Zibeline n°34 en PDF

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Zibeline n°34 en PDF
34
du 13/10/10 au 17/11/10 | un gratuit qui se lit
Investir
la culture
Politique culturelle
Marseille Provence 2013
Le CAC à Istres,
les Rencontres artistiques Méditerranéennes du Var
Hors-la-loi de Rachid Bouchareb
Actoral
5
6
7
8
Saisons
Avignon
10, 11
Théâtre
La Criée, le Vitez, le Jeu de Paume,
Pourrières, Préavis de désordre urbain
Au programme
12, 13
14 à 19
Danse
GTP, BNM, Pavillon Noir
Ballet d’Europe, BNM, Dansem
Au programme
20
22
24, 25
Musique
Concerts
Lyrique, Concerts, Contemporaine
Au programme
Jazz, actuelle, chanson
Au programme
26 à 29
30, 31
32
33 à 36
37
Cirque
Istres, Nono, Arles, Le Merlan,
Sainte-Maxime, Gap
38, 39
Arts de la rue
Petit Art Petit, Gardanne, Salon
Le Gymnase, le Merlan, Small is beautiful
42
43
Jeunesse
Au programme
Merlan, Jeu de paume, Salins, Centaure
Châteauvallon, Grand Théâtre
Livres
44, 45
46
47
48, 49
Cinéma
FFM, Entre nos mains, Illégal, Liberata
Instants vidéo, Cinehorizontes, Image de ville,
Gardanne, Institut de l’image
Les rendez-vous d’Annie, AFLAM, Apt, Toulon
50, 51
52, 53
54, 55
Arts visuels
Aix-en-Provence, Avignon
Parcours marseillais
FRAC, CCIMP
Bandol, Fabrik89, Artothèque
Au programme
56, 57
58
59
60
61
Rencontres
62, 63
Livres
Rencontres
Littérature, arts, musique
Sciences
64 à 67
68 à 74
75
Histoire
Sétif et Hors-la-loi
76
Marseille oubliée
Hé ho les Marseillais, vous vous sentez une âme de capitale culturelle ? Quelques faits devraient vous sauter aux yeux, si vous
n’aviez tant l’habitude d’être maintenus aux marges.
Marseille, métropole qui regroupe près d’un million d’habitants,
n’abrite ni son rectorat, ni sa direction des affaires culturelles,
ni sa fac de lettres, arts et sciences humaines. Cette situation est
unique en France : de telles institutions, essentielles à la vie
culturelle, se trouvent toujours dans les capitales régionales.
Imagineriez-vous que le Campus de Lettres quitte les fastes de
Montpellier pour trouver refuge dans les arènes nîmoises, que le
Rectorat d’Alsace abandonne Strasbourg pour migrer vers de
sages images d’Epinal, et que la DRAC de Midi Pyrénées tourne
le dos au lyrisme de Toulouse pour s’enfermer dans les médiévaux
remparts de Carcassonne ?
Marseille n’abrite pas davantage les grands musées d’art de la
région, ou les festivals subventionnés. Elle est la seule ville de
cette importance démographique à ne pas avoir d’Opéra National, ni d’Orchestre. Ce sont ces conditions, fondées sur une
méfiance historique envers la ville rebelle, pestiférée, populaire,
bigarrée, dues aussi aux erreurs stratégiques de ses dirigeants
successifs, qui font de Marseille une métropole étrange, sans
centre d’affaires, sans bourgeoisie éclairée, mais riche d’une
vitalité artistique particulière, née des gens qui vivent et construisent ici, et ont pris l’habitude de ne pas attendre grand-chose
des institutions.
Attention cependant à ne pas confondre le pansement avec une
cerise sur un gâteau, qui demeure absent. Si on fait de Marseille
la Capitale des Arts de la rue, si on investit dans ses quartiers
Nord, dans son cousinage avec le Sud et la Méditerranée, ses
musiques populaires, si on lui donne un MuCEM, c’est encore
pour la maintenir aux marges : la tête de l’Empereur s’expose à
Arles, l’État investit dans la musique savante d’Aix, et aujourd’hui dans le théâtre à Toulon. Quitte à délabelliser la Scène
Nationale de Marseille, voire la Criée, disent les rumeurs ! Qu’il
ne faut pas écouter, mais qui alertent…
La plus ancienne métropole de France a, par défaut d’investissement institutionnel, construit une identité culturelle forte et
indépendante. À l’heure où on l’a nommée Capitale, il ne faudrait
pas qu’elle renonce à obtenir ce qui lui est dû.
AGNÈS FRESCHEL
Philosophie
La pop philosophie
77
Adhérents
78
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MARSEILLE PROVENCE 2013
POLITIQUE CULTURELLE
05
attend les décisions des dossiers déposés pour labellisation auprès de l’équipe
de Bernard Latarjet. Les réponses
tardent, dangereusement. Les projets
d’envergure ont besoin d’assurances
pour être mis en branle, pour trouver
les financements complémentaires que
MP 2013 ne saurait fournir. Pour avancer. Il ne reste que deux ans, il n’est
plus question d’atermoiements.
L’objet du débat était là. Il ne fut pas
traité. Dommage : le numéro 77 du
Ravi (toujours disponible sur le site
www.leravi.org), posait les bases du
problème bien plus profondément.
Le débat
est ailleurs
AGNÈS FRESCHEL
Faut-il miser sur 2013 ?,
débat organisé par le mensuel
satirique Le Ravi, s’est tenu
au cinéma l’Alhambra le 5 oct,
et a été diffusé simultanément
sur les ondes de Radio Grenouille
(disponible en poadcast
sur www.grenouille888.org )
© Agnès Mellon
Clarifications
Tout le paradoxe de la Capitale culturelle était représenté ce
soir-là : sur la scène trois hommes politiques majeurs,
responsables de la culture à la Ville, aux conseils régional et
général. Renaud Muselier, Patrick Mennucci et Michel
Pezet en représentation, caricaturés par les dessinateurs du
Ravi pendant le débat, échangèrent mine de rien quelques
flèches perfides, mais dans l’ensemble se tinrent plutôt bien,
manifestant la volonté de sortir Marseille Provence 2013 des
stricts enjeux politiciens. Mais comment faire ?
Culture ou politique ?
L’absence de tout représentant de Marseille Provence 2013
faussait de fait toutes les problématiques : ils n’avaient pas
été invités, et étaient les seuls à posséder les réponses
artistiques. Dans la salle le premier rang était réservé à la
Ville de Marseille, et occupé par des Élus. Sur les 300
personnes présentes, peu d’habitués des salles sombres, des
galeries et des rayons intimes de bibliothèque. Aucun artiste
ne prit la parole : des politiques, nombreux, quelques
directeurs de lieux, les seuls pertinents. Malgré les efforts de
recentrage de Michel Gairaud qui menait le débat, il ne fut
jamais véritablement question de culture. Mais d’investissement et de gouvernance. Problèmes essentiels, qui minent
l’avenir de la capitale culturelle, placée entre des élections
présidentielle et législative, qui vont changer le paysage local
en 2012, et les prochaines municipales, auxquelles Messieurs
Pezet, Mennucci et Muselier pensent forcément très fort.
Ce qui est logique.
Faut-il miser sur 2013 ? Dans ce contexte la question posée
par Le Ravi prenait un sens pervers : il est évident que les
politiques parient sur 2013, mais plus en vue de 2014 que par
amour de l’art. Même s’ils s’en défendent, même si des préoccupations culturelles les animent aussi. Le fait de confier la
gouvernance à Bernard Latarjet, décision très courageuse
de Jean-Claude Gaudin, devait en principe préserver
Marseille Provence 2013 de ces dérives-là. Mais à Marseille la
Culture est soudain devenue un enjeu politique. Ce qui lui
donne une importance bienvenue, mais l’entraîne parfois fort
loin de son objet : esthétique, intellectuel, éducatif,
émancipateur. Concepts qui ne furent jamais évoqués.
De quoi fut-il question, donc ? D’éclaircir la position de la
Ville, ce que Renaud Muselier fit avec conviction. Il expliqua
que son rôle était de construire les équipements nécessaires
à 2013, que la Ville investissait 500 millions d’euros, et
promit que les grands bâtiments attendus seraient prêts, que
les transports et l’accueil des visiteurs serait repensé, et que
lui ne fournissait que le cadre. Que des ajustements avaient
été nécessaires au sein de la Ville de Marseille pour lever les
malentendus initiaux sur le «Guichet unique» qui semblait
doubler celui de Marseille Provence 2013. Patrick Mennucci
regretta qu’il ne siège pas comme représentant de la Ville au
Conseil d’Administration de MP2013, et qu’on ne sache pas
très bien qui décidait, de Madame Vlasto, de Monsieur
Hermann, ou de lui-même. Il insista surtout sur l’échec de la
métropolisation de Marseille «depuis 50 ans», qui ne pourra
pas être compensé simplement par la capitale… rejoignant
en ce sens Michel Pezet, qui soulignait combien Marseille
peinait à devenir une ville culturelle d’envergure, comme le
sont plus «naturellement» Aix ou Arles (Monsieur Hermann,
à ce propos, rappela très justement que le CG investit à Arles,
que toutes les collectivités aident l’activité culturelle d’Aix,
alors que les Musées de Marseille, son Opéra, bref tous les
équipements coûteux sont laissés aux seuls soins de la Ville,
et que le CG et le CR n’y investissent pas un centime… oubliant au passage que l’État fait de même, confortant depuis
toujours Marseille dans son personnage de cité oubliée, et
marginale).
Quelques difficultés d’envergure furent évoquées également.
Le fait que les mécénats attendus (15 millions sur 80) sont
pour l’heure quasiment absents : alors que les collectivités
territoriales et locales tiennent toutes leurs engagements,
les entreprises comptent-elles bénéficier des retombées économiques sans investir ? Le fait que le monde culturel de la
région, mis à mal par les restrictions budgétaires de l’État, la
stagnation des subventions des collectivités territoriales, la
situation économique globale, attende trop de MP2013, qui
représente comme le rappela Patrick Mennucci «moins d’un
dixième des subventions annuelles courantes de la culture sur
le territoire. Soit 80 millions sur presque 900 millions.»
Enfin il fut question des inquiétudes d’un monde culturel qui
06
POLITIQUE CULTURELLE
LE CAC À ISTRES | TOULON
Recentrages
Après la mise à l’écart à mi-parcours de saison de
son directeur Bernard Hennequin (pour cause,
semble-t-il, d’éléments par trop sexués offerts au
regard dans l’exposition Brunier-Mestas), le Centre
d’Art Contemporain réoriente ses activités futures.
Une direction unique sous la houlette administrative de Jocelyne Urban et artistique de
Catherine Soria regroupe désormais les trois
structures déjà présentes dans le Pôle Arts Visuels:
le Centre d’Art Contemporain, l’Artothèque de
Miramas et l’Adapp (1). Avec un budget semble-til identique (mais on n’a pas jugé bon de nous en
communiquer le détail malgré notre demande claire
de précisions !), il s’agit «…de mutualiser les
moyens des trois structures en conservant les
missions et l’identité de chacun. La programmation
doit donner envie au public, avec un vrai travail
autour des œuvres» indique Catherine Soria. D’où
l’importance donnée à la médiation : une partie du
personnel de l’Adapp bascule vers l’art contemporain pour «un travail plus pointu» tandis que
l’association se consacrera aux actions vers les
publics amateurs et le patrimoine.
Expositions et aide à la production d’artistes locaux
et plus réputés, en émergence, échanges
nationaux, internationaux, mise en réseau avec
Weebles ( 2010) de Laurent Perbos,
exposition Tout l'univers jusqu'au 13 novembre
au CAC d'Istres © Claude Lorin
d’autres structures d’art contemporain, développement de partenariats pour «ne pas être seulement
programmateur, mais articuler de la pensée avec une
politique artistique», telles sont les ambitions de
la nouvelle directrice.
Un modèle de programmation annuelle est envisagé selon le fil rouge d’une thématique : mise en
bouche en début d’année avec une exposition
introductive, puis une monographique, un temps
fort en milieu de calendrier, deux expos monographiques pour finir. Pour 2011, Les Réalités de la
Fiction inaugurent cette nouvelle démarche avec
dans l’ordre : Les 4 temps de la fiction, Bruno
Peinado, Images Transversales (art et cinéma),
Nicolas Pincemin, Lilian Bourgeat.
Le regroupement du pôle arts visuels en un seul
bâtiment sur le site du Centre Éducatif et Culturel
d’Istres a été évoqué plusieurs fois, en particulier
par Jean Hetsch, vice-président de Ouest-Provence,
délégué aux affaires culturelles, lors du vernissage
de Michel Stéfanini le 24 juin, ou dans le journal du
SAN Ouest Provence de septembre. Depuis sa
création en 1993 et divers changements de
directions, le CAC d’Istres n’a pu prendre totalement
sa place dans le paysage de l’art contemporain
régional. L’opportunité est-elle offerte avec ce
recentrage du Pôle Arts Visuels ?
CLAUDE LORIN
(1) Association intercommunale
pour le développement des arts plastiques
et du patrimoine
Var des deux rives
Les Rencontres artistiques
méditerranéennes font entendre
la parole des artistes et acteurs
culturels étrangers
Maroc, Italie, Espagne, Tunisie, Italie, Palestine,
Albanie, Liban : les Rencontres organisées par le
conseil général du Var ouvrent une fenêtre sur d’autres
cultures, entrecroisant paroles, témoignages et
créations.
Trop rarement présent en France, Roger Assaf a
offert deux temps forts : le premier comme auteur,
comédien et metteur en scène du monologue La
Ville aux miroirs qui fit regretter aux spectateurs la
configuration peu propice du Crep des Lices… Un
souhait entendu par le conseil général qui rappela
ses objectifs : «éveiller la conscience des diffuseurs
varois, leur faire découvrir d’autres propositions, bref,
être le passeur entre artistes, publics et structures»… Le second comme directeur du théâtre Le
Tournesol à Beyrouth et rédacteur d’une Encyclopédie universelle du théâtre en langue arabe dont il
prépare le 4e volume. Dès les premières minutes, il
donna le ton : «Vous continuez à faire du théâtre ?
c’est du militantisme !» Un dialogue s’instaura autour des conditions de travail des artistes au Liban,
de la transmission orale, de l’écriture contemporaine. De ses matériaux de création (la mémoire
contemporaine et la réalité vécue), de ses interrogations («comment faire du théâtre qui rassemble
dans une société totalement divisée ?»), de
l’absence de subventions («personne n’a de salaire
au Tournesol, les seuls à avoir des rentrées d’argent
travaillent à la télévision») et de ce qui fait leur
force : rassembler autour du théâtre toutes les
confessions.
À la librairie d’images Contrebandes, la lecture
d’Éric Valentin entraîna à Tanger, la ville du conteur
Mohamed Mrabet avec lequel il travaille à la
retranscription de ses «Dits». En quelques pages
extraites du recueil de textes et de peintures Le
Poisson conteur (Le Bec en l’Air éditions), il donna
corps aux mots dits par Mrabet, inspiré par les
expressions de son visage et le mouvement de ses
mains. Peu après, les places de Toulon s’animèrent
à la faveur d’artistes espagnols : le clown muet
Léandre Ribera qui n’hésita pas à faire entrer dans
son jeu les spectateurs hilares, la Cie Kamchàtka
dont les silhouettes grisâtres intriguèrent autant
que leurs valises rétro… Et Andrès Marin, l’une des
grandes figures du flamenco contemporain, qui
clôtura les festivités à l’Hôtel du Département.
Espérons donc qu’en 2011 les Rencontres sortent
enfin de leur confidentialité professionnelle, pour
figurer en bonne place dans l’agenda culturel du
public.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Les 4e Rencontres se sont déroulées
du 1er au 6 oct dans 10 lieux à Toulon
www.var.fr
HORS-LA-LOI
POLITIQUE CULTURELLE
07
Chez nous
Le site de La Ligue du Sud, qui demande à ses
adhérents 100 euros pour que Marseille ne devienne
pas terre d’Islam, appelait à manifester contre un
«film anti-français financé par l’État Français». Il
faut aller faire un tour sur ces sites : celui du
Chardon Varois glace le sang, dessine les Arabes
comme des animaux sans visage, en appelle à la
libération de la France par… Charles Martel ! Quant
aux Petits échos d’Oran, il écrit : les gauches
extrêmes, le Parti communiste, les socialistes à la
Mennucci, la Ldh, la Licra, le Mrap, toutes celles qui
vomissent la France, veulent faire un État soumis à
la charia, repentant et humilié...
Patrick Mennucci, venu promouvoir le film en partie
© A.G
Il est peu fréquent d’être accueilli au cinéma par des cordons de policiers et des cris haineux.
C’est pourtant dans ces conditions que le dernier film de Rachid Bouchareb
a été projeté à Marseille en avant-première au Pathé Madeleine, le 20 septembre
subventionné par la Région PACA, fut donc ce soirlà traité de collabo. Mot lourd de sens… les
Algériens sont-ils des nazis ? Comment l’extrême
droite française compte-t-elle faire oublier que les
miliciens se recrutaient dans ses rangs ?
Résultat des appels Internet : quelques manifestants empêchèrent le public de passer, bousculèrent
les journalistes malgré les cordons de police,
hurlèrent des horreurs à l’encontre d’un Harki venu
voir le film «pour savoir», scandèrent des insultes
à l’encontre des quelques contre-manifestants…
dont un «rentre chez toi» insistant à la face d’un
français musulman désemparé de tant de bêtise.
Peu de mal, direz-vous ? Sans doute, si ces réac-
tions nauséabondes n’entraînaient avec elles celles
d’une droite a priori respectable et qui, pour ménager un électorat d’anciens rapatriés et de nouveaux
xénophobes, en appelle à la censure, confond
mémoire et histoire, et continue de nier les faits les
plus établis. Et le droit des Algériens, des Français
musulmans, des autres aussi, d’aller regarder de
près cette histoire, qui est la nôtre, et dont
l’examen seul pourra enfin permettre de bâtir une
maison commune. (Voir le point de vue de notre
historien p 76).
AGNÈS FRESCHEL
Fresque pour mémoire
Si Indigènes mettait en scène les colonisés défendant en 43 une marâtre-patrie
qui n’était pas la leur, Hors-la-loi, deuxième volet d’une trilogie annoncée,
présente l’avènement d’une nation indépendante dans la douleur et la violence
à travers le destin tragique d’une famille algérienne.
L’expropriation par les colons dans les années 30 et les massacres de Sétif en
45 constituent les traumatismes initiaux qui poussent trois frères à l’émigration
et les placent chacun à leur façon hors d’une loi injuste.
L’essentiel du film se déroule entre 1950 et 1960 dans le Paris des usines
Renault, du couvre-feu pour les Algériens, de
l’immense bidonville de Nanterre superbement
photographié. Dans la continuité de la Résistance,
le Paris des porteurs de valises, des faux papiers, du
terrorisme, de sa répression. Le Paris d’un FLN
clandestin aux collusions mafieuses s’imposant par
le meurtre de ses concurrents politiques. Dans un
registre différent, Les Sacrifiés de Touita proposait
une même lecture sans concession de la période
(Zib. 25). Reconstitution historique à grands
moyens, revendiquant les influences du cinéma
américain -Coppola et Scorcese ne sont pas loin,
convoquant les ombres de Melville en citation
feutrée : Bouchareb ne signe pas ici un chefd’œuvre cinématographique mais une fresque
populaire, parfois pesante, servie avec talent par
Djamel Debbouze, Roschdy Zem, Sami Bouajila.
Elle image enfin, dans la mémoire collective, cette
«sale guerre» qui appartient à l’histoire commune
des deux pays.
ÉLISE PADOVANI
Hors-la-loi
de Rachid Bouchareb
Abondance de mots…
Plus de 50 propositions artistiques et
contemporaines en 2 semaines, des
partenaires et des lieux divers ; quelques faiblesses comme la lecture de
Pierre Alféri pour France Culture et une
surprise : un pompier à la Ionesco
dans les escaliers de Montévidéo ! Pour
le moins généreuse, l’édition 2010
d’Actoral s’est révélée «prolifique et
hétérogène» comme le prophétisait
Christophe Fiat dans son amicale
contribution au dépliant constellé de
petites planètes programmatiques ;
vertige assuré et puisque Hubert Colas
invite au partage de la métaphore («il
y a des chemins qui unissent....»), il est
permis de souffler un peu et de regarder en arrière, le nez au vent.
Sollicité à plein, requis dans son
attention la plus vigilante, le public
n’a pas faibli depuis Zone Éducation
Prioritaire de Sonia Chiambretto. De
sa mise en espace avec l’Erac il n’y a
pas grand chose à dire, sinon qu’on y
trouve la «manière» heureuse de notre
auteur (Actes Sud Papiers, voir Zib’27) :
langage syncopé, disparition du sujet
au profit de la parole chorale, présence du tragique quotidien ; mais
aussi un durcissement systématique
du sens : adolescents enfermés dans
l’espace de leur origine, cour de
récréation où résonnent les échos de
la guerre... trop didactique ?
L’impression est paradoxalement similaire avec les Sysiphes et Zombies
traversant le Kaïros d’Oskar Gomez
Mata : drôlerie audacieuse des situations, langage dramatique déconstruit,
jeux avec l’ici et le maintenant, ralentissements intempestifs ne réussissent
pas à convoquer sur la scène du Gymnase le dieu des instants propices (le
Kaïros du titre) censé triompher de la
voracité de Chronos ; au mieux quelques temps morts... petite victoire !
Plus excitantes, et au fond assez voisines dans leur interaction avec le
public, les propositions de Marseille
Objectif Danse : Batterie de David
Wampach et While We Were Holding It
Together d’Ivana Müller brisent délicieusement toute résistance intellectuelle.
L’un propose une performance nerveuse
de pile épileptique où désarticulation
et tremblement, secousses musculaires sur chocs de grosse caisse,
mousse à raser en guise de dentelles
disent l’homme en volaille à vif ou
plus sûrement en ange déplumé !
Radical ! L’autre organise un tableau
«vivant» parfaitement immobile (nerfs
et muscles dans leur volonté de fer)
qui laisse circuler une parole atone
Spiro Scimone © Gianni Fiorito
non adressée («j’imagine que..»),comme
une pensée à soi-même, qui déclenche
chez celui qui regarde un afflux d’images éphémères, souvent drôles, qui ne
se fixent pas et dansent dans la tête ;
subtil et émouvant ; quand les premiers signes d’épuisement de la posture
apparaissent sur scène, c’est fou comme le spectateur est content d’avoir
mal partout !
Du discours mouvant, du risque de
l’interprétation, et de l’engagement de
celui qui écoute, il est aussi question
avec la mise en lecture pétillante,
dirigée par Galin Stoev, de Danse
«Delhi» d’Ivan Viripaev, sept pièces
brèves qui jouent avec humour d’une
même situation dont tous les personnages explorent les possibles
dramaturgiques ; virtuosité, rêverie et
tendresse portées par des lecteurs
assis qui font valser les pupitres.
Enfin, plus rassurants dans la simplicité de leur forme, les 2 pièces et
le film de Spiro Scimone émeuvent
par leur profonde humanité, leur
attention aux frémissements des êtres
fragiles (Nunzio incarné par le déchirant Francesco Sframeli) ou la mise en
œuvre d’une langue qui fait mouche
entre surréalité et remontée d’une
tradition aigre-douce de Beckett à
Raymond Devos (Pali avec ses clochards
sublimes perchés au dessus du monde
fait en permanence rire et pleurer).
Abondance de mots peut donc ne pas
nuire tout à fait !
MARIE-JO DHÔ
Actoral 2010 s’est déroulé
dans divers lieux de Marseille
entre le 25 sept et le 13 oct
La
fin de Montevideo ?
La commission de sécurité a permis à Hubert Colas d’aller jusqu’au bout
d’ActOral, mais sous surveillance filtrée… Le soir de l’ouverture, les
spectateurs étaient comptés, retenus à l’entrée. Plus grave : Montévidéo
ferme dès le 15 oct, pour cause de sécurité. Il faut faire des travaux, il y en
a pour 300 000 euros. Montévidéo ne les a pas. Désespère. Réunit quelques
sous, implore des rallonges de subventions. Est-ce qu’un des lieux les plus
inventifs et vivants de Marseille, qui abrite Actoral, mais aussi le GRIM et
la cie Diphtong, va devoir fermer ses portes parce qu’il n’a jamais eu l’argent
nécessaire pour se mettre aux normes (logiques !) de sécurité ? Après la
belle réussite d’ActOral, chacun attend impatiemment la réouverture… nous
y reviendrons, en vous rendant compte des derniers spectacles (ceux qui ont
lieu pendant qu’on imprime…), en vous annonçant que le Livre de Jan,
d’Hubert Colas, passe bientôt au Gymnase… aux murs décidément
accueillants !
A.F.
10
SAISONS
Les saisons
avignonnaises
débutent
traditionnellement
un peu plus
tard… C’est qu’il
faut du temps
pour se remettre
du Festival !
AVIGNON
Avignon :
à fond
les saisons !
lectures jouées de Contes à croquer une
fois par mois, trois débats Croq’philo, des
rencontres d’improvisation des Kamikaz
et des résidences de compagnies de la
région. La Cie permanente avignonnaise
On est pas là pour se faire engueuler
présentera du 2 au 5/2 une étape performative de sa nouvelle création Tout au
bord, «un mariage entre technologie et
ancrage terrestre.» Le théâtre du Kronope, en résidence permanente, créera Le
Songe d’une nuit d’été le 12/4 pour le
Festival Festo Pitcho. Anaïs Richetta et
Loïc Beauché relèveront le challenge
d’interpréter 27 personnages. Joëlle Richetta montera une Carmen inspirée de
Mérimée, sans masques (la marque de fabrique du Kronope) mais moult chevelures.
Rendez-vous le 31/3 et 1/4 pour la
découvrir.
Les Vauclusiens sont à l’honneur cette
fin d’année sur la scène belge du Théâtre
des Doms. Excessifs dans C’est l’enfer (!)
les 15 et 16/10 (voir page 19) et généreux avec Little Wendy and my family
group au profit d’Amnesty International
le 22/10. Le circassien Kenzo Tokuoka
revient en solo le 25/11 dans DS You can
never be absolutely still, une étape de
travail de son exploration du langage
monocycliste. Les 26 et 27/11, en collaboration avec l’Ajmi et le cinéma
Utopia, sous l’égide de Sud Culture aura
lieu le Forum des Contre-Cultures, une
alternative de réflexion au Forum d’Avignon lancé par le Ministère de la Culture
depuis 2008. Conférences, ateliers, film,
spectacle proposeront d’autres pistes de
réflexion sur la dimension économique
de la culture. Et pour finir 2010, soirée
Double Jazz entre les Doms et l’Ajmi le
17/12, avec le Trio Grande / Quatre.
Carnet de voyage en forêt enchantée © Delphine Michelangeli
Au Théâtre du Chêne Noir, l’infatigable
Gérard Gélas crée deux spectacles cette
saison : Mais n’te promène donc pas toute
nue de Georges Feydeau du 18/11 au
5/12 et Bibi ou les mémoires d’un singe
savant du 8 au 12/4. Dans ce dernier,
Cyril Lecomte adapte et interprète le
texte de Henri-Frédéric Blanc, auteur
marseillais anarchiste à la plume lyrique
et engagée. Entre temps, deux rendezvous mensuels à suivre. Deux concerts et
pas des moindres : littéraire avec Stéphan Eicher et Philippe Djian le 15/10,
argentin avec le Cuarteto Cedron les 4
et 5/11. Des Conférences sous le Chêne
avec Abd Al Malik le 11/11 (voir p.19),
Les derniers jours de Stefan Zweig par
Laurent Seksik le 20/1, qui adaptera le
roman pour une création signée Gélas
d’ici deux ans, et l’Esprit de l’athéïsme par
André Comte-Sponville le 3/2. Deux
spectacles jeune public : Éby et le mangeur de contes de Laurent Montel mis
en scène par Sarah Gabrielle le 8/12 et
Les Précieuses Ridicules le 10/2. Le moliérisé Jean-Paul Farré revient avec Les
Douze pianos d’Hercule et son univers poético-burlesque du 9 au 10/12. Brigitte
Mounier nous étonnera dans Road Movie
à bicyclette les 27 et 28/1. Le Théâtre des
Capucins et Marc Olinger dévoileront l’intimité de deux hommes de pouvoir avec
la reprise du best seller théâtral Le Souper,
de J.-C. Brisville, du 10 au 12/3.
À la Fabrik’théâtre, interdite de concerts amplifiés (une opportunité en moins
pour assister à des concerts proches du
centre ville), on continue de s’occuper
du public jeune (mais pas uniquement)
et d’accueillir la scène émergente. Une
Fabrik’ qui se veut «école du spectateur»,
entre ateliers théâtre hebdomadaires,
Hormis les Lundis au Soleil à suivre désormais mensuellement (1re rencontre le
18/10 avec Claudio Stellato), le CDC
des Hivernales a fixé son rendez-vous
d’hiver du 24/2 au 5/3. Le Festival de
danse aura pour thème les Amériques et
accueillera Trisha Brown Dance Company,
Jonah Bokaer (New York), Lia Rodriguez
(Rio de Janeiro), Hafiz Dhaou, Johanne
Saunier, Radhouane El Meddeb, Cédric
Andrieux, Josette Baïz et la cie Grenade.
Un temps fort essentiel à la danse en
Vaucluse… de même que toute l’activité
annuelle du CDC.
Alain Timar livrera sa création annuelle
au Théâtre des Halles du 25 au 29 mai :
Les Quatuors heureux d’Olivier Coyette,
une fable polyphonique en 20 tableaux
pour 4 acteurs et 30 personnages. Avant
cela, de nombreux rendez-vous théâtraux
et des auteurs-interprètes talentueux à
(re)découvrir : la Cie In Situ les 14 et
15/10 dans Occident, (voir p.19) et du 4
au 7/11 Howard Barker avec La Douxième bataille d’Isonzo (voir p.19) ;
bouffée d’oxygène avec le marseillais
Christian Mazzuchini qui sera les 9 et
10/12 le Mythomane de Serge Valletti ;
David Lescot, Molière de la Révélation
théâtrale 2009, racontera ses souvenirs
d’enfance communiste du 19 au 21/1
dans La Commission centrale de l’enfance,
en partenariat avec la Scène Nationale
de Cavaillon ; du 4 au 6/1, place au poème
dramatique Dans le jardin de mon père de
et par Claude Guerre. Pendant le Festival Festo Pitcho, le Jeune Public sera
gâté, l’auteur s’appelle Wajdi Mouawad,
avec Pacamambo, les 12 et 13/4, sous la
houlette de Marie Provence. Pour finir
côté théâtre, le plateau des Halles accueillera les 17 et 18/6 le travail d’écriture
que François Cervantes, auteur actuellement en résidence au Conservatoire
d’Avignon, mène avec les élèves du département théâtre. L’année sera également
musicale avec un Récital de Jacques
Bertin le 16/12 suivi par Et toi tu marcheras dans le soleil (autour d’Arthur et
Isabelle Rimbaud) le 17 par Isabelle
Bloch-Delahaie. Jean-Yves Picq ponctuera la saison avec 3 lectures mises en
musique : le 14 /1 Voïces ou le Retour
d’Ulysse avec Alain Bert, le 18/2 Les
Effrayants avec le batteur Guigou Chenevier et le 10/3 Franz avec Fred Giuliani
au sampler. Le 7 mai, un concert inédit
l’Amour, la prière, associant les pages
sacrées de Liszt et Messiaen.
En dehors des spectacles qu’ils recommandent à leurs adhérents à Cavaillon ou
ailleurs, les ATP d’Avignon ont programmé 8 spectacles à découvrir à la Salle
Benoit XII, dont 4 créations : Extinction
de Thomas Bernhard par le Théâtre de
la Madeleine (le 9/11), Encore une heure
si courte par le Théâtre du Mouvement
(le 15/3) absolument recommandé, Les
Yeux d’Anna de Luc Tartar par la cie
Théâtre Temps (le 30/3) et Le Horla de
Maupassant par la Cie des Dramaticules
(le 14/4).
Pas moins de 100 représentations prévues à l’Auditorium de Vaucluse (au
Thor). Pour Michel Fuillet, vice-président
du conseil général de Vaucluse, «l’Auditorium prouve qu’on peut avoir une salle
culturelle en dehors des grandes agglomérations». La programmation est populaire
(facile ?) mais réserve aussi quelques
surprises de qualité : 13 spectacles d’hu-
mour, dont Christophe Alévêque le
6/11 et le nouveau spectacle du Quatuor
le 18/3. 20 rendez-vous musicaux avec
Patrick Fiori et Dave, mais aussi le Quatuor Calienté le 13/11, The Glenn
Miller Memorial Orchestra le 15/1,
Aïda (pour les collégiens) le 3/5. Le
cycle théâtre accueillera Annie Cordy le
21/11 et Gérard Jugnot le 16/3, Guy
Bedos et Macha Meril dans Le Voyage de
Victor le 5/2, Alice Belaïdi le 12/4 qui
terminera la tournée de Confidences à
Allah et Jean Piat le 28/5 dans un texte
signé par son épouse Françoise Dorin.
Parmi les 6 propositions chorégraphiques, la Belle au Bois dormant par le
Ballet de l’opéra de Kiev le 10/2 et
Cendrillon par le Ballet de l’Opéra d’Avignon le 27/3. Car les 10 spectacles Jeune
Public prouvent l’attention particulière
portée aux jeunes spectateurs (22 000
places déjà réservées) qui pourront vois
la Flûte Enchantée, Peter Pan, Cendrillon.
L’Eveil Artistique des Jeunes Publics,
toujours nomade, a quant à lui programmé 3 spectacles pour ce dernier trimestre.
Carnet de Voyage en forêt enchantée du
23 au 26 oct, une féérie déambulatoire
au Théâtre Golovine (par la cie avignonnaise les Eponymes). La chapelle des
Pénitents Blancs accueillera Boby Boy,
inspiré par l’univers musical de Boby Lapointe, les 5 et 6/12 et Voyage d’un
courant d’air les 8 et 9/12.
DELPHINE MICHELANGELI
Théâtre des Doms - 04 90 14 07 99 www.lesdoms.be
Théâtre du Chêne Noir 04 90 82 40 57 - www.chenenoir.fr
La Fabrik’théâtre - 04 90 86 47 81 www.fabriktheatre.fr
CDC les Hivernales - 04 90 82 33 12 www.hivernales-avignon.com
Théâtres des Halles - 04 90 85 52 57
– www.theatredeshalles.com
ATP d’Avignon - Bureau du Festival 04
90 27 66 50
Auditorium du Thor - 04 90 33 97 32
- www.auditoriumdevaucluse.com
Éveil Artistique - 04 90 85 59 55 www.festivaltheatrenfants.com
Précision et erratum
Dans l’article sur le OFF d’Avignon, paru dans Zibeline 33, les chiffres de location,
estimatifs, étaient communiqués par l’association AF&C, et n’engageaient pas les
théâtres cités.
Contrairement à ce que nous avons indiqué suite aux informations communiquées
par l’AF&C, le Balcon travaille uniquement en co-réalisation et n’effectue plus de
contrat de location depuis deux ans.
12
THÉÂTRE
CRIÉE | VITEZ | JEU DE PAUME | POURRIÈRES | PRÉAVIS
Cascade glacée
Le roman écrit par Vesaas en 1963,
mais traduit en Français 30 ans après,
a ses fans absolus. Ceux qui l’ont
découvert ados, et se sont perdus
dans ses ambiguïtés irrésolues, ses
délicatesses qui tournent autour du dit,
ses secrets qui ne se dévoilent jamais,
même entre les lignes… L’adaptation
dramatique de Joël Jouanneau a su
préserver à la fois les non-dits,
magnifier la dureté colorée des
ambiances glacées, la froideur
affolante des étreintes, et établir une
progression dramatique faite de
cercleS concentriques qui conduisent
mine de rien vers le point névralgique
de l’histoire, fui aussitôt qu’atteint… La
mise en scène de Stéphanie Loïk
repose également sur des principes
appuyés : les petites filles Siss et Unn
sont évoquées par deux acrobates
gémellaires, danseuses de corde
verticale,
suspendues
comme
colorés du mortel Palais de Glace. Cela
reste statique pourtant, une fois ces
éléments intelligemment posés. Peutêtre aurait-il fallu, tandis que l’intrigue
progresse, concevoir une évolution des
principes scéniques ?
A.F.
Palais de Glace a été créé le 8 oct
Jusqu’au 16 oct
La Criée, Marseille 7e
04 91 54 70 54
www.theatre-lacriee.com
Atelier de critique
© Agnès Mellon
l’enfance, troublantes dans leur
proximité sensuelle. Siss adulte est
une jeune voix qui crie et lève droit les
bras au ciel, parcourant en rectilignes
le pourtour de la scène, répondant à
une femme assise au centre, la tante
qui sait, ou ne sait pas, le mot de
l’histoire. C’est beau, carré et glacé,
simple comme les ombres d’arbres
nus projetés au sol, les prismes
le 16 oct de 10h à 13h
avec Agnès Freschel
Atelier ouvert à tous les spectateurs
ayant vu Palais de glace
Inscription indispensable
04 96 17 80 30
En toute complicité
Ce serait trop long de t’expliquer... © Philippe Houssin
Trois compères, compagnons des grands chemins
du théâtre, désiraient monter une pièce de Hanokh
Levin, dramaturge israélien. Une pièce drôle et
violente qui met face à face Hoyamer, vieil homme
qui veut s’offrir une putain pour son anniversaire et la
prostituée Kokotska qui ne brade pas ses services.
Le fils, Hoyamal, enrage de voir son maigre héritage
s’envoler. Ça se complique quand le père n’arrive pas
à bander et que Kokotska ne veut pas rembourser.
Le fils, alors, demande à remplacer le père, mais elle
refuse. C’est sordide. Mais voilà que les 3 comédiens
se voient refuser l’autorisation de monter le texte.
N’écoutant que leur envie de jouer, ils décident de
faire 3 scènes «à la muette» et de proposer un
montage de textes contemporains autour. Cela
donne un spectacle original, plein d’humour où le
quatrième, le troisième et tous les murs autour du jeu
explosent, où les comédiens sont autant des
personnes que des personnages. Le jeu et la réalité
se confondent, et le théâtre devient une vraie
rencontre avec ces baroudeurs de la scène. Ils le
disent d’ailleurs : «Pour un acteur, jouer c’est vivre.»
Les scènes drôles s’enchaînent, on entend de vrais
textes (de Pommerat à Salvayre ou Tarkos), les
spectateurs attablés entrent en jeu… L’ambiance est
bon enfant, les comédiens servent à boire et
proposent des chips, comme à la maison. Ambiance
détendue garantie !
CHRIS BOURGUE
La Putain de l’Ohio n’a pas été joué - Ce serait trop
long à t’expliquer...
le mieux c’est que tu viennes a été conçu par Haïm
Menahem,
avec Philippe Séjourné et Christian Mazzuchini et
joué à La Minoterie
du 5 au 9 oct
Il sera joué au Théâtre Vitez, Aix,
le 20 oct
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
L’attirance des contraires
L’argument est manichéen en diable. Tout les oppose
culturellement : elle lit Schopenhauer, il lit Mickey.
Vont-il pouvoir s’aimer, construire quelque chose
ensemble ?... Les classes socio-culturelles
instaureraient-elles des interdits encore plus forts que
ceux des Capulet et des Montaigu ? Ce n’est guère
original, soit. Pourtant, l’adaptation du roman à
succès de Katarina Mazetti, Le mec de la tombe d’à
côté, par Alain Ganas nous entraîne dans un moment
fort réjouissant. Le texte est plein d’humour, bien
écrit, la mise en scène de Panchika Velez
intelligente et efficace. Le décor sobre et minimal
laisse une belle liberté ; le banc de cimetière se
transforme en lit ; un fauteuil situé d’un côté, une
table et deux chaises de l’autre permettent
d’identifier les maisons des protagonistes. Il y a une
tension de tango dans cette histoire, ils se détestent
avant de se connaître, se cherchent, s’évitent, se
trouvent, se séparent, essaient de renouer un lien…
La rencontre vouerait toute ébauche romanesque au
désastre, puisqu’elle se déroule dans un cimetière.
Elle vient sur la tombe de son mari, qui était
biologiste, cultivé, fin, écolo, responsable ; lui, il rend
visite à la tombe de sa mère. La première tombe est
nue, la seconde surchargée de fleurs, de citations.
Elle le trouve rustre, il la trouve fade, une «crevette»
«beigeasse»… On rit beaucoup en voyant cette pièce,
les acteurs, Sophie Broustal et Marc Fayet, sont
drôles, mais plus encore rendent leurs personnages
crédibles et touchants. Une belle réussite !
MARYVONNE COLOMBANI
© Cosimo Mirco Magliocca
Le mec de la tombe d’à côté a été donné au Jeu de
Paume, Aix, du 5 au 10 oct
Augustin d’Hippone
né et mort dans un territoire qui se
situe en Algérie actuelle.
La première partie, l’enfance et la
jeunesse, énumération des tentations,
des péchés, pèse, malgré les qualités
du lecteur, mais les deuxième et
troisième parties ont plus d’allant :
verve du récit d’anecdotes, comme
celle d’Alipus et les gladiateurs, ou
émotion poignante de l’évocation de la
mort de sa mère, réflexions sur le
temps, la mémoire «qui garde l’objet
perdu pour les yeux», et qui «retient
l’oubli»… la recherche d’un sens, sous
l’égide d’un Dieu qui «étend le ciel
comme une peau». Chaque livre se
referme sur un chant composé par Kay
Fender pour la représentation comme
une enluminure musicale. La mise en
scène de Marik Frigère permet
d’en)tendre simplement un texte
auquel il est impossible d’adhérer, en
particulier quant à sa vision de la
femme… mais dont le cheminement
qui s’offre à nous permet d’étreindre
une pensée essentielle à la compréhension de notre fondement culturel.
Il faut être doté d’un sacré culot pour
mettre en scène une œuvre aussi
ardue que les Mémoires de Saint
Augustin ! C’est que Francescu
Raffaelli a grandi avec, à son chevet, la
belle formule «avance sur ta route parce
qu’elle n’existe que parce que tu marches»… Il se livre ici au périlleux
exercice de la lecture d’une œuvre
souvent austère. Voix bien placée,
surmontant la difficulté liée à l’acoustique d’une église qui a tendance à
brouiller les sons, par une diction
ample et posée même lorsqu’elle
donne l’impression de la hâte. Une
belle présence jusqu’au cœur des
silences, dans une djellaba bleu roi,
rappel des origines de Saint Augustin,
M.C.
© X-D.R
Les confessions ont été données
en l’église de Pourrières, les 18 et 19
septembre, à voir aussi à l’Abbaye
Saint-Victor le 17 octobre
Le sens du désordre
Pour sa quatrième édition Préavis de
désordre urbain a connu un beau
succès, et quelques couacs. La
manifestation interventionniste a des
progrès politiques à faire, et braquer un
bureau de poste sans prévenir, même
déguisé en Père noël et avec une
mitraillette très en plastique, ou
bloquer la circulation des trams en
agitant au nez des chauffeurs une
muleta au centre d’un carrefour très
emprunté, n’est pas très malin : s’il faut
transgresser l’ordre urbain, ce n’est
pas en violentant le quotidien des
habitants les plus fragiles, mais en
étonnant leur regard.
