la chaleur ; la chaleur spécifique de l’eau est Cp = 4.18103
J.kg−1 .◦ C−1 et la masse volumique de l’eau de mer est ρ = 1028 kg.m−3 . Pour l’air,
les valeurs sont environ de 1000 J.kg−1 .◦ C−1 et 1.2 kg.m−3 . La masse de l’atmosphère
et de l’océan sont :
mA = 4πR2 Ps /g = 5260Tt
mO = 7/10 × 4πR2 × 3730 × ρ ∼ 260mA
Les capacités calorifiques sont :
CA = 1000 × mA
CO = 4180 × mO ∼ 1000CA
–
–
–
–
Un refroidissement de l’océan de 1◦ Cpeut se traduire par un réchauffement de l’atmosphère de 1000◦ C. Une couche de 2,5 m d’eau peut stocker autant de chaleur que
la totalité de l’atmosphère. Comparé à l’atmosphère, l’océan représente un immense
réservoir de chaleur. Ceci va influencer différemment pour les deux fluides les échelles
de temps et d’espace mises en jeu dans la circulation de grande échelle.
L’atmosphère est en partie transparente au rayonnement solaire. Elle est chauffée
par le sol qui a absorbé l’énergie solaire, donc par le bas. Elle est donc déstabilisée
par ce réchauffement. Cet effet thermodynamique est le principal moteur de la circulation atmosphérique. L’océan est, lui, chauffée par le haut car peu transparent
au rayonnement solaire. Ce chauffage a tendance à le stabiliser.
En plus du forçage thermodynamique, La circulation océanique est étroitement liée
aux échanges de moment avec la troposphère (forçage par le vent).
Les effets atmosphériques du cycle de l’eau est plus complexe que les effets océaniques
du sel (pas de changement d’état, pas d’impact radiatif, etc).
La circulation océanique est contrainte par la présence de continents. Par conséquence,
les deux circulations s’organisent différemment. , .
4
Deuxième partie
Circulation océanique forcée par le vent
3
Les équations de la dynamique de l’océan
3.1
Rappels mathématiques généraux
Voir cours oral.
3.2
La dérivée particulaire
Soit N (x, t) ;
dN = N (X + dX, t + dt) − N (X, t) =
3.3
3.3.1
∂N
∂N
dX +
dt
∂x
∂t
Conservation de la masse
Formulation
Dρ
−
= −ρ (div →
u)
(1)
Dt
C’est l’égalité entre la divergence de la vitesse et le taux de dilatation volumique. Souvent,
le fluide sera considéré incompressible, la divergence de la vitesse seule sera nulle.
3.3.2
L’approximation de Boussinesq
Celle-ci consiste à négliger les variations de ρ pour les mouvements océaniques de
grande échelle. ρ est alors une constante dans les équations du mouvement, et l’équation
1 devient :
−
div →
u =0
(2)
Les variations de ρ ne sont retenues que dans le terme de flottabilité (le ρ dans l’équation
de w).
3.4
Equation du mouvement : Ecriture générale
Pour obtenir l’équation du mouvement, on exprime que l’accélération absolue du fluide
résulte de la gravité et des contraintes internes au fluide, composées des effets non-visqueux
(pression) et des effets de la viscosité :
D
1
→
−
−
u a = −grad Ψa − grad p + ν∆→
ua
Dt a
ρ
où ν est le coefficient de viscosité cinématique moléculaire. Pour l’étude des courants il est
plus opportun de se placer dans le repère lié à la Terre, en rotation dans le repère lié au
→
−
→
−
soleil avec le vecteur rotation Ω k , Ω = 0.727 × 10−4 s−1 et k est le vecteur unitaire porté
par l’axe des pôles. Le changement de repère s’opère grâce à la formule de Bour :
→
−
D
D
=
+Ωk∧
Dt a Dt
5
−−→
Appliquée deux fois (une fois à OM , où O est le centre de la Terre et M le point qui nous
−
intéresse, puis à →
u a) :
−
→
− −
→
−
→
− −−→
D
D→
u
→
−
ua =
+ 2Ω k ∧ →
u + Ω k ∧ (Ω k ∧ OM )
Dt a
Dt
Le dernier terme, l’accélération centripète, dérive d’un potentiel et peut s’ajouter au potentiel de gravitation :
→
− −−→
1
Ψ = Ψa − Ω2 | k ∧ OM |2
2
−
Le terme précd́ent est l’accélération de Coriolis. Finalement, pour la vitesse relative →
u =
→
−
−
−
→
→
−
u − Ω k ∧ OM , l’équation s’écrit
a
−
→
− −
1
D→
u
−
= −2Ω k ∧ →
u − grad Ψ − grad p + ν∆→
u
Dt
ρ
(3)
Cette équation fait en général l’objet de plusieurs approximations et simplifications.
