Gratuit - InterMédia

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Gratuit - InterMédia
10 | 12 | 2014 n° 1276
15€
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ISSN : 0249-1575
Marketing / communication / médias en rhône-alpes m a g a z i n e
dossier
Demain, la ville…
s
e
c
n
a
d
n
Te
2015
grand témoin
« La signalétique multisensorielle permettra
de mieux s’orienter » Ruedi Baur designer franco-suisse
enquête Jeunes
entrepreneurs :
plus jamais sans mes coworkers
Le poids grandissant de Rhône-Alpes dans l’innovation nationale
© J. Chauche
édito
Par Julie Druguet
Quelques raisons de
MARSALA
PANTONE 18-1438
Couleur de l’année
Marketing / communication / médias en rhône-alpes
Le Challenge
58, avenue Debourg 69007 Lyon
Tél. 04 72 84 45 55
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Éditeur : InterMédia Sarl
au capital de 37 579 e. Siren : 325 694 909. Directeur de la publication :
Jacques Simonet. Rédactrice en chef :
Julie Druguet.
Rédaction : Michel Texier,
Maeva Melano, Jérémy Chauche,
Yann Petiteaux, Stéphanie Borg. Service commercial :
Pascal Leby et Étienne Mayaux.
Agence photo : Alpaca (Lyon).
Maquette : ProEdito (Paris).
Mise en page & infographie :
Frédéric Morel / mfredpao.
Impression : Imprimerie Brailly
(Saint-Genis-Laval).
Dépôt légal : à parution.
Abonnement : voir p. 41
ISSN : 0249-1575 CPPAP : 0518 I 83313
Parution trimestrielle
Prix de l’abonnement : 285 €
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passer aux actes
en 2015
P
longez dans notre spécial « Tendances
2015 ». Nous avons voulu aérer vos méninges en vous donnant à voir du neuf,
de l’original, de l’innovant. Nous avons
cherché les dernières tendances dans le
marketing et la communication, mais aussi dans le
digital, le graphisme, les médias...
en espérant vous étonner. D’ailleurs,
pour notre couverture, nous avons
choisi le Marsala, une teinte « cordiale
et élégante » élue couleur de l’année 2015 par Pantone Color Institute.
Saviez-vous que les abribus d’Amsterdam permettent de surfer sur
le bitume (p 24) ? Que les médias
en ligne parient maintenant sur les
enquêtes-fleuves (p 10) ? Que les robots s’imposent dans l’événementiel
(p 38) ?
Le Niel de l’optique. En nous
les avocats de Facebook. Ce qui ne l’a pas ému outre
mesure.
Hardiesse des coworkers, ces travailleurs des temps
modernes, qui parient sur l’entraide et le partage
d’expérience pour faire progresser leurs entreprises.
Nous sommes allés visiter ces espaces de travail collaboratif, qui ont poussé comme
des champignons depuis trois
ans (p 18). Ces lieux font figure
de laboratoires du travail de
demain.
Aérons nos
méninges !
Voici du neuf,
de l’original,
de l’innovant
concentrant sur l’innovation, notre
objectif était de proposer un numéro
gonflé d’audace et de courage. Audace de notre
Homme de l’année, Paul Morlet, tout juste 24 ans :
cet autodidacte propose des lunettes de vue à moins
de 10 € (p 6). Le jeune homme se rêve en Xavier
Niel de l’optique.
Audace de Quentin Lechémia, le créateur de
Pornostagram (devenu Uplust), un réseau social de
photos porno qui affiche un million de visites quotidiennes. Vous apprendrez p. 15 comment il a codé
lui-même son site et comment il a dû composer avec
Un phare dans la ville.
Dans ce numéro, nous nous
sommes attelés à un exercice de
prospective autour de la ville de
demain, la fameuse « smart city ».
Il fallait bien un dossier entier
pour cela (p 20). Création d’écoquartiers, développement de la
mobilité... les villes ont déjà
entamé une profonde transformation. Vous lirez quels trésors
d’ingéniosité elles déploient pour amener leurs habitants à accompagner ce mouvement.
Sinon, les villes sont-elles au bord de la saturation
visuelle ? C’est la question que nous avons posée à
un des phares de la planète graphique, Ruedi Baur.
Ce globe-trotter franco-suisse a signé une impressionnante collection de chantiers, du Palais des Nations
Unies de Genève au futur métro du Grand Paris.
Il nous livre une analyse dense et fouillée. À déguster p 32. v
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 3
sommaire
tendances 2015
repères
06. en têtes
Paul Morlet se voit comme un Xavier Niel
de l’optique 08. Gamebuino La console rétro
Le tri des déchets est un enjeu
de civilisation. Créé par la Métro,
SuperTri est devenu un personnage
de référence pour les Grenoblois.
à 35 e séduit les nostalgeeks
10. entreprises
10. ANALYSE Marion Moreau « Avec les objets
connectés les entreprises collectent des
data enrichies ». 11. La galaxie de… Culture Next.
Ruedi Baur, une des stars de la planète
graphique, imagine quelle sera la signalétique
de demain. Et revient sur le rôle du graphisme
dans la ville ces dix dernières années.
dossier demain, la ville
12. en suite
L’IMAGE 2015 Des cabines d’essayage virtuelles.
14. Analyse Richard Vincent « Le crowdfunding
c’est encore peanuts mais il pèsera
1 000 milliards de dollars en 2020 ». 15. IL l’a dit,
IL l’a fait Quentin Léchémia « Je voulais un site où
chacun pourrait publier ses photos porno ».
16. en chiffres
Le poids grandissant de Rhône-Alpes
dans l’innovation nationale
18. enquête
Jeunes entrepreneurs : plus jamais
sans mes coworkers
Les espaces de coworking poussent comme des
champignons depuis trois ans. Émergence d’une nouvelle
façon de travailler ? Sans doute, mais aussi parfois grosse
ficelle de marketing immobilier.
4 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
20. Il faudra bien convertir
à la smart city
les citadins
En 2050, deux tiers des humains vivront dans une agglomération. Pour ne
pas devenir invivables, les villes doivent se réinventer. Et faire changer les
habitudes des citadins. Or ceux-ci n’en voient pas toujours l’utilité.
24 [ reportage ] Comment les marques investissent de plus en plus
l’espace public. 26 [ focus ] Mobilité : un lent passage à l’acte.
28 [ analyse ] Transformer une ville est un gros enjeu de communication.
30 [ oui/non ] Des écrans vidéo un peu partout dans les rues en 2030 ?
mots tendance
BarCamp. Rencontre professionnelle
informelle dont le contenu est fourni par les
participants qui doivent tous apporter une
contribution au cours d’ateliers participatifs.
Crowd (-funding, -sourcing,
-mining). Préfixe indiquant l’action de
Les robots créent l’événement. Un incentive
tristounet ? Animez-le avec ces bipèdes artificiels.
Les robots événementiels séduisent les grands comptes
et les agences. Et ce n’est pas de la science-fiction.
Gamebuino,
la console des
nostalgeeks. Avec
son design vintage,
qui fait penser
aux 1res Game Boy,
elle a déjà séduit
1 500 amateurs.
horizons
32. grand témoin
Ruedi Baur « La signalétique de demain
sera multisensorielle. »
solliciter l’aide financière, intellectuelle, créative
d’un groupe dans l’objectif de réaliser un projet.
GAFA. Acronyme qui désigne les quatre
entreprises mondiales qui dominent internet :
Google, Apple, Facebook, Amazon.
Hackathon. Événement où des
développeurs se réunissent pour faire de
la programmation informatique collaborative.
MOOC : programme de cours magistraux
en vidéo ouvert à tous les internautes (Massive
Open Online Course).
Nudge. Des incitations sans caractère
obligatoire qui visent à rendre le comportement
du consommateur plus vertueux.
Pitch. Présentation synthétique du projet
entrepreneurial d’une start-up pour convaincre
un public (investisseurs, partenaires) de son
potentiel.
Smart city (fr : ville intelligente).
36. + et -
Ville où les technologies numériques prennent
une place importante pour améliorer les
transports, l’énergie ou les rapports entre les
citoyens.
40. Métiers
Urbex. Pratique photographique qui
consiste à pénétrer dans des friches
industrielles et des bâtiments abandonnés
(hôpitaux, châteaux, usines).
42. débloque-notes
interactif sur le web.
Au banc d’essai Le QR Code.
38. TOPS et FLOPS d’innovations récentes.
L’émergence de formations au big data
Des notes sur tout ce qui débloque.
Webinar (fr : webinaire). Séminaire
index
Les principales
entreprises citées
8e étage……8
A Blind Legend……8
Airdrone……16
Alain Milliat……12
Anatome……22, 26, 28
Annexe Numérique……18
Antidot……40
Ardi……16
Axiona……14
Being……20
Ben Agency……18
Blanchon……36
Branding the city……22
Business Camp……18
Buzz Web……19
Capsa……6
Clear Channel Play……12
Clubble……6
Col’inn……19
Co(m)pilote……19
Cowork in Grenoble……18, 19
Crédit Agricole Loire HauteLoire……36
Culture Next……11
Cybèle Arts……19
DigiSchool……12
Digital campus……40
Diplomatic-Cover……40
Dowino……8
Dronestagram……12
Dronesys……16
Ecoworking……18, 19
Elaee……40
EM Lyon……24, 38
ENS Lyon……40
Epicentre……19
ERDF……8
Ernst & Young……16
Escadrone……16
Esprit……22
Evotion……38
Exit……12
Fabulous……38
F&B Numeric……8
Gamebuino……8
Ginko……20
Giraudet……12
Grains de Sel……38
Grenoble École de
Management……22, 30, 40
Grenoble INP……40
Ijsberg……8
Imaginove……19
In Medias Res……22
Ipsos……24
ISCPA……40
JCDecaux……25
Kolibree……10
La Cordée……18, 19
La Forge Collective……18, 19
La Mutinerie……19
L’Atelier des Médias……18, 19
Le Comptoir Etic……18, 19
Le Comptoir Numérique…18, 19
Le QG……18, 19
Le Square du Rhône……18
Les utopies urbaines……8
Le Troquet Numérique……18
Locaux Motiv’……18, 19
Lokaz……6
Lunettes Pour Tous……6
Lyon City Design……21
Lyon Smart Community……16
M3……22
Mission Part-Dieu……20, 21, 22
Mixeur……19
MMAP……22, 26, 28
Native Communications……21
Navia……21
Nova7……22
Place Publique……22
Prezmaker……6
Prismaflex……30
Prospective du Grand
Lyon……20, 22
Prototypo……6
Search’XPR……6
Smart Electric Lyon……16
Strada Marketing……25
Sup de Pub……40
Tassag……38
Terra Publica……26, 28
Tilkee……12
Trafik……22
Tuba……21, 22
Uplust.com……15
ValGrine……12
Vidcoin……12
Web International School……40
We demain……22
Withings……10
WR&S……25
Xotelia……19
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 5
BULLES DE MAILS
MISE EN BOÎTE
Anthony Bleton lance
des containers. Seuls,
accrochés ou
empilés, utilisés
comme stand,
bureau, bar..., ils
répondent à l’engouement des annonceurs
pour le mobilier
événementiel
éphémère et design.
Sa société, Capsa,
a déjà œuvré pour
Renault Trucks, le
Sirha, GL Events, etc.
BOÎTE À MALICES
Thomas Pons
arie sur
p
Focus sur ces professionnels de Rhône-Alpes
qui ont un temps d’avance
têtes
l’homme de l’année
le recul de
PowerPoint.
Le jeune homme est
Paul Morlet, 24 ans,
persuadé que le
logiciel de présentation Prezi sera
bientôt plus
apprécié. Il a donc
fondé Prezmaker
en 2014 pour former
agences et
annonceurs à son
utilisation. Premiers
clients : Danone,
La Poste et Feu Vert.
dirige Lunettes Pour Tous
(modèles à prix discount)
et Lulu Frenchie (lunettes
publicitaires).
Lunettes Pour Tous.
Création : 2013
Un magasin à Paris
35 salariés
Investissement : 1 M€
CA : NC | Entre 180 et
250 paires vendues
par jour.
BOÎTE À LETTRES
Yannick Mathey et
Louis-Rémi Babé :la
typo pour tous.
Les deux Lyonnais
ont développé
Prototypo, une web
app permettant
d’éditer facilement
des typographies en
ligne. Ils ont levé
34 K£ sur Kickstarter sur 12 K£
attendues. Sortie
prévue en février
2015.
CAISSES
Stéphane Blanchet
innove dans
la vente de
voitures. Son
site, Lokaz, met en
relation vendeurs et
acheteurs de voitures.
Mais les transactions
se finalisent ensuite
offline, lors d’un
rendez-vous
hebdomadaire aux
Puces du Canal
(Lyon).
Paul Morlet se voit comme
un Xavier Niel de l’optique
Bien vu. Des lunettes de vues à moins
de 10€ : c’est sur cette promesse
que Paul Morlet a créé Lunettes
Pour Tous en début d’année.
Un positionnement qui a très vite
suscité l’attention des médias avec
des reportages dans 100% mag,
BFM, LCI, Capital... «Nous n’avons
pas besoin de travailler avec une
agence de RP, notre concept se
suffit à lui-même», déclare ce jeune
Lyonnais de 24 ans, qui avait déjà
créé les lunettes publicitaires Lulu
Frenchie en 2010.
Ces dernières qui exhibent des
visuels microperforés sur les verres
génèrent 1 M€ de CA.
Presqu’à l’œil. Le jeune entrepreneur
revendique son profil autodidacte
et sa pensée « hors cadre ». Il aime
se comparer à Xavier Niel qui, sans
formation, a bouleversé le marché de la
téléphonie. Lui, avec son BEP d’électricien, il veut révolutionner l’optique. En
mai 2014, il ouvre le premier magasin
Lunettes Pour Tous, à Paris.
6 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Chaque jour, il vend entre 180 et 250
paires à partir de 9,99€. Une sacrée
performance quand on sait que le prix
moyen chez un opticien traditionnel
est de 350€.
Visionnaire. Autre supériorité : ses
lunettes sont fabriquées en 10 minutes.
Contre 3h en moyenne chez ses
confrères. Pour cela, Paul Morlet a
dû investir 1 M€ en constituant un
grand stock de composants achetés
en Corée et en Chine (18 000 verres
des corrections d’optiques les plus
courantes en France et 34 montures).