Mais ne doutons pas qu’ils y
parviendront ; à la Friche le premier
jour, puis accueillis en urgence par la
mairie du 1er secteur qui a pris le soin
de baliser le terrain, ou par les
Bernardines, qui savent y faire dans la
gestion du public, Préavis de
désordre urbain a donné à voir des
talents : ceux, poétiques, qui font
sécher des poissons sur un fil, d’autres
qui font de la plongée dans une
poubelle, qui mesurent le sol et la
longueurs des pas, qui vous entrainent
dans des flux de foule imaginaires.
Dans un salon de coiffure pour
cheveux africains, Eva Doumbia nous
parle de la condition de métis à travers
la mise en scène de sa coiffure
naturelle, non défrisée, et de la
difficulté d’assumer, enfant, sa tête
crépue, pour le rejet qu’elle suscitait.
À cette performance/transformation
en
blonde
platine
ou
sculptée/naturelle, inenvisageable
hors du salon de coiffure, répondait la
petite forme étrange conçue par
Carole Vanni et Alain Fourneau.
Cérémonieuse, faite de gestes codés,
d’absence de repères spatiaux réels,
d’espaces imaginaires dessinés dans
l’air, la danse à peine esquissée
exigeait qu’on s’arrête au détail, qu’on
s’y recueille, isolés des bruits de la ville.
Un ordre désurbain, en contrepoint…
A.F.
Préavis de désordre urbain s’est
tenu dans divers lieux de Marseille du
18 au 25 sept
14
THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Acteur/auteur
Énergie
Tous
Quand Agnès Regolo met en scène Hanokh Levin
en
scène
et son ironique Que d’espoir !, ça déménage ! Il faut
Après son Je ne sais quoi (voir p. 33), le Lenche
dire qu’elle s’adjoint les services musicaux du
Collectif Inouï, et fonce dans ce théâtre de l’urgence
qui manipule l’humour noir pour mieux mettre en
évidence les ressort de la domination…
enchaîne avec une création de Renaud Marie
Leblanc : le metteur en scène, dont beaucoup ont
apprécié la mise en scène de Phèdre à la Criée, est
généralement attiré par les écritures contemporaines
de Lars Nøren ou Noëlle Renaude… et est aussi
comédien. Avant de créer en décembre au Merlan
avec sa cie Didascalies and co un texte sur le sexe
de Christophe Pellet, il se met dans la peau de
l’auteur en jouant un de ces textes, autobiographique,
où le personnage Thomas Blaguernon, est un auteur
dramatique qui doit faire une conférence sur le
théâtre. Conférence qu’on ne verra pas vraiment,
mais qui donnera pourtant à entendre un discours
sur l’esprit français, l’hypocrisie bourgeoise des
institutions culturelles, tout en dessinant le portrait
d’un écrivain révolté, écorché vif, souffrant de sa vie
et du monde.
<
Que d’espoir
Du 17 au 20 nov
La Minoterie, Marseille 2e
04 91 90 07 94
www.minoterie.org
© Delphine Michelangeli
<
La pièce a reçu en 2009 le Grand Prix de littérature
dramatique.
La Conférence
Du 26 oct au 6 nov
Rencontre avec Christophe Pellet le 4 nov à l’issue de
la représentation
Théâtre de Lenche, Marseille 2e
04 91 91 52 22
www.theatredelenche.info
Renaud Marie Leblanc © Agnes Mellon
Désopilant
Le monde semble n’avoir plus aucun sens et c’est
tant mieux : moins ça va et plus la cie 4 litres 12,
poursuivant sa recherche sur le comportement
humain, opte pour l’humour corrosif et irrévérencieux
option absurde. Détraqué, conçu et mis en scène par
Michel Massé, s’interroge sur les causes et les
origines de la peur que la vie inspire à l’homme, à
l’aide d’un savant hirsute et un peu fêlé et trois
cobayes pas si soumis que ça…
© Fabrice Duhamel
La Petite est assise bien droit sur sa chaise ; elle lisse
ses jupes et parle, parle ; seule dans un lieu où ils
viendront tous, convoqués doucement par les mots
murmurés. Émouvante Edith Mérieau, qui porte loin
le monologue écrit pour elle (et ce n’est pas une
formule) par Suzanne Joubert, mis en scène par
Xavier Marchand. Il y a aussi des sacs plastiques, la
subtilité aiguisée du tragique de Supermarché et
encore André, Mariethé, Simon... Tous les autres que
le théâtre nous fait rencontrer !
Détraqué
Le 15 oct à 21h
Théâtre Toursky, Marseille 3e
0 820 300 033
www.toursky.org
Tous tant qu’ils sont
du 15 au 20 oct
Les Bernardines, Marseille 1er
04 91 24 30 40
www.theatre-bernardines.org
Fantaisie
Rufus joue les fantaisistes en reprenant, seul sur
Indépendance
Après les Pièces de mémoires, projections et scène, des textes de quelques-uns des meilleurs
Rufus joue les fantaisistes
Le 5 nov à 21h
Théâtre Toursky, Marseille 3e
0 820 300 033
www.toursky.org
Rufus © BM Palazon
Alger 62
Du 4 au 7 nov
La Minoterie, Marseille 2e
04 91 90 07 94
www.minoterie.org
d’entre eux : Fernand Reynaud, Zouc, Coluche,
Raymond Devos, Jacques Villeret, Alex Metayer,
Bernard Haller, Muriel Robin… Sans aucune parodie
il restitue l’humour de chacun, s’appropriant leurs
univers en y insufflant sa poésie, ses délires, sa
cocasserie.
<
rencontres animées par Approches culture(s) et
territoires le 22 oct (voir p 76), la Minoterie accueille
Alger 1962, une pièce de Mohamed Kacimi sur
l’Indépendance vue de Marseille. Mise en scène par
Valérie Grail, la pièce a ému, fait sourire et réfléchir
lors du dernier Festival d’Avignon…
THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Dékanté
GoldonHirsh
Véridique
Voilà que notre Argante national emprunte les traits Dans le cadre de la saison russe en Pays d’Aix, la cie
d’Ottavio, son cousin italien… Robert Hirsch incarne
le vieux bourgeois pris d’un retour de verdeur, qui a
épousé une coureuse de dot et déshérité son fils, et
sera sauvé par sa servante dévouée… Bien sûr
Goldoni a abondamment pillé Molière, qui ne se
gênait pas non plus pour emprunter aux canevas
italiens. Mais les élans de sa servante sont plus
ambigus, la verdeur de son vieillard assez défendable,
les prétentions de l’épouse pas si délirantes, et le fils
n’est pas très clair… Clémentine Célarié et Claire
Nadeau entourent le patriarche de leurs dévotions
plus ou moins sincères. En costumes bien sûr, et
décors pas si damassés.
© X-D.R
Dessin de lumière, spontanéité du dialogue
Le 26 oct à 20h30
Théâtre Vitez, Aix
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
La Serva amorosa
Du 9 au 20 nov
Le Gymnase, Marseille 1er
0 820 000 422
www.lestheatres.net
Ils viennent de Nancy mais ce n’est pas l’origine qu’ils
interrogent. Odile et Michel Massé, l’une à l’écriture
et au jeu, l’autre à la mise en scène, ont conçu un
délire poético métaphysique essentiellement
burlesque. C’est-à-dire reposant sur des interrogations primaires (dans le genre qui sommes-nous et
suis-je moi, où tout cela mène-t-il et faut-il se
demander pourquoi), celles qui ne peuvent conduire
qu’à s’esclaffer, parce que le cœur fondamental est
forcément dérisoire… Bon, partout où elles passent,
Odile Massé, sa comparse et leurs gorilles mous
déclenchent le rire. Philosophique bien sûr, mais
surtout teinté de cette Folie sans laquelle on
n’interroge rien.
Désillusions
Russie toujours, avec Endroit sec et sans eau, pièce
autobiographique d’Olga Pogodina mise en scène par
Tatiana Frolova du théâtre KnAM. Sur le thème de
l’illusion, ou des désillusions d’un peuple russe
fatigué, le texte se penche sur les relations entre un
frère incarcéré et sa sœur libre qui lui envoie ce dont
il a besoin, les croyances en une Russie omnipotente,
le régime marxiste et la démocratie… Spectacle en
russe surtitré.
Boulevard
Bernard Murat met en scène Faisons un rêve de
Sacha Guitry, avec Pierre Arditi dans le rôle du
séducteur plein d’esprit, cabot et charmeur… Une
pièce drôle, spirituelle et inventive de Guitry, dont les
trois caractères de base que sont le mari, la femme
et l’amant illustrent à merveille les jeux de la
séduction, de l’amour et du mensonge !
Endroit sec et sans eau
Le 5 nov à 20h30
Théâtre Vitez, Aix
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
Faisons un rêve
Du 21 au 23 oct à 21h
Théâtre Toursky, Marseille 3e
0 820 300 033
www.toursky.org
le 15 oct à 20h30
Théâtre de l’Olivier, Istres
04 42 56 48 48
www.scenesetcines.fr
Folisophie
Du 16 au 20 nov
Le Gyptis, Marseille 3e
04 91 11 00 91
www.theatregyptis.com
Rock
Mais oui, le rock est assez vieux pour qu’on écrive
son histoire, qu’on s’y penche sérieusement, qu’on
fasse même de son évolution un spectacle. L’Atelier
du possible tourne My GGGeneration avec un
succès qui ne se dément pas. La recette : une
véritable analyse musicologique et sociologique, une
trame dramatique, et… d’excellents musiciens
emmenés par Jean-Luc di Fraya, autour d’un
répertoire qui les décalent juste ce qu’il faut : de Bill
Haley au rock progressif, ça vous ramènera
forcément vers les sons de votre enfance…
Vivants
Coprogrammé avec les ATP d’Aix, Ensorcelés par la
mort est lui aussi un spectacle tiré d’entretiens
menés par Svetlana Alexievitch. L’écrivaine et
journaliste biélorusse a recueilli les paroles de trois
anciens membres du parti communiste d’URSS ayant
tenté de se suicider parce qu’ils croyaient à
l’avènement d’un monde meilleur, au changement
radical, à l’utopie… en vain.
Laboratoire
Reprenant à son compte l’analogie fructueuse des
<
© Bruno Vion - flag'
années 70, qui comparait la création artistique à la
recherche scientifique, les Bancs publics défendent
des formes expérimentales d’art spectaculaire (ou
non) : des projets croisés, étapes de travail, écritures
participatives qui trouvent leur «festival» tous les ans
lors des Rencontres à l’échelle.
Au programme de cette 5e édition, des auteurs
contemporains algériens particulièrement intenses :
Thierry Niang et Julie Kretshmar, Hamid Ben Mahi (le
10 nov à l’Olivier d’Istres), Geoffrey Coppini,
Kheireddine Lardjam se sont emparés des textes de
Mustafa Benfodil, Hamid Skif , Mourad Djebel et Ryad
Girod pour proposer des formes inattendues,
théâtrales et/ou dansées, projetées en diatribe…
À coté de ces écritures algériennes des projets
croisés (Emile Lesbros avec un violoniste algérien le
13 nov) et du cinéma documentaire de réalisatrices
qui parlent d’amnisties impossibles, en Syrie et en
Algérie.
Rencontres à l’échelle
Du 10 au 27 nov
Bancs Publics, Marseille 3e
04 91 64 60 00
http://bancspublics.free.fr
www.lesrencontresalechelle.com
Ensorcelés par la mort
Les 9 et 10 nov
Théâtre Vitez, Aix
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
© MC Soma
My GGGeneration
Les 21 et 22 oct
Le Gyptis, Marseille 3e
04 91 11 00 91
www.theatregyptis.com
moscovite Perspective, dans une mise en scène
d’Aliona Galkina, monte Dessin de lumière,
spontanéité du dialogue d’après La guerre n’a pas un
visage de femme de Svetlana Alexievitch, ouvrage
basé sur des témoignages de jeunes femmes
engagées volontaires dans l’Armée Rouge pendant
la seconde guerre mondiale. Spectacle en russe et
français.
<
16
THÉÂTRE 17
Nostalgique
Authentique
Une nuit d’été, dans les collines du Piémont, des jeunes Avec Joël Pommerat, le public est toujours sur le fil,
Loin derrière les collines
Les 4 et 5 nov
La Passerelle, Gap
04 92 52 52 52
www.theatre-la-passerelle.eu
bluffé par sa maîtrise stupéfiante de la lumière, de la
dramaturgie et la puissance évocatrice de son théâtre. Sa
dernière création, Cercles/Fictions n’échappe pas à cette
règle : il assemble par magie les morceaux épars d’un
puzzle (des fragments de vie), entrecroise les récits,
convoque ses propres souvenirs en une succession de
tableaux tantôt drôles, parfois rudes. On y entre sur la
pointe des pieds en voyeur d’une histoire qui nous
concerne aussi.
Cercles/Fictions
Les 15 et 16 oct
CNCDC Châteauvallon, Ollioules
04 94 22 02 02
www.chateauvallon.com
<
© Olivier Gendrin
Devant un rideau de fer, c’est ainsi que Marguerite Duras
souhaitait que l’on représente L’Amante anglaise. La Cie
Cavalcade, elle, a choisi de se concentrer exclusivement
sur le moment de l’interrogatoire de Claire Lannes
accusée d’avoir tué sa cousine Marie-Thérèse Bousquet,
sourde et muette. Une scène stupéfiante qui signe le
second mouvement du texte où la présumée coupable
est frustrée, perdue et suppliante. Pourquoi l’avez-vous
tuée ? répète inlassablement l’interrogateur lors «de ce
jour très long»… Avec une économie de moyens, Sylvia
Bruyant fait entendre l’écriture Durassienne.
femmes reviennent du bal et jouent à se faire peur, des
hommes se promènent en conversant… Rêves et réalité,
à la croisée de l’intime et de l’Histoire, se mêlent dans ce
texte d’Eugène Durif écrit en écho à l’univers de
l’écrivain turinois Cesare Pavese dont il apprécie
particulièrement «l’écriture à hauteur d’homme». Ce
monde, habité par la nostalgie et le lyrisme, a séduit le
metteur en scène italien Pietra Selva qui s’en empare à
son tour dans une distribution franco-italienne.
<
Huis clos
L’Amante anglaise
Le 16 oct
Théâtre Durance, Château-Arnoux
04 92 64 27 34
www.theatredurance.com
Désespérés
Bastian est vissé à sa webcam et Laetitia se filme en
Le chagrin des Ogres
Le 16 nov
Théâtre Durance, Château-Arnoux
04 92 64 27 34
www.theatredurance.com
Écolo
Taxe carbone, bonus, parachutes dorés, crises économiques et menaces environnementales ? Cela ressemble à
une journée banale d’un grand patron de l’industrie
pétrolière… Mais qu’adviendra-t-il lorsqu’une catastrophe
écologique en Alaska remettra en cause le système
mondial ? Prenant prétexte de l’actualité, la Cie Artefact
signe une fable écologique et explore une nouvelle hybridation des langages (texte, jeu, danse, musique, images et
sonorisation) pour nous transporter dans un Alaska
virginal dont l’homme serait le grand absent.
Alaska Forever
Le 9 nov
Théâtre Durance, Château-Arnoux
04 92 64 27 34
www.theatredurance.com
Le 20 nov
Le Carré, Sainte-Maxime
04 94 56 77 77
www.carreleongaumont.com
© Elisa Zaniro
En
miroir
D’un côté les photographies de Michel Graniou, de
l’autre les mots de Gilles Granouillet écrits à partir de
son interprétation personnelle. La pièce Un endroit où aller
se situe dans cet aller-retour aléatoire entre le travail d’un
artiste vu par un autre artiste, portrait sensible et cocasse
d’un jeune couple qui nous invite à sa table et déroule le
fil de leur rencontre, de leur histoire. Portrait en creux
d’une époque révolue dont le photographe a conservé les
traces en traquant en noir et blanc quelques objets. La
Passerelle en donne judicieusement un aperçu dans sa
galerie avec l’exposition Les âges de la mémoire (jusqu’au
23 nov).
Un endroit où aller
Les 9 et 10 nov
La Passerelle, Gap
04 92 52 52 52
www.theatre-la-passerelle.eu
© Elisabeth Carecchio
permanence. Ces deux adolescents enfermés dans leur
bulle vont bientôt cesser d’être des enfants… en se rapprochant inéluctablement de la mort. Dépassant les clichés
sur la crise adolescente et les méfaits des jeux vidéo,
Fabrice Murgia écrit une pièce juste et met en scène des
acteurs à l’interprétation troublante. Il joue avec les codes
du théâtre et de la représentation pour trouver un bel
équilibre entre monde réel et fiction et évoque, sans
jugement ni discours moralisateur, le chagrin des ogres.
Complice
Catharsis
Des mots, des signes : deux langages pour la comédienne Ces Inepties volantes sont aussi furieuses à voir qu’à
Anne de Boissy et la danseuse Géraldine Berger qui
imaginent un conte inspiré d’histoires vraies, Double moi,
mélange d’ingrédients inattendus. Ensemble elles ont
pétri leur récolte où se fondent un paquet de kleenex, des
talons aiguilles, un doudou, une bague… elles ont malaxé
leurs bouts d’enfance pour raconter finalement une seule
histoire et inventer une troisième langue. Celle de la
scène, visuellement forte, née du mélange des deux
grammaires et du plaisir du jeu.
Double moi
Le 5 nov
Le Cadran, Briançon
04 92 25 52 52
www.theatre-le-cadran.eu
entendre ! Dans cette partition à deux voix, Dieudonné
Niangouna se bat pour domestiquer la douleur sur le
rythme des chuchotements et des cris de l’accordéon de
Pascal Contet : la rage au ventre, il se lance «à bride
abattue dans le récit de trois guerres civiles qui ont mis à
feu et à sang son pays natal, le Congo-Brazzaville». Une
énergie électrique court entre ces deux hommes qui
s’accordent à faire resurgir les souvenirs. Même les plus
douloureux.
Les Inepties volantes
Le 16 nov
CNCDC Châteauvallon, Ollioules
04 94 22 02 02
www.chateauvallon.com
18
THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Décorations
Filiation
Zabou Breitman aime l’univers de l’écrivaine Lydie
Saltimbanques
Le Théâtre du Maquis rend hommage à l’Occitanie
Salvayre, dont elle adapte et met en scène La Médaille
(éd du Seuil). Un texte sans concession, drôle et mordant
sur le monde de l’entreprise, ses codes et ses dérives à
travers une grande cérémonie de remise de médailles aux
employés méritants. Entre les discours qui sentent bon
l’hypocrisie et ceux qui font bomber le torse, des petits
désordres imprévus vont venir coincer la machine si bien
huilée…
médiévale dans un spectacle théâtral, musical et
burlesque dont ils ont le secret, avec des
troubadours, des textes contemporains qui se mêlent
à des poèmes du XIIIe, des partitions d’époque
revisitées… Dans un esprit politique, le Cabaret des
hérétiques se propose de retrouver «l’esprit de
résistance[…] des jongleurs, trobadors et trobairitz».
© Michel Sedan
La Médaille
Le 13 nov à 20h
Théâtre des Salins, Martigues
04 42 49 02 00
www.theatre-des-salins.fr
les 17 et 18 déc à 20h30
Théâtre de Grasse
04 93 40 53 00
www.theatredegrasse.com
Dada
Écrit en 1936 par Gertrude Stein, et traduit en français
par elle-même, Listen to me s’inscrit dans la continuité du
mouvement Dada -l’adaptation pour la scène avec Picabia
sera empêchée par la guerre. Emma Morin, musicienne et
comédienne, fait de ce texte inédit une traversée
acoustique et sensuelle qui joue avec les mots et leurs
sons, comme sa créatrice se jouait de l’académisme de
l’écriture. Autour du spectacle, une visite intime du musée
des Beaux-Arts de Nîmes avec Emma Morin et un
conférencier à l’issue de laquelle E. Morin donnera une
conférence-lecture sur Gertrude Stein (3 nov), et la
projection, au Carré d’art, du documentaire d’Arnaud de
Pallières, Portrait incomplet de Gertrude Stein (6 nov).
Volte
Face
... et facétie ! Oyez la bonne nouvelle : revoilà sur les
planches le trio bondissant (ildi! eldi! collectif) dont
la libre interprétation de Vice-Versa, roman
dérangeant de Will Self, trublion des Lettres
anglaises, ravit à tout coup ! Dans cet apologue
pétillant de malice et de férocité lubrique, le sort
coquin dote un viril rugbyman d’une douce béance
derrière le genou droit ; le diagnostic déclenche alors
tourbillons de fantasmes et cruelles révélations à soimême ! Swift n’est pas loin... ne laissez pas filer la
grosse blague touchée par la grâce du grinçant !
Abraham
Les 15 et 16 oct à 20h30
Théâtre de Grasse
04 93 40 53 00
www.theatredegrasse.com
Les 20 et 21 oct à 20h30
Sémaphore, Port-de-Bouc
04 42 06 39 09
www.theatre-semaphore-portdebouc.com
Le 22 oct à 20h30
Théâtre de Fos
04 42 11 01 99
www.scenesetcines.fr
Vice-Versa
les 18 et 19 nov
Théâtre des Salins, Martigues
04 42 49 02 00
www.theatre-des-salins.fr
>
Mito
!
Alain Gautré puise dans les pièces de Molière «un
>
Listen to me
Le 4 nov
Théâtre de Nîmes
04 66 36 65 10
www.theatredenimes.com
Le grand-père maternel de Michel Jonasz s’appelait
Abraham, il était juif polonais, il sera déporté. Jonasz ne l’a
pas connu, ce qui ne l’empêche pas de se promener dans
la mémoire familiale pour faire revivre cet aïeul amoureux
de sa Rose, père de sept enfants, épicier qui devient
cantor dans les synagogues… À cette évocation sensible,
le chanteur-auteur-comédien mêle des histoires juives à
l’humour savoureux ainsi qu’un hommage à la musique
tzigane qui a bercé son enfance.
réconfort quasi-philosophique» ; sa mise en scène du
Malade imaginaire conserve l’aspect délirant et rieur de
cette comédie-ballet, notamment les intermèdes et la
partie chantée du deuxième acte, avec un réajustement
actuel pour les parties dansées et chantées qui lorgnent
du côté du rap, du funk, de la soul music et du raï. Argan,
de doux dingue «devient un vrai clown, agissant comme un
enfant pour oublier qu’il est adulte.» Étonnamment
contemporain !
© Bellamy
Le Malade imaginaire
Le 14 oct à 20h30
Théâtre la Colonne, Miramas
04 90 58 37 86
www.scenesetcines.fr
Universel
Fellag et Marianne Épin poursuivent leur exploration d’une Baal rock
ville continuellement aux prises avec la folie, coincée entre La mise en scène de François Orsoni a vivifié
C’est à Alger
Les 5 et 6 nov à 20h
Théâtre de Nîmes
04 66 36 65 10
www.theatredenimes.com
Avignon cet été… Ce Brecht de jeunesse, brouillon,
parcellaire, possède une force indomptée,
magnifiquement portée par une bande de jeunes
comédiens éructant, transcendés par la juvénile et
ambiguë Clotilde Hesme… Un régal !
Baal
Les 4 et 5 nov
Théâtre d’Arles
04 90 52 51 51
www.theatre-arles.com
© Olivier Soulie
tradition et modernité. Michel, marié à Zoubida, vient
rejoindre sa femme dans sa famille, et se trouve en butte
à des mœurs et des rituels inconnus. Ce sont deux des
nombreux personnages que les comédiens incarnent
dans cette nouvelle création.
Le Cabaret des hérétiques
Le 18 nov
Théâtre Comoedia, Aubagne
04 42 18 19 88
www.aubagne.fr
en tournée dans le Pays d’Aix, à Rousset, Ventabren,
Puyloubier, Eguilles…
THÉÂTRE 19
Tourmenté
Ça soufi
Stefano Fogher et Guigou Chenevier, 2 musiciens-
Biodiversité
«Vivre, rêver, créer la ville et les paysages avec la
performers qui aiment la parole, se retrouvent avec Les
Planches du Salut et Inouï Productions pour explorer les
tourments de l’anti-dieu grâce à Dante, Hugo, Lorca,
Artaud, Shakespeare… C’est l’enfer (!), un spectacle
excessif «où les diables s’amusent certainement plus que
les pauvres anges au paradis.» Contrebasse, cor et
stratocaster se frotteront aux toupies, percussions et
autres cloches diablotines.
biodiversité» : le rendez-vous de la réflexion concertée sur
l’aménagement des territoires et de la ville
contemporaine. Experts et pouvoirs publics, aménageurs
et citoyens, chercheurs et invités sont réunis pour cette 9e
édition des Rencontres de Volubilis autour de plusieurs
exemples de réalisation et de gestion de territoires
innovants sur le plan de la biodiversité. Interventions
d’artistes, parcours poétique et naturaliste ponctueront
les Rencontres.
C’est l’enfer (!)
Les 15 et 16 oct
Les Doms, Avignon
04 90 14 07 99
www.lesdoms.eu
9e Rencontres de Volubilis
Du 17 au 20 nov
Les Halles, Avignon
04 90 85 52 57
www.theatredeshalles.com
Mémoire
Le Balcon ouvre sa saison avec trois représentations sur
Mélancolie
Le comédien Dirk Roofthooft et le compositeur Kris
le génocide des tziganes par la cie Mémoires Vives à
l’invitation de la Fondation Abbé Pierre. Samudaripen, une
pièce chorégraphique dont le thème est la persécution
séculaire des peuples nomades en Europe. Un spectacle
orchestré par le chorégraphe Michaël Stoll qui raconte le
génocide des tziganes internés par Vichy, déportés et
exterminés pendant le régime nazi. Une rencontre entre
le jazz manouche et la danse hip hop pour questionner
l’univers concentrationnaire et les systèmes de
déshumanisation.
Abd Al Malik © X-D.R.
Abd Al Malik ouvre le cycle de Conférences sous le Chêne
avec un débat à l’occasion de la sortie de son livre La
Guerre des banlieues n’aura pas lieu (Le Cherche Midi).
Un ouvrage nominé pour le prix Edgar Faure du meilleur
livre politique de l’année, dont le témoignage s’échappe
des standards de la culture hip hop et fait place à la
perspective d’une voie soufiste. Les jeunes des banlieues
d’Avignon seront-ils au rendez-vous de ce slameur pétri de
spiritualité ?
Samudaripen
Les 15 et 16 oct
Le Balcon, Avignon
04 90 85 00 80
www.theatredubalcon.org
Abd Al Malik
Le 11 novembre
Le Chêne Noir, Avignon
04 90 82 40 57
www.chenenoir.fr
Résistants
Grinçant
Philippe Hottier et Stéphanie Marc sont Il et Elle dans
Occident, une comédie noire de Rémi de Vos, mise en
scène par Dag Jeanneret. Grinçante, crue, désespérée,
atroce dans sa noirceur sans retour d’un couple en
perdition, la pièce dans laquelle «on doit pourtant rire,
sinon ça ne marche pas» réussit le pari de faire émerger le
comique derrière l’extrémisme. Créée il y a deux ans au
théâtre Sortie Ouest de Béziers par la Cie In Situ, la pièce
aborde de front, avec force, la barbarie ordinaire des
racistes décomplexés de tout poil.
© Caroline Coste
Succès du Festival 2009, le tandem Dau et Catella revient
pour jouer Sacco et Vanzetti d’Alain Guyard. Ils retracent
le scandale judiciaire des années 20, immortalisé par la
chanson Here’s to you de Joan Baez dont les victimes
furent les militants anarchistes italiens, devenus symbole
de la lutte contre l’intolérance et la discrimination, et
condamnés à la peine capitale malgré le manque de
preuves formelles. Une tragédie moderne interprétée par
un duo de choc et mis en scène par François Bourcier.
Sacco et Vanzetti
Du 21 au 23 oct
Le Chêne Noir, Avignon
04 90 82 40 57
www.chenenoir.fr
Occident
Les 14 et 15 octobre
Les Halles, Avignon
04 90 85 52 57
www.theatredeshalles.com
Visionnaire
Plongeon dans l’œuvre incandescente du dramaturge
anglais Howard Barker avec La Douxième bataille d’Isonzo
interprétée et mise en scène par un duo captivant de
complicité, Alain Cesco-Resia et Camille Carraz. Quand,
devant nos yeux, la cécité et la différence d’âge se
transforment en voyeurisme mental pour apprendre à
s’aimer. Cru et étonnant.
La Douzième bataille d’Isonzo
Du 4 au 7 novembre
Théâtre des Halles, Avignon
04 90 85 52 57
www.theatredeshalles.com
>
Defoort rendent hommage au lyrisme du poète russe
Joseph Brodsky, lauréat du prix Nobel. Une œuvre bâtie
sur la mélodie et ses assonances, autour de grands
thèmes métaphysiques : le sens de la vie, la mort, le
voyage dans le temps et l’espace, la relation entre
plénitude et néant, l’existence entre soi-même et
personne. Un dialogue d’artistes pour révéler ce que les
mots ne peuvent exprimer.
Les Concerts Brodsky
Le 15 oct
Théâtre de Cavaillon
04 90 78 64 64
www.theatredecavaillon.com
Déplacés
Retrouver Grand Magasin est toujours un bonheur.
Pour commencer sa saison de Nomades la Scène
nationale de Cavaillon envahit les villes de
Châteauneuf-de-Gadagne (le 16 nov), Mérindol
(le 18), Oppède (le 19), Morières (le 20), Les
Paluds de Noves (le 22) de sa fantaisie
combinatoire, absurde, rocambolesque et
profondément Oulipienne. À trois ils abolissent toutes
les règles de la représentation et des arts, pour
proposer un ailleurs juste à côté et sans complexe…
Les Déplacement du problème
Du 16 au 22 nov
Théâtre de Cavaillon en Nomades
04 90 78 64 64
www.theatredecavaillon.com
© X-D.R.
20
DANSE
GTP | BNM | PAVILLON NOIR
Reflets cadavériques
Denis Plassard et sa compagnie Propos créaient
au Théâtre Durance un roman musical photochorégraphique intitulé Les cadavres se regardent
dans le miroir. En première partie, l’atelier de danse
amateur Elan C présentait dans le cadre du projet
culturel Tutorat Danse la toute première création du
chorégraphe, millésime 1990, intitulée Propos : retour
à l’origine même du nom de sa compagnie. Le
dispositif Danse en amateur et répertoire est
financé par le Ministère de la Culture et a permis aux
danseuses amateurs de concrétiser le bénéfice d’un
travail avec un chorégraphe professionnel.
Ce Propos entre langage parlé et gestualité, aux
fragrances d’humour et d’autodérision, caractérise
les préoccupations esthétiques de Denis Plassard.
La création actuelle (65 mn) veut-elle développer cet
argumentaire autour du regard sur le regard du
geste? Décor : une géante maison de poupée.
D’incertains personnages teintés d’années cinquante
se strobotéléscopent et intriguent autour
d’intrigantes intrigues intriquées peuplées de nains
de jardin, de caves sépulcrales, de miroirs mutins et
mutants autour d’un quatuor à cordes jouant
Beethoven. Un jeu d’éclairage complexe, une
performance dans l’immobilisme des danseurs en
butte à un butô déjanté, un rien cuissenlair. Exposé
peut-être brillant d’un professeur professant la
Scories
des batailles
Germaine Acogny est magnifique. Elle a dansé au
Pavillon Noir un solo de femme Africaine qu’elle
venait de créer à la Biennale de Lyon. Une pièce en
forme de portrait, qui dit sans violence les difficultés
de la vie en Afrique, même quand on est la grande
Germaine, fille spirituelle de Béjart, célèbre depuis
40 ans (elle en a 66). Seule en scène avec quelques
objets, sa voix cassée et son corps si beau, elle
s’adresse au public, parle, bouge, instaure une
relation intime faite de reproches pourtant : Songook
Yaakaar, Affronter l’espoir, s’en prend aux
détracteurs de l’Afrique, à ceux qui prétendent qu’elle
n’est pas entrée dans l’Histoire, et qui la laissent dans
sa misère. La Dame finit par une traversée très
rythmée, pieds à plat et près du sol, les mains dans
l’eau et les pétales de rose, les yeux plantés comme
une guerrière vers une lumière inconnue….
Un autre solo de femme pour ouvrir une saison
décidément très féminine : Patrizia Lo Sciuto,
Sicilienne, livre elle aussi des bribes de sa mémoire,
en une série de tableaux reposant sur sa relation aux
objets (des poissons du marché, des papiers
coupés…) et aux sons (un violoniste bruiteur aussi
l’accompagne). Elle danse bien, entraîne en déboulés
ou en cercles, mime un bal populaire, montre
comment la danse contemporaine s’est emparée de
son corps de midinette. L’ensemble manque encore
un peu de liant… la pièce est en création !
© Christian Ganet
corruption dynamique et discursive… Mais au bout
de 45 minutes de chronophotographie
chorégraphiques, le cancre las n’a pas pu résister à
l’assoupissement en fond de glace.
YVES BERCHADSKY
Les Cadavres se regardent dans le miroir a été créé au
Théâtre durance (Château-Arnoux) le 2 oct.
Il sera repris sur la Scène Nationale de Cavaillon le
19 oct
04 90 70 64 64
www.theatredecavaillon.com
Brouiller les pistes
que comme une trace ancienne, la survivance d’un
univers perdu ou intime dont il n’est jamais
véritablement question, sauf à le regretter.
Moving Target nous parle du corps contemporain
comme d’une terre étrangère, mécanique, où les
sensations sont abolies, gouvernées par des choix
binaires, chimiques, commerciaux. Où les reflets, les
projections et les images troublent et détruisent la
présence du corps réel, lui-même démantelé,
multiplié, sursignalétisé. Des images d’une troublante
virtuosité, toujours inhumaine, tentent de circonscrire
une cible dansante qui s’enfuit entre des mots qui
défilent, des quadrilatères qui l’emprisonnent, des
menaces qui la poursuivent. En proie à une folie
schizophrène, Katharina Christl incarne l’ombre
d’un Nijinski qui s’arrache des cadres tandis que
Marion Cavaillé flotte, ombre nostalgique d’une
sensualité perdue… La musique, en partie interprétée
en direct, joue des mêmes glissements, dominée par
des scansions binaires, laissant parfois entrevoir des
souvenirs expressifs aussitôt gauchis, enfouis,
perturbés. L’ironie souvent affleure, comme la
dernière arme contre une asepsie qui gagne et
impose son ordre, impeccable et glaçant.
Le constat est rude. Mais qui le voit ?
AGNÈS FRESCHEL
© Agnès Mellon
Moving Target a été recréé
au Grand Théâtre de Provence
du 23 au 25 sept.
Il sera repris à la Criée en mai 2011
A.F.
Songook Yaakaar et La vie en scories ont été dansés
du 7 au 9 oct au terme de résidences de création
au Pavillon Noir
Germaine Acogny © Jean Barak
En reprenant avec le Ballet National la pièce qui l’avait
fait connaître en Europe, Frédéric Flamand livre
quelques clefs de son univers. Intellectuel, plastique,
contemplatif, le mouvement y est en fait incident à la
pensée. Et l’émotion, la sensualité n’y apparaissent
22
DANSE
BALLET D’EUROPE | BNM | DANSEM
Jazz et répétitif
La création
du souvenir
Le ballet d’Europe envahit l’Opéra pour une soirée, avec une création
et deux reprises
Trace avec moi © Jean-Charles Verchere
One more time est une des grandes réussites de
Jean-Charles Gil. Créée en 2005, tournée partout
depuis, reprise en particulier aux Salins l’an dernier
par de nouveaux danseurs enthousiastes et virtuoses,
la pièce repose sur le crescendo haletant de la
musique de John Adams, magnifiée par mouvements d’ensemble millimétrés, et si rapides… Tout à
l’inverse du pas de deux Trace avec moi : Jean-Charles
Gil est remonté sur les planches avec Monique
Loudières, et le duo ancien a retrouvé une complicité,
un contact et une expressivité douloureuse très
émouvants, sur les notes de Brad Mehldau et Herbie
Hancock… Jazzy sera également sa nouvelle création,
pour 10 danseurs lancés dans un espace occupé de
mobilier contemporain, et confrontés au souvenir de
Duke Ellington et Avishai Cohen…
Le ballet national propose en cette fin
d’octobre deux programmes
de créations
À l’Opéra tout d’abord, durant trois soirées, un
événement : Thierry Malandain, au style néoclassique
affirmé et assumé, vient créer pour le BNM des Nuits
d’été sur l’incomparable chef-d’œuvre de Berlioz
(hélas sur bande !). Tandis que les amoureux de la
technique classique pourront se délecter de la
précision et de l’exigence de Malandain, les fans des
images et concepts de Frédéric Flamand entreront
dans les cercles et le bestiaire étrange de ses
métamorphoses. Pour que chacun danse au mieux
de ses goûts et aptitudes, avec un Ballet qui a enfin
retrouvé un répertoire varié qu’il peut interpréter
partout !
Et qui ne cesse de croître : Frédéric Flamand propose
à ses danseurs de chorégraphier leur propre univers
mais, contrairement à d’autres, il programme ensuite
les plus marquantes de ces créations lors des
tournées. L’Ouverture d’octobre donnera l’occasion
de découvrir, entre autres, les créations des quatre
nouveaux interprètes du ballet…
A.F.
Autrement pareil. Trace avec moi. One more Time
Le 28 oct
Opéra de Marseille
04 96 13 01 12
www.balletdeurope.org
Dansem : c’est parti !
nouvelles, souvent en cours d’élaboration, d’esthétiques diverses. Que le spectateur peut ensuite
interroger, le cadre des Bernardines étant parfait pour
l’exercice.
Puis Dansem proprement dit débutera au Lenche les
13 et 14 nov, avec un solo d’Hélène Cathala intitulé
La jeune fille que la rivière n’a pas gardée, et
retournera aux Bernardines pour un cycle de la Cie
Mal Pelo du 16 au 21 nov : deux pièces et une
installation de Maria Munoz et Pep Ramis, souvent
programmés à Marseille… Et cela continuera sur ce
rythme jusqu’au 14 décembre !
Les Nuits d’été. Métamorphoses
Du 14 au 16 oct
Opéra de Marseille
Ouverture 16
Les 22 et 23 oct
Ballet National de Marseille
04 91 327 327
www.ballet-de-marseille.com
A.F.
La Jeune fille... © Sylvie Veyrunes
Dansem
Du 13 nov au 14 décembre
Marseille, Arles, Aix,
Château-Arnoux
04 91 55 68 06
www.officina.fr
www.dansem.org
Metamorphoses © Agnes Mellon
Depuis 14 ans le festival organisé par l’Officina
affirme sa singularité et monte régulièrement en
puissance, proposant ses formes méditerranéennes
dans toute la région et sur de nombreuses scènes
marseillaises. Questionnant les formes et pratiques
chorégraphiques, et plus généralement celles du
corps en (non) représentation, le festival défend aussi
l’existence de la danse contemporaine dans des pays
où le corps reste souvent tabou, difficile à exhiber,
politiquement dérangeant.
Comme l’an dernier, Dansem débute donc en
accueillant avec les Bernardines les Questions de
danse posées par Michel Kelemenis. Une occasion
particulière d’assouvir sa curiosité de formes
A.F.
24
DANSE
PAVILLON NOIR | NÎMES | OUEST PCE | CHÂTEAUARNOUX
Figuratif, ou pas
En attendant Suivront
des siècles de calme,
dernière création d’Angelin
Preljocaj avec le ballet
du Bolchoï (au GTP à partir
du 17 nov), quelques très
belles pièces à se mettre
sous la dent au Pavillon
Noir…
D’abord la reprise d’Empty Moves du
20 au 23 oct : Angelin Preljocaj a
créé deux quatuors étonnants sur la
«musique» de John Cage, Empty Words.
Des conférences en fait, mots vides
étirés, agrémentés des réactions du
publics à leur non sens si signifiant. Sur
ces suites de sons prononcés des mouvements, abstraits. Des constructions
géométriques, des combinaisons de
corps qui dansent à l’extrême, produisent des portés, des agrégats
indescriptibles. Virtuoses et coulés
sans ruptures et sans arrêts, d’une
souplesse et d’une continuité infinie.
Parfois les perturbations des spectateurs qui protestent sur la bande son
semble un instant les contaminer…
puis ils reprennent, dans leurs costumes simples, sous des lumières à
peine posées, leur mouvement continu
et imperturbable. La première partie
créée en 2004 reste très abstraite, la
seconde (2007) tisse des liens émotionnels entre les corps. Des relations.
Au final les deux parties se répondent
et forment une des plus belles pièces,
expérimentale et terriblement inventive
quant au vocabulaire chorégraphique,
de Preljocaj.
Ensuite une pièce sur James Dean,
Empty moves
© JC Carbonne
Last meadow, les 5 et 6 nov : Manuel
Gutierrez, chorégraphe américain,
veut faire danser la figure de l’acteur,
l’incarner sur scène en citant les trois
films qui ont fait sa légende. C’est une
femme qui le joue, le danse, au milieu
de deux hommes qui tour à tour évoquent les images d’À l’Est d’Eden, Giant
et La Fureur de vivre. Que reste-t-il des
figures de la mythologie américaine
quand la danse les visite ?
Enfin la création 2005 de Vladimir
Golubev, Non Solo, les 15 et 16 nov.
L’acteur danseur chanteur accordéoniste russe refuse de s’enfermer dans
un mode d’expression, touche-à-tout
avec talent, dessine son portrait en
solo (sed non solum) en revenant sur
un souvenir d’enfance loufoque… Une
courte pièce de 25 mns, pour commencer la soirée au Pavillon Noir.
AGNES FRESCHEL
Le Pavillon Noir, Aix
0811 020 111
www.preljocaj.org
La danse
est à Nîmes
Deux géants
de la danse contemporaine
se succèdent au Théâtre
de Nîmes : Anne Teresa
de Keersmaeker avec
sa pièce la plus mythique,
et Philippe Decouflé
en création !
Rosas danst Rosas © Herman Sorgeloos
Rosas danst Rosas (les 20 et 21 oct)
est la pièce qui a fait connaître ATK
dans le monde. Avec Thierry de Mey
qui composa pour elle une partition
faite essentiellement de silences, de
répétitions, de boucles et de décalages, elle inventa une danse aussi
abstraite et géométrique que les sons
dans sa composition, mais transcendée par les quatre corps de femmes
qui entrainent dans leurs virevoltes et
volte-face incessantes, jusqu’à l’épuisement. Magistrale dès cette première
pièce, en blanc, sans effet, sans autre
décor que quelques chaises alignées…
Nîmes donne aussi à voir, au Carré le
15 oct à 17h, le film Fase de Thierry
de Mey, quatre pièces de la même
époque sur la musique de Steve Reich,
tournée dans une forêt, une fabrique,
sur du sable… redessinant la géométrie des figures vue d’en haut, de côté.
Fascinant.
