Enquête sur les pratiques de reconnaissance du
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Enquête sur les pratiques de reconnaissance du
Projet QVT Les pratiques de reconnaissance du travail des cadres supérieurs du Réseau de la Santé et des Services Sociaux par Anne-Héloïse Bédard, Hélène Giroux et Estelle M. Morin. 28 mars 2002 Table des Matières 1. INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 4 2. MÉTHODOLOGIE............................................................................................................................................ 5 2.1. DESCRIPTION DE L’ÉCHANTILLON .................................................................................................................... 5 2.2. GUIDE D’ENTRETIEN ......................................................................................................................................... 6 2.3. ANALYSE .......................................................................................................................................................... 7 3. ANALYSE DES ENTRETIENS........................................................................................................................ 9 3.1. ENTRÉE EN LA MATIÈRE ................................................................................................................................... 9 3.1.1. Ce qui plaît dans le travail..................................................................................................................... 9 3.1.2. Ce qui déplaît dans le travail ............................................................................................................... 10 3.1.3. Ce qui est important dans le travail ..................................................................................................... 11 3.2. FORMES DE RECONNAISSANCE........................................................................................................................ 13 3.2.1. Formes de reconnaissance désirées ..................................................................................................... 13 3.2.2. Formes de reconnaissance non désirées .............................................................................................. 19 3.3. OBJETS ET SOURCES DE RECONNAISSANCE ..................................................................................................... 21 3.3.1. Objet : ce qui mérite d’être reconnu .................................................................................................... 21 3.3.2. Source : de qui doit venir la reconnaissance ....................................................................................... 24 3.4. PRATIQUES SUGGÉRÉES .................................................................................................................................. 25 4. CONCLUSION ................................................................................................................................................. 29 ANNEXE..................................................................................................................................................................... 31 Table des Illustrations TABLEAU I – DESCRIPTION DE L’ÉCHANTILLON .............................................................................................................. 6 TABLEAU II – CE QUI PLAÎT AU CSRSSS DANS LEUR TRAVAIL ..................................................................................... 10 TABLEAU III – CE QUI DÉPLAÎT AUX CSRSSS DANS LEUR TRAVAIL ............................................................................. 11 TABLEAU IV – CE QUE LES CSRSSS TROUVENT IMPORTANT DANS LEUR TRAVAIL ...................................................... 12 TABLEAU V – FORMES DE RECONNAISSANCE ............................................................................................................... 13 TABLEAU VI – CE QUI MÉRITE D’ÊTRE RECONNU ......................................................................................................... 21 TABLEAU VII – PRATIQUES SUGGÉRÉES ....................................................................................................................... 28 3 1. INTRODUCTION Le mandat confié à l’équipe de recherche dirigée par la professeure Estelle M. Morin porte sur la qualité de vie au travail (QVT) des cadres supérieurs du Réseau de la Santé et des Services Sociaux (CSRSSS). Le volet couvert par le présent rapport vise à faire ressortir les facteurs qui, chez ces derniers, engendreraient le sentiment de reconnaissance. D’après nos recherches, le concept de « reconnaissance » en tant que tel n’est défini nulle part de manière précise. Il est traité de façon indirecte en lien avec la motivation, la valorisation, la mobilisation et l’empowerment. De plus, ce concept est généralement abordé du point de vue de la reconnaissance des employés par les cadres, et non du point de vue de la reconnaissance des cadres eux-mêmes. Notre démarche tente donc de cerner ce qu’est la reconnaissance dans le contexte précis du travail des cadres supérieurs du milieu de la santé. La méthodologie, basée sur une approche inductive, utilise les entretiens individuels comme source de données, le but étant de faire ressortir les différents « facteurs de reconnaissance » propres aux CSRSSS. La démarche comporte deux étapes : la première, celle des entretiens individuels, a été réalisée durant les mois de septembre, octobre et novembre 2001; la seconde étape utilisera les résultats obtenus en vue de fournir à l’équipe de recherche les éléments nécessaires à l’élaboration d’un questionnaire qui sera distribué à l‘ensemble des CSRSSS. Les sujets ont été rencontrés individuellement, en privé, et les entretiens ont été enregistrés (avec l'accord des participants). Le contenu des entretiens a été analysé de façon inductive et diverses catégories de réponses ont été regroupées afin de bien représenter les différents éléments mis en évidence par les répondants. La gestion des données a été effectuée au moyen du logiciel QSR NUD*IST. L'objectif de ce rapport est de présenter et d'analyser brièvement les catégories obtenues, puisque c'est à partir de ces catégories que le questionnaire d'enquête sera développé. 4 2. 2.1. MÉTHODOLOGIE Description de l’échantillon Pour assurer la validité externe des résultats, l’échantillonnage des sujets a été fait de façon aléatoire parmi les participants à l’enquête QVT. En d’autres termes, parmi les 582 répondants à la première enquête, 26 sujets ont été choisis au hasard puis contactés par téléphone. Après leur avoir rappelé leur collaboration à l'enquête précédente, les participants étaient invités à être visités par un membre de l’équipe de recherche pour discuter de leur sentiment de reconnaissance. Ce contact préliminaire est utile à plusieurs points de vue. En plus de permettre de recruter des participants à cette étape de la recherche sur l’amélioration de la qualité de vie au travail des cadres supérieurs, il jette les bases d’un climat de confiance entre le répondant potentiel et l’enquêteur. De plus, l'entretien initial est profitable aux deux parties. D’une part, il permet au chercheur d’exposer les visées de la recherche1 ainsi que ses attentes envers l’interviewé; d’autre part, il permet au répondant de comprendre les objectifs de l’étude, d’anticiper le degré d’écoute dont il bénéficiera et finalement, de choisir s’il désire ou non participer à l’étude (chaque individu étant libre d’accepter ou de refuser de participer). Lorsque le participant acceptait, un rendez-vous était fixé et les documents relatifs à l'entente de confidentialité et à la description de la recherche lui étaient envoyés. De cette façon, le sujet obtenait de plus amples détails sur les thématiques abordées au cours de l’entretien. Les rencontres avaient généralement lieu en milieu de travail. Le tableau I présente les caractéristiques des répondants. Comme notre mandat consistait à prendre le pouls de la population des CSRSSS, l’échantillon se devait d’être le plus représentatif possible. Ainsi, notre échantillon se compose de 50 % d’hommes et 50 % de femmes, proportions similaires à celles retrouvées au sein de la population des CSRSSS. De plus, des entretiens ont été effectués dans tous les types d’établissement et dans 12 des 18 régions administratives existantes. Les fonctions représentées par notre échantillon sont les suivantes2 : direction des soins infirmiers (5), direction des services techniques (3), direction des ressources humaines (5), direction des ressources financières (1), direction des services professionnels (2), direction des programmes (3), direction de la protection de la jeunesse (1), direction des services à la clientèle (2), direction des services administratifs (2), direction des programmes de soins de longue durée (1), direction générale (1). 