Sur le point de vente tout se passe
sur iPad: les vendeurs enregistrent les
informations du client nécessaires à la
fabrication des lunettes. «Un logiciel
édite un code-barres transmis à notre
machine en sous-sol qui permet de
produire 250 paires par jour», souligne
le jeune PDG.
En 2015, il prévoit d’ouvrir 20 boutiques en France. La seconde est
prévue à Lyon au printemps. v MM
ses clubbles en
entreprise
© J. Chauche
Cédric Denoyel
j oue la carte
Pour Anthony Bleton, c’est clair : les
réseaux sociaux d’entreprise ne se
sont jamais imposés. Dans les grandes
entreprises, le mail reste plébiscité pour
travailler en équipe.
Fort de ce constat, le président de
l’agence Novius a réfléchi à un moyen
d’enrichir les mails avec de nouvelles
fonctionnalités, comme celles qu’on
trouve sur les réseaux sociaux (le « like »,
le partage de contenus...).
C’est ainsi qu’est né le logiciel Clubble
(fusion de « clubs » et « bubbles »). Il est
censé faciliter les échanges mail au sein
d’un groupe de personnes (entreprise,
association...)
Aux États-Unis, Threadable, un
concurrent potentiel, a tapé dans l’œil de
Y Combinator (accélérateur qui a investi
dans DropBox et AirBnB). D’ici janvier,
Clubble devrait boucler sa 1re levée de
fonds et créer une version bêta. v
SÉRENDIPITÉ
Jean-Luc Marini
répond aux
recherches
inconscientes
des internautes
Dis-moi
comment tu
cliques, je te
dirais qui tu es.
Jean-Luc Marini
en est persuadé :
en traquant les
signaux faibles
émis par les
internautes
(mouvements de
souris, clics, frappes...), on peut décrypter
leurs émotions.
Cet ancien des HP Labs passionné
de sciences cognitives, a imaginé un
algorithme qui se base sur ces émotions
pour recommander des produits que
les internautes n’auraient même pas
l’idée de rechercher.
Pour prolonger ces recherches, Jean-Luc
Marini, qui est aussi professeur associé
à l’IAE de Lyon, a lancé Search’XPR
en 2013. La start-up a levé 2 M€ et
compte déjà parmi ses clients
Pecheur.com (groupe Décathlon),
Decitre et Armand Thierry. v
PAS BÊTE
Un hôtel pour
treprises
les chats
pacha. Après les
hôtels pour chiens
à New York et
à Vincennes,
le premier hôtel pour
chats « Roomer » a
ouvert à Lyon
début 2014 dans le
7e arrondissement.
Mignardise
quotidienne, salle
de sport, chambre
climatisée, infirmerie....
TABLE(TTE)S
Des menus
i nteractifs.
Bientôt des menus
actualisés en temps
réel sur tablette ?
La start-up
lyonnaise F&B
Numeric est sur ce
créneau prometteur.
Elle propose de
numériser la carte
des vins des restaurants. Premiers
clients : Elleixir,
Le Mercière, le Café
Français...
IMMERSION
Dowino conçoit
un jeu
d’action dans
le noir. L’utilisa-
teur d’A Blind
Legend dispose
seulement de sons
pour se repérer et
d’un écran tactile
pour contrôler son
héros. Un jeu pour
les non-voyants,
mais aussi les
valides qui veulent
faire une expérience
inédite.
CABANES
Les utopies
urbaines de
Roger Tator.
La galerie de design
d’espace a installé
une résidence
d’artistes dans trois
modules en bois de
18 m2 en plein Lyon.
Chaque jour des
milliers de Lyonnais
passent devant
cette « Factatory »
posée sur un reliquat
de chantier herbeux
de la gare
Jean-Macé.
Coup de projecteur sur des innovations qui font l’actualité
PUR JUS
Des showrooms
pour tester
les smart grids
ERDF veut aider les responsables locaux à se former aux innovations dans
le domaine de l’énergie
notamment les smart grids
(réseaux intelligents). Pour cela, le gestionnaire du réseau d’électricité a opté pour un outil de communication bien concret : le
showroom. L’entreprise peut ainsi présenter aux collectivités son
nouveau système de distribution d’électricité intelligent.
ERDF Rhône-Alpes Bourgogne en a ouvert un à Lyon il y a deux
ans. Puis un 2e à Grenoble en novembre.
« La région a été sélectionnée pour tester la fiabilité de nos compteurs
Linky auprès de 190 000 clients d’ERDF. Ces compteurs sont “communicants” : ils peuvent être interrogés et actionnés à distance », explique
Jacques Longuet, directeur d’ERDF en Rhône-Alpes Bourgogne.
À l’aide de maquettes, cinq ingénieurs-chercheurs animent les
showrooms. 71 interlocuteurs d’ERDF auprès des collectivités ont
commencé à être formés pour les relayer. Un 3e showroom ouvrira
en Bourgogne courant 2015. v
KING SIZE
Les médias en ligne jonglent
avec les formats
Selon les moments, les internautes
peuvent avoir envie de formats différents
et ne répugnent pas à lire des interviewsfleuves. C’est le constat de 8e étage et Ijsberg, deux sites d’infos lyonnais lancés
en 2014. Consacrés à l’actualité internationale, ils font la part belle aux reportages,
mais aussi à des brèves factuelles.
« Nous voulons être un site évolutif, commente Florent Tamet, l’un des cofondateurs d’Ijsberg, avec plusieurs niveaux
de lecture et des outils multiples : sons,
vidéos, textes ». Son positionnement lui
a valu le Prix de l’innovation en journalisme, décerné en décembre par Sciences
Po Paris en partenariat avec Google.
Maxime Lelong, cofondateur de 8e étage
travaille actuellement au modèle économique du site. « Il y aura un socle gratuit,
mais nos contenus “longs formats” seront
payants ». v
la surprise
Gamebuino La console
rétro à 35 € séduit
les nostalgeeks
Aurélien Rodot, (photo) 22 ans,
passe ses week-ends... à assembler des consoles. Gamebuino,
celle que cet étudiant a bricolée
dans son garage en 2013, a
séduit 1 500 amateurs de façon
inattendue. Notamment des
trentenaires, amusés par son
design vintage semblable à celui
des premières Game Boy.
L’un des atouts de Gamebuino est son prix : 35 €. Mais
surtout, elle est basée sur une technologie open source.
Elle permet donc aux utilisateurs de programmer leurs
propres jeux et de les échanger avec une communauté
de « gamers ».
Crowdfunding. Aurélien Rodot est le premier surpris par
ce succès. Le jeune élève ingénieur de l’ENISE (SaintÉtienne) n’a aucun objectif de ventes pour Gamebuino.
Pas plus que de stratégie de communication. Ce qui
l’a fait connaître, c’est une campagne de financement
8 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
participatif via la plateforme Indiegogo. Il voulait lever
3 000 €, il en a finalement récolté 33 000. « Durant la
campagne de crowdfunding, j’ai vendu 1 000 exemplaires de
la console, et 500 supplémentaires depuis la création d’une
boutique en ligne au mois d’octobre », souligne l’étudiant.
Les médias ont sauté sur l’histoire de ce passionné de jeux
vidéo et de bricolage. Aurélien Rodot a eu les honneurs de
nombreux médias nationaux (dont le JT de M6).
Entrepreneur. Au vu du succès de sa console, le jeune
homme s’est créé un statut d’entrepreneur individuel. Mais la
Gamebuino n’est pour lui « qu’un projet parmi tant d’autres ».
L’étudiant mène de front sa 5e année à l’ENISE (spécialité
génie sensoriel), un master en bio-ingénierie à l’École des
Mines et un contrat pro dans le domaine de la recherche
robotique. Il aimerait poursuivre avec un doctorat. v yp
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 9
treprises
Marion Moreau est rédactrice en chef de FrenchWeb, un magazine en ligne dédié à l’innovation et aux start-up
”
LA THÈSE
Nombre
d’entreprises
se mettent à
vendre des objets
connectés. Un
business à double
détente puisqu’il
permet en plus de
collecter en retour
des informations
sur ses clients.
Avec les objets connectés les entreprises collectent
des data enrichies ”
INTERMÉDIA. Les objets connectés sont-ils
une mode ou une tendance de fond ?
m.m. C’est clairement une tendance
de fond. Les objets connectés se
développent parallèlement à l’usage
intensif des smartphones.
D’ailleurs, les entreprises françaises
sont très actives en matière d’objets
connectés. Ainsi elles représentent
33 % des sociétés nominées aux prix
du CES 2015 (Consumer Electronics
Show). Cet événement, qui se tient
à Las Vegas, est le plus grand salon
high-tech du monde.
Parmi les sociétés hexagonales en
pointe, on peut citer Withings, avec
sa balance et son bracelet connectés
vendus dans les boutiques Apple,
Parrot et ses drones. Ou encore
Kolibree et sa brosse à dent connectée.
10 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
INTERMÉDIA. Pourquoi les entreprises
conçoivent-elles des objets connectés ?
m.m. Grâce aux objets connectés, les
entreprises peuvent collecter des
données beaucoup plus riches et plus
précises sur leurs clients. Ce qui est
inédit, ce n’est pas la récolte en ellemême. C’est plutôt le caractère enrichi
de cette data.
Par exemple, une marque qui vend
une raquette connectée pourra savoir
quelle est la fréquence d’utilisation
de ce produit. En conséquence, elle
pourra proposer à ses clients de
changer de raquette au bon moment.
Et ajuster ainsi sa stratégie commerciale et marketing.
Les entreprises ont compris qu’elles
pouvaient augmenter leurs revenus
avec les data, qui sont perçues
comme un Graal.
INTERMÉDIA. Comment ces nouvelles
données sont-elles traitées ?
m.m. Aujourd’hui,
tout l’enjeu pour
les entreprises est de savoir attirer
les talents capables d’analyser et de
segmenter ces données, pour s’en
servir le mieux possible. Ce sont des
profils techniques particuliers, et non
pas de simples informaticiens.
L’autre question qui se pose est le
devenir de ces données, qui ont un
volume considérable.
Pour l’instant, il y a peu de transparence, mais les entreprises
devront, tôt ou tard, communiquer sur ce qu’elles en font. La question de l’accessibilité à ces
données et de la possibilité de les
modifier éventuellement va très
rapidement se poser. v sb
la galaxie de… Culture Next
Virginie Sozzy
Cédric Dujardin
Anthony Fonteneau
Julien Roche
Cédric
Denoyel
Vincent Carry
Delphine Sokanthong
Vincent Carry a créé Culture Next en 2012. Pour animer un
lieu culturel sans équivalent à Lyon Confluence : Le Sucre. Le
fondateur des Nuits Sonores veut en faire un espace culturel
et une vitrine technologique attirant des artistes, des chefs
d’entreprise le jour, des night-clubbers la nuit.
L
e Sucre qui emploie 20 personnes
(CA : 1,4 M€) est très couru des
amateurs de musique électronique
et organise des événements étonnants :
soirées rollers, conférence sur le graphisme... C’est aussi un lieu d’événements corporate.
Vincent Carry s’appuie sur une équipe
principalement composée d’anciens
des Nuits Sonores. Parfois bénévoles,
très souvent en stage, confirmés par un
emploi aidé quand c’est possible, ils
Matthieu Lecan
Laure Morelli
ont tous suivi « un parcours républicain
interne » selon la formule du président
de Culture Next.
Le DG Cédric Denoyel est aux commandes opérationnelles de la société
depuis sa création.
À ses côtés, Cédric Dujardin est chargé
de la direction de l’exploitation du Sucre.
Il s’appuie sur Clément Burgos, responsable logistique, et sur les producteurs
Marin Cardoze et Célia Lamonica. Sans
oublier Anthony Fonteneau, directeur
technique et Virginie Sozzy, directrice
administrative, une ancienne de l’Opéra
de Lyon, assistée d’Édouard Lambert.
Delphine Sokanthong est dédiée à
l’accueil des entreprises – Le Sucre privatise son espace en début de semaine.
Julien Roche, responsable de la communication et marketing, a rejoint
l’équipe en juin 2014. Repéré à Toulouse
lors de deux petites éditions des Nuits
Sonores, il encadre Loïc Marszalek,
webmaster et Matthieu Lecan, responsable des partenariats.
Laure Morelli, ancienne responsable
de la billetterie des Nuits Sonores, endosse la même fonction au Sucre. Un
poste essentiel, car le système d’entrée
repose uniquement sur des préventes
en ligne.
La DA et les RP sont déléguées à Arty
Farty, l’association qui organise les Nuits
Sonore. Aux commandes : Pierre-Marie
Ouillon (programmation) et Guillaume
Duchêne (relations médias). v sb
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 11
VIDÉOS
Vidcoin profite
suite
de la folie des
jeux sociaux.
Qui n’a jamais joué à
Candy Crush ? Vidcoin a eu l’idée d’intégrer à ce jeu et à
d’autres du même
type des vidéos publicitaires. La startup, qui compte
aujourd’hui une
quinzaine de salariés, vient de lever
1 M€.
Des innovations dont on a parlé
cette année, mais qui n’ont pas toutes
été des réussites
jifimiaimijijiaisiOinid
jifimiaimijijiaisiOinid
Thierry
Debarnot
(à gauche)
et Anthony
Kuntz
TRAQUE
Tilkee ambitionne de
révolutionner
le commercial.
Les commerciaux
en rêvaient, Tilkee
l’a fait : son logiciel
permet de savoir si
une proposition envoyée par mail a été
lue et par qui, combien de temps et de
quelle façon. 500
sociétés se seraient
déjà équipées, deux
ans après le lancement.
PRISE DE TÊTE
Exit peine à im-
poser un
concept
d’abonnement
compliqué.
Souscrivez un abonnement à Exit, vous
aurez droit à une
avalanche de cadeaux bonus chaque
mois (places de
concerts, invitation
à une avant-première...). L’idée était
séduisante, mais n’a
pas été bien comprise. Le mensuel
lyonnais travaille à
clarifier cette offre.
Avec DigiSchool, les ados révisent
leurs cours sur écran
Finies les annales volumineuses
et poussiéreuses, les lycéens d’aujourd’hui révisent leurs examens
sur tablette. La start-up lyonnaise
l’a bien compris : trois ans après
sa création, elle est devenue le leader de l’éducation numérique. Son
best-seller : des applis pour réviser
le bac et le brevet. Mais DigiSchool
propose aussi sur le web des cours,
des fiches de lecture, des annales...
