1 Les troubles spécifiques du langage : quel accès à l`écrit? plan

Transcription

1 Les troubles spécifiques du langage : quel accès à l`écrit? plan
plan
Les troubles spécifiques du langage :
quel accès à l'écrit?
Michel Habib, M.D.
Centre référent troubles du langage
• Cerveau et langage : quelques notions de base
• Études au long cours du devenir d'enfants
dysphasiques
• Troubles du langage et dyslexie
• Applications thérapeutiques
CHU de Marseille
Composantes du langage
Pragmatique
Perception/compréhension
Sémantique
Syntaxe
Lexique
production
Cerveau et langage : quelques notions de
base
Phonologie
Phonétique
Cortex moteur
(aire précentrale)
Aire de Broca
Cortex somato-sensoriel
Gyrus supramarginal
Gyrus angulaire
Aire
visuelle
primaire
Cortex préfrontal
Aire de Wernicke
1
Réalisation articulatoire
aire classique du langage
Cortex pré-frontal latéral
Programmation
pré-articulatoire
(fonctions exécutives, habiletés narratives, pragmatique, communication)
(processus instrumentaux)
Image
'optique' des
mots
couleurs
noms
propres
cortex préfrontal
inférieur
Discrimination auditive
éléments objets
naturels
(syntaxe, grammaire
accès aux verbes)
Le système phonologique
dans le cerveau
lobe pariétal inférieur :
mémoire phonologique à
court terme
aires de médiation
(accès "catégorie-spécifique" aux mots)
Aire de Broca : une plaque tournante dans
l'acquisition du langage
DYSPHASIE
DYSLEXIE
Aire de Broca:
- programmation articulatoire
- traitement séquentiel
- récapitulation phonologique
cortex temporal postérieur:
discrimination phonétique
Beyond the Mirror System:
From Monkey-like Action Recognition to Human Language
Michael Arbib
Computer Science Department, Neuroscience Program, and USC Brain Project
University of Southern California
Los Angeles, CA 90089-2520
[email protected]; http://www-hbp.usc.edu/
2
Latéralisation hémisphérique :
l’inné et l’acquis
Norman Geschwind : 1926-1984
Wernicke ’s area
Teszner et al., 1972 :
asymétrie du planum déjà
présente sur un cerveau de fœtus à
terme
Planum temporale
left
right
L’hémisphère gauche se spécialise
progressivement au cours de l’enfance
récupération de l'aphasie
après une lésion gauche
naiss. 1an
5ans
10ans
adulte
explication : rôle de l'hémisphère droit?
+ organisation intra-hémisphérique?
3
hémisphère
gauche
hémisphère
droit
"canard"
"bateau"
Le test d’écoute
dichotique:
Preuve de la latéralisation
gauche du langage
Succion non-nutritive : écoute de parole ou de musique
5
oreille gauche
oreille droite
score de
réactivation
de la succion
Baby ERP cap
4
3
2
1
0
parole
musique
Etudes sur la spécialisation hémisphérique de la
perception du langage: conclusions
MMN obtenues chez des nourrissons de 3 mois en réponse à un
contraste /ba/-/ga/ et à un contraste voix masculine /féminine
• Les réseaux cérébraux impliqués dans la perception du
langage sont spécialisés dès les premiers instants de la vie,
donc probablement génétiquement programmés
• Au cours de la première année, sous l’influence de
l’environnement linguistique propre à chaque langue, ils se
déterminent dans leur fonction définitive en perdant une partie
des aptitudes initiales
• Les autres aspects (production, syntaxe, lexique,
sémantique…) sont probablement également soumis à une
période critique, s’étalant sur les 10 premières années de vie.
4
Etudes longitudinales d'enfants SLI
• Catts (1991-1993) :
– Compétences précoces en conscience phonologique prédictives des
capacités d'identification des mots écrits
– Compétences précoces lexicales et grammaticales corrélées au niveau
de compréhension en lecture
• Bishop et al (1987-1998) : 68 enfants SLI à 4 ans, réévalués à
5,6 ans :
30 langage oral dans les normes
38 déficit persistant
• Snowling, Bishop & Stothard (2000) : dans les deux groupes, le
taux de troubles du langage écrit augmente entre 8,5 et 15 ans.35% des
enfants des deux groupes avaient des performances normales en lecture à
15 ans
Les compétences orales de sujets
dyslexiques
• Les données largement établies
– Le quotient verbal vs performance
– La métaphonologie : une double évolution
• du mot jusqu'au phonème,
• de l'implicite à l'explicite
• Les études comparatives des autres aspects du langage
oral (articulation, morpho-syntaxe, accès lexical,
dénomination rapide, pragmatique…)
• Les études de cohortes
Troubles phonologiques: impact sur l'entrée dans l'écrit, les autres
domaines impliqués dans la maîtrise plus tardive de la lecture
Syntaxe et morpho-syntaxe
Epreuves de conscience morphosyntaxique
Epreuves de jugement grammatical
•Anomalie morphémique (e.g. Emilie joue avec son poupée, nous
suis heureux)
•Inversion de l’ordre des mots (e.g. jouons avec nos jouets nous,
elle enfant son embrasse)
Epreuve de correction d’agrammaticalité
•Idem, mais correction de l’erreur
Epreuve de réplication de fautes grammaticales
Leur père le lui donne
Troubles de la perception auditive
du langage chez les dyslexiques
• Très nombreuses études (et contestées…)
–
–
–
–
–
–
Perception catégorielle
Masquage rétrograde
Discrimination de fréquences
Modulation de fréquence
Perception dans le bruit
Traitement rapide des informations…
– Mais toujours autour de 50% des dyslexiques seulement
•Localiser une violation grammaticale dans une phrase
agrammaticale donnée comme modèle (e.g. Paul lance sa ballon)
et la transférer dans une phrase de structure similaire (e.g. il
écoute son frère).
