Éthique et performance
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Éthique et performance
Les Conférences de la Mission laïque française Éthique et performance Les Conférences de la Mission laïque française Éthique et performance Préface La Mission laïque française questionne son propre fonctionnement dans l’exercice constant des valeurs qui la fondent. Pour nourrir sa réflexion, elle a organisé, à Paris, en mai 2008, un séminaire dédié aux personnels d’encadrement de son réseau mondial, dont le thème était Éthique et performance. Le dessein de la Mission laïque est d’agir toujours avec la conscience de sa responsabilité, ainsi pose-t-elle les interrogations qui traversent son action : que serait la performance sans éthique et comment mesurer la performance en termes d’éthique ? Pour traiter de cet enjeu majeur, Jean-Pierre Villain, alors directeur général de la Mission laïque française a fait appel à deux experts éminents dont les conférences font l’objet de ce recueil. Bernard Toulemonde, professeur de droit public, s’interroge sur la façon de concilier deux objectifs en apparence éloignés : performance/efficacité – service public/égalité des chances. Jean-Marc Monteil, professeur et chargé de mission auprès du Premier ministre, centre quant à lui son discours sur la responsabilité de l’école et de son personnel face aux élèves ; il insiste sur la nécessaire distinction entre performance et qualité. La nécessité de se confronter à la réalité d’un monde en évolution, sans pour autant perdre de vue les valeurs fondatrices de l’École républicaine ni le respect de l’élève, conduit à aborder des questions difficiles auxquelles les deux intervenants apportent leurs réponses. Qu’ils soient remerciés de nous avoir autorisés à les publier. Marcelle Barry Chef du service communication et développement de la MLF Éthique et performance 3 Sommaire >9 Éthique et performance : questions préalables Bernard Toulemonde PROFESSEUR DE DROIT PUBLIC > 33 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire Jean-Marc Monteil PROFESSEUR ET CHARGÉ DE MISSION AUPRÈS DU PREMIER MINISTRE Éthique et performance 5 Éthique et performance : questions préalables Bernard Toulemonde PROFESSEUR DE DROIT PUBLIC Professeur de droit public à la Faculté de droit de Lille, Bernard Toulemonde a été appelé au cabinet du Premier ministre, Pierre Mauroy, en 1981. Il a ensuite exercé une carrière de haut fonctionnaire de l’Éducation nationale, au ministère (directeur des affaires générales 1982-1987, directeur de l’enseignement scolaire 1998-2000) et dans les rectorats (Montpellier 1988-1991, Toulouse 1991-1992), ponctuée d’un passage au cabinet de Jack Lang (1992-1993), avant de la terminer à l’Inspection générale (1993-1998 ; 2000-2005). Bernard Toulemonde milite au sein de l’Association française des administrateurs de l’éducation (AFAE), dont il a été le président de 2002 à 2005. 8 Éthique et performance : questions préalables Éthique et performance : questions préalables* Joëlle Dusseau C’ est un vrai honneur pour moi de venir vous faire part d’un certain nombre de réflexions, de vous aider dans votre travail si c’est possible. Je dois dire que je connais la Mission laïque française depuis longtemps, avec laquelle je travaille depuis de très nombreuses années. Jean-Pierre Villain1 m’a demandé de réfléchir avec vous et d’être le fil rouge de cette semaine sur Éthique et performance. Je crois que c’est un sujet qui est de plus en plus au cœur de notre problématique. On parle beaucoup de performance, de résultat, d’efficacité, on a même employé le mot efficience. La pression est de plus en plus forte. Et au fond dans ce mouvement très pressant, la question est : « Comment ne pas perdre notre âme ? ». Comment concilier les valeurs auxquelles nous croyons, que nous essayons de promouvoir, qui sont les valeurs du service public, les valeurs d’égalité des chances de tous les enfants ? Le programme qui a été bâti va nous permettre effectivement – à moi aussi – d’apprendre sur ce sujet. Je dois dire que je suis particulièrement heureux qu’on ait réussi * L’auteur a volontairement conservé le style familier d’une intervention orale qui correspond bien à l’esprit de la rencontre. 1 - Directeur général de la Mission laïque française de 2003 à 2009. Éthique et performance : questions préalables 9 à avoir parmi nous Alain Bouvier, qui va venir demain. Quand il était recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, dans le cadre de l’Association française des administrateurs de l’éducation (AFAE), nous avions fait avec lui un colloque intitulé Piloter par les résultats ? Que signifie « piloter par les résultats » ? ; et cela fait déjà quelques années. Alain Bouvier vient de sortir un livre extrêmement intéressant sur la gouvernance du système éducatif2. Anne Barrère, une femme absolument époustouflante dans ses propos, est l’auteur de l’enquête Sociologie des chefs d’établissement, les managers de la République3 – peut-être que certains d’entre vous l’ont lu, en tout cas je vous en conseille sérieusement la lecture. Elle est sociologue, et travaille à l’université de Lille III. Pour cette enquête, elle a vécu avec les chefs d’établissement du Nord-Pas-de-Calais. Elle fait état des résultats de sa recherche et de la façon dont elle a vu le travail de ces chefs d’établissement, et vous verrez que ce livre est aussi extrêmement intéressant ; je pense que son propos nous aidera beaucoup. Nous avons donc beaucoup de perspectives au cours de ces conférences, à nous écouter les uns et les autres. À propos de l’entreprise, qui est sans doute la pionnière en matière de performance, posture posant des problèmes éthiques – du moins le souhaitons-nous aux responsables des entreprises privées. Le sport aussi pose des problèmes éthiques extrêmement graves ; en vingt ou trente ans, il a été atteint à la fois par les performances et la réussite à tout prix, y compris par le dopage. Les médias sont aussi confrontés à ces problèmes d’éthique : être le premier à annoncer un événement ou que telle personne vient de mourir avant même qu’elle ne soit morte, etc. – comme l’a fait telle radio française récemment. Et cela nous gagne petit à petit, pour un certain nombre de raisons. 2 - Bouvier (Alain), La gouvernance des systèmes éducatifs, PUF, 2007. 3 - Barrère (Anne), Sociologie des chefs d’établissement, les managers de la République, PUF, 2006. 10 Éthique et performance : questions préalables Je vais essayer de poser quelques jalons. Je ne prétends pas répondre à toutes les questions, au contraire, mais attirer notre attention sur un certain nombre de points, qui nous permettront peut-être d’éclairer ce qui va se passer au cours de ces trois jours. Les premiers jalons que je voudrais poser, c’est le pourquoi des choses. Pourquoi cette pression sur les performances ? Pourquoi cette émergence de la performance dans nos sociétés et à l’intérieur des sociétés, dans les différentes institutions et en particulier, ce qui nous intéresse aujourd’hui, dans les institutions scolaires et universitaires ? Et dans un deuxième temps, peut-être réfléchir au sens, à la signification de ces performances, leurs enjeux et justement à quelques points de relation avec l’éthique et les valeurs que nous essayons de promouvoir. Le premier point est une interrogation sur les raisons de cette percée de la performance dans les systèmes éducatifs. On assiste depuis quelques années à l’émergence d’une logique de performances, d’une logique de résultats qui s’installe dans les systèmes éducatifs. Première chose que l’on peut dire sur ce sujet : cette logique de performances n’a jamais été totalement absente du système, au contraire. Mais c’est son objet qui évolue. La performance du système ne concernait autrefois que les élèves. Aujourd’hui, on passe des élèves à un autre objet qui est l’établissement, l’académie, le système