Fiche pédagogique "Beethoven et la musique romantique Allemande"

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Fiche pédagogique "Beethoven et la musique romantique Allemande"
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• 01.10.2014 / concert
Variations Diabelli / Andreas Staier, piano-forte
• 08.10.2014 / concert de l’orchestre de limoges et du limousin
Brahms, libre mais heureux / Dorota Anderszewska, violon / OLIM / Robert Tuohy, direction
• 27.11.2014 / conférence
Le Tour de Beethoven en 80 minutes / Michel Beretti
• 02 & 03.12.2014 / concerts OLIM
Beethoven, piano concertos / François-Frédéric Guy, piano / Marius Stieghorst, direction
• 16, 17 & 18.01.2015 / concerts
Beethoven, marathon sonates / Tedi Papavrami, violon / François-Frédéric Guy, piano
• 24.01.2015 / danse
Benjamin Millepied / Ballet du Grand Théâtre de Genève
• 21.03.2015 / cinéma (à la bfm de limoges)
La Jeune Fille et la Mort / Roman Polanski
• 26 & 27.03.2015 / danse
La Jeune Fille et la Mort / Sergio Simòn, chorégraphie / Ballet de l’Opéra-Théâtre de Limoges /
Quatuor à cordes de l’OLIM
• les œuvres de beethoven...
Variations Diabelli : sur un thème original de Diabelli, une dizaine de compositeurs se sont prêtés au jeu de la variation
— un vaste aperçu des débuts du romantisme allemand.
Concerto pour violon : composé en 1806, l’unique concerto pour violon de Beethoven fait une brillante synthèse de
l’élégance viennoise et de la fougue héroïque du compositeur.
Marathons sonates et concertos : les dix sonates pour violon et les cinq concertos pour piano offrent un large panorama
de son évolution stylistique, du classicisme au romantisme.
• ... et celles des autres
Schumann : ouverture de Manfred, musique de scène opus 115 sur le poème éponyme de Lord Byron : la musique et
les vers de deux romantiques passionnés.
Brahms : la Symphonie n°3 en fa majeur opus 90, composée en 1883, est ostensiblement tournée vers le romantisme
de Schumann.
Weber : Invitation à la danse opus 65 (1819), valse utilisée par Michel Fokine puis Benjamin Millepied pour le ballet
Le Spectre de la rose, sur le poème éponyme de Théophile Gautier.
Schubert : quatuor n°14 en ré mineur « La Jeune Fille et la Mort » D.810, composé en 1824, dont l’Andante est une
variation sur le célèbre lied, composé sept ans avant sur un poème de Matthias Claudius.
beethoven, à la source du
romantisme allemand
À l’apogée du siècle des Lumières apparaît en
Allemagne, dans les années 1770, le Sturm
und Drang. Caractérisé par un rejet du monde
social, des conventions classiques, de l’élégance
française, de la moralité de l’art, les poètes du
Sturm und Drang (Goethe, Herder, Klinger)
recherchent leur inspiration dans la nature où
les sentiments et les passions sont libres et
spontanés. Radicalisation des Lumières, le Sturm
und Drang ouvre de nouvelles voies artistiques :
rapidement abandonné par les compositeurs de
l’époque (Mozart, Haydn), il pose néanmoins les
premières pierres du romantisme.
Beethoven est alors enfant et se fait remarquer
comme pianiste virtuose. Jusqu’au tournant
du siècle, il compose une part importante de
son œuvre dans l’esprit des Lumières et de la
Révolution française : son style est savant, animé
par l’idéal humaniste et inspiré par la lecture des
classiques grecs.
En 1806, le Saint Empire romain germanique se
disloque — Napoléon, libérateur, fils héroïque de
la Révolution, devient le tyran qui met l’Europe
sous son joug ; la France, patrie de l’esprit, pays
des droits de l’Homme, devient l’envahisseur,
l’occupant barbare. Chez les intellectuels
allemands naît un sentiment patriotique qui ne sera
qu’amplifié par le congrès de Vienne, en 1815, à
la chute de l’Empire français : la Confédération
germanique,
artefact
diplomatique
de
circonstances, manque de grandeur millénaire.