Beaucoup plus coloré et baroque est
l’univers de Decouflé ! Sa dernière
création, Octopus (du 17 au 19 nov),
joue pourtant davantage d’illusions en
noir et blancs, de membres étirés, qui
se reflètent et se referment, enfermant
les corps dans un système illusionniste
de miroirs…
Théâtre de Nîmes
04 66 36 65 00
www.theatredenimes.com
La
chance !
Qui va avoir le privilège de voir
Brilliant corners avant la Biennale
de Venise ? La Cie d’Emanuel
Gat est en résidence à Istres depuis 4 ans, et offre ainsi à ses
hôtes la primeur de sa création en
cours pour 12 danseurs «brilliants»…
Et ce n’est pas tout : invité par les
Rencontres d’Averroès, le plus
épatant, émouvant, intelligent des danseurs issus du hip hop vient interpréter
la Géographie du Danger : quand le
danseur Français Hamid Ben Mahi
rencontre l’écriture du journaliste
Algérien Hamid Skif, cela donne un
chef-d’œuvre sur la solitude de
l’immigré clandestin…
Brilliant Corners © X-D.R.
Brilliant Corners
Le 21 oct
La Géographie du Danger
Le 10 nov
Théâtre de l’Olivier, Istres
04 42 56 48 48
www.scenesetcines.fr
Échanges
Miguel Nosibor crée sa nouvelle pièce Aller-Retour, avec sa compagne Fabienne,
danseuse elle aussi. Rien de hasardeux là dedans : Miguel Nosibor veut mettre en
danse son expérience de l’échange, avec ses élèves, ses stagiaires, ses amis, les
autres artistes issus de pratiques voisines. Ce qu’il donne avec sa danse
généreuse, et ce qui lui est rendu.
Aller-retour
Le 6 nov
Théâtre de Fos
04 42 11 01 99
www.scenesetcines.fr
Trois grâces
Le Théâtre Durance a la bonne idée de
programmer le cycle électroacoustique
de Michel Kelemenis, (musiques de
Christian Zanesi), trois très belles
pièces témoignant de son écriture
accomplie. Une réflexion sur ce qui est
gracieux et disgracieux, ce que l’on voit
et ce qui échappe, sur les phases
quantiques de la lumière, et la vitesse
du regard qui s’accommode mal de
celle des corps lancés dans la course…
Alea. Viiiiiite. Disgrâce
Le 22 oct
Théâtre Durance, Château Arnoux
04 92 64 27 34
www.theatredurance.fr
Disgrace © Agnes Mellon
26
MUSIQUE
CONCERTS
On entend encore le frottement de la plume de
Chénier sur le parchemin où il coucha son dernier
poème, en prison, tout comme le bruit sourd de la
guillotine brisant une jeunesse pleine de promesses…
Andrea Chénier est l’un des rares opéras (avec
Dialogues des Carmélites) à dénoncer la Terreur. En
situant, sans parallaxe temporelle, l’action durant la
Révolution française, la mise en scène de Claire
Servais nous conduit au musée, jusqu’à assumer le
kitsch du livret par un final «lumineux», transcendant
le passage vers la Mort du couple héroïque. À bien y
regarder, les décors (Dominique Pichou) figurant
un gigantesque échafaud morcelé dans l’espace, prêt
à l’emploi, et l’arène orangée représentant le tribunal
populaire au 3e acte, génèrent de puissants effets.
Car c’est là, précisément, que tout se joue du rapport
psychologique semblant annoncer le triangle Cavaradossi, Scarpia, Tosca.
Andrea Chénier de Giordano fait partie de ces ouvrages poussant les voix vers des intensités peu
communes. Les plus grands ont chanté le rôle-titre,
mais ils ne sont pas nombreux aujourd’hui à pourvoir
l’endosser. Zoran Todorovich est un ténor au port
altier, au timbre compact, puissant. Hélas, ses moyens
ont été altérés, le 1er octobre, par un fort rhume.
Cependant, tout le plateau vocal a été bien pensé.
Irène Cerboncini maîtrise son soprano vibrant pour
la jeune amoureuse Madeleine de Coigny et le superbe baryton Marco di Felice, assume la complexité
de Gérard, révolutionnaire tiraillé entre sa haine de
l’Ancien régime, son désir de posséder son ex et
noble maîtresse, et sa volonté profonde de rester
vertueux. L’ensemble des seconds rôles contribue à
la réussite d’une production venue de Monte-Carlo.
Le chef Fabrizio Maria Carminati à la tête de
l’Orchestre et des Chœurs de l’Opéra rend enfin
à l’opus son vérisme chatoyant et ses élans musicaux
opulents.
JACQUES FRESCHEL
Andrea Chénier a été donné à l’Opéra de Marseille
du 23 sept au 5 oct
Andrea Chenier © Christian Dresse 2010
La lyre et l’échafaud
Du son à l’idée
I Virtuosi Italiani
X-D.R.
Au XVIe siècle l’art instrumental s’émancipe
du©texte
qui jusqu’alors lui servait d’incontournable support
(prières, chansons…). En quelque sorte, à ce
moment-là de l’histoire, la musique devient un art
«abstrait», bien avant la révolution picturale du début
du XXe siècle. Cependant, peut-être effrayés par ce
phénomène qui plaçait la musique instrumentale hors
du «sens» (que veut donc «dire» une sonate ou une
symphonie ?), les musiciens baroques ont cherché à
établir des relations entre les phénomènes sonores,
rythmiques, mélodiques, et les passions humaines
ou les phénomènes naturels. C’est ainsi que les
partitions de l’époque regorgent d’effets imitant
l’orage, le sommeil, les chants d’oiseaux ou le
murmure des fontaines, la jalousie, l’amour, le
plaisir…
D’Antonio Vivaldi, on connaît les fameuses Quatre
saisons, moins les nombreux Concertos à titre
comme La Rustique, L’Amoureux, La Tempête en mer,
Le Soupçon… Autant de pièces qui, par leur rudesse
dynamique, leur plainte mélodique, sensuelle,
l’aspect furieux ou haletant des trémolos, leurs
harmonies sinueuses, suggèrent des climats où les
pensées s’envolent au fil des élans agiles d’un violon
solo. C’est vers ces contrées imaginaires que nous
ont emmenés les cordes aguerries d’I Virtuosi
Italiani et leur chef/soliste Alberto Martini le 7 oct
pour le 2e concert du Festival de Saint-Victor (à
suivre… voir p30).
JACQUES FRESCHEL
Obscure clarté
nuire à l’écoute. Car qu’est ce que ce
premier romantisme allemand ? Le
sentiment de la nature, les cyprès inquiétants, et l’innocence de l’enfance
qui s’oppose à un monde de mensonges que fuient les poètes…
Puis, on eut le bonheur d’entendre la
grande pianiste interpréter seule Chu© Jean-Louis Bergamo
Univers sombre que celui choisi ce
soir-là au GTP pour le spectacle Les
derniers feux du romantisme, dirigé tout
en finesse par Laurence Equilbey ; le
concert de chœur Accentus s’ouvrait
sur Franz Liszt avec Weinen, klagen,
sorgen (d’après J.S. Bach), puis Nuages
gris ; le chœur entame le premier
morceau de dos, son parfait, harmoniques sensibles et prenantes, direction
d’une rigueur toute d’élégance et de
tension. Brigitte Engerer accompagne le chœur pendant la première
partie, légèrement, tissant finement le
son entre les voix et son piano. Le lyrisme est profond, évident, l’atmosphère
poignante échappe aux lourdeurs que
la tristesse existentielle des œuvres de
Max Reger ou Hugo Wolf pourrait entraîner. Le surtitrage, clair, permet de
goûter à la poésie des auteurs dont les
compositeurs se sont inspirés, sans
chotements secrets de Clara Schumann, dans leur transcription de Franz
Liszt, où les silences s’interrogent. Et
le tendre Liebeslied de Robert Schumann. Enfin Rêve d’amour et Cantique
d’amour de Franz Liszt. Le piano se
fait aérien, les difficultés techniques
accessoires… Sublime !
Le concert s’achève avec le chœur
Accentus seul, dans quelques pages
essentielles de Malher. Sons irisés,
ampleur, intériorité, des finales pailletées… un pur bonheur de tristesse et
de désespoir !
MARYVONNE COLOMBANI
Ce concert a été donné
au GTP
le 2 oct
MUSIQUE
27
In memoriam
Séquence émotion : Caline Barbizet, après une présentation
rapide par Pierre Vasarely du rapport qu’entretenait le
plasticien avec la musique, prit la parole pour parler de celui
qui fut son mari. Quelques mots simples, suivis d’extraits du
concert donné par le pianiste marseillais en 1975, et
enregistré par FR3 : Milhaud, puis Bach, dont les lignes
mélodiques habilement tissées firent corps avec les œuvres
du grand Victor. Puis immergé dans un espace de sons de
couleurs et de formes, l’auditoire put apprécier le récital
d’Evelina Pitti, ancienne élève du maître. Les œuvres de
Bach, l’âme slave à fleur de peau de Rachmaninoff, puis
Dutilleux, et sa première sonate pour piano «à Geneviève
Joy» emplirent le lieu de leurs volutes invisibles. Solidement
ancrée dans le clavier, la pianiste proposa une interprétation
de ces pièces, pleine d’émotion et de retenue. Hommage
vibrant aux deux artistes disparus, qui, l’espace du concert,
semblèrent réinvestir la place : tout le charme de l’illusion.
CHRISTOPHE FLOQUET
Ce concert a eu lieu le 16 sept à la Fondation Vasarely, Aix
Evelina Pitti © Gerard Pau
Un double hommage in situ dans le temple de «l’optical art», quand Vasarely accueillait
Barbizet
Syntaxe de l’air
Infatigable, L’Opéra au village ne cesse de proposer des spectacles qui
allient qualité et innovation. Le 18 sept,
l’église romane accueillait Télémaque
pour un concert à la composition originale : aux cinq mouvements du
Quintette opus 39 de Prokofiev se
mêlaient en un savant tissage des pièces solistes d’auteurs contemporains.
Melancholia pour contrebasse solo
(Jean-Bernard Rière) de Hersant :
les graves s’approfondissent, comme
une matière lourde et malléable, puis
les cordes graves deviennent chanterelles, s’adonnant aux aigus les plus
absurdes, le bois de l’archet jongle, le
spectre tout entier s’éveille. Dans Sarc
d’Ohana, le hautbois (Blandine Bacqué) oscille entre interrogations et
certitudes, arrachements d’âme et
légèreté, polyphonies incroyables, tandis que la Sonate pour alto (Pascale
Guérin) de Hindemith, très romantique, vibre d’accents sourdement
passionnés.
© Dany Savary
La Sonate pour clarinette (Linda Amrani) de Denisov suit une esthétique
picturale pointilliste, toile parsemée
d’éclats, d’arêtes vives qui semblent
sculpter l’espace, acrobaties défiant la
mesure. Enfin, la très lyrique Cadenza
pour violon (Jean-Christophe Selmi)
de Penderecki semblait vouloir
déchiffrer toute la complexité d’une
âme, mouvements qui s’exacerbent,
vont au-delà des capacités humaines,
repoussant toujours les limites, jeu des
extrêmes, doubles cordes enchaînées,
jusqu’à la formulation de l’indicible.
Ce parcours permettait d’apprécier
des œuvres de compositeurs du XXe,
riche contrepoint à la danse du Quintette, composé pour un ballet, qui livre
une galerie de tableaux, tantôt un
monde oriental empli de poésie et de
mystère ou d’une verve féroce, tantôt
une description de la démarche de
l’ours, puis celle, brillante, du jeu des
acrobates ou d’une danse russe traditionnelle.
Le bis, de Tristan Murail, inspiré des
Ruines circulaires de Borges, emporte
le violon et la clarinette dans un affrontement étrange. L’un et l’autre rêvent,
mais l’un n’est que le songe de l’autre,
mode spectral où la virtuosité ne peut
être que subtile. Un concert d’exception, qui animait de souffles invisibles la
délicate installation de plumes duveteuses et blanches d’Isa Barbier,
esquisse d’un globe qui épousait les
formes de l’abside, construction fragile, éphémère écho, manifestation à
peine tangible de l’idée…
MARYVONNE COLOMBANI
Concert Les Subjectifs, donné
à Pourrières au Couvent des Minimes
le 18 sept.
Emilie Capulet, pianiste inspirée
Dans le cadre somptueux du château
de Cassis, Emilie Capulet, pianiste
diplômée à Aix, Marseille et Londres
(Guildhall School of Music) a apprivoisé
un Pleyel quart de queue de 1920 à la
chaude sonorité mais à la mécanique
© Yves Bergé
capricieuse, dans un programme très
viennois. Les 12 Variations sur Ah, vous
dirai-je maman de Mozart, d’une clarté
juvénile, étaient entourées des plus
grands romantiques. Technique sûre,
phrasé élégant pour l’Etude en mi
majeur op.10, belle lisibilité et main
droite survoltée dans la Fantaisie-Impromptu de Chopin. Avant la Ballade
en sol mineur, superbement interprétée, un moment de respiration où
la pianiste présente les œuvres avec
beaucoup de ferveur. Dans les Impromptus en mi b majeur et b mineur
de Schubert, Emilie Capulet effleure
le piano avec un charme exquis, la
technique étant toujours au service
d’une musicalité d’une grande matu-
rité: les guirlandes de triolets dans le
1er Impromptu, si maîtrisées, rappellent
la jouissance romantique du musicien.
La Valse-Caprice de Liszt, souvenir de
soirées viennoises, héritées de danses
schubertiennes, pièce redoutable,
doigté puissant et bondissant :
Schubert sublimé par la tornade Liszt !
Le Carnaval de Vienne, jeu généreux et
inspiré, est un bel hommage à la
théâtralité et aux audaces harmoniques de Schumann. Un très beau
moment de musique, offert avec
grâce.
YVES BERGÉ
Ce récital s’est donné le 19 sept
au Château de Cassis
28
MUSIQUE
CONCERTS
Lamenti e pianto
les rangs d’un public venu nombreux,
ce 3 oct, pour goûter au derniers feux du
festival automnal de Concerto Soave.
On a rarement l’occasion d’entendre
une telle qualité d’interprétation du
style baroque, une telle maîtrise de
l’équilibre, des phrasés tissés avec
finesse, de la juste distanciation inter-
Maria Critina Kiehr et Jean-Marc Aymes © C Peillon
La Sinfonia lente et plaintive ouvrant la
Cantate «Bella madre dei fiori» de
Scarlatti résonne gravement dans la
belle acoustique de l’église Saint-Laurent.
Les deux violons d’Alessandro Ciccolini et Alba Roca glissent de retards
en anticipations, de dissonances en
consonances et s’amusent des frottements harmoniques qui font les délices
tendrement douloureux de la musique
baroque italienne. Aussi, quand Maria
Cristina Kiehr (voir p 73) déploie son
chant, doucement réservé, aux sonorités suaves et au timbre compact, très
homogène et peu vibrant (mais sans
aucune platitude), au fil d’une basse
continue souple (Etienne Mangot au
violoncelle) et libre d’arpèges, traits
virtuoses limpides comme une eau de
source (Jean-Marc Aymes au clavecin), on se dit qu’on a bien fait de grossir
prétative, ni trop timide, ni trop
extravertie des affects anciens. Si la
soprano semble avoir été un peu chagrinée au début, le souffle un peu
court, la vocalise hésitante et l’aigu
anxieux, tout est vite rentré dans l’ordre. Après un Concerto du même
Scarlatti, riche en contrepoints célestes, où l’alto de Myriam Cambreling
a rejoint l’ensemble, le récital s’est
achevé par un «must» de la musique
sacrée. Le Salve Regina de Pergolèse,
à l’égal du Stabat mater dont on entendit de nombreuses souvenances
harmoniques, foisonne en madrigalismes, effets sonores intensifiant le
sens de mots chers aux «passions» de
l’époque, tels les «soupirs» et les
«larmes»… qu’on a bien failli verser !
JACQUES FRESCHEL
L’orgue de demain
Star atypique de l’orgue,
Jean Guillou tenait les
claviers de Roquevaire
le 26 septembre
Sa présence, son aura et ses interprétations valent à coup sûr une nef
bien remplie, ce qui s’est largement
vérifié lors du 14e Festival International d’Orgue de Roquevaire. Et
jusque dans ce programme plus qu’original et très vingtièmiste, accompagné
par les excellents percussionnistes du
Trio Delta, Jean Guillou s’affirme comme une légende vivante. Entre deux
interprétations de Bach qui feraient
tomber de leur tribune une ribambelle
d’organistes, l’artiste démontre ses
talents de compositeur avec des pièces scintillantes et enlevées pour
percussions seules (Chroniques) ou
associant l’orgue à l’impressionnant
dispositif allant du marimba au gong
(Colloque n°6 et 8). Toujours en recherche de nouvelles sonorités, ce
bonhomme hors du commun n’hésite
pas, en véritable apôtre, à amener le
public sur le terrain du XXe siècle d’hier,
jusqu’aux sonorités d’aujourd’hui.
FRÉDÉRIC ISOLETTA
Le festival d’Orgue de Roquevaire se
poursuit jusqu’au 17 oct
http://orgue.roquevaire.pagespersoorange.fr
Destin tragique
La figure de Didon, reine de Carthage, est une inspiratrice précieuse pour nombre
de compositeurs. Parmi eux Purcell bien sûr, mais aussi des Français, ceux du
Grand Siècle de Louis XV comme les illustres Couperin et Campra et les moins
connus mais intéressants Pancrace Royer et Michel Pignolet de Montéclair. Pour
servir ce programme français singulier, l’ensemble Les Folies Françoises
composé au violon et à la direction de l’excellent Patrick Cohën-Akenine, au
clavecin de Béatrice Martin et au violoncelle de François Poly. Tantôt en trio
pour le Neuvième Concert des Goûts Réunis de Couperin, au clavecin seul pour
d’exquises miniatures comme Le Tambourin ou La Majestueuse de Royer, ou en
soutien de l’admirable voix à la prononciation parfaite d’Anne Magouët, si à l’aise
dans ce baroque français pour deux cantates évoquant le triste sort de Didon : les
quatre interprètes ont illuminés par leur talent le temple protestant de la rue
Grignan.
FRÉDÉRIC ISOLETTA
Cherubini «l’ancien» ?
C’est dans la magnifique salle du
Grand Tinel du Palais des Papes d’Avignon qu’a débuté le Festival de
musique ancienne avec une soirée
consacrée à Luigi Cherubini dont on
fête cette année le 250e anniversaire :
des cantates rarement jouées pour
commencer, puis le Drame lyrique
Pygmalion, originellement composé
pour le castrat Crescentini en 1809 :
l’ensemble instrumental Les Nouveaux Caractères -dirigé du
pianoforte par Sébastien d’Hérin- et
le Chœur de l’Opéra-Théâtre d’Avignon ont accompagné des solistes
remarquables. En particulier Karine
Deshayes, bien connue et appréciée
des avignonnais, fut remarquable dans
Circé, magnifique cantate pour mezzo-
Les Nouveaux Caracteres © X-D.R.
soprano et orchestre : son interprétation, brillante et théâtrale, fut
longuement applaudie.
On regrette cependant que l’immense
salle du Tinel ne mette pas les voix en
valeur : trop résonante, elle rend les
textes peu compréhensibles. Autre
regret : l’absence du contre-ténor
Christophe Dumaux dont le nom figure
pourtant sur le programme de cette
soirée…
Autre étonnement : beaucoup d’œuvres, dont par exemple Le Remède de
fortune de Guillaume de Machaut,
programmée le 19 octobre, ont une
place évidente dans ce Festival, mais il
est curieux de noter combien certains
classiques ont «vieilli»… Sinon
comment justifier que Cherubini,
compositeur du XIXe siècle (17601842), contemporain des grands
romantiques Frédéric Chopin et Hector
Berlioz, ouvre ce Festival dit de
«musique ancienne» ?...
CHRISTINE REY
30
MUSIQUE
LYRIQUE | CONCERTS
«Grand opéra»
économique (l’univers décrit y est pharaonique…),
l’ultime scène où le temple s’écroule sur les Philistins
au moment où Samson, attaché aux colonnes de
l’édifice, cheveux coupés et yeux crevés, implore une
dernière fois Dieu de lui redonner sa force herculéenne…
À Marseille, on y entendra Olga Borodina et
Torsten Kerl dans les rôles-titres sous la direction
d’Emmanuel Villaume.
Rarement opéra aura connu une aussi longue
gestation. Samson et Dalila, toutefois, est le seul
véritable opéra de Saint-Saëns que la postérité
retient (avec aussi le très rare Henri VIII). Et c’est un
chef-d’œuvre unique, illustrant peut-être l’aboutissement magistral du «Grand opéra» à la française !
D’inspiration biblique, cet opus, puisant sa source
dans la forme des oratorios baroques, retrace
l’ascension, la victoire du héros, la trahison de Dalila,
la vengeance et la mort de Samson. Les airs et les
chœurs sont d’une grande beauté avec pour sommet
le fameux «Mon cœur s’ouvre à ta voix» immortalisé
par Callas ou Shirley Verret.
Monter l’ouvrage dans une version de concert n’est
pas un sacrilège tant l’action y est figée : on regrette
cependant, dans ce choix de production qui est aussi
JACQUES FRESCHEL
Samson et Dalila
Les 17, 23 et 26 nov. à 20h et le 20 nov. à 14h30
Opéra de Marseille
04 91 55 11 10
www.marseille.fr
Samson et Dalila, Gustave Moreau
© RMN (Musee d'Orsay) - Jean-Gilles Berizzi
Des voix dans Mozart !
© X-D.R
fiancée respective. Ils leur tendent un piège… dans
lequel elles tombent ! Cependant, l’épilogue de ce
marivaudage est bien amer, car Mozart et da Ponte,
dans Cosi fan tutte («ainsi font-elles toutes») en
épinglant les travers de la gent féminine (cliché de
l’époque pas vraiment éradiqué aujourd’hui)…
agrafent plus généralement ceux de nature humaine.
Un des grands opéras mozartiens, mis en scène par
Philippe Sireuil et dirigé par Dominique Trottein,
dans une production de l’Opéra Royal de Wallonie
(passée par Toulon en 2009) et dont l’intérêt premier
est la qualité annoncée du plateau vocal… ce qui
n’est pas si courant de nos jours dans les opéras de
Mozart.
J.F.
Auditorium de la Faculté de Médecine Marseille
Le 9 nov. à 20h30
SMCM Adhésions Espace Culture 04 96 11 04 60
ou Harmonia Mundi 04 91 33 08 12
(gratuit pour enfants de sociétaires de 7 à 14 ans)
J.F.
Cosi fan tutte
Le 12 nov. à 20h et le 14 nov. à 14h
Opéra-Théâtre d’Avignon
04 90 82 81 40
www.operatheatredavignon.fr
Encouragés par Alfonso (Nicolas Courjal) célibataire
cynique, Ferrando (Florian Laconi) et Guglielmo
(Armado Noguera) deux jeunes officiers amoureux
parient sur la constance de Fiordiligi (Nathalie
Manfrino) et Dorabella (Patricia Fernandez), leur
Orientalisme
Avec Carmen ou Les Pêcheurs de Perles, Georges
Bizet nous invite au voyage. Il en va de même pour
son exotique Djamileh (1872), œuvre rarement
donnée, dans laquelle on est convié dans l’univers de
Tchèques
Le mélomane attend toujours avec une certaine
impatience le début de la saison de concerts de la
Société de Musique de Chambre de Marseille.
Pour le coup, c’est l’une des formations issues de
l’immense vivier de Bohème (Prazak, Kocian, Talich…)
qui est invitée par l’équipe de Bernard Camau. Le
Quatuor Zemlinsky joue Schubert (n°5 D.68 en si
bémol majeur) les fameuses «Dissonances» K.465 en
ut majeur de Mozart et le Quatuor n°1 op.4 en la
majeur post-romantique d’Alexander von… Zemlinsky
(1871-1942).
Djamileh © Yves Bergé
mille et une nuits. Le livret, tiré de Namouna de
Musset, narre l’aventure de la belle favorite Djamileh,
immanquablement congédiée, comme toutes ses
semblables, esclaves colocataires du harem, par le
sultan Haroun. Néanmoins, celle-ci est prête à tout
pour reconquérir l’amour de son maître… La mise en
scène de Bernard Grimonet devrait trouver sa
mesure sur la scène aubagnaise (une production qui
fut créée au Couvent de Minimes à Pourrières durant
l’été 2009 pour L’Opéra au Village, voir Zib’22).
L’orchestre réduit en formation de chambre
accompagne de jeunes et talentueux chanteurs.
J.F.
Djamileh
Le 5 nov. à 21h
Comœdia d’Aubagne
04 42 18 19 88
www.aubagne.fr
Piano… piano
La saison de concerts à l’Opéra de Marseille s’ouvre
en accueillant deux grands virtuoses des claviers.
Bertrand Chamayou, l’un des interprètes les plus
doués la jeune génération des pianistes français, joue
le Concerto n°2 de Chopin avec Evelino Pido à la
baguette qui dirige également l’Ouverture du
Freischütz de Weber et la Symphonie n°41 «Jupiter»
de Mozart (le 2.oct. à 20h).
On le sait peu, mais Cyprien Katsaris est né à
Marseille : c’est un formidable musicien qui rafla dans
les années 70 les Premiers Prix Cziffra et Reine
Elisabeth. Intéressé par toutes les musiques, luimême compositeur, on l’entend dans le très
romantique 2e concerto de Liszt aux côtés de Louis
Langrée qui prend les rênes de l’Orchestre
Philharmonique de Marseille dans le poème
symphonique Le Chasseur maudit et la grande
Symphonie en ré mineur de César Frank (le 6 nov. à
20h)
J.F.
Opéra de Marseille
04 91 55 11 10
www.opera.marseille.fr
CONTEMPORAINE | CONCERTS
MUSIQUE 31
Composer aujourd’hui ?
terie – Entrée libre), une mise en bouche apéritive et lutine de courts airs
humoristiques accompagnés à la
trompette. Avant des Compositrices
de l’ailleurs : deux pièces d’Hanna
Kulenty Preludium, postludium and
psalm (2007) et Sofia Gubaïdulina In
croce par Guillaume Rabier au violoncelle et Jean-Marc Fabiano à
l’accordéon (le 17 nov. à 18h30 au
Point de bascule).
La harpe (Lydia Laurent) et la guitare
(Philippe Azoulay) jouent les Pinceurs
d’âme aux côtés des instrumentistes
de Télémaque au grand complet pour
un programme mêlant des opus de
Ravel, Roussel, Villa-Lobos à ceux de
deux jeunes brésiliennes Tatiana
JACQUES FRESCHEL
Le Mois des Compositeurs
jusqu’au 7 déc
Histoire de la musique (épisode 1)
le 16 nov. à 18h. à l’Alcazar
– Entrée libre
Ateliers pédagogiques
les 17 et 18 nov. de 9h30 à 17h30
au Grim (gratuit sur inscription)
04 91 39 29 13
www.ensemble-telemaque.com
En fin de Contes
Orchestre et Ciné
La saison symphonique toulonnaise
s’ouvre avec Giuliano Carella qui, depuis qu’il est le directeur musical de
l’opéra, tire la phalange varoise vers le
haut. Cet éminent chef dirige la violoniste Akiko Suwanaï dans le fameux
Concerto de Tchaïkovski. Avec l’Orchestre de l’Opéra, il joue également
l’Ouverture de La Scala di Seta de
Rossini et poursuit son intégrale des
symphonies de Beethoven par la 4e op.
60 (Le 21 oct. à 20h30 au Palais Neptune). On retrouve l’Orchestre de
Catanzaro et Valéria Bonafé, doublé
d’un hommage à Robert Coinel (le 19
nov. à 20h30 à La Magalone Cité de
la Musique )… À suivre : cela dure un
mois !
© Agnès Mellon
Raoul Lay, à la tête de l’Ensemble
Télémaque, consacre un mois entier
(cosa rara !) à la composition. Il propose de faire entendre «des compositeurs
locaux et lointains, jeunes et moins
jeunes, hommes et femmes» en particuliers ceux du XXIe siècle, déjà bien
engagé. Les auditeurs, plus ou moins
avertis, suivent des ateliers de composition, des ateliers-concerts et envisagent
un acte créateur s’inscrivant aussi bien
dans l’héritage que la nouveauté ; les
concerts rapprochent les styles par de
fines concordances, temporelles, formelles, esthétiques, géographiques.
La manifestation s’ouvre par une présentation conviviale agrémentée de
courts opus (le 10 nov à 19h à la Mino-
l’Opéra de Toulon dans la fosse pour
un Ciné-concert toujours apprécié
(voir p.55). C’est Gabriel Thibaudeau
qui compose et dirige la musique
d’accompagnement du film muet Le
fantôme de l’Opéra (1925) d’après le
célèbre roman de Gaston Leroux. (le 6
nov. à 20h – déconseillé aux moins de
8 ans).
Le dernier des sept Contes du cycle
initié par Roland Hayrabedian, entendu en juin dans sa version musicale
(voir Zib 31), est créé sur le plateau du
Gymnase dans une mise en scène
d’Aurélie Hubeau et Damien Caille
Perret. «Antti Puuhaara est un mélange de cycle choral et de mélodrame
inspiré d’une légende finlandaise» écrit
le compositeur finnois Tapio Tuomela, qui cosigne le livret avec Erik
Söderblom. Un «univers magique où
se mêlent géants, devins, fille-oiseau et
sorcière» sur un mythe héroïque et une
musique interprétée par les voix de
Musicatreize mâtinées de sonorités
de harpe, de cordes et d’accordéon.
Un livre-disque est également paru
chez Actes-Sud (voir p 74).
J.F.
Opéra de Toulon
04 94 92 70 78
www.operadetoulon.fr
Dumay, Hendricks…
Derwinger au piano, dans une habile
mise en espace avec jeux de lumières
et projections (le 21 oct. à 20h30 Opéra). Jérôme Pillement dirige un
programme de musique sacrée d’opus
de Poulenc, Landowski et Vivaldi avec
Luc Antonini au continuo (le 31 oct. à
17h - Eglise des Carmes).
J.F.
Opéra-Théâtre d’Avignon
04 90 82 81 40
www.operatheatredavignon.fr
Aux créneaux !
Le Festival de Saint-Victor se poursuit sous la nouvelle présidence de
Jean Stéphane Bourgeat (et avec un
nouveau paravent acoustique qui empêche le son de filer en arrière dans le
chœur de l’Abbaye fortifiée). La Petite
messe solennelle de Rossini est chantée par le Chœur Régional PACA avec
un quatuor de solistes et son accompagnement singulier mêlant le piano et
l’harmonium (le 21 oct. à 20h30).
C’est ensuite le violoniste Laurent
Antti Puuhaara
Le 4 nov. à 20h30
Le Gymnase, Marseille
0 820 000 422 6
www.lestheatres.net
© Guy Vivien
Le violoniste Augustin Dumay joue le
Concerto de Beethoven avec Yeruham
Scharosky à la tête de l’OLRAP dans
la Symphonie de Bizet (le 15 oct. à
20h30 - Opéra).
On n’a pas l’occasion d’entendre souvent, sur scène, le plus beau cycle de
Schubert. Le Voyage d’hiver, sommet
du romantisme, union intime de la
poésie et de la musique. La soprano
Barbara Hendricks chante les 24
poèmes, accompagnée par Love
J.F.
Korcia qui revient aux créneaux en
compagnie de l’accordéoniste David
Richard et du Quatuor Você pour un
programme festif de musiques de
Gershwin, Morricone, Rota, Grapelli,
Chaplin (Charles), Vivaldi, Bartok…(le
10 nov. à 20h30).
J.F.
Marseille
04 91 05 84 48
http://saintvictor.chez.com/
Jeune quatuor et belle
enchanteresse
Les quatre jeunes musiciens du Baroque dirigé par Paul Agnew, la
Quatuor Modigliani ont, en peu
d’années, fait leur place au panthéon
des formations du genre. Cette saison,
on les entend à plusieurs reprises à
Marseille (25 janv. SMCM), Avignon (8
mars Opéra), mais c’est à Aix qu’ils
débutent leur périple méridional avec
l’opus 76 n°4 «Lever de soleil» de
Haydn et Les Quatuors en la mineur
op.13 et fa mineur op. 80 de
Mendelssohn (le 19 oct. à 20h30).
L’Orchestre Français des Jeunes
soprano Salomé Haller interprètent
des extraits d’œuvres de Lully,
Haendel, Haydn autour du personnage
de la belle princesse de Damas et
ensorceleuse
Armide,
tombée
amoureuse du Croisé ennemi Renaud
(le 4 nov. à 20h30).
J.F.
GTP, Aix
04 42 91 69 69
www.legrandtheatre.net
32
MUSIQUE
AU PROGRAMME
Électro
Méliès
Duo
Chopin
Hommage au père de l’électroacoustique : Pierre Schaeffer par Les
Acousmonautes.
Marseille. Le 15 oct à 18h30. Urban
Gallery
Courts voyages animés par les sons
mixés du saxo-clarinettiste Louis
Sclavis et de l’orchestre khmer Phare
Ponleu Selpak sur des courts
métrages de Georges Méliès et du
réalisateur américain surréaliste Charley
Bowers.
Briançon. Le 22 oct. à 20h30 au Cadran
Augustin Bourdon (violon) et Nina
Uhari (piano) jouent un programme de
Sonates de Mendelssohn, Schumann
et l’incontournable chef d’œuvre de
Franck (Sonate la majeur). Marseille
Le 23 oct. à 17h. Foyer de l’Opéra
Le pianiste Abdel Rahman El Bacha
joue des Valses, Mazurkas, Nocturnes,
Polonaises, Ballade, Barcarolle.
Toulon. Le 10 nov au Palais Neptune
04 91 37 52 93
Point d’orgue…
Dernière flèches du 14e Festival
d’orgue de Roquevaire : récital de
Vincent Dubois (le 15 oct. à 21h),
avant Diego Tosi (violon) et BaptisteFlorian Marle-Ouvrard aux claviers (le
17 oct. à 16h). Roquevaire
04 42 04 05 33
http://orgue.roquevaire.pagesperso-orange.fr
Opérette
La compagnie Les Amoureux
transis représente l’Opéra-Bouffe
Gariné du compositeur Dikran
Tchouhadjian, «l’Offenbach oriental»
fondateur au XIXe siècle de l’opéra
arménien. Une œuvre méconnue,
jamais produite en français.
Marseille. Les 16 et 17 oct à 14h30
Odéon
04 96 12 52 70
www.marseille.fr
Bénites
Le cycle des Chants Sacrés en
Méditerranée s’articule autour des
Eaux Sacrées, on entend l’ensemble
italien de musique médiévale Quattrocento pour des chants liturgiques et
les turcs d’Häzineler dans des chants
soufis (le 16 oct Eglise d’Ansouis),
avant Juan Carmona (guitare flamenco) pour des chants de baptême (le 24
oct. à 18h au Temple de Lourmarin).
04 90 90 94 20
www.festival-durance-luberon.com
Insolentes ?
Marier la viole et le sax au rock ou la
vielle au luth africain serait une «insolence»… Bigre !
Draguignan. Festival des musiques
insolentes Les 21 et 22 oct au
Théâtre
04 94 93 55 45
www.theatresendracenie.com
Hommage
Le compositeur Robert Coinel est
décédé il y a un an. Des créations de
ses compagnons musiciens et des opus
de sa main sont joués en témoignage
d’amitié.
Marseille. Le 22 oct Auditorium Cité
de la Musique Entrée libre sur réserv
04 91 39 28 28
04 92 25 52 52
www.theatre-le-cadran.eu
Bandes de quatre
Le 22e Festival de Quatuors à
cordes en Pays de Fayence se déroule,
comme chaque automne, entre SaintRaphaël et les villages perchés de
Seillans, Mons, Callian…
Parmi la crème des formations internationales, la manifestation accueille,
pour célébrer Mozart et Schumann les
Quatuors Parisi (France), Prazak (République Tchèque), Arriaga (Belgique),
Signum (Allemagne), Zemlinsky
(République Tchèque), Leipzig (Allemagne) et Voce (France).
Pays de Fayence. Du 23 au 30 oct
04 94 76 02 03
www.quatuorsenpaysdefayence.com
3x4
Après les Tchèques du Quatuor Prazak
dans Borodine, Schulhoff et Dvorak (le
22 oct), place à deux formations plus
jeunes pour le Week-end Quatuors
au Méjan. Les Espagnols du Cuarteto
Casals jouent Mozart, Bartok et La
Jeune Fille et la Mort de Schubert (le 24
oct. à 11h) avant les Français du Quatuor Alma dans Haydn, Debussy et
Mendelssohn (le 24 oct. à 17h).
Arles. Chapelle du Méjan
04 90 49 56 78
www.lemejan.com
Violon
Andrea Cardinale accompagné au
piano par Alessandro Magnasco dans
Tartini, Beethoven, Sarasate, Schumann et Granados.
Trets. Le 23 oct Salle du château
04 42 61 23 75
www.lesnuitspianistiques.com
Ancien
Au cœur de la 6e édition du Festival
de Musique Baroque de Marseille
un hommage est rendu au flûtiste Pierre Rampal (du 29 au 31 oct). Les
concerts du festival sont produits par
les artistes de l’Opéra de Marseille
et du Conservatoire National à
Rayonnement Régional.
Marseille. Les 22, 29 oct et les 5 et
12 nov à 20h30, le 30 oct à 18h30, le
31 oct, les 7 et 14 nov à 16h.
Basilique du Sacré-Cœur
04 91 14 66 76 (voir p.75)
04 94 93 55 45
www.festivalmusiquetoulon.com
04 91 55 11 10
Trio
Le Trio Chausson joue Mozart Mendelssohn et Chopin.
Marseille. Le 25 oct au Gymnase
0820 000 42
www.marseilleconcerts.com
Deux voix
Ruth Baumgartner (soprano), JeanChristophe Maurice (baryton-basse)
et Lily Guironnet (piano) proposent
un choix de mélodies pour deux voix
de Purcell, Dvorak, Mendelssohn,
Schumann, Gounod, Saint-Saëns,
Massenet…
Marseille. Le 5 nov.
Villa Magalone
04 91 39 28 28
www.citemusique-marseille.com
Liouba Timofeeva
La pianiste russe joue Chopin, Schubert, Liszt, Rachmaninov, Prokofiev.
Les Pennes Mirabeau.
Le 7 nov. à 16h
04 42 02 55 14
www.lesnuitspianistiques.com
Lauréat
Le jeune pianiste Guillaume Vincent
lauréat du Concours Long-Thibaud
2009 donne un récital qui court de
Beethoven à Messiaen.
Nîmes. Le 8 nov au Carré d’Art
04 66 36 65 10
www.theatredenimes.com
Office
L’Organiste et compositeur Thierry
Escaich et l’Ensemble Sequenza
9.3 (chant grégorien) donnent un office imaginaire.
Marseille. Le 8 nov Eglise des Réformés
04 96 11 04 61
www.marseilleconcerts.com
Campra
3e programme de Petits motets de
l’Aixois, dont on célèbre la naissance il
y a 350 ans, par l’ensemble soliste des
Festes d’Orphée et pour clore l’année
qui lui est consacrée.
Aix. Le 9 nov Chapelle des Oblats
04 42 99 37 11
www.orphee.org
Mixtion
Dans le cadre des Rencontres
d’Averroès quatre musiciens Francesco Tristano, Murcof, Bachar et
Rami Khalifé échangent entre deux
pianos, des percussions et un
Electronica. À partir d’œuvres de Bach,
Byrd et Frescobaldi, un mélange de
musiques classiques et électroniques.
Martigues. le 10 nov. à 20h30 et 22h
au Théâtre des Salins
04 42 49 02 00
www.theatre-des-salins.fr
Quintettes
Mise en regard de deux Quintettes de
Schumann et Chostakovitch par l’ensemble Des Equilibres.
Aubagne. Le 10 nov au Comœdia
04 42 18 19 88
www.aubagne.fr
Brecht vocal
Nada Strancar chante Brecht, non
pas sur les musiques de Kurt Weill,
mais celles du compositeur Paul
Dessau (1894-1979).
Marseille. Du 10 au 16 nov à La Criée
04 91 54 70 54
www.theatre-lacriee.com
Nada Strancar © Christian Ganet
CONCERTS
MUSIQUE 33
Fontaine je boirai de ton eau
Brigitte Fontaine © Francois-Xavier Emery
Silhouette de petite fille, bas résille, bottes de Maya
l’abeille, marche mécanique, jouet blessé… Et une voix
si fausse parfois qu’elle en est vraie, des textes qui ne
cessent, acrobatiques, de se heurter, de se déconstruire, de se perdre, de se disséquer en une fascinante
plongée où le sens émerge des non-sens mêmes…
Esthétique d’accumulations déjantées, esprit d’escalier, glissements, dérapages, reprise des poncifs en
coquillages nacrés de nouveaux mondes. «Arthur
Rimbaud du top 50», avec la folie d’un Antonin Artaud :
c’est Brigitte Fontaine. Capable de dénoncer les
«roseaux malpensants», tout en «haïssant les chiens à
poussette» ! Sous l’écorce des mots s’insinuent des
interrogations existentielles, désespérées, «je dis je
mais je ne sais pas du tout qui je suis».
Le concert fut avant tout une lecture d’extraits de
Nouvelles de l’exil, Le Bon peuple du sang ou de Portrait
de l’artiste en déshabillé de soie (à paraître chez
Flammarion), à l’ombre d’une lampe de bureau, geste
théâtral du doigt léché pour tourner les pages,
Comme une source
Chaque année, Ecume organise un festival de
Chants sacrés en méditerranée, variant les
thèmes auxquels les différents participants doivent
adapter leur programme. Pour cette 19e édition, le
thème choisi est «comme l’eau qui coule» (voir p 30).
Le Comœdia d’Aubagne accueillait le 3 oct dernier
un double concert, grec et bulgare. L’ensemble grec
Maye, spécialement constitué pour l’occasion
essentiellement par des professeurs de musique
traditionnelle (à Arta), offrait au public un beau
florilège de musiques d’Asie Mineure, de Crète et un
chant byzantin. La belle voix de la chanteuse
Theodora Athanasiou prenait les inflexions des vieux
enregistrements, les instrumentistes présentaient le
Yayli tanbour, le Kemenche (une sorte de violon au
très long manche et au corps rond), le oud, le ney
(longue flûte en roseau), les percussions. Les
influences balkanique et orientale se mélangent pour
donner une musique profondément originale : la
Grèce occupa longtemps la côte d’Asie Mineure et
ce n’est qu’après le sac de Smyrne que les grecs de
ces régions revinrent en Europe…
On retrouvait ensuite le groupe des Balkanes, qui
proposait un spectacle entièrement renouvelé, dans
le respect du thème, Arda, source ardente. Production
plus sombre que la précédente, plus intérieure, avec
des chants qui s’appuient sur des légendes bulgares,
où il est question de jeunes filles qui s’endorment au
bord des sources, de guerriers qui vont à la guerre, de
lune qui retient les filles parties chercher de l’eau… de
sorcières et d’eau magique… Une poésie profonde et
belle, comme le jaillissement sourd d’une source
enfouie.