1 Comme le sujet de la recherche est très précis et que le répondant ne doit pas être biaisé par l’objet de la recherche, les objectifs décrits sont restés d'ordre général. 2 Le nombre de fonctions touchées dépasse le nombre d’entretiens car certains des cadres supérieurs interviewés cumulent deux postes ou plus. 5 Tableau I – Description de l’échantillon Subdivisions Population (en %) Échantillon (en %) Homme Femme 51 49 50 50 Montréal Québec Montérégie Autres3 30 10 12 48 36 10 14 50 CLSC Centre Hospitalier et centre multivocationnel Centre de réadaptation CHSLD Centre jeunesse Régie Régionale Établissement non classé 8 9 46 46 7 14 5 5 15 17 21 4 4 Aucun Un Plusieurs 36 65 43 57 Catégories Sexe Région Type d’établissement Site 2.2. Guide d’entretien La grille d’entretien a été élaborée à partir des résultats du questionnaire QVT (Morin et al., 2001) et basée sur les aspects que nous visions à déterminer et à répertorier. Cette grille a par ailleurs été pré-testée auprès de trois cadres supérieurs du secteur public (deux provenant du milieu de l’éducation et un de la santé). L’entretien est semi-directif, c’est-à-dire que l’ordre des thématiques abordées a été respecté alors que la formulation des questions présentait une certaine souplesse. Dans ce type d’entretien, l’enchaînement des thématiques dans un ordre prédéfini est nécessaire; quant aux changements de formulation, ils servent à adapter les questions au répondant et à l’atmosphère régnant durant l’entretien. Le guide d’entretien est composé de 15 questions ouvertes. Chaque participant a la possibilité d’accepter ou de refuser de répondre à chacune des questions. 3 Les régions couvertes par la catégorie « autres » sont : Bas St-Laurent, Saguenay-Lac St-Jean, Mauricie, Estrie, Outaouais, Côte-Nord, Gaspésie & Îles-de-la-Madeleine, Chaudière-Appalaches, Laval. Notre recherche couvre donc 12 des 18 régions administratives possibles. 6 La grille d’entretien se divise en quatre parties : 1. Entrée en matière : questions ouvertes qui placent le répondant dans une position active et renforcent sa confiance envers la chercheuse. Les thématiques traitées dans cette première partie favorisent la compréhension du contexte au sein duquel le sujet évolue ainsi que son attitude face à son travail et à ses exigences. Les éléments provenant de cette section du questionnaire permettent, lors de l’analyse, de mieux situer le répondant par rapport à son milieu. La chercheuse aborde des sujets tels que la description de tâches, les éléments plaisants et déplaisants du travail, ce qui est important au travail, le désir de rester dans ce poste ou à l’emploi du Réseau et les réalisations. 2. Formes de reconnaissance : les thèmes abordés ont pour objectif de cerner, avec le sujet, les différentes formes que peut prendre la reconnaissance pour lui. Cette section permet de dégager ce qui engendre chez le CSRSSS le sentiment d’être reconnu et de découvrir les formes de reconnaissance qui ne plaisent pas aux répondants ou encore, celles qui ne sont pas perçues comme de la reconnaissance. 3. Objets et sources de reconnaissance : ce qui mérite d’être reconnu et par qui. 4. Pratiques suggérées : pratiques de reconnaissance que le sujet aimerait voir instaurer. Cette partie permet d’enrichir l’éventail des possibilités d’intervention, de s’assurer une dernière fois d’avoir bien saisi tous les enjeux liés à l’environnement du répondant et, finalement, de démontrer au sujet l’importance de son apport à l’étude et au développement de solutions adaptées à son milieu. 2.3. Analyse Les participants se disent tous très satisfaits d’avoir pris part à la recherche. Plusieurs mentionnent que c’est la première occasion qu’ils ont de faire le point sur leur sentiment de reconnaissance, alors que cet élément est important pour eux. Certains sont touchés de l’intérêt que l’on porte à leurs sentiments, d’autres en profitent pour faire le point sur des éléments importants pour eux au travail. Somme toute, les entretiens se déroulent bien, les participants désirent activement prendre part à la recherche. Ceux-ci mentionnent d’ailleurs attendre les résultats avec impatience. Nous avons interviewé 26 CSRSSS; 23 entretiens ont été utilisés lors de l’analyse, les enregistrements de trois entretiens étant inaudibles. Les entretiens sont d’une durée moyenne d’une heure et demie. Tous les entretiens audibles ont été retranscrits en entier, verbatim. Les retranscriptions comptent de 17 à 45 pages (moyenne : 28,8 pages), soit 6 500 à 21 000 mots (moyenne : 12 800 mots). 7 Le traitement d'un si vaste ensemble de données ne pouvait se faire manuellement. Nous avons donc utilisé QSR NUD*IST, un logiciel spécialement conçu pour l’analyse de données qualitatives. Il est important de noter que le logiciel n'effectue pas un codage automatique des données. Le codage est fait par les chercheurs, soit à partir de catégories préétablies, soit, comme dans le cas de la présente recherche, à partir de catégories émergeant des données elles-mêmes, de manière inductive. Toutefois, le logiciel facilite grandement la gestion des documents ainsi que le traitement, le classement et l'analyse des données. De plus, grâce à ses multiples fonctions, il permet de manier et d’explorer diverses idées et/ou catégories de concepts. Finalement, QSR NUD*IST permet au chercheur d' «interroger» les données, ce qui offre la possibilité de préciser davantage la recherche et de tester diverses hypothèses. L’analyse des données respecte les quatre parties de la grille d’entretien. Chacune des thématiques est traitée séparément. Chaque thématique comporte un certain nombre de catégories qui sont mutuellement exclusives à l’intérieur de chaque thématique. Ainsi un même élément de réponse peut se retrouver sous plus d’une thématique, mais ne peut être inclus qu’à l’intérieur d’une seule catégorie d’une même thématique. La compilation des résultats est présentée sous forme de tableaux conçus de la façon suivante : Première colonne: les différentes sous-catégories qui ressortent lors de l’analyse. Une sous-catégorie est créée dès que l’on peut regrouper les affirmations d’au moins trois participants sous une même rubrique. Deuxième et troisième colonnes : pour chacune des sous-catégories, le nombre de répondants (NR) ayant mentionné au moins une fois la sous-catégorie, ainsi que le pourcentage correspondant. Quatrième et cinquième colonnes : le poids relatif du nombre d’affirmations (NA) par rapport au nombre total d’affirmations classées sous une même thématique, ainsi que le pourcentage correspondant. Sixième colonne : les résultats du calcul du ratio NA/NR. Celui-ci, en donnant le nombre moyen d’énoncés par répondant par catégorie, permet de constater l’intérêt de la catégorie pour les répondants. Ainsi, plus le ratio est élevé, plus il est permis de croire que la catégorie apparaît importante aux yeux de ceux qui l’ont mentionnée. La catégorie « Inclassables / autres » recense les éléments mentionnés par un ou deux répondants seulement. Les résultats de cette sous-catégorie doivent être qualifiés, car leur proportion les fait paraître plus importants qu’ils ne le sont en réalité. Ainsi, dans le tableau II (troisième colonne, dernière ligne), une proportion de 61% indique uniquement que 14 des 23 répondants ont fait au moins une affirmation qui ne pouvait être classée dans aucune autre des sous-catégories. 