Artérite à cellules géantes. - Revue Marocaine de Rhumatologie
Transcription
Artérite à cellules géantes. - Revue Marocaine de Rhumatologie
22 Disponible en ligne sur FMC www.smr.ma Artérite à cellules géantes. Giant Cell Arteritis. Soumia Tayfi, Wafae Rachidi, Kawtar Nassar, Saadia Janani, Ouafae Mkinsi. Service de Rhumatologie, CHU Ibn Rochd Casablanca - Maroc. Rev Mar Rhum 2014; 30: 22-9 Résumé Abstract L’artérite à cellules géantes (ACG) est une vascularite touchant les artères de gros et moyen calibre, avec une prédilection pour les branches de la carotide externe. Elle atteint le sujet de plus de 50 ans. Les signes cliniques peuvent être classés en quatre sous-groupes : artérite crânienne, artérite extracrânienne, symptômes systémiques et pseudopolyarthrite rhizomélique. La biopsie de l’artère temporale a été longtemps considérée le gold standard du diagnostic de l’ACG. Actuellement, l’échodoppler de l’artère temporale, examen alternatif non invasif, peut remplacer la biopsie. D’autres examens d’imagerie comme la tomographie par émission de positons, l’angio-TDM ou l’angio-IRM ont un apport diagnostique surtout en cas d’atteinte de l’aorte et de ses branches proximales. Le diagnostic positif de l’ACG repose sur un ensemble d’arguments: cliniques, biologiques, histologiques et d’imagerie. Le traitement est basé sur les corticoïdes en prévenant Giant cell arteritis is a vasculitis involving large and medium-sized arteries, with predilection for the branches of the extern carotid artery. It four subsets: cranial arteritis, extracranial arteritis, systemic symptoms and polymyalgia rheumatic. The Temporal artery biopsy has long been the gold standard for establishing the diagnosis of giant cell arteritis. Nowadays, the duplex ultrasonography of temporal arteries, non invasive alternative procedure, can replace the biopsy. Other imaging modalities such as positron emission tomography, CT angiography or MR angiography (MRA) have provided evidence especially that involvement of the aorta and its proximal branches. The positive diagnosis is based on clinical, laboratory and The treatment is based on glucocorticoids les facteurs de risque cardiovasculaire. Un rapporté pour certains médicaments tels certain drugs such as the methotrexate, the cyclophosphamide dans des séries de cas. Ce échelle. Le ciblage de IL-6 au cours de l’ACG est studies. The targeting of IL-6 during the GCA is et de tolérance à long terme inconnu. Mots clés : Artère temporale; Biopsie,; Echodoppler; Tomographie par émission de positons; Corticoïdes. L’artérite à vascularite avec une issues de cellules géantes, ou artérite temporale est une touchant les artères de gros et moyen calibre prédilection pour les branches crâniennes l’arc aortique surtout celle de la carotide Correspondance à adresser à : Dr S. Tayfi Email : [email protected] Key words : Temporal artery; Biopsy; Duplex ultrasonography; Positron emission tomography; Glucocorticoids. externe. C’est la vascularite la plus fréquente du sujet âgé. Elle est caractérisée par son association fréquente à la pseudopolyarthrite rhizomélique. Le pronostic est conditionné par les complications vasculaires ischémiques Revue Marocaine de Rhumatologie 23 Artérite à cellules géantes notamment ophtalmologiques. Les nouvelles techniques d’imagerie ont pu changer la prise en charge clinique. La corticothérapie constitue la pierre angulaire du traitement. De nouvelles thérapeutiques émergent dans le but d’épargne cortisonique. L’objectif de notre article est de mettre le point sur cette vascularite notamment en ce qui concerne les nouveautés paracliniques et thérapeutiques. EPIDEMIOLOGIE L’artérite à cellules géantes (ACG) ou maladie de Horton touche le sujet de plus de 50 ans avec un pic de fréquence entre 75 et 85 ans. Elle est caractérisée par une prédominance féminine (2-3F=1H). L’incidence varie entre 1 à 30/100 000 habitants, avec une fréquence élevée chez les pays Scandinaves et leurs descendances comme au Minnesota (U.S.A), une fréquence intermédiaire en Europe du sud et elle est rare en Afrique et en Asie (1,2). L’incidence annuelle de la PPR est estimée à 52,5 pour 100 000 habitants (3). PHYSIO-PATHOGENIE Facteurs génétiques L’ACG est favorisée par des facteurs génétiques multiples, le mieux établi étant le génotype HLA-DRB1*04. En effet, une forte prévalence