3.5
Equation du mouvement : Approximations et simplifications
3.5.1
Le système de coordonnées
Les équations sont écrites pour une enveloppe fluide à symétrie sphérique. Le système
de coordonnées le plus naturel est celui des coordonnées sphériques centrées au centre de
la Terre. Pour des études ”sur le papier”, on projette en général les équations sur les axes
d’un repère local, cartésien, lié au plan tangent à la sphère centré sur la zone d’intérêt . x
dénote la distance selon la longitude, y la distance selon la latitude, et z l’altitude. u, v,
et w sont les vitesses correspondantes. Les équations du mouvement s’écrivent :
∂u
∂u
∂u
∂u
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂v
∂v
∂v
∂v
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂w
∂w
∂w
∂w
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂Ψ 1 ∂p
∂2u
∂2u
∂2u
−
+ ν 2 + ν 2 + ν 2 (4)
∂x
ρ ∂x
∂x
∂y
∂z
2
2
2
∂Ψ 1 ∂p
∂ v
∂ v
∂ v
= −f u −
−
+ν 2 +ν 2 +ν 2
(5)
∂y
ρ ∂y
∂x
∂y
∂z
∂Ψ 1 ∂p
∂2w
∂2w
∂2w
= f 0u −
−
+ν 2 +ν 2 +ν 2
(6)
∂z
ρ ∂z
∂x
∂y
∂z
= f v − f 0w −
où f = 2Ω sin φ est le paramètre de Coriolis qui traduit l’effet de Coriolis dû à la compo→
−
sante localement verticale de Ω , et f 0 = 2Ω cos φ est le paramètre réciproque de Coriolis
→
−
qui traduit l’effet de Coriolis dû à la composante localement horizontale de Ω . φ représente
la latitude.
3.5.2
La force centrifuge
La force centrifuge étant très petite devant la gravité, il est commun de la négliger en
première approximation. Il est possible de comparer leurs valeurs à l’équateur : Ω2 R =
0.0338 m.s−2 , g = 9.81 m.s−2 . Donc on considère Ψ = gz. Les termes en Ψ dans les
équations de u et v disparaissent, et ∂Ψ
∂z = g.
3.5.3
La rotation locale et la force de Coriolis
Les vitesses horizontales (typiquement, 0.1 m.s−1 dans l’océan) sont nettement supérieures
aux vitesses verticales, et on peut considérer en première approximation que les deux sont
6
découplées. On néglige alors l’effet de la composante horizontale locale (les termes en f 0 )
de la rotation.
Les équations 4, 5 et 6 deviennent :
∂u
∂u
∂u
∂u
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂v
∂v
∂v
∂v
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂w
∂w
∂w
∂w
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂2u
∂2u
1 ∂p
∂2u
+ν 2 +ν 2 +ν 2
ρ ∂x
∂x
∂y
∂z
2
2
1 ∂p
∂ v
∂ v
∂2v
= −f u −
+ν 2 +ν 2 +ν 2
ρ ∂y
∂x
∂y
∂z
2
2
1 ∂p
∂ w
∂ w
∂2w
= −g −
+ν 2 +ν 2 +ν 2
ρ ∂z
∂x
∂y
∂z
= fv −
(7)
(8)
(9)
La force de Coriolis locale est nulle à l’équateur et maximale aux pôles. Elle fait dévier
à droite dans l’hémisphère Nord et à gauche dans l’hémisphère Sud.
3.5.4
L’approximation hydrostatique
Cette approximation se fonde sur la faiblesse des vitesses des courants verticaux (w)
devant les autres termes physiques en jeu : les forces de pression et la force de gravité.
L’équation 9 se simplifie à :
∂p
−
= ρg
(10)
∂z
3.5.5
Turbulence et viscosité turbulente
La turbulence provient de la nature non linéaire de l’équation du mouvement, qui permet des interactions entre les différentes échelles spatiales et temporelles. L’océanographe
ne s’intéresse guère aux mouvements chaotiques de très petites échelles relevant de la turbulence, mais plutôt à l’effet que peut avoir cette turbulence sur les mouvements de plus
grande échelle (les courants). Pour séparer les échelles, il est d’usage de décomposer les
grandeurs en un terme moyen (cette moyenne étant calculée sur un volume et un intervalle
de temps adéquats), variant lentement, et un terme fluctuant. Pour la vitesse du courant
zonal par exemple (la barre dénote la moyenne) :
u = ū + u0 ,
avec
ū0 = 0
Nous admettons que l’opérateur de moyenne commute avec les opérateurs de dérivation.
Nous avons aussi ūv = ūv̄ et donc uv = (ū + u0 )(v̄ + v 0 ) = uv +u0 v 0 . Nous allons introduire
cette décomposition dans l’équation 7 mais auparavant, nous réécrivons cette équation
sous sa forme flux : en considérant que la divergence de la vitesse est nulle (grâce à
l’approximation de Boussinesq) :
1 ∂p
∂2u
∂u ∂u2 ∂uv ∂uw
∂2u
∂2u
+
+
+
= fv −
+ν 2 +ν 2 +ν 2
∂t
∂x
∂y
∂z
ρ ∂x
∂x
∂y
∂z
(11)
Avec la décomposition ci-dessus puis l’opérateur de moyenne, cette équation s’écrit :
∂ ū ∂ ū2 ∂ ūv̄ ∂ ūw̄ ∂u02 ∂u0 v 0 ∂u0 w0
1 ∂ p̄
∂ 2 ū
∂ 2 ū
∂ 2 ū
+
+
+
+
+
+
= f v̄ −
+ ν 2 + ν 2 + ν 2 (12)
∂t
∂x
∂y
∂z
∂x
∂y
∂z
ρ ∂x
∂x
∂y
∂z
Les équations 12 sont identiques à 11, avec trois termes supplémentaires qui représentent
le transport zonal de quantité de mouvement dû à la turbulence. Le principal problème
pour modéliser un écoulement turbulent est d’exprimer ces termes en fonction de termes
7
connus. Ce problème n’a pas de solution générale, et ces termes doivent être paramétrisés.
Avant d’aborder ce problème nous allons procéder à une simplification supplémentaire.
