délais de congé et de protection

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délais de congé et de protection
Aide-mémoire
DÉLAIS DE CONGÉ ET DE PROTECTION
I. Généralités
Au quotidien, les délais de congé et de protection donnent souvent lieu à des incertitudes. Quand
le délai de congé commence-t-il à courir, quand et combien de temps ce délai est-il cas échéant
interrompu, quelle est la signification des années de service? Ce sont ces questions qui sont
analysées ci-dessous.
II. Les délais de résiliation
1. Le délai de congé pendant le temps d’essai
1.1. Généralités à propos du temps d’essai
Conformément à l’art. 18 al. 1 CN, le temps d’essai est de deux mois pour les travailleurs
engagés pour la première fois dans l’entreprise. Il peut être prolongé d’un mois par accord écrit.
En outre, le temps d’essai se prolonge automatiquement lorsque le collaborateur est absent pour
cause de maladie, d’accident ou d’accomplissement d’une obligation légale (à ce sujet, cf.
également notre aide-mémoire «Aspects du temps d’essai»).
1.2. Début du délai de congé pendant le temps d’essai
Pendant le temps d’essai, contrairement à ce qui vaut en cas de résiliation après le temps d’essai
(cf. ch. 2.1 ci-dessous), le délai de congé commence à courir le jour suivant la résiliation. Ce qui
est déterminant ici, c’est d’avoir pris connaissance de la résiliation (à ce sujet, cf. également le
ch. 2.3). En principe, une résiliation pendant le temps d’essai peut avoir lieu n’importe quel jour
de la semaine; les conventions contraires doivent être arrêtées par écrit.
1.3. Durée du délai de congé pendant le temps d’essai
Selon l’art. 18 al. 3 CN, le délai de résiliation est de cinq jours ouvrables («jours de travail»)
pendant le temps d’essai. Cette disposition déroge à la réglementation du CO, où un délai de
congé de sept jours calendaires est prévu (art. 335b al. 1 CO). En conséquence, avec la solution
préconisée par la CN, il est possible que le délai de congé dure plus d’une semaine calendaire
lorsque, une fois la résiliation prononcée, un jour férié ou un jour de compensation tombe sur un
jour ouvrable.
Exemple: un employeur licencie un collaborateur le jeudi avant vendredi saint (jeudi saint). Selon
la CN, les rapports de travail prennent seulement fin le lundi après le week-end suivant le weekend de Pâques. En revanche, si le CO s’applique, le délai de congé prend déjà fin le jeudi suivant
le week-end pascal.
2. Le délai de congé après le temps d’essai
2.1. Début du délai de congé après le temps d’essai
La question de savoir à quel moment le délai de congé commence à courir après le temps
d’essai a longtemps été controversée dans la doctrine et la jurisprudence. La date de la
notification est-elle déterminante? Le Tribunal fédéral a décidé que le délai de congé doit être
calculé rétroactivement, à partir du terme de résiliation le plus proche possible.
Weinbergstr. 49
Postfach 198
8 0 4 2 Z ü ri c h T e l . 0 4 4 2 5 8 8 1 1 1 F a x 0 4 4 2 5 8 8 3 3 5
ww w . b a u m e i s t e r . c h
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Exemple: le 15 août, un employeur licencie un collaborateur pour la fin septembre moyennant le
délai de résiliation ordinaire d’un mois. Dans ce cas, le délai de résiliation commence à courir le
1er septembre et prend fin le 30 septembre.
Le début et la fin du délai de congé revêtent notamment une importance décisive pour déterminer
le délai de protection (cf. ch. III).
2.2. Durée du délai de congé après le temps d’essai
Conformément à l’art. 19 al. 1 CN, le contrat de travail peut être résilié en observant les délais de
congé suivants après le temps d’essai:

pendant la première année de service:
1 mois

de la deuxième à la neuvième année de service:
2 mois

dès la dixième année de service:
3 mois
La CN a ainsi repris les délais minimaux légaux. Les délais de résiliation prévus par la CN ne
peuvent pas être raccourcis; ils peuvent cependant être prolongés par accord écrit.
Par accord du 28 mars 2012, les partenaires sociaux de la CN ont adopté des délais de congé
plus longs pour les collaborateurs ayant 55 ans révolus. Selon l’art. 19 al. 1bis CN, les règles
suivantes s’appliquent à ces collaborateurs après le temps d’essai:

pendant la première année de service:
1 mois

de la deuxième à la neuvième année de service:
4 mois

dès la dixième année de service:
6 mois
Ces délais ne peuvent pas non plus être modifiés (raccourcis) au détriment du travailleur (art. 19
al. 2 CN).
La résiliation ne peut être signifiée que pour la fin d’un mois et doit être communiquée à l’autre
partie au plus tard le dernier jour avant le début du délai de congé.
La partie qui résilie le contrat doit démontrer qu’il était possible de prendre connaissance de la
résiliation en temps utile. La date du sceau postal n’est pas déterminante dans ce contexte, car
elle ne prouve pas la réception, resp. la possibilité de prendre connaissance de la résiliation.
Remarques: lorsque la résiliation parvient encore à l’autre partie avant la fin de la première
année de service, le délai de congé applicable à la première année de service est déterminant.
Le fait que le délai de résiliation expire seulement durant la deuxième année de service est sans
importance. Cette règle s’applique par analogie au cas où la résiliation est signifiée durant la
neuvième année de service et que le délai de congé prend fin durant la dixième année de
service.
3. Conséquences du non-respect des délais de congé
Une résiliation notifiée tardivement ou signifiée à trop court terme ne perd pas sa validité. Au
contraire, elle sera interprétée et modifiée conformément aux termes du contrat ou de la loi.
Exemples:
1. Une résiliation (délai de congé: 1 mois) pour le 30 septembre parvient seulement le 1 er
septembre au travailleur. Dans ce cas, le délai de résiliation commence seulement à courir le 1er
octobre et prend fin le 31 octobre.
2. Le 15 août, un employeur licencie un travailleur accomplissant sa deuxième année de service
pour le 30 septembre. Le délai de congé étant de deux mois, il est prolongé jusqu’au 31 octobre.
Cependant, les conséquences juridiques sont controversées lorsque le travailleur ne réagit pas à
une telle résiliation «erronée» et qu’il ne propose plus ses prestations de travail pour la durée
restante du délai de congé. En principe, le travailleur a droit au salaire pour toute la durée du
délai de congé lorsqu’il ne s’est pas rendu compte de l’irrégularité de la résiliation ou qu’il n’avait
pas à s’en apercevoir. Il va de soi que cela dépend fortement des circonstances du cas
particulier. Dans tous les cas, on ne peut pas poser des exigences trop élevées concernant les
connaissances juridiques des collaborateurs.
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III. Les délais de protection
1. Généralités concernant les délais de protection
Les délais de protection sont destinés à protéger le travailleur contre la perte de son travail dans
une période où il n’a en principe pas la possibilité de chercher du travail et où il ne serait pas
engagé par un employeur en raison de son incapacité de travailler.
2. A quelles conditions les délais de protection trouvent-ils application?
Les conditions suivantes doivent être cumulativement remplies pour que les délais de protection
s’appliquent, c’est-à-dire pour que la protection temporelle contre le licenciement soit mise en
place.
2.1. Expiration du temps d’essai
Le moment de la réception du licenciement est déterminant. Si la réception a encore lieu pendant
le temps d’essai, la résiliation est valable même si l’incapacité de travailler dure au-delà du temps
d’essai. Comme mentionné ci-dessus, il faut tenir compte du fait que le temps d’essai est
susceptible d’être prolongé pour cause de maladie, d’accident ou d’accomplissement d’une
obligation légale. Dans de tels cas, la protection temporelle contre le licenciement commence
seulement après expiration de la prolongation.
2.2. Pas de contrat de travail à durée déterminée et pas de résiliation immédiate
Lorsque le contrat prend fin à une date déterminée, les délais de protection ne trouvent pas
application. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’une résiliation immédiate est justifiée (p. ex. si le
travailleur participe à des concours sportifs malgré une annonce de maladie à 100%).
2.3. Délais de protection seulement applicables si la résiliation est signifiée par
l’employeur?
En principe, les délais de protection ne s’appliquent pas lorsque le travailleur résilie lui-même le
contrat ou si un contrat d’annulation a été conclu. Le contrat d’annulation a toutefois donné lieu à
de nombreuses décisions de tribunaux par le passé. Certes, l’art. 336c CO n’exclut pas la
conclusion d’un contrat d’annulation. Mais chaque fois qu’il peut être démontré que le contrat
d’annulation a été conclu sur pression de l’employeur et alors que le travailleur disposait d’une
liberté de décision limitée, les délais de protection sont tout de même appliqués par les tribunaux.
2.4. Quel délai de congé est important pour les délais de protection?
Comme mentionné ci-dessus, selon la pratique du Tribunal fédéral actuellement applicable, il est
clair que le délai de congé est déterminé rétroactivement à partir de la fin du contrat. Aucun motif
de protection ne peut s’appliquer en dehors de ce délai.