MARYVONNE COLOMBANI
Freud et sa chanteuse
Je ne sais quoi est un récital étrange ! Natalie Joly fait
revivre très joliment Yvette Guilbert, chanteuse
populaire et polissonne qui inspira les chanteuses
modernes de Piaf à Barbara, mais aussi le chant
cabaret de Schönberg ou Kurt Weill, et fut abondamment croquée par Toulouse Lautrec. Natalie Joly
reproduit avec une minutie exquise les poses,
sourires, et surtout la voix parlée-chantée de son
modèle, qu’elle maîtrise parfaitement.
On sait moins qu’Yvette Guilbert entretint une correspondance suivie avec Freud, venu plusieurs fois la voir
à Paris, fasciné par l’impudeur assumée de ce répertoire qui parle de sexe avec plaisir. Fasciné aussi par
la comédienne, par ce qui fait une artiste, proximité
ou éloignement de son modèle… Bref Je ne sais quoi,
qui cite mine de rien ces échanges épistolaires,
© X-D.R possède une lecture à
double détente tout à fait
fascinante, relevant du
plaisir mimétique -l’émotion est là, le rire, les
larmes, au sens propre- et
de la distanciation
conceptuelle !
A.F.
Je ne sais quoi
Jusqu’au 17 oct
Théâtre de Lenche,
Marseille 2e
04 91 91 52 22
www.theatredelenche.info
autodérision de l’auteur qui se lit, parce que l’on est
toujours autre… Beau duo dialogue avec Areski
Belkacem, accompagnement complice et détaché à
la guitare de Yan Péchin… Elle «nous parle, bouche
cousue», souveraine et déchirante, «bourrée d’alexandrins» et de folie dionysiaque, le public reprend en
chœur Salam, Salam, puis elle s’en va mains nouées
d’adieu, papillon qui replie ses ailes. Poupée cassée et
sublime.
MARYVONNE COLOMBANI
Concert donné lors de la journée d’ouverture
des Correspondances de Manosque le 22 sept
au Théâtre Jean le Bleu
34
MUSIQUE
ACTUELLES | JAZZ
Et si Marsatac avait trouvé Son lieu avec le site de la Friche Belle de Mai ? Le labyrinthe urbain
de la Friche s’harmonise bien avec le concept de ce festival pas comme les autres
La rue est à nous
avec des esthétiques aux antipodes les unes des
autres. Des ondulations du monde d’un Féfé se
mettant tout le monde dans la poche pour une
relecture surprenante de I got a woman de Ray
Charles à la performance jubilatoire des SudAfricains de Tumi & The Volume, les habitués ont
pu une nouvelle fois savourer la présence sur scène
de Succes, pour ceux qui s’étaient remis de la
prestation renversante des Shaka Ponk dont
l’énergie et le jeu de scène époustouflant doivent
encore résonner au travers des murs de la
Cartonnerie. Pour un pari, il est réussi, reste à savoir
si ce nouveau point de chute deviendra pérenne, ou
si à terme il faudra s’exiler et voir encore plus grand…
© Agnès Mellon
Heureuse surprise, tant les atermoiements locaux ont
mis en doute jusqu’au bout la tenue sur notre
territoire d’une manifestation digne de sa réputation
internationale, qui a encore attiré 21000 adeptes du
23 au 26 sept. Certes il n’est pas simple de se rendre
à la Friche sans avoir recours à un véhicule, ce malgré
la bonne volonté d’organiser une valse de navettes.
Sans parking à proximité et sans vélos urbains, qu’on
ne peut pas emprunter après minuit, il fallait être
motivé pour garer ses roues ! Mais les trois niveaux
différents reliés aux trois salles (Le Cabaret Aléatoire,
la salle Seita, La Cartonnerie) et la déambulation de
la rue intérieure offraient au festivalier de ce théâtre
urbain un cloître à ciel ouvert géant, avec un espace
vital qui fait souvent défaut à ce type de
manifestation. Ceux qui n’ont pas pu entrer dans une
Seita archi pleine et surchauffée pour écouter les
étonnants performeurs locaux Nasser ne seront pas
du même avis, mais l’avantage d’être à la fois dedans
et dehors est considérable.
Avec 57 formations au compteur, le Marsatac 2010
ne fait pas dans la demi-mesure et contente chacun,
FRÉDÉRIC ISOLETTA
Marseille Jazze !
La Cave est à deux pas de l’Auditorium de la Cité de
la musique. Le trompettiste Christophe Leloil,
après E.C.H.O.E.S, est déjà en rodage dans un autre
projet : il forme le New Quartet Line 4 avec Eric
Surmenian à la contrebasse, André Charlier à la
batterie et au clavier Carine Bonnefoy avec laquelle
il partage une grande complicité. Une musique
Francesco Bearzatti © Dan Warzy
Christophe Leloil © Dan Warzy
Jazz sur la Ville investit un lieu de plus à Marseille :
l’Institut Culturel Italien a accueilli Francesco
Bearzatti au saxophone et clarinette, accompagné
du pianiste Oscar Marchioni. Un bon concert
constitué de compositions personnelles de chacun
des musiciens. Le standard There will never be
another you, interprété d’abord par le piano en solo,
sied bien au duo et procure une grande émotion
romantique. Un hommage aussi à Sonny Rollins, Stan
Getz... Le registre du saxo est volubile, les
articulations inattendues, et pourtant évidentes. La
mélodie est la règle de la soirée et la couleur reste
très italienne.
Ce concert a eu lieu le 5 oct
…
chargée d’énergie où chaque musicien jouit d’une
grande liberté mais où tout s’accomplit dans l’instant.
Les compositions de chaque membre du groupe,
telles Chasing Monsters, Sleepwalker, Lost in the Tube,
Up Town... semblent questionner de la place de
l’humain dans la vie urbaine. Est-ce une musique qui
illustre les replis individualistes d’aujourd’hui ? Le
quartet sait aussi installer des moments d’accalmie,
comme dans la ballade Numbers interprétée tout en
rondeur au buggle.
Ce concert a eu lieu le 6 oct
…
Le Roll’ Studio, tout en haut du Panier, est une cave
voûtée intime (environ 50 personnes) où l’accueil est
chaleureux. Le guitariste Paul Pioli et le
contrebassiste Christian Brazier ont proposé un
duo particulièrement adapté à l’espace. Un jazz fait
de compositions d’influences multiples. Le dialogue
entre musiciens s’est étiré tout au long de la soirée
sur des canevas harmoniques riches.
Ce concert a eu lieu le 25 sept
DAN WARZY
Duo Pioli / Brazier au Roll'Studio © Dan Warzy
MUSIQUE
35
Flâner à Saint Rémy
En septembre, Saint-Rémy se voue au
Jazz. Les oreilles du promeneur sont
d’abord réjouies par une aubade avec
fifres, tambourins, galoubets et costumes arlésiens au Château de
Roussan. Puis, au gré de la flânerie, sur
le site antique de Glanum ou sur les
places du centre ville, près du Café
Riche on s’attarde auprès d’un be-bop
endiablé. On découvre, entre deux, de
superbes galeries qui s’attachent à
promouvoir l’art contemporain.
Après ce préambule, le clou de la
journée : Tania Maria et son univers
onirique et sensuel.
Dès les premières mesures, la chanteuse se révèle généreuse, volubile,
puis expansive, exubérante. Les
couleurs chaudes de sa voix, la qualité
de la pulsion syncopée trouvent appui
dans le toucher suave de la pianiste,
qui sait aussi utiliser son instrument
comme une percu. Marc Bertaux se
livre à la basse à des variations hallucinantes ; le trio, avec Edmundo
Carneiro aux percus semble se livrer à
une joyeuse partie de cache-cache,
variant les impros comme pour mieux
surprendre l’autre ; on suit une véritable conversation, facétieuse, avec
ses ruptures, ses passages à l’unisson,
ses instants d’accords savoureux, ses
éclats de fureur rythmique. La voix de
Tania Maria, véritable caresse sur les
bossas novas, irradie de joie de vivre.
Elle fredonne, siffle, imite une multitude d’instruments, murmure ou
déclame en «gromelo», slame ; sa voix
se transforme en orchestre, quand elle
ne devient pas lyrique ; elle sait aussi
s’effacer, n’hésitant pas à chanter hors
micro pour mieux mettre en valeur le
travail exceptionnel des autres musiciens, se bornant à ponctuer de
quelques accords épicés leur fastueux
délire créatif.
Tania Maria © X-D.R.
Décidément, une immense artiste que
cette reine incontestée du Choro !
sept à Saint-Rémy-de-Provence
JEAN-MATHIEU COLOMBANI
Ce concert a été donné le samedi 18
Si l’on chantait ?
Il est une tradition au Théâtre et Chansons : le
passage à l’acte du spectacle par les stagiaires des
ateliers de chant d’Isabelle Bloch-Delahaie. Au fil
des ans, on les retrouve, on constate leurs progrès.
Le cru 2010, L’autre versant de la colline, est
particulièrement bon : des voix bien placées, un choix
éclectique et bourré d’humour dans les pièces à
interpréter. Le moteur à explosion, L’imparfait du
subjonctif ou Prince de l’amûr de Chanson Plus
Bifluorée… La mise en scène de chacune des prestations est intelligente, drôle, avec des mouvements
d’ensemble remarquablement réglés. Le spectacle
ne s’endort jamais, variant les registres, établissant
une progression qui permet à chaque artiste de
montrer ses qualités propres. Un excellent travail !
Et le meilleur est à venir : Michel Melchionne avec
son spectacle Chansons Bouts de Crayons, pour le
jeune public (dans le cadre de Momaix, le 17oct à
15h), la qualité des textes et leur poésie n’est plus à
mentionner… Mouron chante Brel, quinze années
d’amour, les 6 et 7 nov pour une remarquable reprise
des chansons de Brel. Les 27 et 28 nov, Coko, Tango
des organes se départageant le corps de l’homme,
avec un humour à la Devos. Et la reprise les 4, 5, 11
et 12 déc du très beau spectacle d’Isabelle BlochDelahaie, Malvina chante avec les loups (voir Zib’
20) : c’est un moment d’intense poésie, à ne pas
rater, si vous n’avez pas encore eu la chance d’y
assister.
MARYVONNE COLOMBANI
L’autre versant de la colline a été donné
les 24, 25 et 26 sept
La bonne chanson
Le Festival de la Chanson Française en est à sa
8e édition, et les concerts, souvent décentralisées
autour d’Aix-en-Provence remportent un remarquable
succès public. Si le festival fait appel à quelques têtes
d’affiche comme Richard Gotainer ou Pierre
Perret, il permet aussi de mieux apprécier des
chanteurs dont l’œuvre n’est habituellement livrée
que de manière fragmentaire. Ainsi Enzo Enzo, dont
on connaît quelques titres bien diffusés, mais dont le
spectacle entier est une pure merveille, avec de très
beaux textes, (poétiques ou mordants, inénarrable
«je hais les gosses !») une palette riche, couvrant de
nombreux registres, une superbe présence sur
scène; ainsi également L’art à Tatouille dont nous
avons tous le souvenir, avec Mets de l’huile, s’est
produit avec bonheur à Trets, festif et épicurien, qui
«en connaît un rayon de lune» ! venant du pays de «la
rouquette qui craque sous la dent»…
Le festival sait aussi présenter de parfaits inconnus,
comme le sympathique chanteur québécois
Christian Sbrocca, qui interprète Trenet et quelques
Enzo Enzo © X-D.R.
unes de ses compositions ; ou Monsieur Lune, avec
sa merveilleuse affiche à la Ernest Pignon Ernest, et
son enthousiasme juvénile, son humour un peu
décalé, son énergie, un bon rythme, de jolis textes,
qui prennent parfois à rebrousse mode comme son
Reviens pas !… Et puis il y a les groupes qu’aucune
radio nationale ne présente et qui drainent leurs fans,
circulent avec efficacité hors des sentiers battus de
la diffusion ; le groupe Bardan, avec un ensemble
qui peut faire penser à Bratsch dans ses
orchestrations, une belle dynamique, voix rauques,
harmonica, et des chansons superbes, comme
Quartier des vivants ou Vie bancale. Le concert à deux
voix de Yves Jamait où les fans chantent toutes ses
chansons, et Daniel Fernandez, une guitare
magnifique, dans les registres du flamenco ou de la
bossa nova. Des textes travaillés, une bonne dose
d’humour, un esprit engagé vivifiant, on passe de la
satire à la fresque sociale ou à l’instant poétique, très
belle évocation de Dijon… Un ensemble qui a fait salle
comble au Bois de l’Aulne, rappels sans fin…
Décidément la chanson française nous porte bien !
MARYVONNE COLOMBANI
Le Festival de la Chanson Française
s’est tenu dans le Pays d’Aix du 1er au 9 oct
36
MUSIQUE
ACTUELLES
Joe Jackson © X-D.R.
La Fiesta des Suds est toujours synonyme de
réchauffement climatique assuré dans les méandres
surchauffés du Dock des Suds. Du 15 au 23 oct
avec six soirées (ou nuits avec un tram prolongé
jusqu’à 2h30) au programme, sans compter les
expositions, rencontres et projections, le rendez-vous
incontournable des marseillais et de nos voisins plus
ou moins proches se veut toujours aussi éclectique
et méditerranéen. Avec un budget de près d’1.2
million, plus de 60% de recettes propres (dont 380
000 euros de billetterie), la fiesta affiche une belle
santé financière : le conseil général reste le seul
subventionneur, mais ne ménage pas son
engagement qui s’élève à 500 000 euros. Dans ce
contexte-là il est sans doute maladroit d’affirmer,
comme l’a fait son Directeur Bernard Aubert lors
d’une conférence de presse très courue, qu’il ne se
passe rien à Marseille musicalement en dehors de la
Fiesta, et de Babel Med. C’est réduire vraiment très
vite le champ musical à celui des musiques du monde
(quid du jazz, des musiques contemporaines, baroques, classiques, lyriques qui rassemblent des
publics nombreux toute l’année ?), et rayer du même
geste le succès des musiques actuelles, des salles
indépendantes, de Marsatac, du Mimi, et des
quelques dizaines de concerts et festivals qui
animent la vie musicale marseillaise.
Mais cette déclaration à l’emporte pièce relevait
visiblement du désir légitime d’obtenir plus encore
pour ces musiques-là, métissées, permettant à
chacun de découvrir la culture de l’autre, mais aussi
Arno © Danny Willems
Tout est au Sud !
de s’en laisser contaminer. Pour preuve le programme : en préambule une soirée d’ouverture à
l’accent du sud, avec Ahamada Smis et les frangins
de Zebda (15/10), puis le rockeur belge à texte Arno
qui fera figure d’extraterrestre à côté du blues occitan
de Moussu T e Lei Jovents (16/10). L’icône postpunk Joe Jackson (20/10) et le légendaire
saxophoniste Wayne Shorter (21/10) seront à
surveiller de près avant la nuit aux couleurs africaines
animée par Youssou N’Dour & Le Super Etoile de
Dakar et secondé par Dub Inc (22/10).
L’embrasement final à tendance électro des Gotan
Project, du déjanté Bonaparte (voir p 73) et des
Les missionnaires
de la musique
Sous l’impulsion de Tandem, Scène de Musiques
Actuelles Départementale, le 14e Forum des
Musiques Actuelles bat son plein de l’épicentre
Toulonnais jusqu’aux confins du Var. Itinérant du 6
au 23 oct avec des points de chute à Draguignan,
Brignoles et Saint-Raphaël, le chapiteau plein de
surprises se centrera sur l’agglomération toulonnaise
jusqu’au 20 nov (Toulon, Hyères, La Seyne, La
Valette, Ollioules, La Garde, La Crau, Six-Fours,
Le Pradet, Le Revest). Pouvant accueillir 300
personnes, cette immense tente sonore est à visiter.
L’action culturelle y est de rigueur, et Tandem
programme des concerts pédagogiques destinés
Appletop © X-D.R.
couche-tard des platines The Supercharger &
Distropunx DJ (23/10) dément formidablement le
reproche que l’on pouvait faire parfois à certaines
éditions précédentes : la Fiesta, ouverte sur le monde
entier, prouve bien que les Suds sont partout !
FRÉDÉRIC ISOLETTA ET AGNÈS FRESCHEL
www.dock-des-suds.org
tant aux primaires qu’aux collégiens et lycéens,
autour de plusieurs histoires : les musiques actuelles
en partant du blues, la percussion de l’Afrique aux
Caraïbes et les technologies appliquées aux musiques
actuelles. De quoi intéresser non seulement les
enseignants de musique mais aussi ceux d’histoire,
de technologie, de physique ou de français avec trois
productions estampillées Tandem qui tournent
régulièrement dans l’année.
Avec une proximité et une convivialité rare lors des
grands rendez-vous musicaux, le FMA entend faire
du partage son credo avec un accès gratuit, une
proximité des artistes et une intégration de tous types
de public. Cette véritable tournée sous chapiteau
accueillera également des groupes locaux et
régionaux rompus à la scène comme les excellents
Mina May, Appletop, Chemin du désert, Kami…
dans des styles variés allant du psyché rock à
l’électro jazz. De même une exposition sur le rock
des 70’s côtoiera des rencontres autour des risques
auditifs. Un chapiteau où il fera bon flâner quel que
soit votre âge, au risque de vous cultiver sur le monde
des musiques actuelles !
F.I.
www.tandem83.com
AU PROGRAMME
AIX
Théâtre et Chansons : Michel Melchionne (17/10), Mouron
chante Brel (6 et 7/11)
04 42 27 37 39
www.theatre-et-chansons.com
ARLES
Cargo de nuit : Alice Russell (15/10), 1973, Lilly Wood & The
Prick (22/10), Anoraak, Minitel Rose (23/10), Brain Damage
(29/10), Babet (5/11), Disiz Peter Punk (6/11), Cascadeur, The
Bewitched Hands (12/11), Sly Johnson (13/11), General Elektriks
(16/11)
04 90 49 55 99
www.cargodenuit.com
AVIGNON
Théâtre du Chêne Noir : Le Cuarteto Cedron (4 et 5/11)
04 90 82 40 57
www.chenenoir.fr
Les Passagers du Zinc : Festival la Triplette des Passagers avec
Izia (14/10), Hocus Pocus (15/10) et Christophe (16/10), Jaqee,
Kzé Négré (22/10), Twin twin, 69 (23/10), les 10 ans de Faya
Reflex (29/10), Disiz Peter Punk, Renga feat. Dr Mozz (5/11),
Madjo, Brune (6/11), Joyce Jonathan, Peau (12/11), Pony Pony
Run Run, In the club (19/11)
04 90 89 45 49
www.passagersduzinc.com
BERRE L’ETANG
Forum des jeunes et de la culture : Victor Démé (29/10),
Vertigo Songs, Las Hermanas Caronni (6/11), ciné musique avec
la projection de O’ Brother de Ethan et Joel Cohen, suivi du
Carolina Chocolate Drops (18/11 à 18h30 et 21h30)
04 42 10 23 60
www.forumdeberre.com
CAVAILLON
Théâtre : Jeanne Cherhal (5/11)
04 90 78 64 64
www.theatredecavaillon.com
CHÂTEAU-ARNOUX
Théâtre Durance : Roberto Fonseca (5/11)
04 92 64 27 34
www.theatredurance.com
CHÂTEAUNEUF-DE-GADAGNE
Akwaba : Beast, Emilie Chick (15/10), Dele Sosimi et le Hot club
afrobeat orchestra, Soul freak brothers (22/10), Elysian Fields,
Jesus is my girlfriend, Phi (24/10), Rahzel/Oddateee dj set
(4/11), Kiddus I, Derajah, Selecta solo (6/11)
04 90 22 55 54
www.akwaba.coop
ISTRES
L’Usine : U-Roy (21/10), Hocus Pocus, Smooth (30/10), Rod
Taylor and the positive roots band (5/11), Kaly live dub (6/11)
04 42 56 02 21
www.scenesetcines.fr
LUNEL
Salle Georges Brassens : Festival de mandolines (du 27 au
30/10)
04 67 42 06 81
www.mandolinesdelunel.com
MARSEILLE
Théâtre La Criée : Diane Reeves (2/11), Nada Strancar chante
Brecht/Dessau (10 au 16/11)
04 91 54 70 54
www.theatre-lacriee.com
Cabaret Aléatoire : Dj Mehdi, Riton (16/10), T Raumchmiere
live band, Markovo (21/10), Mas Professor (30/10), W.A.S.P.
(4/11), Rahzel, Underkontrol, A SM (5/11), High Tone (6/11),
Broken Social Scene, The Bewitched hands (10/11), !!! Chk Chk
Chk (13/11), Shannon Wright (15/11)
04 95 04 95 09
www.cabaret-aleatoire.com
Espace Julien : The swell season (14/10), Apocalyptica (16/10),
The Dillinger escape plan (17/10), John Mayall, The Yardbirds
(20/10), Moriarty, Kid Francescoli (22/10), Sexion d’Assaut
(26/10), Sophie Hunger (27/10), Izia (4/11), Joby Bernabe
(6/11), Raul Paz (11/11), The Drums (15/11)
04 91 24 34 10
www.espace-julien.com
La Mesón : Fabrizio Bosso quartet (17/10), tablao flamenco
Manuel Gutierrez (6/11), Otkhon (7/11), carte blanche à Manu
de Barros (16 au 20/11)
04 91 50 11 61
www.lameson.com
MARTIGUES
Théâtre des Salins : Rencontre entre Francesco Tristano, Rami
et Bachar Khalifé et Murcof pour un concert classique suivi d’une
performance électro (10/11), Incisif #1 : Lilly Wood & The Prick,
Emilie Lesbros (12/11)
04 42 49 02 00
www.theatre-des-salins.fr
MAUBEC
La Gare Adama Cissoko et les Blakoros, La Mauvaise herbe
(15/10), Nathalie Natiembé (23/10), Trempoly (10/11),
Samenakoa (12/11)
04 90 76 84 38
www.aveclagare.org
NÎMES
Théâtre : dans le cadre de l’Agglo au rythme du jazz, concert de
Chick Corea (18/10)
04 66 36 65 10
www.theatredenimes.com
MUSIQUE
37
OLLIOULES
Châteauvallon : Bibi Tanga and the Selenites (23/10), Black
rock coalition orchestra, a tribute to the black women songwriters
(5 et 6/11), Roberto Fonseca (13/11)
04 94 22 02 02
www.chateauvallon.com
PORT-DE-BOUC
Théâtre Le Sémaphore : Sam Karpienia, extatic Malanconi
(6/11)
04 42 06 39 09
www.theatre-semaphore-portdebouc.com
SAINTE-MAXIME
Le Carré : David Murray end the Gwo-Ka Masters (17/10), Le
nouveau trio gitan & Florin Niculescu (23/10), Black rock
coalition orchestra, a tribute to the black women songwriters
(7/11)
04 94 56 77 77
www.carreleongaumont.com
SALON-DE-PROVENCE
Portail Coucou : Tremplin Buzzbooster (16/10), Pakistan
express, The Yolks (23/10), Dhoad gypsies from Rajasthan
(2/11), Alabama Slim (6/11), Anything Maria, Lily wood and the
Prick (13/11)
04 90 56 27 99
www.portail-coucou.com
TOULON
Oméga Live : Chewy chocolate cookies, Manege 88, The
Slutgarden, Beat Wankers, Pixel Face (16/10), Local Heroes 16 :
Voodoo, Heiki (22/10), Local Heroes 17 : Lag, Run, P-Troll,
Hollywood Sekks (6/11), Pigalle, Bat Point G (19/11)
04 98 070 070
www.tandem83.com
VENELLES
MJC : Evelyne Gallet (6/11)
04 42 54 71 70
Et en jazz...
ARLES
Jazz’Trium : Louis Winsberg-Lilian Bencini-Olivier Renne.
Masterclass durant le week-end du concert (5/11)
0490 541 205
www.radio3dfm.com
AVIGNON
AJMI : Workshop de Lyon / Slogan (14/10), Tom Rainey Trio
(19/10), Noah Rosen trio (22/10), Christian Brazier 4tet
(29/10), Une année dans la vie de Wayne Shorter, écoute et
conférence-débat animée (4/11), Loïc Fauche 5tet (le 5/11)
04 90 860 861
www.jazzalajmi.com
HYERES
Théâtre Denis : Bill Carrothers (piano solo) (16/10)
04 94 007 880
www.jazzaporquerolles.org
MARSEILLE
Jazz sur la ville : Jusqu’au 17 oct. Programmation des derniers
concerts sur www.myspace.com/jazzsurlaville
Cité de la Musique : Expo Histoires de Batteries ; Olivier
Temime (15/10), Simon Bolzinger 4tet - Inca Mandinga
(l4/11), Gildas Boclé Trio (15/11)
04 91 392 828
http://pages.citemusique-marseille.com
Cri du Port ; Expo Instants Jazz par Denis Dalmasso ;
Choumissa invite Maria Simoglou (14/10), Emile Parisien 4tet
(10/11)
04 91 50 51 41
www.criduport.fr
Inga des Riaux : Fabienne Zaoui e beijo accustico (15/10),
Juste un swing (22/10), Abram jazz 4tet (29/10), Phil Good
(5/11), Arias Parisi Alamel trio(12/11)
06 07 575 558
www.inga-des-riaux.com
Station Alexandre : Carte blanche à Sylvie Paz (Bal Latino)
(6/11)
04 91 009 000
www.station-alexandre.org
Centre Edmond Fleg : Roy Swart’s cabaret-jazz (16/10)
0491 735 781
www.jazzclubprovence.com
VITROLLES
Moulin à Jazz : Robin Nicaise 5tet (16/10), Enzo Carniel invite
Nicolas Folmer (13/11)
04 42 796 360
www.charliefree.com
EN LUBERON
Du 15 au 24/10 : Rural Detour en Vaucluse / 9e édition avec
Helène Labarriere et Violaine Schwartz. Huit villages traversés
de St Saturnin à Bonnieux.
www.luberonjazz.net
38
CIRQUE
ISTRES | NONO | ARLES | MERLAN | STE MAXIME | GAP
Monstrueusement Dada
Pour Madona Bouglione, le cirque a «la
beauté de l’innocence et la force de la
vérité», c’est un art qu’elle a su rendre
contemporain tout en conservant sa
dimension traditionnelle. Avec Cirque
O Présent, sorte de maison de tous les
cirques ouverte à tous les artistes, de
toutes les disciplines, dont elle est
directrice artistique, elle a créé à Istres,
après un mois de résidence, Pentimento, sur la musique du Lac des
cygnes de Tchaïkovski. Sur scène onze
artistes revisitent le ballet, insérant au
cœur des numéros traditionnels de
trapèze, acrobaties, clowns ou encore
jonglage une poésie vibrante et inventive par le biais de la vidéo notamment
–quel jeu délicat entre la projection
d’une fleur et un clown jardinier !-, de
la danse, d’effets visuels impressionnants et délicats, telles ces boules
géantes descendues des profondeurs
du théâtre jusque sur la scène… Un
cirque délicat et nuancé.
DO.M.
Mister Monster s’est joué
au Théâtre d’Arles le 9 oct
Pentimento a été créé au théâtre
de l’Olivier, à Istres, du 1er au 3 oct
Complètement NoNo !
Quand les NoNo font leur cirque le
spectateur croit devenir fou, perd
l’équilibre, rêve tout haut et même se
met à croire à l’impossible. Il assiste à
une fable poétique et ludique composée
de minuscules sketches -absolument
irrésistibles- et de grands numéros de
cirque traditionnel -voltige, équestre,
manipulation, jonglage. Mais dans cette
rutilante parade quelque chose cloche,
Un cygne
des temps
un grain de sable enraye la belle mécanique… des situations totalement
décalées, des personnages loufoques,
des skieurs égarés, des souris
blanches glissées dans le pantalon, un
troupeau de culottes bouffantes, des
mines patibulaires qui jouent des
maracas ! Et la liste n’est pas exhaustive car l’imaginaire des NoNo est un
puits sans fond. Ahurissant le duo-duel
© Agnès Mellon
avec le cerceau, croquignolesque le
crooner déjanté, assourdissant le
battle aux 13 paires de sabots de bois.
Ah le grand méchant loup, il ferait
pleurer de rire le plus craintif des
chérubins !
Deux heures durant, le public reste
scotché sur son siège prêt à décoller
sur une simple injonction de ces
personnages farfelus. Car la piste
circulaire est devenue leur terrain de
jeux favori, livré à des numéros d’acrobaties puisés dans un vieil imagier,
peuplé de machines-objets et d’un
défilé ininterrompu de petits gestes
tonitruants et de grosses carcasses
muettes (tout est dans cette confrontation des contraires). C’est Zazie
égarée au cirque et Jarry prêtant sa
Machine à décerveler à quelques
irréductibles rêveurs.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Les NoNo font leur cirque
jusqu’au 23 octobre
Théâtre NoNo, Marseille 8e
04 91 75 64 59
www.theatre-nono.com
Pentimento © Bruno Perroud
DELPHINE MICHELANGELI
Mister Monster © Yvette Rotscheid
À partir d’un conte médiéval, la cie Anomalie &…
dirigée par Jeambenoix Mollet, associée à nouveau
à Philippe Eustachon (les Witotos), a créé une fable
fantastique, physique et très dadaïste. Si dans le
spectacle Mister Monster, l’intention est «de révéler le
monstre qui est en chacun de nous» en réunissant
une fine équipe à cheval (à dada ?) entre arts du
cirque, danse et théâtre, le résultat nous laisse
immergés dans un entre-deux volontaire et absurde
du «monde moderne». L’histoire de Valentin et Orson
(jumeaux séparés à la naissance par une ourse dans
la forêt) est prétexte à élucubrations sur le plateau,
découpé en deux espaces. Habitants de la ville et du
réel en avant-scène se confrontent à la forêt lointaine,
ses mystères et ses fantasmes. Chacun des 6
personnages puisera dans ce monde sauvage son
propre faune et sa part d’ombre. Ils se parlent à voix
basse, observent cet ailleurs muséal et fantasmé,
dans lequel ils basculent chacun leur tour, pour
devenir des êtres à poils, découvrant leur animalité.
Autour de Pierre Palmi, à poil et barbu, qui rugit sans
rougir et se laisse tartiner de mousse à raser par le
«monde social», une tribu chevelue qui saute partout,
se pend aux branches, fait le show entre galipettes,
clowneries, pop corn, acrobaties instantanées.
Humour et dérision sont tapis dans chaque recoin,
servis par une bande son «au poil» de Thomas
Turine, organique, cardiaque, vitale. Un peu décousu,
certes, ce théâtre de recherche décloisonne avec
gloutonnerie les arts pour servir un propos ambitieux
sur la nature humaine. Obscure et parfois
incohérente.
Homomorphes
Le Merlan retrouve ses humeurs vagabondes ! Outre les quatre portraits de ville
qu’il accueille avec Lieux publics et La Friche dans divers lieux de Marseille (voir
p 43), le théâtre retourne dans le troublant Muséum d’Histoire Naturelle de
Marseille… Michael Cros y installe un Zoo étrange, des cages aux barreaux
symboliques ou réels, ces corps dont la chaleurhumaine sera numérisée,
apparaissant comme une empreinte numérique, ou une sensation réelle… Corps
plastiques, de danseurs, d’acrobates, de monstres de foire, prisonniers ou libres.
Une déambulation à accomplir à la vitesse de son choix et de ses attentes : pour
trente minutes, ou trois heures…
<
Zoo chaleurhumaine
Du 28 oct au 4 nov de 19 à 22h
Museum d’histoire naturelle, Marseille 4e
04 91 11 19 30
www.merlan.org
Zoo chaleur humaine © X-D.R.
Avant
les Roms
Après s’être attaché en début de saison au sable moite des légionnaires (voir p
9), le Carré emmène sur la route des peuples nomades ; avec une exposition, un
conte musical tzigane, du grand jazz manouche et le Circus Klezmer, qui avait
enchanté Massalia il y a deux ans. Un spectacle tout public qui met en scène un
mariage Yiddish au son si caractéristique des clarinettes Klezmer. Avec quelques
numéros de jonglage et d’acrobatie virtuoses, intégrés dans une narration et un
univers poétique et burlesque. Autour de roulottes, fières de l’être, mémoire d’une
Europe centrale éradiquée par les nazis.
A.F.
Les Fils du vent
du 18 au 24 oct
Carré Léon Gaumont, Sainte Maxime
04 94 56 77 77
www.carreleongaumont.com
Oh le joli duo! Il était une fois une
acrobate rêveuse qui passait à travers
les miroirs, outrepassant les surfaces
réfléchissantes au son d’un piano qui
accompagnait ses tours… Melissa
Von Vépy offre un moment de pure
virtuosité suspendue, une incarnation
fugitive de la grâce… qui redore et
restitue la magie cruelle des miroirs
fabuleux.
A.F.
Miroir miroir
Les 12 et 13 nov à 19h
La Passerelle, Gap
04 92 52 52 52
http://theatre-la-passerelle.eu
Miroir Miroir © Christophe Raynaud De Lage
Réfléchir davantage
42
ARTS DE LA RUE
PETIT ART PETIT | GARDANNE | SALON
Dans le vent !
qu’elle a rencontrés au cours de sa résidence dans le
quartier.
Plus loin, l’atelier d’écriture de C’est la faute à
Voltaire permettait d’inventer un nouveau destin aux
personnages de contes qui se trouvent à l’étroit dans
leur histoire. Tantôt, marionnette de taille humaine
venue de Lille et son créateur Éric Bézy, proposait
des vidéos-performances filmées dans le quartier au
milieu des habitants. Le chien Bébert et son maître
Lolo de la Cie Les Cousins ont réjoui petits et grands
tandis que Cirkatomik fourguait aux festivaliers des
inventions destinées à les protéger de divers
désagréments. Cocasse !
CHRIS BOURGUE
Le Festival a eu lieu le 25 septembre
© Chris Bourgue
C’est dans un mistral vivifiant que s’est déroulé Petit
Art Petit, organisé par l’association Lézarap’art, au
cœur du quartier des Aygalades (Marseille 15e).
Familles et curieux ont été accueillis pour une journée
conviviale autour d’un pique-nique géant dans le parc
arboré de L’Oasis. Des installations plastiques s’accro-chaient sur les troncs des arbres et dans les
feuillages, produites par des ateliers participatifs
menés avec les écoles du secteur. D’autres ateliers,
éphémères, permettaient à chacun de se lancer dans
la création sans idées préconçues : réalisation d’une
fresque sur le thème du Jardin des délices de Bosch,
modelages en argile, gribouillages géants en osier...
Pascale Mijares, artiste invitée en collaboration
avec le FRAC, a réalisé pour sa part une fontaine avec
une batterie de cuisine de récup, et une sculpture
faite de tiroirs, comme autant de récits des habitants
Salon, rues et château
© Delphine Michelangeli
Onze compagnies régionales et étrangères, essentiellement circassiennes,
ont investi pendant 3 jours les rues de
Salon, transformant l’espace public en
terrain d’expression artistique gratuit.
Une volonté municipale de poétiser
l’espace urbain et démystifier les artistes en instaurant de façon pérenne ce
rendez-vous déambulatoire dans chaque recoin de la ville afin, d’après
Jean-Claude Fabre, élu à la culture,
«que les gens circulent et redécouvrent
encore plus la ville».
En ouverture de cette 2e édition, une
forme monumentale, frontale et fixe
avec Schraapzucht joué deux soirs
consécutifs au cœur de la splendide
cour du château de l’Empéri. La com-
pagnie hollandaise Tuig a proposé une
étonnante machine à remonter le temps
à qui il ne manquait que la parole. Une
cordes, poids, grande roue et poulies,
opérée par trois personnages plutôt
hostiles, rameurs de galères qui chercheraient à nous prendre dans leurs
filets. En dessous, un comédien s’agite
au milieu des chaises, tables, transats
et fenêtres, qui montent et descendent
magiquement, jusqu’à devenir lui aussi
l’objet des cadenceurs. Un bric-à-brac
incroyable qui touche surtout par son
incroyable machinerie visuelle.
DELPHINE MICHELANGELI
Salon Public a eu lieu du 1er
au 3 octobre à Salon-de-Provence
structure en bois qui devient le théâtre
d’un monde mobile, rythmé au premier
étage par une manipulation savante de
… et tout le tremblement !
16h tapantes place de l’église, un cortège étrange se met en branle. Deux
personnages d’un autre temps défilent
sur de drôles de destriers, suivis d’une
foule nombreuse et complice… Musique ! Le coup d’envoi est lancé pour
cette nouvelle édition du festival des
arts de la rue de Gardanne. Entre 16h
et 23h les spectacles se succèdent et
même s’entrecroisent. Il y a du théâtre
avec La célèbre histoire de Don Quichotte et Sancho Panza jouée en totale
interaction avec le public par la compagnie CME, dans une ambiance
Le GUID © X-D.R.
simple de détente et de divertissement.
Et puis les Clowns de la compagnie
Les Nez En Plus interviennent tout au
long du festival en faisant des blagues
au public. Sur la place devant la mairie,
Les Mains Nues de l’Orchestre
vocal de la Compagnie Traction-Avant
chantent, dansent et rythment une
balade à petits pas, tous de pois,
rayures et cachemires vêtus.
Vient ensuite le moment de la danse :
le GUID, Groupe Urbain d’Intervention
Dansée d’Angelin Preljocaj, amène son
répertoire dans la rue afin de faire
découvrir au plus grand nombre quelques principes et pages marquantes
de danse contemporaine. Entre trois
extraits de spectacles qu’ils présentent, s’intercalent deux compagnies de
danse, l’une dynamique et collective
de hip hop et l’autre en duo. Par la
proximité des représentations, on
s’attend à un dialogue dansé où cha-
cune d’entre elles va utiliser le contexte
particulier et l’espace de la rue. Mais il
s’agit plutôt d’une succession de
chorégraphies, et chacune s’y exprime
avec un style très marqué. Souvent
avec talent, sachant ainsi satisfaire
tous les publics. Le public se presse à
chacune des prestations en essayant
de ne pas en perdre une miette ! Beaucoup s’étonnent, rient, apprécient.
Le festival se poursuit après une petite
pause «dîner» par une déambulation
acrobatique et pyrotechnique où chaque engin présenté semble sortir d’un
siècle passé, au temps où Léonard De
Vinci imaginait des machines extraordinaires.
CLARISSE GUICHARD
Tremblement de Rue
s’est déroulé le 2 oct
à Gardanne
GYMNASE | LE MERLAN | LIEUX PUBLICS
ARTS DE LA RUE
43
Défie-les !
Ouvrir la saison avec un groupe d’amateurs qui
reprennent l’idée d’un défilé de mannequins ? L’idée
semblait tape-à-l’œil et démago ! Rares sont ceux qui
savent jouer pudiquement des maladresses des nonprofessionnels, et il leur fallait encore subvertir les
règles de la représentation/marchandisation des
corps… Le propos de la cie T-public est néanmoins
d’une limpidité surprenante : sur une scène
retrouvant le proscenium anglo-saxon du défilé de
mode -pour voir sous les jupes et zyeuter les jambes,
encadrés par des compressions de bouteilles en
plastiques, défilent non stop les corps de ces
amateurs qui ont sacrément bossé, et savent ce
qu’on leur fait faire. Survêtus pour se stripteaser
comme des pelures d’oignons, voilés pour mieux
contraindre leur érotisme, affublés de sacs sur la tête,
de codes barres, de prothèses de membres qui les
rendent monstrueux, ils mettent au clair les règles
absurdes du genre. En affichant leur monstruosité,
mais surtout en assumant tranquillement la présence
sur scène, dans ces positions là, de leurs corps non
formatés. Beaux, laids, gros, imparfaits, nus parfois,
simplement, parodiant sans y croire les déhanchements démarches provocations et airs boudeurs des
professionnelles de la mode : celles qui s’affichent
sur nos kiosques, nos écrans, dans nos rues, et
jusqu’à la tête féminine de l’État, modèles de rien,
omniprésentes…
© Agnès Mellon
Le défilé de marques, coproduit par le Merlan,
s’est déroulé lors du Préavis de désordre urbain
le 17 sept, et pour l’ouverture du Gymnase le 24 sept
A.F.
Petits actes subversifs
Les premiers jours de Small is beautiful interrogent
notre quotidien avec force et pertinence… Roger
Bernat proposait avec sa Sirène qui ouvrait les
festivités, puis en soirée, de mettre sur la place
publique des scenarii peu innocents ! À midi, équipés
de casques, ceux qui possédaient un billet se
Small is beautiful © Agnes Mellon
voyaient encerclés, puis poursuivis par des «loups»
affamés (voir couverture). Le soir le jeu se faisait plus
personnel, les questions plus directes (avez-vous peur
des arabes ?), voire carrément intimes (vous
caressez-vous le sexe le matin ?), les attitudes des
participants donnant clairement à voir leurs réponses
impudiques, ce qui opéra des rapprochements
étonnés entre jeunes et mûrs, pauvres et installés,
sans choquer ceux qui gentiment refusèrent d’entrer
dans le jeu… Sur les Escaliers de Saint Charles,
d’autres happenings : les artistes descendent les
marches, incongrus, superbes ou burlesques, la foule
grossit, s’arrête, hausse les épaules ou applaudit au
cadeau. Stephen Bain, sur le Port, propose un thé
et une conversation, very british même lorsqu’il se
plie en quatre…
Un très beau début de petites choses, et d’autres se
préparent : l’ANPU a semé ses questionnaires à
Martigues, Aubagne, et Marseille après avoir analysé
Port-Saint-Louis. À partir du 13 oct les réminiscences
latines vont s’afficher sur les murs de nos monuments, visibles seulement si vous prenez le petit
train…
Et puis il y aura, en coproduction avec Le Merlan, le
collectif Berlin. Qui vient d’Anvers, comme son nom
l’indique, et propose 4 portraits de villes particulières,
coproduits conjointement par le Merlan et Lieux
publics : Iqaluit s’installera du 13 au 23 oct au Palais
de la Bourse, tandis que Jerusalem et Bonanza
(village texan a priori paradisiaque, mais traversé
d’incroyables conflits) projetteront leurs ombres et
leurs interventions à La Friche du 19 au 23 oct. Le
cycle Holocène, et Small is beautiful, se termineront du 20 au 23 oct Place de la Major avec le
spectacle sous chapiteau sur la capitale Russe.
Moscow, et sa violence, et sa beauté.
A.F.
