Les conseils et la prise en charge en prévision d`une très grande
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Les conseils et la prise en charge en prévision d`une très grande
Document de principes Les conseils et la prise en charge en prévision d’une très grande prématurité Ann L Jefferies, Haresh M Kirpalani; Société canadienne de pédiatrie Comité d’étude du foetus et du nouveau-né Version abrégée : Paediatr Child Health 2012;17(8) : 445 Affichage : le 1 octobre 2012 Reconduit : le 30 janvier 2015 Résumé En cas de très grande prématurité (accouchement entre la 220/7 et la 256/7 semaine d’âge gestationnel [AG]), les parents doivent souvent faire des choix complexes sur les soins de leur nourrisson. Les professionnels de la santé ont un rôle important à jouer en matière d’information, d’orientation et de soutien. Les parents qui font face à la naissance d’un très grand prématuré doivent avoir la possibilité de rencontrer les dispensateurs de soins obstétricaux et pédiatriques ou néonatals pour recevoir de l’information exacte sur le pronostic de leur nourrisson, transmise avec clarté et compassion. La prise de décision entre les parents et les professionnels de la santé doit découler d’un processus éclairé et partagé, et toutes les décisions de prise en charge doivent être consignées. Il est important de consulter un centre périnatal de soins tertiaires et d’y prévoir le transfert de la mère et du fœtus afin d’assurer leurs soins. Puisque la survie des nourrissons venus au monde avant 22 semaines complètes d’AG demeure rare, il est recommandé de ne pas intervenir, mais à 23, 24 et 25 semaines d’AG, il faut adapter les conseils sur les issues et la prise de décision à chaque nourrisson et à sa famille, compte tenu des facteurs qui influent sur le pronostic. Il faut prodiguer des soins palliatifs compatissants à tous les grands prématurés qui ne sont pas réanimés ou qui ne répondent pas à la réanimation. Mots-clés : Antenatal counselling; Ethics; Extreme prematurity; Resuscitation En 1994, la Société canadienne de pédiatrie et la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada ont publié des lignes directrices sur la prise en charge en prévision de la naissance des nourrissons ayant atteint de 22 à 26 semaines complètes d’âge gestationnel [1]. Depuis, la pratique des soins néonatals a beaucoup évolué, la survie des très grands prématurés a augmenté, des préoccupations renouvelées ont surgi au sujet des issues à long terme, un débat éthique constant sévit sur la prise en charge des nouveau-nés venus au monde à la « limite de la viabilité » et le rôle de la famille dans la prise de décision a gagné en importance. Le présent document de principes contient des recommandations à jour pour orienter les professionnels de la santé et les familles aux prises avec la naissance anticipée d’un très grand prématuré. Pour les besoins du présent document, les termes « parents », « mère » et « père » désignent les futurs parents d’un enfant tout autant que ceux dont l’enfant est déjà né. La très grande prématurité soulève des enjeux complexes relativement à ce qui est le mieux pour la mère, le nourrisson, la famille et la société. Pendant le premier trimestre de grossesse, le respect de l’autonomie de la mère et son bienêtre ont souvent préséance sur les décisions de prise en charge de la grossesse. À; mesure que la grossesse progresse, la survie et la santé du fœtus ou du nouveau-né prend de l’importance. Les décisions peuvent être compliquées par la différence de statut juridique entre le fœtus et le nouveau-né au Canada. Après la naissance, les professionnels de la santé ont la responsabilité de donner préséance à l’intérêt du nourrisson. La naissance imminente d’un très grand prématuré suscite de la détresse et de l’incertitude au sein de la famille et chez les professionnels de la santé. Les parents doivent faire des choix difficiles sur la réanimation et les soins de leur nourrisson. Les professionnels de la santé désirent offrir une orientation et un soutien convenables. Les préoccupations à l’égard de la morbidité neurodéveloppementale à long terme, de la qualité de vie et des coûts de santé connexes accrus sont à la fois complexes et controversées, et les professionnels de la santé ont des attitudes et des avis très partagés sur la question. Malgré une consultation dans la société et