Dans l’océan hauturier, les parois ”solides” responsables des frottements donc de la
turbulence sont le fond et l’interface avec l’air. La présence de ces parois induit une variation rapide de tous les paramètres sur la verticale, variation beaucoup plus rapide que
sur l’horizontale. Nous admettons que c’est aussi le cas pour les flux turbulents et nous
02
∂u0 v 0
∂u0 w0
négligeons donc ∂u
∂x et ∂y devant ∂z . L’équation 12 est réduite à :
1 ∂ p̄
∂ 2 ū
∂ 2 ū
∂ 2 ū
∂ ū ∂ ūv̄ ∂ ūw̄ ∂u0 w0
+
+
+
= f v̄ −
+ν 2 +ν 2 +ν 2
∂t
∂y
∂z
∂z
ρ ∂x
∂x
∂y
∂z
(13)
Il s’agit maintenant de paramétriser le terme turbulent restant en fonction de termes
connus. Le modèle de Prandtl le présente comme proportionnel au gradient de la quantité
moyenne ū :
∂ ū
u0 w0 = −Ku
(14)
∂z
Le coefficient d’échange turbulent Ku a la même dimension qu’un coefficient de viscosité
cinématique, et est parfois nommé le coefficient de viscosité turbulente. Dans l’océan, ce
coefficient apparait comme nettement supérieur à ν. En effet, la viscosité moléculaire se
traduit par du transfert de moment au sein du fluide par la seule agitation moléculaire,
importante sur quelques millimètres au plus dans l’eau. Le transfert de moment dû à la
turbulence peut se produire sur des distances beaucoup plus élevée, jusquà des dizaines ou
centaines de mètres dans l’océan. Il est donc légitime de négliger la viscosité moléculaire
devant la viscosité turbulente. Avertissement : dans certains ouvrages les notations se
mélangent et ν représente la viscosité totale (donc essentiellement turbulente).
3.5.6
Forme finale des équations du mouvement
1 ∂p
∂2u
+ Ku 2
ρ ∂x
∂z
1 ∂p
∂2v
= −f u −
+ Kv 2
ρ ∂y
∂z
∂u
∂u
∂u
∂u
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂v
∂v
∂v
∂v
+u
+v
+w
∂t
∂x
∂y
∂z
∂p
−
∂z
3.6
= fv −
= ρg
(15)
(16)
(17)
Autres équations
Bilan de sel :
ρ
DS
= div (KS grad S)
Dt
Energie interne :
DT
= div (KT grad T )
Dt
KS et KT sont les coefficients de viscosité turbulente (qui doivent être égaux, car la turbulente mélange les deux identiquement).
Equation d’état : déjà vue.
ρCv
8
4
Dynamiques des courants
4.1
Courants géostrophiques
Nous nous intéressons ici à la circulation de grande échelle, proche de la stationnarité
( ∂u
∂t petit). Ce type de circulation est caractérisé par les ordres de grandeur (réalistes)
suivant :
u ∼ 0.1 m s−1 (vitesse typique des courants étudiés)
∆x ∼ 105 m (échelle caractéristique des mouvements horizontaux étudiés)
H ∼ 10 − 103 m (épaisseur de la couche, peu important)
∆H ∼ 10−1 m (variations de H)
∆t ∼ ∆x/u ∼ 106 s
f ∼ 10−4 rad s−1
K ∼ 10−6 m2 s−1 (océan moyen très peu turbulent).
Pour l’équation 15, les ordres de grandeur des termes sont alors les suivants :
∂u
∂t
+
u ∂u
∂x
+
v ∂u
∂y
w ∂u
∂z
+
=
fv
−
1 ∂p
ρ ∂x
2
+ Ku ∂∂zu2
(18)
10−7
10−7
10−7
<
10−7
10−5
10−5
10−9
Le terme de Coriolis est deux ordre de grandeur plus grand que les autres. Le terme de pression est donc forcément du même ordre de grandeur et équilibre le terme de Coriolis. Cet
équilibre entre entre les forces de pression et de Coriolis s’appelle l’équilibre géostrophique
et on note ug et vg le courant géostrophique :
1 ∂p
ρ ∂y
1 ∂p
ρ ∂x
f ug = −
(19)
f vg =
(20)
ou, vectoriellement :
→
− →
1
2Ω k ∧ −
ug = − grad p
(21)
ρ
Cette équation indique que le courant géostrophique est toujours perpendiculaire au gradient de pression.
Même si la géostrophie explique une part importante de la circulation, elle ne suffit
bien évidemment pas à tout expliquer.
4.2
La dérive d’Ekman
La dérive d’Ekman est un courant existant dans les couches superficielles, généré par
le vent.
4.2.1
Action du vent à la surface
A la surface, le vent exerce une force de friction appelée tension de vent. La tension de
−
vent (N.m−2 ou kg.m.s−2 ) est usuellement notée →
τ , est parallèle au vent et proportionnelle
au carré de la vitesse du vent :
L’effet de frottement du vent à la surface est transmis vers le bas par les frictions
internes de l’océan superficiel, qui résultent de la turbulence. Cela résulte finalement en
un transfert de quantité de mouvement vers le bas.
→
−
−
−
τ = ρair CD k →
u 10 k →
u 10 ,
9
(22)
−
où CD est un coefficient de friction et →
u 10 la vitesse du vent à 10 m au-dessus de l’eau.
La condition à la surface est donc un flux de quantité de mouvement imposé, donc
∂v
∂u
ρKu
= τx , ρKv
= τy .