Small is beautiful
Jusqu’au 23 oct
04 91 03 81 28
www.lieuxpublics.com
Cycle Holocene
Jusqu’au 23 oct
04 91 11 19 20
www.merlan.org
Collectif BERLIN © Thomas Legreve
CAHIER JEUNESSE
Les jeunes spectateurs et leurs familles peuvent picorer à l’envi dans
le menu Mômaix 2010 composé par 7 structures aixoises (du 13
oct au 18 déc). De la danse avec la dernière création de Michel Kelemenis
(voir p 46) et les Petites histoires.com d’un virtuose du hip hop Kader Attou. La chanson
se pare de toutes les couleurs depuis les Chansons bouts de crayons de Michel
Melchionne jusqu’aux élucubrations verbales de Corentin Coko (Tango des organes)
en passant par Isabelle Bloch-Delahaie (Malvina chante avec les loups). À moins que la
curiosité enfantine ne soit titillée par le portrait d’Armide l’enchanteresse dessiné par
l’Orchestre français des jeunes Baroque à travers les œuvres de Lully, Haendel et
Haydn (concert pédagogique) ou le pétillant opéra d’Offenbach Orphée aux enfers…
Cette année, conte, théâtre et marionnette se taillent la part du lion ! Les comédiens
du Théâtre des Ateliers partagent autour d’un goûter leur Saison Russe, les mots de
Philippe Dorin (Dans ma maison de papier), Wajdi Mouawad (Pacamambo) et Ulrich
Hub (L’Arche part à 8 heures) tintinnabulent sur scène. Parfois même il y a des images
immobiles et des mots muets mélangés comme dans La Trafiquante. Plus spectaculaire,
le Slava’s Snowshow parade en tête des festivités.
<
M.G.-G.
Mômaix
04 42 91 99 19
www.aixenprovence.fr
Époustouflant
La Trafiquante © X-D.R
Éclectique !
Mamanbobo
Et si le «pays du jamais jamais» de Peter Pan ressemblait
à un bric-à-brac de canapés usés, à un vaisseau fantôme
et des libellules plus belles que Betty Boop ? Et si une
joyeuse tribu de 6 acteurs parvenait à rendre plus vraie
que vraie l’illusion du théâtre au point qu’une fois le rideau
tombé, on tangue encore ? On croit dur comme fer aux
rêves comme la famille Darling ? Et si on se prenait pour
de méchants pirates, une bande de gamins insolents, des
Indiens ? Et si on jouait jusqu’à l’épuisement, emporté par
la malice des comédiens, les trouvailles de la mise en
scène, le rythme jubilatoire…
Lucie a 12 ans lorsqu’elle perd sa grand-mère adorée,
Marie-Marie, emportée par la Lune. Persuadée que la
Mort va venir la chercher à son tour, la jeune fille l’attend
pour lui casser la gueule ! Et continue à veiller sur elle…
Comment mettre des mots là où il difficile de s’aventurer ?
Comment dire la candeur et la rébellion, la souffrance et
l’insouciance ? L’auteur Wajdi Mouawad a choisi de créer
un hymne à la vie, ici mis en images et en jeu d’ombre et
de lumière par la jeune metteure en scène Marie
Provence.
Pacamambo
dès 9 ans
6 nov 17h
Théâtre du Jeu de Paume, Aix
0 820 000 422
www.lestheatres.net
Peter Pan ou le petit garçon qui haïssait les mères
dès 8 ans
2 nov 19h
Théâtre Antoine Vitez,Aix
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
10 nov 20h30
Le Cadran, Briançon
04 92 25 52 52
www.theatre-le-cadran.eu
<
Magique
PeterPan © Agnès Mellon
En 2002, Slava’s Snowshow créait l’événement hors les
murs du Jeu de Paume. Depuis, sa tournée dans le monde
continue ! L’épopée de ces quinze clowns au nez rouge,
avec bulles de savon, gigantesques toiles d’araignée et
tempête de neige marche à coup sûr car le show de Slava
allie la performance à la poésie, une profonde tristesse à
un immense bonheur, l’absurde au surréalisme. Chaque
scène est jouée comme un tableau, chaque geste comme
un poème, chaque décor un symbole : Slava a l’art de
nous ramener au paradis perdu de notre enfance.
Slava’s Snowshow
9, 12 et 14 nov 20h30
10, 11 et 13 nov 15h et 20h30
Grand Théâtre de Provence, Aix
04 42 91 69 69
www.legrandtheatre.net
7 d’un coup
Le Petit Tailleur est un de ces contes qui valorisent les
faibles, la vaillance, l’intelligence et… la bonne fortune ! Le
compositeur Tibor Harsányi a conçu en 1939 une
partition très illustrative, où l’on entend distinctement les
mouches qui volent, le sanglier furieux qui trépigne,
l’ingénuité du tailleur, la beauté de la princesse… Une
trentaine de minutes, la voix radiophonique de François
Castang, sept musiciens dirigés par Roland Hayrabédian :
un bon moyen d’entrer en musique dès 7 ou 8 ans.
Le Petit Tailleur
17 oct 15h
Grand Théâtre de Provence, Aix
04 42 91 69 69
www.legrandtheatre.net
Âge tendre
L’Atelier des Arts de Sainte Marguerite, qui
propose désormais une véritable saison de
spectacles vivants dans le 9ème arrdt de Marseille,
consacre les vacances de la Toussaint aux tout
petits : avec des spectacles dès l’âge de la crèche,
jusqu’à la fin de la maternelle, d’autres juqu’à 10
ans, par des cies marseillaises qui aiment à
raconter des histoires et à faire vivre sons et
objets : la Cie Mascarille, Crochetryolé, l’Atelier de
mars se produisent dans la journée (10h, 16h ou
18h selon les âges…) du 26 au 30 oct…
Vacances au théâtre
Marseille, 9ème
04 91 26 09 06
Cie Crochetryolé, semaine Vacances au théâtre © X-D.R
AU PROGRAMME
La vie, la mort, le temps, la pensée… les jeunes
enfants aussi s’interrogent, et interrogent le monde.
Pour ces philosophes en herbe, Pasquale Buonarota,
Alessandro Pisci et Lucio Diana ont imaginé une
fable en trois volets dont un sur l’esthétique : La fable
de la beauté ou «l’aventure fabuleuse et
rocambolesque d’un roi et de son bouffon à la
recherche de la beauté qui fera de son royaume le
meilleur des royaumes». Quel qu’en soit l’endroit.
Un spectacle donné en français pour la première fois,
dans une adaptation signée Denis Fayollat.
Les «Gitans du monde» font une halte au Carré le
temps de l’exposition-installation Les fils du vent Tziganes et peuples nomades et du spectacle de la
Cie Est en Ouest Sur la route des tziganes. Deux
manières de découvrir leurs modes de vie :
l’exposition propose de marcher sur leurs pas à
travers des photos et des images historiques, des
roulottes et un campement ; Jean-Baptiste Laya
choisit la poésie du geste en mouvement, le goût de
l’enchantement et la musique klezmer pour évoquer
ce peuple victime de l’exode. Sur le plateau, une
danseuse, une conteuse et cinq musiciens sont les
acteurs de ce conte musical universel.
En prolongement, deux rencontres : le 21 oct avec
Jean-Baptiste Laya et les artistes à l’issue de la
représentation ; le 23 oct avec Pierre Le Fur,
conservateur du musée Un siècle de roulottes pour
échanger sur le thème «Nomadisme et littérature
de voyage».
<
Mammaluna
dès 4 ans
20 oct 15h
La Gare Franche, Marseille 15e
04 95 04 95 70
www.theatremassalia.com
La fable de la beauté
dès 6 ans
20 oct 15h
Théâtre Durance, Château-Arnoux
04 92 64 27 34
www.theatredurance.com
© Nicola Pavone
Surprise
Les fils du vent – Tziganes
du 18 au 29 oct
Parvis, grand hall et médiathèque
Sur la route des tziganes
21 oct 14h30
dès 6 ans
Le Carré, Sainte-Maxime
04 94 56 77 77
www.carreleongaumont.com
Du théâtre sans texte (ou presque), expressionniste,
visuel et sonore dans lequel on entre comme dans
un rêve… Une vendeuse d’allumettes est un conte de
glace et de feu écrit par Andersen, adapté à la scène
par la compagnie L’Escabelle en une version
contemporaine : c’est une petite fille pauvre oui, mais
pas résignée, qui s’efforce en rêvant de choisir sa
destinée : tel est le message de Heidi Brouzeng grâce
à son look de personnage de BD, ses petits pas de
danse, ses mots décousus, son masque et sa kyrielle
d’objets. Il y a de la joie dans cette sombre histoire !
Insolent
C’est un régal que de voir la Cie Vol plané se saisir du
Malade imaginaire, comédie-ballet en trois actes dans
laquelle Molière pille allègrement ses propres
œuvres : Les Fourberies de Scapin,Tartuffe, Le Médecin
volant. Pour jouer cette pièce noire et folle, quatre
acteurs déploient leur art sans compter, portés par la
vivacité de l’écriture, la collusion de la farce avec la
tragédie. Sur scène, débarrassés de tous les artifices
de l’illusion, ils font entendre au plus juste la petite
musique de Molière.
Une vendeuse d’allumettes
dès 6 ans
16 et 17 nov 19h30
Théâtre de Grasse
04 93 40 53 00
www.theatredegrasse.com
Le Malade imaginaire
dès 12 ans
12 et 13 nov 19h
Le Cadran, Briançon
04 92 25 52 52
www.theatre-le-cadran.eu
La famille Tombola ne possède rien d’autre qu’un
arabiye, petit chariot fourre-tout pour transporter
ses objets usuels : ils sont voyageurs, explorateurs de
mémoire et raconteurs d’histoires, sans cesse sur les
routes entre l’Europe et l’Orient. Pour évoquer leur
vie la Cie ExtraMuros et le Collectif Kahraba
croisent théâtre d’ombre, marionnette et théâtre
d’objets dans une économie de moyens qui colle à
la situation. Un drap devient l’écran, un sac plastique
un nuage, une bouilloire un coffre d’argent… Pour
tout trésor la famille Tombola a du cœur !
Arabiyetna, La Famille Tombola
dès 6 ans
11 et 13 nov 15h
Daki Ling, Marseille 1er
04 95 04 95 70
www.theatremassalia.com
Frissons
Premier de 3 ciné-concerts avec Filmharmonia, le
PôleJeunePublic «fait entendre» Le Fantôme de
l’Opéra, adaptation au cinéma du célèbre roman de
Gaston Leroux par Rupert Julain (1925). Du noir et
blanc, bien sûr, de l’effroi avec des souterrains hantés,
de l’amour avec un étrange génie défiguré. Si absolu
et exclusif que lorsque Raoul entre dans la vie de la
belle Christine, le fantôme ne le supporte pas… Au
pied de l’écran, l’Orchestre de l’Opéra emporte
l’auditoire cinéphile, dirigé par Gabriel Thibaudeau,
compositeur canadien qui s’est fait une spécialité de
l’accompagnement musical de film muet.
Le Fantôme de l’Opéra
dès 8 ans
6 nov 20h
Opéra de Toulon
04 94 98 12 10
www.polejeunepublic.com
© Arnaud Hussenaut-Desenonges
Nomade
<
Le coup de projecteur sur la vitalité de la création
italienne se poursuit : après le Teatro Kismet Opera,
place à la Cie Cerchio di Gesso et sa pièce de
théâtre Mammaluna, C’era una volta e non c’era. Il était
une fois et il n’était pas… trois sœurs endormies,
devenues grises et oubliées alors que les années
passent. Cent ans, peut-être plus ? Tout basculera le
jour où Mammaluna, par une nuit de pleine lune,
traversera cette grande fenêtre blafarde et ravivera
les couleurs et les joies du passé.
45
Philosophique
Voyage
Illumination
SPECTACLES
46
SPECTACLES
LE MERLAN | CENTAURE | JEU DE PAUME | SALINS
Est-ce magique ?
tant qui lui manquait. Peut être les
magiciens ont-ils aussi à lui
apprendre… Les enfants qui étaient là,
les parents aussi, et les adultes sans
enfants, n’en revenaient pas : si on voit
des magiciens chez Sébastien, à la télé
la manipulation est nettement moins
sidérante !
Et puis il y avait le Soir des Monstres
d’Etienne Saglio, comme une preuve
du bien fondé de cette programmation. Le magicien, qui est aussi
acrobate, metteur en scène et
comédien, maitrise les arts magiques
pour faire naître des monstres : ses
jonglages illusionnistes, ses tuyaux qui
s’animent et qu’il massacre longuement, ses jeux des cordes qui
s’emmêlent et l’envoient dans les airs,
ses projections qui multiplient le réel
et le diffractent jusqu’à le faire disparaître, tout cela construit un spectacle
terrifiant et soufflant, dont la magie est
un ingrédient essentiel. Entre l’appétit
cruel de Max et les maximonstres, et
les acrobaties burlesques de Buster
Keaton.
Après un Défilé de marques
programmé au Gymnase
(voir p 43) la saison
du Merlan débutait
en ses murs avec
10 jours de magie
La démarche artistique de Nathalie
Marteau, directrice de la Scène
Nationale, est toujours singulière : elle
invite des formes inattendues, qu’elle
produit souvent et présente à des
publics très mixtes, des plus branchés
culture jusqu’aux gamins turbulents des
quartiers nord. Et ça marche, parce
que les formes sont accessibles, près
du corps - comme on dit d’un vêtement- et loin des textes la plupart du
temps. Proposant d’autres écritures.
Mais la magie, fallait l’oser ! Si les arts
circassiens ont conquis leurs lettres de
noblesse dans les salles de théâtre
subventionnées, il n’en est pas de
même pour les saltimbanques illusionnistes, manipulateurs de cartes, de
lames rétractables ou de pensées.
La programmation proposée au
Merlan n’échappa pas toujours à un
côté Grand Cabaret de Patrick
Sébastien. Ce qui est dommageable :
ce que l’on peut voir là n’a a priori pas
grand-chose à faire sur une scène
Dark Blue Bloom © X-D.R
subventionnée. Mais est-ce bien sûr ?
Scorpène avec ses analogies scientifiques approximatives, son côté
grandiloquent mine de rien, est un brin
agaçant. Mais ce qu’il parvient à produire donne l’impression vertigineuse
qu’il entre dans les têtes. Et interroge
sur le réel, le regardé, le temps du
spectacle, ce qu’on nous montre et
qu’on nous cache. Comment fait-il, se
demande-t-on ? Comme devant les
manipulations plus terre à table de
Bébel, qui produit un close-up sidérant,
proprement inexplicable. Les numéros
Performance
Le Centaure propose dorénavant une performance tous les mois ! Ces petites
formes font leur réputation dans le monde des salons hippiques, où ils remportent
toutes les compétitions. Artistiques et troublantes, elles plaisent beaucoup aux
jeunes adolescents, souvent
fans de chevaux et habités
de monstres hybrides
mythologiques…
illusionnistes à coups d’épées, de lévitation et de miroir traversé de part en
part de Hugues Protat et de son
épouse potiche, ou l’abattage comique
du show de Gaetan Bloom, sont plus
contestables mais tout de même… Il y
a là non pas un art en soi, mais tout un
pan illusionniste que la scène contemporaine, toute à ses réflexions sur la
distanciation et la cruauté, a négligé
d’explorer. Il est si divin d’y croire, d’être
épaté, bluffé, illusionné ! Les arts circassiens ont apporté à la scène
d’aujourd’hui un sens de l’exploit épa-
AGNÈS FRESCHEL
La Magic Week s’est déroulée
au Merlan du 1er au 10 oct
Matisse et la danse
noir en blanc, puis on s’introduit dans
l’atelier du peintre, il y rencontre
l’inspiration (Caroline Blanc, magnifique
et mutine), puis les traits et les
couleurs… La narration est limpide,
cela se conclut par une belle évocation
des Danseuses, sur un clair de lune de
Debussy orchestré... Et si les choix
musicaux synthétiques du début sont
plus contestables, le Jazz de Redolfi
donne à la pièce juste le peps qui
manquait aux premières scènes !
Bonne idée que de mettre l’idée de
Matisse en danse ! Ses couleurs et ses
formes simples, ses aplats et ses feuilles
découpées, trouvent dans la courte
pièce de Michel Kélémenis une
illustration de choix. Pertinente. Cela
commence par une visite au musée en
A.F.
Poème Centaure
Le 13 nov
Théâtre du Centaure,
Marseille 8e
04 91 25 38 10
www.theatreducentaure.com
A.F.
Henriette et Matisse a été créée
à la Biennale de la danse à Lyon, et
dansée aux Salins le 5 oct.
© X-D.R
© Agnès Mellon
Elle sera reprise au Jeu de Paume,
Aix les 13 et 14 oct
dans le cadre de Mömaix
0 820 000 422
www.lestheatres.net
CHÂTEAUVALLON | GYMNASE | GRAND THÉÂTRE DE PROVENCE
SPECTACLES 47
Double face
Si l’étiquette hip hop colle encore à la
Cie Farid’O, Saleté est autrement plus
complexe. La parole rude et incisive de
Robert Schneider est portée par quatre
danseurs-récitants incarnant tour à tour
Sad, irakien de 30 ans débarqué en
Allemagne où il vend des roses. Préjugés,
jugements hâtifs, peur, différence jaillissent,
exhumés de sa tête sur une BO qui
scande autant les mots que les corps.
Des interprètes à l’énergie «hip hopienne», c’est vrai, dont chaque déplacement,
chaque glissement, chaque modulation
semblent s’immiscer dans la respiration
de l’autre. Théâtre et danse se marient
subtilement : au texte écorché vif et
militant qui puise sa cruauté dans la
violence faite aux peaux basanées («la
guerre a un sens») répondent une danse
fluide, des figures aériennes. Comme si
Farid Ounchiouene détricotait la dure
réalité par la douceur des corps, une
certaine légèreté. Dans les rues de
Bassora ou d’ailleurs, l’étranger n’a pas de
nom de famille - pourquoi faire ? - il vend
des roses. Et dans ce ballet de fleurs
rouges, les épines ne blessent même plus
les mains de ceux qui dansent…
A contrario, la Cie Alexandra N’Posse
développe exclusivement une grammaire hip hop et smurf et son spectacle
Les S’tazunis sent le «réchauffé», enfile les
démos et les saynètes comme un collier
de perles en essayant, vainement, de
raconter une histoire. Haro sur la super
puissance américaine, son affreux billet
vert, la convoitise des hommes, le tout à
la louche… Dans cette bande joyeuse
qui surfe sur toutes les musiques made in
USA, les hommes tirent leur épingle du
jeu en offrant un ou deux soli puissants,
dont une partition fusionnelle avec une
table. Mais c’est peu !
Saleté © Andras Fenris
Saleté et Les S’tazunis ont été donnés
respectivement les 24 sept et 1er oct à
Châteauvallon
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Hommes-orchestre
© X-D.R
Cet Offenbach-là commence au milieu du fatras d’un
plateau de théâtre qu’une troupe de comédiens
découvre au seuil de sa première répétition. On monte
La Vie Parisienne ! Mais le metteur en scène fait fauxbond. La partition posée sur un lutrin, les chanteurs
découvrent le premier chœur, lisent les dialogues
initiaux, se répartissent les rôles… Peu à peu, ils laissent
tomber leur feuille, jouent comme s’ils improvisaient : la
sauce prend. Foin d’une gare ! Les Brésiliens ou Suédois
débarquent au fil du livret, la machine prend son élan,
l’idée fonctionne à pleine vapeur… et force comique !
Pourtant ce qui est le plus original, et sans doute aussi
le plus économique, c’est qu’Alain Sachs distribue des
artistes capables de jouer la comédie, chanter, danser…
et même interpréter l’accompagnement instrumental.
On se relaye au piano (selon un planning sans doute
calculé sur excel), on sort sa trompette, son violon ou
Et en plus de gueules de théâtres, certains en possèdent
la voix ! Haut-perchée à souhait en Veuve d’un colonel,
graveleuse celle du Bottier, tandis que la coquette
Métella s’illustre dans le seul air réellement lyrique de
l’œuvre (les voix sont cependant reprises par des
micros en façade). L’idée distanciée chemine
ardemment, autant dans le pastiche «Son habit a craqué
dans le dos», que dans l’univers pré «dada» qu’on peut
parfois dénicher chez Offenbach… Le tout dans la
fête… et couronné par vrai Cancan en apothéose.
JACQUES FRESCHEL
son violoncelle, sa clarinette, une grande duduche tire sa
flûte, et vas-y qu’on te pousse au pied d’une harpe,
qu’on frappe en bande sur un marimba ou tout autre
outil sonore…
Mille et une couleurs
La Vie Parisienne a été jouée au Gymnase
du 28 septembre au 2 octobre
Les Siecles © Agnes Mellon
Les musiciens des Siècles ont fait briller
de mille feux l’odyssée des Ballets Russes
au Grand Théâtre de Provence : nous
n’étions certes pas au Châtelet le 4 juin
1910 mais, cent ans et des poussières
plus tard, François-Xavier Roth a fait
revivre avec éclat le programme, pour le
bonheur des oreilles de tous âges
rassemblées ce soir-là.
1910 : la fabuleuse histoire des Ballets
Russes n’en était qu’à ses balbutiements
et faisait découvrir au Tout-Paris les pages
orchestrales russes mêlant folklore,
avant-garde, tradition romantique et
orientalisme exacerbé. Le Festin, ballet
regroupant des extraits symphoniques
de Moussorgski, Glinka ou Tchaïkovski et
Les Orientales, esquisses chorégraphiques
associant Glazounov et Arenski aux
nordiques Grieg et Sinding (avec des
orchestrations
originales
des
compositeurs contemporains Mantovani
et Piper) ont le temps d’une soirée
plongé un auditoire comblé au cœur des
productions du visionnaire Diaghilev.
Après des Danses polovstiennes de
Borodine très enlevées, la version
historique avec récitant de Shéhérazade
du génial orchestrateur Rimski-Korsakov
démontra le souci d’authenticité de cet
ensemble jeune et dynamique,
dialoguant avec le verbe tranchant de
Daniel Mesguich. Un concert sans
frontière où une foisonnante palette de
timbres était disposée sur la scène du
Grand Théâtre.
FREDERIC ISOLETTA
Ce concert a eu lieu le 5 oct au Grand
Théâtre de Provence à Aix
48
LIVRES
Le visage de Rosemonde
Avec pour décor «le ciel indigo du quartier
Canapé-Vert» en Haïti, où naquit l’illustratrice
Pascale Monnin, James Noël raconte La fleur de
Guernica, son premier album jeunesse, comme un
poème. Quelques mots suffisent à donner vie à
Sismo le garçon turbulent, Rosemonde et son cahier
«peuplé de dessin et de photos», comme le tableau
Guernica qu’elle lui offre. Une brève rencontre et
Sismo rêve à la jeune fille jour et nuit avant que le
tremblement de terre ne détruise tout… À
l’apparente quiétude des dessins succèdent alors
des images aux lignes fracturées, aux couleurs
froides : le chaos est dans les têtes («Une vraie Babel
Gauguin.
Ce livre bâti sur une actualité dramatique parvient à concilier l’inconciliable :
l’amour comme arme de résistance à la
tragédie.
de larmes et de désespoir en
bloc») et dans la ville (inscriptions
et signes entremêlés, visages
masqués, formes désordonnées). Seul Sismo regarde le
ciel toujours indigo, désormais
habité par les âmes des morts,
et part à la recherche de
Rosemonde. Saine et sauve
elle réapparaît telle la petite
fleur restée intacte au milieu
des ruines du tableau, son
visage peint à la manière de
Petits bouts de vie
Déjà avec Les heureux parents (Zib’25), Laetitia Bourget enchantait le
lecteur de sa plume minimaliste pour dire aux enfants la genèse du sentiment
amoureux. Avec Le creux de ma main, elle tend la main à sa voisine d’atelier
l’illustratrice Alice Gravier pour raconter l’éclosion du monde : l’arrivée d’un
bébé dans la famille.
Par la grâce d’une petite fille malicieuse et enjouée, tout un monde minuscule
s’anime au creux de sa main : un flocon de neige, un oiseau blessé qui s’envole
à nouveau, un têtard transformé en grenouille, une luciole attrapée et sitôt
relâchée, quelques morceaux de porcelaine habilement recollés… Jusqu’à ce
qu’une petite tête délicate lui sourie et qu’une grenouillère emplisse ses bras.
Face à de courtes phrases décrivant l’enthousiasme de la petite fille à faire
renaître la nature et les choses, les pleines pages illustrées enveloppent de
douceur ses jeux et ses découvertes (trait fin et précis, transparence des
encres colorées). Un va-et-vient entre rêve et réalité qui rend cet album
attachant.
M.G.-G.
Le creux de ma main
Laetitia Bourget, Alice Gravier
dès 3 ans
Éd. Sarbacane, 14,90 euros
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
La fleur de Guernica
James Noël, Pascale Monnin
Éd.Vents d’ailleurs, 15 euros
India song
Le jeune Devdas est paresseux.
Jeune apprenti coiffeur, il passe
sa journée à se contempler
dans un miroir. Pour échapper
aux reproches et aux coups, il
s’enfuit du village et, dans la
jungle, rencontre le Démon de la
nuit avec lequel il commence une
danse terrifiante… Par la ruse,
Devdas prendra le dessus et
reviendra chez lui, riche, toujours
paresseux, mais heureux ! Ce conte
imaginé par Muriel Bloch présente
l’intérêt d’être accompagné par de la
musique indienne et des instruments
traditionnels de la péninsule asiatique : le
sitar, le tempura (cordes pincées), le tabla
ou le dhol (tambours), la flûte bansouri… et les chants en bengali. Le livre
coloré est illustré par Allegra Agliardi et la documentation à la fin du livre
enseigne l’essentiel sur les spécificités musicales locales, des styles populaire et
savant ou de son enseignement.
JACQUES FRESCHEL
Livre & CD
Gallimard Jeunesse
dès 3 ans, 13,50 euros
Belle pour aller danser ?
Bianca a 13 ans, elle est en 4ème. Ses parents sont
divorcés. Alors avec son frère Lenny, lycéen difficile,
et sa petite soeur Léna, ils trimballent les valises
toutes les semaines entre les 2 apparts. Et ce n’est
pas facile à vivre, surtout avec les lettres du
Proviseur pour blâmer le grand frère… qui
s’enferme tout le temps dans sa chambre avec sa
copine tandis que Bianca doit s’occuper de sa petite
soeur et échange des SMS avec ses copines.
Et puis ce samedi il y a une fête. Mais aura-t-elle
l’autorisation de s’y rendre ? Surtout qu’il y aura
Gabriel, le cousin d’une amie. Grand, joli sourire,
tout y est pour qu’un premier amour se dessine. De
SMS en courses pour acheter avec sa mère un
nouveau soutien-gorge, tout se prépare pour cette
fameuse soirée du samedi... Le suspens est entier !
Une jolie promenade du côté des premiers émois
et approche sensible de la garde alternée, vue du
côté des enfants.
CHRIS BOURGUE
Une semaine chez ma mère
Gladys Marciano
Éd. du Rouergue, coll. Dacodac, 7,50 euros
LIVRES
Le meilleur des mondes
de Claude Ponti
Les albums de Claude Ponti parlent
à tous les âges. Ils tiennent l’équilibre
entre naïveté, fantaisie et ironie. Les
personnages y sont tout-mignons, mais
aussi vaguement inquiétants ou
énigmatiques, tels le Doudou méchant
ou Blaise, le poussin masqué ; les familles
y sont douces et rassurantes, à moins
qu’elles ne soient recyclables à la
consommation, comme dans le catalogue des parents à l’usage des enfants
qui veulent en changer. Des animaux et
objets anthropomorphes, bizarroïdes et
déjantés, qui ressemblent à rien ou à
nain porte quoi, sont affublés de noms
ronds et sonores, à l’humour potache :
Okilele, l’Eugénie des larmes, la carpe
Hédiem,
Métentenskondti
et
Métébouché…
On ne s’étonnera pas que les albums
de Claude Ponti plaisent aussi aux
architectes, qui le mettent à l’honneur
cette année. L’architecture hybride mêle
le minéral à l’organique, et au végétal.
Des châteaux à la Gaudi tiennent dans
un équilibre précaire ; les cabanes dans
les arbres ont la taille du cosmos ; les
larmes font des maisons. Les espaces
saturés et grouillants alternent avec des
immensités épurées ; les jeux d’échelles
animent des paysages en transformations constantes, selon une logique
d’associations d’idées qui tient au rêve
ou au caprice de celui qui l’explore. On
fabrique le château d’Anne Hiversère
en suivant la recette du gâteau ; des
aventures initiatiques conduisent d’un
univers à un autre, avec pour compagnon la porte de sa maison perdue ; on
traverse des miroirs et des rideaux de
pluie. Et ainsi, comme dans Lewis Caroll,
explorer le monde revient à le réinventer au fur et à mesure qu’on le
découvre.
Si les albums de Claude Ponti plaisent à
© Bih Bih et le Bouffron-Gouffron, Claude Ponti, Ecole des Loisirs, 2010
51
49
tous les âges, et aux architectes,
c’est grâce à l’inépuisable fécondité de
ces mondes possibles, effervescents ou
oniriques, qui se transforment et se
réinventent sans cesse, en se réajustant
à la mesure des petits qui grandissent,
et des grands qui rajeunissent.
AUDE FANLO
Quand l’architecture se livre
avec Claude Ponti
du 15 sept au 15 janv
Ateliers de construction d’un
Abrikaban, espace de lecture,
workshops
Maison de l’architecte, Marseille 8ème
Exposition et ateliers
Librairie Imbernon, le Corbusier,
Marseille 8ème
à partir du 17 nov
L’Ile aux livres à l’Alcazar : 80 dessins
originaux extraits d’albums
et une carte blanche pour 5 vitrines
qui contiendront des dessins
préparatoires, objets et références
personnelles
Rencontre avec Claude Ponti le 17
nov à 9h30, animée par Adèle de
Boucherville et Olivier Douzou et
journée des professionnels le 18 nov
Libellule et moutons
Encore deux très jolis titres chez Picquier. Le
premier nous parle de la mort d’une libellule dans
un jardin. Les fourmis s’empressent autour d’elle en
grande procession. Rien de triste : un court poème
du Coréen Cheon Jeong-cheol illustré par les
aquarelles lumineuses de Lee Gwang-ick. L‘enfant
sera ébloui par les couleurs qui envahissent peu à
peu les pages tout en faisant l’apprentissage
nécessaire de l’existence de la mort et du
déroulement de la vie...
Le second album présente un conte d’Yveline
Féray inspiré de la tradition tibétaine. Trois enfants
sont enlevés dès leur naissance par les sœurs de la
reine, jalouses de la maternité de leur cadette. Le
roi accuse son épouse et la fait emprisonner. Les
enfants, recueillis par un prêtre tibétain qui se
réincarnera en oiseau magique, retrouveront bien
sûr leurs parents, et les méchantes sœurs seront
punies ! Les illustrations d’Anne Romby, aux
couleurs vives, aux dessins d’une grande précision
dans les détails des costumes et
des paysages ne manqueront
pas de faire rêver les jeunes
lecteurs à partir de 8 ans.
Et aux éditions Ricochet,
pour les très petits, un
imagier présente 1000 et 1
moutons, à compter pour
s’endormir. Mais pas
seulement ! Car les
dessins sont d’une grande
variété, on s’y promène d’une
époque à une autre, d’une situation à
l’autre avec délectation et
amusement. Le jeu du comptage
des moutons tendrait plutôt à tenir
éveillé ! il ne faut pas en oublier,
certains sont bien cachés… Le trait de
Kerso, sûr et précis, à l’encre noire avec
des réhauts jaunes et un camaïeu de gris,
ménage des trésors de
drôleries.
CHRIS BOURGUE
Dans le jardin, la libellule est morte,
Éd. Picquier, 13 euros
L’Oiseau magique, Éd. Picquier,
16,50 euros
1001 moutons, Éd. du Ricochet,
17 euros
50
CINÉMA
FFM | FILMS
Corps et âmes
C’est sur les tarentelles endiablées du trio Gli
Ermafroditi que se sont ouvertes, le 28 sept au
cinéma le Prado, les rencontres FFM. Prélude
emblématique de l’énergie des organisatrices
qui, depuis 2006, font découvrir au public
marseillais le travail cinématographique des
femmes de Méditerranée.
Première rencontre : Questione di cuore, une
comédie à l’italienne qui débute par deux infarctus et s’achève par un enterrement ! Francesca
Archibugi y raconte l’amitié entre Angelo, carrossier de son état, et Alberto, scénariste en
panne d’inspiration, réunis par la peur de la mort
et le goût de la vie. Une façon drôle, tendre,
d’interroger les apparences et à l’instar d’Alberto
d’imaginer des réponses. Avec Cosmonauta,
dans le même registre, Susanna Nicchiarelli
s’amuse des illusions et des contradictions des
communistes italiens au temps du spoutnik et de
Gagarine, mêlant au parcours initiatique fictif
d’une jeune militante des images d’archives.
Se défendant d’un réalisme social potentiellement réducteur, la réalisatrice tunisienne Raja
Amari a présenté Les secrets, huis clos tragique
sur la condition féminine que l’expression
métaphorique et symbolique rend universel.
Violence des vérités dévoilées par la suggestion
de la mise en scène sous la lumière diffuse de
Renato Berta. Hafzia Hersi, alias Aïcha-Cendrillon claudiquant au bal des maîtres sur des
escarpins rouges, un talon cassé, ou s’avançant
au grand jour, sa robe virginale éclaboussée de
sang, libre enfin, crève l’écran.
Films incarnés. Le corps des femmes sujet et
objet cinématographiques de désirs, de
frustrations, d’outrages. Le corps à peine pubère
de Niloofar, destiné à l’écartèlement des accouchements successifs dans le film libano-iranien
de Sabine El Gemayel, plus bouleversant par son
Les secrets de Raja Amari
propos que par sa forme trop illustrative. Le corps
inconvenant de Lily la folle dans Pieds nus sur les
limaces de Fabienne Berthaud (voir Zib’ 31). Les
corps-fantômes des bosniaques violées et assassinées par les nationalistes serbes, pièces à
conviction manquantes pour le tribunal international de La Haye dans le thriller politique de
Christian Schmid, La révélation. Films sur les
choix aussi. Celui de Luna (Jasmila Zbanic), celui
d’Eduart (Angeliki Antoniu). Pour l’exilé Esfedandyar de retour au pays, entre vengeance et
apaisement, un choix qui s’inscrit magistralement dans tous les plans de Sepideh Farsi. Jeu
sur les mises au point, reflets, cadrages où se
recompose un Téhéran géométrique, ville abstraite que nul ne reconnaît plus.
Le prix du public de 13 en courts, mini-festival
organisé aux Variétés à l’intérieur des Rencontres, a été décerné à la fiction douce-amère
Phone Story de Berivan Binevsa. Il aurait pu aller
à Sabine El Chamaa pour Promenade : une vieille
dame dans les ruines blanches d’une ville
bombardée, ramasse un à un des morceaux de
murs effondrés. Plus tard, couchée à même le sol
dans son nouveau logement qui peu à peu se
colore, elle regarde le patchwork qu’elle a
reconstitué où courent d’anciens motifs rompus.
Image de l’entêtement de la vie et de la mémoire,
corps et âme endoloris, comme dans de
nombreux films de cette sélection qui a tenu ses
promesses de femmes.
ÉLISE PADOVANI
Films Femmes Méditerranée
a eu lieu du 28 sept au 6 oct
Désaliénation
Le 21 sept, Mariana Otero était au
cinéma Le Mazarin, à Aix, pour présenter Entre nos mains, un film
généreux, éminemment politique. «Je
voulais porter mon regard sur une
utopie qui se confronte au réel… et je
me suis intéressée aux scop, entreprises qui fonctionnent sous forme de
coopératives.»
Mariana Otero s’immerge donc, à
Orléans, pendant trois mois, dans une
PME de lingerie féminine, Starissima,
dont les salariés, en majorité des
femmes, décident de construire leur
propre coopérative. Elle montre ainsi
leurs interrogations, leurs doutes,
leurs difficultés à prendre la parole, à
décider. Il faut investir un mois de
salaire et, comme le dit une des ouvrières, «Si ça marche pas, tu perds
tout.»
Mariana, qui filme elle-même, a su
tisser de véritables liens avec ces
femmes, cela est manifeste : le film se
construit avec elles dans une énergie
commune. «Créer une coopérative ou
créer un film, c’est pareil !… Plus elles
s’impliquaient dans le projet, moins
elles avaient peur, y compris devant la
Entre nos mains de Mariana Otero
caméra.» C’est à une évidente libération de la parole de celles à qui «on
n’a pas appris à penser» que nous
assistons et, en ces temps difficiles,
c’est réjouissant !
Le sujet est grave : l’entreprise se
solde par un échec économique mais
l’expérience collective enchante. La
séquence finale, en comédie musicale, est l’aboutissement d’une vraie
aventure humaine visant à transmettre le désir qui a été de faire vivre
l’utopie.
ANNIE GAVA
Entre nos mains était également
programmé
aux Variétés à Marseille
par Films-Femmes-Méditerranée
Aller simple
On pourrait craindre qu’Illégal n’en
dise guère plus que son affiche. Le
titre, la dureté de ses lettres majuscules, apposé au tarmac d’un
aéroport, des agents de police usant
de la force pour qu’une femme monte
dans un avion, le tout noyé dans la
grisaille du plat pays. En bref, Madame
est sans-papiers sur un territoire de
l’union européenne, donc hors-la-loi,
donc interpellation, détention, et aller
simple vers son pays d’origine. Pas
besoin d’être belge pour connaître ce
doux refrain. Madame sur l’affiche,
c’est Tania, immigrée russe qui vit
seule avec son fils de 14 ans, et qui,
dès les premières images du film,
efface ses empreintes digitales au fer
à repasser. On vous le disait. Sanspapiers. Donc arrestation à la sortie du
bus, centre de rétention de la banlieue
bruxelloise, et retour vers la Russie.
Bouh, vilain système. Et ?
Illegal © Versus-production
Et Tania. Car Illégal n’accable pas, ne
cherche pas de coupable, ne cadre pas
si large. La réussite d’Olivier MassetDepasse est de ne jamais faire de la
subjectivité fictionnelle un prétexte à
la critique sociale. Chez lui, la fiction
est toute-puissante. Sa réalité, c’est
Tania et rien d’autre. Parce que Tania
(Anne Coesens, admirable de retenue)
n’a aucunement l’intention de partir,
parce que son fils, Ivan, eh bien c’est
toute sa vie, et que de toute façon, elle
s’est juré de ne plus jamais fouler le
sol russe. Pourquoi ? On ne le sait pas.
Et puis cela nous est égal. Ce serait
donner du grain à moudre aux
affréteurs de charters. Ce qu’elle est
prête à endurer pour rester en
Belgique auprès de son fils,
l’enfermement, la misère des centres
familiaux de rétention, la violence
policière, dépasse, et de très loin, cette
question de la légalité administrative
et
des
pratiques
gouvernementales. En
allant au bout de sa
Illégal
subjectivité,
s’applique à démontrer
qu’au-delà d’un système,
il y a l’humain, et qu’il est
bien là le cœur du débat.
RÉMY GALVAIN
Sortie en salles le 13 oct
Liberata,
une héroïne corse
L’héroïne du film de Philippe Carrese, pasionaria de la Résistance, est une
allégorie de l’île qui, dès 1943, sortit seule, par l’unique force de ses
combattants, du joug fasciste, et fut ainsi la première région française
occupée à réussir sa libération.
Comment concilier les fâcheux errements des intellectuels et artistes corses
lors du congrès de A Muvra en 1938 avec l’obstination des insulaires à ne
livrer aucun Juif aux forces d’occupation pendant toute la durée de la guerre,
le fameux serment de Bastia de «vivre et mourir français», le rôle réel des
FFI ou celui proclamé, pendant les décennies de l’après-guerre, des
gaullistes et de leurs acolytes tardifs…
Philippe Carrese réalise une fiction pour FR3, sans grand moyens financiers,
donc nécessairement symbolique et dépouillée, mais qui par sa finesse
d’analyse apporte un témoignage bouleversant de ce que fut la réalité de
cette période. À travers les relations ambiguës de deux frères, résistants et
communistes, avec deux soldats de l’armée italienne qu’ils retournent contre
les Chemises noires, c’est toute la spécificité de la résistance Corse qui est
symbolisée.
Liberata relate une belle histoire d’amour mais manie aussi humour et ironie
dans des dialogues savoureux, écrits tant en Corse qu’en Italien ou en
Français ; l’accent est juste et la langue belle, ce qui est constitue une rareté
dans les films évoquant l’île.
JEAN-MATHIEU COLOMBANI
Liberata a été projeté à la Maison de la Corse, à Marseille, le 25 sept
52
CINÉMA
RENCONTRES
Poésie électronique
mances se poursuivront en parallèle à la Fosse le
11 nov avec un concert de David Oppetit et Greg
Lelay et les Nuns, quatuor vocal contemporain,
puis, le 14 aux Grands Terrains avec une performance d’Enna Chaton.
À ne pas rater non plus les rencontres-débats
avec artistes et spécialistes ni les programmations internationales d’art vidéo qui se
dérouleront du 10 au 14 nov de 14 à 23 h.
Entre installations vidéo, performances poétiques
musicales et multimédias, programmations de
vidéos et films, rencontres avec artistes et
penseurs, la 23e édition des Instants Vidéo
s’annonce sous les meilleurs auspices créatifs.
L’artiste Giney Ayme sera à l’honneur : ses
performances et ses installations plastiques et
vidéo seront visibles le 5 à l’Espaceculture et à la
Compagnie, le 11 à la Fosse et le 13 à La Friche.
Les Grands Terrains, Art/Position, OÙ et
l’Artothèque exposeront les installations vidéo
d’artistes de tous horizons, dont la Française
Mélanie Terrier, le Japonais Hiraki Sawa ou encore la Syrienne Iman Hasbani. Les performances
ne seront pas en reste à La Friche: Vincent
Bonnet présentera son livre Pense bête en
compagnie de quelques complices le 11 ; le
lendemain Ex-pose de Skalen combinera danse
musique et vidéo et la soirée du 13 sera le cadre
de trois performances signées Morton Feldman,
Philippe Charles et Giney Ayme. Les perfor-
RÉMY GALVAIN
Sur vol - Installations de Giney Ayme
Les instants video
Du 5 au 14 nov
Marseille
www.instantsvideo.com
Présences hispaniques
Montrer le dynamisme et la richesse du cinéma
espagnol, tel est l’objectif de l’association
Horizontes del Sur qui propose du 5 au 14 nov son
9e festival, Cinehorizontes 2010, au cinéma le
Prado à Marseille. 28 films seront présentés dont
7 en compétition pour le Grand Prix du jury présidé par la chorégraphe et réalisatrice espagnole
Blanca Li.
Un hommage sera rendu à Fernando Trueba
dont le film El Baile de la victoria, adapté du
roman d’Antonio Skarmeta et neuf fois nominé
aux Goya, est en compétition. On pourra voir aussi
El año de las luces et Belle époque avec Penelope
Cruz.
En ouverture, le 5 nov à 20h, Yo tambien d’Álvaro
Pastor, en présence de Lola Duenas qui interprète Laura, une femme relativement
anticonformiste qui devient l’amie d’un homme
trisomique.
En clôture, le 13 nov à 20h, Io, Don Giovanni du
cinéaste très inspiré par la musique, Carlos
Saura, en sa présence !
Entre ces deux moments exceptionnels, vous
aurez l’occasion de voir des films, de rencontrer
des réalisateurs comme Javier Rebollo et sa coscénariste Lola Mayo, dont le film La Mujer sin
piano est en compétition, tout comme Tres dies
amb la familia, premier film de la jeune
réalisatrice Mar Coll, Elisa K. -l’histoire d’Elisa
âgée de 11 ans qui vient de se rappeler quelque
chose de terrible- de Jordi Cadena et Judith
Colell.