de l’allèle de l’haplotype DRB1*04 a été rapportée chez les patients ayant l’ACG par rapport à la population générale (4). Une association semble exister aussi entre l’allèle de l’haplotype HLADRB1* 04 et les risques d’atteinte oculaire ou de résistance aux corticoïdes (5, 6). D’autres études ont montré que la susceptibilité de développer une AGC est liée à un polymorphisme de gènes impliqués dans le processus lésionnel comme certaines molécules d’adhésion cellulaire (ICAM1 VCAM1..), cytokines (TNF , IL-6, IL-10..), et facteurs de croissance (VEGF, PDGF...) (7). Facteurs environnementaux L’hypothèse d’un stimulus antigénique bactérien ou viral initiateur du processus lésionnel a été évoquée, surtout devant le caractère saisonnier des cas d’ACG bien que les études soient controversées (2). Parmi les agents pathogènes suspectés : il y a parvovirus B19, mycoplasma pnemoniae, chlamydia pneumoniae, VRS, virus Parainfluenza type I (8,9). Récemment, Koening et al.MH ont rapporté à l’ACR que l’ACG pourrait être due à une bactérie, souche Burkholderia pseudomallei-like. Elle a été retrouvée par PCR dans les Revue Marocaine de Rhumatologie artères temporales de patients atteints de l’ACG (ACR 2013). Ainsi si son rôle dans la physiopathologie de la maladie de Horton est confirmé elle pourrait probablement constituer une nouvelle cible thérapeutique. Histologie L’ACG se caractérise par la présence d’infiltrats inflammatoires polymorphes (histiocytes, macrophages, cellules géantes multinucléées et lymphocytes), intéressant au moins deux tuniques de l’artère prédominant au niveau de la partie interne de la média et par l’existence d’une fragmentation de la limitante élastique interne avec ou sans thrombose intraluminale. Les cellules géantes multinucléées au contact de la limitante élastique interne sont caractéristiques de l’ACG (10, 11). D’autres lésions viennent d’être décrites récemment, ce sont des lésions de microvascularite touchant les vasa vasorum ou des petits vaisseaux extra-adventitiels « vascularite des petits vaisseaux entourant une artère temporale non inflammatoire» (12). Mc Donnell et al. ont classé les lésions histologiques en fonction du stade de la maladie de Horton en une artérite active et une artérite séquellaire qui est souvent trompeuse (13). Mécanisme physiopathologique Le processus lésionnel se déroule en trois phases incluant la rupture de tolérance et activation des cellules dendritiques résidantes de l’adventice, le recrutement des LT CD4+ et leur polarisation ainsi que le remodelage vasculaire. L’ACG fait intervenir initialement les lymphocytes T, ces derniers étant activés après présentation d’un antigène inconnu par les cellules dendritiques. L’activation des lymphocytes T conduit à la production d’interféron permettant la prolifération et la différentiation des macrophages en cellules géantes multinucléées. Les macrophages activés au sein de la paroi artérielle secrètent alors des cytokines inflammatoires (IL-1, IL-6) ainsi que des métalloprotéases participant au stress oxydatif à l’origine des lésions endothéliales. Les macrophages produisent également des facteurs de croissance dont le Platelet Derived Growth Factor (PDGF) et le Fibroblast Growth Factor (FGF), aboutissant à la prolifération et à la migration de myofibroblastes et à l’épaississement de la média, ainsi que le Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) contribuant à la néoangiogénèse et à l’épaississement de l’intima, à l’origine de l’oblitération luminale (figure 1) (14). Les signes généraux sont le fruit de l’intense réaction inflammatoire, par ailleurs le remodelage vasculaire est responsable des manifestations ischémiques de la maladie. 