Les études de cohortes d'enfants "à risque"
• Etudes initiales de Scarborough (1990, 1991) : mise en
évidence de déficits très précoces (2,5 ans) de la
longueur et complexité syntaxique des énoncés et la
précision articulatoire
• Jyväskylä Longitudinal Study of Dyslexia (Lyytinen et
al., 2001-2004) : dès les premiers jours de vie, les
enfants génétiquement à risque de dyslexie diffèrent
d'enfants témoins dans les potentiels évoqués auditifs
des sons de parole
5
Jyväskylä Longitudinal Study of Dyslexia
(Lyytinen et al., 2001-2004)
Enfants de 6 mois à risque familial de dyslexie : défaut d'activation
cérébrale par un stimulus déviant quant à ses caractéristiques
temporelles (/ata/ vs /atta/)
• À 6 mois ces différences sont décelables dans les
tâches d'orientation de la tête
• À 2 ans, les enfants à risque présentent un retard sur la
combinaison des mots
• À 3,5 ans, différences dans tâches phonologiques et
lexicales
• Retard d'apparition des premiers mots, faiblesse des
vocalisations et pauvreté du babil seraient de bons
prédicteurs
Suivi sur 9 ans de 107
enfants à risque familial et
93 sans risque familial
Un retard de parole à 2 ans persiste à 3 ans1/2 chez les enfants à risque familial
•Comparaison des lecteurs
et non lecteurs dans les
deux groupes :
•Dans le groupe à risque,
la présence de troubles du
langage précoce est
prédictive des troubles de
la lecture
•Dans le groupe non à
risque, le niveau de
langage n'est pas prédictif
•Le déficit phonologique à
5 ans est identique dans les
deux groupes
Origine différente
du trouble
phonologique?
6
La question du lien entre phonologie
et lecture
Etudes de cohortes : résumé
• Goulandris, Snowling & Walker (2000) ont comparé le langage oral, les
aptitudes phonologiques et la lecto-écriture chez des adolescents dyslexiques,
des SLI résorbés, des SLI persistants et des témoins : DYS et SLI-R ont des
troubles phonologiques, mais seuls DYS et SLI-P ont des troubles persistants
de l'écrit
• Snowling, Ghallager et Frith (2003) ont examiné à 8 ans des sujets à risque à
3 ans 9 mois : 63% présentaient des troubles de la lecture. Les autres étaient à
6 ans déficitaires en connaissance des conversions graphème-phonème. Leurs
meilleures capacités linguistiques générales expliqueraient leur évolution
favorable
• Carrol & Snowling (2004) : comparent des sujets à risque de dyslexie et des
sujets ayant des troubles de production phonologique : le devenir des deux
groupes est similaire, suggérant un mécanisme commun de défaut des
représentations phonologiques
•Déficit précoce de la perception auditive est prédicteur de
dyslexie (mais seulement dans la moitié des cas)
•La présence de troubles plus extensifs du langage est un facteur
de risque supplémentaire pour l'écrit
•Un déficit phonologique compromet l'entrée dans l'écrit
•Un déficit plus vaste du langage altère la compréhension et
l'efficience ultérieure en lecture et en orthographe
•L'association de troubles de divers aspects du langage oral
accentue le risque chez les sujets à risque familial de dyslexie
•La présence de troubles de la parole (réalisation phonologique)
accentue également le risque.
Effet d'un entraînement phonologique chez des
enfants dysphasiques (Chaix et al., en préparation)
Modalités de l'entraînement phono-morphologique
• 12 enfants, 8-12 ans, QI performance > 85
• Bilan de langage oral, phonologie et lecture avant et
après un entraînement en deux parties
MorphoExamples
phonological training
bûche - douche - cage What is the odd one ? lavabo - la bouche la porte
Common first
châle - jouet - cheveu What is the odd one ? boulanger phoneme
boulangère - étagère
Common embedded
cousine - lézard What is the odd one ? tombons - faisions phoneme
chaussette
marchons
Number of syllables question - couleur
Number of Words
le léopard est un
- rocher - souterrain animal sauvage / léo
part en voyage
How many times was facile - fantôme the sound /f/ heard ?