éducatif. C’est-à-dire qu’on a une évolution de l’objet sur lequel porte l’évaluation, sur lequel portent les performances. La situation est d’ailleurs un peu paradoxale. Parce que dans les établissements scolaires, depuis de nombreuses années (depuis quasiment toujours), on passe une bonne partie de notre temps à noter, à évaluer les élèves, c’est-àdire à regarder leurs performances, leurs résultats. Il y a bien des choses à dire Éthique et performance : questions préalables 11 sur ce sujet. La notation est-elle vraiment la performance d’un élève ? Que mesure-t-on au travers de la notation ? Des auteurs ont soulevé ces problèmes récemment, puis aussi la façon dont on mesure les choses. Vous savez bien que la correction des copies n’est pas quelque chose de totalement objectif, indépendant de tout et vous connaissez l’ouvrage d’un mathématicien qui a sorti un livre sur la constante macabre dans les établissements scolaires4. Il exagère un peu, mais il y a du vrai ; il explique que quand on donne des copies à un correcteur, on a toujours trois paquets : un paquet de bonnes copies, un paquet de moyennes et un paquet de médiocres, quel que soit finalement le niveau réel des élèves. C’est quand même assez intéressant. Tout cela peut nous encourager, dans les établissements scolaires, à faire des devoirs communs pour éviter les habitudes de tel ou tel type de correcteur, distribuer les copies de façon aléatoire entre les correcteurs d’un établissement scolaire, justement pour les habituer à réfléchir sur leurs échelles de notation. Bref, nous passons beaucoup de temps à la notation des élèves, mais on a résisté et on résiste encore largement à l’évaluation des performances de l’établissement ou du système éducatif. Cette culture de l’évaluation a beaucoup de mal à s’installer dans les établissements scolaires, moins dans l’encadrement, car il est lui-même parfaitement conscient des choses, que chez les enseignants ; beaucoup d’entre eux ont du mal à admettre qu’on puisse évaluer les performances d’un établissement scolaire, d’un système éducatif. Et on a toujours de bonnes raisons pour dire que cela n’est pas valable. Or, ce qui est en train de se produire, c’est précisément ce glissement. De plus en plus, le système est lui-même soumis à évaluation au milieu d’une résistance assez générale qui a beaucoup de mal à se mettre à cette nouvelle culture. C’était la première remarque que l’on pouvait faire sur ce premier point. 4 - Antibi (André), La constante macabre ou comment a-t-on découragé des générations d’élèves ?, Toulouse, éditions Math’Adore, 2003. 12 Éthique et performance : questions préalables La deuxième remarque, ce sont les sources. Quelles sont les sources de cette émergence de la performance, de l’obligation de résultat dans les systèmes éducatifs, et en particulier dans le système éducatif français ? À mon sens, il y a trois sources qui conduisent à cela. La première source – dont je vais parler assez longuement – est ce que l’on pourrait appeler rapidement la mondialisation. La seconde source, c’est la volonté de réforme de l’État. Et la troisième source, c’est la raréfaction des moyens publics. Première source, qui me paraît fondamentale, une sorte de raz de marée dans tous les pays occidentaux : c’est l’exigence liée à la mondialisation, à la compétition internationale et en particulier à la construction de l’Europe. La compétition économique internationale implique un haut niveau d’éducation, et donc que les établissements et les systèmes éducatifs soient plus performants. Cela se traduit par toute une série de politiques menées par les pays, et quelquefois même par l’Europe elle-même, bien que la compétence éducative ne fasse pas partie des compétences de l’Union européenne. Sur ce point, je peux vous conseiller une lecture extrêmement intéressante (je dois dire que nous avons à faire à des chercheuses qui sont de très haut niveau maintenant) de Nathalie Mons, Les nouvelles politiques éducatives, la France fait-elle les bons choix ?5 Nathalie Mons compare 39 pays de l’OCDE et analyse leurs politiques actuelles, pour voir comment se situent les différents pays – en particulier la France – par rapport aux politiques nouvelles qui sont mises en œuvre au niveau de l’OCDE. C’est un livre qui nous permet de nous situer nous-mêmes par rapport à ces politiques, et en même temps peut-être prévoir l’avenir. Car je crois profondément qu’on n’arrêtera pas la construction de l’Europe, ni la mondialisation et que par conséquent, la France se mettra un 5 - Mons (Nathalie), Les nouvelles politiques éducatives, la France fait-elle les bons choix ?, PUF, 2007. Éthique et performance : questions préalables 13 jour ou l’autre à la norme internationale ; cela me paraît l’évidence même et c’est une condition de survie. Nous avons d’ailleurs des atouts pour cela. Si on regarde un peu dans ces nouvelles politiques fondées sur la performance, prenons le blairisme. Tony Blair est tout à fait représentatif de ce type de politique : il a parlé d’autonomie et même d’indépendance de l’établissement, de choix des parents, d’évaluation externe des établissements par un organisme pas du tout comme chez nous, consanguin – l’OFSTED (Office for standards in education). C’est autre chose. L’Union européenne joue aussi un rôle dans tout cela, même si nous n’en sommes qu’aux balbutiements. Vous avez entendu parler du processus de Lisbonne, du processus de Bologne, du processus de Copenhague, et des objectifs communs mis en place dans les pays de l’Union européenne. D’ici 2010 ou 2012, nous devrons avoir accompli un certain nombre de progrès sur la maîtrise des compétences de base, les sorties sans qualification, l’achèvement du cycle secondaire par tous les élèves, le nombre de diplômés en mathématiques et technologies etc. Des objectifs communs sont fixés dans le cadre de l’Union européenne et s’appliquent à tous les pays membres. Parallèlement, et c’est là que cela pose problème parce qu’il ne s’agit pas seulement de définir des politiques, il s’agit de mettre en place des instruments d’évaluation de l’accomplissement de ces politiques. Or, que se passe-t-il depuis plusieurs années ? Des instruments internationaux d’évaluation des systèmes éducatifs se mettent en place. Vous avez entendu parler de Pisa : des élèves de quinze ans, quel que soit leur lieu de scolarisation ou leur classe, sont évalués pour leurs compétences. En France, les premiers résultats n’ont pas été très favorables, et nous avons mis en cause l’instrument de mesure. Mais comme ces résultats persistent, on commence désormais à s’inquiéter et à se dire que l’instrument n’est peut-être pas si mauvais que cela. Il y a peut-être des conséquences à en 14 Éthique et performance : questions préalables tirer. En Allemagne par exemple, la précédente enquête Pisa a fait un coup de tonnerre, parce que les résultats étaient mauvais. Les Allemands se sont alors retroussé les manches, en se demandant ce qu’ils pouvaient faire pour essayer de les améliorer. En France, nous changeons progressivement d’attitude, puisque les résultats ne sont pas fameux – nous sommes autour de la moyenne en dépensant plus que les autres. Cela commence à poser problème et nous sommes même mauvais dans certains des items, notamment concernant l’apprentissage des langues étrangères. Vous avez entendu parler d’une autre enquête portant cette fois sur le primaire : l’enquête Pirls, qui vient de sortir récemment. Les enfants sont évalués à la fin de la quatrième année de l’école obligatoire ; on leur fait passer des batteries de tests pour savoir quelles sont leurs compétences. La France se révèle là aussi être un pays qui n’a pas de bons résultats, en particulier au regard des pays de l’Union européenne. Petit à petit, avec lenteur, on commence en France à s’intéresser aux enquêtes internationales, qui montrent que notre système éducatif