24 S. Tayfi et al. FMC inflammatoire avec thrombocytose a été notée. Une élévation des phosphatases alcalines et des gamma-GT sous la forme d’une cholestase anictérique est rapportée classiquement dans 20 % des ACG (3). Figure 1 : Physiopathologie de l’artérite à cellules géantes (14). CLINIQUE L’ACG a un début progressif rarement brutal. Différentes branches de la carotide externe et plus rarement interne peuvent être atteintes à l’origine de céphalées et de symptômes variés (Tableau 1) (15). Tableau 1 : Manifestations cliniques de l’ACG (15) Artérite crânienne Céphalées : 70-85% Hyperesthésie du cuir chevelu : 20-40% Artère temporale palpable : 30-60% Claudication de la mâchoire : 30-40% Perte de vision brutale (transitoire ou permanente) Diplopie ou autres manifestations ophtalmiques : 15-45% Neuropsychiatriques : Accidents vasculaires cérébraux confusion, dépression ou démence < 15% Manifestations vestibulo-auditives : surdité, bourdonnements d’oreilles, vertige Claudication de la langue ou nécrose du scalp : 5-25% < 5% Artérite extracrânienne Aortite, anévrisme aortique ou dissection : 5-20% Atteinte des autres artères (y compris MS et MI) : 5-20% Neuropathies périphériques < 15% Symptômes respiratoires : toux, dl pharyngée, enrouement < 15% Signes généraux: Fièvre, anorexie, amaigrissement, fatigue, malaise 30-50% Pseudopolyarthrite rhizomélique : : Atteinte bilaérale des ceintures scapulaire et pelvienne et du rachis cervical : 20-65% PARACLINIQUE Biologie L’ACG est caractérisée par la présence d’un syndrome inflammatoire important avec une VS supérieure à 50 mm/h dans 90-95%, supérieure à 100 mm/h dans 3060% ou VS et CRP élevées dans 90-95% (16). Une anémie Sur le plan immunologique, pas de marqueur spécifique, mais les anticorps anticardiolipine étaient retrouvés dans 30 à 60% des cas (17). Récemment, des anticorps antiferritine ont été décelés plus fréquemment chez les patients ayant une ACG comparés aux sujets témoins (55% vs. 1% ; p< 0,01). En plus ces anticorps constituaient un marqueur d’activité de la maladie de Horton puisqu’ils étaient dépistés, lors du diagnostic dans 92% des cas, lors des poussées dans 69 % des cas et lors des rémissions dans 13% des cas (18). Cependant, d’autres études complémentaires sont nécessaires pour valider l’intérêt des AC anti-ferritine comme critère de diagnostic et d’activité de la maladie. Biopsie de l’artère temporale: gold standard Examen indispensable au diagnostic de l’ACG. Elle peut être normale dans 10-30% des cas, en raison de l’atteinte artérielle typiquement segmentaire et focale. Elle est guidée par la clinique et mieux par l’échodoppler, avec longueur suffisante de 2-3 cm d’artère. La réalisation de biopsies bilatérales systématiques permet un gain diagnostique de 12,7% mais reste non recommandée (19). Ce geste doit être réalisé au plus vite après l’initiation - souvent urgent de la corticothérapie. Dans le travail de Narvaes (20), la probabilité de positivité de la biopsie baisse avec le temps après l’introduction de la corticothérapie. Néanmoins, sa réalisation après plusieurs semaines de corticothérapie reste utile si suspicion de l’ACG à la recherche des lésions artérielles. Des lésions histologiques constituent des facteurs pronostiques. En effet, la fragmentation de la limitante élastique interne avec ou sans thrombose intraluminale est prédictive des complications neurologiques et ophtalmologiques (21). Par ailleurs, la présence de cellules géantes est prédictive de l’atteinte ophtalmologique (22). Imagerie Echographie-Doppler artériel : L’échodoppler permet de visualiser l’aspect typique d’un halo hypoéchogène au niveau de l’artère temporale avec épaississement circulaire hypoéchogène périluminal de l’artère temporale, en rapport avec l’œdème pariétal (> 1mm), anomalie caractéristique de l’ACG (figure 2) (23). Comme il peut mettre en évidence une sténose ou une occlusion artérielle. C’est un examen utile pour guider le site de la biopsie Revue Marocaine de Rhumatologie Artérite à cellules géantes de l’artère temporale et même pour suivre l’évolution des lésions sous traitement. 25 d’authentifier la régression des lésions d’aortite, en association avec le suivi clinico-biologique. Angio-IRM : L’angio-IRM a un intérêt dans le dépistage des lésions artérielles au niveau des gros vaisseaux (aorte, artères des membres supérieur ou inférieur) en montrant un épaississement de la paroi artérielle prenant le contraste sur les séquences pondérées T1 associé à un œdème en T2. Dans une série de 17 cas de l’ACG bénéficiant d’angioIRM, des anomalies de la paroi artérielle temporale ont été rapportées dans 94,1% des cas sur les séquences pondérées T1 avec un épaississement de la paroi artérielle temporale plus important en cas de positivité de la biopsie de l’artère temporale) (28). Figure 2 : Echographie-Doppler d’artère temporale en coupe longitudinale (a) et axiale (b) de l’artère temporale normale (a) et (b). Signe du halo (c) et (d) chez une patiente