8 Par exemple, dans l'extrait qui suit, le répondant exprime le désir de pouvoir rencontrer ses collègues dans un contexte autre que celui du travail. Toutefois, puisqu'il s'agissait d'un souhait apparemment isolé, il ne correspondait à aucune de nos catégories et a donc été classé «inclassables / autres» : « […] je pense que ça donne la chance aussi de voir du monde dans un autre contexte. Le directeur des ressources humaines...mon dieu... habituellement, c'est un gars qui est sérieux, qui fait son travail pis... bon, c'est pas un gars de party...pis là, tiens, on voit XXX, surtout la fois où j'étais dans le groupe des fêtés...bon, ben lui aussi, il aime danser, il aime prendre un petit verre de vin, il dit bonjour à tout le monde...une photo des XXX ans...puis ça se fait comme ça depuis plusieurs années puis....» 3. ANALYSE DES ENTRETIENS 3.1. Entrée en la matière 3.1.1. Ce qui plaît dans le travail L’analyse des éléments mentionnés par les cadres sous la rubrique Ce qui me plaît dans mon travail indique que ces derniers aiment : les activités leur permettant d’utiliser leurs acquis et de démontrer leurs compétences (relever des défis, mener à bien des projets, avoir de l’influence, avoir de la marge de manœuvre); les activités qui permettent d’élargir leurs champs de connaissances (avoir des tâches variées, apprendre); les relations au travail (avoir une bonne équipe, bon climat de travail, avoir du soutien); l’utilité, la qualité et l’efficacité du travail (se sentir utile, bien faire les choses). Le tableau II présente ces résultats de façon plus détaillée (page suivante). 9 Tableau II – Ce qui plaît au CSRSSS dans leur travail Sous-catégories Relever des défis Mener à bien des projets Avoir de l'influence Avoir une bonne équipe Avoir des tâches variées Bon climat de travail Apprendre Avoir de la marge de manœuvre Se sentir utile Bien faire les choses Avoir du soutien Inclassables / autres Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Fréquence % du total Fréquence % du total 14 61% 25 15% 13 57% 21 12% 13 57% 24 14% 11 48% 20 12% 8 35% 11 7% 6 26% 11 7% 5 22% 6 4% 17% 1,79 1,62 1,85 1,82 1,38 1,83 1,20 5 3% 1,25 4 17% 4 3 13% 3 3 13% 4 14 61% 30 Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 23. Nombre d’éléments de réponse : 179. 2% 2% 2% 18% 1,00 1,00 1,33 2,14 3.1.2. 4 Ratio NA/NR Ce qui déplaît dans le travail L’analyse des éléments mentionnés par les cadres sous la rubrique Ce qui vous déplaît le plus dans votre emploi et pourrait vous donner envie de quitter, se résume en quatre classes : les difficultés liées au climat de travail (climat de travail malsain, problèmes avec l’équipe de travail, manque de respect); les difficultés liées aux conditions de travail (conditions de travail, manque de temps); les difficultés liées à la réalisation du travail (manque de soutien, incohérence, manque de ressources, gestion « politique », charge de travail trop grande, routine, incompréhension); les difficultés liées à la marge de manœuvre (lois / règlements, manque d’autonomie /confiance, ne pas avoir d’influence). Enfin, il semble que l’appréciation des méthodes de reconnaissance officielle soit mitigée. En fait, cinq personnes signalent explicitement ne pas aimer les reconnaissances officielles. En ce qui concerne les autres répondants, soit on ne retrouve aucune mention de leur appréciation des méthodes de reconnaissance officielles dans leurs propos, soit, lorsqu’ils en parlent, c'est pour souligner les conséquences potentiellement fâcheuses de ce type de reconnaissance. Une analyse plus détaillée de ces critiques est présentée à la section 2.2.2. « Formes de reconnaissance non désirée ». Les résultats détaillés de cette rubrique sont présentés au tableau III (page suivante). 10 Tableau III – Ce qui déplaît aux CSRSSS dans leur travail Sous-catégories Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Fréquence % du total Fréquence % du total 10 43% 15 6% 9 39% 22 9% 9 39% 22 9% 9 39% 10 4% 9 39% 10 4% 8 35% 12 5% 8 35% 20 9% 7 30% 13 6% 7 30% 14 6% Conditions de travail Manque de soutien Incohérence Climat travail malsain Incompréhension Lois / règlements Manque de ressources Manque de temps Ne pas avoir d'influence Charge de travail trop 6 26% 11 grande 6 26% 10 Gestion « politique » Méthode de 5 22% 12 reconnaissance officielle Manque d'autonomie / 4 17% 4 confiance 3 13% 8 Manque de respect 3 13% 3 Routine Problèmes avec l'équipe de 3 13% 3 travail 13 57% 44 Inclassables / autres Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 23. Nombre d’éléments de réponse : 262. Ratio NA/NR 1,50 2,44 2,44 1,11 1,11 1,50 2,5 1,86 2,00 5% 1,83 4% 1,67 5% 2,40 2% 1,00 3% 1% 2,67 1,00 1% 1,00 19% 3,38 3.1.3. Ce qui est important dans le travail Finalement, l’analyse des éléments mentionnés par les cadres sous la rubrique Ce qui est important dans mon travail, permet de constater sans l’ombre d’un doute que la reconnaissance a une grande importance aux yeux des sujets, 100 % de ceux-ci l’ayant mentionnée. De plus, le ratio NA/NR pour la reconnaissance est de 2,45, ce qui signifie que chaque répondant la souligne en moyenne 2,45 fois. Toutefois, puisque l'entretien portait sur le sentiment de reconnaissance, il est normal que cet aspect ait été mentionné plus souvent. 11 Outre la sous-catégorie « être reconnu », les éléments jugés importants pour les CSRSSS se divisent en quatre grands volets : les relations au travail (avoir un sentiment d’appartenance, avoir un « sens humain », avoir du soutien); l’exercice de ses compétences (avoir de l’influence, avoir la confiance de l’entourage); le sentiment d’accomplissement (savoir que l’on fait un bon travail, congruence entre les valeurs personnelles et celles de l'établissement, se sentir utile, aimer son travail, se sentir respecté); les pratiques de gestion (clarté des demandes, obtenir une rétroaction). Finalement, il est intéressant de constater que le sentiment d’appartenance, lorsque signalé, l’est en moyenne 2,6 fois par entretien. Les résultats détaillés de la rubrique Ce qui est important dans le travail sont présentés au tableau IV. Tableau IV – Ce que les CSRSSS trouvent important dans leur travail Sous-catégories Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Fréquence % du total Fréquence % du total 22 100% 54 22% Être reconnu Avoir un sentiment 15 68% 39 d’appartenance Avoir la confiance de 12 55% 26 l’entourage 11 50% 20 Avoir de l'influence Savoir qu'on fait un bon 9 41% 10 travail 7 32% 12 Avoir du soutien Congruence – valeurs 7 32% 9 pers. / établissement 6 27% 9 Avoir un « Sens humain » 6 27% 8 Clarté des demandes 6 27% 9 Se sentir utile 5 23% 5 Aimer son travail 4 18% 8 Se sentir respecté 4 18% 5 Obtenir une rétroaction 13 59% 30 Inclassables / autres Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 22. Nombre d’éléments de réponse : 244. Ratio NA/NR 2,45 16% 2,60 11% 2,17 8% 1,82 4% 1,11 5% 1,71 4% 1,29 4% 3% 4% 2% 3% 2% 12% 1,50 1,33 1,50 1,00 2,00 1,25 2,31 12 3.2. Formes de reconnaissance 3.2.1. Formes de reconnaissance désirées Cette section, le corps de notre étude, met en lumière les éléments qui engendrent, chez les CSRSSS, le sentiment d’être reconnus (les formes de reconnaissance). Le tableau V présente les résultats obtenus (la définition de chacune des catégories, telle qu'utilisée pour le codage des données, est présentée en annexe). Tableau V – Formes de reconnaissance Sous-catégories Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Fréquence % du total Fréquence % du total 22 100% 114 21% 22 100% 90 17% Avoir de l'influence Avoir la confiance Avoir un sentiment 20 91% 52 d’appartenance 17 77% 52 Expression de satisfaction Rémunération et 15 68% 29 avantages 15 68% 30 Avoir du soutien 14 64% 24 Obtenir une rétroaction 14 64% 29 Souligner les bons coups 12 55% 22 Expression de gratitude 11 50% 18 Fierté personnelle Avoir accès à de la 9 41% 15 formation 6 27% 16 Avoir des ressources 5 23% 7 Symboles 4 18% 7 Avoir de la visibilité Avoir des reconnaissances 3 14% 5 matérielles 3 14% 7 Être respecté 15 68% 24 Inclassables / autres Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 22. Nombre d’éléments de réponse : 541. Ratio NA/NR 5,18 4,09 10% 2,60 10% 3,06 5% 1,93 6% 4% 5% 4% 3% 2,00 1,71 2,07 1,83 1,64 3% 1,67 3% 1% 1% 2,67 1,40 1,75 1% 1,67 1% 4% 2,33 1,60 13 Tout d’abord, les données révèlent que, chez les CSRSSS, c'est avant tout le fait d'avoir de l’influence qui engendre le sentiment « d’être reconnu ». En effet, les répondants ont tous mentionné cet élément. En outre, on retrouve cet énoncé en moyenne 5,18 fois par entretien, ratio le plus élevé de tous. Pour les répondants, il existe plusieurs façons