Avec un CA de près de 4 M€ (30 %
de croissance), elle emploie une
cinquantaine de salariés (dont un
tiers de développeurs).
En 2014, la start-up a franchi des
étapes capitales pour son développement. Elle fait désormais régie
commune avec le portail Melty
(portail créé par un Lyonnais et
leader sur la cible 15-25 ans) et a
créé une chaîne éducation pour
LeMonde.fr.
DigiSchool vient d’ouvrir un bureau parisien et a racheté trois
sites spécialisés dans l’orientation,
afin de se diversifier sur ce créneau. Enfin, elle a été choisie par
le ministère de l’Éducation (1 M€
à la clé) pour développer OCINAE
(Objets Connectés et Interfaces
Numériques pour l’Apprentissage
à l’École), un projet qui vise à faciliter l’apprentissage des mathématiques à l’école des robots d’Awabot (Lyon). v
l’imaGE 2015
Les multimillionnaires, et notamment
les nouveaux riches venus d’Asie, sont
prêts à payer très cher leur putter de
golf. C’est la conviction de ValGrine,
une marque stéphanoise lancée en
septembre 2012, qui ne propose que
des putters très haut de gamme — rien
à moins de 5 000 €. Le plus luxueux se
vend plus de 20 K€. Depuis sa création,
cette entreprise stéphanoise a vendu
près de 150 pièces.
Pour justifier ces prix hors-norme, ValGrine met en avant une conception
très performante et l’utilisation de
matériaux rares (damas, inox forgé...).
Certains modèles sont siglés ST Dupont
ou Philippe Tournaire (putter serti de
diamants).
Le putter ST Dupont
Pour toucher les CSP++, ValGrine est
présent sur les salons et événements
internationaux de golf, et mise sur les
RP. Son positionnement ultra-luxe lui a
permis de faire son trou dans l’équipement de golf. Car, aussi étonnant que
cela puisse paraître, ce marché reste très
uniformisé. Il se partage entre les géants
mondiaux (Nike, Adidas, Puma...) dont
l’essentiel des produits vient d’Asie. v
jifimiaimijijiaisiOinid
Alain Milliat ferme sa
boutique-restaurant
TIRe D’AILE
Dronestagram dé-
colle. Il y a de plus
en plus de passionnés de drone en
France. Leur profil ?
Des geeks souvent
fans de photos. Pour
eux, Éric Dupin
(Presse-Citron) a
lancé Dronestagram,
un site de photos
aériennes. Il a atteint
le million de pages
vues en trois semaines.
Pour ValGrine l’ultra-luxe
dans le sport c’est
payant
Des cabines d’essayage virtuelles. C’est l’innovation technique qu’a développée le pôle Create de Clear Channel Play dans le centre commercial Carrefour
d’Écully en mars 2014. Le principe : le client se place devant une borne virtuelle
et fait défiler en balayant l’air de la main la nouvelle collection de prêt-à-porter
Tex, la marque de textile de Carrefour. Il suffit alors de sélectionner un article
pour le voir porté par son double virtuel. On peut finalement envoyer le résultat
à ses proches sur les réseaux sociaux. v
12 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Plusieurs marques alimentaires comme
Giraudet, ont ouvert ces dernières années des boutiques-restaurants. L’idée :
mettre en scène leurs produits et se rapprocher du consommateur. La marque
de jus de fruits haut de gamme Alain
Milliat (69) a tenté l’expérience il y a
deux ans en ouvrant un restaurant à
Paris. Elle vient de le fermer.
« La restauration demande des compétences très particulières, ce n’était pas
notre métier. Nous allons nous recentrer sur un projet de boutique » explique
Alain Milliat, le fondateur. v
suite
Richard Vincent est cofondateur du cabinet de conseil lyonnais Axiona, spécialisé dans le financement des PME
à fort potentiel.
Le crowdfunding c’est encore peanuts mais
il pèsera 1 000 milliards de dollars en 2020 ”
les faits
Selon
le baromètre
Crowdfunding
France, le
montant de fonds
collectés par
le financement
participatif a
doublé en un an.
Mais les sommes
concernées
demeurent
modestes.
INTERMéDIA. Le crowdfunding s’inscrit
enfin dans un cadre juridique depuis
le 1er octobre 2014. Est-ce un signe
de maturité ?
r.v. Non, je ne suis pas certain que l’on
puisse parler de maturité. Sur le million
de Français qui ont déjà soutenu un
projet via le crowdfunding, beaucoup
l’ont fait sous la forme d’un don, pour
aider un projet artistique par exemple.
Il existe d’autres formes de crowdfunding, sous forme de prêt ou de prises
de participations (equity). Celles-ci
sont balbutiantes, mais elles représentent une réelle solution, car les PME
françaises sont sous-capitalisées et ont
besoin de fonds propres.
INTERMéDIA. Le crowdfunding peut-il
intéresser les investisseurs ?
r.v. Le crowdfunding concilie les
14 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
besoins des entreprises innovantes
et la volonté d’épargne de proximité
des investisseurs. Ceux-ci en ont assez
des fonds dont ils ne savent plus rien.
Investir dans une start-up dont on a
rencontré le dirigeant est tout autre
chose.
Je pense que le financement participatif peut faire revenir les investisseurs
vers une forme de bourse régionale.
Un endroit où l’on pourra trouver la
petite pépite qui sera le futur Google.
Avec des perspectives de plus-values
potentiellement très fortes.
INTERMéDIA. Le crowdfunding n’a permis
de lever que 66 M€ au 1er semestre
en France. C’est très peu.
r.v. Oui, au niveau national, c’est
« peanuts ». Mais le magazine Forbes
estime que le marché mondial de la
finance participative pèsera 1 000 Md$
en 2020.
D’ici là, il y a une forme d’éducation à
faire. Nous partons de zéro. La montée
en puissance va se faire progressivement, mais le potentiel de marché est
considérable.
INTERMéDIA. Les plateformes se multiplient. Même la CCI de Lyon en a lancé
une. Est-ce une bonne chose ?
r.v. Il faut faire attention, car si chacun
monte son propre site de crowdfunding, on finira par ne plus avoir la
moindre visibilité.
Il ne se passe pas un jour sans qu’une
nouvelle plateforme ne se crée. C’est
normal, car il y a des places à prendre.
Mais il ne faudrait pas que cette effervescence brouille le paysage. v yp
Axiona possède sa propre plateforme
de crowdfunding dédiée aux PME innovantes (www.axiona.co).
”
IL l’a dit IL l’a fait
Quentin Léchémia, fondateur du site Uplust.com (ex-Pornostagram).
Je voulais un site où chacun pourrait publier ses photos porno ”
”
les faits
À 23 ans,
fraîchement
diplômé en
expertise
comptable,
ce Lyonnais
a eu l’idée
de créer un
réseau social
de photos
porno. Près de
deux ans après,
Pornostagram,
devenu Uplust,
affiche plus
d’un million
de visites
quotidiennes.
INTERMéDIA. Comment est venue l’idée
de Pornostagram ?
q.l. J’étais totalement fan d’Instagram,
sur lequel je suivais des actrices
pornos. Mais elles ne pouvaient pas
aller trop loin dans leurs photos sous
peine d’être censurées. J’ai donc eu
envie de créer un site de partage de
photos porno d’amateur. J’ai imaginé
que ces clichés pourraient être retouchés à l’aide de filtres, comme sur
Instagram.
INTERMéDIA. Quelles ont été les difficultés
pour mettre en ligne Pornostagram ?
q.l. Indéniablement, la création de la
web app était la difficulté principale.
J’étais obligé de faire le choix du site
web mobile, car une application porno
n’aurait jamais pu être hébergée sur
l’App Store ou Google Play Store. Le
défi était donc de mettre en place des
fonctionnalités similaires à une application (filtres, appareil photo, etc.)
mais accessibles depuis un site web
mobile. Autodidacte, j’ai mis plus de
quatre mois à coder seul le site. C’était
un choix payant. Aujourd’hui, 80 % du
trafic provient du mobile.
INTERMéDIA. Avez-vous eu des problèmes
avec Instagram ?
q.l. Je savais pertinemment que tôt ou
tard, la popularité du site grandissant,
je serais contacté par les avocats de
Facebook, propriétaire d’Instagram.
Ils m’ont effectivement demandé de
changer de nom cet été. Je me suis
exécuté sans faire le malin, car je ne
voulais pas risquer un procès.
Pour trouver un nouveau nom, j’ai fait
voter les internautes. C’est comme
ça que Pornostagram a été rebaptisé
Uplust. Grâce à ce nouveau nom, j’ai
pu accroître considérablement mon
audience aux États-Unis. 80 % de mes
visiteurs en viennent désormais, car
« lust » est beaucoup plus parlant que
« porno ».
INTERMéDIA. La prochaine étape
pour Uplust ?
q.l. Une levée de fonds de plusieurs
centaines de milliers d’euros auprès
d’un Français, leader européen du
marché (le producteur de films pornos
Marc Dorcel). L’objectif est maintenant
d’attirer des acteurs et actrices pornos
pour rendre le site plus séduisant. À
terme, il va évoluer vers un modèle
freemium : la base restera gratuite,
mais nous lui ajouterons des services
payants. Par exemple des filtres supplémentaires ou des tchats vidéo. Je vais
aussi embaucher des développeurs, des
responsables marketing et ouvrir des
bureaux à Londres et Paris. v jc
Uplust. Création : 2013 | Siège : Lyon | Permanent : 1 | 300 nouveaux utilisateurs/jour |
130 000 membres actifs | 1 à 1,5 M de visites/jour, dont 80 % d’Américains.
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 15
ENSEIGNEMENT
93. C’est le nombre
de MOOC (cours
en lignes ouverts
à tous sur internet)
répertoriés en
France. Ce qui
classe l’Hexagone
loin derrière ses
voisins espagnols
(278 MOOC) et
anglais (194).
Décollage
800
C’est le nombre de demandes
de brevets déposées en
Rhône-Alpes en 2014. Certes,
c’est presque six fois moins
que l’Île-de-France (7 952 demandes). Mais deux fois
plus que PACA, qui dépose 564 brevets. Dans la région,
les départements qui déposent le plus de demandes de
brevets sont le Rhône (408) et l’Isère (311). v
Source : Direction générale de l’aviation civile
Source : Institut national de la propriété industrielle
SANS FIL
24,6 %. C’est la
croissance annuelle
que devrait enregistrer le marché du big
data entre 2014 et
2018, d’après
le cabinet IDC.
Le chiffre d’affaires
dégagé grâce à
cette technologie
devrait atteindre les
2,9 Md$ en 2014.
ÉNERGIE
6. C’est le nombre
de projets de smart
grids (réseaux
électriques intelligents) concentrés
sur la seule ville de
Lyon. Parmi eux, le
déploiement du
compteur électrique
communicant Linky,
Lyon Smart
Community et
Smart Electric Lyon.
chiffres
Quelques repères chiffrés
sur l’innovation
et les dernières tendances.
212. C’est, en
BULLE
1 401
C’est le nombre de sociétés qui
ont déjà acquis des drones pour
leur activité en France. Ces engins
volants sont très en vogue, car ils
permettent par exemple de faire des prises de vue aériennes facilement et à moindre coût. On compte 35
constructeurs de drones en France, dont 5 en RhôneAlpes (Airdrone, Dronesys, Escadrone...). v
Source : Open
education europa. milliards, le nombre
d’objets qui seront
connectés à Internet
en 2020, selon le
cabinet d’analyse
économique IDC.
D’autres études,
moins optimistes,
annoncent 30 à
80 milliards.
Inventif
Pôle position
Le poids grandissant de Rhône-Alpes
dans l’innovation nationale
L
a région est l’une des plus innovantes en France. Selon l’Ardi
(Agence régionale de développement et de l’innovation), elle
accueille 13,6 % des entreprises innovantes de France et 12 % des jeunes
entreprises innovantes.
Autre indicateur : selon Ernst &
Young, Rhône-Alpes est passée de la
39e à la 12e place mondiale en terme
de publication de brevets. Parmi les
domaines de compétences identifiés, on citera évidemment la santé
et l’infectiologie à Lyon, mais aussi le
logiciel à Grenoble. Incubateurs. « Alors que notre
région pèse 10 % du PIB national,
elle reçoit 35 % des financements
nationaux en R et D. Cela prouve
que nous sommes parmi les plus
innovants de France », souligne
Jean-Louis Gagnaire, vice-président
de la région en charge notamment
de l’innovation.
Top 3 des régions en nombre
de pôles de compétitivité
13 pôles
11 pôles
Pour soutenir l’innovation, la Région
compte sur ses 13 pôles de compétitivité — un chiffre record, plus
élevé qu’en Île-de-France et PACA.
Mais aussi sur ses 10 clusters. Elle
bénéficie enfin de nombreux incubateurs, comme Grain (Grenoble).
Selon Ernst & Young, c’est celui qui
concentre le plus de start-up ayant un
11 pôles
CA supérieur à 500 K€ après 5 ans
d’existence.
En 2015, cette dynamique va s’intensifier avec la mise en place d’une stratégie régionale d’innovation (SRI). Cette
démarche soutenue par Bruxelles va
permettre à la région de disposer de
1 Md€ jusqu’en 2020 pour financer
des projets innovants.v
Le recours au crowdfunding explose
TRIDIMENSIONNEL
72 500. C’est le
nombre d’imprimantes 3D personnelles qui ont été
vendues dans le
monde l’an passé.
Le marché de
l’impression 3D
devrait atteindre
8,5 Md€ en 2020.
Source : Xerfi.
16 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Depuis plusieurs années, le montant des fonds collectés en France
par voie de financement participatif progresse à toute allure.
Celui-ci est passé de 7,9 M€ en 2011 à 27 M€ en 2012 et 78,3 M€
en 2013 !
Pour le 1er semestre 2014, les fonds collectés s’élevaient à
66,4 M€, soit le double du premier semestre de l’année précédente.
Sur les six premiers mois de 2014, plus de la moitié des dons
collectés (56 %) l’ont été sous forme de prêt, 29 % sont des dons
et 15 % des prises de participations au capital.