La isla interior de Dunia Ayaso et Félix Sabroso
est une histoire sur la peur de la folie et Map of
sounds of Tokyo d’Isabel Coixet, avec Sergi
López, raconte l’histoire de Ryu, une jeune Japo-
naise, vendeuse au marché aux poissons et…
tueuse à gages.
Comme chaque année, le festival met en lumière
les jeunes cinéastes espagnols de l’ECAM et de
la Filmoteca Vasca avec une soirée courts
métrages parrainée par le magazine Vocable.
Si on ajoute les buffets et la musique, c’est une
semaine très festive qui attend les amateurs de
culture hispanique, les cinéphiles et ceux qui ont
envie de découvertes ! Un festival qui s’affirme
chaque année dans le paysage régional.
ANNIE GAVA
Horizontes del Sur
04 91 08 53 78
www.horizontesdelsur.fr
Vertigo
Pour sa 8e édition, Image de ville
élève sa réflexion à hauteur de
gratte-ciel. À travers débats, conférences et projections, Verticalopolis
propose de penser la ville debout :
orgueilleuse Babel, nécessité urbaine, lieu d’isolement ou d’échanges,
de prestige ou de stigmatisation. Le
festival aixois a invité les architectes
Jean Nouvel (Pritzker Price 2008) et
Manuelle Gautrand, des cinéastes
et producteurs, des historiens de
l’architecture... La programmation
cinématographique mêle fictions et
documentaires, films du répertoire
et films récents, tous en vostfr.
Hommage à Éric Rohmer, récemment disparu, et au burlesque
américain Harold Lloyds accroché à
jamais aux aiguilles de l’horloge
murale géante de Safety last (1923).
En avant-première, I wish I knew,
réalisé par Jia Zhang-ke pour l’expo
universelle de Shanghaï, témoignage de 18 habitants de cette mégapole
en mutation constante.
Une nuit entière sera dédiée aux
tours plus ou moins infernales. Un
programme à donner le vertige !
E.P.
I Wish I Knew de Jia Zhang-ke
Breaking news de Johnnie To (2004),
Buffet froid de Bertrand Blier
(1979), Claire Dolan de Lodge Kerrigan (2004), Cloverfield de Matt
Reeves (2008), Cube de Vincenzo
Natale (1999), L’Imprécateur de
Jean-Louis Bertucelli (1977), Land
of the dead de George A. Romero
(2004), Le Rebelle de King Vidor
(1949). La liste n’est pas exhaustive...
Image de Ville
Du 12 au 16 nov
Aix, divers lieux
www.imagedeville.org
Gardanne et le monde
La 22e édition du Festival Cinématographique d’Automne de Gardanne
présente 80 films venus de 30 pays,
longs et courts métrages ! Vous pourrez rencontrer les réalisateurs parmi
lesquels Mariana Otero, avec le généreux Entre nos mains, Pascal Boucher,
avec Bernard, ni dieu ni chaussettes,
et plusieurs réalisateurs algériens :
Khaled Benaïsa avec Ils se sont tus ;
Mohamed Soudani avec Une guerre
sans images et Liazid Khodja avec Si
Mohand U M’Hand, l’insoumis. Au
moment où Hors-la-loi déchaîne polémiques et actions haineuses, vous
pourrez revoir tous les films de Rachid
Bouchareb, en particulier le très bon
Little Sénégal. Et à l’heure où l’on
chasse les Roms, vous aurez peutêtre envie de revoir Swing et Liberté de
Tony Gatlif ?
En ouverture, le 22 oct, La nostra vita
de Daniele Lucchetti, une photogra-
phie de l’Italie à travers le parcours de
Claudio, ouvrier du bâtiment. Alamar
du Mexicain Pedro Gonzalez-Rubio
clôturera la manifestation, le 2 nov :
un enfant de cinq ans, en vacances
chez son père, découvre la mer des
Caraïbes et une autre culture…
Entre ces deux films on n’a que l’embarras du choix et on se laissera
tenter par un sujet, un réalisateur ou
un pays : le Chili avec La nostalgie de
la lumière de Patricio Guzman, la
Turquie avec Miel de Semih Kapanoglu, le Kirghizstan avec Le voleur de
lumière de Aktan Arym Kubat ou la
Russie avec Le dernier voyage de
Tanya de Alexei Fedorchenko.
La soirée Bollywood avec New-York
Masala de Nikhil Advani et la compétition de courts métrages seront aussi
au programme d’un Festival qui
promet de belles soirées d’automne.
ANNIE GAVA
Alamar de Pedro Gonzales-Rubio
Festival
Cinématographique
d’Automne
du 22 oct au 2 nov
Cinéma 3 Casino,
Gardanne
04 42 51 44 93
www.cinema-gardanne.fr
La résurrection
du clown
Il est de toutes les rétrospectives,
comme s’il courait après le temps
perdu. Vingt ans exactement. C’est ce
qu’il aura fallu à l’œuvre de Pierre
Etaix, 81 ans, pour retrouver le chemin
des salles obscures après de nombreux litiges juridiques et une
restauration complexe de ses films.
Cinq longs métrages et trois courts,
tournés en l’espace d’une décennie,
auront suffi à accoler son nom aux
légendes du burlesque que sont
Keaton, Linder, Chaplin et Jacques
Tati, pour qui il fut dessinateur,
gagman et assistant réalisateur sur
Mon Oncle. C’est sur le tournage de ce
dernier qu’Etaix était apparu, du haut
de ses vingt-sept ans, allure de dandy
et sourire rêveur. Né artistiquement
au cirque et au music-hall, il réalise
pour lui des centaines de croquis à la
recherche du gag parfait. En 1961, il
tourne un premier court métrage,
Rupture, où l’on entrevoit déjà son
sens millimétré de la mise en scène
et son goût pour les personnages
lunaires. Puis suivra le Soupirant, son
premier long. Le travail de Pierre Etaix
trouve à partir de ce film sa singularité
mais aussi une continuité assumée de
ses maîtres. Comme eux, il se crée un
personnage récurrent, amoureux transi
et maladroit. Enclin à l’utilisation de
l’outil cinématographique, il s’essaie
aux effets sonores, au trompe-l’œil, au
montage expressif. En seulement dix
ans, Etaix définit un humour qui n’appartient qu’à lui, doux et
mélancolique. Qu’il mettra toute une
vie à nous léguer.
RÉMY GALVAIN
L’institut de l’Image à Aix présente
l’intégrale de ses films du 27 oct
au 5 nov : du Soupirant, qui sera
présenté le 30 oct à 16h
par Jean-Philippe Tessé,
critique aux Cahiers du cinéma,
au Pays de cocagne,
une occasion de voir les films
du «clown», invisibles depuis
longtemps.
04 42 26 81 82
www.institut-image.org
54
CINÉMA
RENDEZ-VOUS D’ANNIE
Le 16 oct à 20h, aux Variétés Marseille, l’association
Solidarité Provence Amérique du Sud propose La
Mirada invisible de Diego Lerman. La séance sera
précédée d’un débat avec Martin Kohan, auteur du
roman Ciencias Morales, qui a inspiré le film.
Le 21 oct à 20h, en avant-première, Ce n’est qu’un
début, documentaire de Jean-Pierre Pozzi et Pierre
Barougier qui sera présent. Une école de la région
parisienne a expérimenté durant deux ans la création
d’un atelier de philosophie en classe de maternelle.
Les Variétés
08 92 68 05 97
La Mirada invisible de Diego Lerman
Du 26 au 31 oct, Cinémémoire présente Mémoires
partagées #1 Algérie : projections, tables rondes au
Polygone Etoilé, à l’Alcazar et au CRDP.
En ouverture, le 26 oct à 19h 30, à la Cinémathèque de
Marseille, Carte Blanche à la Cinémathèque Algérienne en présence de sa directrice, Badia Sator ;
projection de Mascarades de Lyes Salem. En clôture
le 30 à 22h, un ciné-concert, Une Terre Algérienne de
Claude Bossion et Agnès O’Martins.
Cinémémoire
www.cinememoire.net
Le 28 oct à 20h, en partenariat avec le cinéma Le
Prado, l’association Cinépage propose le superbe film
de Sergey Dvortsevoy, Tulpan : le retour dans la
steppe kazakhe d’Asa, un jeune marin qui veut devenir
à son tour berger. Asa doit se marier avant de pouvoir
devenir berger. Son seul espoir est Tulpan, la fille
d’une autre famille de bergers. Mais…
Cinépage
04 91 85 07 17
www.cinepage.com
Les mardis de la Cinémathèque proposent à 19 h au
CRDP le 2 nov, Les Assassins de l’ordre de Marcel
Carné et le 9 Répulsion de Polanski.
Le 4 nov dans le cadre de la journée, Psychiatrie et cinéma, organisée par l’AFRET, projection à l’Alhambra
Ciné Marseille du film Copacabana de Marc Fitoussi,
avec Isabelle Huppert et sa fille Lolita Chammah.
Babou, une mère marginale va essayer de regagner
l’estime de sa fille Esméralda. Babou rêve de s’évader
sur la plage de Copacabana à Rio de Janeiro, sa fille
fantasme sur un beau mariage traditionnel…
Les Rencontres d’Averroès, durant tout le mois de novembre, placent la région Sous le signe d’Averroès, et
du cinéma
Le 7 nov au cinéma Lumière à la Ciotat, un documentaire de Jawad Rahib, El Ejido, la loi du profit.
Le 10 nov à 20h 30 à la Friche, en ouverture des
Instants vidéo, Repérages en Palestine pour l’Evangile
selon Saint Mathieu de Pasolini.
Du 12 au 14 nov, à la Maison de la Région, en partenariat avec l’INA et le CMCA, week-end documentaire :
le 12 à 19h, Ecologie, ces catastrophes qui changèrent
le monde de Virginie Linhart (voir p 68) et Alice Le
Roy, en présence des réalisatrices.
Le 13 nov à 18h, au Méjean à Arles, dans le cadre de Sous
le signed’Averroès, table ronde avec Francesco Forgione
autour de son livre édité par Actes Sud, Mafia Export.
Après un apéritif, projection à 20h 30 du documentaire
d’Esmeralda Calabria, Biutiful cauntri, en sa
présence.
Le Méjan
04 90 93 33 56
Rencontres d’Averroès
04 96 11 04 76 / 72
www.rencontresaverroes.net
Biutiful Cauntri d’Esmeralda Calabria
Alhambra Cinémarseille
04 91 46 02 83
www.alhambracine.com
Copacabana de Marc Fitoussi
Le 22 oct à 18h30 à la Friche dans le cadre de «Les
Pouilles à Marseille», l’association Les 7 portes
présente KAOS, une installation vidéo-photographique, le regard du duo Sisygambis (Christine
Coulange et Nchan Manoyan) qui montre les paradoxes du Salento. Cette installation sera présentée
jusqu’au 13 nov.
Utopia, Avignon
04 90 82 65 36
www.cinemas-utopia.org
Institut culturel de Marseille
04 91 48 51 94
Le 22 oct à 20h30, au Renoir à Aix, en avant-première,
le film de Michel Leclerc Le Nom des gens, avec Sara
Forestier et Jacques Gamblin, en présence du
réalisateur : Bahia Benmahmoud, jeune femme
extravertie, se fait une haute idée de l’engagement
politique, n’hésitant pas à coucher avec ses ennemis
pour les convertir à sa cause…
Renoir
04 42 26 85 12
Le 23 oct à 18h30, au Polygone Etoilé, Peuple et
Culture Marseille propose un film choisi par son
atelier de pratique cinéma, Chacun sa Palestine de
Nadine Naous et Léna Rouxel, le portrait de jeunes
réfugiés palestiniens nés au Liban… Le documentaire
sera précédé d’un court métrage réalisé par l’atelier.
Polygone Etoilé
04 91 91 58 23
www.polygone-etoile.com
Le 14 nov à 18h, à Utopia-Manutention, dans le cadre
de Sous le signe d’Averroès, projection de Draquila,
l’Italie qui tremble, de Sabina Guzzanti : une
dénonciation de l’instrumentalisation politique du
tremblement de terre de L’Aquila qui a détruit, le 6
avril 2009, cette ville des Abruzzes. Francesco
Forgione, auteur de Mafia Export, participera au débat
après la projection.
Le 5 nov à 19h au cinéma du Merlan, projection de
Ressources humaines de Laurent Cantet, suivie d’un
débat.
Le Merlan Scène nationale à Marseille
04 91 11 19 20
www.merlan.org
Le 5 nov à 20h à la Friche, projection du film de JeanFrançois Neplaz, Alpini, portrait de l’écrivain italien
Mario Rigoni Stern (cf Zib 33), présenté par Gérald
Collas.
Le 10 nov à 20h30, à Châteauvallon, Les Chantiers du
cinéma proposent Portraits de femmes, Au fil du
temps avec la projection de Sia, le rêve du python,
adaptation par Dani Kouyaté de la légende du
Wagadu, un mythe Soninké du VIIe siècle.
Les Chantiers du cinéma
04 94 09 05 31
www.festivalportraitsdefemmes.f
Draquila, l’Italie qui tremble de Sabina Guzzanti
Le 16 nov à 19h30 ce sera un ciné-concert, El Topo
d’Alejandro Jodorowsky : Hors-la-loi, El Topo défie,
pour l’amour d’une femme, les Quatre Maîtres du
Désert qu’il vainc. Sa conscience s’élève jusqu’à ce
que sa femme le trahisse. Sa nouvelle vie d’homme
saint commence alors, et El Topo s’engage dans la
libération d’une communauté de parias.
La Cinémathèque de Marseille
04 91 50 64 48
AFLAM | APT | TOULON
CINÉMA
55
Apt à l’heure africaine
Du 5 au 10 nov aura lieu le 8e Festival
des cinémas d’Afrique du pays d’Apt :
projections de films au cinéma CésarCinemovida, rencontres avec les
réalisateurs, leçons de cinéma.
Un hommage sera rendu à Samba
Félix Ndiaye, fondateur de l’école de
cinéma documentaire africain, et au
grand comédien Sotigui Kouyaté.
En ouverture, le 5 à 18h, Un Homme qui
crie de Mahamat-Saleh Haroun, Prix
du jury à Cannes, un film fort sur le
Tchad, la guerre et son absurdité, et,
à 21h, What a wonderful world de
Faouzi Bensaïdi.
Parmi les films présentés, Moloch
tropical, les dernières heures du président haïtien Jean de Dieu Théogène
(Zinedine Soualem) de Raoul Peck
qui présentera aussi Lumumba et
donnera une leçon de cinéma le 7 à
14h.
Présents aussi, le cinéaste tunisien
Mohamed Zran avec un documentaire
conviés plus de 600 scolaires, dont
certains formeront le jury lycéen
présidé par la réalisatrice sénégalaise
Angèle Diabang.
Le succès de cette semaine particulière a conduit les organisateurs à
programmer les films deux fois, comme en 2009. Entre les films, vous
pourrez aller voir une exposition de
photos sur l’Afrique à la galerie Zoomy
ou les superbes «Textiles» de l’artiste
nigériane Nnenna Okoré à la fondation Blachère.
Et dans tous les cas, il est prudent de
réserver !
ANNIE GAVA
Un homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun
sur sa ville, Zarzis, ainsi que, pour le
focus sur le cinéma marocain, Brahim
Fritah, Faouzi Bensaïdi, qui donnera
lui aussi une leçon de cinéma le 6 à
14h et Daoud Aoulad Syad dont le
dernier film, La Mosquée, sera pré-
senté en clôture, le 10 nov à 21h.
Les cinéastes de la génération émergente ne seront pas oubliés avec une
rencontre le 7 à 10h, animée par Olivier Barlet. Avant le Festival se tiendra
la «journée lycéenne» à laquelle sont
Liban, mon amour
FIMÉ,
fais-moi peur
Du 19 oct au 20 nov, AFLAM présente
dans plusieurs villes de la région un
panorama du cinéma libanais en une
quarantaine de films. Un cinéma né
sous les bombes, dans le chaos d’un
Beyrouth occupé, scindé, détruit,
reconstruit. Un cinéma devenu au fil
des années le moyen privilégié de dire,
reconstituer, interroger la réalité du
pays.
La programmation rend compte de
son évolution, de sa vitalité et de son
renouveau depuis la dernière guerre
de 2006 à travers le travail de Borhane
Alaouié, Jocelyne Saab, Randa
Chahal Sabbag et d’autres encore…
Dans Chou Sar, censuré au Liban, De
Gaulle Eid s’interroge sur les crimes
impunis : une projection inédite.
Massaker (2004) de Borgmann, Slim
et Theissen, Khiam 2000-2007 (2008)
de Joana Hadjithomas et Khalil
Joreige, Terra Incognita (2003) de
Ghassan Salhab révèlent ce même
désir de ne pas oublier.
Beyrouth fantôme de Ghassan Salhab
enrichira l’atmosphère angoissante
des Trois Lumières de Fritz Lang le 7
nov à Ollioules ; le 8 à Six-Fours, Dans
La Nuit, film de Charles Vanel, sera
accompagné par le pianiste virtuose
Karol Beffa ; The Lodger de Hitchcock
prendra une dimension tantôt orchestrale tantôt psychédélique sous les
archets du Manuchello Quartet le 10
nov à La Garde, tandis que Zombie
Zombie, groupe psyché-Krautrock,
s’attaquera à un autre maître du cinéma : Eisenstein et son Cuirassé
Potemkine le 11 à La Valette-du-Var.
Les courts métrages seront eux aussi
à l’honneur le 9 nov grâce au studio
Folimage et au trio jazz l’Effet Vapeur.
À noter enfin, le 12 à Saint-Mandrier,
l’excitant projet du groupe Antiquarks
qui revisitera un chefd’œuvre de suspense,
Duel, le premier film de
Spielberg.
RÉMY GALVAIN
Festival International
des Musiques d’Écran
Du 5 au 13 nov
Toulon
04 94 21 60 18
www.filmharmonia.fr
Le fantôme de l'opéra
de Rupert Julian
Beyrouth fantome de Ghassan Salhab
Pour sa 6e édition, le Festival International des Musiques d’Ecran déploie
bobines et créations musicales dans
l’agglomération toulonnaise. Neuf
ciné-concerts prendront un malin
plaisir à nous faire peur. ODDSAC
lancera idéalement les hostilités aux
Variétés de Toulon. Ce film expérimental posera les bases d’un FIMÉ
aux allures troubles et obsédantes,
auxquelles la séance de clôture, une
performance live du collectif Soundwalk intitulée Ulysses’ Syndrome, fera
écho. Les classiques muets du genre
seront au rendez-vous : Le Fantôme
de l’opéra de Rupert Julian sera
accompagné le 6 nov par l’orchestre
de l’Opéra de Toulon; Benjamin
Macke, accordéoniste électronique,
Festival des cinémas d’Afrique
Du 5 au 10 nov
Apt
09 52 57 49 35
www.africapt-festival.fr
(1998), portrait mélancolique de la ville
martyre mêlant fiction et documentaire, ouvrira la session marseillaise
aux Variétés le 4 nov en présence du
réalisateur. La sélection reviendra
également sur des œuvres peu diffusées, à l’instar des deux premiers
longs métrages de Maroun Baghdadi,
Beyrouth ô Beyrouth (1975) et Petites
guerres (1982), deux films cultes de la
production cinématographique libanaise, ou encore Le vendeur de
bagues (1965) comédie musicale de
Youssef Chahine avec Fairouz, témoignage d’une époque où le cinéma
libanais sollicitait le concours de
réalisateurs étrangers.
E.P.
Cinéma(s) du Liban
Du 19 oct au 30 nov
Marseille, Forcalquier, La Garde,
La Valette, Salon
04 91 47 73 94
www.aflam.fr
56
ARTS VISUELS
AIX-EN-PROVENCE
Desseins de traits
Jean-Marie Sorgue s’est éteint en avril dernier. Le Gudgi lui rend hommage en lui consacrant
sa première édition d’Aix itinéraires de l’art
Relégué à la disgrâce pendant la
période post-moderne, le dessin a
pourtant continué d’être à l’œuvre.
Moyen d’expression privilégié au
point que certains artistes en ont fait
leur médium majeur (E. PignonErnest, O. Hucleux…) voire leur
unique ressort comme le décida
définitivement à la fin des années
soixante Jean-Marie Sorgue*. Il y a
encore peu la galerie Ardital, la Villa
Tamaris puis l’Abbaye de Silvacane
consacraient son travail sans se
douter que l’artiste allait, hélas,
définitivement poser ses plumes à
Aix. Le musée des Tapisseries et le
musée Granet lui avaient offert
leurs cimaises et en 2001 l’artiste fit
don de 80 dessins au musée de la
ville.
Hommage lui est donc rendu grâce
à un parcours d’expositions dans la
ville d’Aix et extra muros jusqu’au 16
oct, produit par le GUDGI, groupement
des galeries d’art d’Aix-en-Provence
sur le principe des «parcours dans
la ville d’Aix» conçus par Alain Paire
(Amado, Bioulès, Ducaté…). «Nous
voulions ouvrir au plus grand
nombre de visiteurs et d’amateurs
Majestes defuntes, 1981, Jean-Marie Sorgue © X-D.R
intéressés par l’art contemporain
les galeries privées et les institutions publiques autour d’un même
projet et rendre cet hommage à l’un
des plus importants artistes aixois»
insiste Corinne Théret de la galerie
du Lézard, coorganisatrice avec
Vincent Bercker et Alain Paire. Au
total plus d’une centaine d’œuvres
dans dix-huit lieux dont certains
exposent un seul dessin accompagné d’un portrait photographique
de l’artiste par son ami Jean Pécoul.
L’appréhension de l’œuvre de
Sorgue peut souffrir de cette dispersion géographique mais on apprécie
les ensembles conséquents rassemblés dans un même espace
exprimant la grande cohérence de
ce travail singulier indépendant des
modes. Les grands formats particulièrement faits de nodosités
ténébreuses, troubles visionnaires
anthropomorphes et matières biomorphiques ne sont pas sans
évoquer Max Ernst ou Fred Deux.
Les prochains itinéraires de l’art
ambitionnent de mettre à l’honneur
le photographe Jean-Pierre Sudre,
la tenue d’un premier festival d’art
contemporain en 2011 et une
biennale du dessin en 2012.
CLAUDE LORIN
Aix itinéraires de l’art 2010
Hommage à Jean-Marie Sorgue
1924-2010
jusqu’au 16 oct
www.gudgi.org
(*) lire la remarquable présentation
faite par Alain Paire sur le site
de sa galerie :
www.galerie-alain-paire.com
Un concentré de Sorgue
Quatre tableaux seulement sont exposés au Musée Granet sur les 80 que
compte la donation qui fit l’objet en 2004 d’une exposition et d’une édition
non moins significative, Sorgue, un artiste, une donation. Pour des raisons de
calendrier surchargé, le musée Granet n’a pu s’associer à l’événement qu’en
les glissant dans un espace entre ses collections ancienne et contemporaine.
C’est peu, mais ils concentrent les thèmes essentiels et fondateurs de son
œuvre : les Locomotives, les Obstacles/forteresses, les Majestés défuntes
et les Villes saintes/paysages.
Que de chemin parcouru depuis les couleurs évanescentes des années 50
aux personnages aux formes anthropomorphes et aux Obstacles ! «Toute
une œuvre bâtie sur les souvenirs d’enfance, influencée par le mystère du rite
et des costumes (il fut enfant de chœur)» souligne Bruno Ely, conservateur
en chef, directeur du musée Granet, et élève de Sorgue au lycée Mignet en
1968. Depuis ils n’ont jamais cessé de se voir, «avec des temps forts», se
liant d’une amitié sincère au point qu’il persuada Sorgue d’écrire son
autobiographie et de publier un entretien avec son fils dans le catalogue de
2004. Deux textes à lire pour comprendre son œuvre, insiste Bruno Ely qui se
souvient de l’artiste «pris au jeu de l’écriture après un état de résistance».
Où l’on découvre, ému, un chapelet de souvenirs, sa solitude d’enfant unique,
son plaisir de «gribouiller sur des petits cahiers», ses déménagements à
répétition, la présence aimante de sa mère dont il lui fallut se séparer à
l’entrée à l’internat. Mais aussi son grand désarroi et ses cauchemars, sa
prise de contact avec Aix en 1953, et toute «[sa] vie de peintre difficile,
solitaire, inquiète, marquée par la recherche d’une expression personnelle»…
Alors «faut-il dire ici peintre, dessinateur ?» comme l’écrivait Denis Coutagne
dans sa préface… Qu’importe, l’essentiel est de percer les obscurs lacets
noircis avec obsession sur de grandes feuilles de papier Canson, ces
planches dessinées qui font toute la singularité du Fonds Sorgue.
M.G.-G.
jusqu’au 16 oct
Musée Granet, Aix
04 42 52 88 32
www.museegranet-aixenprovence.fr
AIX-EN-PROVENCE | AVIGNON
ARTS VISUELS 57
Esprit des lieux
© Bettina Steinacker
Phot’Aix 2010, qui a déjà une
histoire ancienne, s’inscrit dans le
cadre du 50e anniversaire du jumelage entre Aix et Tübingen. Le face à
face est inédit, non pas conçu
comme un état des lieux de la
photographie de part et d’autre de
nos frontières mais comme un
moyen de circuler à travers «un
archipel autonome d’images».
Immersion frontale dans l’Allema-
gne d’aujourd’hui à la galerie Fontaine obscure avec Bettina
Steinacker qui offre un point de vue
distancié sur les transformations
urbaines de la région industrielle de
la Ruhr. Des terres en jachère, des
lieux qui disent la disparition,
l’effacement, des zones intermédiaires : parking, entrepôts, murs
abandonnés, hôtels d’étape, zones
pavillonnaires… Un travail d’obser-
vation presque clinique qui interroge, peut-être, la place laissée par
l’homme à la nature dans ces
Terrains vagues : des photographies
qui évoquent «un temps éloigné et
des activités perdues, une méditation sur la perte de sens des lieux»
selon Jean Arrouye.
Au Musée des Tapisseries, la
collusion des styles et des géographies rappelle l’extrême diversité
des pratiques photographiques actuelles. L’exemple le plus probant
étant les travaux de Dominique Bosq
et Jörg Umrath, La Peau du monde,
le premier donnant à voir l’illusion
de lieux identifiables à travers des
lunettes 3D (le grand escalier de la
gare Saint-Charles), le second usant
de la fragmentation de vues aériennes pour recomposer un paysage
imaginaire. L’un et l’autre proposent
un travail extrêmement sophistiqué.
Térence Pique préfère explorer la
ville contemporaine à l’heure où les
lumières électriques se substituent
à la lumière naturelle, quand il peut
«réchauffer» la réalité crue, froide,
des soubassements de lieux hostiles.
Une mise en abîme des profondeurs
de notre environnement ?… Avec
Tilman Rösch, le paysage architectonique affleure par frottements à
angles vifs de l’ombre avec la matière, la lumière et la couleur. Une
construction cubiste quoiqu’abstraite
qui, in fine, poétise la ville. Et d’autres encore qui disent Le Danger de
la disparition (Alice Angeletti,
Michaël Serfaty) ou Le Micro cosmos (Harald Gottschalk, Frédéric
Nakache).
M.G.-G.
Phot’Aix
jusqu’au 7 novembre
Expositions Off dans 17 lieux aixois
et
Regards croisés Tübingen-Aix
Musée des Tapisseries
Galerie Fontaine obscure
04 42 27 82 41
www.fontaine-obscure.com
La 16ème édition du Parcours de l’Art,
organisée par l’association éponyme
qui expose aussi mensuellement dans
sa galerie, sème dans 25 lieux
d’Avignon, 33 artistes triés sur le volet
(sur 200). Loin de s’arrêter aux artistes
régionaux, l’événement ouvre également l’œil vers l’Ukraine, la Slovaquie
et la Birmanie. Les expositions sont
accompagnées de conférences, visites
et films, construits autour du travail de
l’artiste invité, le marseillais JeanJacques Surian et son œuvre
kaléidoscopique occupée par les mythes
et les strates temporelles.
«Mes tableaux parlent du temps, de
l’urbanité et très souvent de Marseille
que j’aime autant que je déteste»
explique l’ancien professeur d’arts
plastiques qui «exhortait ses élèves à
lire plutôt qu’à regarder la peinture»
et qui qualifie son style de métafiguration (ou figuration mentale). Au
Cloître St Louis, il présente un
ensemble de grands formats labyrinthiques, dont un triptyque de 1993
et la série Fragments amoureux
inspirée par Barthes, jamais sortie de
son atelier. «Il n’y a pas de lien entre
les images, ce sont des séquences.
Un collectionneur fou pourrait avoir
envie de réunir tous mes tableaux,
mais ça n’est pas mon concept. Ce qui
J.J. Surian en plein accrochage © Delphine Michelangeli
m’intéresse c’est de choisir un espace
et de le remplir». Son travail le plus
récent est également à l’honneur, de
délicieux petits formats sur le nu
féminin à travers l’Histoire de l’art. S’il
confesse avoir été méfiant au départ le principe de sélection lui paraissait
fumeux -il est aujourd’hui ravi de
participer.
Dans la déambulation, on retiendra au
Cloître, les installations sur calque et
photos sur verre de la lyonnaise
Marcelle Benhamou et les sculptures
de Jean-Paul Moscovino. À la Maison
Jean Vilar, Thierry Savini expose un
étonnant Eros en crin végétal et un
Crâne aux 1000 roses. Ne manquez
pas le travail photographique performatif d’Imen Djouini et les
magnifiques poupées de Cécile Perra
à l’Espace Vaucluse (jusqu’au 17 oct).
Entrée libre (sauf séances cinéma à
l’Utopia).
DELPHINE MICHELANGELI
Sculpture de J.P. Moscovino dans la cour du Cloitre © Delphine michelangeli
3 semaines
d’art contemporain
Parcours de l’art
jusqu’au 23 octobre
Avignon
04 90 89 89 88
www.parcoursdelart.com
58
ARTS VISUELS PARCOURS
MARSEILLAIS
Généreux
Courez à la rencontre des œuvres
et des artistes ! Tel est le mot
d’ordre donné par Mouv’art,
Ouvertures d’Ateliers d’Artistes
et Portes Ouvertes Consolat :
l’art contemporain généreusement
Pfou ! Faut pas être mou du g’nou ces jours-ci !
Petits livrets en guise de vademecum en poche,
plans dépliés largement sous ses yeux ébouriffés,
surligneur en main, café refroidi abandonné sur le
bord de la table trop étroite du bar d’à-côté…
l’aficionado doit batailler ferme avec ce qui lui est
offert de voir de l’art contemporain à Marseille.
Dans la même période ont lieu trois évènements
qui ravissent nos mirettes : Mouv’art pour le plus
récent, Portes Ouvertes Consolat et Ouvertures
d’ateliers d’artistes pour les plus vénérables ont
en commun d’offrir généreusement la rencontre
avec les artistes. Plus de 120 tout compte fait !
Là, physiquement disponibles, les œuvres au mur
chez eux ou installées dans l’espace public.
Gratos.
L’atelier ou la maison sont ouverts, avec quelques
petites réjouissances à grignoter un verre à la
main. Tout le plaisir est pour nous. Nous tous. La
rencontre est facile : les gens sont dans la rue,
pas besoin de pousser la porte, elle est ouverte.
Alors on entre même dans des containers. Pas
question de jouer au guide étoilé de l’art
contemporain marseillais : un nom, un lieu plus
recommandable ? Z’avez qu’à y’aller. Mais de bien
belles découvertes : Guillaume Gattier (résidence
prometteuse aux Ateliers Boisson), Hervé Proby
(ses dernières plaques d’acier ouvragées), Clara
Feder (mise en installation vertueuse de Paul et
Virginie), la maison-atelier-tout-est-art de Frank
Garam. Être accueillant par respect pour les
Julie Darribere Saintonge dans son atelier avec Martine Robin,
Ouvertures d'ateliers d'artistes 2010 © C.Lorin/Zibeline
Mouv’art © Agnès Mellon
artistes et les organisateurs, tous ceux et celles
qui se lèvent l’âme pour quelques centaines
d’euros de salaire seulement et de grosses
inquiétudes souvent, pour que ça existe. Et ça
existe. Mais j’apprends que la Tangente va fermer.
Certains s’interrogent : verra-t-on cette année les
élus à la culture et responsables publics ? Hors
fonction éventuellement. Pour constater ce qui est
fait in situ. Contrairement aux idées reçues, les
subventions ne sont pas fatalement vécues
comme une manne (une aumône ?) bien
recueillie des artistes ou des porteurs de
structures dédiées à l’art contemporain : il s’agit
de faire vivre un projet et de partager… D’autres
demandent : avez-vous rencontré des collectionneurs ? Quelques mécènes ? D’autres réclament
la création de nouveaux ateliers d’artistes dans la
ville (1). Indécent ? Et dire que je n’ai encore pu
voir cet atelier, découvrir les trucs de tel collectif,
mettre enfin un visage sur une invitation.
(1) collectif Art 13 http://marseillequel
avenircultureenv.hautetfort.com
Enchères
De leur côté Mouv’art et le Château de Servières
ont aussi programmé une vente aux enchères.
Maître Cornette de Saint Cyr (qui officia cet été
dans les Alpilles pour le festival Ap’art) descend
sur le cours d’Estienne d’Orves à l’invitation
d’Emmanuelle Saint Denis. La quatrième édition
de À vendre se fera au 24 de la rue Montgrand
dans un immeuble prêté pour l’occasion par la
Ville de Marseille. Le principe est souvent le
même : les artistes (encore eux) offrent une
œuvre, la mise à prix devant être des plus
accessibles, parfois moins de cent euros. Une part
revient à l’artiste, l’autre à l’organisateur ; de
l’ordre de vingt pour cent qui seront réinjectés
dans les projets l’année suivante précise Martine
Robin pour Château de Servières, pour partie
dans le partenariat avec le Portugal initié l’année
dernière suite à l’invitation marseillaise.
Ouverture d’ateliers d’artistes a désormais son
équivalent lisboète avec la création de
l’association Castelo d’if. Cent artistes dont une
délégation marseillaise en invitée d’honneur
seront les 20 et 21 novembre prochains dans le
quartier de Graça.
Vous suivez ?
CLAUDE LORIN
Mouv’art, Portes Ouvertes Consolat et Ouvertures
d’ateliers d’artistes ont eu lieu jusqu’au 10 oct
Association Portes Ouvertes Consolat
04 91 95 80 88
www.assopoc.org
Mouv’art
06 20 97 63 01
www.mouvart.fr
À vendre
du 15 au 17 oct
Association Château de Servières
04 91 85 42 78
www.chateaudeservieres.org
FRAC | CCIMP
ARTS VISUELS 59
Pour sa dernière exposition avant
réinstallation en 2012 dans
ses nouveaux murs à la Joliette,
le FRAC propose une exposition
qui interroge… l’exposition
Prendre la porte et faire le mur invite à
expérimenter l’exposition comme un lieu de
réflexion sur le médium exposition et ses
composants. Troublant parcours proposé par la
commissaire invitée, Florence Ostende. Dans ce
white cube il y a peu et plus à voir, à entendre, à
comprendre au risque de la confusion sur la
nature des choses et d’interprétations fortuites.
Que faire de ce cube de bois peint en blanc : siège
ou œuvre ? (Le Belvédère, Saadâne Afif).
Qu’éclaire dans l’angle de la salle le faisceau
lumineux du projecteur de scène posé au sol?
(Poursuite en angle, mi-rasante, mi-frontale,
Michel Verjux). Que fait cet homme bien réel
assis devant un ordinateur ostensiblement muet
à vos interpellations ? (Instant Narrative, Dora
Garcia). Comment ces deux rectangles sombres
suspendus au mur s’inventent-ils comme tableaux pendant qu’ils diffusent des paroles en
sourdine ? (La peur des anges, Philippe Parreno).
Pourquoi ces grands panneaux transparents
placés de façon labyrinthique servent-ils à accro-
cher trois fois rien ? (Brain 1, Simon Dybbroe
Møller). Tiens ! des textes projetés sur le mur
blanc d’à côté se déroulent… que disent-ils ? Ils
décrivent des gens… ils parlent de cette personne
en rouge qui rit dans la pièce d’à côté… d’un
homme à lunettes qui se rapproche et se met à
lire les textes projetés sur le mur ( Instant
Narrative, Dora Garcia).
Repenser l’œuvre d’art, les lieux de monstration,
le rapport à l’œuvre, les modalités d’implication
du public, évoquent bien des tentatives historiques : Futuristes, Duchamp, art sociologique,
happenings, Fluxus et autres propositions non
muséales. On sait depuis longtemps que l’art
n’est plus seulement délectation esthétique.
Faut-il faire sienne la déclaration clouée à l’entrée
par Simon Dybbroe Møller invitant le visiteur à
renoncer aux conventions passées. Mais entre
qui ? Mais lesquelles ? Celles qui nous lient à l’art,
évidemment.
CLAUDE LORIN
Prendre la porte et faire le mur
jusqu’au 11 décembre
FRAC, Marseille 2ème
04 91 91 27 55
www.fracpaca.org
Alain Rivière, Comment j’ai fait certaines de mes expositions, 1997-2004 FRAC Paca © Alain Rivière
S’asseoir sur le white cube
L’art a la côte
Qu’est-ce qui fait courir la Chambre
de commerce et d’industrie Marseille Provence ? Permettre aux
mondes de l’entreprise et de l’art de
se rencontrer, comme en témoigne
sa collection permanente dont les
premières archives datent de 1599
(plus de 80000 ouvrages, des
peintures, aquarelles, affiches,
photographies, cartes et plans,
instruments de navigation…). Dès
lors l’idée de créer un concours
artistique en direction de la création
actuelle se justifie pleinement : «Il
ne s’agit pas d’un prix, souligne Gérard Traquandi, président du jury,
les artistes gagnent le fait que la CCI
achète leurs pièces». La dotation
d’achat se montant à 30 000 euros,
qui se répartissent cette année
entre Cari Gonzalez-Casanova (accueillie aux Ateliers d’artistes de la
ville de Marseille de 2005 à 2007),
Denis Prisset (fondateur des Éditions P à Marseille) et Mathieu
Schmitt (diplômé de la Villa Arson à
Nice) sous la forme d’une acquisition ou d’une commande. Avant de
«décrocher le gros lot», les artistes
ont été présélectionnés par un
comité constitué par la CCI Mar-
seille Provence, puis choisis par un
jury professionnel.
Leurs travaux sont exposés au
Palais de la Bourse avec 7 autres
artistes qui ont fait mouche parmi
les 78 dossiers de candidature récoltés émanant du territoire et
au-delà (66 en 2009). Un intérêt
croissant qui s’explique par l’enjeu
financier et la visibilité, mais également par la souplesse de la CCI
vis-à-vis du thème central : l’économie du territoire intègre l’ensemble
géographique des communes d’Arles, d’Aix-en-Provence et de Toulon.
On est alors en droit de se demander comment des artistes vivant à
l’étranger peuvent s’emparer de ce
Denis Prisset, photo extraite de son diaporama © D. Prisset
territoire. Ce que Gérard Traquandi
clarifie simplement : «Il n’y a pas de
malentendu entre nos choix et le
thème de la CCI car elle est, par
définition, ouverte sur l’Europe et la
Méditerranée. On a préféré
s’intéresser à une réflexion autour
de l’économie, de cet espace-là».
D’où la présence de Cari GonzalezCasanova qui travaille avec une
entreprise de Château-Gombert,
Aurélie Masset et Malik Ben
Messaoud qui produisent des écofauteuils design ou Sandra Aubry et
Sébastien Bourg qui évoquent le
GPS à travers un ouvrage marqueté
de tradition artisanale.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
3e Concours artistique de la CCI
Marseille Provence
jusqu’en janvier 2011
Palais de la Bourse, Marseille 1er
0 810 113 113
www.ccimp.com
60
ARTS VISUELS
BANDOL | FABRIK89 | ARTOTHÈQUE
Nouvelle vague
À l’heure où la 7e édition de L’œil en
Seyne bat son plein (jusqu’au 7 nov),
Bandol lance son premier festival de
photographies Horizon vertical. Une
«photoïncidence» surprenante, légitimée par l’installation de Louis
Lumière à Bandol de 1935 à 1948 et
la volonté de la Ville de dérouler le fil
rouge de la mémoire. L’inauguration
se déroulant d’ailleurs en présence
de ses petits-enfants… Sauf que la
posture est résolument contemporaine grâce à un commissariat
co-signé avec l’association Art&A et
une carte blanche offerte à la galerie
parisienne Esther Woerdehoff. Au
Centre culturel, à la galerie Ravaisou
et au parc du Canet (en plein air), 24
photographes français et internationaux dessinent «un périple Odysséen»
composé de bords de mer, d’architectures du littoral et d’environnement.
nautiques, bâti, industries, ailleurs…
Comme s’il s’agissait d’ouvrir encore
l’horizon sur le Grand large avec,
notamment, le traitement perturbateur de la couleur chez David Koenig,
bleu vif circonscrit à un carré incrusté dans le noir et blanc. Une
irruption qui pourrait donner le ton à
un événement que d’aucuns attendaient dans cette paisible cité
balnéaire.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Bunker, France, 2002 © Philippe Calandre
Un état des lieux tantôt distancié - les
discothèques inanimées de Christophe Mauberret -, historique - les
vestiges de bunkers de Philippe Calandre -, ou poétique avec Loan
Nguyen. Au Centre culturel, la
sélection se caractérise par une
certaine unicité de tons (sentiment
d’inachevé) et de thèmes (nature
déshumanisée). Dans son prolongement, la proposition de la galerie
Esther Woerdehoff opère une cassure stylistique en multipliant les
points de vue et les sujets : activités
Art tôt
Déclic nocturne
population rurale qui, en principe, est en train de
dormir ! Une façon d’interroger les hommes par
leur absence, de n’en conserver que leurs
empreintes, de faire surgir du noir absolu la trace
de leur passage : deux pompes à essence, des
meules de foin, des fanions colorés, une
construction inachevée… Des photos pensées
comme une «mise en scène de la théâtralité du
monde» nées au cours d’un long travail de
repérage, tout feux allumés. Inconsciemment,
peut-être, Julien Lombardi inscrit son œuvre dans
la photographie plasticienne tout en ne perdant
jamais de vue le travail de collecte à la rigueur
toute scientifique.