Animé par une force vitale, le Volksgeist (esprit du
peuple), ce nouveau sentiment exalte les vertus
primitives et la grandeur de la nation. Valorisant
non le repli sur soi, mais l’essor de l’identité, ce
mouvement qui articule la mystique patriotique à
l’universalisme des Lumières, dont il n’est qu’une
tardive réaction, façonne l’Europe moderne.
Cette émergence correspond au début de la
période héroïque de Beethoven, marquée par
le Testament de Heiligenstadt, où il révèle sa
surdité et l’isolement psychologique auquel il est
contraint. Le musicien, confronté à l’injustice, à
la solitude, à la souffrance psychique comme
physique, se révolte aussi contre l’envahisseur
et l’empereur-tyran qui l’a tant déçu. Le combat
qu’il mène contre ces tourments obsédants vibre
d’un courage sublime et d’une sainte espérance
en l’Homme : cette dialectique des souffrances
intimes et de la quête d’un idéal patriotique fonde
le romantisme allemand.
À la fin de sa vie, le style de Beethoven se
fait plus personnel : dans la Missa Solemnis
ou la Neuvième symphonie, il s’affranchit des
références politiques pour s’élever vers un
idéal esthétique et spirituel préfigurant déjà les
évolutions musicales de Wagner, Bruckner et
Brahms.
Extrait
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Testament d
1827), 1802
ethoven (1770Ludwig van Be
le piano roi
La fin de l’ère classique et l’avènement du romantisme
voient aussi le sacre de celui qui est depuis toujours considéré comme le roi des instruments : le piano. Clavecin
jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, piano-forte jusqu’au début
du XIXe, le clavier règne sur la musique. Son immense tessiture, la palette chromatique de ses couleurs, la facilité
d’accès de son apprentissage le font préférer des compositeurs autant que des mélomanes. Et les compositeurs du
XIXe sont avant tout des pianistes chevronnés qui écriront
d’abord pour leur instrument royal.
La sonate, écrite quasiment à la chaîne par Haydn et Mozart
pour des des morceaux de salon, devient avec Beethoven
puis Schubert une forme reine, requérant maturité et
réflexion de la part du compositeur comme de l’interprète.
Les dernières sonates de Beethoven (qui en écrivit 32),
les 19 sonates de Schubert, les 3 sonates de Chopin et
de Brahms sont des monuments qui condensent tout le
génie de leurs compositeurs. Au cours du XIXe siècle, la
sonate laissera peu à peu la place aux nouvelles formes
pour piano seul : plus appropriées au romantisme (valses,
mélodies, ballades...), venues du folklore (mazurkas,
polonaises, danses...), libérées des conventions formelles
(rhapsodies, impromptus, fantaisies...), soumises à la
seule virtuosité (scherzos, études...).
Le concerto, quant à lui, va régner sur le répertoire
instrumental — tout grand compositeur aura bientôt à son
actif un grand concerto pour piano. Si Mozart en fait un
genre incontournable (en en composant 27), Beethoven
le consacre en produisant cinq monuments du répertoire,
dont le dernier, « L’Empereur », pose la première pierre
du grand concerto romantique. À leur suite, Schumann,
Chopin, Brahms, puis Liszt, Grieg et Rachmaninoff
construiront le reste de l’édifice musical que représente
encore aujourd’hui le concerto pour piano.
Texte
La mort a toujours interrogé les poètes et les penseurs.
Le mystère de notre condition, la vanité de notre vie,
l’inéluctabilité de notre mort sont des thèmes universels
dans les arts et la philosophie. Mais avec l’arrivée du Sturm
und Drang et du romantisme, c’est une autre figure qui
surgit dans l’imaginaire littéraire : celle de la mort injuste
qui frappe aveuglément.