la rédaction de COMITÉ D’ÉTUDE DU FOETUS ET DU NOUVEAU-NÉ, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE | 1 recommandations consensuelles, telles que celles du Nuffield Council on Bioethics du Royaume-Uni [2] et du groupe consensuel de la Nouvelle-Galles du Sud de l’Australie [3], il n’y a pas d’entente universelle sur l’approche et la prise en charge. Le présent document de principes contient les recommandations obtenues par consensus malgré ces difficultés. La méthodologie Les auteurs ont effectué des recherches dans MEDLINE sur l’issue et la prise en charge des très grands prématurés et les ont mises à jour en 2011. Ils ont fait ressortir les études qui rendaient compte des issues d’après l’âge gestationnel des très grands prématurés nés après 1995. Ils ont examiné les listes de publications. Ils ont consulté des néonatologistes, des éthiciens, des défenseurs des parents et des experts internationaux pendant l’élaboration du document de principes. La définition d’âge gestationnel Le présent document de principes tire sa définition d’âge gestationnel (AG) de la Classification internationale des maladies, 10e révision, de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) [4]. L’AG est exprimé d’après les jours et les semaines complétés, à compter du premier jour des dernières menstruations. Ainsi, « 22 semaines » désigne la période entre 22 semaines 0 jour et 22 semaines 6 jours. Dans le présent document de principes, une très grande prématurité est définie comme une naissance qui se produit entre 22 semaines 0 jour et 25 semaines six jours. Au Canada, où l’AG est défini conformément à la définition de l’OMS, cette plage d’AG est interprétée comme incluant les bébés nés entre 154 et 181 jours de grossesse, inclusivement. Les conseils anténatals et la prise de décision Les conseils anténatals visent à nouer une relation entre les professionnels de la santé et la famille, à fournir de l’information exacte et à aider les parents à prendre une décision quant aux soins de leur nourrisson. Les professionnels de la santé doivent être conscients de l’effet qu’ils ont sur les parents, chercher à comprendre les expériences et les valeurs des parents, les aider à tenir compte de leurs propres valeurs, favoriser une relation mutuellement respectueuse et chercher à former une alliance thérapeutique avec les parents afin de parvenir à des objectifs compris mutuellement. Les personnes qui donnent les conseils doivent échanger avec les familles sans qu’elles perçoivent de préjugés personnels. Ces échanges sont particulièrement difficiles, parce qu’ils se produisent souvent en situation de pression et de stress. La communication avec les parents Les parents aux prises avec la naissance d’un très grand prématuré devraient profiter de plusieurs occasions de recevoir de l’information et d’envisager un plan, notamment si la grossesse se poursuit ou que de nouveaux renseignements émergent. Parmi l’information que les parents trouvent utile, soulignons la possibilité de survie, le risque d’incapacité, les traitements médicaux, les problèmes anticipés, l’expérience à l’unité de soins intensifs (USIN), les pratiques parentales et la manière d’affronter le stress [5][6]. Les parents désirent également qu’on prenne en considération leur détresse et qu’on fasse preuve de compassion envers leur situation. De l’information écrite peut les aider à comprendre l’information et à s’en souvenir [7]. Il est essentiel que les nombreux professionnels transmettent de l’information exacte et homogène aux futurs parents. Des conseils transmis conjointement par les équipes obstétricale et néonatale favorisent la cohérence de l’information et le respect du plan établi. D’autres stratégies peuvent également encourager la cohérence de l’information, soit des lignes directrices consensuelles interdisciplinaires [8] et des fiches d’information pour le personnel [9]. Des rencontres sur la gestion des cas peuvent contribuer à résoudre les désaccords au sein des équipes ainsi que d’autres situations difficiles. Les travailleurs sociaux et les conseillers spirituels offrent souvent du soutien. Des consultations anténatales bien consignées et facilement accessibles et des mises à jour du plan de prise en charge, y compris la prise en charge du travail, du mode d’accouchement et des soins du nourrisson, garantissent la cohérence