n’est pas aussi performant qu’il pourrait l’être. Je pense maintenant que nous sommes davantage dans l’idée d’essayer d’en tirer des conclusions pour voir comment améliorer la situation de nos élèves. D’ailleurs, je vous signale que même pour les apprentissages, dans les programmes, s’introduisent à l’heure actuelle des éléments qui ne sont plus seulement des programmes habituels avec la liste des savoirs académiques que les élèves doivent posséder ; mais progressivement s’introduit aussi une logique d’acquisition de compétences au travers des référentiels de compétences. D’ailleurs dans l’enseignement professionnel et technologique, on connaît depuis longtemps des référentiels de compétences. Mais comme d’habitude, cela concerne l’enseignement professionnel et technologique, et n’intéresse pas les autres ; c’est bien dommage. En éducation physique et sportive aussi, on Éthique et performance : questions préalables 15 trouve des référentiels de compétences. Actuellement, c’est en train de gagner l’enseignement général : le socle commun de connaissances et de compétences par exemple, est une nouveauté dans le système français – il s’agit de donner une sorte d’obligation de résultats aux établissements scolaires. J’y reviendrai tout à l’heure, car cela pose des problèmes extrêmement importants. Cette logique est aussi à l’œuvre avec le Cadre européen commun de référence pour les langues. Avez-vous entendu parler du CECRL ? On introduit progressivement dans les langues vivantes le référentiel de compétences élaboré par le Conseil de l’Europe. Maintenant les élèves ne sont plus seulement évalués sur des savoirs académiques en langue anglaise ou autre, mais sur des compétences. Cette logique de résultats gagne également la gestion des personnels. Elle a gagné depuis quelques années les personnels de direction gérés par le ministère de l’Éducation nationale. Que signifie demander à un chef d’établissement le diagnostic de son établissement ? : c’est lui donner une lettre de mission et évaluer quelques années plus tard sa capacité à atteindre ou non les objectifs fixés ; nous sommes dans une logique de résultats. Pour les enseignants, nous avons découvert qu’être enseignant, c’était un métier. Cela veut dire que ces métiers s’apprennent. Et comme vous le savez, il y a quelques années, nous avons sorti un nouveau cahier des charges des IUFM (les instituts chargés de former les enseignants), dans lequel nous avons listé les compétences attendues d’un enseignant. Il ne s’agit pas seulement d’être le professeur qui connaît sa matière à fond, mais aussi d’être un professeur qui sache communiquer et travailler collectivement dans son établissement. C’est une très grande nouveauté qui suscite évidemment chez les enseignants beaucoup de réserve, voire 16 Éthique et performance : questions préalables d’hostilité pour un certain nombre d’organisations syndicales. Je signale simplement que cette logique du résultat gagne progressivement du terrain6. Donc, la première source de ce mouvement vers la performance est la mondialisation, l’internationalisation qui se produit dans le monde d’aujourd’hui. Deuxième source : la réforme de l’État. Au fond, ce n’est qu’une variante du premier thème. Le premier thème lui-même comporte une réforme de l’État. Dans tous les pays européens et même d’autres j’imagine, se sont développées des politiques appelées new public management (le nouveau management public), c’est-à-dire une nouvelle façon de travailler pour les services publics et pour l’État. D’ailleurs en France, ce n’est pas complètement nouveau, puisqu’en 1989 le Premier ministre Michel Rocard avait parlé de renouveau du service public, et avait été le premier à dire qu’il existait peut-être une logique de résultats et d’efficacité du service public et de l’administration. Cette logique continue à être en œuvre aujourd’hui, avec la recherche de nouvelles méthodes – en particulier d’administration ou de gestion – qui soient plus efficaces que les précédentes. Par exemple, on assiste aujourd’hui en France à la mise en place de nouveaux modes de relations et de fonctionnement au sein des administrations et entre les administrations et les établissements scolaires : Le pilotage par objectif, c’est-à-dire par projet : analyser la situation et mobiliser l’ensemble de la collectivité éducative sur des objectifs. La contractualisation se développe aujourd’hui en France, plus ou moins vite selon les académies. Il s’agit de la signature de contrats d’objectifs 6 - Depuis cette conférence, la « masterisation » du recrutement nous conduit dans une direction inverse. Éthique et performance : questions préalables 17 entre les établissements scolaires et les autorités académiques : on se met autour de la table, on discute des objectifs, les autorités académiques et l’établissement s’engagent sur certains résultats. Le pilotage par évaluation. Nous avons fait des progrès à ce sujet et nous avons eu un grand directeur à la tête de la Direction d’évaluation de la prospective, Claude Thélot, qui a fait faire des progrès au ministère de l’Éducation nationale sur l’évaluation des établissements scolaires et du système. Je vais peut-être dire de temps en temps des choses qui ne vont pas faire plaisir, mais je dis les choses telles que je les pense et il me semble qu’elles doivent être dites, car honnêtement, faire 100 % de résultats au baccalauréat en série S dans tel lycée, je sais le faire. Ce n’est pas très éthique, mais je sais le faire : je n’inscris que de bons élèves, en envoyant tout ce qui est médiocre vers STG (Sciences et technologies de la gestion) pour ne conserver que les bons, et j’ai 100 % du résultat. Des établissements se livrent à cela, c’est bien clair. Et justement, pour éviter cet effet palmarès – dont les médias sont très friands – qui encourage le consumérisme scolaire d’un certain nombre de parents et de familles, notamment celles des milieux favorisés et des classes moyennes et parmi elles, celles des cadres moyens de l’Éducation nationale, la Direction de l’évaluation de la prospective a établi des indicateurs, les IPES (Indicateurs pour le pilotage des établissements de second degré). Parmi eux, on trouve le taux d’accès, qui mesure les enfants qui rentrent en seconde et obtiennent le baccalauréat dans l’établissement. Évidemment, tout cela est à analyser avec beaucoup de précaution, parce qu’il faut interpréter ces chiffres. On trouve aussi des indicateurs permettant d’évaluer la plus-value des établissements scolaires. Je lisais il y a trois ou quatre semaines dans Le Monde, que le lycée de Châteaudun, lycée ordinaire, avait obtenu d’excellents résultats dans les évaluations de la Direction de l’évaluation de 18 Éthique et performance : questions préalables la prospective. Le chef d’établissement expliquait qu’avec l’ensemble de ses équipes éducatives, il avait décidé d’orienter toutes les marges de manœuvre sur les élèves de seconde pour les porter et les aider vers une individualisation de l’enseignement, des travaux de petits groupes etc., de façon à les aider à réussir. Voilà tout simplement comment un établissement, dans le cadre de son autonomie, peut essayer d’aider ses élèves. De nouveaux modes de pilotage se mettent en place, mais nous avons aussi dans cette réforme de l’État quelque chose de tout à fait fondamental : la LOLF, loi organique sur les lois de finances. Là aussi, cela peut être la meilleure et la pire des choses. Je crains assez souvent que cela ne prenne une tournure purement bureaucratique, alors que cela pourrait être un excellent instrument. Outre le fait que cela permette un contrôle du Parlement beaucoup plus sérieux qu’il ne l’était précédemment, le ministre présente désormais des programmes pour lesquels il indique des objectifs chiffrés, et le Parlement lui alloue les moyens pour accomplir ces objectifs. Chaque année, les ministres