M.G.-G
Artefact
Julien Lombardi
jusqu’au 27 novembre
Fabrik 89, Marseille 7e
04 91 55 58 29
www.fabrik89.com
Artefact
© Julien Lombardi
© X-D.R
30 ans et déjà deux prix ! La Bourse du talent #40
et la Mission jeune artiste 2010, et l’adoubement
de la Bibliothèque nationale de France qui vient
d’intégrer à sa collection une œuvre de sa série
Artefact. Le jeune photographe Julien Lombardi
se sent «encouragé sur le chemin qu’il s’est
choisi» après ses études d’anthropologie à la
MMSH d’Aix et une année vagabonde au Maghreb
et en Afrique de l’Ouest. Une parenthèse qui fut
aussi une révélation alors même qu’il «fait des
images» depuis ses 7 ans et lui fit préférer
l’épanouissement de son imaginaire aux travaux
de recherche. À la galerie Fabrik 89, les épreuves
d’Artefact frappent par leur matité («une texture
qui absorbe la lumière et évite les reflets»), leur
étrangeté (impression de jamais vu) et le protocole
mis en œuvre. Solitaire, Julien Lombardi aime plus
que tout explorer au volant de sa voiture, la nuit, le
territoire alpin pour offrir un portrait en creux d’une
Horizon vertical
jusqu’au 14 novembre
Centre culturel (Horizon vertical),
galerie Ravaisou (Grand large), parc
du Canet (en plein air), Bandol
04 94 29 22 70 / 04 94 29 37 35
www.bandol.fr
Le 6 oct, l’Artothèque du lycée Artaud vernissait
l’exposition de ses vingt ans d’activité. La structure
est née autour d’un groupe d’enseignants et
d’élèves qui voulaient «favoriser la rencontre de
l’art contemporain par le jeune public, apporter aux
lycéens un complément de formation par
l’éducation du regard et l’approche des disciplines
artistiques». La Proviseure dans son allocution a
rappelé l’originalité et la singularité de cet
héritage, qui passe commande à des artistes (elle
possède un fonds de près de 400 œuvres), prête
son fonds aux adhérents, édite des cahiers
monographiques, expose des artistes majeurs.
Pour son 20ème anniversaire, l’Artothèque a donc
publié le troisième volume de ses portfolios (voir
Zib 31) qui réunit les œuvres de 45 des 61 artistes
qui y ont réalisé une exposition personnelle depuis
sa création. Le document de très belle facture a
été tiré à 190 exemplaires numérotés, vendus au
prix de 200 euros. Les premières planches du
portfolio ainsi que celles des deux précédents
documents sont l’objet de l’exposition, présentée
ce soir là par les élèves de terminale : un
panorama pointu et pertinent des plus intéressants
artistes de notre région. Car connaître l’art tôt, à
l’artothèque, permet de côtoyer les plus grands…
YVES BERCHADSKY
www.lyc-artaud.ac-aix-marseille.fr/artotheque
AU PROGRAMME
ARTS VISUELS 61
Fusionnel
Le musée Ziem poursuit son approche de la peinture de paysage et s’attache ici au «paysage
abstrait» avec l’œuvre peint d’Olivier Debré (1920 –1999), notamment ses Signes-Paysages.
Loin de vouloir témoigner d’une réalité objective, Olivier Debré s’était engagé dans une
représentation sensible et sensuelle du paysage. Quasi fusionnelle…
M.G.-G.
Signes-Paysages
Olivier Debré
du 20 octobre au 23 janvier
Musée Ziem, Martigues
04 42 41 39 60
www.ateliermuseal.net
Borderline
La série de photographies de Geoffroy Mathieu Extension urbaine et les
photographies, vidéo et installations de Barbara Sarreau La ville avance Le cube sont les deux faces d’une même expérience : un jeu d’allersretours entre Marseille, Tanger et Tétouan vécus par les deux artistes en
mai 2010. Ce projet s’inscrit dans une thématique que Vol de Nuits
développe cette saison avec Aurore Valade et Laetitia Bianchi (Plein air),
Till Roeskens (À propos des certains points de l’espace) et Martine Derain
(L’Étrange demeure).
M.G.-G
La ville avance
Geoffroy Mathieu / Barbara Sarreau
jusqu’au 25 novembre
Vol de Nuits, Marseille
04 91 47 94 58
www.voldenuits.com
L’aventure surréaliste
Jacques Herold participa à l’aventure surréaliste aux côtés de Tanguy, Breton, Brauner… Le musée
Cantini rend hommage à cet artiste qui vécut à la villa Air-Bel à Marseille de 1940 à 1943 et réalisa,
notamment, le Jeu de cartes de Marseille, un ensemble de Cadavres exquis et de Dessins collectifs
qui figurent dans le fonds permanent du musée. L’exposition monographique présente également un
ensemble conséquent de bronzes, dessins et toiles.
M.G.-G.
Jacques Hérold (1910-1987) et le surréalisme
jusqu’au 11 janvier
Musée Cantini, Marseille 6e
04 91 54 77 75
www.marseille.fr
Jacques Hérold,
La maison de crystal,
1938
© ADAGP,
Paris, 2010
Contre nature
En écho à sa collection photographique (150 œuvres sélectionnées pour
l’occasion), le Musée d’art de Toulon présente le travail de l’artiste
allemande Karen Knorr issu de son étrange série Fables. Une recherche
sur le rapport de l’homme à l’animal et la figure métaphorique de l’animal
qui prend la forme de tableaux mis en scène dans un décorum muséal :
leur séduction ambiguë tient peut-être au trouble qu’ils suscitent ?
M.G.-G.
Fables
Karen Knorr
du 16 octobre au 30 janvier
Musée d’art, Toulon
04 94 36 81 01
62
RENCONTRES
Libraires du sud /Libraires à Marseille 04 96 12 43 42
Rencontres avec Marie-Claude Char et Michelle
Gazier pour la présentation de la première édition de
La Correspondance 1951-1954 de René Char et
Nicolas de Staël (éd. des Busclats), le 15 oct à 19h à la
librairie de l’horloge (Carpentras) ; avec Jean-Louis
Bianco pour Si j’étais Président… Que faire en 2012 ?
(éd. Albin Michel), le 16 oct de 10h à 12h à la librairie
Au Poivre d’Âne (Manosque) ; avec le père Bernard
Lorenzato, le 19 oct à 18h30 et avec Robert Peloux
autour du thème de son dernier livre Les religiosités
populaires, archaïsme ou modernité ? (éd. de l’Atelier),
le 20 oct à 18h30, à la librairie Saint Paul (Marseille);
avec Marie-Sabine Roger pour Vivement l’avenir (éd.
du Rouergue, le 20 oct à 19h à la librairie Aux Vents
des mots (Gardanne) ; avec René Coppano pour Il
était une fois Marseille (éd. La Manufacture des livres),
le 28 oct à 18h30, et avec Anne Proenza et Teo
Saavedra pour Les Evadés de Santiago (éd. Le Seuil) le
18 nov à 18h30, à la librairie Au Poivre d’Âne (La
Ciotat).
Itinérances littéraires : rencontre avec Néstor Ponce
pour Sous la pierre mouvante (éd. Le Bec en l’air), dans
le cadre du festival Belles Latinas organisé par Espaces
latinos, le 14 oct à 17h30 à la libraire All Books & Co
(Aix) et le 15 oct à 19h à la librairie Le Petit Pois
(Manosque).
Escales en librairie : Rencontre avec David Toscana
pour Un train pour Tula (Ed. Zulma), le 13 oct à
18h30 à la librairie l’Ecailler (Marseille), animée par
Pascal Jourdana, et 15 oct à 18h30 à la librairie Le
Grenier d’abondance (Salon), animée par Nathalie
Delsalle.
AIX
Fondation Saint John Perse
– 04 42 91 98 85
Rencontre-débat avec Joëlle Gardes, le 22 oct à 18h.
Voyons voir – [email protected]
Le 16 oct : Vernissage à 12h, au domaine de Château
la Grande Bauquière, à Puyloubier, de l’expo
Liquidations/Dérapages contrôlés de Vincent Bonnet et
Catherine Melin ; à 16h, au domaine de Château
Grand Boise, à Trets, conférence de Sylvie Coëllier,
Panneaux de campagne, à 16h45 film de Noël Ravaud,
La société ne souhaite pas faire de commentaires à ce sujet
à ce sujet non plus et à 17h30 performance avec
Maxime Carasso pour un film de Noël Ravaud.
ARLES
Atelier Archipel – 06 21 29 11 92
Exposition de peinture de Vonnick Caroff, jusqu’au
24 oct.
Hôtel Le Bervédère – 06 27 30 57 71
Exposition de photographies de Fred Eral, Touchez des
Yeux, prolongation jusqu’à la fin de l’année.
Collège international des traducteurs littéraires –
04 90 52 05 50
27e assises de la traduction littéraire en Arles, sur le
thème Traduire la correspondance. Conférences, tables
rondes, ateliers de traduction…
Du 5 au 7 nov.
BARJOLS
Association Plaine Page
– 04 94 72 54 81
Les éditions Plaine Page présentent leur dernière
parution Les Entre Peaux, Barjols, des tanneurs aux
artistes, suivie de lectures des textes du recueil : le 16
oct de 18h à 19h au théâtre Apollinaire à la Seyne et
le 3 nov à 18h30 à la librairie Imbernon du Corbusier
à Marseille.
Dans le cadre du Festival Les Musiques insolentes, le
23 oct au Centre Elias à Barjols, ils organisent un
atelier de percussions sur instruments originaux de
17h à 19h ; Bamboo Orchestra en concert à 19h30 ;
rencontre improvisée entre Sébastien Lespinasse
(poésie sonore) et Heddy Boubaker (saxo) à 20h30.
BEAUCAIRE
Office de tourisme – 04 66 59 26 57
10e salon des Métiers d’art, du 15 au 17 oct, casino
municipal au Champ de Foire.
FORCALQUIER
Association Forcalquier des livres – 04 92 75 09 59
10e fête du livre d’artiste : autour de l’auteure Corinne
Hoex qui créera un texte inédit, une vingtaine
d’artistes présenteront leurs œuvres et travailleront à la
réalisation d’un livre d’artiste commun.
Du 22 au 25 oct.
GARDANNE
Médiathèque Nelson Mandela
– 04 42 51 15 16
Fête de la science : Biodiversité, quels défis pour
l’avenir ? expos, spectacles, balade nature (le 23 oct à
14h30), séances d’observation en forêt (le 24 oct à
14h30 et 16h30), espace lecture, le monde des
fourmis… Du 20 au 24 oct.
LA BOUILLADISSE
Centre culturel – 04 96 11 27 69
Dans le cadre du cycle Quelle ville pour demain !,
projection du film de Marc-Henri Wajnberg, Oscar
Niemeyer un architecte engagé dans le siècle, suivie d’un
débat animé par Bruno Jourdan, en présence de
Jacques Sbriglio et Rudy Ricciotti.
Le 14 oct à 19h.
LAMBESC
Agglo du Pays d’Aix – 04 42 93 85 85
2e édition du festival de l’imaginaire du Pays d’Aix
Autres Mondes : spectacles, concerts, rencontres et
dédicaces avec les auteurs invités, conférences,
débats…
Du 20 au 24 oct.
LA SEYNE-SUR-MER
Théâtre Guillaume Apollinaire – 04 94 87 21 30
11e fête du livre de théâtre : le 16 oct, sur le thème des
Écritures théâtrales contemporaines, lectures de
pièces récentes, rencontres avec Éric Durnez, Francine
di Mercurio, Sabine Tamisier, Stéphanie Marchais,
Natacha de Pontcharra... ; le 17 oct, sur le thème de
Théâtre et histoire dans le Var, rencontre avec des
historiens, metteurs en scène, auteurs, autour de la
pièce Drame à Toulon - Henri Martin de Claude
Martin et Henri Delmas (1951) et projection du film
D’autres sont seuls au monde de Raymond Vogel
(1953).
MARSEILLE
Regards de Provence – 04 91 42 51 50
Exposition Les trésors cachés du Sacro Monte Di
Orta, jusqu’au 16 janvier.
Institut Culturel Italien – 04 91 48 51 94
10e semaine de la langue italienne, du 18 au 23 oct :
conférence d’Anna Proto-Pisani Entre deux langues,
littérature et migration en Italie, le 19 oct à 18h ;
exposition photo de Simona Filippini, Di Lei, du 19
oct au 19 nov, inauguration le 19 oct à 19h ;
projection du film Lettere dal Sahara de Vittorio de
Seta, le 20 oct à 18h.
Installation vidéo-photographique Kaos, un autre
regard sur le Salento par le duo Sisygambis, du 22 oct
au 13 nov à la Friche.
Rencontre avec Giovanni Maria Bellu à l’occasion de
la sortie de la traduction de son 1er roman L’Homme
qui voulut être Perón (éd. Actes Sud).
Le 9 nov à 18h.
ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00
Exposition Jours de fête en Provence, co-produite
avec le Museon Arlaten. Jusqu’au 23 déc ; autour de
cette expo, visite musicale avec André Gabriel, le 16
oct à 15h, Têtes de Tarasque, atelier pour enfants de
fabrication d’instruments de musique avec Marie
Picard, le 16 oct à 14h et 16h, De bric, de broc et de
roseaux, atelier pour enfants de fabrication
d’instruments de musique avec Henri Maquet, le 20
oct à 14h et 16h, conférence musicale avec André
Gabriel, le 21 oct à 18h30 et Maracas et Toutoures,
atelier pour enfants de fabrication d’instruments de
musique avec Marie Picard, le 23 oct à 14h et 16h.
Exposition photographique de Patrice Terraz, Les cent
visages du vaste monde, jusqu’au 11 déc.
Dans le cadre de Ces étonnants archivores, conférence
sur L’Assassinat d’Henri IV et le midi de la France, avec
Michel Cassan, professeur à l’Université de Limoges et
auteur de La Grande Peur de 1610, et Françoise
Hildesheimer, conservateur général aux Archives
nationales.
Le 18 nov à 18h30.
BMVR Alcazar – 04 91 55 90 00
Présentation de livres d’art provenant du centre de
documentation Ernst Goldschmidt, bibliothèque du
Musée d’art contemporain, jusqu’au 16 oct.
Lectures théâtralisées par la cie Peanuts : Les animaux
malades de la peste, le 30 oct dans le cadre des
Littorales.
Les Mardis du Mucem : cycle de rencontres-débats
animés par Thierry Fabre pour comprendre les
civilisations entre Méditerranée et Europe. Un
RENCONTRES 63
bréviaire méditerranéen pour
le XXIe siècle avec Predrag
Matvejevitch, écrivain et
essayiste, professeur honoraire de langues romanes à
l’Université La Sapienza de
Rome.
Le 9 nov à 18h30.
Espace Ecureuil
– 04 91 57 26 49
Conférence de Jean Weissenbach et Fabienne Orsi sur
Le projet génome humain : une brevétisation ratée ?, le 26
oct à 18h30.
Conférence de Jean-Noël Bret : Italie, Italies I : Le
grand tour ou le voyage en Italie, le 26 nov à 12h30 et
le 29 oct à 12h30 et 18h ; Italie, Italies II : Rome,
musées et monuments, le 16 nov à 12h30 et le 19 nov
à 12h30 et 18h.
Centre Richebois – 06 14 69 65 94
Exposition Une exploration partagée, photographies de
Aude Lavenant, Gilles Gerbaud et des stagiaires du
Centre, jusqu’au 30 oct.
Galerie Jean-François Meyer – 04 91 33 95 01
7e édition de Poésie Marseille.
Du 22 oct au 31 oct.
Cinéma les Variétés – 06 22 57 81 80
Exposition de photos de Julien Anselme issues de la
parution du livre D’une belle à l’autre (éd. P’tits
Papiers, 2008).
Du 28 oct au 20 nov.
Librairie Maupetit – 04 91 36 50 50
Mini-concert Hansel et Gretel un conte musical chanté
par Catherine Vincent, le 16 oct à 11h15 ; rencontre et
dédicace avec Raphaële Frier à l’occasion de la parution de son dernier album Pedro à 100 à l’heure (Mango),
le 23 oct à 15h ; dans le cadre des Littorales, Jeanne
Siaud-Facchin dédicace son livre Génération Ado le
dico (Bayard jeunesse) ainsi que Raphaële Frier le
30 oct à partir de 14h sur le stand de la librairie.
Art-Cade – 04 91 47 87 92
L’autre bord #1 : rendez-vous annuel avec la création
contemporaine méditerranéenne, du 14 oct au 6 nov.
Vernissage à la galerie des grands bains douches de la
Plaine le 14 oct à 18h30 ; vernissage à la galerie Montgrand le 15 oct à 18h30 ; lecture de Mohamed Kacimi
à la galerie des grands bains douches le 5 nov à 18h ;
rencontre Les modernités hors de l’europe, le 6 nov à 14h
à la bibliothèque départementale Gaston Defferre.
« Rochers Carrés », 2009, série photographique, courtesy Kader
Attia, Sharjah Art Foundation, galerie Christian Nagel (Berlin &
Cologne)
Espaceculture – 04 96 11 04 60
Atelier d’écriture littéraire et symbolique proposé par
l’association Zingha (sur résa au 06 61 66 89 85), les
13 et 20 oct de 10h à 18h.
Rencontre avec Paul Aubert sur La Frustration de
l’intellectuel libéral. Espagne, 1998-1939, le 28 oct à
17h30.
CIPM – 04 91 91 26 45
Exposition consacrée au travail graphique de Pierre
Alferi, Les Illustrés dans le cadre du festival ActOral.
Jusqu’au 20 nov.
Atelier Vis à vis – 04 91 33 20 80
Book Project International, XIIIe Rencontres de
l’édition de création : manifestation organisée autour
du livre d’artiste et de la bibliophilie.
Les 30 et 31 oct, de 10h à 19h.
Alphabetville – 04 95 04 96 22
L’art à l’essai : appréhender l’art, ses techniques, ses
médias, selon des parcours, des artistes, des positions,
des situations par la présentation de publications
récentes et sous forme de rencontres avec les auteurs,
au travers d’essais sur l’art. Le 14 oct à 18h30,
Recherche et création, art, technologie, pédagogie,
innovation (éd. du Parc, ENSA Nancy) présenté par
Samuel Bianchini et Jean-Paul Fourmentraux ; le 4
nov à 18h30, Erik Bullot présente son ouvrage
Renversements 1, notes sur le cinéma (éd. Paris
Expérimental) ; le 17 nov à 18h30, Jacqueline Caux
présente Le silence, les couleurs du prisme et la
mécanique du temps qui passe (éd. de l’Eclat) de Daniel
Caux.
poésie persanes, dans le cadre des 16e Rencontres cinélittérature. Le 15 oct à 18h30.
Conférence avec Mohammad-Reza Djalili,
politologue spécialiste du Moyen-Orient et de l’Asie
centrale, auteur notamment de L’Iran de A à Z (éd.
A. Versailles) et de Géopolitique de l’Iran (éd.
Complexe) sur la question iranienne.
Le 19 oct à 18h30.
ROGNES
Office de tourisme – 04 42 50 13 36
Salon des littératures imaginaires : rencontre avec
Charlotte Bousquet, le 21 oct à 18h30 et spectacle
déambulatoire de la cie Estock Fish, le 23 oct à 10h et
11h45.
Bibliothèques en fête sur le thème des littératures
contemporaines slaves, du 19 oct au 12 nov.
SAINT-RÉMY
Musée Estrine – 04 90 92 34 72
Exposition Bargoni, peintures récentes, jusqu’au 28 nov.
SALON
Ville – 04 90 44 89 00
Village des sciences : animation sur la biodiversité
marine, expo escales littorales sur des espèces et
écosystèmes emblématiques de la Méditerranée,
explications sur l’hydroélectricité avec EDF, les
transports et leur sécurité, la musique assistée par
ordinateur…
Du 19 au 22 oct à l’espace Trenet.
MARTIGUES
Médiathèque Louis Aragon – 04 42 80 27 97
Exposition Photographes d’Ailleurs et d’ici : photographies de Anne-Marie Camps, Marina Obradovic, Jean
Barak, Yann Castannier et Jean-Félix Fayolle, jusqu’au
30 octobre à la salle de l’Aigalier. Vernissage et concert
de Sylvie Paz le 14 oct à 18h30 à la salle de l’Aigalier;
conférence de Reza, le 15 oct à 18h à la médiathèque.
ORANGE
Le Théâtre Antique – 04 90 51 17 60
Au temps d’Auguste : s’amuser et comprendre le monde
antique grâce à 7 ateliers originaux. Ateliers lampe à
huile, fibule, écriture, masques, école du gladiateur…
Du 23 au 31 oct.
Conférence avec Jean-Charles Moretti, responsable de
l’Institut de Recherche sur l’Architecture Antique de
Lyon, directeur de recherches au CNRS : Théâtres
Grecs et théâtres Romains, le 27 oct à 18h.
PORT-DE-BOUC
Médiathèque Boris Vian – 04 42 06 65 54
Rencontre-débat avec Parviz Abolgassemi,
universitaire et poète autour de la littérature et de la
Apéritif artistique
Comme chaque année et peut être
mieux encore, avant la grand messe
des Tables Rondes, les 17eRencontres d’Averroès se mettent sous son
«signe» et proposent une série
d’événements artistiques qui mettent en scènes, en films, en lectures
«la méditerranée des deux rives».
Du cinéma (voir p 54), une grande
expo photographique au MuCEM,
et des collaborations réaffirmées
avec DanseM, les Bernardines, les
Salins, le Méjan, La Friche pour du
théâtre en arabe… Des représentations, des concerts et des films de
grande qualité. Vous avez le choix :
d’Arles à Apt et La Ciotat, pas
moins de 21 événements traversent
le territoire…
Sous le signe d’Averroès
Jusqu’au 12 déc
www.rencontresaverroes.net
64
LIVRES
RENCONTRES
Les habits neufs des Littorales
Pour sa 3e édition, le rendez-vous annuel des auteurs et des livres proposé par les libraires indépendants associés
poursuit son ancrage dans le paysage littéraire marseillais en s’autorisant quelques innovations prometteuses
Une thématique fédératrice d’abord. Pour les
Littorales 2010, ce sera Moi et les autres. Une
exploration de l’écriture entre intime et collectif, qui
se jouera sur cinq jours, en plusieurs temps et selon
différents axes et genres, afin que tous les lecteurs
puissent y trouver plaisir. Comme les années
précédentes, la manifestation débutera avec une soirée
«cinélittéraire» autour du documentaire de Virginie
Linhart, 68, mes parents et moi, en présence de
l’auteure réalisatrice (voir p. 66). Le 28 se passera au
Comptoir, en compagnie de Maylis de Kerangal
(voir Zib 33) et de Fabrice Humbert. Le 29, 2e
grande nouveauté, sera consacré à des tables rondes
assez pointues sur le thème à la BMVR Alcazar. Et
durant le week-end, les chapiteaux reviendront sur le
Cours d’Estienne d’Orves pour accueillir l’espace
librairies, diverses animations ainsi que, 3e nouveauté,
un forum radiophonique en partenariat avec Radio
Grenouille. Quant au Comptoir littéraire, il se tiendra
cette année, dernière nouveauté notable, au calme de
la Boate, à deux pas du cours.
Une vingtaine d’auteurs invités (voir p 66 et 67), des
rencontres croisées et des approches variées, de
multiples propositions dans et hors les murs, les
Débats et résistance
C’est peu dire que le Festival du Livre
de Mouans-Sartoux (06) est un rassemblement militant. Dès la descente
du TER, on en prend conscience en
remplissant un questionnaire sur le
choix des transports en commun. Et ce
sera ainsi tout le week-end : palissade
pour la paix, vente de produits bio,
bouquinistes, stands associatifs accompagnent ce festival bon enfant qui
draine une large partie de la population
de la commune ainsi que les fidèles
venus de toute la région… et d’ailleurs !
Centré à ses débuts sur la culture
occitane, rassemblant alors une quarantaine d’auteurs au plus, le festival a
rapidement connu une croissance importante. Aujourd’hui ce sont des
centaines d’écrivains, journalistes, réalisateurs, hommes politiques également,
qui s’y retrouvent pour rencontrer un
public de plus en plus nombreux. Sous
l’égide du maire écologiste de la ville
André Aschieri et de son initiatrice
Marie-Louise Gourdon, l’événement
prend des allures de forum citoyen.
Toute la ville y participe. Des dizaines
de bénévoles veillent à la circulation de
la foule, à la gestion des files d’attente,
au bon déroulement des rencontres et
des débats. Les lieux publics (gymnases,
salle polyvalente) sont réquisitionnés
pour l’occasion, ce qui n’empêche pas
l’installation de chapiteaux dont celui,
énorme, consacré à la littérature jeunesse. Bref, une bonne partie du bourg
est investie pour trois jours de débats,
projections, signatures, lectures parmi
lesquels il est difficile de faire un choix.
La diversité des propositions et le
nombre des rendez-vous a d’ailleurs de
quoi donner le tournis. D’autant que la
plupart des interventions sont sonorisées à l’extérieur des salles, afin que
tout le monde puisse profiter des
échanges, et que l’on est constamment
Littorales affirment leur ambition d’offrir à tous les
publics un festival de littérature de grande qualité. À
suivre sans modération.
FRED ROBERT
Les Littorales, festival littéraire organisé
par l’Association Libraires à Marseille,
aura lieu du 27 au 31 oct
en différents lieux de Marseille
www.librairie-paca.com
© X-D.R
sollicité. Une ambiance vraiment
particulière, qui tient de la fête de parti
et du salon du livre traditionnel.
Certains viennent pour rencontrer des
écrivains et faire dédicacer leurs ouvrages ; on les voit attendre sagement
leur tour devant les stands. Avec une
prédilection pour les écrivains à succès,
telle Katherine Pancol ! On note comme ailleurs la foule auprès des auteurs
et illustrateurs jeunesse, devant les
éditeurs BD également. Mais il est évident que pour la majorité des visiteurs,
venir à Mouans signifie participer aux
débats publics. Florence Aubenas,
Guy Bedos et Christophe Alévêque,
Thomas Legrand, Nadia Kaci et
beaucoup d’autres ont fait salles combles. Dans un climat d’intervention
active du public. Apostrophes, applaudissements frénétiques, questions très
directes, les gens ici viennent pour en
découdre.
Et la littérature dans tout ça ? Les rencontres purement littéraires rassemblent
visiblement moins, comme en a
témoigné celle avec Bernardo Carvalho. Certaines sont déprogrammées en
dernière minute (Volodine). Quant aux
auteurs qui se succèdent au Café littéraire, ils n’ont que quelques minutes
pour évoquer leur livre dans un
brouhaha continu peu propice à
l’échange. En cet automne social plus
que chaud, le public de MouansSartoux semble avoir eu besoin, avant
tout, de manifester son mécontentement sur la politique de l’actuel
gouvernement. De résister à sa
manière… Et tant pis pour la forme !
FRED ROBERT
Le festival de Mouans-Sartoux
s’est déroulé du 1er au 3 oct
La presse
régionale
en question
L’Alcazar organise dans sa salle de
conférence une série de rencontres
qui veulent dessiner le paysage de la
presse écrite régionale. Le premier
volet, le 5 oct, était passionnant.
Christian Digne, chef du service
politique de La Marseillaise et ancien rédacteur en chef, et Jacques
Bonnadier, journaliste historique et
plume marquante du Provençal,
parlèrent des trente glorieuses de la
presse, après un documentaire très
éclairant de Gilles Cayatte : Le Provençal, quotidien du pouvoir. Une
occasion unique de comprendre les
enjeux et l’histoire paradoxale de
notre PQR (presse quotidienne
régionale, pour les intimes) au
moment où elle traverse une crise
sans précédent… Dont il faut
absolument qu’elle se relève si nous
voulons continuer à vivre dans un
espace démocratique, et avoir un
regard sur les arcanes de notre vie
régionale.
La suite des débats ? Les nouvelles
formes de la presse écrite. Avec Le
Ravi, Rue89, 20minutes et…
Zibeline bien sûr. On vous y attend
nombreux !
A.F.
Paysage de la presse régionale
Les nouvelles formes de la presse
écrite
BMVR l’Alcazar, Marseille 1er
Le 21 oct à 18h
www.bmvr.marseille.fr
66
LIVRES
LES CORRESPONDANCES DE MANOSQUE
Rencontres, lectures, spectacles… les Correspondances, années après années, transforment
Manosque en capitale littéraire. Mieux, en centre du monde des lettres
Lectures
La petite salle du Théâtre Jean-le-Bleu
accueillait de précieuses mises en voix :
celle d’Antoine Volodine et de deux de
ses hétéronymes fut un moment intense.
L’auteur était accompagné de Dominique
Pinon et d’Agnès Sourdillon proposant
une lecture à 3 voix, celles de 3 écrivains
présents dans son dernier livre. Lecture
frontale, manuscrits éclairés par 3 lampes
et une bande-son souvent inquiétante…
tout l’univers du livre est là : regard fixe,
visage impassible, obscurité. Pour dire la
noirceur du monde, l’endoctrinement des
enfants, l’amputation des soldats blessés,
l’échec terrifiant des utopies égalitaires.
Pour en finir avec «le camp des paroliers
officiels» et les «10 décennies de douleur».
…
Dessiner la lecture en direct… L’entreprise, presque délirante, donna lieu à un
moment de pure magie. Il faut dire que
François Schuiten et Jacques Abeille se
connaissent bien. Que l’univers du dessinateur belge semble être né au creux d’un
miroir graphique où se reflèterait les constructions mentales de Jacques Abeille.
Suivant, détournant, mettant en abyme
les descriptions surréelles du poète de la
quête le dessinateur ne les donne pas à
Kim Thuy © Francois-Xavier Emery
Olivier Adam © Francois-Xavier Emery
voir : il les transcende et les détourne. Un
bémol à la magie ? L’accompagnement
inutile, improvisé sans inspiration, par un
guitariste involontairement plongé dans
une œuvre dont il n’avait pas la
connaissance intime. Difficile de se hisser
sans préparation à ces hauteurs-là.
…
Lots of love est une lecture à 2 voix : celle
du père, Scott Fitzgerald, celle de la fille
surnommée Scottie. Hippolyte Girardot
et Marie Vialle lisent l’échange de lettres
des dernières années de la vie de l’écrivain.
Scott est ruiné, alcoolique, réduit à l’écriture de scénarios. Il s’inquiète pour les
études et l’avenir de sa fille, lui prodigue
ses conseils. Il apparaît mesquin et parfois
même pitoyable : on n’est pas convaincu
par le choix de ces textes terre à terre.
Écrivains, Antoine Volodine
éd. Le Seuil
Les mers intérieures, Jacques Abeille
François Schuiten, Attila
Les Jardins statuaires, Jacques Abeille,
Attila
Les Cités obscures, François Schuiten,
Casterman
Lots of love, éd. Le Livre de poche
Rencontre de Sophian Hadjadj avec Jerome Ferrari © Francois-Xavier Emery
Rencontres
Comment dire de soi sans dévoiler son
être, et se soumettre à un entretien littéraire quand on n’est pas un as de la
représentation ? Sans doute en désignant
l’écrit comme ultime refuge…
Kim Thuy, auteur de Ru, se livrait aux
confidences avec une gêne trop volubile
lors de son entretien avec Pascal Jourdana, qui sut néanmoins donner une
belle idée de l’ouvrage. Autobiographie
déguisée, le roman se nourrit de l’expérience de boat people de la jeune femme,
sa fuite de Hanoï avec sa famille, le camp,
l’exil, l’accueil merveilleux au Canada Elle
y tiendra un restaurant, «Ru de l’âme».
Quatre ans, dix mille assiettes lavées… il
est temps pour Kim Thuy de retourner
en étrangère au Vietnam, puis d’emprunter la voie des mots, 10 000 mots
répondant aux 10 000 assiettes… «Jouer
avec les mots pendant un an», voici le pari,
un livre naît, Ru. Pourtant les mots résistent, la langue française imparfaitement
maitrisée mais «seule langue dans laquelle
[elle peut] réfléchir».
L’auteur s’émerveille de la vie, trouver
dans toute épreuve un pendant positif est
un peu agaçant. Puis elle lit un passage de
son roman. Quête de soi, images fulgurantes, aquarelle qui dessine par touches
successives, strates de sens et de temps…
Le badinage s’efface devant une écriture
forte et sensible. Émotion.
…
Olivier Adam porte une veste à carreaux
qui lui donne un air de baroudeur. Son
dernier roman, Le cœur régulier, lui a été
inspiré par sa résidence à Kyoto : les
grands arbres, le ciel, si importants pour
les japonais… Il confie à Michel Abescat
qu’un article sur un japonais qui apaisait
les candidats au suicide lui a donné son
point de départ. Le personnage de Sarah
a peu à peu surgi, «mêlant la force du réel
et celle de la fiction pour faire entendre une
voix. Le masque du féminin permet peutêtre plus d’authenticité, d’intimité. C’est à
ce jour, me semble-t-il, le livre le plus intime
que j’ai écrit.»
Une rencontre bienvenue, après une
lecture musicale qui, la veille, avait aplati
considérablement le texte (voir Zib 33) en
lui imprimant un rythme étranger à sa
course. Pourquoi ce flux rock ininterrompu et indifférencié qui noie l’évolution
subtile du personnage, le passage de la
France au Japon, le sentiment antagonique d’amour/indifférence, presque
incestueux, envers le frère mort?
…
Sofiane Hadjaj interroge Jerôme Ferrari
en historien. Ou en romancier qui s’est
attaché à l’Histoire. Celle, sale, de la
Guerre d’Algérie, du côté des Français
tortionnaires, militaires de carrière plongés dans les horreurs de la répression à
Alger en 1957 (voir p 70).
C’est en philosophe que Jérôme Ferrari
lui répond, interrogeant la nature humaine, l’origine du mal, la barbarie.
Affirmant qu’elle est en chacun, naturellement, et que les Lumières nous trompent.
Passionnant.
Le coeur régulier, Olivier Adam,
éd. de l’Olivier
Ru, KimThuy, Ed Liana Levy
Où j’ai laissé mon âme, Jérome Ferrari,
Actes sud
CHRIS BOURGUE, AGNÈS FRESCHEL,
MARYVONNE COLOMBANI
Voir également p 33 le concert
de Brigitte Fontaine
RENCONTRES
LIVRES
67
En marge des Correspondances
Un Brésilien
en Russie…
Bernardo Carvalho a la bougeotte. Pourtant,
entre Paris, Manosque et Mouans-Sartoux, il a
pris le temps de se poser un soir à L’Attrape-Mots
à Marseille. Histoire de parler, abondamment et
dans un excellent français, de son dernier
roman. ’Ta mère répond à la commande d’un
producteur qui a offert à quinze auteurs une
résidence d’un mois dans une grande ville du
monde, à condition qu’ils y écrivent une
histoire d’amour et cèdent leurs droits sur une
éventuelle adaptation cinématographique. Carvalho a choisi Saint-Pétersbourg. Sans connaître
ni le pays ni la langue, inspiré par quelques
lectures et documentaires, il s’est lancé. De la
contrainte thématique et de l’expérience «flippante» vécue là-bas, il a tiré une fiction (voir
p.67) sous-tendue par la panique. Ecrite de
façon brute, sans autres effets que ceux d’une
construction millimétrée : une manière originale d’aborder l’histoire d’amour.
Éternelle jeunesse de la résistance
Pour la 27e édition de la Fête du Livre,
les Écritures croisées créent l’événement,
et la surprise
Inattendu, le choix d’un invité d’honneur, Stéphane
Hessel, qui n’est pas à proprement parler un écrivain:
c’est pourtant une salle comble qui applaudit, à la
soirée inaugurale, l’arrivée du résistant à la carrière
diplomatique exceptionnelle, et qui rend hommage
aux idéaux qu’il défend et incarne en même temp, une
culture humaniste et européenne, une immigration
exemplaire, l’engagement indéfectible pour les droits
de l’homme et pour le Tiers-Monde. Inattendue aussi
la personnalité même de cet invité : dès son arrivée, il
improvise avec son complice Jean-Louis CrémieuxBrilhac, son conscrit, grand historien et fondateur de
la Documentation française, une saynète facétieuse qui
régale le public ; sa vie et ses messages sont
profondément édifiants, mais il s’amuse et cabotine
presque. Il incarne la mémoire d’un siècle, de la
déportation à la création de l’ONU, de De Gaulle à
Mendès France, mais il vient pour parler au présent,
des désastres écologiques, des conflits du MoyenOrient, du climat politique, avec un engagement
idéaliste et parfois provocateur de jeune militant et de
vieux renard à la fois ; et il s’interrompt soudain pour
réciter, à la façon d’un mantra, un poème d’Edgar
Poe… Avec un rendez-vous avec les étudiants, une
programmation cinématographique riche de l’expérience tragique du monde, une belle exposition
photographique réunissant les clichés les plus célèbres
de l’actualité, et un panel d’invités qui lient leur
engagement artistique à la lecture de l’histoire, la Fête
du Livre a une nouvelle fois réussi son pari, en se
plaçant cette année sous le signe de l’éternelle jeunesse
de la Résistance. Et sous la protection d’un jeune
homme de 92 ans !
AUDE FANLO
… et un homme louche à l’Alcazar
Le festival ActOral y a proposé une heure avec
François Beaune, actuellement en résidence à
Manosque. Auteur d’un 1er roman remarqué,
fondateur de la revue Louche et promoteur
d’objets dérivés louches, telles les cartes postales
à l’envers (le texte en est déjà rédigé, il suffit
d’inventer l’image !), c’est peu dire que la notion
de louchitude lui est chère. Porter un autre
regard sur la réalité, biaiser pour voir autrement; par-delà l’apparente facétie et les
métaphores fromagères, le propos est loin d’être
vain.
La Fête du livre a eu lieu
du 1er au 3 oct à la Cité
du livre, Aix.
L’exposition de l’agence
Magnum : 25 ans de
reporters sans frontières,
se poursuit jusqu’au 4 nov.
04 42 26 16 85
www.citedulivre-aix.com
FRED ROBERT
’Ta mère, de
Bernardo
Carvalho (éd.
Métailié)
et Un homme
louche de
François Beaune
(éd. Verticales).
Dans le cadre de sa résidence à Manosque
jusqu’en janvier, et afin de poursuivre son
«grand déballage», François Beaune est en
quête d’histoires vraies, que vous pouvez lui
adresser à l’hôtel Voland à Manosque ou par
mèl à [email protected].
Si vous êtes à Marseille, vous pourrez aussi
venir les lui raconter dès mars 2011 puisqu’il
sera alors en résidence à La Friche
© Dennis Stock-Magnum
Photos Venice Beach Rock Festival.
Californie. 1968
Des maisons
et des hommes
Parce que l’édition et la promotion d’ouvrages originaux, non formatés, nous est chère, nous ne pouvions
manquer le rendez-vous annuel proposé par la BDP
Gaston Defferre en partenariat avec l’ARL Paca. On
ne change pas une formule qui fonctionne; c’est donc
sur le même principe que se sont organisées ces 3e
Rencontres de l’édition indépendante : une maison
d’édition de la région en invite une venue d’ailleurs.
C’est ainsi par exemple que les éditions Parenthèses
avaient fait signe à Champ Vallon de Seyssel dans
l’Ain, qu’André Dimanche présentait le superbe
travail éditorial de Clémence Hiver (de Sauve dans le
Gard), que la jeune maison des Alpes-de-Haute-
Provence C’est-à-dire recevait La Louve Editions,
venue de Cahors pour présenter ses ouvrages historiques, et que Le Port a jauni avait fait signe à
Lirabelle, de Nîmes…
Ces journées, ponctuées de tables rondes, lectures et
autres intermèdes musicaux, se déroulent dans un
climat détendu, propice aux échanges. Elles offrent
chaque année des découvertes insolites, telle cette
«entreprise éditoriale effrontée (et non effondrée)»,
Monsieur Toussaint Louverture (c’est son nom !),
invitée de Toulouse par l’agence éditoriale toulonnaise
Géhess. Elles permettent aussi de mieux connaître ces
professionnels d’une édition hors des sentiers battus,
dont on ne peut que soutenir l’ambition et la passion.
FRED ROBERT
Les 3e Rencontres de l’édition indépendante
se sont tenues à Marseille les 17 et 18 sept
68
LIVRES
LITTÉRATURE
L’opium des saltimbanques
Après La Hague, ses tempêtes et ses déferlantes, c’est au
bord du Rhône que Claudie Gallay installe sa
nouvelle fiction. Sur les berges du fleuve, au pied des
remparts d’Avignon. Et dans la ville aussi, au plein
cœur d’un été pas comme les autres, puisque c’est
celui, lourd, caniculaire et désormais historique, qui
vit l’annulation du festival et tous les mouvements des
intermittents du spectacle. Dans cette ambiance de
surchauffe, tant climatique que politique et sociale, la
romancière imagine l’histoire de quelques passionnés
de théâtre. Odon, le directeur d’un petit lieu, qui met
en scène la pièce d’un jeune auteur mort, Paul Selliès;
sa fille, Julie, qui joue dans la pièce ; et puis Mathilde,
son grand amour, revenue triompher dans sa ville avec
un rôle important ; et Isabelle, l’ancienne, qui a connu
les premiers festivals, l’époque des Vilar et Philipe ; et
tous les autres, acteurs, techniciens, hommes à tout
Héritière de 68 ?
Virginie Linhart n’est pas la fille d’un militant
anonyme. Son père, Robert Linhart, fut une figure
phare de 68. Ou du moins aurait dû, s’il n’avait refusé
ce mouvement «petit-bourgeois», sombré dans la
dépression et vécu Mai en cure de sommeil. Le
fondateur du mouvement maoïste en France n’est
donc pas un père anodin, et c’est cette mémoire que
sa fille interroge : en sociologue et documentariste elle
enquête et écrit un essai ; en témoin elle en fait un
roman sensible, où elle scénarise son parcours, dessine
des visages où son père apparaît en creux, et toute une
génération d’enfants de 68, personnages croisés
emblématiques
d’une
Comédie
humaine
défictionalisée.
On comprend beaucoup de choses à travers ce filtre
étrange, ce regard d’historienne qui tenterait une
objectivité factuelle passée au crible d’un point de vue
faire, qui tournent et virent dans la chaleur de juillet
en attendant la suite. Au milieu de tout cela débarque
Marie, une jeune fille écorchée (au propre comme au
figuré). La sœur de Paul, venue demander des
comptes…
Cadre mythique, personnages attachants, secrets
dévoilés, hommage au monde du théâtre, les
ingrédients sont là. Pourtant, la sauce ne prend pas.
On ne fait que glisser sur ce récit volontairement
fragmenté. Conflits et passions y flottent, amortis,
lointains. Avignon devient une île, que l’auteure ne
parvient pas à aborder.
FRED ROBERT
L’amour est une île
Claudie Gallay
Éd. Actes Sud, 21,80 euros
interne assumé. Les réticences sur l’héritage des
enfants de militants, sur la liberté sexuelle, les liens
complexes avec la mémoire de la Shoah, avec
Althusser, la psychanalyse. Avec l’école aussi, l’élite
intellectuelle parisienne, quelque chose d’une volonté
d’excellence refoulée, et le sentiment d’abandon.
Jamais réac, rendant toujours hommage à
l’engagement politique, à l’enthousiasme et la liberté
qui habitaient ces parents particuliers, au courage aussi
qui mena certains intellectuels maoïstes à l’usine, ou
au Larzac. On est très loin de l’actuelle relecture des
repentis entrés en carrière politique. Très loin aussi de
l’hommage aveugle.
Depuis la publication de Le jour où mon père s’est tu
Robert Linhart a repris la parole. Enseigne, écrit. Se
réapproprie son histoire ?