et la continuité des soins [5][10]. La prise de décision En milieu périnatal, il est fortement recommandé d’opter pour une prise de décision conjointe entre les professionnels de la santé et les parents [11][12]. Dans les faits, certains parents hésitent à porter le fardeau de la décision, d’autres veulent s’investir et possèdent les compétences pour le faire, tandis que d’autres encore ne savent pas comment le faire. Les professionnels de la santé sont parfois mal à l’aise de participer activement à la prise de décision avec les familles et se concentrent davantage sur la transmission d’information que sur la prise en compte des valeurs ou des préférences de la famille [13]. Cependant, les professionnels ont la responsabilité d’informer les parents et de les inviter à participer à une prise de décision partagée. À; tout le moins, ils doivent déterminer comment les parents désirent s’investir. Les aides à la décision pour les patients (des outils qui fournissent de l’information et qui aident les individus à démêler leurs valeurs et à les partager) peuvent aider les parents à participer à la prise de décision. Les patients et les professionnels de la santé qui recourent à de telles aides 2 | LES CONSEILS ET LA PRISE EN CHARGE EN PRÉVISION D’UNE TRÈS GRANDE PRÉMATURITÉ prennent de meilleures décisions. Les patients participent davantage, en savent davantage et ont des attentes plus réalistes [14]. Il existe des aides à la décision pour aider les parents qui affrontent une prématurité imminente [15]. périnatal de soins tertiaires et laisser le temps aux CAN de faire effet. L’administration de sulfate de magnésium pour favoriser la protection neurologique du fœtus est à considérer [23]. Les soins de la mère à risque d’accoucher d’un très grand prématuré Le mode d’accouchement Les décisions relatives au monitorage fœtal et au mode d’accouchement sont difficiles à prendre à un AG très précoce. Une analyse systématique de la césarienne non urgente par rapport à la prise en charge attentive des bébés prématurés a démontré une morbidité maternelle accrue (p. ex., hémorragie, infection), sans avantage significatif pour le nouveau-né [24]. Des indications obstétricales peuvent toutefois rendre la césarienne nécessaire. Dans ce cas, une césarienne classique s’impose avant 24 semaines d’AG et inclut le risque d’hémorragie de la mère [24], de diminution de la fertilité et de rupture utérine lors des futures grossesses. Il faut prendre les décisions quant au mode d’accouchement conjointement avec la mère et son dispensateur de soins obstétrical. L’évaluation précise de l’âge gestationnel L’échographie est la méthode la plus précise pour déterminer l’AG [16]. L’idéal consiste à effectuer une échographie précoce, entre huit et 14 semaines d’AG, lorsque la distance vertexcoccyx est visible. La précision de l’évaluation de l’AG par échographie s’établit à plus ou moins cinq jours au premier trimestre, et à plus ou moins dix jours entre 16 et 22 semaines d’AG, l’imprécision étant directement proportionnelle à la progression de l’AG [17]. Les évaluations du poids fœtal ont une précision de ±10 % et ont tendance à être sous-estimées. L’évaluation du poids fœtal n’est pas assez précise pour déterminer la datation d’une grossesse de 22 à 25 semaines [18]. Les dispensateurs de soins obstétricaux devraient établir la date estimative de l’accouchement le plus rapidement possible et la transmettre à la femme enceinte. Le lieu des soins La mortalité et la morbidité néonatale des très grands prématurés diminuent lorsque l’accouchement se produit dans un centre périnatal de soins tertiaires plutôt que dans un autre centre suivi d’un transfert à une USIN de niveau 3 [19]. Lorsqu’on transfère à un centre périnatal de soins tertiaires une femme qui risque d’accoucher d’un très grand prématuré, on s’assure qu’elle profite d’une consultation, de soins et de conseils de la part de spécialistes de la santé fœtomaternelle et de la médecine néonatale et périnatale, ainsi que le nourrisson à haut risque soit bien stabilisé et soigné. Ces soins peuvent permettre de prolonger certaines grossesses. Les thérapies anténatales Les avantages des corticoïdes anténatals (CAN) administrés avant 24 semaines d’AG en cas de grossesse à haut risque sont controversés. Le document consensuel des National Institutes of Health excluait ces nourrissons