Exemple: le 15 août, l’employeur licencie un travailleur pour la fin septembre en respectant le
délai de résiliation ordinaire d’un mois. Les événements survenant entre le 1er septembre et le 30
septembre sont pertinents pour les délais de protection. En revanche, si un motif de protection
survient entre le 15 et le 31 août, cela ne déclenche pas le délai de protection.
De même, la survenance d’un motif de protection durant le délai restant, soit dans la phase entre
l’expiration effective du délai de congé et la fin du mois, ne peut pas influencer la fin du contrat de
travail.
3. Conséquences juridiques des délais de protection
3.1 Nullité de la résiliation
Si une résiliation est prononcée pendant un délai de protection, elle est nulle, c’est-à-dire qu’elle
ne produit aucun effet juridique et qu’elle doit être réitérée après écoulement du délai de
protection, en respectant le délai de résiliation ordinaire. Si l’employeur ne signifie pas une
nouvelle fois le congé au travailleur, le contrat de travail continue à s’appliquer pour une durée
indéterminée.
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3.2 Suspension du délai de congé
Si l’employeur prononce la résiliation avant l’application du délai de protection, le délai de
protection entraîne la suspension du délai de congé. Le délai de congé restant continue
seulement à courir lorsque le délai de protection a expiré.
Dans la plupart des cas, le délai de protection a pour effet que la fin du délai de résiliation ne
coïncide pas avec la fin du mois. Dans de tels cas, le contrat de travail est prolongé jusqu’à la fin
du mois suivant (délai restant).
3.3. Bon à savoir
La nullité de la résiliation resp. la prolongation du délai de résiliation sont des conséquences
juridiques objectives, raison pour laquelle l’employeur peut aussi s’y référer. Par conséquent, le
travailleur ne peut pas, parce que cela l’arrange (p. ex. parce qu’il a trouvé un nouvel emploi)
renoncer unilatéralement aux effets du délai de protection et ainsi entraîner précocement la fin du
contrat. L’accord de l’employeur est dans ce cas nécessaire.
4. Les délais de protection resp. les différents motifs de protection
4.1. Délai de protection en cas de service militaire, de protection civile ou de service civil
Une protection contre le licenciement existe durant l’accomplissement du service militaire, du
service de protection civile ou du service civil. Si le service dure plus de onze jours, le délai de
protection est prolongé de quatre semaines avant et après le service.
Remarque: bien que l’art. 336c al. 1 lit. a CO ne mentionne que les services en vertu de la
législation fédérale, conformément au droit international récent, la protection contre le
licenciement existe aussi pour les ressortissants de l’UE ou de l’EEE qui fournissent des services
à l’étranger.
4.2. Services d’aide à l’étranger
Si l’employeur a donné son accord au service à l’étranger, le délai de protection existe durant
toute la durée des services d’aide ayant été ordonnés par une autorité fédérale.
4.3. Grossesse et maternité
La protection contre le licenciement s’applique pendant toute la durée de la grossesse et au
cours des 16 semaines qui suivent l’accouchement. Le délai de protection commence au début
de la grossesse, même si la travailleuse apprend seulement après coup qu’elle était enceinte au
moment de la résiliation.
4.4. Maladie
a) Résiliation pendant une maladie: en cas de maladie, la solution prévue par la CN déroge
sensiblement à la réglementation du CO. Ainsi, conformément à l’art. 21 al. 1 CN, le délai de
protection court aussi longtemps que l’assurance-accidents ‒ obligatoire selon la CN ‒ verse des
indemnités journalières au travailleur. C’est seulement lorsque le travailleur perçoit également
une rente de l’assurance-invalidité parallèlement aux indemnités journalières de l’assurancemaladie que l’employeur peut le licencier à partir de la date de la naissance du droit à une rente
d’invalidité, en observant les délais de résiliation ordinaires. Par conséquent, la protection contre
le licenciement mise en place par la CN va bien plus loin que l’art. 336c al. 1 lit. b CO, où les
délais de protection sont fixés en fonction du nombre d’années de service.
b) Maladie survenant après la résiliation: en revanche, en cas de maladie survenant après la
résiliation, l’art. 21 al. 3 CN a repris la réglementation prévue par le CO. Si la résiliation est
encore prononcée avant la maladie, le délai de congé est suspendu durant 30 jours au maximum
au cours de la première année de service, durant 90 jours au maximum de la deuxième à la
cinquième année de service et durant 180 jours au maximum à partir de la sixième année de
service. Il faut tenir compte du fait que le délai de protection court également en cas d’incapacité
partielle de travailler. Toutefois, ce délai ne se prolonge pas proportionnellement en cas
d’incapacité partielle de travailler.
c) Exemples: le travailleur est entré dans l’entreprise le 1er juillet 2011. Le 24 août 2012,
l’employeur licencie le collaborateur pour le 30 novembre 2012 en respectant le délai de