ayant une artérite à cellules géantes (23). D’après la revue de littérature, l’échodoppler a une sensibilité diagnostique de 95,4% et une sensibilité de 91,3%, une valeur prédictive positive de 84% et une valeur prédictive négative de 97,6% (23-25). Cette technique peut être appliquée aux autres branches extracrâniennes de la carotide, aux gros vaisseaux des membres et de l’aorte abdominale. En effet dans une série de 53 patients, Schmidt et al ont mentionné un épaississement homogène de la paroi vasculaire avec ou sans sténose des artères sous-clavières, axillaires et brachiales (26). Récemment, une étude a évalué l’intérêt diagnostique de la combinaison de l’échodoppler de l’artère temporale, l’artère axillaire et des artères carotides dans le diagnostic de l’ACG en la comparant avec la biopsie de l’artère temporale. Cette combinaison avait une excellente sensibilité pour diagnostiquer l’ACG. La présence du signe de halo seul dans des artères temporales et les gros vaisseaux était un signe fiable pour diagnostiquer l’ACG par l’échodoppler (27). La combinaison de l’échodoppler de la carotide commune, des artères axillaires et temporales avait une sensibilité excellente et une haute spécificité comparable à la biopsie de l’artère temporale. Cet examen non invasif pourrait remplacer la biopsie dans le diagnostic de l’ACG. Angio-scanner : L’angio-scanner permet de visualiser un épaississement pariétal circonférentiel, régulier et homogène > 3 mm d’épaisseur ou des dilatations anévrismales. Son intérêt est capital pour le diagnostic d’aortite inflammatoire chez les patients ayant une maladie de Horton .comme il est utile pour le suivi en permettant Revue Marocaine de Rhumatologie L’inconvénient de cet examen est la possible persistance des lésions malgré la disparition de l’inflammation et l’amélioration clinique sous traitement. Il n’existe actuellement pas de recommandations concernant la surveillance morphologique aortique en termes de dépistage ou de surveillance systématique, ni de parallélisme entre un aspect d’aortite radiologique et l’activité clinique ou biologique de la maladie. Tomographie par émission de positons (PET-scan) : Le PET-scan visualise une fixation du traceur sur les artères intéressées par un processus inflammatoire, notamment l’aorte et les troncs supra-aortiques. Cette détection des lésions inflammatoires pariétales pourrait être plus précoce qu’avec une autre technique d’imagerie. Le PET-scan ne permet pas de visualiser l’atteinte inflammatoire temporale, en raison du trop faible diamètre des artères temporales (< 2 mm) et de la proximité du métabolisme cérébral normalement très intense (pas de fixation de traceur du 18F-FDG même dans les cas histologiquement confirmés d’artérite temporale). Cependant, en 2010, Gaemperli et al ont montré l’inflammation active métabolique dans des artères temporales dans une étude expérimentale utilisant PET-scan à la [11C]-pk11195 combiné avec l’angio-TDM (29). Et récemment une équipe tchèque a montré une accumulation accrue de traceur utilisant le 18F-FDG au niveau des artères temporales et occipitales et même dans des branches plus petites en utilisant un scanner hybride commun PET/CT si un protocole d’acquisition cérébrale est appliqué (figure 3) (30). Son Intérêt réside surtout dans les formes frustres avec signes généraux dominants ou chez les patients présentant une évolution défavorable sous traitement ou une rechute. Néanmoins, cet examen comporte plusieurs facteurs limitants 26 S. Tayfi et al. FMC Figure 4 : PET/scan chez une patiente ayant une pseudopolyarthrite rhizomélique (31). A. Aortite thoracique et abdominale, vascularite artère carotide et sous clavière, atteinte des épaules, bursite trochantérienne. B. Vascularite artères carotides et bursite cervicale interépineuse. C. Atteinte des épaules et de l’articulation sternoclaviculaire. D. Bursite ischiatique bilatérale. E. Bursites interépineuses cervicale et lombaire. Figure 5 : Manifestations cliniques de l’ACG (15) Critères d’ACR 1990 Figure 3 : PET-scan avec acquisition cérébrale : fixation sur les artères temporales (flèches rouges), sur leurs branches frontales et pariétales (flèches jaunes) sur les artères occipitales (flèches vertes) (30). - Age au début de la maladie 50 ans - Céphalées d’apparition récente (nouveau début ou type nouveau de