parce peu d’essais sur les CAN en tenaient compte [20]. Cependant, certaines données révèlent une plus grande survie grâce aux CAN [21]. De plus, selon les modèles de régression, les CAN sont bénéfiques pour les nourrissons de 22 à 25 semaines d’AG [22]. Il faudrait proposer des CAN aux femmes à risque d’une très grande prématurité lorsqu’on projette une prise en charge active du nouveau-né. Il faut également envisager une tocolyse à court terme pour faciliter le transfert in utero vers un centre La prise en charge du très grand prématuré Les décisions de prise en charge des très grands prématurés sont partiellement étayées par le risque de mortalité et d’incapacité à long terme du nourrisson. La survie des très grands prématurés a augmenté depuis les dix à 15 dernières années [25][26], et les rubriques suivantes résument les données récentes au sujet de la survie et du sort à long terme du nourrisson. Il est également important de fournir les issues locales et régionales en plus des statistiques plus globales, que certains parents trouvent plus pertinentes dans l’immédiat. Les issues du nourrisson : sa survie Il peut être difficile d’interpréter les données de survie lorsqu’on ne peut déterminer les nourrissons qui en forment le dénominateur. Certaines cohortes incluent à la fois les mortinaissances et les naissances vivantes, certaines incluent seulement les naissances vivantes, tandis que d’autres n’incluent que les nourrissons admis à l’USIN. Les études en milieu hospitalier ou en réseau font souvent foi de meilleurs taux de survie que les études régionales ou en population. Un tel potentiel de biais de sélection dans les études de cohorte des très grands prématurés entraîne peut-être une surestimation de la survie [27]. La variabilité des pratiques de prise en charge des très grands prématurés peuvent également biaiser les résultats. Les études qui rendent compte des naissances vivantes mais pas des mortinaissances peuvent exclure les grossesses sans monitorage pendant le travail. Les thérapies qui améliorent l’issue, telles que la prise de corticoïdes anténatals (CAN), ne COMITÉ D’ÉTUDE DU FOETUS ET DU NOUVEAU-NÉ, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE | 3 sont peut-être pas déclarées ou sont peut-être exclues. La population de nourrissons qui meurent avant d’être admis à l’USIN peut se composer de ceux qu’on a décidé de ne pas réanimer et de ceux dont la réanimation a échoué. La prise en charge active des très grands prématurés peut susciter une meilleure survie [28][29]. Plusieurs vastes études en population, résumées au tableau 1, font état de la survie au congé de l’USIN à chaque semaine d’AG. Dans toutes les études sauf une [34], les taux de survie étaient rajustés de manière que le dénominateur corresponde à toutes les naissances vivantes, y compris les nourrissons non réanimés et ceux qui sont morts dans la salle d’accouchement. Les diverses issues peuvent refléter en partie la stratégie de prise en charge active de chaque emplacement. TABLEAU 1 La survie des très grands prématurés d’après l’âge gestationnel : des études en population Lieu Total des naissances vivantes Survie ≤ 22 semaines 23 semaines 24 semaines 25 semaines EPICure, 2000 (30) Royaume-Uni et République d’Irlande 1 185 1,5 % 11 % 26 % 44 % Markestad, 2005 (31) Norvège 182 0% 26 % 55 % 77 % Bolisetty, 2004 (32) Nouvelle-Galles du Sud et Territoire de la capitale de l’Australie, Australie 355 Non déclarée 50 % 62 % 72 % Field, 2008 (33) Trent, Royaume-Uni 669 0% 9% 36 % 59 % Itabashi, 2009 (34) Japon 1 303 34 % 54 % 76 % 85 % EXPRESS, 2009 (35) Suède 501 10 % 53 % 67 % 82 % Le Réseau néonatal canadien (RNC) collige les statistiques canadiennes sur les nourrissons admis dans 29 USIN canadiennes. De 2005 à 2010, sur un total de 2 893 nourrissons, le taux de survie s’élevait à 8 % jusqu’à 22 semaines d’AG, à 36 % à 23 semaines d’AG, à 62 % à 24 semaines d’AG et à 78 % à 25 semaines d’AG [36]. Ces données n’incluent pas les décès en salle d’accouchement ou les nourrissons admis ailleurs que dans un établissement du RNC. Les auteurs ont analysé attentivement 19 études de cohortes en milieu hospitalier ou du réseau rendant compte des taux de survie des nourrissons venus au monde après 1995, selon leur AG [7][28]-[35][37]-[46]. Des tendances similaires se dessinaient entre les études : une augmentation du