Depuis 2008, quelque 55 000 projets ont été mis en ligne sur des
plateformes françaises de crowdfunding. Sur cette même période,
le nombre de financeurs cumulé est estimé à un million. La classe
d’âge la plus représentée ? Les 35-49 ans. Source : Compinnov.
quête
Jeunes entrepreneurs :
« plus jamais sans
mes coworkers »
Les espaces de coworking poussent comme des champignons depuis
trois ans. Émergence d’une nouvelle façon de travailler ? Sans doute,
mais aussi parfois grosse ficelle de marketing immobilier.
On dénombre
200
espaces de
coworking
en France.
Dont 23
en RhôneAlpes.
©Niko Korto
«D
écouvrez le coworking
en Ardèche méridionale avec nous », promet le site Annexe
Numérique.
Derrière ce nom qui fleure bon l’association de promotion des NTIC aux champs,
se cache en fait une agence web avec un
surplus de locaux à louer dans un village
proche de Vallon-Pont-d’Arc. Plus curieux,
cette Annexe Numérique vient en tête
d’une bonne demi-douzaine d’espaces
de coworking au milieu de nulle part,
recommandés par le Conseil Général.
On l’aura compris, l’appellation est
encore en quête de son AOC. Avec
parfois des offres immobilières dérivées
des immeubles de bureaux temporaires
des années 80 qui sont éloignées du vrai
coworking, un concept de lieu dédié au
travail collaboratif.
Le modèle est né aux États-Unis au milieu
des années 2000, qui répondait au boom
du nombre de travailleurs indépendants,
notamment dans les NTIC. Des travailleurs
qui se sont vite organisés en communautés et réseaux d’échanges. Un modèle
exporté depuis dans le monde entier.
Champignons. En Rhône-Alpes, il
y eut Le Comptoir Numérique en 2010 à
Saint-Étienne. Puis L’Atelier des Médias,
l’année suivante à Lyon, et Cowork in
Grenoble en 2012. Trois lieux d’espaces
de travail partagés par des travailleurs
indépendants ou des microentreprises.
18 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
On les croyait encore un peu expérimentaux. Mais voici qu’on découvre que ces
espaces (également baptisés tiers lieux)
ont poussé comme des champignons
depuis trois ans. Une enquête parue
en septembre sur le blog Alternatives
du journal Le Monde en dénombrait
déjà plus de 200 dans l’Hexagone. Dont
23 en Rhône-Alpes. Pas sûr que ce soit
exhaustif.
Le Grand Lyon, à lui seul, en aligne le
tiers sous diverses enseignes comme
Le Comptoir Etic, Locaux Motiv’,
Ecoworking et surtout La Cordée, qui gère
quatre espaces. Mais l’on en trouve aussi
à Bourg-en-Bresse (Le QG), à Valence
(La Forge Collective), à Chambéry
(Business Camp), Annecy (Le Square
du Rhône) ou même Bourgoin-Jallieu
(Le Troquet Numérique). Le tout avec
des surfaces variant de 200 à 600 m2.
Lieux collaboratifs. « Le succès
de l’espace coworking tient au fait que
ce n’est pas seulement un partage de
bureaux et d’outils connectés, mais un
lieu d’entraide et de partage d’expériences entre ses utilisateurs, résidents
permanents ou occasionnels », résume
David Réchatin, l’un des cofondateurs
Benjamin Durand dans la caverne d’Ali Baba
Quand il a transféré, début 2012, son agence digitale Ben Agency de Paris à Lyon,
histoire de se rapprocher de sa Haute-Savoie natale, Benjamin Durand, en quête de
bureaux, est tombé par hasard sur ceux de La Cordée, dans le quartier de Perrache.
« On a visité et signé dans la foulée. D’emblée, on a apprécié la convivialité d’une
vraie communauté et la souplesse d’une organisation permettant de naviguer entre
les différents sites gérés par La Cordée. »
Au-delà des premières impressions très favorables, le lieu a pris, au fil des mois, des allures de caverne
d’Ali Baba. « J’ai trouvé sur place des prestataires (des développeurs, un photographe...), un associé,
Julien Édouard, et une avocate pour caler ce nouveau pacte d’associé », raconte Benjamin Durand.
L’an dernier, à 27 ans, il a lancé ainsi Happy Newco, une société qui commercialise des balises
(technologie Beacon d’Apple) permettant de connecter un magasin avec les téléphones mobiles de
clients disposant d’une application. Rebaptisée Bealder cet été, la start-up prépare un grand test de
ses produits chez Darty à Paris, ainsi qu’une levée de fonds.
Dernier détail : Bealder est aussi domiciliée à La Cordée. On ne change pas une formule gagnante. v
©Franck Ribard
Rhône-Alpes abrite plus de 20 espaces de coworking. Dont Cowork in Grenoble (en haut), L’Atelier des Médias (en bas à gauche) et La Cordée (en bas à droite).
stéphanois du Comptoir Numérique.
Pour les indépendants, « travailler en
coworking, c’est d’abord rompre l’isolement », confirme Léonore Pillon-Quesada
créatrice de Co(m)pilote (conseil en
communication) et résidente lyonnaise
de L’Atelier des Médias. Transfuge d’une
agence locale, elle craignait de se retrouver seule pour démarrer son activité.
« Non seulement, on se retrouve entre
gens qui ont les mêmes problématiques,
mais en plus on bénéficie d’un programme de conseils et d’animations »,
abonde Clémence Pornon, qui a accouché de son projet Cybèle Arts (visites
insolites de Lyon) à La Cordée.
C’est que l’animation des espaces est
l’un des éléments fondamentaux du
coworking. Chez Cowork in Grenoble,
c’est un programme des plus fournis,
qui alterne petits déjeuners débats,
cours d’entrepreneuriat, présentations
de projets ou déjeuners entre lanceurs
de start-up, business-angels, banquiers...
« C’est devenu le point de rencontre de
l’univers numérique local », témoigne
Jeffrey Messud, gérant de Xotelia (logiciel de réservation pour la petite hôtellerie), fidèle habitué de ce lieu un peu
unique, parce qu’il accueille à la fois
des indépendants et un accélérateur
de start-up.
Surtout, ces espaces partagés permettent
de se constituer un précieux réseau
relationnel. Et d’y dénicher à l’occasion clients ou fournisseurs. Au sein
du Mixeur (une pépinière coworkeuse
stéphanoise), Alix Briffaud, la gérante
de Cabane (création textile) a ainsi pu
trouver un photographe, un scénographe
et un designer de packs.
C’est aussi une aubaine pour les « immigrés ». Christophe Desbruères, web
designer parisien venu à Saint-Étienne
rejoindre sa compagne, se réjouit de son
installation au Comptoir Numérique :
« Cela m’a offert une vraie ouverture professionnelle, mais aussi des relations
amicales dans le monde associatif local,
qui irrigue le lieu. » Cerise sur le gâteau,
Buzz Web, son agence, s’est aussi trouvée
des partenaires au sein du Comptoir, pour
répondre à des appels d’offres.
Initiatives privées. Enfin, et ce
n’est pas le moindre attrait, les loyers sont
plutôt doux. L’abonnement mensuel va
de 155 € à L’Atelier des Médias à 270 € à
La Forge Collective (Valence). En général
les bureaux sont plutôt en open space,
mais parfois aussi fermés (380 € chez
Ecoworking à Lyon). Surtout, il n’y a pas
d’engagement de durée. On peut s’en
aller quand on veut, mais aussi louer
à la journée ou une dizaine de jours.
Autre spécificité du coworking, il relève
quasi exclusivement de l’initiative privée.
Seule exception notable, La Mutinerie,
lancée à Villeurbanne en 2013 par le
pôle Imaginove et qui a fermé ses portes
au bout de 6 mois ! Le plus souvent, les
lieux ont été créés par des associations.
On peut
aussi
dénicher
dans ces
espaces
partagés
des clients
ou des
fournisseurs.
C’est le cas de L’Atelier des Médias, du
Comptoir Numérique, du QG à Bourgen-Bresse, de Locaux Motiv’ à Lyon ou
d’Epicentre à Clermont-Ferrand.
Mais Cowork in Grenoble est une SAS
créée par un entrepreneur du cru,
Mathieu Genty. Comme La Cordée, fondée par deux diplômés de HEC. Ou le
Comptoir Etic (Lyon), lui aussi SAS, mais
très branché sur l’économie sociale et
solidaire. La plupart de ces lieux restent
toutefois multiprofessionnels. Ce qui en
fait aussi toute leur richesse, puisque s’y
côtoient architectes, avocats, consultants,
journalistes, développeurs web, etc.
Quant aux puristes, ils montrent volontiers
du doigt les ficelles marketing d’opérateurs immobiliers, simples loueurs de
m2 surfant sur la vague du coworking
comme Col’inn à Grenoble ou d’autres
projets alpins émergents.
Enfin, après l’avoir regardé avec méfiance, les collectivités commencent à
s’intéresser au phénomène. Le Grand
Lyon et Saint-Étienne Métropole ont
créé une structure de mise en réseaux
de leurs espaces de coworking. Et le
label French Tech décroché par Lyon et
Grenoble s’accompagne de l’ouverture
de bâtiments Totem incluant des espaces
de coworking. Enfin, la Région soutiendra en 2015 des projets en zone rurale,
notamment dans le Diois et le Faucigny.
Mais c’est encore le privé qui alimentera
le plus le marché et pas toujours dans
l’esprit du pur coworking. v MT
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 19
dossier demain, la ville
24 [ REPORTAGE ] Comment les marques investissent de plus en plus l’espace public
26 [ FOCUS ] Mobilité : un lent passage à l’acte
28 [ ANALYSE ] Transformer une ville est un gros enjeu de communication
30 [ oui / non ] Des écrans vidéo un peu partout dans les rues en 2030 ?
Il faudra bien
convertir
les citadins à la
smart city
En 2050, deux tiers des humains vivront dans une
agglomération. Pour ne pas devenir invivables, les villes
doivent se réinventer. Et faire changer les habitudes
des citadins. Or ceux-ci n’en voient pas toujours l’utilité.
P
ersonne ne s’imagine que les ressources en
eau du Grand Lyon sont fragiles, et pourtant c’est bel et bien le cas. Et comme, en
France, il n’y a pas de problèmes d’accès
à l’électricité il est difficile de faire prendre
conscience de l’enjeu énergétique à des
citadins », soupire Pierre Houssais, le directeur de la
Prospective du Grand Lyon.
L’homme sait de quoi il parle : le Grand Lyon, comme
de nombreuses autres collectivités, a engagé une foule
d’actions innovantes en matière de transport (autopartage...), d’habitat (écoquartiers...), de tri des déchets...
Objectif : tendre vers ce que les spécialistes appellent
une smart city , c’est-à-dire une ville vivable et agréable
pour tous. Encore faut-il que les habitants suivent le
mouvement, et changent de comportement. Or ils n’en
voient pas toujours la nécessité.
Mais pour les gestionnaires des agglomérations, il y a
urgence : d’ici 2050, deux tiers des Terriens seront des
citadins. Si les villes n’évoluent pas, elles vont devenir
littéralement invivables (pollution insoutenable, bouchons monstrueux...).
20 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Formation à la ville intelligente
Pierre Houssais,
directeur de la Prospective
au Grand Lyon
« S’appuyer sur
l’exemple de citadins
convaincus, c’est
toujours payant. Lorsque
le message émane de
l’autorité publique, il est
moins bien perçu. »
Pour inciter leurs habitants à changer de comportements, les collectivités tâtonnent.
Beaucoup ont conscience de la nécessité d’être très
pédagogues, et ne sont donc pas avares de supports
print bourrés d’infos très concrètes. Par exemple, la
Mission Part-Dieu (rattachée au Grand Lyon) édite les
Cahiers de la Part-Dieu. Cette publication régulière est
conçue comme un magazine (interviews, portraits...)
pour expliquer comment le quartier va être rénové en
profondeur (agence : Being). Et inciter les Lyonnais
à se projeter dans ce nouveau quartier plus fluide et
plus agréable.
Autre type de démarche : nombre d’écoquartiers
(Bonne à Grenoble, Confluence à Lyon, Ginko à
Bordeaux, Haye à Nancy...) ont conçu à l’usage de
leurs habitants des livrets d’accueil explicatifs. Le fonctionnement d’un écoquartier est en effet complexe, il
faut maîtriser ce qu’est un immeuble à énergie positive. « Il suffit d’installer une véranda avec chauffage
pour bouleverser sans le vouloir l’équilibre énergétique
La smart city se prépare aujourd’hui
Un lieu d’échange expérimental
@ La Folle Entreprise
Fin 2014, le Grand Lyon a inauguré Tuba sur le parvis de la gare de la Part-Dieu.
Un endroit où les habitants et les acteurs de la ville sont incités à se croiser pour
échanger sur le futur visage du quartier..
Une web série humoristique
La Métro de Grenoble a créé en 2010 SuperTri, un super héros écolo pour
sensibiliser les habitants aux bons gestes de tri. Ce personnage hilarant
a eu tellement de succès sur internet qu’il est devenu un personnage de
référence pour les Grenoblois (agences : Altius Prod et Plazzle).
Un magazine
pédagogique
© Induct
La Mission Part-Dieu
diffuse Les Cahiers
de la Part-Dieu, une
publication régulière
conçue comme un
magazine (interviews,
portraits...). Objectif :
expliquer comment
le quartier va être
rénové en profondeur
(agence : Being).
Une navette électrique sans pilote
Une navette électrique sans pilote : c’est ce que les Lyonnais ont pu découvrir en 2013
dans le centre-ville. Baptisée Navia, ce robot a permis au maire de Lyon Gérard Collomb
de parler mobilité dans la ville de demain. Des centaines de Lyonnais ont testé l’engin.
de l’écoquartier. D’où l’importance d’être formé sur le
sujet », pointe Caroline Gauthier, professeur à Grenoble
École de Management et spécialiste des écoquartiers.
Autre levier : l’événementiel. « Nous utilisons beaucoup
les grands événements comme la Fête des Lumières
par exemple. De manière ludique, elle interroge la
consommation d’électricité dans la ville à travers
une interaction avec les bâtiments », indique Karine
Dognin-Sauze, vice-présidente du Grand Lyon chargée
de l’innovation. L’événementiel, c’est aussi l’une des recettes du quartier Part-Dieu pour communiquer sur sa
profonde rénovation. Il accueillera en 2015 l’événement
Lyon City Design. Au programme : présentation de prototypes, expositions de mobilier urbain innovant... On
devrait aussi pouvoir mettre des lunettes pour admirer
le visage du futur quartier en réalité augmentée.