(23)
∂z z=0
∂z z=0
4.2.2
Couche d’Ekman, spirale d’Ekman
La couche d’Ekman désigne une couche superficielle de l’océan dans laquelle l’effet de
la turbulence est important : typiquement, Ku ∼ 10−2 m2 s−1 . Pour l’équation 15, les
ordres de grandeur des termes sont alors les suivants :
∂u
∂t
+
u ∂u
∂x
+
v ∂u
∂y
w ∂u
∂z
+
=
fv
−
1 ∂p
ρ ∂x
2
+ Ku ∂∂zu2
(24)
10−7
10−7
10−7
<
10−7
10−5
10−5
Un écoulement géostrophique peut se superposer sans gêner la résolution. En effet, pour
∂u
∂v
un tel écoulement, ∂zg = ∂zg = 0. Nous le supposons nul ici. Au premier ordre et avec
Ku = Kv = K, nous avons donc
∂2v
(25)
∂z 2
∂2u
f v = −K 2
(26)
∂z
Cette équation différentielle se résout en écrivant la vitesse complexe U = u + iv et les
conditions aux limites 23, et U = 0 en −∞ (bas de la couche d’Ekman, limite inférieure
de validité des équations 25 et 26). La solution pour f > 0 (hémisphère Nord) s’écrit :
√
z π
z π i
2 z/d h
u =
τx cos
− τy sin
(27)
e
−
−
ρf d
d 4
d 4
√
z π
z π i
2 z/d h
τx sin
v =
e
−
+ τy cos
−
(28)
ρf d
d 4
d 4
(29)
1/2
la profondeur de la couche d’Ekman. Le courant décroı̂t en intensité
avec d = 2K
f
avec la profondeur et son sens est giratoire. Il décrit donc une spirale entre la surface et
le bas de la couche d’Ekman. Nous notons qu’en surface, le courant est à 45◦ vers la droite
par rapport au vent.
fu = K
4.2.3
Transport d’Ekman
Le transport moyen de la spirale d’Ekman se calcule en intégrant u et v entre 0 et −d
(que l’on peut remplacer par −∞). On obtient
U
V
1
τy
ρf
1
= − τx
ρf
=
(30)
(31)
D’une façon plus générale le transport moyen s’écrit :
− →
→
−
1 →
k ∧−
τ
U =−
ρf
Donc un courant moyen perpendiculaire au vent.
10
(32)
4.3
Pompage d’Ekman
Dans la réalité, l’effet du vent ne se fait plus sentir au-delà de la couche d’Ekman. Le
−∞ utilisé pour l’intégration ci-dessus correspond donc au bas de la couche d’Ekman.
La vitesse verticale au niveau de cette couche, wE , (= w(−∞)) peut s’obtenir en
intégrant l’équation de la conservation de la masse selon z, avec les expressions de u et v
ci-dessus. On obtient :
−
1 →
−
k .rot →
τ
(33)
wE − w0 =
ρf
Avec un rotationnel de vent positif, le bas de la couche d’Ekman se déplace vers le haut :
c’est un upwelling.
5
Circulation forcée par le vent
5.1
5.1.1
Circulation dans les régions subtropicales : cas de l’Atlantique Nord
Présentation du Gulf Stream
Le Gulf Stream est un courant intense de l’Atlantique, peut-être le phénomène océanique
le plus étudié depuis le début de l’océanographie. Il semble prendre son origine dans le golfe
du Mexique, puis remonte le long de la cote Est américaine jusqu’au cap Hatteras d’où il
se décolle. A partir de là, le courant commence à être déstabilisé par les vents d’Ouest et
perd son aspect laminaire et des tourbillons se forment. En quelque sorte, ces tourbillons
concentrent l’énergie cinétique qui ne peut s’exprimer en écoulement laminaire. Ces tourbillons se déplacent vers le Nord-Est, si bien que le courant moyen est toujours dirigé dans
cette direction. Ces tourbillons assurent une part importante du transport d’énergie vers
le Nord. Une partie du courant s’infléchit vers le Sud et retourne dans la boucle du gyre
subtropical. L’autre partie constitue la dérive Nord-Atlantique qui atteint l’Europe et va
alimenter le courant de Norvège. C’est grâce à cette continuité du Gulf Stream que le
climat est clément en Europe, en comparaison de l’Amérique du Nord (-Est).
La première référence au Gulf Stream connue date de 1513 (Ponce de Leon). Dès 1519
il était connu des marins et utilisé pour le retour en Europe depuis l’Amérique (l’aller se
faisant par le courant Nord-équatorial et les alizés). En 1515 une théorie a été proposée pour
expliquer le GS : c’est la conséquence du courant Nord-équatorial et de la conservation de
la masse. Ce courant était expliqué, lui, avec l’attraction par les corps célestes se déplaçant
vers l’Ouest... Les premiers croquis du GS datent de 1772.
La circulation gyratoire subtropicale est donc associée à un courant de bord Ouest
intense, un de bord Est peu intense, et notamment d’une autre circulation gyratoire subpolaire plus au Nord. Les deux sous-sections suivantes présentent deux théories simples
pour tenter d’expliquer le gyre subtropical et le Gulf Stream. Une seulement y parvient.
5.1.2
Transport de Sverdrup
L’océanographe Sverdrup est à l’origine d’une théorie de l’écoulement vers l’équateur
dans les latitudes moyennes qui porte son nom. On rappelle que le paramètre de Coriolis,
f , dépend de la latitude, donc de y dans le plan local. On note β = ∂f
∂y (positif dans
l’hémisphère Nord). On considère l’écoulement géostrophique. En éliminant le terme de
pression et en utilisant la relation d’incompressibilité du fluide, on obtient :
βv = f
11
∂w
∂z
(34)
Donc, un étirement de la colonne d’eau s’accompagne d’un déplacement dans l’axe NordSud. C’est l’effet β.