doivent rendre compte de l’accomplissement de leurs objectifs. Même chose au niveau des académies : en France aujourd’hui, chaque recteur est à la tête de budgets opérationnels de programmes (il y en a quatre) pour chacun desquels il détermine des objectifs, et doit rendre compte dans un rapport annuel de performances. Nous sommes donc dans une logique financière très articulée sur des indicateurs de résultats. Au fond, cela renvoie non seulement à l’efficacité, mais aussi à l’efficience ; la distinction entre efficacité et efficience est la suivante : l’efficience réintroduit le coût et désigne le meilleur résultat au moindre coût. Cette loi est donc un outil extrêmement intéressant. Ce que je regrette, c’est que les indicateurs ne soient pas toujours pertinents ; certains d’entre eux le sont, d’autres non. Il faut aussi bien voir que ce qui se produit aujourd’hui en France au milieu de hoquets et de criailleries, c’est le remodelage du paysage institutionnel : on introduit dans le système éducatif à la fois la décen- Éthique et performance : questions préalables 19 tralisation – à chaque fois qu’on introduit un peu de décentralisation, on nous dit que c’est la fin du service public national… – et la déconcentration. Cela signifie gérer la proximité, et on sait combien il est difficile de le faire en matière de gestion du personnel, car dans notre pays il n’est bon bec que de Paris. Par conséquent, si vous n’êtes pas gérés par les ordinateurs parisiens, ce n’est pas bien. Or, excusez-moi, il suffit d’avoir été sur le terrain pour savoir qu’on peut faire un peu de gestion des ressources humaines au niveau local, ce qui est impossible au niveau national. Parce que lorsque vous avez à faire à 330 000 instituteurs et 400 000 professeurs du second degré, vous faites de la confection industrielle et non des costumes sur mesure. Petit à petit, ce paysage institutionnel évolue et cela ne s’arrêtera pas quoi qu’il arrive, parce que progressivement notre pays s’aligne sur les standards internationaux. Troisième et dernière source de cette exigence de résultats : la raréfaction des moyens publics. La contrainte financière est devenue terrible. Je pense qu’une partie de nos concitoyens n’a pas encore cela en tête, mais c’est ainsi. Aujourd’hui, on insiste donc sur la performance et sur l’efficience, c’est-à-dire qu’on réintroduit l’efficacité par rapport au coût, pour essayer de déterminer la meilleure efficience possible. Cela implique qu’aujourd’hui les coûts de personnel sont très comprimés. Il faut bien voir une chose : vous avez peut-être dans vos budgets des dépenses de personnel, contrairement à vos collègues français en France qui ne savent pas quel est le coût des personnels. Le budget d’un EPLE (établissement public local d’enseignement) tel qu’on le vote aujourd’hui, représente uniquement la subvention de la collectivité territoriale, plus quelques minces filets de crédit d’État. Excusez-moi, mais cela ne représente même pas 20 % du budget, parce que les 80 % restant, c’est la partie immergée 20 Éthique et performance : questions préalables de l’iceberg, c’est-à-dire les dépenses de personnel. Justement, un effort est fait dans le cadre de la LOLF pour notifier aux établissements scolaires leurs dépenses de personnel, de façon à ce qu’une sorte de vérité des prix apparaisse. On ne peut pas toujours dire : « Je voudrais des postes supplémentaires ». Je comprends très bien qu’on ait besoin de postes supplémentaires, mais il faut aussi qu’on sache combien cela coûte. Une sorte de vérité des prix est donc en train de s’installer de ce point de vue. Mais à cause de cette raréfaction des moyens publics, une exigence très forte de compte rendu existe aujourd’hui. Moi qui ai aussi connu la période précédente, je peux dire honnêtement qu’on ne rendait pas beaucoup de comptes, et même pas de comptes du tout. Les chefs d’établissement un peu, mais au niveau des enseignants, excusez-moi, mais la visite de l’inspecteur n’est pas vraiment un compte rendu. Aujourd’hui, les choses sont radicalement en train de changer, et je vous le disais tout à l’heure, les chefs d’établissement eux-mêmes sont amenés, y compris dans leur propre gestion, à rendre des comptes : on vous fixe des objectifs dans le cadre de votre lettre de mission, et vous allez en rendre compte quelques années plus tard (qu’ai-je fait par rapport aux objectifs que l’autorité académique m’avait fixés après que j’ai moi-même proposé des objectifs et un diagnostic de l’établissement ?). Concernant les inspections des enseignants, on fonctionne encore sur un système ancien dont la valeur est tout à fait discutable. Mais on s’oriente de plus en plus sur un système non pas seulement d’inspection, mais d’évaluation des enseignants par rapport à un compte rendu d’activité. D’ailleurs, certains chefs d’établissement demandent eux-mêmes un compte rendu d’activités à leurs enseignants. Vous en avez parfaitement le droit, il suffit simplement de le faire avec tact et mesure, de choisir le bon moment, d’être opportuniste. Éthique et performance : questions préalables 21 L’État demande aujourd’hui des comptes aux établissements scolaires, puisque par le biais de la LOLF et des rapports annuels de performance, les établissements scolaires doivent également rendre compte de leurs performances. Les collectivités territoriales qui financent de plus en plus ce système, demandent aussi des résultats pour un certain nombre d’entre elles. Je conseille moi-même un Président de Région (Haute-Normandie) : la moitié du budget de cette région passe dans la formation continue et les lycées ; les élus – qui ne sont pas très éloignés du système éducatif, une bonne partie d’entre eux étant enseignants ou anciens enseignants – paient aujourd’hui énormément et se demandent ce que fait le système éducatif par rapport à cela. Je dois dire par exemple qu’en Haute-Normandie, une région située à un carrefour international près de la Grande-Bretagne, les élus commencent à s’énerver à propos de la question des langues vivantes étrangères, parce que les élèves sortent du lycée sans pratiquer vraiment la langue anglaise. Cette logique de performances est aujourd’hui fortement à l’œuvre. Encore faut-il se mettre d’accord sur ce qu’est une performance au sein du système éducatif, et là commence une série de problèmes, parmi lesquels des problèmes éthiques très importants. J’en viens à la deuxième partie de cette conférence : sens et enjeux des performances. Qu’est-ce qu’une performance en éducation ? Je signale que Jean-Pierre Villain a écrit performance au singulier et pas au pluriel. Je me suis interrogé pour savoir s’il y avait un sens à cette singularité, mais je n’en ai pas trouvé. En quoi cette culture de la performance peutelle s’écarter, voire éventuellement contredire des objectifs d’éducation, 22 Éthique et performance : questions préalables des objectifs éthiques, des objectifs moraux ? En tout cas, la méthodologie de l’évaluation, les indicateurs de performances etc., peuvent être à mon sens interrogés et doivent être discutés. Il faut que nous ayons nous-mêmes quelques éléments sur les jugements à porter du point de vue éthique par rapport à ces instruments. D’abord, il faut bien dire qu’il y a beaucoup d’insuffisance et de méconnaissance ; nous sommes très loin de pouvoir juger et évaluer toutes les performances du système éducatif. Nous n’en sommes qu’aux balbutiements des instruments et des indicateurs. J’évoquais tout à l’heure la notation des élèves : la notation des élèves est-elle vraiment une évaluation des élèves ? Je vous laisse y répondre. Là-dessus justement, peut-être est-il possible de faire des progrès. Bref, il faut avoir conscience des limites et des possibles dérives. Première question qu’on peut se poser sur le sens et les enjeux des performances : peut-on mettre l’éducation en chiffres ? Il existe une