d’avoir de l’influence. Ainsi, on peut avoir de l’influence : en servant d’exemple, en étant consultés au regard de nos accomplissements antérieurs (implantation d’un nouveau système informatique, etc.). L’entourage, à travers ce geste, admet la compétence de l’individu : « C'est sûr qu'au sein du réseau, je me sens reconnue quand les gens m'appellent pour savoir comment j'ai fait pour tel ou tel dossier. » en étant sollicité lors d’une prise de décision (faire partie de comités, etc.). On accorde ainsi un certain pouvoir au CSRSSS sollicité : « Là où je sens une certaine reconnaissance, c'est quand on est interpellé pour un dossier régional où on forme un comité régional. » en étant consulté relativement à une situation, à un besoin avant la prise de décision (par exemple, le dossier de retraite des infirmières, etc.). De cette façon, les CSRSSS se sentent écoutés et constatent qu’on reconnaît leur connaissance du terrain : « Donc, le ministère, à mon avis, il est... La reconnaissance, c'est qu'ils ne nous consultent pas assez dans les travaux, c'est-à-dire qu'ils prennent des gens qui ont de l'expérience mais pas assez. Je veux dire...que ce soit pour les négociations, que ce soit pour tout autre..., qu'ils aillent chercher des gens de terrain à différents niveaux.» Le sentiment d’avoir la confiance d’autrui apparaît lui aussi d’un intérêt majeur pour les répondants. Ce sentiment est mentionné par 100 % des interviewés et est repris en moyenne 4,09 fois par entretien. Le CSRSSS insiste sur l’importance d’avoir la confiance « professionnelle » de : ses supérieurs (délégation de dossiers, de travail ou de responsabilités importantes, marge de manœuvre laissée, pouvoir décisionnel octroyé) : « Il [le DG] fait en sorte qu'on fasse partie d'un colloque, il me demande de le représenter à des endroits, il me confie d'autres responsabilités. Pour moi, c'est une reconnaissance. » « Par rapport à la confiance qu'il me donne. Il [le DG] a une très grande confiance en moi, il me donne beaucoup de marge de manœuvre. » 14 ses collègues (respect des champs d’expertise de chacun) : « Comme directrice de soins, quand j'arrive à la table et que je dis : "Écoutez, moi, comme directrice de soins, je vois les choses comme ça pour telle et telle et telle raison". Les gens n’ont pas ... ils ne me demandent pas : "Bien, veux-tu nous expliquer ?” Puis m'obstiner, puis tout ça ! […] Moi quand un ingénieur me dit : "Si t'enlève ce stud-là, le toit va tomber", je ne commence pas à lui demander 50 fois pourquoi, explique-moi le clou où est-ce qui est, ou comment ça ?! Je connais... reconnais sa compétence […] » ses subalternes (sentiment d’être appuyé, suivi dans ses décisions) : « Oui, je la sens parce que... s'ils [les subalternes] ne me supportaient pas ou s'ils rejetaient les idées que j'amène...faut qu'ils me fassent confiance pour dire : "Oui, c'est le chemin qu'on prend puis c'est avec ça qu'on va corriger la situation puis on va y arriver." Il faut qu'il y ait beaucoup de confiance. » Certains répondants mentionnent aussi l’intérêt porté à la confiance « interpersonnelle » (confiance qui dépasse largement la vie professionnelle) ainsi qu’à la franchise, à la transparence et au droit à l’erreur : « Il y a aussi le fait que des gens viennent me raconter des choses d'ordre personnel. Ça nous fait peut-être un problème de plus, mais le fait qu'ils se confient à moi, c'est parce qu'ils éprouvent un certain degré de confiance.» Le sentiment d’appartenance, aussi très important aux yeux du CSRSSS, découle : de la perception d’être « aimé » par l’équipe de travail, dont les membres sont contents de le voir : « Je le sens quand ils me voient, ils sont contents de me voir et ça se sent. » du constat que les gens sont gentils avec lui et lui portent attention : « […] les gens s'arrêtent pour s'informer de ta santé, de n'importe quoi d'autres et tu sens que tu fais partie de l'équipe. » du fait que les gens ont envie de travailler avec lui, d’être avec lui : « [...] quand ils m'écrivent une petite carte... puis qu'ils disent qu'ils apprécient travailler avec moi puis tout ça... bien ça... pour moi, c'est une forme de reconnaissance aussi. Quand ils me font des beaux sourires... tu sais, là... tout le monde est content... puis je me dis qu'à quelque part, ils doivent être heureux. » du plaisir de travailler en groupe : « Beaucoup de support, beaucoup d'humour, beaucoup d'échanges. L'humour, c'est tellement important... tellement, tellement, tellement important puis au cœur de tout. Et on forme une équipe de gestion où il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de plaisir à se retrouver ensemble alors...» 15 du sentiment de former une « vraie » équipe de travail : « puis on est une équipe de directeurs qui fonctionne bien, on n'est pas une équipe de directeurs qui est en compétition, on est une équipe... on est vraiment une équipe. Puis… tu sais... il y en a pas un qui va chercher à couillonner l'autre; au contraire, s'il se passe quelque chose dans une rencontre, bien... l'autre va t'appeler pour te dire : " Hier, ils ont questionné telle affaire, tu vas en entendre parler, prépare-toi donc " ou " Les gens n’étaient pas conseils, ils ont parlé de telle affaire". » de l’ambiance, du climat de travail (le plaisir d’être ensemble, blaguer, avoir du « fun », etc.) : « […] venir prendre un café, se téléphoner pour aller dîner. Pas juste parler de job, dire “écoute, à midi, je vais aller acheter des gadgets de cuisine dans le magasin machin chouette a dit hier le gars qui fait des recettes à TV” bon. Il donne des noms de magasin, on part 3-4 on s'en va acheter des gadgets de cuisine absolument inutiles dans nos vies mais au moins on a du fun. Donc ça pour moi, c'est important,» L’expression de satisfaction est, quant à elle, liée au fait de se faire dire que l’on « est bon ». Grâce à cette dernière, on reconnaît la valeur de l’individu ainsi que celle de son travail. Elle est mentionnée par 17 répondants, en moyenne 3,06 fois par entretien. Selon nous, cette catégorie s’associe au sentiment de compétence4 de l’individu ainsi qu’au besoin d’avoir de l’influence. De fait, elle confirme à la personne visée que les décisions prises ou les actions posées sont les bonnes, ce qui augmente ses chances d’influer sur les événements ultérieurs. Ainsi, les CSRSSS percevraient le manque de consultation comme une négation de leur valeur professionnelle. La catégorie rémunération et avantages fait référence aux différentes conditions de travail des CSRSSS. Ces derniers utilisent souvent les termes « conditions de travail » sans préciser ce à quoi ils font référence. Dans ce cas, les interviewés insistent sur l’amélioration des conditions de travail : « Qu'ils nous reconnaissent au niveau des conditions de travail et ce serait déjà beaucoup, mais pour les autres choses, je n'ai rien à redire.» Lorsque le répondant spécifie davantage son propos, il parle généralement : du salaire : « Bien, ils pourraient peut-être nous payer mieux ! Ils pourraient peut-être reconnaître que l'ensemble des expertises qui nous ont... des situations aussi complexes et bien, ça se paye ! hein ! Ça se reconnaît par au moins la base qui est la reconnaissance salariale et les conditions de travail....» 