: SUP SPORTS : SAM-XVI - Site officiel du Pugilist Club Niçois

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Sports
nice-matin
Dimanche 25 novembre 2012
BOXE PORTRAIT
Juste une mise aux “poings”
Jacques Strocchio, entraîneur le plus titré de la région, évoque sa passion pour le noble art
I
l s’est pointé au rendez-vous
fièrement vêtu d’un maillot de
l’équipe de foot de l’AC Ajaccio.
« Enlève-moi ça » lui a-t-on glissé à
“La Cave”, un établissement où
Jacques Strocchio a ses habitudes, rue Veillon, à Nice. Et où le patron des lieux, René Bocchi, est
un ancien du Gym. Ici, comme au
“Circuit“, place Saétone, un autre
endroit qu’il fréquente, les Aiglons
de Claude Puel sont plus souvent
au centre des conversations que
les Ours d’Alex Dupont.
« Mon amour pour l’ACA date de la
fin des années 60. C’est un club méconnu mais dont la gestion et l’ascension sont un modèle du genre et
où de nombreux joueurs sont passionnés de boxe ! À Ajaccio, j’ai découvert des gens. »
Nous, on veut bien, mais pour un
type né à Nice, dont les parents et
les grands parents sont aussi Niçois, ça la fout mal !
Bon, personne ne va lui coller un
procès pour ça. On lui en a déjà
fait suffisamment à la boxe. Un
sport où il a beaucoup donné. Et
si peu reçu... sauf des coups. L’entraîneur du Pugilist-club Niçois
n’a pas oublié : « Au décès de mon
père (1), en 2005, des gens “responsables” ont raconté que l’on m’avait
retiré la salle Leyrit car je n’avais
pas de diplôme pour enseigner. Ces
mêmes “marida lengua” (mauvaises langues) ont été condamnées
par le TGI de Grasse pour non-respect de l’obligation de produire à la
Fédération les documents comptables afin d’exercer son devoir de
contrôle. »
‘‘
Il n’y a plus de
référence avec la
multiplication
des ceintures ”
Strocchio vise le Comité départemental, attaqué en justice par sa
propre fédération et quatre clubs
du 06, dont le PC Niçois. Il n’a pas
le diplôme, et alors ? « Lors des stages de formation pour devenir instructeur, prévôt ou Brevet d’État,
on ne vous apprend pas à faire un
bandage ou à colmater une blessure
à l’arcade. Moi, je sais le faire,
parce que des anciens ont bien
voulu me donner des tuyaux. Mais
quelqu’un qui n’a jamais enfilé une
paire de gants, titulaire du BE, peut
entraîner un boxeur pro et gérer sa
carrière. Tout cela en ayant appris
la boxe dans les livres. »
Voilà pour la mise “aux poings”.
Il est comme ça, Jacques. Sanguin
et direct comme une droite au
flanc. Il est surtout attachant. Passionné. Il connaît tous les résultats
des clubs. Il s’intéresse à tous les
sports de sa ville : le foot, qu’il a
pratiqué au Cavigal, « je n’étais
pas bon ! », le rugby, « j’ai joué avec
Catoni, Buchet » et plein d’autres
Son CV
3 Né le //
à Nice.
3 Palmarès boxeur :  combats amateurs (v, n et d.).
Vice-champion de France .
Champion de France universitaire.
3 Palmarès entraîneur : un
championnat d’Europe (),
cinq championnats de France,
une Coupe de la Ligue, un Tournoi de France et deux titres de
champion de France amateurs.
3 En , le PCN remporte la
Coupe Paul Rousseau (meilleur
club de l’année).
3  championnats d’Europe et
 championnats de France organisés par le PCN.
Sebir, Joseph, Delsahut, tavares,
Boubaker, etc.
‘‘
(Photo A.B.)
disciplines.
Curieux, ouvert, il n’est pas rare de
le voir dans les travées des salles
et des stades de la région.
L’épisode du Comité a terni
l’image du noble art. Comme si ce
sport à l’image déjà écornée en
avait besoin. C’est que, depuis une
dizaine d’années, personne ne
comprend plus rien à tous ces titres, à toutes ces fédérations. Il
en pense quoi, Jacques Strocchio,
le coach le plus titré des AlpesMaritimes ?
« Le problème, c’est que, devant la
multiplication des ceintures, il n’y a
plus de référence. Je ne dis pas que
les champions du monde ne sont
pas bons, mais il y en a plusieurs en
même temps. Sans parler de l’apparition des titres par intérim et des
ceintures intercontinentales. Au
judo, Douillet était le meilleur dans
sa catégorie de poids, comme Riner
aujourd’hui. »
De tels propos rassurent, alors
même que l’on se posait des questions quant à l’intérêt de l’existence de cinq fédérations mondiales (WBC, WBA, IBF, WBO et WBF).
