Plainte contre la nef
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Plainte contre la nef
Philippe MARIAGE 13, quai Jongkind 38000 Grenoble [email protected] à l’attention de M. Laurent BECUIWE Procureur de la République adjoint Tribunal de grande instance de Grenoble BP 100 38019 CEDEX 1 PLACE FIRMIN GAUTIER 38000 Grenoble samedi 20 novembre 2010 Objet : dépôt de plainte contre X pour refus de service sur critère prohibé. Monsieur, Par la présente, je porte plainte contre X auprès du Parquet de Grenoble, pour les faits relatés ci-dessous, qui constituent un refus de service sur critère prohibé, au sens des articles 225-1 et suivants du Code Pénal. Mercredi 17 novembre 2010, désireux d’assister à une séance du film « Des hommes et des dieux » au cinéma La Nef ( sis à Grenoble, 1 Rue Emile Augier ), programmé à 19.55 ( Cf. site http://www.allocine.fr ), je propose à une amie de m’y rejoindre par ses propres moyens. Je téléphone à 19.00 heures au n° 04 76 46 53 25 pour m’assurer que ce film est projeté dans une salle accessible, car je suis handicapé à 80 %, titulaire de la carte « Station debout pénible ». Une opératrice me confirme obligeamment que ce film est projeté dans une salle accessible par ascenseur et qu’il suffit que j’arrive en avance pour pouvoir bénéficier de ce service. Je préviens l’amie qui devait m’accompagner à cette séance, Mme Hélène Dreyfus ( Cf. témoignage joint ) : celle-ci, anticipant mon arrivée, achète nos deux billets à 19.18 ( Cf. photocopie jointe ), en précisant bien qu’elle va être rejointe de manière imminente par une personne handicapée : il lui est répondu que l’on va s’occuper de nous dès que je serais là. J’arrive à 19.30 devant le cinéma et je parviens à stationner le long du trottoir d’en face, sur une place que m’a réservée Mme Deyfus1 : le temps de m’extraire de mon véhicule et de traverser la chaussée, je suis sur le trottoir devant le cinéma à 19.32 ; nous pénétrons dans le hall et un employé qui déchire les tickets à côté de la caisse 2 nous dit de sortir et d’attendre dehors, précisant que l’on va s’occuper de nous. Nous sortons et attendons debout, à l’extérieur, dans le froid et le soir qui tombe3, l’employé(e) censé(e) nous guider vers l’ascenseur. Voyant se rapprocher l’heure de la séance, Mme Dreyfus pénètre à plusieurs reprises dans le hall pour s’informer : elle est, à chaque fois, avertie que nous devons attendre dehors et que l’on va s’occuper de nous ; à 20.00, deux autres employés arrivent, Mme Dreyfus retente sa chance. La personne qui déchire les tickets lui signifie, par son attitude, son exaspération, puis s’empare du badge ou de la clef de l’ascenseur et tend l’objet à l’un de ses collègues arrivé depuis quelques minutes. Cette personne sort et nous demande de la suivre, ce que nous faisons : nous pénétrons sous le porche de l’immeuble voisin, le n° 3, plongé dans la pénombre et encombré d’un échafaudage. Je demande s’il est possible d’avoir de la lumière : l’employé me dit que celle-ci va s’allumer automatiquement lorsque j’aurai suffisamment avancé dans le hall ! Je suis obligé, pour progresser, de m’appuyer sur l’épaule de mon accompagnatrice et de tâtonner dans l’obscurité avec ma canne… Nous débouchons dans une cours plongée dans le noir, qu’il faut traverser pour accéder, au fond de celle-ci, à la porte d’un ascenseur que l’employé débloque et où il pénètre avec nous. 1 Je note au passage qu’ aux abords de ce cinéma il n’y a pas de place « réservée » aux titulaires de la carte de stationnement « handicapé » ! 2 Il y avait, à ce moment précis, deux employées dans le réduit vitré de la caisse, mais une seule semblait vendre les tickets. 3 Par chance, il ne pleuvait pas ce soir là ! Pendant le bref trajet de montée, Mme Dreyfus demande à cet employé si la séance a débuté : avant qu’il ait répondu, la porte s’ouvre au fond d’une salle obscure, où nous apercevons les silhouettes des spectateurs installés, en train de regarder le film ! En conséquence, nous étions censés pénétrer dans la salle obscure, au risque de tomber, pour voir un film déjà commencé, en étant assurés de déranger des spectateurs déjà installés ! Constatant cela, nous avons demandé à notre accompagnateur de nous reconduire au rez-de-chaussée pour aller nous expliquer avec son « responsable » : confronté à celui-ci le ton est très vite monté, cet individu me déclarant tout de go « ce n’est pas ma faute si vous êtes handicapé ! » « si vous étiez pressés, vous n’aviez qu’à prendre les escaliers ! », « Je ne vais quand même pas vous prendre sur mon dos ! ». Nous sommes partis, refusant de nous faire rembourser immédiatement les tickets d’entrée, comme tentaient de nous y obliger les employés 4, afin de les conserver comme preuve. En résumé, un cinéma prétendument « aux normes » fait attendre 30 minutes, debout et à l’extérieur , une personne clairement identifiée comme handicapée, dont l’achat du billet a été effectué trente sept minutes avant le début de la séance, puis lui propose un gymkhana dans le noir sur un parcours en chantier, pour assister à un film commencé depuis dix minutes : les personnes handicapées serait-elles des clients de deuxième catégorie pour les responsables de ce cinéma ? Je vous demande, Monsieur le Procureur adjoint, de bien vouloir enregistrer ma plainte contre X pour le motif invoqué en objet ; je suis prêt, le cas échéant, à me constituer partie civile². Dans l’attente de votre réponse, soyez assuré, Monsieur, de l’expression de ma respectueuse considération. 4 « Si on ne vous les rembourse pas tout de suite, ce ne sera plus possible plus tard ! »