taux de survie moyen avec la progression de l’AG, une variabilité croissante du taux de survie dans les études à mesure que diminuait l’AG, la plus grande différence entre la survie par naissance vivante et la survie par admission à l’USIN s’observant chez les nourrissons à l’AG le moins avancé. Dans l’ensemble, la plupart des centres déclaraient des taux de survie de moins de 5 % chez les nourrissons nés à 22 semaines d’AG ou moins, certains ne déclarant aucun survivant. Par ailleurs, selon les études de cohorte, les nourrissons nés à 25 semaines d’AG ou plus ne peuvent être considérés comme ayant une faible probabilité de survie. Les issues du nourrisson : l’incapacité à long terme Certaines études ne rendent compte d’aucune différence de morbidité néonatale importante à court terme associée à une incapacité à long terme (hémorragie intraventriculaire de grade 3 ou plus, leucomalacie périventriculaire, rétinopathie de la prématurité et maladie pulmonaire chronique ou dysplasie bronchopulmonaire) chez les nourrissons survivants venus au monde à 22/23, 24 et 25 semaines d’AG [28][42][47]. Dans la plupart des études de suivi, des issues neurodéveloppementales indésirables graves entre 18 et 24 mois se définissent par au moins l’un des états suivants : 4 | LES CONSEILS ET LA PRISE EN CHARGE EN PRÉVISION D’UNE TRÈS GRANDE PRÉMATURITÉ infirmité motrice cérébrale, atteinte cognitive (indice du test ≥ 2 ÉT sous la moyenne), convulsions, cécité ou surdité. Ces états ne reflètent pas nécessairement les issues à plus long terme [48]. L’utilité des données de suivi peut être limitée par le délai nécessaire pour déclarer les issues, souvent de trois à quatre ans. Les issues peuvent être déclarées selon les naissances vivantes, les admissions à l’USIN, les survivants de l’USIN ou le pourcentage des bébés qui sont suivis. Les études exposant les issues selon l’AG démontrent que le taux de grave incapacité est plus élevé chez les survivants nés entre 23 et 25 semaines complètes d’AG que chez les prématurés plus matures [49]-[55]. Certaines études font foi d’un taux d’incapacité chez les très grands prématurés survivants qui est inversement proportionnel à l’AG [32][39][49] [54][55], tandis que d’autres ne déclarent aucune différence entre les nourrissons nés à 23, 24 ou 25 semaines [7][51]. Le risque de grave incapacité varie entre 18 % et 60 % chez les nourrissons les plus petits et les plus immatures. Selon une vaste étude menée au Royaume-Uni (EPICURE), chez les 283 survivants nés à 25 semaines complètes d’AG ou moins, 23 % présentaient une grave incapacité à 30 mois d’âge corrigé [51] et 22 %, une grave incapacité à six ans [56]. À; 11 ans [57], 40 % des membres de cette cohorte avaient une atteinte cognitive grave (indice < 2 ÉT sous la moyenne) et 45 %, une incapacité fonctionnelle. Environ 50 % des enfants ne présentaient aucune incapacité grave. Des résultats similaires sont tirés d’une cohorte australienne âgée de huit ans [55]. Les données de trois cohortes canadiennes faisant état du pourcentage de survivants qui ne présentaient pas d’incapacité neurodéveloppementale indésirable grave, évalués chez des enfants de 18 à 24 mois, figurent au tableau 2. TABLEAU 2 Survie sans issue neurodéveloppementale indésirable grave au Canada Étude Population Année de naissance Survie sans issue neurodéveloppementale indésirable grave 23 semaines 24 semaines 25 semaines Jacobs [54] Unités de niveau 3 de Toronto, en Ontario (aiguillages régionaux) 1990 à 1994 36 % 57 % 63 % Synnes [7]* B.C.Women’s Hospital and Health Centre, Colombie-Britannique (toutes les naissances) 1999 à 2006 35 % 37 % 37 % Robertson Unités de niveau 3 du nord de l’Alberta (toutes les naissances) [58]* 50 % 54 % 70 % 1992 à 2003 * Données approximées à partir de tableaux La difficulté à se maîtriser et les troubles de comportement, tels que le trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité, les retards de langage, les problèmes de santé et les réhospitalisations, sont plus fréquents chez les prématurés et contribuent à la morbidité à long terme [26]. Quelques petites études ont permis de suivre jusqu’à l’adolescence et à l’âge adulte des enfants qui pesaient moins de 1 000 grammes à la naissance, mais ils ne sont peut-être pas représentatifs de l’ensemble de la population. Les personnes suivies étaient moins scolarisées et