4 Voir Ce qui mérite d’être reconnu, tableau VI. 16 du nombre de jours de vacances / de ressourcement : « Il pourrait y avoir d'autres conditions de travail pour le reconnaître que ce soit plus long de vacances selon un certain nombre d'années [....] » de la possibilité de gérer son temps : « Et je pense que le fait qu'on me laisse gérer mon temps est en soi une grosse reconnaissance.» En ce qui a trait aux éléments classés dans «avoir du soutien», ceux-ci font référence aux trois différents types de soutien suivants : Le « soutien conseil » : on désire quelqu’un à qui se référer, quelqu’un « pour nous aider », un mentor : « Ça démontre premièrement qu'il se sent concerné puis deuxièmement, qu'il est intéressé à t'aider, il prend le temps de t'écouter puis te dire […] On s'attend à ça, dans le fond, d'un supérieur immédiat, il est pas là pour nous donner un horaire à tous les jours puis ça... Une fois que t'as le mandat... bien par contre, il est là pour nous éclairer quand on en a besoin..» « […] comme le ministère, euhh, du support, plus de support encore à monter nos dossiers. Parce que nous, on voit notre établissement; eux autres, ils ont un éventail d'établissements, puis je pourrais peut être bénéficier plus de leur expertise à eux autres pour mieux, euhh, documenter mes dossiers quand j'ai à rencontrer le ministère ou je m'attendrais à ce qu'il puisse me supporter un peu plus.» Le « soutien appui » : le cadre supérieur explique qu’il se sent reconnu au moment où ses décisions sont appuyées, quand « on prend sa part », lorsqu’il perçoit que « l’on est derrière lui » : « Et en même temps, effectivement, les gens me soutenaient par rapport à des décisions ou des choses que j'avais dites publiquement, là, sur les ondes ou n'importe quoi.» Le « soutien émotif » : prend une forme très personnelle lors du partage des difficultés (personnelles ou professionnelles) avec les différents collègues de travail : « S'il y a un cadre qui vit une difficulté, on le supporte dans son épreuve et s'il a besoin de quelques jours, on n'est pas une gestion qui comptabilise heure par heure et jour par jour, on a beaucoup de souplesse et de reconnaissance du travail des cadres. On essaie d'aménager certains congés ou certaines libérations pour aider la personne.» Les CSRSSS jugent qu’obtenir de la rétroaction (évaluation formelle) et le fait de souligner les bons coups sont des formes importantes de reconnaissance (14 interviewés ayant fait mention de chacune d’elle). C’est grâce à ces éléments qu’ils sont en mesure de juger de la qualité de leur 17 travail, de savoir qu’on fait un bon travail5. Aux yeux des répondants, la rétroaction permet de : clarifier son rôle, de se fixer des objectifs et de connaître ses points forts et faibles en vue d’une amélioration. La rétroaction est généralement planifiée à l’agenda, effectuée en privé et possède un caractère très officiel, contrairement au fait de souligner les bons coups. Ce dernier élément, tout comme la rétroaction, conforte le CSRSSS dans ses qualités professionnelles, mais cela n’est pas nécessairement planifié, ni extrêmement précis, ni réalisé en privé. Au contraire, cet élément dépend de son caractère souvent spontané et surtout public. Rétroaction : « Par contre, je m'attendrais peut-être à ce que les mécanismes d'évaluation annuelle soient un peu plus formels, qu'on le fasse une fois par année et qu'on fasse le bilan. C'est une attente que j'aurais par rapport à lui [au DG]. » Souligner les bons coups : « Moi, je pense que lorsque ton supérieur te souligne devant le public, au conseil d'administration ou apprécie le travail ou te remercie avec un... un message d'appréciation en public, bien... je pense que c'est quelque chose qui, effectivement, est une reconnaissance. » Les CSRSSS considèrent aussi comme des formes de reconnaissance les éléments inclus dans les catégories suivantes. Chacune de celles-ci est illustrée par une citation. • L’expression de gratitude : se faire dire « merci ». Elle est davantage liée au sentiment d’utilité personnelle du CSRSSS : « […] j'ai toujours trouvé qu'il [le DG] était reconnaissant... quand tu lui donnais quelque chose : " Merci beaucoup "... c'est bien agréable. » • La fierté personnelle : consiste, pour l’individu, à s’octroyer lui-même sa propre reconnaissance suite à un certain événement : « Au niveau de l'établissement, je pense que la reconnaissance vient du fait que ton travail va bien, que tu réussis bien tes projets.» • Avoir accès à de la formation : « Par contre, il y a une autre marque de reconnaissance qui est intéressante et c'est la formation en cours d'emploi. Pour moi, c'est drôlement important de reconnaître quelqu'un et de lui permettre d'avoir des formations d'appoint en cours d'emploi [...] Pour moi, c'est de la reconnaissance [...] » 5 Voir Ce que les CSRSSS trouvent important dans leur travail, tableau IV. 18 • Avoir des ressources : disposer des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs fixés, obtenir les résultats désirés, pouvoir répondre aux besoins des différents intervenants : « […] moi déjà là, si on est capable de reconnaître le... le travail que les gens font, puis qu'on leur fournisse ce qu'il faut pour faire leur travail, je trouve que c'est déjà un élément de...de... [reconnaissance] » • Les symboles : tout geste posé ou objet remis significatif d’une intention : « Il [le président du CA] m'a envoyé des fleurs à ma fête... tu sais, là […] » • Avoir de la visibilité : « Il me rendait justice dans mes dossiers, il rendait à César ce qui appartenait à César, il le disait publiquement, clairement […] » • Avoir des reconnaissances matérielles : « Mais au moins, qu'on ait des conditions, ne serait-ce que des repas payés quand on travaille plus que tant d'heures, ça paraîtrait dans un budget et ce serait, à mon avis, une forme de reconnaissance. » • Être respecté : « Je vais être accompagnée dans le respect du fait que j'ai XX enfants, dans le respect de tout cela. Le respect, c'est une de nos premières règles ici dans l'établissement. C'est une de notre règle essentielle...le respect. C'est ...euh... ce sentiment-là de savoir qu'on va être respecté.» 3.2.2. Formes de reconnaissance non désirées Bien que la question ait été posée directement, seulement huit sujets ont fait état de formes de reconnaissance non désirées. Il s'agit de : Toute reconnaissance officielle et/ou individuelle; Gros « flafla », symbole (trophée, médaille); Recevoir de l'argent. Toutefois, une analyse plus détaillée des réponses fait ressortir que les CSRSSS ne refuseraient pas nécessairement d’être reconnus à travers les éléments énumérés ci-haut et se sentiraient même probablement reconnus grâce à ceux-ci, mais ils voient à ces formes de reconnaissances des conséquences indésirables et constatent que ces formes de reconnaissance ne sont pas, et de loin, les plus importantes pour eux. Du côté des conséquences indésirables, les répondants disent craindre que de telles formes de reconnaissance suscitent chez les autres un sentiment d'injustice, qu'elles entraînent une forme de 19 concurrence entre les membres de l'équipe, ou même qu'elles soient à l'origine de rivalités et de conflits internes. Ces craintes correspondent à l'importance accordée par les cadres à l'appartenance à l'équipe. « […] on n'a jamais privilégié ça ici de souligner une équipe plus qu'une autre. Souvent, quand on fait des médailles, ça amène des concurrences et pour moi, ce n'est pas une gratification après laquelle je courrais. Je serais aussi contente si les services hôteliers étaient soulignés parce qu'ils viennent de faire un beau travail. Pour moi, c'est aussi intéressant et je ne nous verrais pas avec des médailles parce que ça nous mettrait en compétition avec d'autres groupes. Je verrais mal le fait qu'une année, ce soit un directeur qui soit médaillé alors que l'autre directeur a peut-être travaillé énormément, mais peut-être plus dans la noirceur, c'est peut-être moins évident parce que ça touche moins la clientèle.» « C'est sûr que la dimension monétaire est un élément problématique dans le réseau, dans le sens où à partir du moment où vous avez deux personnes, la personne a toujours l'impression qu'elle a bien fait son travail et qu'elle le mérite autant que le voisin. De jouer sur ces dimensions-là, tout ce que je pense que ça va faire, c'est de créer une scission à l'intérieur des équipes de direction. On n'a qu'à regarder certains établissements où, selon le directeur ou théoriquement de l'évaluation de la classe qui est faite, ça crée des problèmes même si c'est une évaluation qui, théoriquement, est objective et faite par le ministère. Si vous ajoutez une différence plus grande, ça juste être une problématique de plus et non pas une solution.» Mais surtout, pour les CSRSSS, ces formes de reconnaissance ne constituent pas ce qui compte le plus pour eux. En l'absence des formes de reconnaissance jugées importantes (avoir de l'influence, avoir la confiance d'autrui, etc.), elles apparaissent même aux cadres comme un simulacre de reconnaissance qui tente d'éluder les vrais besoins. « Elle est très importante [la reconnaissance] mais à ce niveau-là. De me faire dire que je suis très bonne, de me faire donner deux ou trois tapes dans le dos ou de me faire envoyer des fleurs, ça ne m'intéresse pas. Je dis que ça ne m'intéresse pas - c'est quand même très gentil – mais ce n'est pas quelque chose dont j'ai besoin. Personnellement, c'est davantage l'autre facette de mon travail qui est une reconnaissance essentielle pour que je fonctionne : c'est-à-dire la confiance, la reconnaissance des compétences et la marge de manœuvre.» « Pour moi, la reconnaissance en soi [...] je n'irai pas à la TV pour donner une poignée de mains à Rémi Trudel et me faire donner une belle claque dans le dos comme quoi je suis performant. Dans ma vision des choses, ça ne cadre pas du tout, le ministre est bien fin, mais il fait sa job et c'est comme ça. Pour moi, la reconnaissance, je l'aimerais mieux - je l'ai eu une fois ce plaisir là et ça n'a jamais passé – ça fait une mèche de ça. Il a formé un groupe d'études et il a dit : " Vous faites de la XXX et il paraît que vous trouvez la vie dure. On va s'asseoir, on va regarder ça et on fera une proposition au ministère." On a travaillé d'arrache-pied pendant six mois et on était environ huit sur le comité : XXX fonctionnaires du ministère dont XXX sous-ministre et XXX directeurs des XXX. Ça n'a jamais été plus gros que ça [ il n’y a jamais eu de suites ] et ça a été une de mes grandes frustrations.» 