On considère maintenant que cette couche dominée par l’effet géostrophique est surmontée par une fine couche d’Ekman. L’intégration verticale, entre le fond de l’océan et
le bas de la couche d’Ekman, fait apparaitre la vitesse verticale au fond (nulle), celle du
bas de la couche d’Ekman, donnée par l’équation 33, la vitesse méridienne moyenne v̄ et
lépaisseur H de la couche géostrophique :
βH v̄ = f w0 +
−
1→
−
k .rot →
τ
ρ
(35)
Un vent rotationnel résulte en un déplacement méridien de la couche de fond (sous la
couche d’Ekman). Ceci ne fonctionne plus avec un vent irrotationnel, ni si la Terre était
cylindrique.
On simplifie légèrement le problème en considérant que τy = 0 et τx = τx (y). On
peut calculer le courant zonal moyen. D’après les relations géostrophiques et la relation
précédente :
f ∂τx
p̄ = P1 (y) −
x
(36)
βH ∂y
et donc (en considérant β constant)
1 dP1
1 ∂τx
1 ∂ 2 τx
ū = −
−
+
x
(37)
ρf dy
H ∂y
ρβ ∂y 2
La première limite de ce modèle apparaı̂t lorsque l’on souhaite définir et appliquer
des conditions aux limites réalistes. Conformément à la géométrie de l’Atlantique, ū doit
s’annuler à l’Ouest (x = 0) et à l’Est (x = L). Cela exige l’ajustement de deux constantes
d’intégration pour ū, alors qu’il n’y en a qu’une (P1 (y)). Physiquement, le problème vient
du fait que la vitesse méridienne (v̄) est partout dirigée vers le Sud (entre deux latitudes
où elle peut s’annuler). Pour maintenir le flot, une frontière ouverte est indispensable,
à l’Ouest par exemple. En imposant une tension de vent en sinus de la latitude et une
frontière fermée au bord Est, la fonction de courant solution se présente comme sur la
figure.
5.1.3
Modèle de Stommel
Le modèle de Stommel est un modèle stationnaire à une couche dont les variables
sont les ”vraies” variables moyennées sur toute l’épaisseur. Cette épaisseur est supposée
constante, donc w = 0, et l’on peut alors écrire ū et v̄ (où les barres symbolisent la moyenne
sur la verticale) à l’aide d’une fonction de courant :
ū = −
∂Ψ
,
∂y
v̄ =
∂Ψ
∂x
(38)
En annulant les dérivées temporelles et en négligeant les termes non-linéaires, les
équations du mouvement horizontales deviennent :
1 ∂p
∂2u
+ Ku 2 = 0
ρ ∂x
∂z
1 ∂p
∂2v
−f u −
+ Kv 2 = 0
ρ ∂y
∂z
fv −
(39)
(40)
(41)
12
En intégrant sur toute l’épaisseur de la couche pour prendre le courant moyen, on fait
apparaitre le flux de quantité de mouvement à la surface, donné par la tension de vent :
A TERMINER
5.2
Circulation dans la région Arctique
5.3
Circulation dans la région Antarctique
13
Troisième partie
Circulation forcée par les échanges de
température et d’eau avec l’atmosphère
6
Caractéristiques de l’eau de mer
6.1
Salinité
Définition théorique : La salinité est la quantité totale des résidus solides (en grammes)
contenu dans 1 kg d’eau de mer, quand tous les carbonates ont été transformés en oxydes,
le brome et l’iode remplacé par le chlore et que toute la matière organique a été oxydée.
Expérimentalement, le constat que la concentration des principaux ions est proportionnelle
à la concentration en ions chlorures a conduit (1962) à la formulation :
S = 1.80655[Cl]
La chlorinité n’est pas facile ni rapide à mesurer. Depuis 1978, on lui préfère une définition
basée sur la conductivité électrique de l’eau de mer, plus facile à mesurer. Soit C(S, P, T )
la conductivité d’un échantillon d’eau de mer de salinité S, à la pression P et température
T . Celle-ci est pondérée par la conductivité d’un échantillon de salinité 35 exactement,
préparé en laboratoire, et mesurée à 15◦ Cet 1000 mb :
K=
C(S, P, T )
C(35, 1000, 15)
et la salinité pratique est définie comme :
S = −0.0900 + 28.2972K + 12.8083K 2 − 10.67869K 3 + 5.9862K 4 − 1.3231K 5
S s’exprime en gramme par kilogramme d’eau de mer.
6.2
Température potentielle
La température réelle n’est pas la variable la plus pertinente pour traiter de la stabilité
verticale d’une colonne d’eau. A pression constante, la densité de l’eau diminue avec la
température. Ce n’est pas forcément le cas lorsque la pression varie, typiquement dans
l’océan. On préfère la température potentielle, qui est la température qu’aurait la parcelle
de fluide si on la remontait adiabatiquement (sans échange de chaleur, ni de sel) à une
pression de 1000 mb.
On considère la parcelle de fluide comme un système ouvert, dont les variables d’état
sont T , P , S, et η l’entropie. La différentielle de l’entropie s’écrit
∂η
∂η
∂η
dη =
dT +
dP +
dS.
∂T P,S
∂P T,S
∂S T,P
Lors d’une transformation adiabatique et sans échange de sel, δQ = T dη = 0 et dS = 0,
si bien que
∂η
∂η
dT = −
dP
∂T P,S
∂P T,S
14
ou plus simplement
dT =
∂T
∂P
dP.
η,S
Intégrée entre la surface de pression P0 et température T0 et la profondeur de pression P
où la température est T , cela donne
Z P
∂T
T0 = T −
dP.