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résiliation ordinaire de deux mois (délai de résiliation prolongé volontairement). Le délai de congé
est ainsi de 61 jours (octobre et novembre). Les variantes suivantes sont envisageables:
Maladie 1: le travailleur est malade du 22 août 2012 au 10 octobre 2012: la résiliation est nulle et
doit être réitérée le 11 octobre 2012.
Maladie 2: le travailleur est malade du 10 septembre 2012 au 20 septembre 2012: la résiliation
est valable. Le délai de protection n’a pas d’influence sur le délai de congé. Le contrat de travail
n’est donc pas prolongé.
Maladie 3: le collaborateur tombe malade le 25 septembre 2012 durant 15 jours: la résiliation est
valable. Le délai de résiliation commence seulement à courir le 10 octobre 2012. Le contrat de
travail prend fin le 31 décembre 2012.
Maladie 4: le collaborateur est malade du 25 octobre 2012 au 31 mars 2013. La résiliation est
valable. Jusqu’au 25 octobre 2012, 24 jours du délai de résiliation se sont écoulés. Le délai de
protection maximal en cas de maladie survenant après la résiliation est de 90 jours au cours de la
deuxième année de service. Ce maximum est atteint le 22 janvier 2013. Le délai de congé
restant de 37 jours court à partir du 23 janvier 2013. Il prend exactement fin le 28 février 2013. Le
contrat de travail n’est pas prolongé.
résiliation le 24.8.2012
terme de résiliation le 30.11.2012
délai de résiliation
2 mois
septembre
M1
M2
M3
M4
octobre
novembre
décembre
janvier
février
22.8.-10.10.12
10.9.-20.9.12
25.9.-9.10.12
25.10.12-28.2.13
d) Durée du délai de protection lorsqu’un travailleur passe à une année de service
offrant un meilleur délai de protection: l’employeur prononce le licenciement au cours de la
première ou de la cinquième année de service, mais le délai de résiliation prend régulièrement fin
au cours de la deuxième resp. de la sixième année de service. Dans ce cas, le délai de
protection plus long s’applique. Cependant, ce délai ne recommence pas à courir à zéro à partir
du passage à l’année de service supérieure, mais est compté depuis le début de l’incapacité de
travail due à une maladie.
4.5. Accident
a) Résiliation pendant un accident: en cas de résiliation pendant un accident, la protection
contre le licenciement octroyée par l’art. 21 al. 1 CN va également beaucoup plus loin que la
réglementation du CO. Alors que le CO échelonne les délais de protection en fonction du nombre
d’années de service, la CN préconise la nullité de la résiliation prononcée par l’employeur aussi
longtemps que l’assurance-accidents verse des indemnités journalières au travailleur.
b) Accident survenant après la résiliation: contrairement à ce qui prévaut en cas de maladie
survenant après une résiliation, l’art. 21 al. 4 CN prévoit, en cas d’accident, une interruption du
délai de résiliation aussi longtemps que l’assurance-accidents obligatoire verse des indemnités
journalières. Il convient dans ce contexte aussi de mentionner la comparaison ci-dessus établie
avec le CO, où les délais de protection sont également échelonnés en fonction du nombre
d’années de service en cas d’accident survenant après la résiliation.
Exemple: le collaborateur est entré dans l’entreprise le 1er juin 2012. Le 21 septembre 2012,
l’employeur le licencie pour le 31 octobre 2012 en observant le délai de résiliation d’un mois. Le
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délai de congé est ainsi de 31 jours. Le travailleur est victime d’un accident le 15 octobre 2012 et
reste incapable de travailler jusqu’au 31 décembre 2013. 14 jours du délai de résiliation se sont
écoulés jusqu’à l’accident. En raison de l’accident, pour lequel l’assurance-accidents verse des
indemnités journalières, le délai de congé est interrompu jusqu’au 31 décembre 2013. Le délai de
résiliation comporte encore 17 jours et recommence à courir à partir du 1er janvier 2014. En
raison de la prolongation légalement prévue jusqu’à la fin du mois, le contrat de travail prend fin
le 31 janvier 2014.
5. Cumul de plusieurs incapacités de travail différentes
D’après le Tribunal fédéral, toute incapacité de travail fondée sur un nouveau motif (maladie,
service militaire, grossesse, accident) déclenche un nouveau délai de protection (indépendant).
En conséquence, les jours des incapacités de travail différentes ne sont en principe pas cumulés.
En revanche, si l’incapacité de travailler pour cause de maladie ou d’accident remonte au même
motif (rechute) ou en est clairement une séquelle, elle ne déclenche pas un nouveau délai de
protection.
Remarque: comme le secteur principal de la construction prévoit des assurances obligatoires en
cas de maladie et d’accident, il est toujours fait appel à un médecin de confiance de l’assurance
dans les litiges où il s’agit de déterminer si l’on est en présence d’une rechute ou d’une séquelle,
étant donné que cela affecte la durée des indemnités journalières.
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Zurich, décembre 2012
Renseignements: Service juridique SSE, hotline, tél. 044 258 82 00
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