APPRENDRE, OUI…MAIS COMMENT de Philippe MEIRIEU

Transcription

APPRENDRE, OUI…MAIS COMMENT de Philippe MEIRIEU
UN LIVRE
LA NEUVIEME DE BEETHOVEN
Une histoire politique par Esteban BUCH
Voilà un livre précieux car il est rare qu’un chercheur s’intéresse aux rapports
entre musique et politique. La plupart des livres musicologiques auraient fait l’historique
de la création de la 9ème symphonie de Beethoven, ou donné de nombreux détails sur la
vie du compositeur, ou encore disséqué l’œuvre pour en faire une analyse précise.
La démarche d’Esteban Buch est tout autre. Elle consiste à montrer le parcours
que cette œuvre a pu avoir depuis sa création. Cette composition monumentale, souvent
considérée comme un « sommet de la musique occidentale » a, en effet, eu une vie
mouvementée et a été considérée comme une référence par de nombreux acteurs
politiques. Car l’analyse faite par Esteban BUCH
montre que toutes les familles
politiques, mêmes les plus opposées, ont « récupéré » cette œuvre de beethoven.
Cette analyse permet donc, d’une manière pratique, de réfléchir sur les liens entre
musique et politique et de ne pas se cantonner à une vision « moderne » de la musique,
qui serait la musique pure. La musique est un art, mais outre ses dimensions
esthétiques, nous ne devons pas oublier ses autres dimensions (sociale, économique,
politique…). La relation à la musique et son utilisation par certains régimes politiques est
ainsi très instructives et nous pouvons voir que parfois, ces différentes dimensions
peuvent s’affronter. Ainsi, quelques nazis mélomanes chercheront par tous les moyens à
réhabiliter l’œuvre de Beethoven à un moment où toutes les enquêtes sur le personnage
sont « accablantes » pour lui...
Une autre étude nous montre comment, à un moment où l’œuvre de Beethoven
sombrait dans l’oubli, les musiciens romantiques vont créer un véritable culte du
compositeur et notamment vont dépenser sans compter leur énergie pour faire ériger la
première statue de Beethoven. L’œuvre de Beethoven devenait ainsi le symbole de la
musique elle-même.
Outre le final de la 9ème symphonie de Beethoven, l’auteur s’interroge sur la
création des premiers hymnes politiques, nous apprenons ainsi de nombreuses
informations sur certaines œuvres et les conditions politiques qui les ont fait émerger.
Alors que fleurissent encore aujourd’hui de nombreux livres biographiques sur les
compositeurs, (pour Beethoven, il existe aussi une analyse psychanalytique…) bien
souvent racontés avec beaucoup d’emphase par des auteurs amateurs de musique, ce
livre permet une approche, non de l’auteur, mais de l’œuvre. Que peut-on dire d’une
œuvre quand on n’en fait pas une « analyse » ? Beaucoup de choses en définitive et ce
livre en apporte la preuve… Nous regrettons que ce genre de recherches soit si rare.
Vincent MAGNAN
Pour l’A.M.E.
NRF, Editions Gallimard, 1999.
Bibliothèque des Histoires, 310 pages. Environs 25 euros.
N° ISBN : 2-07-07518-X.
4ème de couverture
La Neuvième de Beethoven, une histoire politique.
Depuis sa création en 1824, la neuvième Symphonie est l’œuvre qui, dans la musique
occidentale, a connu le plus grand succès politique, jusqu’au choix récent de l’Ode à la
joie » comme hymne officiel de l’Europe.
Esteban Buch entreprend de rendre compte de cet éclatant parcours et d’analyser les
multiples composantes de ce phénomène sans précédent : la naissance des hymnes
politiques de la modernité nationale (God save the King, La Marseillaise, l’Hymne à
l’Empereur de Haydn, etc.), que Beethoven réussit à transfigurer dans son langage
symphonique ; la tentative des compositeurs romantiques de faire de la neuvième
symphonie la pierre d’angle d’un culte de la musique : la constitution, tout au long du
XIXème siècle, du mythe de Beethoven, auquel participent célébrations et
commémorations, des funérailles en 1827 au centenaire, en passant par l’érection de la
statue de Bonn en 1845.
Toutes les familles politiques, mêmes les plus opposées, républicains français et
nationaux-socialistes allemands, par exemple, se sont emparées du finale de la
Neuvième jusqu’à la république raciste de Rhodésie qui en a fait son hymne national.
Comment le message universaliste utopique de Schiller – « tous les hommes deviennent
frères » - a-t-il pu faire l’objet de tant d’appropriations contradictoires et incompatibles ?
Paradoxe déconcertant et emblématique de la culture européenne dont l’exploration, qui
n’avait encore jamais été tentée, arrive à l’heure au rendez-vous de l’histoire.
Esteban Buch, né en argentine, a tiré cet ouvrage d’une thèse de doctorat soutenue à
l’E.H.E.S.S. en 1997. Il a publié, à Buenos Aires, une étude sur l’hymne argentin, et, en
Français, Histoire d’un secret. A propos de la « suite lyrique » d’Alban Beg (Actes Sud,
1994). Il travaille sur les rapports de la musique et de la politique.
Table des matières de ce livre
Introduction : Les états de la joie.
Première partie : Naissance des musiques politiques modernes.
Chapitre 1 : Le God save the King et le culte de Haendel
Chapitre 2 : La Marseillaise et l’Etre suprême
Chapitre 3 : L’Ode à la joie et l’Hymne à l’empereur
Chapitre 4 : Beethoven et le concert de l’Europe
Chapitre 5 : La Neuvième Symphonie
Deuxième partie : Réception politique de l’Ode à la joie
Chapitre 6 : Le culte des romantiques
Chapitre 7 : Les fêtes de Bonn de 1845
Chapitre 8 : La Neuvième Symphonie au temps des nationalismes
Chapitre 9 : Le centenaire de 1927
Chapitre 10 Beethoven Führer
Chapitre 11 : De l’année zéro à l’hymne européen
Chapitre 12 : De l’hymne de l’apartheid à la chute du Mur
Conclusion : Critique et avenir d’un rêve
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Notes
Bibliographie
Index