tentation, une dérive possible, de nature technocratique : tout mettre en chiffres et croire que c’est cela qui va nous donner des solutions et nous permettre d’approcher la vérité, ou la performance réelle des élèves. Deux écueils sont à éviter. Premier écueil à éviter : se focaliser exclusivement sur les chiffres. Si on se focalise exclusivement sur le mesurable, on va avoir tendance à gommer, à oublier les acquis non mesurables ou difficilement mesurables. Au fond, la question que nous devons nous poser à cet égard concerne l’éducation : le résultat en éducation est-il réductible à une batterie d’indicateurs ? Je prends comme exemple le socle commun de connaissances et de compétences – j’ai repris les textes pour essayer de vous montrer la complexité de cette question, combien les incertitudes sont aujourd’hui nombreuses, et on ne peut pas dire que les chiffres peuvent tout résoudre. Éthique et performance : questions préalables 23 Comme vous le savez, le socle commun de connaissances et de compétences est issu de la loi Fillon de 2005 sur l’éducation, concrétisée par un décret du 11 juillet 2006 appliqué à compter de la rentrée 2006. Comme vous le savez, on a déterminé dans ce socle commun sept compétences, parmi lesquelles certaines ne sont pas habituellement évaluées dans le système éducatif et pour lesquelles les outils de mesure sont tout à fait parcellaires, voire inexistants. Ceux-ci sont très utiles pour mesurer les acquis en langue française, éventuellement en langues vivantes, mais quand on en vient à la compétence nommée culture humaniste, ils sont déjà moins adaptés. Or, quand on en vient aux compétences sociales et civiques des élèves, comment les mesurer ? C’est une vraie question car on n’a pas toujours les instruments ; du moins faut-il faire preuve de créativité pour en trouver. Enfin, la dernière compétence parmi les sept, qui me paraît tout à fait capitale dans le monde d’aujourd’hui, mais qu’on ne sait pas vraiment évaluer, est l’autonomie et l’esprit d’initiative des élèves. Comment évaluer cela ? C’est compliqué. Cela n’est pas mesurable selon nos habitudes et nos instruments traditionnaux ; il faut faire preuve d’imagination. En outre, dans ce socle commun figure pour chacune des sept compétences, une déclinaison de ce qui est attendu des élèves. Peut-être connaissez-vous cela par cœur et j’enfonce des portes ouvertes n’est-ce-pas ? À chaque fois, il y a trois éléments ; comment va-t-on les évaluer ? : Premier élément : les connaissances exigées. On sait à peu près faire, encore que cela demande à être regardé de près. Deuxième élément : les capacités (l’élève est capable de faire ceci ou cela). C’est déjà plus compliqué, et on a moins l’habitude d’évaluer cela. Troisième élément : les attitudes, les comportements. Comment juger et évaluer cela ? 24 Éthique et performance : questions préalables On voit bien toutes les dérives auxquelles les choses pourraient donner lieu si on n’était pas attentif et si on n’adoptait pas de règles morales et éthiques. J’ai pris cet exemple du socle commun de connaissances et de compétences pour vous montrer la complexité qu’il y a à éviter l’écueil de se focaliser exclusivement sur le mesurable. Même chose pour les indicateurs de la LOLF. Je ne vais pas vous lire la loi de finances maintenant, mais sachez qu’un volume très épais est consacré à l’éducation et que pour chacun des programmes, est déclinée toute une série d’actions auxquelles sont fixés des objectifs de performance, avec souvent des indicateurs chiffrés. Par exemple : augmenter la proportion d’élèves des milieux sociaux défavorisés atteignant le niveau du baccalauréat. Là aussi, cela mérite réflexion : certains indicateurs risquent d’être imparfaits ou inadaptés. Je prends un exemple : un des indicateurs figurant cette année dans la loi de finances pour le programme « Vie de l’élève », est le taux de participation aux élections lycéennes. Estce un bon indicateur ? Je demande à le discuter, parce que là aussi, il est aisé de faire du chiffre. Autre chose : pour la qualité des professeurs des écoles, il existe cinq indicateurs dont l’un est la proportion de professeurs des écoles inspectés chaque année. Y a-t-il une relation entre l’inspection et la qualité de l’enseignement ? Je m’interroge. Il faut toujours s’interroger sur les méthodes d’évaluation des performances, et nous poser une série de questions. D’ailleurs, ces indicateurs posent la question de nos missions : fondamentalement, quelle mission la Nation nous fixe-t-elle ? Est-ce simplement celle de délivrer des diplômes ? Est-ce de faire des têtes bien pleines ? Ou est-ce de former des citoyens, des hommes et des femmes capables d’initiative, d’insertion professionnelle etc. ? Il faut éviter l’écueil du chiffrage pur et simple par le mesurable pur et simple. Deuxième écueil possible : faire du chiffre. Ce n’est pas complètement nouveau, et dépend de l’éthique et de la responsabilité des chefs d’établissement Éthique et performance : questions préalables 25 et des enseignants. Je disais tout à l’heure qu’un chef d’établissement moyennement habile peut parfaitement réussir à avoir 100 % de résultats au baccalauréat S dans son établissement ; parce qu’il va utiliser certaines méthodes. Cela est totalement contraire aux principes du service public, et aux principes que nous partageons tous ici. Par exemple les redoublements : je crains beaucoup une dérive consistant à juger les chefs d’établissement par rapport au taux de redoublement et à les sommer de réduire ce taux. C’est un excellent objectif car la France est un des rares pays au monde avec tant de redoublements. Mais il y a deux manières d’atteindre cet objectif : on peut faire du chiffre – il suffit que le chef d’établissement décide de faire passer les élèves –, ou bien faire vraiment le travail, sans abaisser les niveaux d’exigence, grâce à l’individualisation, au soutien etc. pour prévenir les redoublements. Il y a donc différentes méthodes auxquelles il faut à chaque fois être attentifs : la méthode morale et éthique, et une autre qui l’est tout de même moins. Les options au baccalauréat sont aussi un bon exemple. Je sais que c’est un vaste sujet en ce moment et j’ai aussi ma petite idée sur la question. Le choix de certaines options est guidé exclusivement par une dérive du chiffre – avoir des points pour le bac – et non dans un projet éducatif. On sait que cette pratique est malheureusement répandue dans le système. Deuxième question : la pertinence de ces chiffres et la pertinence des résultats. Quand j’inspectais et quand un principal de collège très souriant m’accueillait, puis me présentait son établissement en me disant qu’il était très content parce qu’il avait augmenté de 3% les résultats au brevet, je restais de marbre. Il se demandait pourquoi. Là aussi, le brevet des collèges est-il un résultat pertinent ? La réponse est non, et vous savez pourquoi : il suffit de comparer les notes de contrôle continu par rapport aux notes des épreuves terminales. Dans un département français que j’ai évalué, 26 Éthique et performance : questions préalables j’avais fait le petit calcul, ainsi que la courbe entre les résultats de contrôle continu et ceux des épreuves. Je m’étais alors aperçu qu’avec une note de 5/20 aux épreuves terminales, on pouvait dans certains établissements avoir son brevet. On achetait la paix sociale… Donc attention, tout cela est à prendre avec beaucoup de pincettes. Là aussi, comment maintenir et trouver les moyens d’instaurer une certaine éthique des résultats ? Je parlais tout à l’heure de devoirs communs, de copies distribuées de manière aléatoire entre les enseignants, pour éviter ce genre de dérive. Enfin, la question de l’imputabilité des performances : de qui dépendent finalement les résultats ? La tendance naturelle du système et de nos collègues enseignants, est de dire que si un