∂P η,S
P0
Par définition, T0 est la température potentielle et est notée θ. La dérivée sous l’intégrale
est communément notée Γ et appelée taux de décroissance adiabatique. C’est une fonction
intrinsèque de S, T , et P donnée par exemple par la formule de Bryden :
Γ(S, T, P ) =
(−2.1687 10−16 T + 1.8676 10−14 )T − 4.6206 10−13 P
+ (2.7759 10−12 T − 1.1351 10−10 )(S − 35) + ((−5.4481 10−14 T
+8.733 10−12 )T − 6.7795 10−10 )T + 1.8741 10−8 P
+(−4.2393 10−8 T + 1.8932 10−6 )(S − 35)
+ (6.6228 10−10 T − 6.836 10−8 )T + 8.5258 10−6 T + 3.5803 10−5
La différence entre température locale (réelle) et température potentielle est surtout
marquée en profondeur.
6.3
Densité et densité potentielle
La masse volumique de l’eau de mer varie entre 1020 et 1070 kg.m−3 , avec une moyenne
de 1028 kg.m−3 . Elle dépend des variables T , S, et P , et l’équation d’état est assez complexe
. Une approximation linéaire est :
ρ = ρ0 [1 − α(T − T0 ) + β(S − S0 )]
(42)
avec ρ0 = 1028 kg.m−3 , T0 = 288K, S0 = 35g.kg−1 , α = 1.7 × 10−4 K−1 (coefficient
d’expansion thermique), et β = 7.6 × 10−4 (coefficient de contraction saline).
En océanographie, on appelle par abus de langage ”densité” l’anomalie de masse volumique par rapport à l’eau douce dans les conditions standard : σ = ρ − 1000. On
utilise souvent (mais de moins en moins) la densité de surface σt = ρ(T, S, P0 ) − 1000
qui représente la densité de la parcelle à la pression atmosphérique mais calculée avec
sa température réelle. C’est rapide à calculer. La densité potentielle est la densité de la
parcelle de fluide ramenée à la surface de façon adiabatique : σθ = ρ(θ, S, P0 ) − 1000.
Celle-ci est la plus appropriée pour les études de stabilité, et est de plus en plus utilisée,
notamment depuis que les méthodes de mesures permettent d’obtenir automatiquement
la température potentielle. Le σθ peut toutefois, lui aussi, être mis en défaut dans certains
cas. Il faut alors utiliser les σ1 , σ2 , σ3 ... corresrpondant aux σθ pris à 1000, 2000, 3000 m
de profondeur.
Stabilité d’une colonne d’eau :
Pour l’étude de la stabilité d’une colonne d’eau on se limite à celle d’une parcelle d’eau,
X, à la profondeur z. On note ρ(T, S, P ) la densité de l’eau dans la colonne, et ρX (T, S, P )
la densité de X. On suppose que X, initialement à z, est déplacée adiabatiquement et sans
échange de sel de δz (> 0 pour le raisonnement). La densité de X, ρX , va être modifiée suite
15
aux variations adiabatiques de sa température et sa pression. X va se retrouver dans un
environnement de densité ρ différente. X va donc être soumise à la poussée d’Archimède,
(ρ − ρX )g :
d2 δz
= (ρ − ρX )g
dt2
(Il faut bien distinguer z, la coordonnée verticale de la colonne, de δz, le déplacement de
X). Si ρX > ρ, la parcelle va être rappelée vers le bas. Elle est stable. Si ρX < ρ, la parcelle
va continuer à monter : elle est instable. Il faut calculer cette différence de densité :
ρX (z) = ρ(z)
avant déplacement
∂ρ
∂T
ρ(z + δz) = ρ(z) +
δz
∂T P,S ∂z env
∂P
∂S
∂ρ
∂ρ
δz +
δz
+
∂P T,S ∂z env
∂S T,P ∂z env
∂T
∂P
∂ρ
∂ρ
ρX (z + δz) = ρX (z) +
δz +
δz
∂T P,S ∂z η,S
∂P T,S ∂z η,S
d’où :
ρ(z + δz) − ρX (z + δz) =
∂ρ
∂T
P,S
"
∂T
∂z
−
env
∂T
∂z
#
δz +
η,S
∂ρ
∂S
T,P
∂S
∂z
δz
env
Les termes en dérivées partielles de ρ sont données par l’équation d’état et les propriétés
de la parcelle d’eau ; les autres sont imposés par la colonne d’eau étudiée. En notant
"
! #
g
∂T
∂S
∂ρ
∂T
∂ρ
2
N =−
−
+
ρ
∂T P,S
∂z env
∂z η,S
∂S T,P ∂z env
La loi de la dynamique pour la parcelle devient
d2 δz
= −N 2 δz.
dt2
Si N 2 > 0, c’est l’équation de l’oscillateur harmonique. La solution est périodique et
bornée, la parcelle d’eau est donc dans des conditions de stabilité. N est dénommée la
fréquence de Brunt-Väisälä ou fréquence de stratification. Si N 2 < 0, la vitesse de X croı̂t
à vitesse exponentielle au moindre petit déplacement δz. la parcelle d’eau n’est donc pas
dans des conditions de stabilité.
6.4
Absorption du rayonnement solaire
Le rayonnement solaire est atténué par absorption et diffusion. Il est absorbé par
(a) le phytoplancton pour la photosynthèse, (b) la matière organique et inorganique en
suspension, (c) les composés organiques dissous, (d) l’eau. Il est diffusé surtout par les
particules en suspension.
Dans une eau claire, environ 65% du flux solaire est atténué dans les 2 premiers mètres,
85% entre 0 et 20 m, 99% entre 0 et 100 m. Il y a des écarts importants entre l’océan
hauturier (plus clair) et l’océan cotier. Les longueurs d’onde les plus pénétrantes sont
situées autour de 500 nm (bleu) et le rouge et l’IR sont absorbés dans le premier mètre.