céphalées) comme la résolution anatomique limitée, en cas d’emploi préalable d’une corticothérapie potentiellement source de faux-négatif, la captation du 18FDG non spécifique de la vascularite et l’accessibilité limitée et coût élevé. Sa place exacte dans la panoplie diagnostique reste à définir. - Anomalie de l’artère temporale à la palpation (induration ou diminution du pouls non due à l’artériosclérose des artères cervicales) Imagerie de l’atteinte articulaire Sensibilité à 93,5% et spécificité à 91,2%. L’échographie, examen accessible, permet l’analyse simultanée des ceintures scapulaire et pelvienne, en recherchant des épanchements synoviaux articulaires glénohuméraux, coxofémoraux, ténosynovites (par exemple de la longue portion du biceps) et des bursites (sous-acromio- deltoïdiennes). L’IRM (séquences T2 et STIR) peut montrer l’existence de bursites inter-épineuses cervicales (C5-C6, C6-C7) ou lombaires (L3-L4, L4-L5). Elle permet également de suivre l’évolution sous traitement. L’IRM semble plus sensible que l’échographie pour les bursites de hanche (31). Le TEP-scan a mis en évidence une hyperfixation articulaire au niveau des tubérosités ischiatiques, des grands trochanters et du rachis lombaire ; une hyperfixation touchant au moins deux de ces sites avait une bonne sensibilité (85,7%) et spécificité (88,2%) dans une série de pseudepolyarthrite rhizomélique (PPR) (32). Comme dans l’observation de Camellino et al (figure 4) (31). Toutefois, sa place dans le diagnostic de la PPR reste aujourd’hui encore à déterminer. DIAGNOSTIC POSITIF Les critères ACR1990 (Figure 5) sont les plus utilisés - Vitesse de sédimentation supérieure à 50 mm à la première heure - Biopsie d’artère temporale : vascularite caractérisée par la prédominance d’une infiltration par des cellules mononucléées ou par un granulome inflammatoire, habituellement avec des cellules géantes. pour le diagnostic de l’ACG. Cependant, Rao et al. ont rapporté que l’utilisation de ces derniers peut exposer à des erreurs diagnostiques, notamment avec certaines vascularites systémiques nécrosantes. Par conséquent, le diagnostic positif de l’ACG repose sur l’ensemble d’arguments: cliniques, biologiques, histologiques et de l’imagerie. TRAITEMENT Corticoïdes La corticothérapie est le traitement de choix de l’ACG. Le protocole français préconise un traitement d’attaque, avec décroissance rapide jusqu’à une posologie suffisante pour prévenir une rechute précoce, puis décroissance lente, traitement d’entretien et sevrage généralement entre la deuxième et la troisième année avec une surveillance des rechutes. Mais d’autres protocoles ont été décrits. La posologie initiale est de 1 mg/kg/j en cas de complications vasculaires et 0,5 à 0,7 mg/kg/j dans les autres cas. La maladie ne justifie pas un traitement à vie. D’après la littérature, il n’y aurait aucun bénéfice à prescrire une corticothérapie par voie intra-veineuse sauf en cas de vascularite active ou de Revue Marocaine de Rhumatologie 27 Artérite à cellules géantes menace vasculaire (diplopie, amaurose transitoire, accident vasculaire cérébral, ischémie critique de membre…) (33). Malgré leur efficacité, les corticoïdes exposent à un risque de corticodépendance, corticorésistance et de iatrogénicité élevée. Traitement d’épargne cortisonique : Méthotrexate Dans une méta-analyse réalisée par Mahr et al (34) avec un suivi moyen de 54 semaines, le risque de première ou de seconde rechute clinique a été réduit de 35% et de 51% respectivement sous méthotrexate. Une réduction des doses cumulées de corticoïdes de 842 mg sur 48 semaines a été également notée avec un risque relatif d’arrêt des corticoïdes pendant plus de six mois de 2,84 (p = 0,001). Sur le plan clinique, le méthotrexate prévient les rechutes de type pseudopolyarthrite rhizomélique, mais pas les rechutes céphaliques (33, 34). Donc, le méthotrexate paraît avoir un effet modeste d’épargne cortisonique dans l’ACG et limité à la prévention des rechutes non céphaliques. Cette efficacité paraît établie lorsqu’il est prescrit dès l’initiation du traitement. Azathioprine Dans une seule étude contrôlée contre placebo de 31 patients sur une durée d’un an, les patients étant en rémission lors de l’introduction du médicament et sous faibles doses de corticoïdes. Un grand nombre d’arrêts a été relevé pour toxicité surtout digestive. Il n’y avait pas d’effet d’épargne cortisonique jusqu’à la 36ème semaine et un effet modeste à la 52ème semaine (35). Donc l’azathioprine reste peu prescrit. Cyclophosphamide Pour le cyclophosphamide, Hubert de Boysson et al ont analysé 17 articles, 88 patients ont été retenus répondant aux critères d’ACR. Le suivi moyen était de 24 mois et la biopsie de l’artère temporale était positive chez 51% des patients. 