présentaient une plus grande atteinte neurosensorielle et plus de limites fonctionnelles sur le plan de la cognition, de la sensation, de la mobilité et de l’autonomie que les sujets témoins à terme, mais pas de différences en matière d’estime de soi ou de perception personnelle de la qualité de vie liée à la santé [59] [60][61][62]. Une vaste étude norvégienne des prématurés survivants à long terme a révélé une plus grande mortalité pendant l’enfance et un plus faible taux de reproduction que chez les sujets témoins nés à terme [63]. La personnalisation des prédictions à l’aide de variables supplémentaires C’est l’AG qui influe davantage sur le pronostic, mais d’autres facteurs ont une incidence sur l’issue, dont l’accouchement à un centre périnatal de soins tertiaires [19][64], la prise de CAN [21][22], le sexe féminin [22][65] et la grossesse multiple [21][66]. Tyson et coll. recourent à quatre facteurs (sexe, CAN, poids à la naissance et grossesse multiple) pour mieux préciser un pronostic fondé seulement sur l’AG [22]. Ainsi, certains nourrissons venus au monde à 25 semaines d’AG qui présentent d’autres facteurs de risque sont plus COMITÉ D’ÉTUDE DU FOETUS ET DU NOUVEAU-NÉ, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE | 5 susceptibles de mourir ou d’avoir une atteinte grave que certains nourrissons venus au monde à 23 semaines d’AG sans ces facteurs. Plus récemment, on a décrit un outil graphique canadien conçu pour prédire la survie sans morbidité et faisant appel au poids de naissance ainsi qu’à l’AG [67]. 3. Malgré ces renseignements supplémentaires, on ne peut prédire l’issue de chaque bébé avec précision. 4. Les décisions de prise en charge Les décisions que prennent les parents au sujet de la réanimation de leur nourrisson tiennent compte du pronostic de leur bébé ainsi que de leurs propres expériences, de leurs attentes, de leurs valeurs et de leur investissement auprès de l’équipe soignante [12]. Il est important que les parents se sentent soutenus dans leurs décisions. Ces décisions peuvent changer, surtout si de nouveaux renseignements émergent ou si la grossesse se poursuit. Lorsque le plan de soins est imprécis, des personnes en mesure de soigner le nourrisson et de faciliter les choix de prise en charge doivent être présentes à l’accouchement. Même après la naissance d’un très grand prématuré, il y a souvent des occasions continues d’en savoir plus sur le pronostic du nourrisson et de réévaluer son plan de soins. 5. 6. 7. Lorsqu’on décide de ne pas réanimer un nourrisson, il faut que les parents comprennent quels soins lui seront prodigués après l’accouchement, y compris les mesures de réconfort et la possibilité de prendre le nourrisson dans leurs bras. Ils doivent être conscients que leur nourrisson pourrait survivre quelques jours. Il faut également prodiguer des mesures de réconfort aux nourrissons chez qui la réanimation échoue ou lorsqu’il est entendu de mettre un terme aux thérapies de maintien de la vie. 8. Recommandations conformes à la structure de GRADE (tableau 3) 1. Les parents aux prises avec la naissance d’un très grand prématuré doivent avoir l’occasion de discuter directement avec leur dispensateur de soins obstétricaux et avec un néonatologiste ou un pédiatre. Si la situation le permet, les parents doivent pouvoir rencontrer leurs dispensateurs de soins plus d’une fois. (Solide recommandation) 2. Les parents doivent recevoir l’information la plus exacte possible au sujet de la possibilité de survie et des issues à long terme de leur nouveau-né, présentée de manière claire et compatissante. Il est conseillé de remettre de 9. 10. 11. 6 | LES CONSEILS ET LA PRISE EN CHARGE EN PRÉVISION D’UNE TRÈS GRANDE PRÉMATURITÉ l’information écrite supplémentaire. Il faut également s’assurer que les parents comprennent toute l’information qui leur est transmise. (Solide recommandation) La prise de décision entre les parents et les professionnels de la santé doit refléter un processus éclairé et partagé. Les aides à la décision peuvent être utiles pour les parents. (Solide recommandation) Il faut consigner de manière explicite les discussions et les décisions portant sur la prise en charge du travail, le mode d’accouchement et l’intensité de l’intervention néonatale et les mettre à la disposition de tous les membres de l’équipe soignante. (Solide recommandation) Il faut