Les villes misent également sur l’exemplarité. Plusieurs
ont choisi de s’appuyer sur des « foyers témoins », engagés dans une démarche écoresponsable, et dont on
suit l’évolution. C’est l’exemple de la campagne « Et
vous combien ? » conçue par Native Communications
pour le Grand Lyon. Le principe : 18 foyers lyonnais
(célibataire, famille, couple de seniors...) se sont engagés à adopter de petits gestes simples pour réduire
leurs déchets. On pouvait découvrir le résultat concret
sur un site dédié. Par exemple « Barbara, 36 ans, 250 kg
de déchets en moins ».
« S’appuyer sur l’exemple de citadins convaincus, c’est
toujours payant, appuie Pierre Houssais. Lorsque le
message émane de l’autorité publique, et qu’il est trop
“descendant”, il est moins bien perçu. Les citadins
peuvent avoir l’impression qu’on cherche à contrôler
leurs gestes quotidiens. »
Ces citadins exemplaires peuvent être réels... ou
fictifs. Pour convaincre ses habitants de mieux trier
leurs déchets, la ville de Grenoble a créé SuperTri,
un super héros déjanté, mais très pédagogue. ÉcoEmballages a utilisé un ressort semblable en donnant
vie à M. Papillon. Avec son nœud pap’ violine et ses
bacchantes, il explique à ses voisins comment mieux
trier leurs déchets. Et « l’effet Papillon » se répand ainsi
dans tout le quartier.
...
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 21
dossier presse
demain,gratuite
la ville
50 % C’est la part des Français qui
ne savent pas ce que signifie le
terme « ville intelligente » (étude de
l’opérateur télécom m2ocity). Cette
expression reste énigmatique pour
le citoyen moyen.
... Laboratoire de ville
Les collectivités s’emploient aussi à impliquer concrètement les citadins dans la construction de cette « ville
de demain ». Ainsi la Mission Part-Dieu a imaginé Tuba,
un « living lab » ouvert à tous les acteurs de la ville et
même le grand public qui peut y découvrir et tester
de nouveaux services citadins.
Enfin, les villes font le maximum pour simplifier et
rendre compréhensibles les innovations mises en
place. Ainsi à Grenoble, toutes les « mobilités » de la
métropole ont été rassemblées sous une marque :
Metromobilité, qui communique par un portail internet
unique, pour faciliter la vie des Grenoblois. Le Grand
Lyon quant à lui travaille avec l’agence Anatome à
une campagne baptisée « Ma ville simplifie ma vie »,
qui vante les mérites de l’appli mobile de la ville, de
son site...
« La ville de demain, parce qu’elle sera “intelligente”,
sera au service de ses habitants », s’enthousiasme
Karine Dognin-Sauze, la vice-présidente du Grand
Lyon chargée de l’innovation. « On travaille le produit
ville sous un angle de plus en plus serviciel. La ville
devient une marque qu’il faut faire consommer avec
toujours plus de régularité et d’efficacité », remarque
de son côté Pierre-Emmanuel Jansen, dirigeant de
l’agence Anatome à Lyon.
En douceur, les élus commencent donc à populariser le concept de smart city. « Grand Lyon, la ville
intelligente » : c’était le titre d’un dossier de presse diffusé à tous les médias locaux l’année dernière. Les
journalistes et les universitaires sont friands de cette
expression. Mais ce concept est encore nébuleux. C’est
presque une utopie, car aucune smart city n’existe
encore.
Pour incarner la ville intelligente, les élus ne peuvent
que citer des actions disparates : développement de
la mobilité, construction d’écoquartiers, édification de
bâtiments à énergie positive... Le lien entre tout cela
n’est pas toujours clair.
Terra incognita
« C’est un argument marketing. La smart city est présentée comme la nouvelle modernité », décrypte Boris
Maynadier, fondateur du blog Branding the city.
Mais le terme même de smart city reste énigmatique
pour le citoyen moyen. 50 % des Français ne savent pas
ce que signifie l’expression « ville intelligente » (étude
de l’opérateur télécom m2ocity). Et ce n’est pas mieux
chez les patrons d’entreprise. Seulement 27 % d’entre
eux ont déjà entendu parler du concept de smart city.
Dont 24 % qui ne savent pas précisément de quoi il s’agit
(source : Baromètre de l’innovation 2014 de Grenoble
École de Management). « La smart city est une terra
22 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
M3 La revue de la ville de
demain compte 3 800 abonnés
À Lyon, la prospective, c’est du sérieux.
La communauté urbaine abrite une
direction Prospective, qui compte pas
moins d’une vingtaine de personnes.
Un organe quasi unique en France, et
qui s’est doté en 2012 de son propre
magazine, M3.
Ce quadrimestriel gratuit, exigeant
et dense, qui propose de réfléchir sur
le devenir des villes, compte 3 800
abonnés : agents de la fonction publique,
entreprises, écoles, élus… Mais aussi
simples citoyens. 35 % des abonnés
sont même situés hors de Rhône-Alpes.
Selon une étude menée par Nova7, M3
serait lue par 7 500 personnes. Plutôt
bien pour une publication pointue, qui
affiche en Une des dossiers sur « la
ville servicielle » ou « les indicateurs de
performance ». Et se compose essentiellement de contributions ou d’entretiens
fleuve avec des urbanistes, politiques,
économistes, sociologues, universitaires
de toute la France. Sans aucune publicité, bien sûr.
Exigeant et pointu. Réalisé par l’agence
In Medias Res (Lyon) et le studio
graphique Trafik, M3 soutient la comparaison avec d’autres publications dédiées
à la prospective. D’ailleurs, les personnes
interrogées par le cabinet Nova7
(enquête commandée par le Grand Lyon
en 2014) le comparent à Urbanisme, XXI,
We demain, Futuribles, Place Publique,
ou Esprit.
« Nous ne sommes pas dans la futurologie, nous n’imaginons pas un monde
peuplé d’éoliennes et de voitures dans
le ciel, précise Pierre Houssais, le directeur de la direction Prospective. Nous
cherchons plus à détecter les changements invisibles et silencieux de la ville.
Ainsi, le rapport au fleuve est en train
d’évoluer. Jusque dans les années 80,
l’eau était en ville un exutoire, l’endroit où
l’on se débarrassait de ses déchets. Alors
qu’aujourd’hui, les berges sont considérées comme des zones à reconquérir. »
Pionnier. M3 est aussi un support privilégié pour mettre en valeur l’expertise de
la direction Prospective du Grand Lyon.
« Lyon a été pionnière en la matière,
puisqu’elle a engagé une démarche de
prospective baptisée Millénaire 3 dès
1997, à la demande de Raymond Barre,
rappelle Pierre Houssais. L’initiative a fait
des émules. La démarche Bordeaux 3.0
par exemple a été très inspirée par Millénaire 3, vingt-cinq ans après. »
Pour autant, la Direction prospective
se défend de faire de la communication
institutionnelle avec M3. « Nous avons
notre indépendance, et elle est très
respectée au sein du Grand Lyon »,
assure Pierre Houssais. v
incognita encore à conceptualiser », constatent Sylvie
Blanco, Thierry Grange et Federico Pigni, les auteurs
de cette étude.
Du coup, ce n’est pas (encore) un axe de marketing
territorial. On voit mal une ville revendiquer cette
étiquette dans des publicités. « Dans les années 80,
Montpellier avait diffusé une campagne incroyable
où elle se proclamait “la surdouée”, avec un gamin en
couches-culottes qui enjambait son lit à barreaux. On
était déjà dans la smart city... Mais ce type d’autocélébration en 4x3 c’était bon dans les années 80 », affirme
Marc Marynower, le dirigeant de l’agence MMAP. v jd
dossier demain, la ville
Après la suppression de nombreux panneaux
publicitaires depuis vingt ans, les marques reviennent
en force dans les rues par d’autres moyens.
Comment les marques
investissent de plus en plus
l’espace public
A
u sein de l’espace urbain, tout devient
prétexte à prendre la parole pour les
marques », tranche Solenne Faure, insight
manager chez Ipsos.
« Affichage mobile, clean tags, pochoirs...
Ce qu’on appelle la “guérilla marketing”
est en plein développement dans les villes. L’idée est
de faire voir sa marque, mais de façon détournée. Tout
en jouant avec les codes, et en rendant la vie moins
morose et plus drôle », confirme Lionel Sitz, professeur
de marketing à EM Lyon.
24 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Première forme de présence : la publicité extérieure.
Loin d’être dépassé, l’affichage a résisté à tout : le web,
la crise... En 2013, alors que la presse a reculé de 7,9 %
et le cinéma de 13 %, la publicité extérieure a limité la
casse avec un recul de 2 % (source : Irep-France Pub).
L’affichage numérique semble de son côté promis à un
bel avenir (+ 47 % en 2012).
Rendre la ville plus douce. L’affichage plaît
aux marques, car elles peuvent exprimer leur créativité,
et enrichir le contact avec le consommateur. « La ten-
Une campagne aux petits
soins pour les citadins.
Un panneau qui se transforme
en banc, en auvent ou
en rampe d’accès : c’est l’idée
étonnante de cette campagne
d’IBM conçue par Ogilvy
& Mather.
Albert Asséraf, DG Stratégie, Études et Marketing France chez JCDecaux
dance, ce sont des affichages ludiques qui jouent avec
le citadin, et redonnent un peu de gaieté à la ville »,
indique Solenne Faure. Dans cet esprit, une ligne débordait des affiches du chausseur André, pour continuer
sur le trottoir et conduire au magasin de la marque le
plus proche. Dans un registre proche, IBM a fait sensation avec sa campagne aux petits soins pour les piétons : le panneau d’affichage s’incurvait en bas pour se
transformer en banc, en haut pour servir d’auvent ou
de rampe pour éviter les escaliers. L’accroche ? « Smart
ideas for smarter cities » (agence : Ogilvy & Mather).
« IBM est sorti de son domaine d’expertise pour incarner
un apaisement, une façon plus douce de faire l’expérience de la ville », commente Solenne Faure.
Hormis l’affichage, la tendance est de créer des espaces
éphémères... souvent étonnants. En juin, juste avant la
Coupe du monde de football, Heineken a ouvert à Paris
la Sub room, un loft éphémère... entièrement privatisable. Sur 325 m2, cet espace était dédié à la bière et au
foot. En mai, Ikea a fait sensation en installant à Paris
trois « Cuisine Box » entièrement équipées où l’on pouvait se préparer des repas... à condition d’avoir réservé
au préalable bien sûr.
À Lyon, le chocolatier Révillon a ouvert à l’approche de
Noël une boutique éphémère elle aussi étonnante : on
pouvait y écouter des contes de Noël, y créer des photophores en papier ou des cartes de vœux (agences :
WR&S et Strada Marketing).
Comprendre le citadin. Autre vecteur de présence dans la ville : l’événementiel. Pour communiquer
sur l’ouverture de son magasin de Clermont, Ikea a installé en pleine ville un véritable mur d’escalade constitué de ses produits (canapé, lit, tables de nuit...). Quant
à Badoit, elle a fait servir des repas gastronomiques aux
usagers d’un RER bondé et à des automobilistes bloqués
dans des embouteillages.
En juin 2013, l’opération 24 h Velib’ a rassemblé 250 000
personnes sur les Champs-Élysées. Une opération financée par JCDecaux bien sûr, mais aussi par Évian. « Ce
type de dispositif sera de plus en plus répandu, prédit
Albert Asséraf (JCDecaux). Dans les villes, des événements grand public seront financés par des marques,
plutôt que par des budgets publics. Ces annonceurs
pourront aussi sponsoriser des patinoires, des terrains
de basket... » Et de rappeler que JCDecaux Live, une
nouvelle entité du groupe, a récemment commercialisé
“ À Sao Paulo, le mobilier urbain
diffuse le fil Twitter de la mairie ”
INTERMÉDIA. Grenoble va supprimer 300
panneaux publicitaires en 2015. Est-ce
le signe d’un désamour des collectivités
pour la communication extérieure ?
a.a. Grenoble a pris cette décision
sans concertation ni échanges,
sans doute à son propre détriment.
Elle fait figure d’exception. Toutes
les grandes capitales au monde
se dotent aujourd’hui de mobilier
urbain, car cela leur permet de
financer des services essentiels à
destination de leurs habitants.
INTERMÉDIA. Comment va évoluer
le mobilier urbain ?
a.a.
Grâce à lui, les villes seront
connectées. Ainsi nous avons équipé
200 arrêts d’autobus d’Amsterdam
de smart cells en partenariat avec
Alcatel et Vodafone. Ces microcellules permettant aux piétons de
bénéficier du haut débit dans la rue.
Le dispositif peut aussi intéresser
les collectivités pour mieux gérer
les tournées de leurs agents ou les
entreprises qui sont à la recherche
de données sur le bruit, le trafic,
la pollution...
INTERMÉDIA. D’autres exemples
d’innovations ?
a.a.
Sao Paulo est la 1re ville au
monde à avoir affiché le fil Twitter
de la ville sur son mobilier urbain.
Le mobilier devient ainsi un réseau
social collectif, où vous lisez l’opinion des gens en temps réel. La
ville de demain sera connectée,
mais aussi plus ouverte : les citadins
pourront davantage s’exprimer, et la
gouvernance leur laissera plus de
place. Ils vont réellement devenir les
acteurs de la ville. v
le sponsoring des illuminations de Noël des ChampsÉlysées.
Pour autant, rien ne sert de trop en faire pour se bâtir
une image positive auprès des citadins. En témoigne
l’échec cuisant de l’immense malle (9 m de haut et
30 de long) installée par Vuitton en Russie, à Moscou.
Jugée indésirable au milieu de la place rouge, classée
au Patrimoine de l’UNESCO, elle a dû être démontée en
urgence, après une vague d’indignation. « Les marques
qui dureront dans la ville seront celles qui comprendront parfaitement le citadin et ses besoins. Bref, celles
qui seront en phase avec les comportements de leurs
contemporains », analyse Solenne Faure. v JD
Loin d’être
dépassée,
la publicité
extérieure a
résisté à tout :
le web, la crise...