argent - face à face
– 4 SEMAINES ENTRAÎNEMENT VISUEL
– 4 SEMAINES : ENTRAÎNEMENT PHONOLOGIQUE et
morphologique
15 à 20 minutes d'exercices par jour
Protocole ayant démontré son efficacité dans la dyslexie
Effets sur les constantes phonologiques
Phonological Results A1 Results A2 Results A3
Overall
Awareness
training effect
(A1 vs A3)
SD
p value*
0,98
16,07
ns
< 0,0061
ns / < 0,012
ns / ns
2,09 3,20 1,63 1,64 2,97 1,09
58,90 28,42 48,00 24,22 42,09 20,14
ns
< 0,0181
ns / ns
ns /ns
3,54 3,20 3,63 2,90 2,69 3,27
74,00 26,00 63,36 18,36 53,00 20,42
ns
< 0,0094
ns / ns
ns /ns
SD Mea
n
SD Mea
n
1,54 1,86 2,45 0,98 0,82
63,09 19,56 55,00 13,39 45,9
Examples
Repeat the following
Words
couloir - céréale obtenir - moulin
Repeat and write the
following sentence
papa rince la vaisselle
/ la Corse est une île
Effets sur les constantes
linguistiques
Effect of visual
training (A1 vs
A2) / Effect of
language training
(A2 vs A3)
p value*
Mea
n
Ssyll Errors
Ssyll Time
(sec)
CVC Errors
CVC Time
(sec)
CCV Errors
CCV Time
(sec)
Phonological
training
Rhyme
Language
tasks
Exp synt
Rep Err
Rep Score
Voc
PF
SF
Comp Score
Results A1
Results A2
Mean SD
Mean
1,45
8,45
25,18
13,18
10,54
18,27
46,09
1,90
7,90
25,63
14,90
11,72
18,63
49,273
0,68
5,14
2,52
3,99
3,76
8,51
4,39
Results A3
SD Mean
1,13
6,26
2,01
4,13
4,67
8,93
3,95
2,90
6,81
26,18
17,54
13,18
21,90
50,81
SD
1,86
4,97
1,99
4,13
3,51
9,10
2,99
Overall
training
effect
(A1 vs A3)
p value*
< 0,0027
ns
ns
< 0,001
< 0,0388
< 0,0179
< 0,001
Effect of visual
training (A1 vs
A2) / Effect of
language training
(A2 vs A3))
p value*
ns / < 0,0288
ns / ns
ns / ns
ns / < 0,0021
ns / ns
ns / 0,0096
< 0,0037 / ns
7
Effets sur les tâches de lecture
Reading
Tasks
Reading
score
IW time
(sec)
IW CR
PW time
(sec)
PW CR
Results A1
Results A2
Results A3
overall
training
effect
(A1 vs A3)
p value*
ns
Effect of visual
training (A1 vs
A2) / Effect of
language
training (A2 vs
A3)
p value*
ns / ns
222,03 1359 244,89
ns
ns / ns
< 0,0008
ns
ns / < 0,0124
ns / ns
ns
ns / ns
Mean
SD
Mean
SD
Mean
SD
38,36
20,10
39,54
18,00
38,18
20,68
1481 343,51
1305
8,60
1417
3,23
9,50
376,39 1241
3,65
11,50 4,45
200,56 1280 228,12
11,1
4,60
5,40
11,18
Effet sur les tâches de
mémoire à court terme
11,54 5,27
Short-term
memory
tasks
Results A1 Results A2 Results A3
SD
p value*
Effect of visual
training (A1 vs
A2) / Effect of
language training
(A2 vs A3)
p value*
3,90
0,53
3,63
0,67
4,18
0,60
ns
ns / < 0,0037
3,09
0,70
3,18
0,60
2,81
0,60
ns
ns / ns
ns / < 0,0034
Mean SD Mean SD Mea
n
Digit span
forward
Digit span
backward
Familiar
word span
Unfamiliar
word span
Non words
repetition
Visuospatial span
Overall
training
effect
(A1 vs A3)
3,90
0,83
3,72
1,00
4,27
0,78
< 0,0387
3,45
0,68
3,72
0,64
3,63
0,80
ns
ns / ns
3,00
0,77
2,90
0,83
3,36
0,67
ns
ns / < 0,0282
5,09
1,37
4,90
1,37
5,54
0,93
ns
ns / < 0,0151
En conclusion (étude d'entraînement
phono-morphologique)
En conclusion (étude d'entraînement
phono-morphologique)
• Amélioration significative de variables
linguistiques non phonologiques :
• Pas d'effet significatif sur les variables
phonologiques (conscience phono et processus
phono en lecture)
• Effet probablement non spécifique sur la
mémoire auditivo-verbale
– Lexicales : vocabulaire, accès au lexique
– Syntaxiques : expression syntaxique (closure
grammaticale), compréhension (ECOSSE)
–Moindre sévérité du trouble que chez les dyslexiques?
–Mécanisme différent?
–Intérêt d'un entraînement plus précoce?
–Intérêt d'un suivi plus prolongé?
Perspectives
• Prise en considération d'un domaine plus vaste
de variables linguistiques (narration,
pragmatique, fonctions exécutives, théorie de
l'esprit)
• Recherche du substrat neurobiologique des
anomalies et de leur amélioration sous l'effet de
thérapeutiques
8