20 3.3. Objets et sources de reconnaissance 3.3.1. Objet : ce qui mérite d’être reconnu Suite à l’analyse des entretiens (voir tableau VI), trois grandes catégories cernant ce qui mérite d’être reconnu émergent : l’apport à l’établissement; les qualités individuelles; le contexte de réalisation du travail. Tout d'abord, reconnaître l’apport des cadres supérieurs à leur établissement paraît être un incontournable. En effet, 96 % des répondants ont mentionné cet élément au moins une fois au cours de l'entretien. Ont été classés dans «apport à l’établissement» les éléments qui répondent à la définition suivante : « aide apportée, participation, contribution directe ou indirecte à une œuvre commune i.e. à la bonne marche de l’établissement, à l’atteinte des objectifs fixés, à l’obtention des résultats espérés ». Après une analyse plus pointue, il appert que la catégorie «apport à l’établissement» se divise elle-même en deux groupes, l’engagement et les résultats. Tableau VI – Ce qui mérite d’être reconnu Sous-catégories Apport à l’établissement Résultats Engagement Inclassables / autres Qualités individuelles Compétences Capacité à résoudre des problèmes Qualités « humaine » Valeurs Inclassables / autres Contexte de réalisation du travail Charge de travail Contraintes Inclassables / autres Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Ratio NA/NR Fréquence 22 22 6 2 19 14 % du total 96% 100% 27% 9% 83% 74% Fréquence 84 72 10 2 59 25 % du total 44% 38% 5% 1% 31% 13% 3,82 3,27 1,67 1,00 3,11 1,79 4 21% 7 4% 1,75 6 5 9 32% 26% 47% 9 5 13 5% 3% 7% 1,50 1,00 1,44 14 61% 37 19% 2,64 10 4 4 10 71% 29% 29% 43% 18 7 12 12 9% 4% 6% 6% 1,80 1,75 3,00 1,20 Inclassables / autres Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 23. Nombre d’éléments de réponse : 192. 21 Parmi les individus ayant mentionné l’importance de reconnaître l’apport à l’établissement, 100 % soulignent la nécessité de reconnaître les résultats. Cette catégorie inclut tous les éléments qui ont trait au travail accompli par les CSRSSS, à leur contribution à l’établissement, aux résultats de gestion ainsi qu’à la qualité des services offerts : « […] Ça a été difficile mais quand tu réussis quand même à donner une bonne qualité de service tout en respectant ton budget dans tes services, je pense que ça mérite aussi d'être reconnu. » « Je pense qu'ils devraient nous... nous reconnaître, au moins, pour ce qu'on fait de bien. » « On devrait reconnaître le travail accompli et les résultats obtenus. » L’engagement des cadres envers leur établissement mérite lui aussi d’être mis en évidence. Selon nous, le fait que les CSRSSS désirent que l’on reconnaisse leur engagement coïncide avec les conclusions de la recherche de Morin et de ses collaborateurs (2001). De surcroît, le type d’engagement dont les individus font état est l’engagement affectif, ce qui est tout à fait cohérent avec les résultats de la recherche effectuée en 2001. La définition utilisée lors de la catégorisation est donc celle de Morin et al. (2001) : « attachement, identification et implication de l’employé dans l’organisation. » Ainsi, 27 % des répondants jugent nécessaire de reconnaître l’engagement du CSRSSS envers son établissement. Les exemples suivants représentent bien cet état de fait : « Ce serait, dans le fond, de reconnaître l'engagement que j'ai à la mission de l'établissement, à rendre de bons services […] » « […]" Faites votre petit quotidien puis c'est assez ! " Moi, je pense que si t'es cadre supérieur, t'es cadre supérieur, t'as un job à faire, tu dois être créatif, tu dois faire des projets, tu dois avancer pour le mieux être de l'organisation. Ça, j'y crois. » Les cadres souhaitent également qu'on reconnaisse leurs qualités individuelles. Les éléments répertoriés dans cette catégorie répondent à la définition suivante : ce qui fait le mérite de quelqu’un sur le plan moral, intellectuel, professionnel, etc. Parmi les répondants, 83 % insistent sur l’importance de reconnaître les différentes qualités des individus. Bien sûr, nombre de qualités méritent d’être reconnues, mais quatre se démarquent : les compétences / l’expertise (mentionnée par 74 % des répondants); les qualités « humaines » (32 %); les valeurs (26 %); la capacité à résoudre des problèmes (21%). Voici quelques exemples : Compétences : « C'est sûr [ce qui mérite d’être reconnu c’est] sa compétence. » « Idéalement, reconnaître l'expertise de quelqu'un […] » 22 Qualités « humaines » : « La capacité de faire sa place tout en respectant les gens […] » « C'est important d'être reconnu comme un bon gestionnaire de personnes dans le changement surtout. » Valeurs : « [Je suis une] personne très éthique, c'est très important pour moi de respecter les valeurs d'un client, de voir à ce qu'il ait de bons services, d'écouter ses attentes parfois particulières, même si c'est exigeant pour nous. Il me semble que si on reconnaissait cette valeur en moi, ce serait un plus. » « Je pense que c'est les valeurs profondes qu'on y met qui méritent d'être reconnues et revalorisées et non pas les résultats eux-mêmes en tant que tel. Les moyens que l'on choisit pour atteindre les résultats, le respect que l'on montre aux autres dans l'atteinte des résultats sont des valeurs... les valeurs de base de la vie elle-même, de la vie du travail ... » Capacité à résoudre des problèmes : « [Je] m'attendrais peut-être à en recevoir [de la reconnaissance] quand je résous des problèmes. » « Par rapport à des dossiers spécifiques, comme un problème dans un secteur d'activités, tout le monde est au courant du problème et ça se règle bien, ce serait de le souligner de façon informelle. » Enfin, 61 % des répondants insistent sur l’importance de reconnaître le contexte de réalisation du travail. Cette dernière catégorie est définie comme suit : ensemble des circonstances, des situations auxquelles l’individu fait face en tentant d’effectuer son travail. La charge de travail et les différentes contraintes du travail sont les éléments saillants de cette catégorie. En fait, 71 % des répondants mentionnent qu’il faudrait reconnaître davantage la charge de travail imposée au CSRSSS et 29 % d’entre eux soulignent l’importance de reconnaître les contraintes. Nos propos sont illustrés par les exemples suivants : Charge de travail : « Ma charge de travail est trop lourde par rapport à la reconnaissance. » « Mais d'un autre côté, il va falloir que quelque part, ils comprennent les conséquences de l'aplatissement des structures. On a de la misère à suivre. » 23 Contraintes : « Reconnaître aussi... plus... les contraintes auxquelles... les contraintes de gestion avec lesquelles on doit composer [...] » « Alors, cette persistance à vouloir atteindre aveuglément des objectifs comme ils le font sans tenir compte des contraintes, c'est décevant, démotivant, je n’emploierais pas d'autres mots, mais dans ces conditions-là, lorsqu'on a à les rencontrer pour leur expliquer nos conditions de travail et lorsqu'on a à les rencontrer pour leur dire : "Ce que vous nous demandez est irréalisable" et qu'on se fait dire : "On ne veut pas entendre parler de vos raisons", bien, je dois