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 25
dossier presse
demain,gratuite
la ville
Pour promouvoir la mobilité dans les villes, les collectivités
abandonnent le discours moralisateur. Elles adoptent un ton
décontracté et humoristique.
3
campagnes
audacieuses
Mobilité Un lent
passage à l’acte
C
Grenoble vante son tram avec
une websérie loufoque
Pour communiquer sur sa nouvelle ligne de tram,
la collectivité a diffusé sur YouTube « ça se tram’chez
vous », une websérie animée par Éric, un chef de
chantier un peu allumé. Agence : Terra Publica.
Le Grand Lyon promeut
le covoiturage en mode coquin
Cette campagne conçue par Native faisait allusion
à de torrides parties de jambes en l’air... alors qu’il ne
s’agissait que de partager une voiture. Drôles et impertinents, les visuels ont beaucoup fait parler d’eux.
Alors que le sujet a priori ne passionne pas les foules.
Aubagne ose la gratuité
des transports en commun
Marc Marynower,
dirigeant de MMAP
« Quand l’offre
de transports
est intelligente,
elle convainc,
et communique
par elle-même »
ovoiturage, autopartage, vélos en libreservice... Il y a cinq ans, ces pratiques
n’existaient pas, ou si peu. Aujourd’hui,
elles font partie du paysage urbain. Mais
qu’ont donc fait les collectivités pour populariser si vite ces nouvelles pratiques
de déplacement ?
« Si ces modes de transport ont été si bien acceptés,
c’est avant tout parce qu’ils étaient innovants. Quand
l’offre est intelligente, elle convainc, et communique
par elle-même. Et pas besoin de campagnes ! Il suffit
de regarder des gens passer en Vélo’V pour avoir envie
d’en faire autant », remarque Marc Marynower, le dirigeant de l’agence MMAP.
Connivence.
Pour autant, l’envie ne suffit pas.
« Souvent, les gens ont compris et intégré ces nouveaux
modes de transport, mais ils ne passent pas à l’acte »,
remarque Pierre Houssais, directeur de la prospective
au Grand Lyon.
Pour les pousser, les collectivités ne sont donc pas
avares de communication. Le ton adopté est détendu
et humoristique, comparable à celui qu’on peut trouver sur les réseaux sociaux. Foin des grands messages
doctrinaux et moralisateurs. Avec un objectif : établir
ainsi une certaine connivence avec les jeunes urbains,
identifiés comme le public cible.
« La 1re communication de ce type, c’était le Vélo’V, se
souvient Pierre-Emmanuel Jansen, le dirigeant d’Anatome. Avec cette offre, on était dans l’innovation la plus
totale, donc il fallait une communication à l’avenant. »
L’outil privilégié est l’événementiel, qui permet de faire
la preuve de l’efficacité des nouveaux modes de transport. Comme les Journées Mobilité du Grand Lyon par
exemple. Mais aussi les réseaux sociaux. Bref, pas de
messages « descendants », mais des incitations à tenter
l’expérience.
Fluidité. La mobilité reste l’un des thèmes de com-
La ville a pris une décision radicale — certains diront
avant-gardiste : rendre son réseau de bus entièrement
gratuit. En France, peu de villes ont adopté cette
mesure audacieuse. À décision novatrice, campagne
à l’avenant, avec une accroche républicaine : « Liberté,
égalité, gratuité » (agence : Anatome). De cette
expérience a été tiré un livre, écrit par une élue et
un philosophe.
26 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
munication incontournables des collectivités. Il leur
permet de se positionner comme des métropoles innovantes, résolument tournées vers l’avenir. « On considère aujourd’hui que la ville du futur sera celle
de la fluidité retrouvée, c’est-à-dire celle où le citadin
se déplacera sans problème », souligne Pierre Houssais.
D’autant que les comportements des citadins ont évolué
en profondeur. Il y a dix ans encore, ils considéraient
que la voiture était une sphère privée. Et attendaient
par conséquent d’une ville qu’elle multiplie les places
de parking et de stationnement. Aujourd’hui, personne
n’entend plus sanctuariser son véhicule, et au contraire
le prête, le partage... De moins en moins de citadins ont
une voiture. Et le revendiquent. v JD
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 27
dossier presse
demain,gratuite
la ville
Les agences de communication publique se réjouissent de
la multiplication des grands projets de ville. Ce sont des dossiers
difficiles, mais passionnants et qui s’étirent sur plusieurs années.
Transformer une ville est un gros
enjeu de communication
L
es agences de communication publique
apprécient les maires bâtisseurs. Et en ce
moment, elles sont plutôt servies.
À Lyon, la liste des quartiers rénovés ou en
cours de rénovation s’allonge (le Carré de
Soie, la Part-Dieu, Gerland, la Duchère...).
Pour chacune de ces métamorphoses, une agence
orchestre soigneusement la communication. Ainsi en
décembre, c’est MMAP qui a été choisie pour communiquer sur le renouveau du quartier de Gerland. Marc
Marynower, le dirigeant de MMAP, ne cache pas son
enthousiasme : « C’est un gros enjeu, car c’est un quartier en pleine mutation, à la fois sociale et industrielle »,
fait-il valoir.
Les agences de communication publique aiment en
effet travailler sur ces projets urbanistiques. Ils sont
Pierre-Emmanuel Jansen, directeur du bureau lyonnais d’Anatome
“ Une aubaine
pour les agences de
communication publique ”
INTERMÉDIA. Comment les agences
accompagnent-elles la transformation
des villes ?
p-e. j. Depuis cinq ou six ans, les villes
multiplient les projets urbanistiques.
C’est une véritable aubaine pour nous,
agences de communication publique.
En tout cas, c’est un vrai challenge. Car
pour faire accepter ces changements
aux habitants, nous devons sortir des
réflexes de la communication publique
institutionnelle et « descendante ».
INTERMÉDIA. Un exemple de réalisation ?
p-e. j. Nous avons conçu la communi-
cation autour du quartier Confluence
à Lyon. La difficulté était de créer une
identité pour une terre en friche, qui
n’existait pas dans l’imaginaire des
Lyonnais. C’était un no man’s land,
presque une utopie.
Le premier travail a été de donner un
nom à ce quartier et de lui trouver
une signature. Ce fut « Vivre Lyon en
cœur. » Ensuite, nous avons travaillé à
« raconter » les qualités de ce quartier.
Nous avons notamment mis en place
des balades de quartier.
INTERMÉDIA. Quelle est l’importance du
rôle joué par la communication ?
p-e. j. Il
est primordial. Prenez la ZAC du
Bon Lait, à Lyon (7e). Un travail énorme
a été fait en termes urbanistiques, un
nouveau quartier a véritablement été
créé. Mais personne ne le sait.
Et quand bien même on le saurait,
personne n’a envie d’habiter une ZAC.
Ce nom est vraiment dissuasif. Il n’y
a pas eu de réflexion sur l’ADN du
quartier qu’on allait construire, et c’est
dommage.
Les agences ne sont pas seulement là
pour servir un projet technique. v
28 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
ambitieux, parfois spectaculaires, et la communication
y est déterminante. « Ce sont des dossiers passionnants,
indique Pierre-Emmanuel Jansen (Anatome Lyon),
qui a notamment travaillé sur la naissance du quartier
Confluence. Ces quartiers sont de véritables destinations
de vie. Il faut leur donner une identité en trouvant des
angles, en racontant une ambiance de ville… On est
aux confins de la communication institutionnelle et du
marketing territorial. »
Ces missions ne sont pourtant pas de tout repos pour les
agences. D’abord elles impliquent de multiples acteurs :
collectivité, société publique locale, promoteurs immobiliers, entreprises déjà implantées dans le quartier…
« Les promoteurs ont parfois tendance à survendre un
projet et à en faire des caisses dans leur communication commerciale. Or celle-ci ne doit pas diverger de la
communication institutionnelle mise en place », pointe
Pierre-Emmanuel Jansen. L’erreur est de parer le nouveau quartier de toutes les qualités. Comme s’il pouvait
être à la fois innovant, agréable à vivre, bien équipé…
Au risque de trop promettre.
Autre difficulté pour les agences : ces dossiers sont souvent assez sensibles. Un écoquartier qui sort de terre
par exemple ne doit pas apparaître comme un ghetto,
avec ses logements modernes et haut de gamme, alors
qu’aux alentours les autres habitants sont beaucoup
plus mal lotis. La communication consiste aussi à parfaitement intégrer ces projets urbanistiques dans leur
environnement.
Rôle de médiation
Parce qu’elles multiplient les projets urbanistiques, les
collectivités ont aujourd’hui conscience de devoir communiquer davantage en direction de leurs habitants.
Et elles sont sans doute plus enclines à le faire que
par le passé, indiquent les agences de communication
publique. « Aujourd’hui on travaille beaucoup sur l’identité de territoire : la fierté d’appartenir à une ville ou
un quartier, l’impression d’y avoir ses racines, souligne
Nicolas Desbouis chez Terra Publica. La ville parle de la
ville à ses habitants. » Ce que confirme Pierre-Emmanuel
Jansen : « Les agences ont un rôle de médiation plus fort
entre une politique publique et les citadins ».
Il y a l’idée qu’on n’impose plus aux citadins de « subir »
la ville et son cortège de désagréments, mais d’en « faire
l’expérience ». Bref, d’être des « usagers », des acteurs,
voire des « bénéficiaires » de la ville. Et Nicolas Desbouis de citer l’exemple à Saint-Pierre-des-Corps (37),
d’une friche industrielle en cours de réhabilitation : le
chantier est ouvert au public, et c’est aussi un lieu de
création urbaine, qui propose conférences, résidences,
performances artistiques… v JD
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 29
dossier demain, la ville
[ OUI / NON ] Les villes européennes vont-elles se doter d’une forêt
d’écrans comme New York ou Séoul ? Un professionnel du mobilier
urbain et un universitaire confrontent leurs points de vue.
Des écrans vidéo un peu
partout dans les rues en 2030 ?
oui
« Il est évident que les écrans vidéo
seront de plus en plus présents dans
les villes. Notamment grâce à l’affichage numérique. Selon moi, les panneaux digitaux
représenteront la moitié des supports de communication extérieure d’ici 20 ans.
C’est une évolution déjà en cours aux
quatre coins du globe. La technologie
permet désormais une résolution suffisante. De plus, le prix de revient d’un
panneau digital est devenu compatible
avec une installation à grande échelle.
On peut donc dire que le produit est
mature. Enfin, il y a maintenant un cadre
légal en France, notamment pour le 8 m2,
grâce au Grenelle II.
Les annonceurs sont intéressés par ces
écrans, car ils leur permettent de cibler
leur communication en temps réel. Une
Pierre-Henry
radio ou une TV peuvent vanter leurs
Bassouls,
programmes du soir, ou leurs exclusivités.
PDG de
Une agence immobilière peut diffuser
Prismaflex (69)
certaines annonces pendant quelques
heures seulement. Les panneaux digitaux
peuvent aussi accueillir des services,
comme la météo ou même des alertes
Amber, qui sont déclenchées lors des
disparitions d’enfants. Pour autant, les réseaux d’affichage papier ne disparaîtront pas. Ils serviront aux
campagnes de masse, qui requièrent des audiences
très larges
Cette évolution implique que les professionnels comme
nous réussissent leur mutation numérique. Depuis cinq
ans, nous avons fortement investi dans le panneau
LED. Le numérique représentera 50 % de notre CA d’ici
trois à cinq ans, contre 10 % actuellement (soit 6 M€).
Toutefois, les collectivités ne sont pas prêtes à accueillir n’importe quel écran. Elles veulent que les
panneaux soient respectueux de l’environnement,
économes en énergie, et faciles à installer. C’est pour
cela que nous avons conçu en 2013 un panneau LED
entièrement autonome en énergie puisque des cellules
photovoltaïques sont dissimulées derrière le visuel.
Lorsqu’on voit que certaines villes comme Grenoble
changent leur politique en matière d’affichage, on se
dit qu’un panneau digital autonome en énergie sera
peut-être mieux perçu par les maires. » v
30 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
non
« Pourquoi y aurait-il des écrans
partout dans la ville dans 20 ans ?
Nous n’en aurons pas besoin, car
chacun sera équipé de son smartphone et de sa paire
de GoogleGlass ! Les écrans ne seront pas vraiment
dans la ville, mais plutôt dans notre poche, sous nos
doigts ou nos yeux (smartphone, montre
connectée...).
Ce seront des écrans “personnels” et personnalisés en fonction de leur utilisateur.
Le monde numérique viendra directement
à nous, en temps réel, par de la pub géolocalisée, des SMS, des notifications... Et se
sur-impressionnera au monde réel. Nous
vivrons dans une sorte de réalité augmentée.
Quel serait l’intérêt à installer des écrans
dans la ville ? Est-ce qu’on les regarderait
vraiment ? N’y a-t-il pas déjà nombre de
supports disponibles pour accueillir des
Federico Pigni,
informations ? N’importe qui en fait l’exprofesseur
périence : lorsqu’on est plongé dans son
à Grenoble École
smartphone, on ne voit plus les affiches.
de Management
N’importe qui préfère que le commerce le
“rejoigne” sur son smartphone (c’est-à-dire
que des offres commerciales viennent à lui)
plutôt que de devoir regarder de la publicité
affichée. D’ailleurs, une hypothèse crédible
est qu’à l’avenir on n’aura même plus besoin de sortir
de chez soi pour travailler, se divertir, échanger avec
ses amis... On se servira pour cela des murs de sa
maison, qui seront interactifs et tactiles.
Les vitrines des boutiques elles aussi deviendront
interactives. On peut déjà savoir quelle population
les regarde (âge, sexe...). On pourra aussi adapter
leurs messages commerciaux en fonction de différents paramètres. Certaines enregistreront même les
réactions des passants à la vue des produits exposés
(mouvements des yeux, conversations...). Aux ÉtatsUnis, une application baptisée SinTop fonctionne avec
des caméras à l’entrée des boîtes de nuit. Ainsi les
utilisateurs peuvent savoir en temps réel les établissements les plus fréquentés par les filles. Cette appli
fait un carton !
Certains objectent que les smartphones et autres objets
connectés sont très chers, et réservés à une certaine
classe sociale. Ce n’est pas tout à fait vrai, car les prix
des smartphones ont beaucoup baissé. » v
t moin
© C. Scholz
Ruedi Baur,
franco-suisse,
58 ans, partage
son temps entre
ses ateliers
de design (Paris
et Zurich),
l’enseignement
(Ensad/Paris et
Head/Genève)
et la recherche
(laboratoire IRB/
Paris et Institut
Civic City/Genève).
