Mots. Les langages du politique

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Mots. Les langages du politique
Mots. Les langages du politique
Appel à contributions pour un dossier publiable en mars 2014
Les livres de journalistes politiques
La revue Mots. Les langages du politique entend publier en mars 2014 un dossier
rassemblant des travaux portant sur les livres de journalistes politiques.
Problématique générale
Le rayon « livres politiques » des librairies accorde une place importante aux ouvrages
publiés par des journalistes. Il s'agit presque toujours pour ces derniers de dévoiler les coulisses
d'une vie politique dont les médias quotidiens ne pourraient saisir que les apparences. Témoins
privilégiés de la « comédie du pouvoir », les journalistes utilisent le média « livre » pour faire le
portrait d'une personnalité politique importante ou pour revenir sur un épisode central de la vie
politique (cohabitation, élection...). Mais toujours il s'agit de donner chair à celle-ci et à ceux qui
nourrissent au quotidien l'actualité politique, de mettre en récit les institutions, de donner un visage
aux processus décisionnels, de transformer la machinerie étatique en configuration d'acteurs
individuels dotés d'ambitions et de caractères.
Dans cette perspective, la période de la présidentielle représente un enjeu éditorial majeur
pour les journalistes politiques et les éditeurs. La parution d'une « avalanche » de livres politiques
est programmée pour la semaine qui suit l'élection du Président de la République : Les coulisses
d'une défaite de A. Leparmentier et S. Grand (Le Monde), De la Corrèze à l’Élysée de C. Pouget et
C. Delpuech (AFP), Coup pour coup de N. Schuck (Le Parisien) et N. Barotte (Le Figaro), La
dernière campagne de P. Corbet (RTL), En campagne de B. Sportouch (L'Express) et J. Chapuis
(RTL), La victoire empoisonnée de E. Dupin, etc. Des « quick books » de campagne pour la plupart,
qui succèdent à des publications d'autres natures, largement commentées durant la campagne
(Catherine Nay, L'impétueux) ou oubliés (S. Antoine, DSK au FMI. Enquête sur une renaissance ;
A. Kara et Ph. Martinat, DSK-Sarkozy. Le duel. Biographie comparative ; Pierre Taribo, François
Bayrou, le paysan qui rêvait d'être président ; R. Geisler, Bayrou l'obstiné….). En 2007 aussi, les
livres de journalistes politiques ont occupé le devant de la scène politico-médiatique, et plus
particulièrement celui de Raphaelle Baqué et Ariane Chemin, La femme fatale.
Les livres de journalistes posent au chercheur plusieurs questions sur le rapport au
politique :
Quels sont les schémas interprétatifs mobilisés ? Personnalisation, réduction de la vie politique à
un affrontement de personnes, psychologisme... Comment ces grilles de lecture se manifestent-elles
dans le texte ? Comment sont-elles justifiées ?
Sur quel type de (re)-lecture biographique s’appuie aujourd’hui l’élaboration de la figure de « la
femme/l’homme d’Etat » ?
Comment la mise en récit de la vie des institutions s'effectue-t-elle ? Sur quelle dramaturgie cette
littérature repose-t-elle ?
Quelle vision du lecteur-électeur cette littérature fabrique-t-elle ? Sur quelle forme d'intérêt pour
la politique joue-t-elle ? Comment interpelle-t-elle le lecteur ?
Dans le même temps, ces ouvrages interrogent aussi la pratique du journalisme spécialisé
sur les questions politiques :
Comment les journalistes arbitrent-ils entre les divers supports de publication qui s'offrent à eux :
livre, presse écrite, blog... ? Quelles sont les contraintes liées à chacun de ces médias ? Quelles
ressources offrent-ils ? Et pourquoi le livre ?
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Qui sont ces journalistes tentés par le livre ? Quelles positions occupent-ils dans le champ
journalistique ? A quel moment de leur trajectoire professionnelle ont-ils recours à ce média ?
Quelle figure du professionnel du journalisme politique contribuent-ils à construire ?
Quels sont les thèmes traités ? Portraits, biographies, récit d'un événement, coulisses... Ne sort-on
jamais du champ politique ?
Quelles sont les sources mobilisées ? D'où les journalistes parlent-ils ? En quoi leur position leur
confère-t-elle la possibilité de raconter « de l'intérieur » la vie politique ?