Les conséquences seront que la surface est plus chaude que le fond dans les régions
ensoleillées, et que l’essentiel de l’activité biologique se produit près de la surface.
16
6.5
La glace de mer
La glace de mer est formée primairement par congélation d’eau de mer.
La masse volumique dépend de la température et de la salinité ; Par conséquent, la
température du maximum de masse volumique dépend de la salinité, et selon la loi empirique
T (ρmax ) = 4 − 0.216S
D’autre part la température de congélation dépend de la salinité :
tcong = −0.0575S
Pour l’eau douce, l’eau a 0◦ Cenvironnant de la glace sera moins dense que l’eau voisine.
A une salinité de 35 g kg−1 , l’eau de mer gèle à -1.91◦ C. Cela signifie qu’à cette
température, le premier cristal de glace d’eau douce apparaı̂t, ce qui a pour effet d’augmenter la salinité de la masse d’eau de mer résiduelle. Deux conséquences importantes :
D’abord, pour continuer la congélation, la température doit continuer de baisser. Ensuite,
comme le chlorure de sodium cristallise autour de -23◦ C, la glace formée est peu salée et
l’eau résiduelle de plus en plus salée, car le sel est progressivement expulsé de la glace.
Contrairement à l’eau douce, le refroidissement tend à densifier l’eau, la formation de
glace tend à saliniser, donc densifier encore l’eau résiduelle. La glace se formant en surface,
de l’eau très dense se retrouve près de la surface.
Coefficient de conduction thermique de la glace d’eau douce : Kglace = 2.03 W m−1◦ C−1 .
Pour la neige : Kneige = 0.31 W m−1◦ C−1 .
7
7.1
Notion de masse d’eau
Variabilité spatio-temporelle de T et S
Les profils de température sont distincts aux basses, moyennes, ou hautes latitudes.
C’est étroitement lié à la répartition de l’énergie solaire absorbée. D’autre part, dans les
régions ensoleillées, une couche chaude traduit l’absorption du rayonnement solaire en
surface. Pour la salinité, les profils sont plus difficiles à interpréter, mais ce qui prime
est que la salinité reste confinée entre 33 et 37, un intervalle relativement moins étendu
que pour la température. Finalement, à part pour les régions polaires en surface, c’est
essentiellement les variations de température qui contrôlent les variations de densité. Dans
ces conditions, les colonnes d’eau tropicales et de moyenne latitude sont stables. Par contre,
Il en faut peu pour déstabiliser une colonne d’eau dans les régions polaires.
Les variations saisonnières dans la colonne d’eau sont également importantes. La thermocline est très marquée en été, très peu marquée en hiver à 50◦ N. Cela suggère que les
instabilités seront plus fréquentes en hiver.
Les variations spatiales moyennes de température de surface sont bien corrélées aux
variations latitudinales du rayonnement solaire. Les variations de salinité en surface ne
suivent pas le même profil. La salinité de surface est avant tout affectée par l’évaporation
et la précipitation. On constate aussi une forte disparité entre l’Atlantique et le Pacifique
Nord. Cela est dû aussi aux échanges avec l’atmosphère. Nous verrons comment cette
différence se traduit sur la circulation de l’océan.
Une coupe verticale dans l’ouest de l’Atlantique reflète bien le lien direct entre soleil et
température : une pellicule chaude dans la zone tropicale, à la surface ; du refroidissement
vers les pôles et vers le fond.
17
Une coupe analogue pour la salinité ne conduit pas aux mêmes conclusions. Les contours
sont plus complexes et ne permettent pas d’identifier facilement une relation ”statique”
entre salinité et géographie. En revanche, il est tentant de faire le lien entre deux lieux
connexes où la salinité est identique. Ceci fait appel à la notion de masse d’eau.
7.2
7.2.1
Masses d’eau
Définition
Une masse d’eau est un volume d’eau qui représente une part significative du volume
total de l’océan, que l’on peut identifier par des caractéristiques qui lui sont propres et
conservées au cours du temps. C’est le cas de la température et de la salinité, altérés
uniquement à la surface par les échanges avec l’atmosphère. Dans l’océan interne, seul le
mélange avec d’autres masses d’eau de caractéristiques différentes peut jouer. Une masse
d’eau va acquérir ses propriétés si elle reste en contact avec l’atmosphère – dans la couche
de mélange – pendant un temps suffisant. Une masse d’eau qui n’est pas en surface a donc
due plonger, donc provient d’une zone de convergence des eaux de surface.
7.2.2
Diagramme T-S
Le principal outil pour représenter graphiquement les masses d’eau est le diagramme TS. Il est utilisé en reportant les caractéristiques T-S d’un point de l’océan sur le diagramme.
En général une mesure in situ de T-S est effectuée conjointement avec des mesures sur
toute la colonne d’eau, et les résultats sont reportés sur le diagramme. Les points voisins
sont reliés par une ligne. On peut annoter la profondeur des points mesurés. Cet exercice
permet de mettre en évidence différentes régions au sein même de la colonne d’eau. Ces
régions sont caractéristiques des masses d’eau auquelles elles appartiennent.
Sur le diagramme les lignes de même densité sont tracées. Celles-ci permettent de
détecter facilement et graphiquement les instabilités de la colonne d’eau.