75% d’épargne cortisonique et 84% de réponse satisfaisante dont 18% d’arrêt de la corticothérapie ont été observés. Par contre, on a noté 19% de rechute et 33% d’effets secondaires (36). Le cyclophosphamide peut être proposé comme un bon agent d’épargne cortisonique, la voie intraveineuse est préférable. Vu les effets indésirables recensés et le nombre limité de patients qui ont reçu ce traitement, des études prospectives à grande échelle s’imposent. Le léflunomide constitue une nouvelle piste thérapeutique. Revue Marocaine de Rhumatologie Dans une étude rétrospective de 23 patients dont 12 PPR retenues selon la classification EULAR/ACR et 11 ACG selon les critères d’ACR. Pour une durée moyenne de traitement de10.7 mois, il a été observé 26% d’arrêt pour effet indésirable, par contre 21% de rémission après un délai moyen de 10.2 mois. Dans le groupe PPR, une réduction de 6 mg/l de CRP et de 3.7 mg de la dose prédnisone chez 34.2% des cas a été rapportée. Concernant le groupe ACG, il a été noté une réduction de 12.4 mg/l de CRP et de 6.6 mg de la dose prédnisone chez 63.4% des cas (37). L’intérêt de léflunomide reste à confirmer par des études contrôlées. Anti-TNF L’adalimumab a été évalué sans succès dans l’essai français Hector (38). Pour l’infliximab, une étude comparative en double insu a été réalisée mais arrêtée après inclusion de la moitié des patients en raison de l’absence complète d’efficacité du médicament (39). Une étude évaluant l’intérêt de l’étanercept chez des patients corticodépendants ou ayant eu des effets indésirables, n’avait pas conclu à des résultats significatifs (40). Par conséquent, actuellement les anti-TNF n’ont pas d’indication dans la maladie de Horton. Le ciblage de l’IL-6 au cours de l’ACG est très prometteur. L’intérêt croissant de cette biothérapie pour les patients réfractaires ou intolérants aux corticoïdes repose non seulement sur des données biologiques mais également cliniques (41-44). Des études contrôlées semblent nécessaires pour déterminer la vitesse de dégression de la corticothérapie, la durée nécessaire du maintien du TCZ et sa tolérance chez le sujet âgé. SUIVI En l’absence de score d’activité défini pour l’ACG, une surveillance clinique s’impose notamment dès la réapparition des manifestations initiales, la survenue d’autres complications vasculaires: céphalées localisées à recrudescence nocturne avec hyperesthésie du cuir chevelu, des anomalies des artères temporales, des symptômes oculaires (amaurose transitoire, diplopie), une claudication ou trismus de la mâchoire, une claudication de la langue ou une toux sèche. MORBIDITE-MORTALITE La gravité de la maladie est conditionnée par l’atteinte oculaire (cécité) dont la fréquence varie entre 21% et 28 S. Tayfi et al. FMC 71% selon les séries (45, 46). La fréquence de cette complication est en nette régression après l’introduction de la corticothérapie (47). En dehors d’autres complications thrombotiques, la morbidité est due aux complications de la corticothérapie chez une population âgée (ostéoporose, fractures osseuses, hypertension artérielle, diabète, infection...). 6. Rauzy O, Fort M, Nourhashemi F. Relation between HLA DRB1 L’ACG n’altère pas significativement l’espérance de vie même sur un suivi prolongé avec une survie de 80% à 5 ans selon des études antérieures de mayo Clinic (48), quoiqu’une surmortalité a été notée dans des travaux récents suédois, elle est due à la survenue de complications cardiovasculaires, à type d’aortite, d’accident vasculaire cérébral et d’infarctus du myocarde associé à une athéromatose et à une hypertension artérielle (49). 