dire qu'on se sent pas reconnu dans ces circonstances-là. » 3.3.2. Source : de qui doit venir la reconnaissance Nous désirions aussi apprendre par qui les CSRSSS désirent être reconnus ainsi que l’importance relative de ces sources. Nous avons donc demandé aux répondants de classer, par ordre d’importance pour eux, différentes sources potentielles de reconnaissance. On demandait au participant de classer les sources au regard de ce qu’il désire – son idéal – et non pas par rapport à ce qui se produit réellement. Pour ce faire, nous avons remis à chacun des répondants une série huit de cartons et un crayon. Sur six des huit cartons était mentionnée une source différente de reconnaissance (i.e. un carton pour les supérieurs hiérarchique, un pour les pairs, etc.). Deux des cartons étaient blancs, le répondant étant libre d’y inscrire une nouvelle source. Nous avons noté le classement fourni, puis déterminé le rang de chacune des sources en comptant le nombre d’occurrences de chaque source pour chaque rang. Les différentes sources de reconnaissance énumérées par les CSRSSS sont présentées ci-dessous par ordre décroissant d’importance : Supérieurs hiérarchiques (direction générale, conseil d’administration); Pairs / collègues de travail; Employés / subalternes; Grand public; Régie régionale; Ministère. 24 3.4. Pratiques suggérées Les CSRSSS ont proposé différentes solutions afin d’accroître leur sentiment « d’être reconnus » (tableau VII, page 28). 1. Améliorer les différentes conditions de travail (souligné par 95% des répondants et mentionné en moyenne 2,25 fois/interviewé). Par exemple, on suggère : d’augmenter / bonifier les salaires (élément qui est nettement le plus important); d’accroître le nombre de jours de congés; d’instaurer des horaires flexibles. 2. Instaurer des mécanismes d’échanges. Divers types de mécanismes sont suggérés : jumelage6 / échange : employé du ministère-régie / cadre supérieur du RSSS : « Ils manquent de mix, il faudrait que les gens du ministère viennent davantage dans les établissements. Je ne détesterais pas, pour un mois, changer de poste avec un fonctionnaire à Québec. Qu'il vienne prendre ma job et qu'il vienne voir comment vont les dossiers, je suis sûr que dans un mois, il va être assez étourdi qu'il n'aura pas le temps de perdre son temps [...] » mécanismes d’échanges inter-cadres supérieurs. Par exemple : mise en place d'un centre de référence pour les CSRSSS et les directions générales; tenue de congrès; tenue de forum d’échanges; possibilité d’aller voir ce qui se fait dans d’autres institutions canadiennes ou autres; mécanismes d’échanges : grand public / cadres supérieur; jumelage : grand public / CSRSSS; jumelage : journaliste /CSRSSS. On entend par jumelage l’échange des rôles ou la possibilité d’accompagner quelqu’un pendant sa journée de travail de façon à améliorer la compréhension des réalités et contraintes de chacun. 6 25 3. Valoriser davantage la formation continue et instaurer des conditions permettant de tirer profit des occasions de perfectionnement. Les CSRSSS insistent sur le fait que les formations sont importantes pour le développement de leurs compétences, ce qui a un impact sur le fonctionnement de l’établissement. La formation est généralement disponible, mais ils ne peuvent en profiter : par manque de temps; parce que le volume de travail à reprendre au retour est trop élevé; par souci d’économie (les CSRSSS n’osent pas se payer de formation, ils préfèrent garder l’argent pour autre chose) : « Qu'on puisse avoir de la formation plus... on en a... le problème, c'est qu'on n'a pas le temps d'y aller. Il y en a comme trop mais ce qui serait peut-être le fun, c'est qu'on puisse avoir du ministère des budgets de formation attitrés spécifiquement aux cadres supérieurs... Parce quand on fait nos budgets, on est toujours gêné... de prendre une partie... tu sais, comme là, il y avait une super de belle formation, c'était quasiment 2 000 $... Tabarnouche, je ne peux pas aller là... ça n'a pas d'allure, ça coûte trop cher... tu sais, là... par rapport au restant de l'organisation... parce que c'est tout dans le même budget. » par manque de fonds (il n’y a pas de fonds disponible pour la formation des CSRSSS) : « Je ne me rappelle même pas des montants d'argent qui vont être consentis mais...euh...tu sais... puis qu'il y ait des programmes de formation pour qu'on puisse mettre notre compétence à jour régulièrement. On a de la misère à avoir 500$ en formation dans l'année...bien moi, je pense que si on...on avait des montants dédiés pour le perfectionnement puis la mise à jour des cadres puis qu'on garde notre enthousiasme à quelque part en nous permettant de prendre un peu de recul puis de nous dégager, bien... pour moi, ce serait des formes de reconnaissance plus tangibles des fois que bien des prix. » 4. Avoir la possibilité d’influencer le cours des événements. Cet élément est soulevé par plus de la moitié des répondants et ce, en moyenne 2,27 fois par entretien. Pour se sentir impliqués, les CSRSSS proposent : que le ministère ou les régies les implique lors de prise de décision : « D'abord, les Régies régionales devraient prendre le temps de nous impliquer par des comités. Et ce n'est pas tout de nous impliquer dans les comités, il faut que les décisions se prennent aussi et qu'on voit une réussite si on travaille sur un projet. » d’accroître le nombre de mécanismes consultatifs ainsi que leur fréquence; « Davantage de mécanismes consultatifs sur le terrain et qu'on en tienne compte. C'est beau faire de la consultation mais il faut que ça donne quelque chose. Parfois, on se pose la question à savoir où ça va nous mener. » 26 d’être utilisés comme consultants à l’intérieur même du réseau (sans pénalité salariale). « Ce serait des prêts de services comme agents, comme consultants dans d'autres boîtes. Moi, je pense que c'est très valorisant de se faire appeler pour dire : "Écoutez, on pourrait vous prêter trois mois à XXX parce qu'ils ont un dossier et vous avez développé l'expertise...", ce qui serait très stimulant. C'est une tâche un petit peu plus supplémentaire mais... ça, ça veut dire qu'on vient te chercher et ça, c'est important. Favoriser plus les prêts de services, c'est supposé d'être prévu dans le mécanisme provincial, mais ça ne l'a pas été tant que ça. Favoriser les prêts de services pour que les gens vivent un autre contexte. » Bien sûr, toutes ces suggestions sont conditionnelles à l’écoute réelle de l’opinion des cadres supérieurs et à l’application des propositions qu’ils font. 5. Obtenir davantage de soutien en termes : de conseil, d’aide de la part du ministère et des régies; « Cela fait qu’à partir du moment où ils le reconnaissent [ les difficultés associées aux demandes, aux objectifs fixés], on se dit ok, on va se retrousser les manches puis s'ils nous offrent du support pour nous aider à rencontrer ce qui nous demande puis si on sent qu'il y a des petits pas qui sont faits pour assouplir certains règlements, certaines choses, bien...» d’appui de la part du ministère et des régies; « Moi, je pense que...tu sais... arrêter de dénoncer, de dire ouvertement, publiquement que les hôpitaux sont mal gérés. Cesser ça. Arrêter le discours négatif et dire : " Écoutez, on le sait que nos cadres font un bon, un excellent boulot, un gros boulot parce que ce qu'on leur demande, ce n'est pas nécessairement facile." Le reconnaître une fois de temps en temps. L'écrire à quelque part, le dire [...] » de cohérence et de compréhension des réalités « terrain » lors de la prise de décisions. « Au niveau du ministère, je vous dis que c'est difficile parce qu'on est en situation d'éléments contradictoires. Ils sont vraiment sur un volet politique alors qu'on est sur le terrain. S'ils arrêtaient de jouer dans les conventions collectives, ça nous aiderait beaucoup. » 6. Obtenir davantage de moyens afin d’améliorer leur qualité de vie. La très grande majorité des moyens sont des ressources financières, mais certains répondants parlent aussi d’augmentation de la marge de manœuvre accordée par les instances supérieures aux CSRSSS. Les répondants utiliseraient les moyens octroyés pour : améliorer l’équipement existant et/ou acheter de nouveaux équipements; engager de nouvelles ressources (ad hoc ou permanente); prendre le temps de former la relève et d'assurer le transfert d'expertise. 