élève a des mauvais résultats, il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. C’est un peu simple. Mais, en même temps, il est très difficile d’analyser les facteurs d’échec et de réussite des élèves. Des sociologues comme Marie Duru-Bellat ont montré qu’il existait un effet-établissement : on réussit mieux dans certains établissements que dans d’autres. Mais on ne connaît pas assez bien les facteurs explicatifs de ce phénomène. On sait par ailleurs qu’il existe un effet-maître – c’est une chose que je ne devrais pas dire mais qui se sait dans toute communauté éducative : les élèves réussissent mieux avec Monsieur X, qu’avec tel autre. C’est-à-dire que des enseignants arrivent mieux que d’autres à faire réussir leurs élèves. Tout cela est évidemment à manier avec beaucoup de précautions ; il faut tout de même essayer d’en tirer les leçons, pour la constitution des équipes de classe par exemple. Concernant les indicateurs, il me semble qu’il faut essayer dans les établissements scolaires, par une discussion collective ouverte, d’en construire des batteries, en ayant toujours conscience des limites et du sens que l’on veut leur donner. On peut parfaitement comprendre que tel établissement Éthique et performance : questions préalables 27 se range à tel et tel type d’indicateur, parce que ce qui est pertinent dans un établissement ne l’est pas nécessairement dans un autre. Il y a donc tout un travail à réaliser en veillant à ne jamais oublier que l’éducation est un effort de long terme – ce que nos ministres oublient malheureusement quelquefois : une réforme n’a d’effet qu’au bout de plusieurs années, ce n’est pas un résultat immédiat. Là aussi, laissons du temps, et travaillons avec les équipes sur le long terme. Je vais conclure parce qu’à défaut, nous pourrions continuer longtemps sur ce vaste et beau sujet. C’est un sujet qui ouvre des tas de perspectives et qui ne répondra peut-être pas à toutes les questions. Tant mieux d’ailleurs, si nous nous posons beaucoup de questions, et que nous n’avons pas nécessairement de réponses à y apporter. Certaines de ces questions sont très personnelles, mais en tout état de cause, elles posent toujours le problème des finalités de l’institution. Il faut toujours se référer aux principes qui nous guident, aux valeurs qui sont les nôtres ; évidemment parmi celles-ci, l’égalité des chances de tous les enfants est la première de toutes. Mais il me semble qu’en tout état de cause, il ne faut pas non plus avoir peur de cette logique de performance. Anne Barrère nous explique dans son livre que les chefs d’établissement du Nord-Pas-de-Calais sont très attachés à la modernisation du service public dans une logique d’amélioration des résultats, mais qu’en même temps ils concilient cet attachement avec un projet républicain. Il me semble que c’est cette voie qu’il faut essayer de chercher et de trouver : être à la fois attaché à un projet républicain et nous orienter vers une modernisation qui fera que notre système éducatif pourra être tout à fait performant. 28 Éthique et performance : questions préalables BIBLIOGRAPHIE DE L’AUTEUR Petite histoire d’un grand ministère, l’Éducation nationale, Albin Michel, 1988. Bernard Toulemonde a dirigé : Le système éducatif en France, coll. « Les notices », La documentation Française, 3e édition, septembre 2009. POUR EN SAVOIR PLUS « La performance, sa mesure. Enjeux éthiques », Administration et éducation, revue de l’association française des administrateurs de l’éducation, n°2, 2009. Lessard (Claude) et Meirieu (Philippe), L’obligation de résultats en éducation, Les presses de l’Université de Laval, 2004. Baillat (Gilles), De Quetele (Jean-Marie), Paquay (Léopold) et Thélot (Claude), Évaluer pour former, De Boeck, 2008. Éthique et performance : questions préalables 29 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire Jean-Marc Monteil PROFESSEUR ET CHARGÉ DE MISSION AUPRÈS DU PREMIER MINISTRE Professeur des universités, Jean-Marc Monteil est docteur en sciences psychologiques et sociales et docteur d’État ès lettres et sciences humaines. Il commence sa carrière à l’université Clermont - Blaise Pascal dont il sera le président de 1992 à 1997. Ses travaux ont porté sur l’étude de l’influence des contextes, et notamment de la comparaison entre individus, sur les performances et processus cognitifs, jusqu’à des niveaux élémentaires de mobilisation de l’attention. Il a créé et dirigé dans ce cadre thématique le laboratoire de psychologie de la cognition (UMR CNRS) de 1983 à 1998. Il a été membre du comité national de la recherche scientifique section « activités mentales, neurosciences intégratives et comportements ». Il est professeur associé à l’université de Lausanne en 1988-89. En 1996-97, il est président de la Conférence des présidents d’Universités. Il est ensuite recteur de l’académie de Bordeaux, puis recteur de l’académie d’Aix-Marseille. En juillet 2002, il est nommé directeur de l’Enseignement supérieur puis directeur général. En mai 2007, il est chargé de mission auprès du Premier ministre François Fillon. 32 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire* Joëlle Dusseau L orsque Jean-Pierre Villain1 m’a demandé si je voulais bien venir bavarder un moment avec vous, et lorsqu’il m’a donné le thème Éthique et performance, j’ai trouvé que le niveau d’ambition était extrêmement élevé, parce qu’accoler éthique et performance, c’est un vrai sujet. L’éthique de son côté, et la performance du sien, sont en soi des problèmes qui méritent des traitements approfondis. Je me suis posé la question de savoir par où il fallait commencer. La fonction qui a occupé la plus grande partie de ma vie, c’est la fonction de chercheur, ce pendant plus de vingt ans. Elle m’a conduit à traiter un certain nombre de questions qui touchent moins à l’éthique qu’à la performance, puisque j’ai beaucoup travaillé dans le domaine des sciences cognitives sur les conditions de production intellectuelle, ce qui est finalement le fond de votre activité. Vous gérez des ensembles qui génèrent de la production intellectuelle et qui sont finalisés par elle. * L’auteur a volontairement conservé le style familier d’une intervention orale qui correspond bien à l’esprit de la rencontre. 1 - Directeur général de la Mission laïque française de 2003 à 2009. Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire 33 Je me suis donc posé la question de savoir s’il fallait que je me clive, c’està-dire que j’oublie le chercheur pour faire appel au recteur, éventuellement au président d’établissement que j’ai été. Je me suis dit que j’allais essayer de faire l’intégrale de tout cela, et de voir ce que cela donne. Ce dont je suis absolument convaincu, c’est qu’on ne peut pas – quelle que soit la position qu’on occupe – ne pas être fondamentalement structuré par ce qui nous a constitué. C’est la raison pour laquelle le métier de l’éducation est un métier à très haute responsabilité. Il y a donc dans cette très haute responsabilité, une composante éthique évidente. Si je vous dis ces quelques mots d’introduction, tout compte fait triviaux, c’est pour introduire le fait que je vais vous parler sur la base de ce qui m’a structuré, c’est-à-dire ma formation et ma pratique de chercheur. Elles ont, en effet, guidé et orienté la plupart de mes actions, moins d’ailleurs par les objets d’études auxquels elles m’ont confronté que par les méthodes qui en fondent l’identité. Il se trouve que j’appartiens à l’univers de ceux qui font de la recherche de type expérimental et qui sont ainsi conduits à l’exigence de confronter leurs idées à l’épreuve des faits. En science, dans un laboratoire, ces idées s’expriment et se testent sous forme d’hypothèses. Dans la vie ordinaire, c’est-à-dire celle de tous les jours, il va de soi qu’une telle position se révèle moins simple. Le réel du laboratoire n’est pas moins réel