Injuste ? La mort pourrait-elle frapper justement ou
injustement ? Ce n’est pas la question : le romantisme
préfère crier sa révolte, vaine à coup sûr, mais profonde et
insatiable, contre l’inhumanité du sort et de notre destinée.
Ce thème, on le retrouve dans La Jeune Fille et la Mort,
bien sûr, mais aussi dans Le Roi des aulnes (Goethe), où
le jeune enfant est emporté par la Mort sans que son père
y puisse rien ; dans Atala (Chateaubriand), où le destin de
la belle Indienne est scellé malgré son amour vertueux ;
dans Le Portrait de Dorian Gray (Wilde), où le héros se bat
contre le spectre de la vieillesse qui veut ravir sa beauté et
sa jeunesse… et finira par lui prendre la vie.
Mais pour le héros romantique, la mort est aussi une
libération : Manfred (Byron), René (Chateaubriand) et
le voyageur du Winterreise (Schubert) la cherchent en
vain, espérant y trouver la consolation qu’ils n’obtiennent
pas dans le monde terrestre. Révolté contre la mort
d’un être cher ou contre les obstacles qui le séparent du
bonheur, le héros romantique erre, sombre et solitaire, à
la recherche d’une mort qui rôde partout mais le prive, lui,
de l’apaisement funeste qu’il demande. Dernière injustice
donc : la mort préfère prendre ceux qui la craignent plutôt
que ceux qui l’appellent !
la jeune fille
et la mort
lle :
— La Jeune Fi
-t’en !
va
,
Ah
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en
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Va
ux squelette !
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Disparais, od
jeune, va-t’en !
Je suis encore
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Et ne me touche
— La Mort :
lle créature !
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Donne-moi la m
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Je suis ton amie
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Laisse-toi faire
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Viens douc
s (1740-1815),
Matthias Claudiu
75
s Mädchen, 17
Der Tod und da
Manfred, gravure de Gustave Doré (1853)
Le spectre de la mort
Extrait
manfred
Acte I, scène 2
des rochers
Manfred, seul, sur le penchant
[...] Ô vous, terre, ma mère !
de lumière,
Gigantesques sommets ! aurore
s’enflammer
Vaste horizon sur qui le jour va
puis vous aimer.
ne
Pourquoi tant de beautés ? je
du monde,
ieux
glor
œil
,
Toi qui t’ouvres sur tous
,
nde
féco
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rayo
tes
à
,
Délices de la terre
leur
cha
ste
céle
ta
ti
sen
pas
Seul, je n’ai
mon cœur.
Et jamais ton regard ne brilla sur
e la cime aiguë,
foul
pied
Vous, rochers, dont mon
vue,
ma
à
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limit
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pou
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Dont j’ai l’immens
ux,
furie
nts
torre
les
vois
je
et
s
tend
D’où j’en
eux,
sur
uler
De vos flancs échappés, se déro
erbes,
sup
plus
les
pins
les
,
Et d’où, dans le lointain
rbe ;
d’he
fes
touf
des
t
blen
sem
cé,
Sous l’espace effa
granit
de
lits
vos
en
Lorsqu’un bond, lorsqu’un souffle,
,
finit
sé
pas
Où le repos commence, où mon
be prête,
Me précipiteraient sur cette tom
t que je m’arrête ?
vien
d’où
irs,
dés
Au but de mes
rouler ;
Je sens l’impulsion, et je ne puis
ler ;
recu
J’aperçois le péril, et ne peux
inébranlable —
pied
mon
,
Mon front est chancelant
itable,
Ah ! je te reconnais, pouvoir inév
!
loi
le
fata
une
vie
la
de
fait
Qui me
ile en soi,
stér
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cœu
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port
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c’es
e
vivr
Si
placé la flamme,
Foyer sombre où la glace a rem
son âme !