Un designer globe-trotter
ESPRIT INTÉGRAL. Graphiste, typographe, designer urbain,
scénographe... Même s’il se revendique plutôt designer (dans
sa fonction de voir au-delà du graphisme), Ruedi Baur se fait
un plaisir d’endosser avec bonheur tous les costumes. C’est
qu’il a l’ADN interdisciplinaire et voyageur, ce franco-suisse,
né à Paris en 1956 dans une famille d’architecte et grandi
à Chambéry. Diplômé de la prestigieuse École des arts appliqués de Zurich, c’est à Lyon que sa carrière décolle avec l’atelier
BBV et une galerie de design qu’il crée en 1983.
Ses travaux pour le Musée d’art contemporain de Lyon, le
Musée d’Art moderne de Grenoble et d’autres institutions
lui valent d’être réclamé à Paris, pour travailler notamment
avec le Centre Pompidou. Il s’y installe en 1989 en fondant
son atelier « Intégral Ruedi Baur et Associés », puis lance
« Intégral concept », un réseau pluridisciplinaire aujourd’hui
constitué de cinq structures partenaires et couvrant un large
champ du design (graphisme, architecture, scénographie,
design produit, édition).
32 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
CARRIÈRE INTERNATIONALE. Un concept gagnant, qui a permis
à ses deux ateliers de Paris et Zurich de décrocher une impressionnante collection de chantiers. Identités visuelles, signalétiques, scénographies d’expositions : ses équipes ont œuvré
de Paris (Cité Internationale Universitaire) à Genève (Palais
des Nations Unies), via Cologne et Vienne (aéroports), Lyon
(Cité Internationale), Grenoble (Cargo), Berne (hôpital), Venise
(Biennale d’architecture), Leipzig et Dresde (expos), Montréal
(Quartier des spectacles)... Derniers travaux en cours : le Musée
des Confluences (Lyon), la New School University (New York)
et le futur métro du Grand Paris.
Entre deux chantiers, Ruedi Baur enseigne aux Beaux-Arts
de Paris et Genève, écrit des livres, donne des conférences
à Rome, Casablanca ou Montréal, achève une thèse et conduit
des équipes de recherche. Qui travaillent, notamment, sur
les systèmes de représentation des collectivités territoriales.
Systèmes dont il dénonce la médiocrité et le dévoiement par
le branding commercial.v
Les villes sont-elles au bord de la saturation visuelle ? Sans doute
répond Ruedi Baur, un Rhônalpin devenu une des stars de la planète
graphique. Mais le problème ne serait pas tant l’abondance
des images et des signes que leur médiocrité.
Ruedi Baur
“ La signalétique
de demain sera
multisensorielle ”
INTERMÉDIA. Comment a évolué le graphisme
dans les villes depuis dix ans ?
r.b. Il a dû s’adapter aux contraintes de la
culture digitale. Car il est confronté à une
typographie mobile et à la représentation de
ce mouvement, par exemple dans la signalétique de sites internet.
Le numérique a un tel impact que,
aujourd’hui, quand on conçoit une identité
visuelle, on place au centre les éléments
digitaux. L’arrivée des smartphones et des
tablettes nous impose de créer des éléments
visuels qui marchent sur ces supports.
Les affiches et autres images fixes ne sont
plus que des extensions des nouveaux
médias. Et ceux-ci permettent d’accéder
à un savoir mondial et de développer des
échanges collaboratifs. Les gens ont désormais des outils pour donner leur avis dans
une ville connectée en permanence.
INTERMÉDIA. Quel est le rôle du graphisme
dans la ville ?
r.b. C’est d’écrire l’espace public, de lui
donner une visibilité et une lisibilité, dans
un monde de plus en plus complexe, où les
institutions se regroupent dans des structures
toujours plus compliquées à comprendre.
Prenez les universités. Voici 20 ans, leur
classement était clair entre sciences dures,
sciences sociales et humaines. Aujourd’hui,
on les regroupe dans des pôles interdisciplinaires complexes, où les étudiants ont
du mal à s’y retrouver. Pour dresser une
cartographie des savoirs élaborés, cultivés
et transmis à l’université de Strasbourg, j’ai
dû piloter un workshop avec des étudiants
du master de design.
Écrire l’espace public, c’est aider à sa lecture
pour le rendre accessible.
INTERMÉDIA. N’est-ce pas l’enjeu
de la signalétique ?
r.b. Bien sûr. C’est donner un langage visuel
à un espace pour que le visiteur puisse
recevoir des informations, s’orienter et retrouver les sous-ensembles d’un bâtiment ou d’un
quartier.
Jusqu’à la fin des années 90, la signalétique
devait intervenir de manière contradictoire.
Elle devait être vue sans déranger l’espace !
Mon travail sur l’identité et la signalétique du
Centre Pompidou a marqué la discipline et
son histoire.
INTERMÉDIA. Qu’avez-vous fait
au Centre Pompidou ?
r.b. Nous avons créé une forte expression
visuelle et nous l’avons mise en scène, sans
support dédié. L’espace est devenu lui même
le support de la typographie. Cela a conféré
à la signalétique un statut esthétique.
D’ailleurs, écrire l’espace public, c’est aussi
introduire de la singularité et de la poésie
dans la fonctionnalité. C’est introduire une
part de rêve et d’utopie dans l’hyperfonctionalité. C’est particulièrement utile pour
s’approprier ces « non-lieux » que sont les
aéroports, les gares ou les parkings.
INTERMÉDIA. Les parkings sont des “non lieux” ?
r.b. Ce sont des endroits où domine la
désorientation, souvent liée à la peur.
Le travail du graphiste, c’est de parvenir à
créer la confiance. Par exemple à la Cité
internationale de Lyon nous avons inventé
des pense-bêtes humoristiques en déclinant
des mots faciles à mémoriser commençant
par les lettres des étages (A, B, C). Ailleurs,
cela peut être des interventions d’artistes
pour marquer chaque étage d’un parking.
INTERMÉDIA. Quels sont les rapports
entre graphisme et architecture ?
r.b . L’architecte travaille à la fois pour
l’humain et la ville. Il bâtit pour créer un
espace urbain qui dépasse la vie d’un
homme, alors que le designer s’inscrit dans
L’architecte bâtit pour créer un espace urbain
“ qui dépasse la vie d’un homme, le designer
s’inscrit dans une échelle de temps d’une dizaine
d’années. ”
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 33
...
grandtémoi
© Io Baur
...
Ruedi Baur
une échelle de temps d’une dizaine d’années.
Pour moi, le design graphique est un interstice de l’architecture. Parce que l’interaction
avec un espace de qualité est importante.
Ainsi le design urbain peut contribuer à
redynamiser un quartier.
INTERMÉDIA. Comment le design peut-il
redynamiser un quartier ?
r.b . Prenons l’exemple du quartier des
spectacles à Montréal, le deuxième d’Amérique du Nord derrière celui de New York
par la taille.
C’était un quartier plutôt informel, malgré
la présence d’une trentaine de salles de
spectacles, délaissé par les investisseurs.
Nous lui avons donné une forte identité en
créant un parcours lumineux de marquage
de trottoirs, des installations vidéo sur des
façades — comme pour la Fête des Lumières
à Lyon — et un mobilier urbain spécifique.
Soit au final, une mise en scène qui disparaît
quand vient le jour, mais qui en a fait un lieu
magique la nuit.
INTERMÉDIA. Comment va évoluer
la signalétique ?
r.b. Deux grands axes se dessinent. D’une
part, l’utilisation des outils numériques, la
géolocalisation et les systèmes électroniques
de guidage vont concurrencer la signalétique.
Elle n’apportera plus que la confirmation de
34 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
ce que le visiteur verra sur son écran.
D’autre part le développement d’une signalétique multisensorielle. Car nous baignons
dans une culture visuelle où l’œil et le cerveau
sont saturés et n’ont plus envie de regarder.
Or, nous disposons d’autres sens pour nous
orienter. L’acoustique, le toucher et l’odorat
peuvent nous aider dans nos déplacements.
La signalétique multisensorielle va proposer d’utiliser ces sens à travers une gamme
d’objets interfacés.
INTERMÉDIA. Comment réduire le flot d’images et
de signes qui saturent nos villes ?
r.b. Mais ce phénomène n’est pas nouveau.
Déjà au Moyen Âge, les villes regorgeaient
de signes des communautés de métiers, de
marques d’ateliers et de blasons.
Dans l’espace public, l’usager a besoin
d’orientation, de scénographie et d’espaces
revalorisés. Il y a trop de signes dans les
villes ? Sans doute, mais l’important est de les
qualifier pour voir quels types favoriser ou
éviter : les signes séducteurs, les autoritaires,
ceux qui sont fabriqués pour les espaces...
Personnellement, ce sont ces derniers que je
veux recultiver, en m’inscrivant plus dans un
travail de jardinage que d’exclusion.
INTERMÉDIA. Que vous inspire l’interdiction
de la publicité à Grenoble ?
r.b. Je ne trouve pas ça très intéressant.
Certes, il y a un certain nombre de signes
agressifs, la publicité est trop présente. C’est
une chose. Mais jusqu’où aller ?
Faut-il aussi proscrire les enseignes, démonter tout ce qui est préfabriqué ? Remplacer
les panneaux publicitaires par des arbres ?
Il n’y a pas d’intérêt à vouloir transformer
la ville en campagne. On vient en ville
chercher de la densité, de l’énergie, de la
nervosité...
Si l’on veut y interdire la publicité, il faut préférer la stratégie de Sao Paulo qui en a profité
pour réinvestir ces espaces avec des créations
d’artistes.
INTERMÉDIA. Comment jugez-vous
la communication des villes ?
r.b. Elles font beaucoup de communication et
peu d’information. Le citoyen est trop coupé
de la réalité. Mais c’est un vice de forme de
notre démocratie actuelle.
Bien des responsables de communication
semblent convaincus qu’approfondir les
choses sur-solliciterait la population. Or le
citoyen est capable de comprendre. Il faut
arrêter de lui parler comme s’il avait 3 ans.
Il faut l’éduquer en provoquant et en élevant
le débat si l’on veut qu’il se réintéresse aux
affaires publiques.
Pour ce faire, il faudrait fédérer les responsables politiques et les acteurs de la ville pour
créer une synergie, une intelligence locale.
INTERMÉDIA. Et leurs stratégies
événementielles ?
r.b. Les événements culturels sont positifs
pour redynamiser l’espace public. Surtout
s’ils sont ancrés dans l’histoire de la ville,
comme la Fête des Lumières à Lyon.
Aujourd’hui, le pèlerinage se fait autour des
installations vidéo.
Quoique beaucoup plus récente, la Biennale
du Design de Saint-Étienne a aussi réussi
à s’institutionnaliser en drainant tout le
monde du design. Et la ville a su ancrer cette
discipline dans sa transformation urbaine,
à travers la Cité du Design et les synergies
du réseau mondial des villes créatives de
l’UNESCO, où elle côtoie Berlin, Montréal,
Kobé ou Shanghai.
En revanche les Capitales de la culture font
trop appel au star-system en exposant par
exemple des artistes de renom pour se valoriser, alors qu’ils pourraient trouver d’autres
moyens pour créer l’événement.
INTERMÉDIA. Que dire du marketing territorial ?
r.b. Que c’est dangereux de transférer à
l’espace public le modèle de branding
des marques internationales. Les modèles
d’identification des entreprises en compétition commerciale ne correspondent pas
aux besoins de lisibilité de nos espaces
démocratiques.
Le branding reprend le système de propa-
Dans l’espace public, les affiches et autres
“ images fixes ne sont plus que des extensions
des nouveaux médias. ”
gande de certaines dictatures : une petite
marque qui crie, on peut en faire une
marque internationale ! Le branding, c’est
toujours la simplification. Mais cela ne
fonctionne pas pour les territoires. Leur
image ne peut se réduire à un logo. Surtout
quand ils font assaut de marques interchangeables comme Iamsterdam, qui pourrait
aussi bien se décliner en IamParis, Berlin,
etc., tout comme OnlyLyon !
L’image ne peut pas remplacer la réalité et le
discours politique.
INTERMÉDIA. Que peut-on attendre de la
réforme territoriale ?
r.b. Elle devait simplifier les organisations. Or
on sait bien qu’elle sera plutôt génératrice de
nouvelles complexifications.
Le citoyen avait appris les rôles des départements et des communes. Il faudra lui
apprendre ceux des futures métropoles et
de leurs compétences. Et qu’il puisse les
identifier facilement. Il serait utile de définir
une typographie et des signes communs
à chaque type de structure en France.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui : les logos
des régions, par exemple, ressemblent à des
marques de savonnettes. Mettez-en trois côte
à côte : impossible de dégager la moindre
grille de lecture !
INTERMÉDIA. N’est-ce pas utopique ?
r.b. La crise est suffisamment forte
pour
que nous soyons obligés de nous réveiller.
N’est-ce pas ce transfert des modèles de
consommation vers les modèles institutionnels, qui a engendré chez le citoyen ce ras-lebol de la chose publique ?
Lui en redonner le respect passe par la
manière dont les institutions se représentent.
C’est un appel aussi bien aux agences de
communication, qu’aux graphistes et aux
politiques.
Il est urgent d’ouvrir un débat citoyen. v
Propos recueillis
par michel texier
n° 1276 I 10 décembre 2014 I InterMédia Magazine I 35
Au banc d’essai : le QR Code
+et–
+++
«N
Cécile Lafay,
chef de projet
web chez
Blanchon (69)
Déjà dépassé le QR Code ? Né en 1999 au Japon
il n’a pourtant que 15 ans d’existence.
Le témoignage de deux annonceurs rhônalpins.
« Le nombre de scans progresse chaque année »
pour la marque Syntilor, vers une
application dédiée. Nous nous en
servons également pour envoyer le
client vers des vidéos montrant les
différentes étapes d’application du
produit.
L’objectif est de lui apporter une
information complémentaire
qu’il ne pourra pas trouver
sur l’étiquette. Ou de le guider
lorsqu’il ne trouve pas un vendeur à proximité.