« L’intérêt ? C’est l’appât du gain.
Ce n’est pas prêt de cesser puisque,
financièrement, beaucoup y trou-
vent leur compte, les fédérations, les
officiels... »
Cette boxe-là est à des années lumières de celle qu’il connaît. Des
valeurs qu’il défend. Lui qui a - bénévolement - maintenu son club à
flots pendant 22 ans, avant de claquer la porte en 2006. « Ce n’était
pas un coup de tête. J’étais usé. Je
travaillais encore de nuit et gérer
cinq boxeurs professionnels n’était
plus possible. »
‘‘
Guillerme, c’est
l’exemple du
PCN. La racine,
c’est lui ! ”
Pendant 22 ans, Jacques sera pratiquement seul à tenir le gouvernail au PCN. Entre 1990 et 2006, il
s’occupe de seize “pros”, et se
construit un gros palmarès.
Son heure de gloire ? Le titre de
champion d’Europe des coqs de
Fabien Guillerme, en 2001. « Fabien, c’est l’exemple du club. Il est
issu de la boxe éducative. La racine, c’est lui. Mon meilleur souvenir reste son titre de champion de
France qu’il conserve en 2000 face
à Mancini. Pour la 2e remise en jeu
de sa ceinture européenne, en 2003,
au Palais Acropolis, ma mère, Charlotte, présidente du club, s’était portée caution financière pour que l’organisation puisse avoir lieu. Elle
ne l’a jamais dit à mon père. »
Cette boxe dont il se revendique,
c’est aussi celle du Docteur Lassus, celui qui, en 1969, aidé de
quelques-uns, dont le papa de Jacques, relança sur ses deniers personnels la discipline à Nice, où
plus aucun club n’existait : « Aujourd’hui, à Nice, sept clubs sont
affiliés à la FFB, c’est une bonne
chose. Cela doit faire plaisir au Dr
Lassus. Cependant, tout irait mieux
si certains se contentaient d’évoluer dans leur domaine, sans recruter leurs élèves dans d’autres
salles ». Et tac, un upercut !
Cette boxe, enfin, c’est celles des
années 70, avec les premiers galas
de boxe éducative du PCN (1973)
et le retour des grands combats.
Puis celle des années fastes du
club, à partir des années 90,
jusqu’au milieu des années 2000,
avec une floppée de pros : Nato,
Joubij (x2), Cano, Mattei, Canclaux, Serrat, Espinas, Saioni,
Je ne veux pas
faire le combat
de trop ”
« La boxe est un sport difficile. Il faut
souffrir. Faut vraiment avoir envie
de prendre des coups dans la
gueule (sic), de faire des régimes.
Sans dénigrer les autres sports, certains sont quand même plus faciles » poursuit celui qui a débuté en
1969 avant de raccrocher en 1982,
après une défaite à Hyères : « Mon
premier combat, en 1972, je l’avais
disputé aussi à Hyères ! J’aurais pu
passer professionnel, d’ailleurs je
m’entraînais comme un pro. Mon
père, qui m’entraînait, ne voulait
pas que je fasse de combat, c’était
un frein, mais je le comprends, c’est
dangereux. En fait, il n’a jamais
voulu que je boxe. »
Aujourd’hui libéré de ses obligations professionnelles, Jacques
est de retour au PCN. Pour le plus
grand bonheur de Robert Talovic,
le président, « qui s’investit, qui est
présent et qui a su ranimer ma passion », des jeunes, et de Lucas Talovic, le 17e pro sur sa liste, avec
lequel il est lié contractuellement.
« Il ne me manque plus qu’un titre,
le Critérium Espoirs, que va disputer Lucas en 2013 ! J’aimerais bien
que le PCN organise des rencontres mais c’est de plus en plus difficile d’utiliser un gymnase à Nice. »
Grand-père pour la deuxième fois
depuis peu - « Une petite Vicky,
après Cassy » -, Jacques se donne
encore deux ou trois ans dans la
boxe : « Je ne veux pas faire le
combat de trop. »
À 57 ans, Jacques Strocchio est
toujours dans le circuit, pas encore à la cave...
(1) Jacques Strocchio père était une légende de la
boxe niçoise (41 combats pros), et à l’origine de la
création du PCN, en mars 1969, avec le Dr Lassus.
ANTHONY BOYER
[email protected]