de
u
bea
tom
le
enir
Si vivre est dev
ifier ;
Car je ne cherche point à me just
plier ;
rais
Devant mes actions je ne sau
crime !
son
r
avili
t
c’es
Criminel, s’excuser…
Lord Byron (1788-1824), 1817
Photo couverture : Der Morgen (détail) 1820 - 1821 | C.D. Friedrich | Rédaction : C.-C. Guibert | Conception : A. Jouffriault / Opéra-Théâtre de Limoges | 2014
de Heussey, 1856)
(trad. Hyacinthe du Pontavice
Pour aller plus loin...
> Discographie
Sonates pour violon de Beethoven : D. Oistrakh, L. Oborin (Philips 2001)
Concertos pour piano de Beethoven : K. Zimerman, L. Bernstein,
Wiener Philharmoniker (DG 1992)
Variations Diabelli de Beethoven : (au piano-forte) A. Staier (Harmonia Mundi 2012)
– (au piano) G. Sokolov (Naïve 2003)
Concerto pour violon de Beethoven : J. Heifetz, A. Toscanini,
NBC Symphony Orchestra (1939, disponible chez Naxos)
« La Jeune Fille et la Mort » de Schubert : Amadeus Quartet (DG 1997)
Troisième symphonie de Brahms : B. Haitink,
Royal Concertgebouw Orchestra (Philips 1983)
Manfred de Schumann : J. von Bülow, A. Boreyko,
Düsseldorfer Symphoniker, J. Deutsch (DVD ArtHaus Musik 2011)
> Beethoven
Ludwig van Beethoven : biographie d’A. Tubeuf (Actes Sud 2009)
Ludwig van B. : film de B. Rose avec Gary Oldman sur le mystère de
l’« Immortelle Bien-aimée » (1994)
Copying Beethoven : film d’A. Holland avec E. Harris et Diane Kruger sur la composition
de la Neuvième Symphonie (2006)
> Romantisme allemand
Le Prince de Hombourg : pièce (1821) de H. von Kleist (Actes Sud 2000)
De l’Allemagne : essai (1883) du poète H. Heine (Gallimard 1998)
L’Âme insurgée : Écrits sur le Romantisme, ouvrage (1977) d’A. Guerne (Points 2011)
L’Âme romantique et le rêve : étude d’A. Béguin (Le Livre de poche 1993)
Faust, une légende allemande : film de Murnau d’après la pièce de Goethe (1926)
...et plus encore sur www.operalimoges.fr
1770 /
Naissance de Beethoven à Bonn
1774 /
Goethe : Les Souffrances du jeune Werther
1792 /
Haydn, professeur de Beethoven
1796 /
premiers symptômes de surdité de Beethoven
1802 /
Beethoven : Testament de Heiligenstadt,
début de la période héroïque
1805 /
Beethoven : Fidelio
1808 /
Goethe : Faust ;
Beethoven : Symphonies n°5 & 6
« Pastorale », concerto n°4
1809 /
Beethoven : concerto n°5 « Empereur »
1815 /
Fin des guerres napoléoniennes ; dernière
période créatrice de Beethoven
1817 /
Lord Byron : Manfred
1822 /
Beethoven : Sonate opus 111
et Variations Diabelli ; Weber : Der Freischütz
1824 /
Beethoven : création triomphale de
la Neuvième symphonie
1827 /
Hegel : Esthétique ; Schubert : Winterreise ;
mort de Beethoven à Vienne
1830 /
Berlioz : Symphonie fantastique
1848 /
Schumann : Manfred ; Printemps des peuples
1856 /
Balzac termine la Comédie humaine
entreprise en 1830
1868 /
Brahms : Ein deutsches Requiem
1883 /
Brahms : création de la Symphonie n°3
sifflée par les partisans de Wagner
1885 /
Brahms : dernière symphonie,
fin du romantisme allemand

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