7.2.3
Mélange de masses d’eau et caballing
Soient m1 et m2 les proportions de deux masses d’eau de caractéristiques respectives
(T1 ,S1 ) et (T2 ,S2 ) qui se mélangent. La conservation de la masse, de la chaleur et du sel
impliquent :
m1 + m2 = 1
m1 T1 + m2 T2 = T
m1 S1 + m2 S2 = S
ce qui permet le calcul des variables de la masse d’eau résultant du mélange.
Si les deux masses d’eau ont des températures et salinités différentes, mais un σt
identique, alors leur mélange va conduire à la formation d’une masse d’eau de densité
supérieure. C’est le phénomène de caballing.
Trois masses d’eau peuvent se mélanger. Sur le diagramme T-S, la masse d’eau résultante
sera située dans le triangle formé par les trois masses d’eau initiales.
7.3
7.3.1
Les principales masses d’eau
Masses d’eau de surface et intermédiaires
La distribution géographique des masses d’eau supérieures est étroitement liée à celle
des courants. Elles sont de propriétés assez variables : plutôt fines près de l’équateur
18
(faible densité, peu de mélange vertical, pas de pompage d’Ekman) et plutôt épaisse dans
les gyres subtropicaux (downwelling). A ce pompage s’ajoute, en hiver, un refroidissement
de la surface qui favorise les instabilités et le mélange. Ces masses d’eau (central waters)
sont donc épaisses et homogènes. Les intervalles de température et de salinité couverts
sont larges, car ces eaux sont en contact direct avec l’atmosphère.
Sous les masses d’eau de surface se trouvent les masses d’eau intermédiaire, formées
dans les régions subpolaires. La plus répandue est l’AAIW, formée vers 50◦ S dans une zone
de convergence (que l’on peut deviner grâce au resserrement des isothermes de surface).
L’eau méditerranéenne est une masse d’eau intermédiaire.
7.3.2
Masses d’eau profondes et de fond
Les masses d’eau profondes et de fond sont constituées d’eau dense. Elles sont formées
dans les régions polaires, essentiellement à partir d’eau de surface refroidie par l’atmosphère
et salinisée par la formation de glace de mer.
NADW : La principale masse d’eau nord-atlantique est la NADW. Celle-ci couvre une
gamme assez large de températures et de salinité, car elle résulte et subit les effets de
mélanges de plusieurs autres masses d’eau lors de sa formation et son expansion vers le sud
(ABW en mer du Groenland, AABW, NACW, AAIW, MW notamment). La NADW ”originale” est essentiellement composée d’eau du Labrador (20%) et des mers du Groenland
et de Norvège (80%), les deux principaux lieux de convection profonde dans l’Atlantique
Nord. L’eau du Groenland, résultant du refroidissement et la plongée des eaux de surface
(avec ou sans formation de glace de mer) est partiellement mélangée à de l’ABW provenant du détroit de Fram, et résultant de la formation de glace de mer en mer Arctique. La
mer Arctique (quasiment fermée au niveau de Bering) est alimentée en eau par le courant
de bord Est du gyre cyclonique subpolaire (courant de Norvège, qui remonte le long de
la Norvège). L’eau résultante du mélange de l’ABW et de l’eau du Groenland est la plus
dense du globe (phénomène de caballing).
Les proportions de NEADW (du Groenland) et NWADW (du Labrador) sont variables
d’année en année. Elles dépendent de la formation de LSW (des années, il ne s’en forme
pas), et des conditions pour les eaux du Groenland et de la Norvège pour passer les détroits
d’Islande et des Iles Feroé.
AABW : Dans le fond de l’Atlantique Sud, c’est l’AABW qui prédomine. La présence
de l’AABW est constatée dans tous les grands bassins océaniques. L’AABW est plus dense
que la NADW, sauf la NADW originelle du Groenland. La NADW et l’AABW ont des
processus de formation différents. Cela est dû a la différence de configuration : au Nord,
une mer froide couverte de glace (Arctique), un bassin fermé sur les cotés (Atlantique)
qui force un courant du Sud vers le Nord (GS, dérive, puis courant de Norvège). Au
Sud, un continent isolé par un courant circumpolaire. L’Antarctique est caractérisée par
la présence récurrente de polynyas. On distingue les polynyas en océan libre, due à des
remontées d’eaux ”chaudes”, souvent forcées dynamiquement par le relief sous-marin, et
les polynyas cotières forcées par le vent catabatique du continent. Les deux sont des lieu de
refroidissement de l’eau de surface, donc des usines à eau dense . L’AABW la plus dense
est formée par les polynyas cotières mais l’essentiel ne sort pas de la région antarctique,
à cause du relief . Après mélange avec les eaux profondes circumpolaires formées par les
19
polynyas en océan ouvert, elle peut quand même s’échapper et occuper le fond de tous les
bassins océaniques.
De l’eau profonde dans le Pacifique Nord ? Il ne se forme pas d’eau profonde dans
le Pacifique Nord de façon aussi intense et efficace que dans l’Atlantique. Pourtant, il y a
bien un gyre subtropical et un gyre subpolaire, donc on pourrait s’attendre à la formation
d’eau profonde comme en mer du Labrador. La raison se situe surtout dans la salinité de
l’eau de surface, donc dans le bilan d’eau douce à la surface . Le taux d’évaporation est
moindre dans le Pacifique Nord, car l’eau de surface y est plus froide que dans l’Atlantique
. Cela semble paradoxal. Mais il faut considérer les effets de salinité, ainsi que la densité de
l’eau sous-jacente, pour expliquer l’absence de convection profonde dans tout son contexte.
8
La circulation thermohaline
8.1
Description
Voir cours oral.
8.2
Un modèle simple de la circulation thermohaline
Voir cours oral.
20
Quatrième partie
Compléments
21