C’est un usage digital supplémentaire qui reste peu répandu
dans notre secteur d’activité. » v
ous utilisons des QR
codes sur les emballages de nos produits
d’entretien du bois, et sur notre
documentation print depuis 2011.
Chaque année, nous constatons
que le nombre de scans est en
progression.
Nos QR codes continuent de
générer du trafic alors qu’ils ne
nous coûtent rien. Au final, cela
fonctionne très bien. L’utilisation
des QR codes est encore relative,
mais cet outil est particulièrement
utile sur nos produits phares.
Placés sur les emballages, nos QR
codes renvoient directement vers
la fiche produit correspondante
sur le site web de Blanchon ou,
Blanchon place des QR codes
sur ses produits d’entretien du bois
depuis 2011.
« Les consommateurs commencent
à en avoir assez » –––
«L
Nicolas
Guignet,
responsable
digital au Crédit
Agricole Loire
Haute-Loire (42)
es QR codes ont été très
utilisés, mais on se rend
compte qu’ils ont été
souvent galvaudés. La plupart du
temps, ils servent à renvoyer vers
une simple homepage, ce qui revient en fin de compte à raccourcir
une URL. Bref, sans grand intérêt.
Personnellement, je pense que les
QR codes ont été victimes de leur
succès : les annonceurs en ont collé
partout, mais s’en sont mal servis. Et
les consommateurs ont commencé
à en avoir assez.
Au Crédit Agricole Loire HauteLoire, nous utilisons peu les QR
codes. Avant tout, ce que nous
souhaitons, c’est les intégrer à une
réflexion plus globale. Le QR code
n’est pas une fin en soi, c’est un
point d’entrée vers une opération
spécifique (vente flash, promotion,
couponing...) qui permet de qualifier le trafic.
À l’avenir, soit on continue à mal
36 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
Le Crédit Agricole
Loire Haute-Loire
réserve l’utilisation
des QR codes à des
opérations
spécifiques, comme
ici un jeu-concours.
utiliser le QR code et il mourra de
sa belle mort, soit on tente de lui
redonner ses lettres de noblesse
en lui conférant un usage plus
pertinent. Je suis personnellement
convaincu que des évolutions dans
ce sens sont possibles. Nous pour-
rions par exemple en mettre sur les
cartes de visite de nos conseillers,
afin que les clients scannent et
intègrent directement les coordonnées sur Outlook.
On peut rendre les QR codes plus
utiles. » v
TOPS et FLOPS d’innovations récentes
+++
Les robots événementiels d’Evotion
séduisent les grands comptes
+et–
Animer des événements d’entreprises avec des robots.
C’était l’idée de Maxime Vallet lorsqu’il a fondé Evotion
à Lyon en 2013. Parmi ses premiers clients : Orange,
Veolia, le Futuroscope.
« Nous touchons de grands comptes, mais aussi des
agences événementielles comme Mondial Events ou
Azoka, en recherche d’innovations », précise le jeune
dirigeant. Pour son 1er exercice, il a dépassé ses objectifs avec un CA de 110 K€. Du coup, il est passé de
deux à cinq salariés et va renouveler son catalogue.
« Pour le moment, nous avons des prestations à la journée allant de 700 à 2 000 €. Avec nos futures offres,
nous serons plutôt entre 5 et 20 K€ pour toucher de
grands comptes comme GL Events », indique-t-il. v
Cinq innovations dont on a parlé cette année,
mais qui n’ont pas toutes été des réussites
Le réseau social Tassag n’attire que 300 adhérents
–––
300 adhérents pour un objectif de 1 000 : Tassag, le réseau social créé il y a deux
ans par la société stéphanoise Soliseo, peine à trouver son public. Le principe
est pourtant ingénieux : il permet aux dirigeants d’organiser des visioconférences et d’entrer
en relation avec une vingtaine d’experts labellisés (avocats, fiscalistes, communicants...).
« Notre outil n’était pas assez performant, explique Myriam Nait-Yacoub, responsable marketing. Nous l’avons amélioré en mai 2014, désormais il n’est pas nécessaire d’installer un
logiciel, il est multisupport et multi-plate-forme. »
Pour se distinguer de Skype, Tassag propose un système de protection des données et de
nouvelles fonctionnalités : outils de prise de note, d’impression et de zoom. Prochaine étape
en 2015 : une version grand public baptisée Tisser du sens. v
+++ Pour Georges,
le crowdfunding
est payant
Le trimestriel pour enfants édité par
Grains de Sel a amassé 17 700 € grâce
à sa campagne de crowdfunding sur
Ulule. C’est deux fois plus que prévu
(7 000 €). « Nous avons beaucoup
travaillé sur la campagne, en créant
des visuels et vidéos en cohérence
avec notre ligne éditoriale. Cela a
plu à notre communauté (6 000 fans
Facebook), mais aussi au-delà », commente Anne-Bénédicte Schwebel, la
directrice de publication.
Du coup, le tirage de Georges va
être augmenté en 2015 (de 3 500 à
5 000 ex.) et la maison d’édition va
créer des PLV pour animer ses 500
points de vente. Un vrai bol d’air pour
ce trimestriel exigeant, qui fonctionne
depuis son lancement il y a quatre
ans sans aucune publicité. v
+++ Le MOOC de EM
Lyon a la cote
+++ Fabulous initie Lancôme à l’impression 3D
La jeune agence lyonnaise spécialisée dans l’impression 3D a conçu des PLV premium pour
Lancôme. Ces supports composés de milliers de bâtons de rouge à lèvres dessinant une
rose sont placés sur les corners de la marque à Paris, Milan, Copenhague, Stockholm et
Cannes. D’autres projets dans le
secteur du luxe sont en cours en
vue d’une livraison au printemps
prochain.
« L’impression 3D industrielle
permet une fabrication rapide
et adaptée à chaque magasin,
souligne le gérant de Fabulous,
Arnault Coulet. Nous pouvons
produire des PLV en fonction
des ouvertures de magasins.
L’intérêt c’est que nous pouvons
concevoir des produits ayant
des formes complexes avec une
grande précision. » v
38 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
En novembre 2014, EM Lyon a lancé la
3e session de son cours en ligne gratuit
sur la création d’entreprise, baptisé
Effectuation. L’école de commerce a
comptabilisé 4 000 inscrits. 25 % d’entre
eux sont allés au bout de la formation.
Un bon score. « En moyenne, 10 % des
inscrits suivent un MOOC jusqu’au
bout », souligne Philippe Silberzahn,
professeur à EM Lyon.
Autre point fort de ce MOOC, la
création d’un laboratoire virtuel où
les participants peuvent présenter
leur projet entrepreneurial pour être
« coachés » par d’autres candidats. 350
projets ont été soumis contre 200 pour
la 1re session.
« Le MOOC amène une nouvelle
manière d’enseigner et d’apprendre
et permet de renforcer l’image de
l’école comme spécialiste dans son
domaine », souligne le professeur. v
DIGITAL ADDICT
Les écoles privées lancent des formations full web
« 60 % de nos offres d’emploi concernent
des profils web ». C’est le constat de Claire
Romanet, fondatrice d’Elaee, cabinet de
recrutement spécialisé dans les métiers de
la communication.
Pour répondre à cette demande, deux
écoles privées spécialisées dans le digital
ont ouvert leurs portes à Lyon en septembre
2014 : Digital campus et la Web Interna-
tional School (WIS). Elles viennent challenger Sup de Pub et l’ISCPA, jusqu’alors
assez seules à proposer des formations aux
métiers du web. La particularité de ces écoles : apporter une
culture générale du digital. Digital Campus
propose de former au « trilinguisme » du
web (web design, développement et marketing digital). De son côté, WIS forme à
métiers
veille
Créative technologist
Un poste hybride
et stratégique
débouchés
26.02.2015
Le big data
(Lyon)
Thème de la
deuxième édition
des 10 Heures du
marketing et de
la communication
d’InterMédia
http://10heures.
intermedia.fr/
28.03.2015
Salon des
Masters (Lyon)
Une journée pour
appréhender les
offres de masters,
mastères et MBA.
cio-lyon-rive-gauche@
ac-lyon.fr
L’émergence de
formations au big data
E
n 2015, 4,4 millions d’emplois demanderont des compétences en big
data au niveau mondial, et seulement 40 % de ces besoins pourront
être couverts. C’est le pronostic d’une étude menée par l’entreprise de
conseil américaine Gartner.
En Rhône-Alpes, l’enseignement supérieur s’appuie sur ces besoins pressants
pour développer des formations pointues. Elles conjuguent des compétences
techniques, business et stratégiques.
Après l’ENS Lyon qui a ouvert un master « Architecte de l’information » en
2012, Grenoble École de Management et Grenoble INP ont créé en 2014 un
mastère en commun spécialisé Big data (bac + 6).
La 1re
promotion
du mastère
Big data
de Grenoble
École de
Management
et Grenoble
INP avec
ses parrains,
Michel
Teyssedre,
(IBM) (à g.)
et Agnès
Mauffrey,
(Michelin).
07-08.04.2015
Salon Sido
(Lyon)
Nouveau salon dédié
à l’internet des
objets à la Cité
internationale
[email protected]
21-22.04.2015
eCom (Genève)
Salon suisse du
web, du
e-commerce
et du mobile
contact@by-connect.
com
Partenaires. Sur une vingtaine de candidatures, 13 étudiants ont intégré
cette formation (5 mois de cours et 10 mois de stage).
« Nous l’avons créée pour répondre à la demande des entreprises, souligne
Fanny Rabouille, responsable du mastère. Elles ont besoin de mouton à
5 pattes qui maîtrisent les statistiques, mais qui sont aussi capables de les
analyser pour concevoir de nouveaux services ». Du coup, le mastère est
soutenu par 19 partenaires privés, dont IBM, Schneider et Michelin.
Le poste le plus souvent proposé par les annonceurs est celui de data
scientist. Pour autant, de nouveaux profils émergent comme business
analyst, data strategist ou encore data officer, « l’équivalent du directeur
financier », souligne-t-elle.
Ces compétences restent l’apanage des entreprises ou des cabinets de
consulting. « Mais les agences qui travaillent régulièrement avec de grands
comptes intègrent peu à peu des data scientist », nuance Pierre Col, responsable marketing de l’agence Antidot. v MM
40 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
la conception et au management des activités web. « Il n’existait pas de formation
polyvalente, souligne Bruno Perinel, responsable de WIS. Alors qu’il y a de vrais
besoins notamment sur la partie ergonomie
et sur le management de sites marchands ».
Digital Campus ouvrira en février 2015 une
formation continue de « chef de projet web
et multimédia » d’une durée de 6 mois. v
Le créative technologist fait le
pont entre les
développeurs, les
créatifs et les commerciaux à un
niveau technique
et stratégique. Il
a des lumières Lucas Mouilleron,
technologist
sur la technologie créative
chez Diplomatic-Cover.
web, la créativité,
le marketing et la communication,
mais n’est pas un expert d’un de ces
domaines.
Ce mouton à cinq pattes peut aussi
bien faire de la veille technologique
sur les tendances du moment, créer
des prototypes pour convaincre un
client, tester une technologie avant
son lancement ou réaliser un benchmark stratégique.
Ainsi, Lucas Mouilleron, créative technologist chez Diplomatic-Cover depuis
deux ans, a expérimenté l’an dernier
sur le site de l’agence une technologie
qui permet de contrôler un site internet à partir d’un smartphone. « C’était
de la veille technologique pure, commente-t-il. Mais j’interviens aussi sur
l’aspect stratégique. Pour un de nos
clients dans le domaine du jeu vidéo,
j’ai réalisé un benchmark sur les
sports de jeu vidéo (l’e-sport), identifié la communauté, ses pratiques... ».
Il n’y avait pas de personne dédiée
à cette veille auparavant. « Ce métier
s’est imposé dans les agences digitales
et généralistes il y a quelques années
face à l’émergence d’une communauté open source qui communique
très bien sur le web, explique Lucas
Mouilleron. Face au foisonnement des
technologies et des supports, le poste
s’est formalisé ».
La fourchette de salaire annuel se
situe entre celle d’un développeur
et d’un directeur technique, entre 30
et 50 K€. v
débloque
-notes
Jacques Simonet,
éditeur
d’InterMédia
Tendance pliage. Plus la société se virtualise,
plus elle place le papier sur un piédestal. French Tech
(« la communauté de ceux qui font le
numérique ») a ainsi pris pour emblème
une cocotte en papier. Un comble pour
une organisation qui, si elle parvenait à
ses fins, pourrait éradiquer la race
papetière (la pape-race).
Certes, l’art de plier le papier n’est pas
nouveau puisqu’il est né il y a
plusieurs siècles en Chine avant d’être
popularisé au Japon sous le nom
d’origami. Depuis, cet art a fait le tour
du monde et je vous signale ainsi
l’existence d’un Mouvement français des
plieurs de papier qui a sa revue et
organise une convention annuelle.
Sage comme une image. En cette fin
d’année 2014, on ne compte plus les visuels publicitaires qui
font référence aux assemblages ludiques les plus divers par
découpage, pliage, assemblage,
montages, tressage ou collage...
Seul gage de modernité :
l’ordinateur a supplanté la colle
et les ciseaux.
Quand il s’agit de la biennale de
l’artisanat à Lyon, on peut dire que
c’est de la belle ouvrage ce
dodécaèdre de bandes entrelacées
(agence Communiquez, InterMédia n° 1275).
De son côté, le Nouveau Rhône a choisi de présenter son
par JIBÉ
42 I InterMédia Magazine I n° 1276 I 10 décembre 2014
territoire avec une carte en relief constituée d’une feuille
plissée (agence Bonne Pioche, InterMédia n° 1277).
Et l’un des prix du concours lyonnais « Femmes de design »
a été attribué à une vitrine de magasin de cuisines (Bulthaup)
décorée de lames de papier disposées en rosace (réalisation :
Théodul, Saint-Étienne).
Génération #ciseaux. Il est toujours difficile
de savoir comment naissent ces tendances graphiques dont on
ne peut préjuger la durée de vie. Difficile aussi de distinguer
les instigateurs (les inventeurs) des suiveurs. Pour ne pas dire
copieurs en manque d’inspiration. Dans le doute, parlons
plutôt de l’air du temps.
Mais quand une tendance s’installe, elle devient une mode.
L’origami sera-t-il en 2015 une des valeurs fortes de la génération hashtag ? v
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