27 7. Souligner les bons coups en les diffusant. L’important est que l’environnement – rapproché ou non – sache que les CSRSSS font du bon travail, font de bonnes choses pour leur clientèle. Ceux-ci suggèrent par exemple de « publiciser » leurs bons coups à travers : les publications existantes (rapport annuel ou autre) du Réseau ou une nouvelle publication qui serait créée; un cocktail ou une soirée « méritas », soit pour l’établissement, soit pour une catégorie d’établissement; la presse populaire (la Presse, le Devoir, etc.) Finalement les CSRSSS maintiennent qu’il faudrait : 8. Rendre l’évaluation formelle obligatoire et l’appliquer réellement; 9. Laisser plus de temps aux CSRSSS pour penser et développer des visions à long terme, ainsi que pour répondre aux diverses demandes des instances supérieures; 10. Mettre en place de mesures visant à favoriser la mobilité inter-établissements, et ce sans perte d’avantages. Tableau VII – Pratiques suggérées Nombre de répondants (NR) ayant mentionné Nombre d’affirmations Sous-catégories cet élément au moins une (NA) par sous catégorie fois Fréquence % du total Fréquence % du total 20 95% 45 22% Conditions de travail 16 76% 36 17% Mécanismes d'échanges 12 57% 21 10% Formation 11 52% 25 12% Influence / être impliqués 10 48% 14 7% Soutien 7 33% 11 5% Plus de moyens 6 29% 10 5% Souligner bons coups 5 24% 15 7% Évaluations 4 19% 4 2% Avoir du temps 4 19% 10 5% Mobilité 11 52% 17 8% Inclassables / autre Note : Nombre de CSRSSS ayant répondu à cette question : 21. Nombre d’éléments de réponse : 208. Ratio NA/NR 2,25 2,25 1,75 2,27 1,40 1,57 1,67 3,00 1,00 2,50 1,55 28 4. CONCLUSION Les résultats font ressortir que, pour les répondants à notre étude, le sentiment de reconnaissance se développe sur deux plans distincts : Le plan professionnel, lorsqu'on reconnaît les résultats obtenus, les compétences, ainsi que les conditions difficiles dans lesquelles les cadres exercent leur travail et la charge de travail qu'ils supportent; Le plan personnel, lorsqu'on reconnaît leur engagement, leurs qualités humaines et leurs valeurs. Ces deux plans entraînent des formes et des pratiques de reconnaissance bien différentes. Au plan personnel, les cadres veulent surtout avoir le sentiment d'appartenir à l'équipe. Au plan professionnel, la situation est plus complexe. D'une part, il semble que, pour les CSRSSS, la meilleure manière de reconnaître la compétence et les bons résultats est de permettre aux cadres d'exercer davantage d'influence, et ce de diverses façons (en leur faisant confiance, en les consultant davantage, etc.). En fait, si on considère ce que les cadres n'aiment pas dans leur travail, il est permis de croire que les cadres vivent surtout la situation inverse : ils interprètent le fait qu'ils soient peu impliqués dans des décisions qui contraignent leur capacité à bien faire leur travail comme un désaveu de leurs compétences. Les CSRSSS apprécient également tout ce qui contribue à leur développement professionnel (échanges, formation, etc.), ce qui correspond bien avec ce qu'ils aiment surtout de leur travail (relever des défis, mener à bien des projets, etc.). D'autre part, malgré leur engagement, les cadres trouvent leur contexte de travail difficile et souhaiteraient qu'on reconnaisse ces difficultés par le biais de meilleures conditions de travail (rémunération, augmentation des congés, flexibilité des horaires, etc.). Quant aux sources, aux formes et aux pratiques de reconnaissance, elles s'organisent aussi de deux manières distinctes. D'un côté, on trouve la reconnaissance interpersonnelle, informelle, venant des supérieurs immédiats, des pairs, des employés et du grand public. Ce genre de reconnaissance paraît être le plus important aux yeux des cadres. Toutefois, la faible présence de ces formes de reconnaissance dans les pratiques suggérées laisse croire que, dans les établissements où travaillent les répondants, ces pratiques sont déjà présentes. Il est possible également que les cadres ne les mentionnent pas parmi les pratiques suggérées justement à cause de leur caractère interpersonnel et informel, ce qui rend plus difficile leur insertion dans une démarche structurée d'amélioration des pratiques. De l'autre côté, on trouve la reconnaissance institutionnelle, formelle et venant du Ministère ou de la Régie régionale. Paradoxalement, bien que le Ministère et la Régie régionale viennent au dernier rang d'importance des sources de reconnaissance, c'est sur ces intervenants que se concentre l'essentiel des pratiques suggérées. On peut formuler ici quelques pistes d'explications. D'abord, il est possible que les cadres suggèrent ces pratiques parce qu'ils voient là la possibilité d'actions concrètes qui pourraient être entreprises au niveau régional ou provincial. Par opposition, il peut leur sembler difficile de mettre en place une pratique incitant les directeurs 29 généraux de leurs établissements à leur dire plus souvent «merci», par exemple. Une autre explication, plus probable, est que les pratiques institutionnelles sont celles qui font le plus cruellement défaut aux CSRSSS. En effet, si la reconnaissance des supérieurs immédiats, des pairs et des employés était absente ou nettement insuffisante, il est probable que les cadres changeraient d'établissement ou quitteraient leur emploi. Cette hypothèse est confirmée par les réponses des cadres interrogés quant à ce qui leur plaît le plus et le moins dans leur travail. Bien que la conduite de 26 entretiens nous ait semblé parvenir assez rapidement à un point de saturation des données, il reste maintenant à rendre nos résultats généralisables en menant une enquête auprès de l'ensemble des cadres supérieurs du Réseau. C'est ce que notre équipe entreprendra dans les mois qui viennent. 30 ANNEXE Définitions utilisées pour le codage des données de la thématique « Formes de reconnaissance » Avoir de l’influence – Avoir la possibilité d’influencer, directement ou indirectement, un choix, une décision et / ou d’avoir le sentiment de faire évoluer l’environnement dans le sens désiré. Avoir la confiance – Avoir l’impression que les « autres » acceptent de s’en remettre à nous ou à notre jugement tant de façon personnelle que professionnelle. Avoir un sentiment d’appartenance – Avoir le sentiment d’être apprécié, d’être soutenu par les membres du groupe (pairs, équipe du travail, établissement), d’être important au sein du groupe, que le travail d’équipe soit aussi important pour les membres de l’équipe que pour la personne concernée, être attaché à la notion d’équipe. Expression de satisfaction – Savoir que ce qui a été fait est bon, que les individus concernés sont satisfaits, contents. Rémunération et avantage sociaux Avoir du soutien – Obtenir de quelqu’un, d’un pair, d’une instance supérieure un appui, une aide, un réconfort tant de façon émotive, personnelle que professionnelle. Obtenir une rétroaction – Obtenir de l’information en retour ayant pour objet d'avertir directement ou indirectement le(s) producteur(s) d'un comportement / travail/ projet de l'écart entre l'effet réel et l'effet poursuivi, et ainsi de lui permettre de mieux adapter ses comportements, ses réponses. Souligner les bons coups – Attirer l’attention d’un auditoire X (entourage immédiat jusqu’à grand public) sur les « bons coups » (bon travail, bons résultats, contribution) d’une (des) personne(s). Expression de gratitude – Se faire dire merci. Fierté personnelle – Sentiment de satisfaction de soi. 31 Avoir accès à de la formation – Avoir la possibilité d’acquérir des connaissances théoriques et pratiques et celle de développer des aptitudes nécessaires à l'exercice d'une activité, d'une profession, d'une fonction. Avoir des ressources – Disposer des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs fixés, obtenir les résultats désirés, pouvoir répondre aux besoins des différents intervenants. Symbole – Élément qui n’a que peu de valeur matérielle mais qui est significatif d’une intention (trophées, cérémonie, gala) Avoir de la visibilité – Qui permet à l’individu de se faire remarquer, et ce directement ou indirectement. Avoir des reconnaissances matérielles – Élément tangible et ayant une certaine valeur monétaire et qui est significatif d’une intention Être respecté 32