8. Regan MJ, Wood BJ, Hsieh YH: Temporal arteritis and Chlamydia CONCLUSION L’ACG est la vascularite la plus fréquente du sujet âgé. Son diagnostic positif repose sur un faisceau d’arguments cliniques, biologiques, histologiques et d’imageries. Les corticoïdes restent le seul médicament indispensable associé à la prévention de leurs complications et une prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire. En dehors du méthotrexate, léflunomide et cyclophosphamide, les médicaments d’épargne cortisonique n’ont pas montré de grands bénéfices en termes de morbidité induite par la maladie. Ce qui reste à confirmer par des études à grande échelle. DÉCLARATION D’INTÉRÊT Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt. RÉFÉRENCES 1. Salvarani C, Crowson CS, O’Fallon WM. Reappraisal of the epidemiology of giant cell arteritis in Olmsted County, Minnesota, over a fifty year period. Arthritis Rheum 2004; 51:264-8. 2. Lee JL, Naguwa SM, Cheema GS. The geo-epidemiology of temporal (giant cell) arteritis. Clin Rev Allergy Immunol 2008; 35:88-95. 3. Salvarani C, Cantini F, Hunder GG. Polymyalgia rheumatica and giant-cell arteritis, Lancet 2008; 372:234–45. 4. Gonzalez-Gay MA, Garcia-Porrua C, Hajeer AH. HLADRB1*04 may be a marker of severity in giant cell arteritis. Ann Rheum Dis 2000; 59:574–5. 5. Gonzalez-Gay MA, Garcia-Porrua C, Llorca J. Visual manifestations alleles and corticosteroid resistance in giant cell arteritis. Ann Rheum Dis 1998; 57:380–2. 7. Enjuanes A, Benavente Y, Hernandez-Rodriguez J. Association of NOS2 and potential effect of VEGF, IL6, CCL2 and IL1RN polymorphisms and haplotypes on susceptibility to GCA–a simultaneous study of 130 potentially functional SNPs in 14 candidate genes. Rheumatology (Oxford) 2012; 51:841–51. pneumoniae: failure to detect the organism by polymerase chain reaction in ninety cases and ninety controls, Arthritis Rheum 2002; 46:1056–60. 9. Salvarani C, Farnetti E, Casali B. Detection of parvovirus B19 DNA by polymerase chain reaction in giant cell arteritis: a case-control study, Arthritis Rheum 2002 ;46:3099–101. 10. Östberg G. Temporal arteritis in a large necropsy series. Ann Rheum Dis 1971; 30: 224–35. 11. Weyand CM, Goronzy JJ. Medium- and large-vessel vasculitis. N Engl J Med 2003; 349:160–9. 12. Restuccia G, Cavazza A, Boiardi L. Small-vessel vasculitis surrounding an uninflamed temporal artery and isolated vasa vasorum vasculitis of the temporal artery: two subsets of giant cell arteritis. Arthritis Rheum 2012; 64:549–56. 13. McDonnell PJ, Moore GW, Miller NR. Temporal arteritis. A clinicopathologic study. Ophthalmology 1986; 93:518–30. 14. Ly KH, Liozon E, Fauchais AL. Physiopathologie de l’artérite à cellules géantes Rev Med Interne 2013 ; 34 (7): 392–402. 15. Nesher G. The diagnosis and classification of giant cell arteritis J of Autoimmun 2014; 48-49:73-5. 16. Kermani TA, Schmidt J, Crowson CS. Utility of erythrocyte sedimentation rate and C-reactive protein for the diagnosis of giant cell arteritis. Semin Arthritis Rheum 2012; 41:866–71 17. Liozon F, Jauberteau-Marchan MO, Boutros-Toni F. Anticoprps anticardiolipine et maladie de Horton. Ann Med Interne (Paris) 1995; 146:541–7. 18. Baerlecken NT, Linnemann A, Gross WL. Association of ferritin autoantibodies with giant cell arteritis/polymyalgia rheumatica. Ann Rheum Dis 2012; 71:943–7. 19. Breuer GS, Nesher G, Nesher R. Rate of discordant findings in bilateral temporal artery biopsy to diagnose giant cell arteritis. J Rheumatol 2009; 36:794–6. 20. Narvaez.J, Bernad B, Roig-Vilaseca D.Influence of previous corticosteroid therapy on temporal artery biopsy yield in giant cell arteritis. Semin Arthritis Rheum 2007; 37:13-9 21. Chatelain D, Duhaut P, Schmidt J. Pathological features of temporal arteries in patients with giant cell arteritis presenting with permanent visual loss. Ann Rheum Dis 2009; 8: 84–8. 22. Makkuni D, Bharadwaj A, Wolfe K. Is intimal hyperplasia a of giant cell arteritis. Trends and clinical spectrum in 161 patients. marker of neuro-ophthalmic complications of giant cell arteritis? Medicine (Baltimore) 2000; 79:283-692. Rheumatology (Oxford) 2008; 47:488–90. Revue Marocaine de Rhumatologie 29 Artérite à cellules géantes 23. Schmidt WA, Role of ultrasound in the understanding and 37. Diamantopoulos AP, Hetland H, Myklebust J. Leflunomide as management of vasculitis Ther Adv Musculoskel Dis 2014; 6 (2): a Corticosteroid-Sparing Agent in Giant Cell Arteritis and 39-47. Polymyalgia Rheumatica: A Case Series. Bio Med Research 24. Romera-Villegas A, Vila-Coll R, Poca-DiasV. The role of color duplex sonography in the diagnosis of giant cell arteritis. J Ultrasound Med 2004 ;23: 1493-8. 