En outre, les journalistes politiques ne se cantonnent pas au genre « livre politique », ce qui
amène à questionner les autres registres sur lesquels leurs livres se fondent. Peut-on repérer d'autres
catégories au sein des livres écrits par des journalistes politiques ? Les livres réflexifs portant sur la
pratique du journalisme politique attirent particulièrement l'attention. Parmi ces derniers, les récits
professionnels enchantés côtoient la dénonciation de dérives honteuses sous différents modes
(« Bien entendu... c'est off ». Ce que les journalistes politiques ne vous racontent jamais de Daniel
Carton ou Journalistes, à la niche, de Bruno Masure). Collusion, compromission, petits
arrangements, ces livres « dévoilent » la relation entre les journalistes et les hommes/femmes
politiques, et fustigent des pratiques douteuses en défendant un idéal journalistique. Ces livres de
journalistes politiques œuvrant à la critique de leur profession constituent-ils pour autant un genre
particulier ?
Ce dossier consacré aux livres des journalistes s'inscrit dans une réflexion qui veut croiser
les problématiques qui intéressent la science politique, la sociologie du journalisme et l'analyse de
discours. La prolifération des livres politiques écrits par des journalistes ou par des
hommes/femmes politiques peut-elle s'interroger en termes d'homologie entre champs politique et
journalistique ? Le livre, en tant que format particulier, renouvelle-t-il la question des genres
journalistiques et plus particulièrement celle des genres et des « rhétoriques du journalisme
politique » ? Les livres de journalistes soulèvent également la question de l'auctorialité en analyse
de discours (Maingueneau, 2009), au sens où ils témoigneraient d'un « tournant auctorial dans la
pratique du journalisme » (Bastin et Ringoot, 2011) – tournant d'autant plus prégnant quand il s'agit
de journalisme politique. Dans cette perspective, les livres des journalistes politiques interrogent les
transformations à l'œuvre dans la pratique professionnelle et le discours journalistiques, tout autant
que celles qui concernent les langages du politique.
Bibliographie
Bastin Gilles et Ringoot Roselyne, « Des journalistes et des livres. Un tournant auctorial dans la
pratique du journalisme ? », Colloque international Mejor, Université de Brasilia, 25 avril 2011
www.mejor.com.br/index.php/mejor2011/MEJOR/paper/.../80/30
Le Bart Christian, « L’écriture comme modalité d’exercice du métier politique », Revue française
de science politique, 1998, 48-1, p. 76-96.
Leroux Pierre, « Une réussite tangentielle. Retour sur la carrière d’Anne Sinclair à la télévision » in
Cyril Lemieux (dir.), La subjectivité journalistique, Paris, Editions de l’EHESS, 2010, p. 245-262.
Maingueneau Dominique, « Auteur et image d’auteur en analyse du discours », Argumentation et
Analyse du Discours, 2009, 3
http://aad.revues.org/index660.html
Mots. Les langages du politique, Rhétoriques du journalisme politique, dir. J. Lefèvre et E. Neveu,
1993, 37.
Ringoot Roselyne, Utard Jean-Michel, Les genres journalistiques, Savoirs et savoir faire, Paris,
L'Harmattan, 2009
SEMEN, Genres de la presse écrite et analyse de discours, dir. J-M Adam, Th Herman, G. Lugrin,
2001, 13
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Modalités de soumission
Les contributions pourront prendre la forme d’articles (maximum 40 000 signes tout
compris) ou de notes de recherche (maximum 15 000 signes tout compris). Les auteurs devront
soumettre aux trois coordinateurs, avant le 1er décembre 2012, un avant-projet (3 000 signes
maximum tout compris), dont l’acceptation vaudra encouragement mais non pas engagement de
publication.
Les contributions devront être proposées aux trois coordinateurs avant le 1er mars 2013.
Conformément aux règles habituelles de la revue, elles seront préalablement examinées par les
coordinateurs du dossier, puis soumises à l’évaluation doublement anonyme de trois lecteurs
français ou étrangers de différentes disciplines. Les réponses aux propositions de contributions
seront données à leurs auteurs au plus tard en septembre 2013, après délibération du Comité
éditorial. Les références bibliographiques devront figurer en fin d’article et être mentionnées dans le
corps du texte sous la forme : (Machin, 1983). L’usage des caractères italiques sera réservé aux
mots et expressions cités en tant que tels, et les guillemets aux énoncés dûment attribués à un
auteur, ou à la glose d’un syntagme. Un résumé de cinq lignes et cinq mots-clés seront joints à
l’article, en français et si possible en anglais et en espagnol.
Coordination du dossier
Christian Le Bart, Pierre Leroux, Roselyne Ringoot
([email protected], [email protected], [email protected])
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