Recrutement web 2.0: le «sourcing» des candidats arrive

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Recrutement web 2.0: le «sourcing» des candidats arrive
HR Today
Le journal suisse des ressources humaines
Recrutement web 2.0: le «sourcing»
des candidats arrive en Suisse romande
Un nouveau segment d’affaires lié au recrutement est en train de voir le jour en Suisse romande. Le «web-sourcing»
consiste à sélectionner les meilleurs profils parmi les centaines de résultats trouvés sur le Net. En parallèle, l’Université
de Fribourg a conduit une grande enquête sur les incidences des réseaux sociaux sur le recrutement*.
Quel est le profil de vos clients ?
Claus-Peter Sommer: Notre client idéal
dispose d’un volume de recrutement constant
d’environ 50 à 300 postes par année. Ce sont
donc des sociétés de taille importante, qui
cherchent une solution sur le moyen à long
terme. A l’heure actuelle, nous travaillons
avec cinq clients. Une entreprise pharmaceutique, du high-tech, une société pétrolière et
des sociétés de services. Elles ont toutes une
présence internationale, avec des sièges en
Amérique, en Italie et en Suisse.
Ce profil correspond-il à vos résultats?
Eric Davoine: Selon notre enquête
auprès de plus de 150 recruteurs romands, le
recours aux réseaux sociaux électroniques
n’est pas lié à un secteur d’activité. Cela dépend plutôt du profil du recruteur et de son
réseau. Ce sont surtout les entreprises de plus
de 250 salariés qui utilisent ce type de sourcing. Etonnement, nous avons découvert que
les profils les plus actifs sont des femmes entre 35 et 50 ans. En général, elles y recourent
pour les recrutements difficiles. Et ces réseaux électroniques ne sont qu’une méthode
parmi d’autres, il y a aussi les réseaux professionnels «réels», les agences de placement et
les chasseurs de tête.
La difficulté est de réussir à faire le tri parmi les centaines de profils disponibles.
Comment procédez-vous?
Claus-Peter Sommer: Les habitudes des
candidats ont changé. Avec l’arrivée du Web
2.0 (portails emplois, réseaux sociaux électroniques) les candidats sont devenus passifs.
C’est-à-dire qu’ils sont approchés par les recruteurs avant qu’ils ne se mettent activement en recherche d’emploi. Il y a dix ans, on
HR Today n°3 juin 2010
Photo: Pierre-Yves Massot/arkive.ch
Créé en novembre 2009 à Fribourg, Staffvision
(groupe Contaplus) est une des premières sociétés de Suisse romande à offrir un service de
sourcing de candidats sur le Net. Pour en parler, son nouveau directeur Claus-Peter Sommer nous accueille dans ses locaux fribourgeois avec le professeur de ressources humaines de l’Université de Fribourg Eric
Davoine, qui vient de réaliser une enquête*
sur l’utilisation des réseaux sociaux dans les
processus de recrutement. Regards croisés.
Claus-Peter Sommer, CEO de Staffvision et Eric Davoine (à droite), professeur de GRH à l’Uni de Fribourg.
estime que la part de candidats actifs était de
60 pour cent. La tendance s’est inversée.
Eric Davoine: Oui, mais cette transparence ne vient pas des candidats, elle a été
rendue possible grâce au Net, qui a rendu disponibles des millions de CV. Votre valeur ajoutée est d’offrir un filtre pour trier tous ces
profils.
Claus-Peter Sommer: Je préfère le terme catalyseur. Nous avons effectivement accès à tous les réseaux et à tous les newsgroups
(micro communautés sur le Net). Avec nos outils, nous sommes en mesure de sélectionner
très précisément les bons profils, que nous
présentons ensuite au recruteur. Une fois la
liste validée, nous approchons les candidats
pour les mettre en contact avec la société. Notre grande force est notre rapidité. En général,
il faut compter sept jours de l’ouverture de la
position à la mise en contact du candidat avec
le recruteur.
En quoi les réseaux sociaux ont-ils modifié
les processus de recrutement?
Eric Davoine: Deux études récentes montrent que les employeurs les utilisent surtout
pour contrôler la traçabilité des individus et
pour voir comment ils parlent de leurs anciens employeurs. Mais on peut aussi repérer
des candidats grâce à des compétences clés
identifiées, maintenir des relations avec
d’anciens employés, animer des groupes de
discussion… En Suisse romande, les réseaux
sociaux semblent encore peu utilisés à des
fins de recrutement. Les recruteurs que nous
avons interrogés emploient surtout les réseaux sociaux pour maintenir à jour leur carnet d’adresses.
Claus-Peter Sommer: Chez nous, chaque collaborateur est spécialisé dans un
secteur d’activité (finance, controlling, vente,
IT, engineering, …), puis nous travaillons le
marché de manière très intensive, huit heures
par jour. Nous disposons d’un moteur de recherche propre qui permet des recherches
ciblées sur certains réseaux très spécifiques. Il
faut également connaître le jargon des différentes professions pour entrer les mots clés.
Eric Davoine: Le Net a sans doute révolutionné la manière de recruter et d’approcher
les candidats. Mais il y a encore trop d’informa­
tions qui circulent, d’où l’intérêt de recourir
à ce genre de filtre. Le jour où ces méthodes
seront à la portée de tout le monde, les sociétés
de sourcing seront face à un vrai challenge. Propos recueuillis par mb
* «L’utilisation des réseaux sociaux dans le recrutement»,
réalisé en octobre 2009 par Florence Martin sous la
direction du professeur Eric Davoine et avec le soutien de
Conciliat, société de conseils en ressources humaines.