25. Karassa FB, Matsagas MI, Schmidt WA. Meta-analysis: test performance of ultrasonography for giant-cell arteritis. Ann Intern Med 2005; 142:359–69. 26. Schmidt WA, Seifert A, Gromnica-Ihle E. Ultrasound of proximal upper extremity arteries to increase the diagnostic yield in large vessel giant cell arteritis. Rheumatology (Oxford) 2008; 47:96– 101. 27. Diamantopoulos AP, Haugeberg G, Hetland H. Diagnostic Value of Color Doppler Ultrasonography of Temporal Arteries and Large Vessels in Giant Cell Arteritis: A Consecutive Case Series. Arthritis Care & Research 2014; 66 (1): 113–9. 28. Bley TA, Markl M, Schelp M. Mural inflammatory hyperenhancement in MRI of giant cell (temporal) arteritis resolves under corticosteroid treatment. Rheumatology (Oxford) 2008; 47:65–7. 29. Gaemperli O, Boyle JJ, Rimoldi OE. Molecular imaging of vascular inflammation. Eur J Nucl Med Mol Imaging .2010; 37:1236. 30. Rehak Z, Szturz P, Kren L. Upsampling From Aorta and International 2013; 20638. 38. Mariette X, Hachulla E, Larroche C. Results of a randomized controlled study of adalimumab for steroid sparing in patients with giant-cell arteritis. Arthritis Rheum 2011; 63: S589. 39. Hoffman GS, Cid MC, Rendt-Zagar KE. Infliximab for maintenance of glucocorticosteroid-induced remission of giant cell arteritis: a randomized trial. Ann Intern Med 2007; 146: 621–30. 40. Martínez-Taboada VM, Rodríguez-Valverde V, Carreno L. A doubleblind placebo controlled trial of etanercept in patients with giant cell arteritis and corticosteroid side effects. Ann Rheum Dis 2008; 67:625–30. 41. Kieffer P , Hinschberger O, Ciobanu E. littératureClinical and biological efficacy of tocilizumab in giant cell arteritis: Report of three patients andliterature review Rev Med Interne 2014; 35 (1) (2014) 56–9. 42. Seitz M, Reichenbach S, Bonel HM. Rapidinduction of remission in large vessel vasculitis by IL-6 blockade. A case series.Swiss Med Wkly 2011; 17: 141. 43. Christidis D, Jain S, Das Gupta B. Successful use of tocilizumab Aortic Branches PET/CT Hybrid Imaging Identified 18F-FDG in polymyal-gic onset biopsy positive GCA with large vessel Hypermetabolism in Inflamed Temporal and Occipital Arteries Clin involvement. BMJ Case Rep 2011;30. Nucl Med 2014; 39 (1): 84 -6. 31. Camellino D, Cimmino MA. Imaging of polymyalgia rheumatica: indications on its pathogenesis, diagnosis and prognosis. Rheumatology (Oxford) 2012; 51:77–86. 32. Yamashita H, Kubota K, Takahashi Y. Whole-body fluorodeoxyglucose positron emission tomography/computed tomography in patients with active polymyalgia rheumatica: evidence for distinctive bursitis and large-vessel vasculitis. Mod Rheumatol 2012;22:942–6. 33. Sailler L, Pugneta G, Bienvenu B. Traitement de la maladie de Horton. Rev Med Interne 2013; 34 (7): 431–7. 34. Mahr AD, Jover JA, Spiera RF. Adjunctive methotrexate for treatment of giant cell arteritis: an individual patient data metaanalysis. Arthritis Rheum 2007; 56 (8):2789–97. 35. De Silva M, Hazleman BL. Azathioprine in giant cell arteritis/ polymyalgia rheumatica:a double-blind study. Ann Rheum Dis 1986; 45: 136–8. 36. De Boysson H, Boutemy J. Is there a place for cyclophosphamide in the treatment of giant-cell arteritis? A case series and systematic 44. Salvarani C, Magnani L, Catanoso M. Tocili-zumab: a novel therapy for patients with large vessel vasculitis. Rheumatology (Oxford) 2012; 51:151–6. 45. Huston KA, Hunder GG, Lie JT. Temporal arteritis: a 25-year epidemiologic, clinical, and pathologic study. Ann Intern Med 1978; 88 (2):162-7. 46. Jonasson F, Cullen JF, Elton RA. Temporal arteritis. A 14-year epidemiological, clinical and prognostic study. Scott Med J 1979; 24:111-7. 47. Salvarani C, Cimino L, Macchioni P. Risk factors for visual loss in an Italian population-based cohort of patients with giant cell arteritis.Arthritis Rheum 2005; 53:293-7. 48. Matteson EL, Gold KN, Bloch DA. .Long-term survival of patients with giant cell arteritis in the American College of Rheumatology giant cell arteritis classification criteria cohort. Am J Med 1996;100:193-6. 49. Nordborg E, Bengtsson BA. Death rates and causes of death in review Seminars in Arthritis and Rheumatism 2013; 43 (1): 284 consecutive patients with giant cell arteritis confirmed by 105–12. biopsy. BMJ 1989; 299:549-50. Revue Marocaine de Rhumatologie