que la vie ordinaire mais cette réalité de la vie ordinaire prend des formes moins facilement contrôlables. Néanmoins, les fondements éthiques qui consistent à se placer dans les conditions les plus défavorables pour vérifier si ce que nous pensons résiste aux faits sont les mêmes : ne pas se satisfaire de ce qui confirme ce que nous pensons. Si la démarche qui consiste à confirmer ses propres hypothèses est 34 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire une démarche de paresse intellectuelle, il ne faut cependant pas la vivre en coupable. C’est en effet une inclination humaine et comme telle, une inclination partagée. Néanmoins, on ne doit jamais perdre de vue que cette démarche de confirmation d’hypothèse est susceptible de générer, dans l’acte d’éducation, des certitudes commodes, des jugements hâtifs ou encore des comportements récurrents quelles que soient les situations rencontrées. Certes, l’enseignement et plus largement l’éducation, ne sauraient se nourrir du seul doute. Mais on peut légitimement penser que l’intrusion de quelques incertitudes porte en soi une saine remise en question. Il s’agit d’une nécessité éthique pour qui fait profession d’éduquer. Dans le cadre de cette éducation, pour instruire (au sens le plus large) les jeunes qui vous sont confiés, vous disposez notamment des programmes disciplinaires. Ces programmes, que les professeurs finissent à peu près toujours et les élèves moins souvent, relèvent-ils, pour leur efficacité, d’un minimum d’intrusion d’incertitudes dans leur déploiement ? À l’évidence, assez faiblement. En effet, si l’on veut bien considérer la récurrence même de ces programmes, on est évidemment en droit de penser que la façon dont leur contenu est intégré par l’ensemble des élèves compte pour peu dans leur évolution. Dès lors, le redoublement constitue la réponse apportée au décalage observé entre la performance de certains élèves et le niveau supposé des programmes. On « redouble » donc le programme et l’on s’étonne que dans la plupart des cas, les mêmes causes produisent les mêmes effets. La qualité du programme est en quelque sorte confirmée par l’échec de l’élève et la remise en cause est évidemment celle de l’élève. Mais ne me faites pas dire, par extension, ce que je ne dis pas, à savoir que tous les élèves devraient réussir à la première « entame ». Certes non. Mais ne pourrait-on pas se demander si des taux de redoublement de l’ordre de 15 % ne révèlent pas, sinon Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire 35 une inadéquation des programmes aux élèves, du moins une insuffisante richesse de présentation. Il est évidemment confortable de confirmer, par une production gaussienne des performances, l’idée (dont nous sommes tous porteurs) que les performances scolaires dépendent exclusivement des qualités et propriétés intrinsèques des élèves. Or, considérer que ces performances dépendent peut être aussi du rapport que les élèves entretiennent avec les propriétés intrinsèques des savoirs déployés dans les programmes aurait probablement la vertu de rappeler qu’enseigner et apprendre devraient plutôt conduire à une courbe de performances en forme de J. Tout cela pour indiquer que rien ne doit nous dispenser d’émettre une hypothèse alternative aux explications des résultats que nous observons si nous voulons nous prémunir de « l’idéologie du don ». Même au risque de la répétition, développons un peu. Nous sommes tous, à des degrés divers, même quand on s’en défend, fondamentalement habités par l’idée que la performance est le résultat de la transaction des compétences intrinsèques d’un individu appliquées aux propriétés intrinsèques d’un objet. Si les compétences intrinsèques d’un individu sont élevées, alors il doit pouvoir traiter les propriétés les plus élevées d’un objet. Ceux qui traitent les propriétés les plus élevées d’un objet sont ceux qu’on appelle des élèves doués ou de très bons élèves. Et ceux qui ne parviennent pas à traiter les propriétés de l’objet selon le modèle de référence que nous avons intériorisé, sont considérés comme « structurellement insuffisants ». Puisque la seule transaction que l’on regarde dans la performance est celle opérant entre les propriétés du sujet et les propriétés de l’objet de connaissance. Mais personne ne regarde de manière systématique l’influence que peut avoir le rapport 36 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire que le sujet entretient avec l’objet. Or ce rapport existe et il est médiatisé par de nombreux éléments. Le premier d’entre eux est lié à la qualité et la nature (quasi historique) des bases de connaissances de l’élève. Nous ne sommes en effet pas dans une situation équivalente quand nous avons affaire à un enfant qui est en train de traiter un objet et qui, dans une situation similaire, a connu dans le passé une situation d’échec ou une situation de succès dans le cadre de ce traitement. En effet, lorsqu’il est amené à traiter une situation qui présente des caractéristiques de similitude avec des situations connues, la nature de ces situations, d’échec ou de succès, n’entraînent pas les mêmes conséquences. Quand la situation évoquée est négative (échec), deux problèmes se conjuguent : la situation d’échec antérieure, activée par la situation actuelle et négativement chargée, et le problème à traiter. Dès lors, l’attention mobilisée est plus importante que dans le cas où la situation évoquée est celle du succès. En effet, dans ce dernier cas, le caractère positif de l’évocation du succès ne réclame pas d’attention. Le problème peut alors mobiliser toute l’attention disponible de l’élève. Le rappel d’une situation positive, non douloureuse, non problématique, ne réclame absolument aucune attention particulière, alors qu’une situation problématique demande d’être traitée : elle est donc consommatrice d’attention. Une performance scolaire n’informe donc, en soi, que partiellement sur les « capacités et caractéristiques de l’élève ». Néanmoins, le plus souvent, le bulletin trimestriel porte jugement en termes de traits de personnalité : manque de volonté, esprit lent ou, symétriquement, esprit vif, bonne volonté ou encore manque de travail etc. Quelles unités de mesure viennent soutenir de tels jugements ? Vous ne rencontrez jamais un bulletin trimestriel d’élève avec 18 de moyenne qui porte l’appréciation « manque de travail » ou « manque d’effort » et pourtant ! Cela signifie que la mesure Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire 37 est confondue avec la qualité. À tel point, par exemple, que la mention « ensemble moyen » permet au chef d’établissement dans son appréciation globale de couvrir et la mesure et la qualité supposée de l’élève ! Le thème de votre rencontre est Éthique et performance. Mais qu’est-ce qu’un comportement éthique à l’endroit de la performance ? À mon sens, il devrait s’agir de se demander d’abord ce que la performance signifie avant de la considérer comme susceptible de traduire la qualité d’un individu. En effet, la performance rend parfois plus compte des conditions de sa réalisation que des propriétés générales de l’individu. N’est-il donc pas dangereux de porter un jugement, éventuellement définitif, à partir d’elle et sans autre forme d’examen ? Peut-on sérieusement parler de manque de compréhension à partir de la mesure d’une performance ? Quand on sait la puissance de la mémoire dans sa capacité de rappel, quand on sait le caractère sédimentaire de jugements répétés des dizaines, des centaines voire des milliers de fois dans une scolarité, on doit se garder de confondre performance et qualité. Aussi ne faut-il jamais inhiber chez un élève sa capacité à rompre avec sa propre histoire si l’on veut préserver chez ceux qui échouent des perspectives de réussites ultérieures. L’éthique de responsabilité des acteurs du système et du système lui-même devrait, dans le cadre d’une telle obligation, pouvoir donner toute sa mesure. Cependant, la performance demeure fondamentale et l’exigence à entretenir à son endroit doit s’exprimer pleinement. Il convient simplement de ne jamais perdre de vue qu’elle est relative à l’objectif poursuivi. Si sa définition entre dans ce périmètre, il est alors légitime qu’elle traduise l’atteinte ou non d’un objectif donné plus que les qualités intrinsèques des élèves. 