Virginie Linhart
sera présente
lors des Littorales
à Marseille
(voir p 63)
Le jour où mon père
s’est tu
Éd. du Seuil, 2008,
15 euros
Poche, 2010,
6 euros
AGNÈS FRESCHEL
Non à la tapisserie !
Remarquable petit ouvrage que le dernier essai de
Belinda Cannone, La tentation de Pénélope. Le titre
délicieusement provocateur, tout de fausse innocence,
est à l’instar du ton adopté : écriture relâchée de la
conversation, parenthèses, apartés, retours, une prose
à laquelle on a lâché les brides… un plaisir savoureux
de lecture, où, suprême élégance, la légèreté du style
permet à la profondeur du propos de ne jamais
sombrer dans la lourdeur grandiloquente, écueil
régulier du genre ! En 36 courts chapitres, brosser un
tableau complet de la condition féminine est pari
impossible dans lequel Belinda Cannone ne s’engage
pas ; mais comme les poètes, elle esquisse des pistes,
aborde le sujet par des tours inattendus, «Le père
marin», «Messieurs, soyez beaux» ou «Éloge de la
pénétration»… Analyses de romans, de psychanalyses,
travail sur la grammaire des genres aussi, vertu du
neutre qui met en avant la personne avant d’en faire
un être sexué. «Distinction des sexes» plutôt que
«différence», qui implique un classement. Réflexions
sur le corps biologique prééminent, et les conséquences qui en découlent : être et devenir sont les
mots clé que Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir
met en évidence, insiste Belinda Cannone, il faut
passer enfin de l’état de nature à la construction sociale
et historique… Cette relation de dominant et de
dominée aliène l’un et l’autre !
Non messieurs, il n’y a pas de guerre des sexes, mais
sans aucun doute il faut à nouveau refonder le regard.
Ce livre ? Un régal, érudit mine de rien, à lire
absolument et à partager !
MARYVONNE COLOMBANI
La tentation de Pénélope
Belinda Cannone
Éd. Stock, L’autre pensée, 18,50 euros
Belinda Cannone sera présente
lors des Littorales à Marseille (voir p 63)
LIVRES 69
Chaotique
Décevant le dernier Gaudé ? Oui pour les inconditionnels de ses nouvelles ténébreuses (Dans la nuit
Mozambique), de son écriture aride (Le soleil des
Scorta), de la puissance fantastique de son récit (La
porte des enfers). Et non, car son talent à autopsier
l’âme humaine est intact. Ouragan est un texte choral
porté par une poignée d’humains en déshérence,
vaincus par la violence des éléments, leurs vies à bout
de souffle, miséreuses. Leurs âmes mises à nu et usées
dont l’issue est entre les mains des soubresauts de la
nature… Laurent Gaudé se fait incantatoire, manie
l’écriture oppressante à force de répétitions en boucle,
de phrases courtes, de glissements d’un temps à l’autre,
d’une parole à l’autre, d’une scène à l’autre ; resserre les
mailles de son texte pour dire l’engourdissement des
corps et des cœurs incapables d’aimer à nouveau. C’est
que l’Ouragan n’anéantit pas seulement sur son
passage la Louisiane – dont seuls les alligators en
sortent vainqueurs et repus (métaphore d’une nature
qui reprendrait ses droits ?). Il fout en l’air des martyrs
résignés, trop longtemps asservis comme Joséphine
Linc. Steelson (figure de la lutte des nègres), Byron
l’enfant au silence obstiné, le Révérend fou de Dieu,
Rose prisonnière de la laideur de sa vie… Le texte luimême est un combat permanent contre la colère du
monde, qui déverse en un flot ininterrompu son
ruban de folie, de peur, de faiblesse, de violence, de
désespoir, d’abandon, de brève révolte. À son tour le
lecteur est englouti sous cette avalanche, pris au piège
de cette litanie. Quitte à s’y noyer parfois ?
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Ouragan
Laurent Gaudé
Éd. Actes Sud, 18 euros
Fable orientale
Le roman possède l’excitante capacité de créer des
rencontres imaginaires, de devenir le laboratoire secret
dans lequel l’écrivain assemble les improbables, redessine, expérimente… Après l’impressionnante caverne
de Zone Mathias Enard livre un petit bijou renaissance à l’ombre des coupoles du Bosphore.
Michel Ange, invité à Constantinople pour concevoir
un nouveau pont sur la Corne d’Or, laisse en plan le
tombeau destiné au pape Jules II. Les lettres se
succèdent, rappelant l’artiste à Rome, tandis qu’il
s’imprègne de l’atmosphère de la ville pour trouver
l’inspiration nécessaire.
Démarche passionnante que de faire se rencontrer la
Renaissance italienne et l’orientale Constantinople du
Sultan Bajazet (non, pas celui de Racine) dans une
construction savante et subtile, une polyphonie à voix
traitées à différents niveaux : à la troisième personne
Michel Ange, et le poète Mesihi, amoureux secret et
désespéré du sculpteur ; à la première personne,
l’envoûtant(e) bel(le) Andalou(se), qui chante, danse,
personnage énigmatique qui semble comprendre en
lui toute la fascination qu’exerce l’Orient des orientalistes, beauté, préciosité, charme et… danger. Le
style est précis, les phrases lapidaires, le présent taille le
texte au rythme d’une tragédie classique, et met en
scène l’éternel combat entre la matière et l’esprit,
l’alchimie subtile qui parfois en des instants de grâce
les unit. L’énigme du titre se dévoile avec finesse, et
chatoiements !
MARYVONNE COLOMBANI
Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants
Mathias Enard
Éd. Actes Sud, 17 euros
Délivrez-les du mal
Quel Juste ? Quel est le poids d’une vie quand on a le
pouvoir de la reprendre ? Alger, 27, 28 et 29 mars
1957. Trois jours suffisent à Jérôme Ferrari pour
débattre du Bien et du Mal sans jamais tomber dans
un portrait manichéen de la guerre, et s’interroger sur
les sentiments qui animent le capitaine André Degorce
et le lieutenant Horace Andreani. Tous deux ont
affronté l’horreur des combats et de la détention en
Indochine, tous deux passent des mains de leurs
tortionnaires aux geôles algériennes : sauf que de
victimes ils sont devenus bourreaux. Mais le plus lâche
des deux n’est pas forcément celui qu’on croit.
Empêtré dans une bigoterie qui lui adoucit les pleurs,
le capitaine Degorce croise sur son chemin Tahar,
«seigneur d’une guerre clandestine», figure charismatique de l’ALN qui va fissurer ses certitudes, mettre
à mal la grandeur et la servitude du métier de militaire.
Mais jusqu’à quel point ?… Remords, angoisse du
Jugement dernier, résignation dans l’accomplissement
de ses viles besognes (faire parler l’ennemi coûte que
coûte) : alors que Degorce n’en finit pas de tressaillir,
Andreani recrache sa haine à la figure du commandeur
genoux à terre. Courage, abnégation, dégoût, exactions, nausées, douleur, aveu, torture, culpabilité,
perversion, héroïsme : autant de sentiments entremêlés et de situations paroxystiques. Jérôme Ferrari
prête à chacun des personnages - même les plus subalternes - une parole forte, concise, servie par une
écriture brillante qui ne s’embarrasse pas de superlatifs.
Et les citations des Écritures saintes en exergue ne font
qu’accroître encore notre malaise. Tahar, Andréani,
Degorce : l’enfer, c’est la guerre.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Où j’ai laissé mon âme
Jérôme Ferrari
Éd. Actes Sud, 17 euros
L’auteur était présent aux Correspondances
de Manosque pour une rencontre avec Sofiane Hadjaj
(voir p 66)
70
LIVRES
LITTÉRATURE
Sous un ciel si bleu, si vide
Que reste-t-il du 11 septembre ? À l’heure où la polémique autour de la future mosquée fait rage, à
quelques mois du dixième anniversaire des attentats,
Thomas Reverdy situe son 4ème roman tout près de
L’envers du monde : Ground Zero, «une absence en
béton». New York donc, août 2003. La canicule
stagne sur la ville. Le ciel y reste inexorablement bleu.
Comme ce jour de septembre où deux avions ont
percuté les tours jumelles. Sur le chantier, le corps d’un
ouvrier arabe est découvert dans un puits de forage.
Homicide ? Accident ? Le roman débute comme un
policier. Ce qu’il n’est pas, même si l’on y croise un
inspecteur du FBI. Car il importe assez peu de connaître les raisons de cette mort ou l’identité de
l’éventuel assassin. Cette disparition initiale - «comme
s’il n’avait jamais existé» - donne le ton du roman. Un
récit à plusieurs voix sur le deuil, le manque, le désarroi. On y suit Pete, ancien policier présent lors des
attentats, reconverti depuis dans la visite du site,
Candice, serveuse à Brooklyn dont le mari a été pulvérisé dans l’une des tours, et Simon le Français venu
donner des ateliers d’écriture à l’université et se
documenter sur les attentats en vue d’un livre. «Tout
le monde a ses fantômes», qu’il parvient ou non à
oublier. À travers trois personnages un brin paumés,
trois itinéraires subtilement croisés, Reverdy entre dans
l’intimité de l’histoire américaine récente. Mi-empathique mi-distant, il brosse le portrait d’une Amérique
meurtrie. Et pose quelques pertinentes questions sur
le monde comme il va… à sa perte ?
FRED ROBERT
L’envers du monde
Thomas Reverdy
Éd. du Seuil, 18 euros
L’auteur était présent aux Correspondances
de Manosque pour une rencontre croisée avec Lionel
Salaün (Zib’ 33), autour de leur vision de l’Amérique
Scène primitive chez les primates
Sois fidèle à l’humain, Doogie.
Tandis que les humains se sont retranchés sur des
stations orbitales, l’Afrique est devenue une sorte de
conservatoire naturel. La famille Evans y gère un zoo
immense et expérimental, et à la façon d’une Genèse
post-moderne, tente d’y recréer l’animal à l’image de
l’homme : Doogie, chimpanzé surdoué, y parvient
presque. Recueilli bébé, le petit singe a été élevé avec
les enfants du couple et il a acquis un langage et une
éducation élaborés. Mais un crash au retour du voyage
de promotion renvoie le prodige «civilisé» au cœur de
la jungle, et le contraint, pour survivre et rejoindre le
zoo, à retrouver par degré son animalité.
Le récit est construit sur le monologue intérieur du
singe : les «mémoires», qui retracent rétrospectivement
la vie au zoo, alternent avec les épisodes «de la jungle» :
ces deux trames retracent les trajets symétriquement
inverses de Doogie, progression et régression, où
basculent, à travers le langage, la conscience, la mort,
la sexualité, les pulsions, les limites entre homme et
animal. Pourtant, ces deux récits convergent : à la
Amours slaves
Le 7e ouvrage du Brésilien Bernardo Carvalho répond à une commande. Celle d’une histoire d’amour
dans une grande ville du monde, ici Saint-Pétersbourg
(voir p 65). Carvalho a accepté la contrainte… pour
mieux la contourner (n’est-ce pas là l’intérêt des
contraintes ?). Dans ce roman qui multiplie les points
de vue, navigue dans le temps et sort de la ville pour
des incursions en Ingouchie, en Tchétchénie et même
au Brésil, on est bien loin des clichés sur la cité de
Pierre le Grand. Et les amours qu’il met en scène n’ont
rien à voir avec des lunes de miel sur la Neva. Pas
d’exotisme slave, aucune couleur locale. Malgré le
ravalement des façades, un climat de brutalité et de
déréliction domine cette ville panoptique, quadrillée
par la police et pourtant pleine de zones obscures. Un
univers glacé, même au printemps, et glaçant. Où se
débattent les fils déshérités de ce système inhumain,
où le comité des mères de soldats étudie plus d’une
centaine de cas par jour, où il faut tricher pour éviter
façon d’une anamnèse, le retour au zoo coïncide avec
la scène primitive du mystère de sa naissance…
S’inspirant d’un fait divers réel, Tristan Garcia
propose une ultime variation sur l’homme-singe, qui
commence comme la Planète interdite et s’achève en
conte cruel. Mais l’originalité et la réussite du livre
tiennent avant tout à l’inventivité de la narration, à la
cohérence du langage singulier de Doogie, étonnant
pidgin mêlant anglicisme, préciosités et barbares
barbarismes. Et au portrait cocasse et pathétique de
Doogie, imitation simiesque de l’homme dans ses
rêves de puissance, lorsqu’il traverse la jungle avec son
slip XXL, son pistolet et son chien, comme dans ses
rêves de servitude volontaire, dans son attachement
désespéré à son origine, à laquelle il a donné le nom de
sa mère, sœur et divinité : sa maîtresse Janet.
AUDE FANLO
Mémoires de la jungle
Tristan Garcia
Éd. Gallimard, 19,50 euros
Tristan Garcia sera présent lors des Littorales
à Marseille (voir p63)
le service militaire et le départ forcé pour la Tchétchénie, où l’armée prostitue ses jeunes recrues afin de
renflouer ses caisses, où la violence est souvent la seule
issue. L’amour ? Quelques rencontres furtives, éphémères. «Quand il n’y a plus rien, il y a encore le sexe
et la guerre. Le sexe et la guerre sont ce que tous les
hommes ont en commun […]». La langue volontairement neutre, cynique presque, rend à merveille le
quotidien terrible d’un pays miné par la corruption et
le désespoir.
FRED ROBERT
Ta mère
Bernardo Carvalho
Traduction Geneviève Leibrich
Éd. Métailié, 17 euros
L’auteur était invité aux Correspondances
de Manosque et président d’honneur
du Festival du Livre de Mouans-Sartoux
Anne-Marie Métailié était l’éditrice invitée
d’honneur à Mouans-Sartoux
Grève à tous les rayons
Après le succès de Notre usine est un
roman, commande des salariés licenciés
d’un centre de recherche pharmaceutique à Romainville, l’écrivain militant
Sylvain Rossignol s’est lancé dans une
fiction sur un supermarché, un monde
du travail fermé où la communication
est réduite à peu de choses : chacun est
à son poste, du directeur aux caissières,
en passant par les vigiles. Quant aux
clients ils sont surtout préoccupés par
leur chariot. Rien que de très banal.
Mais voilà que la caissière Noémie se
livre à un acte singulier et fou : elle
cache le code-barres d’un bouquet de
fleurs et par là même les offre à un
client. Séduit, celui-ci se débrouille pour
toujours passer à la caisse de Noémie les
jours suivants. Cependant Noël approche et la responsable du rayon
poissonnerie, Viviane, nouvellement
déléguée syndicale, veut inciter le
personnel à refuser de travailler le 24
décembre qui tombe un dimanche. Le
directeur s’inquiète, les caissières se
mobilisent, Viviane et Noémie deviennent amies, Julien se déclare solidaire.
Sylvain Rossignol anime tout cela par
de courts chapitres essentiellement dialogués, variant les points de vue par des
monologues incisifs dont la juxtaposition est jubilatoire. Le vote de la grève
réveille les consciences, déclenche une
parole libératrice. Trop beau pour être
vrai ? Sur la Canebière Monoprix est en
grève…
CHRIS BOURGUE
Carte de fidélité
Sylvain Rossignol
Éd. La découverte, 14 euros
Sylvain Rossignol sera présent lors
des Littorales à Marseille (voir p63)
Pour que l’on
n’oublie pas
Pourquoi chroniquer le dernier roman
de Maurice Gouiran ? Depuis que ce
docteur en mathématiques, spécialiste
des systèmes d’information sur les
incendies de forêts, s’est lancé dans
l’écriture, il publie un livre par an au
moins, jouit d’un lectorat fidèle qu’il
rencontre volontiers lors des nombreux
festivals où il est invité. Certains de ses
textes sont même étudiés en lycée ; bref,
il n’a pas vraiment besoin de publicité !
Il importe pourtant de saluer ce nouvel
opus. Car, au-delà de l’enquête de
Clovis Narigou son double à peine
déguisé (Narigou, Gouiran, vous
voyez ?), au-delà de ce qui ne manquera
pas d’agacer les allergiques au polar dit
marseillais, à savoir les digressions sur
les us et coutumes des piliers de bars de
l’Estaque ou sur la faune et la flore de
nos belles collines, au-delà de tout cela
donc, voilà une palpitante leçon de
mémoire. Gouiran utilise les ressources
de la fiction policière pour débusquer
les silences et les mensonges de l’histoire. Dans Franco est mort jeudi, on
navigue entre plusieurs périodes dou-
loureuses de l’histoire espagnole récente,
on entre dans la mémoire de ceux qui
ont vécu la guerre civile puis l’exil. On
prend aussi conscience que les forces
réactionnaires sont toujours là, prêtes à
reprendre du service et qu’il convient de
rester plus que jamais vigilant. Placé
sous la tutelle d’Orwell, dont une page
est citée en exergue, ce roman engagé et
humain est à lire pour se souvenir…
FRED ROBERT
Franco est mort jeudi
Maurice Gouiran
Éd. Jigal,
18 euros
72
LIVRES/ARTS
People et Tarifs préférentiels
Porte Avion est une des plus anciennes galeries d’art
contemporain associatives de Marseille mais certains
oublient qu’ils sont aussi éditeurs (P. A. Gette, Le
Forban, J. L. Parant, C. Marchetti…). Jean-Jacques
Le Berre propose une belle affaire en souscription : Art
People or Employees, livre d’artiste de Susanne Strassmann (expo actuellement au Passage de l’Art) format
21,5 x 28 cm, 136 pages, un peu plus de 120 photographies en couleurs, en français et en anglais. Le tirage
est limité à 500 exemplaires pour 35 euros au lieu de
45 et une édition en tirage de tête, à 30 exemplaires
numérotés et signés accessibles pour 100 euros au lieu
de 125. De plus vous pouvez choisir entre deux
visuels. Parution prévue en janvier 2011, exposition
en septembre de la même année.
Dans le monde de l’art les people ne sont pas toujours
des VIP. Entre 2000 et 2009, à Venise, Bâle, NYC,
Paris, Avignon… Suzanne Strassmann a capté les
gestes des gens qui font les expositions d’art contemporain. Autant, comme dans toute maison bourgeoise,
les petits personnels font tourner la boutique, autant
les invités peuvent être plus ou moins impersonnels.
Martin Parr, Jessica Craig-Martin aussi captent dans le
savoir décoder, Strassmann ouvre le champ : technicien de surface ou quelconque performeur ? décolleté
pique-assiette ou fameuse critique d’art ? Mais un
vigile en costard restera un vigile !
Art People or Employee se présente comme une chronique amusée et distanciée, haute en couleurs, de
certains dans le monde de l’art.
CLAUDE LORIN
Art People or Employees
Suzanne Strassmann
Éd. Porte Avion
Au photographe inconnu
Cet été lors des Rencontres de la Photographie d’Arles,
la rétrospective du musée Réattu rendait hommage à
l’œuvre du photographe Pierre Jahan (1909-2003).
Le catalogue prolonge utilement l’évènement centré
sur la période sûrement la plus prolifique et éclectique
de l’artiste, des années trente à la fin des années cinquante. Premier opus d’importance sur ce photographe
méconnu du grand public, il reprend les thématiques
de l’exposition, s’enrichit de nombreuses reproductions et d’un texte inédit de Michel Frizot. Concise et
dûment informée, la contribution de l’historien de la
photographie éclaire ce qui n’est pas toujours explicite
face aux images et à leur évidence première. Ainsi du
Notre littoral
La poétique du bord est le résultat de deux années
d’exploration photographique menée par Olivier
Ansellem sur les rives provençales. Commande portée par Le Factotum avec l’appui du Conseil général
des Bouches-du-Rhône. C’est donc le littoral du
département qu’Olivier Ansellem a suivi entre La
Ciotat et la Camargue. Une sélection de tirages grand
format a été présentée à la Maison de l’architecture et
de la ville Paca à Marseille (voir Zib’ 33) en parallèle
à la parution de cet ouvrage rassemblant plus de cent
clichés. Évacuant poncifs touristiques tout autant que
les images catastrophistes, les photographies d’Ansellem se veulent cependant un authentique cri d’alerte,
acerbe et distancié, sur les transformations insensées
subies par le littoral provençal. Constat désenchanté
que reprend et développe dans sa présentation le
sociologue Jacques Leenhardt en rappelant l’autre
statut de la photographie dans le premier tiers du 20ème
siècle entre image d’illustration (favorisée par la photogravure) et médium artistique (expérimentations des
avant-gardes) : on perçoit les allers-retours entre ces
deux pôles à travers les travaux de commande (illustration, publicité) et les recherches plus personnelles.
Entre le regard humaniste d’un Doisneau, et la
démarche surréaliste.
CLAUDE LORIN
Pierre Jahan, libre cours
Co-édition Actes Sud/Musée Réattu, 35 euros
dimension du paysage, celle temporelle des transformations, des nombreux aménagements agressifs
apportés par l’Homme. Dans les pages suivantes le
photographe s’entretient avec l’architecte Rudy
Ricciotti à propos du projet du Mucem, d’urbanisme
et d’esthétique politique maniériste. Plus poétique
mais non moins dénonciateur, Christian Lacroix
détricote cette langue de terre en treize petits chapitres
où il est question en conclusion de «ce couloir saturé
oscillant entre Eden et égout, cloaque et réserves
paradisiaques».
C.L.
La poétique du bord
Olivier Ansellem
Funny Bones éditions
73
74
LIVRES/DISQUES
MUSIQUE
Apprendre à entendre
Genres, Formes et Commentaire d’écoute : trois outils pour l’analyse musicale.
Claude Abromont et Eugène Montalembert, éminents
pédagogues en matière d’analyse musicale, ajoutent des
contributions claires et instructives à leur œuvre entreprise au début des années 2000 (Guide et Abrégé de la
Théorie musicale). Leur «dictionnaire» consacré aux Genres
de la musique occidentale s’aborde par quelque 300 entrées
alphabétiques, énumère les principaux genres liés au
concert (symphonie, sonate…), à la musique vocale (Lied,
opéra…), la danse, la musique religieuse, ou aux principes de composition (fugue, variation…). Débordant
de références historiques et de liens aux œuvres, ce
«pavé», destiné au simple amateur comme au musicien /
musicologue, est complété par son pendant obligé. Un
Guide des Formes de la musique occidentale, synthétique et
abondamment éclairé d’extraits de partitions, envisage
précisément la trentaine de formes fondant notre culture
sonore (Aria da capo, Sonate bithématique, Rondo…) de
Léonin aux Beatles.
Nonobstant, le plus original des trois ouvrages est le Petit
précis du commentaire d’écoute que Fayard reprend de chez
les éditions Panama (2008). Ce livre est destiné notamment aux étudiants qui doivent se confronter à l’exercice
(oral ou écrit) du commentaire d’écoute : du candidat se
présentant à l’épreuve musicale du baccalauréat, aux
élèves des conservatoires, candidats aux concours de
l’éducation nationale, danseurs… et aux professeurs désireux de former leurs élèves à l’écoute ordonnée. Avec un
didactisme maîtrisé l’auteur échafaude une pédagogie en
sept axes qu’il développe et illustre d’outils et de conseils
pratiques. Précieux, et passionnant.
JACQUES FRESCHEL
Conte finnois
On a découvert la version musicale de l’ultime des sept contes
commandés par Musicatreize, Antti Puuhaara à Mar-seille le 11
juin dernier (ABD Gaston Defferre), et l’on pourra enfin
apprécier l’opus dans l’espace scénique du Théâtre du Gymnase
le 4 nov à 20h30 (voir p 30). On peut également se familiariser
avec l’opus grâce à la paru-tion d’un livre-disque publié chez
Actes Sud. Le livret (Tapio Tuomela et Erik Söderblom) tiré
d’une légende finlan-daise est narré en français. Les dialogues
Piccolo solo
Jean-Louis Beaumadier est issu de la magnifique école française
(marseillaise) de flûte dont Jean-Pierre Rampal fût le plus
éminent représentant (un hommage lui sera rendu à Marseille,
du 29 au 31 oct voir p 30). C’est à cette occasion que notre
Paganini du piccolo, publie un florilège d’opus contemporains
écrits durant le dernier quart du 20ème siècle. Ces partitions, qui
lui sont souvent dédiées et qu’il a lui même sollicitées, prouvent,
Musique au féminin
Longtemps on a pensé que l’acte de composer de la musique
était une affaire d’hommes. Aujourd’hui les deux sexes se
partagent l’affiche des concerts de musique contemporaine,
prouvant qu’il n’y avait aucune prédestination à cela. Les
histoires de la musique ne citent que rarement le nom de femmes
compositrices. Le Seicento italien (voir p 28) a pourtant été
favorable à l’éclosion de talents comme Barbara Strozzi dont
l’œuvre profane et sacrée est abondante. L’ensemble Concerto
Soave dirigé par Jean-Marc Aymes (claviers), à la faveur de la
Électro choc
Soit cet homme est complètement fou, soit il est grand temps de
s’exiler à Sainte-Hélène histoire de se remettre les idées en place.
Car le plus déjanté des suisses allemands se nomme Bonaparte
et sème aux quatre coins de la planète son Indie électro-punk.
Coqueluche de l’underground berlinois et suivi à la trace par les
spécialistes américains, cette boule à facettes posée sur un corps
d’humain dégoupille sa grenade aux 14 titres plus explosifs les
uns que les autres sous l’appellation non contrôlée My horse like
you. Computer in love est un single qui nous ferait avaler des
Guides des Genres (42 euros),
Formes (20 euros)
de la musique occidentale.
Petit précis
du commentaire
d’écoute
(17 euros)
Éd. Fayard / Henri Lemoine
sont illustrés par le peintre Hannu Vaï-sänen et Roland
Hayrabedian dirige avec soin les pages chorales et deux airs
étonnants en finnois (Tapio Tuomela) doucement mâtinés de
sonorités de harpe, de cordes et d’accordéon.
J.F.
Antti Puuhaara
Livre-CD Éd. Actes Sud, 25 euros
s’il le faut encore, que la «petite flûte» n’est pas qu’un fifre
d’orchestre. Elles sont signées, pour partie, de musiciens liés à
notre région au fort potentiel créatif : Marcel Frémiot, Régis
Campo, Robert Coinel, Lucien Guérinel, Georges Bœuf…
J.F.
CD Premiers Horizons Ref. 070.141 distr. Codaex
voix suave et lumineuse de Marie Christina Kiehr, exhume
aussi des pièces inédites et somptueuses de Francesca Caccini
(fille de Giulio) et de deux religieuses : Caterina Alessandra et
Isabella Leonarda.
J.F.
Canto delle Dame
Concerto Soave
CD Éd. Ambronay AMY025
couleuvres pop, et en plus Bonaparte est un dévastateur d’espace
scénique dont les shows restent en mémoire. Plus qu’à découvrir
le phénomène sur la scène de la Fiesta des Suds le 23 oct (voir
p 36).
FRÉDÉRIC ISOLETTA
My horse like you
Bonaparte
Differt-ant / Staatsakt
SCIENCES 75
Rencontres du quatrième trip
Après une année blanche en 2009 l’association Polly Maggoo satisfait son public
en proposant comme en 2008 les 4e RISC
(Rencontres Internationales Science et
Cinéma) du 2 au 7 nov au CRDP et pour
une soirée au GMEM. Pour élaborer la
sélection des films présentés et pour choisir
les thématiques, Polly Maggoo revendique
une programmation «éclectique» ou «grand
public». Parmi les trois cents films reçus en
2009 et en 2010, les démarches singulières
ont été privilégiées, entreprises en quête
d’aventures, rencontres sans confort
préalable.
Au cœur de la semaine de projection qui
permettra de visionner les films retenus, deux
soirées extraordinaires : le 4 nov, l’image ne
Moi Sekou, mon village, mon combat d’Eric Mounier
sera pas le médium des sciences, mais les
poètes et performers Jean-Michel Espitallier et Eric Duyckaerts feront jongler les
mots avec l’univers scientifique (séance spéciale au Gmem). Et le 5, une soirée hommage
au grand documentariste anglais Richard
Leacock : connu pour avoir suivi la campagne de JF Kennedy en 1960 (Primary),
le cinéaste de 89 ans présentera des films
scientifiques réalisés à la fin des années
1950.
Poursuivant son travail dans des collèges et
lycées tout au long de l’année, Polly Maggoo propose quatre séances réservées aux
publics scolaires, les 4 et 5 nov à 10 h et 14 h.
Nous conseillons particulièrement aux enseignants la séance du 5 nov à 10 h en
partenariat avec l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) : Moi Sékou,
mon village, mon combat d’Éric Mounier
(France, 2004, documentaire, 52’). Construit comme un «voyage enquête», ce
documentaire suit les pas et le parcours
d’un jeune malien émigré en France. Sékou
refuse la fatalité. Lorsqu’il retourne pour
ses congés dans son pays, c’est pour tenter
de trouver des solutions à la désertification
qui détruit inexorablement son village. À
travers son périple et ses rencontres, les
jeunes pourront découvrir les multiples
causes, et les conséquences, de la
désertification.
YVES BERCHADSKY
Rencontres Internationales Science
et Cinéma
Du 2 au 7 nov
Crdp, Gmem, Marseille
www.pollymaggoo.org
Faites, faits, fête, défi…
Prochain rendez-vous pour la 19e édition de la Fête de la
Science du 21 au 24 oct un peu partout dans notre région
Le programme trop riche pour être ici détaillé se trouve facilement sur
www.fetedelascience.fr et dans de très jolis
fascicules distribués dans tous les lieux
publics et culturels.
Dans ce cadre, Zibeline a retenu pour vous
la Conférence inter-religieuse du Pr. Hagay
Sobol, cancérologue et généticien, le 19 oct
à 18h30 au Théâtre Comœdia à Aubagne :
La génétique est-elle une fatalité ? Les textes
sur la bioéthique ont vocation à être revisités régulièrement. Ce sera le cas, devant
le Parlement, en 2011. Ces débats doivent
également être ceux des citoyens, pour leur
permettre de réfléchir ensemble au sens à
donner aux progrès constants de la médecine, qui se doit d’être au service de
l’Homme. Cette conférence éclairera ce
débat essentiel selon trois axes : la génétique, la bioéthique, le religieux.
Venez également souffler les 50 bougies du
Laser, dans le cadre de la Fête de la Science
le 21 oct à la faculté St Charles. Le programme est éblouissant, il comprendra des
animations, expériences et trois grandes
conférences. Différentes expériences (de la
Maison des Sciences et de l’Institut Fresnel)
seront installées dans la salle de conférences
du centre de St Jérôme les 21 et 22 oct, de
9 à 17h. Y.B.
76
HISTOIRE
SÉTIF | HORS-LA-LOI
Hors-la-loi, de quelle Histoire ?
Le film de Rachid Bouchareb
soulève des réactions extrémistes
(voir p.7). Il convient de le regarder
avec recul, loin du tumulte
de la colonisation positive
Hors-la-loi est, par essence, un film historique. Il narre
l’histoire d’une famille dont le destin chemine avec la
décolonisation algérienne. La scène initiale montre une
expropriation, en 1925. C’est une allusion à ce qui fut une des
permanences de la colonisation : la spoliation de terres.
Depuis le Second Empire, on distinguait juridiquement les
Musulmans -les indigènes- et les Français. Le code de
l’indigénat (1881) permettait la saisie des terres, les sanctions
collectives ou individuelles. Dans le film, le Caïd, le chef
communautaire, ne défend pas les intérêts de la population
locale : Rachid Bouchareb dénonce ainsi la collaboration des
élites et leur trahison, et le propos tend à conclure au recours
obligé à d’autres personnes pour d’autres moyens d’action.
Pourquoi Sétif
La scène suivante, la manifestation du 8 mai 1945, est un
moment clé. Rappelons ! Les paysans affluent en ville chassés
des terres et poussés par la croissance démographique. D’autre
part, les colons, peu nombreux (moins de 10% de la
population), disposent des meilleures terres, base de leur
puissance. Ils contrecarrent le projet d’assimilation qui voulait
faire des locaux, sous conditions, des Français à part entière.
Pour eux le recours à la force est une solution durable !
Côté musulman, il faut rappeler que l’essor du nationalisme
est tardif. L’absence initiale d’État réellement algérien et
l’adhésion des élites au projet républicain ont ralenti l’éclosion
de la contestation : le mouvement des jeunes Algériens, avec
Ferhat Abbas, poursuit le combat de l’intégration. A contrario, les docteurs de la loi, les oulémas, veulent une nation
algérienne fondée sur la pureté de la foi. Messali Hadj, lui,
fonde en 1937 le Parti du Peuple Algérien et professe un
nationalisme islamique populaire.
Avec la guerre mondiale et le débarquement américain en
Afrique du Nord les données changent. Dégrisé par l’attente
de réformes toujours repoussées, Ferhat Abbas publie un
Manifeste du peuple algérien qui revendique un État algérien
autonome. La France répond enfin par une ordonnance, le 7
mars 1944, où elle propose une assimilation plus généreuse.
Mais il est trop tard ! Les courants contestataires s’enhardissaient, encouragés qu’ils étaient par la charte des nations
unies et la création de la ligue arabe (1945). L’affaire se noue
à Sétif et dans le Constantinois. Ici le film abuse : la mort du
porteur de drapeau algérien fut suivie par un massacre des
populations d’origine européenne (102 morts). Deux jours
plus tard commence la répression sanglante. Les historiens
débattent de l’ampleur et des causes des événements. Il semble
que la férocité et l’outrance de la répression (des milliers de
morts musulmans, peut-être des dizaines de milliers) correspondent à une volonté d’écraser le mouvement nationaliste
(le PPA avait déclenché prématurément un projet insurrectionnel). Le film nous livre la vision rétroactive du FLN : Sétif
et Guelma seraient le début de la guerre révolutionnaire.
Violence et terreur
Deuxième temps fort : la lutte entre les factions politiques. La
guerre d’Indochine et le triomphe vietnamien de Dien Bien
Phu sont un encouragement majeur pour les nationalistes.
La voie à suivre est choisie : il faut provoquer pour que la répression s’abatte. L’impasse politique liée au statut de l’Algérie
de 1947 et à son application -un double collège et un trucage
des élections- sont évoqués par nos héros révolution-naires à
l’usine Renault.
Le film ne fait que très évasivement allusion à ce qui fut le
véritable début du soulèvement nationaliste conduit par le
FLN : le massacre de populations civiles, le 1er novembre 54.
S’imposent désormais le primat de l’action militaire, la
violence et la terreur. Cette intransigeance conduit à éliminer
toute opposition. À l’extérieur, ce sont les partis concurrents
(le FLN est né d’une scission du parti de Messali Hadj, le
MTLD) et tous ceux qui résistent, d’où la scène de l’assassinat
du cabaretier MNA (successeur du MTLD). À l’intérieur du
mouvement, ce sont les faibles. On ne voit pourtant pas les
règlements de compte politique à l’intérieur du mouvement
qui opposent, par exemple, les chefs de l’ALN (l’armée des
campagnes) aux chefs historiques du
FLN. Le mouvement apparaît comme
solide et unifié, ce qu’il ne fut pas (le
leader FLN Abbane Ramdame est
assassiné par ses compagnons).
Les trois héros se meuvent dans un univers clos sur lui-même. Le FLN y est
décrit comme un mouvement sans histoire, où les porteurs de valises ne sont
que des accessoiristes aux ordres du
mouvement algérien : pas de Sartre ou
de Vidal-Naquet pour dénoncer les
affres du colonialisme, ni même l’engagement d’un Maurice Audin. Le film
poursuit la logique de légitimation du
combat nationaliste du FLN : la violence ne pouvait être évitée, puisqu’elle
est révolutionnaire.
En réalité ces déchirures ne vont aller
qu’en s’amplifiant, surtout après l’Indépendance. Les légitimer revient à
justifier les violences de la vie politique
algérienne. À y regarder de près, bien
que les héros ne soient pas sympathiques
et soient montrés comme pratiquant
un peu vite le meurtre politique, ce film
ressemble à un panégyrique du FLN.
D’ailleurs, la version des événements de
Sétif reprend les positions du gouvernement algérien: celui-ci ne cesse de
demander une repentance unilatérale
de la France.
RENÉ DIAZ
Hors-la-loi de Rachid Bouchareb
Intégrations
Un nouveau cycle de sept conférences historiques, organisé par Approches,
Culture(s) et Territoire aux Archives départementales de Marseille, a pour
thème central l’inscription de Marseille dans le cadre royal à partir du règne de
Louis XVI. Comment Marseille la soumise, Marseille la méditerranéenne, trouve
une place dans l’espace méditerranéen et oriental.
Par ailleurs ACT projette à la Minoterie Pièces de mémoire, paroles de passeurs,
une série de portraits de comédiens «issus de l’immigration» (Zohra Ait-Abbas,
Mohamed Adi, Akel Akian, Kamel Boudjellal, Louisa Amouche, Edmonde
Franchi et Patrick Servius).
R.D.
Mobilités, échanges et frontières
Voisins, Wolfgang Kaiser, le 19 oct
Politique et altérité : des représentations sous influence Junko Takeda, le 9 nov
Pièces de mémoire, paroles de passeurs, le 22 oct, la Minoterie
www.approches.fr
LA POP PHILOSOPHIE
Politique
ou poétique
de la vérité ?
PHILOSOPHIE 77
POL POP philosophie
La philosophie se définit premièrement ainsi selon
Foucault : c’est un travail essentiel interrogeant la
vérité, elle doit faire comprendre que l’accord rationnel
n’est pas un fruit du consensus, mais du rapport de
force. Certains objectent à cette définition que la
philosophie n’est pas forcément politique, et qu’elle
peut s’appliquer à tout objet ; à moins que tout ne soit
politique, et que s’interroger sur Plus belle la vie -le 20
oct à 15h à la FNAC Marseille- soit un champ
possible de l’investigation philosophique ?
© Tonkin Prod
Alors c’est quoi la pop philosophie ? Pas de définition
nette mais des injonctions, comme celle de
Canguilhem : «la philosophie est une réflexion pour qui
toute matière étrangère est bonne, et nous dirions
volontiers pour qui toute bonne matière doit être
étrangère.» Pop pourquoi ? Parce que populaire on
l’espère, mais surtout dans la lignée du pop art et de
la musique pop. Pour Gilles Deleuze qui inventa
l’idée, c’est une philosophie impure qui s’empare
d’objets inhabituels et a priori illégitimes, pour penser
dans la joie. Comme par exemple la conception du
monde chez les Shadoks le 22 oct à 14h, à La Criée,
et par Gérard Berry professeur au collège de France.
En fait la pop philosophie est un bricolage de la pensée
sur des références légères qui se substituent à l’œuvre
d’art ; on essaie, on trifouille les idées sur des objets
étonnants. Pourquoi pas ? On s’approchera peut-être
des intentions de cette pop philo à la Maison Hantée
le 22 à 18h30 où Eric Aeschimann, Stéphane
Legrand et Pacome Thiellement se demanderont si
le rock philosophique a vraiment existé. Parce que le
rock et mai 68 sont de purs évènements, surgis de
nulle part, «improductifs et sans objet… ainsi le rock
réussit où la politique échoue : il rend heureux.» On
espère un débat vraiment rock’n’roll si les gauchistes
de la Plaine passent par là !
En tout cas la semaine est riche, avec d’éminents
intervenants, et quelques problématiques nécessaires
comme celle du 23 à 17h30 au Palais de la Bourse,
sur les métamorphoses de la temporalité et de la
spatialité à l’heure du portable qui rend l’Autre en
permanence à ma portée, et ma localisation connue
par satellite !
RÉGIS VLACHOS
Semaine de la Pop Philosophie
du 18 au 23 oct
Marseille
www.lesrencontresplacepublique.fr
Un brin de Sexop Philo
Influencé par la pop philosophie on a inventé la PHILOsophie
SEXuelle Opérationnelle ; on fait ce qu’on peut !
La philosophie a raison de s’interroger
sur les objets et débats du quotidien,
pour les sortir de leur doxa, leurs préjugés, leur simplification médiatique.
Non pour broder mais pour les ramener à des concepts fondamentaux, afin
d’éclairer et de donner envie de changer
le monde. À l’inverse de Spinoza («ne
pas railler, ne pas pleurer, ne pas haïr, mais
comprendre»), Bensaïd disait que d’abord
vient l’indignation, ensuite la pensée, et
enfin l’action.
Action justement que celle contre la
réforme des retraites, qui en son sein
porte un grave coup à l’égalité de traitement entre l’homme et la femme, et
met en lumière la béance philosophi-
que quant à la réflexion sur la différence
générique homme-femme.
Le premier point sur lequel rien n’est
réglé est celui du naturel et du culturel :
hormis la procréation, tout est culturel.
Or cette différenciation culturelle est
d’autant plus violente qu’elle s’abrite
sous une justification naturelle : ainsi
l’instinct maternel, inexistant naturellement mais présenté comme conséquence
de la procréation.
L’autre question, qui découle de celleci, est la généalogie de la distinction du
féminin et du masculin : on nage en
eau trouble dès qu’on se demande d’où
et comment vient l’inégalité Homme/
Femme. De l’invention de la propriété
privée qui brise l’état heureux de nature
où tous étaient égaux ? Dès lors la
femme devient propriété de l’homme,
dixit Engel, why not… Pour d’autres
elle provient d’un modèle de pensée
archaïque dominant, issu des premières
représentations du monde au paléolithique, qui se perpétue : on aurait
évolué sur tout depuis l’homme des
cavernes, sauf là-dessus, et le féminin
resterait passif, l’homme actif…
Il y a bien une différence entre l’homme
et la femme, que l’histoire millénaire a
construite. Mais peut-on constater aujourd’hui qu’il y a des valeurs féminines
et d’autres masculines sans que cette
distinction relève de l’essentialisme ?
Ces valeurs sont le fruit de la culture,
elles ont été faites et peuvent être
défaites. Mais pour obtenir l’égalité la
femme doit-elle adopter les valeurs
(non essentielles) de l’homme: le mode
de gestion capitaliste (brutalité, rentabilité) n’est-il pas proprement inhumain ?
La femme doit-elle s’y glisser parce qu’il
est masculin ? Et pour y faire quoi ?
Pour montrer qu’elle peut subvertir ces
valeurs ? On aimerait le croire.
R.V.
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imprimés sur papier recyclé
Edité par Zibeline SARL
76 avenue de la Panouse | n°11
13009 Marseille
Dépôt légal : janvier 2008
Directrice de publication
Agnès Freschel
Imprimé par Rotimpress
17181 Aiguaviva (Esp.)
photo couverture
SMALL IS BEAUTIFUL
© Agnès Mellon
Conception maquette
Max Minniti
Rédactrice en chef
Agnès Freschel
[email protected]
06 09 08 30 34
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Philosophie
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Maquettiste
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Histoire et patrimoine
René Diaz
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Sciences et techniques
Yves Berchadsky
[email protected]
Ont également participé à ce numéro :
Dan Warzy, Yves Bergé, Aude Fanlo,
Christophe Floquet, Jean-Mathieu
Colombani, Clarisse Guichard,
Christine Rey, Rémy Galvain
Photographe
Agnès Mellon
095 095 61 70
photographeagnesmellon.blogspot.com
Directrice commerciale
Véronique Linais
[email protected]
06 63 70 64 18
Chargée de développement
Nathalie Simon
[email protected]
06 08 95 25 47

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