donner des conseils en continu. Si les décisions relatives aux soins du nourrisson changent, il faut le consigner clairement. Si la grossesse se poursuit, il faut fournir aux parents de l’information à jour. (Solide recommandation) Les personnes qui s’occupent du bébé doivent obtenir l’information la plus exacte possible sur l’AG et l’évaluation du poids fœtal. (Solide recommandation) Lorsqu’on pense qu’une femme enceinte en est au moins à 22 semaines d’AG et qu’elle est à risque d’accoucher prématurément, son professionnel de la santé devrait consulter un spécialiste de la médecine fœtomaternelle et un néonatologiste. (Solide recommandation). Il est recommandé de transférer à un centre périnatal de soins tertiaires toutes les femmes qui risquent d’accoucher prématurément, qu’on croit au moins rendues à 23 semaines d’AG et dont le transfert est sécuritaire. Lorsqu’il est convenu de ne pas réanimer un très grand prématuré après une consultation avec un centre de soins tertiaires et une décision complète et éclairée prise par la famille, les dispensateurs de soins et la famille peuvent s’entendre pour ne pas transférer la mère. Il faut administrer des corticoïdes anténatals lorsqu’on envisage une prise en charge active. (Solide recommandation) La césarienne non urgente n’est pas recommandée avant 24 semaines d’AG, à moins d’indications liées à la mère. (Solide recommandation) Puisque la survie est rare à 22 semaines d’AG, une approche non interventionniste est recommandée, axée sur des soins de réconfort. (Solide recommandation) À; 23, 24 ou 25 semaines d’AG, il faut adapter les conseils sur les issues et la prise de décision quant à l’amorce d’un traitement actif, compte tenu de chaque nourrisson et de chaque famille. (Solide recommandation) 12. À; 23 et 24 semaines d’AG, un traitement actif convient à certains nourrissons. (Faible recommandation) 13. La plupart des nourrissons de 25 semaines d’AG présentent une meilleure survie et une meilleure issue neurodéveloppementale; et un traitement actif convient, sauf en présence d’autres facteurs de risque importants. (Faible recommandation) 14. Lorsqu’on n’a pas précisé l’AG ou le plan de soins, il faut que des personnes en mesure de prendre le nourrisson en charge assistent à toutes les naissances de très grands prématurés. (Solide recommandation) 15. Tous les très grands prématurés qui ne sont pas réanimés ou dont la réanimation a échoué doivent recevoir des soins palliatifs compatissants, y compris de la chaleur et le soulagement de la douleur. (Solide recommandation) TABLEAU 3 Critères de recommandations à l’aide de GRADE (Grading of Recommendations Assessment, Development and Evaluation) [68] SOLIDES RECOMMANDATIONS FAIBLES RECOMMANDATIONS · Fondées sur des données probantes de qualité modérée à élevée. · Fondées sur des données probantes de basse qualité. · Les avantages sont supérieurs aux inconvénients. · Il y a une incertitude quant à l’évaluation des avantages et des inconvénients. · Les valeurs et préférences des cliniciens et des patients sont compatibles. · Les valeurs des cliniciens et des patients ne sont pas compatibles. · Le coût de l’intervention est raisonnable. · Le coût de l’intervention est élevé. Remerciements La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, ainsi que le comité de bioéthique et le comité de la pédiatrie communautaire de la Société canadienne de pédiatrie, a révisé le présent document de principes. Références 1. 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Éd., Association canadienne des infirmières et infirmiers en néonatologie; Lu-Ann Papile MD, comité d’étude du fœtus et du nouveau-né, American Academy of Pediatrics; Robin K Whyte MD (ancien membre) COMITÉ D’ÉTUDE DU FOETUS ET DU NOUVEAU-NÉ, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE | 9 C Haresh M Kirpalani MD Aut onseiller : princi paux : Ann L Jefferies MD; Haresh M Kirpalani MD Aussi disponible à www.cps.ca/fr © Société canadienne de pédiatrie 2016 La Société canadienne de pédiatrie autorise l’impression d’exemplaires uniques de ce document à partir de10son|site LESWeb. CONSEILS Pour obtenir ET LA la PRISE permission EN CHARGE d’imprimerEN ouPRÉVISION de photocopier D’UNE des TRÈS exemplaires GRANDE multiples, PRÉMATURITÉ consultez notre politique sur les droits d'auteurs. Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.