38 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire Ce n’est évidemment pas la même chose. Et il est déjà tellement difficile de mesurer convenablement l’atteinte du premier que s’attacher à cerner précisément les secondes relèvent de la fiction. Sans s’engager ici dans un développement sur l’évaluation, les multiples biais scientifiquement observés dans les pratiques d’évaluation à visée docimologique devraient retenir certains des jugements du professeur. Mais qu’est-ce qu’un professeur ? C’est un ingénieur avec un supplément d’âme. Les ingénieurs travaillent sur de la matière froide, les professeurs travaillent sur de la matière vivante, ce sont donc des ingénieurs avec un supplément d’âme. Chacun mettra sous ce dernier terme ce qu’il a envie d’y mettre, mais ce n’est pas le même système de valeurs qui supporte les deux pratiques, celle de l’ingénieur et celle du professeur. Par ailleurs, la plus efficace des ingénieries, appliquée à l’acte d’enseignement, ne serait qu’un « pauvre tour de main » si elle n’était pas adossée à une connaissance totalement maîtrisée des savoirs disciplinaires. En revanche, une fois assurée la connaissance de la discipline, la capacité à organiser l’environnement des apprentissages porte en soi la plus value susceptible d’optimiser les actes d’enseigner et d’apprendre. Cette recherche permanente d’optimisation devrait faire l’objet d’un partage entre professionnels de l’enseignement. Pour que ce partage s’installe et constitue une base sans cesse renouvelée de connaissances pratiques et d’expériences, il conviendrait que les professeurs consignent, périodiquement, leurs réflexions sur leurs actions dans un rapport d’activités (démarche naturelle dans le domaine scientifique). Ce serait une fantastique richesse pour solidariser, au sein de l’institution, les actions pédagogiques des professeurs et pour favoriser la mise en place d’un véritable système de veille, à la fois sur l’évolution des programmes et sur la Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire 39 façon dont ils sont intégrés par les élèves, ces derniers étant appréhendés dans leur diversité sur la base d’une évaluation rigoureuse et scientifiquement informée. Un tel rapport d’activité dirait des choses sur la classe et son organisation, sur les forces et faiblesses des programmes, sur la pertinence de l’emploi du temps etc. Ainsi y aurait-il matière à occuper, en professionnel, la prérentrée dans les établissements scolaires. Il n’y aurait là rien de bien révolutionnaire, sauf à considérer qu’échanger des points de vue un peu formalisés entre professeurs relève d’un acte sans rapport avec la vie « ordinaire » de l’école. Le chef d’établissement y puiserait des ressources objectives susceptibles d’alimenter sa réflexion et son action de manager et de premier responsable pédagogique de l’établissement. Si l’École, dans son ensemble, veut associer éthique et performance, elle doit commencer à faire en sorte que les acteurs, dans leur totalité et au sein d’un espace institutionnel donné, discutent ensemble des éléments qu’ils se sont attachés à produire le plus objectivement possible. C’est la préparation, l’analyse et le bilan d’un système de production (il faut employer le terme) de compétences, de performances, et de comportements qu’il s’agit de promouvoir et d’entretenir au bénéfice exclusif des élèves. En effet, au bout du compte seuls leurs résultats nous jugent. 40 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire BIBLIOGRAPHIE DE L’AUTEUR Seaton M., Marsh H.W., Dumas F., Huguet P., Monteil J.M., Régnier I., Blanton H., Buunk B.P., Gibbons F.X., Kutper H., Suls J. and Wheeler L. “In search of the big fish : Investigating the coexistence of the big-fish-little-pond effect with the positive effects of upward comparisons”. British Journal of Social psychology, Vol. 47, pp. 73-103, 2008. Huguet P., Dumas F. and Monteil, J.M. “Competing for a Desired Reward in the Stroop Task: When Attentional Control is Unconscious but Effective versus Conscious but Uneffective”. Canadian Journal of Experimental Psychology, Vol. 5, pp.153-167), 2004. Michinov E. and Monteil J.M. “The Similarity-Attraction Relationship Revisited: Divergence between the Affective And Behavioral Facets of Attraction”. European Journal of Social Psychology, Vol. 32, pp. 485-500, 2002. Huguet P., Dumas F., Monteil J.M., and Genestoux N. “Choice Comparison and Comparative Evaluation as Independent Performance: Replication and Extension with a French Sample”. European Journal of Social Psychology, Vol. 31, pp. 557-578, 2001. Monteil J.M. and Huguet P. Social Context and Cognitive Performance. Hove, East Sussex: Psychology Press, 1999. Huguet P. Monteil J.M., Galvaing M.P. and Dumas F. “Mere Presence Effects in the Stroop Task: Further Evidence for Attentional view of Social Facilitation”. Journal of Personality and Social Psychology, Vol. 77, pp. 1011-1025, 1999. Monteil J.M., Brunot S. and Huguet P. “Cognitive Performance and Attention in Classroom. An Interaction between Past and Present Academic Experience”. 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Monteil (Jean-Marc) et Huguet (Pascal), Réussir ou échouer à l’école : une question de contexte ?, Grenoble, PUG, 2002. Monteil (Jean-Marc), Éduquer et former , Grenoble, PUG, 1989. Régner (Isabelle), « Les stéréotypes de genre des enseignants ». Sous la direction de Bourgeois (Etienne) et Chapelle (Gaëtane), Apprendre et faire apprendre, Paris, PUF, 2006. 42 Fragments d’analyse sur l’instruction scolaire Les Conférences de la Mission laïque française Dans la même collection… L questions de l’identité, de l’histoire et de la Les mémoire ont, depuis quelques années, pris une place m ccentrale dans notre actualité sociale, cculturelle ou politique. IIl n’est pas d’identité sans mémoire. M Mais il n’est pas non plus d’identité vraie, c’est-à-dire d dynamique et vivante, qui ne cherche à éclairer et à m mieux comprendre ce que sa mémoire porte. Tel est le rrôle premier de l’Histoire. C C’est à cette problématique que Philippe Joutard, p professeur des universités, ancien recteur, et Joëlle Dusseau Dusseau, inspectrice générale de l’Éducation nationale ont répondu par leurs deux conférences présentées lors du séminaire des personnels d’encadrement de la Mission laïque française en mai 2007. La Mission laïque française a souhaité publier ces deux conférences d’une très grande qualité afin de vous faire partager la richesse de ces réflexions. Retrouvez les Conférences de la Mission laïque française sur www.mlfmonde.org www.mlfmonde.org Toute la Mission laïque française en un clic Mieux connaître la MLF ses objectifs, son organisation, son histoire contact [email protected] Toutes les actualités de l’association et de son réseau d’établissements scolaires à l’étranger Remplir un dossier de candidature en ligne de septembre à janvier (rubrique Recrutement) Mission laïque française 9 rue Humblot - F - 75 015 Paris Téléphone : +33 (0) 145 786 171 Télécopie : +33 (0) 145 784 157 E-mail : [email protected] www.mlfmonde.org Directeur de publication Jean-Christophe Deberre Directrice de la rédaction Marcelle Barry Secrétariat de rédaction et suivi d’édition Sophie Grallet /Aude Buclon /Marie Noaille Conception et réalisation graphiques Alexis Oukkal Réalisation générale Service communication et développement Couverture © Anna Larionova, tiero, Natallia Vintsik - Fotolia.com Impression Lettering