L`hybridation moléculaire : application à la détection spécifique de

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L`hybridation moléculaire : application à la détection spécifique de
L’hybridation moléculaire : application à la détection spécifique de
séquences d’acides nucléiques
L’hybridation moléculaire désigne l’ensemble des applications qui utilisent la reconnaissance spécifique d’une
séquence d’acide nucléique (ADN et ARN) par une autre séquence qui lui est complémentaire.
Lorsque la deuxième séquence est marquée, elle est appelée sonde moléculaire. Le duplex formé est détectable
et le signal obtenu offre des informations qualitatives et quantitatives sur la séquence cible détectée.
1 Nature biochimique des sondes
Les sondes sont de trois types :
 formées d’ARN : ce sont des Ribosondes ; elles forment un hétéroduplex avec l’ADN cible qui est
plus stable qu’un homoduplex. Ces ribosondes sont peu stables dans le temps à cause de leur
sensibilité aux RNases ubiquitaires. Elles sont produites par transcription in vitro.
 formées d’ADN : ce sont des molécules d’ADN naturel marquées à posteriori ou bien des
oligonucléotides (oligosondes) marqués lors de leur synthèse chimique.
 formées de polymères artificiels sur lesquels sont greffés des bases permettant de mimer des
séquences nucléiques. Ces molécules non naturelles sont de ce fait peu sensibles aux attaques
enzymatiques et donc très stables dans le temps. Par exemple les PNA (peptide nucleic acids) sont
des polymères proches des protéines dans lesquelles les chaînes latérales sont constituées de bases
nucléiques.
2 Types de marquages
Il existe deux grands types de marquages :
 les marquages chauds, dans lesquels le signal est lié à la radioactivité des sondes qui contiennent un ou
plusieurs atomes radioactifs de courte période comme le phosphore 32 (P32) ou le soufre 35 (S35) ou le
tritium (H3). Le seul avantage de ce type de marquage est sa sensibilité, mais les méthodes
luminométriques permettent de s’en rapprocher voir de l’égaler en s’affranchissant des problèmes liés à
l’utilisation de radio isotopes (coût, dangerosité et élimination de déchets spécifiques).
 Les marquages froids qui sont de deux types : soit la sonde est liée à un fluorochrome, soit elle l’est à
un ligand qui sera reconnu spécifiquement et avec une forte affinité par une molécule réceptrice. Deux
exemples sont bien connus ; le couple biotine / avidine et le couple digoxygénine / anticorps anti
DIG
3 Méthodes de marquage
3.1. Aux extrémités
3.1.1. en 5’ par substitution du phosphate
La substitution du phosphate froid en 5’ par un P32 se fait en deux étapes, à l’aide de deux enzymes : la
phosphatase alcaline en présence de magnésium permet d’hydrolyser le phosphate en 5 ‘ du
polynucléotide ; la polynucléotide kinase permet de transférer un P32 en 5’à partir d’un ATP radioactif
et de magnésium.
3.1.2. en 3’ par élongation
La terminale transférase permet de rajouter des bases marquées en 3’ en présence de dXTP* et de
magnésium. Cette enzyme est une ADN polymérase matrice indépendante.
3.2. Dans la séquence
3.2.1. lors de la synthèse des oligosondes
La synthèse chimique des oligosondes permet en théorie d’incorporer des bases marquées dans la
chaîne, mais il semble plus facile de greffer des marqueurs aux extrémités de ce type de molécules.
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3.2.2. par des méthodes liées à la réplication de l’ADN ou à la transcription de l’ARN
Lors de transcription in vitro utilisant des ARN polymérases bactériophagiques (T7) des bases marquées
peuvent être ajoutées.
Lors de la réplication de portions de séquences de l’ADN cible double brin, on peut obtenir des
mélanges de séquences marquées spécifiques de cette séquence cible en faisant incorporer des bases
marquées par la polymérase. Les techniques utilisées sont :
 le multiamorçage aléatoire (random priming) dans lequel une collection de toutes les amorces
possibles de 6 bases (hexanucléotides) est hybridée sur les séquences cibles dénaturées pour
servir d’amorces à l’ADN polymérase en présence de magnésium ;
 le déplacement de coupure (nick translation) dans lequel un mélange optimisé de DNase I et
d’ADN polymérase permet de générer des coupures simples brins sur les deux brins qui servent
d’amorces pour la réplication du brin complémentaire. Cette réplication permet d’incorporer des
bases marquées tout en gardant la spécificité de la collection de sondes obtenues;
 la PCR.
4 Système d’amplification du signal
Dans les techniques à marquage froid, la sensibilité de la détection serait trop faible si le signal n’était pas
amplifié.
4.1. Reconnaissance de ligands par des molécules réceptrices
Deux couples de molécules sont employées :

biotine/avidine : la biotine (vitamine B8) peut être covalemment liée aux
base formant la sonde. L’avidine et la streptavidine sont des protéines ayant une forte affinité (Ka
= 1012) pour cette molécule et possèdent quatre sites d’adsorption spécifique. Une molécule de
streptavidine peut se fixer sur une sonde lors de la révélation. Puis fixer trois autres molécules
biotinylées lors des étapes suivantes. Le signal est donc amplifié trois fois et la streptavidine sert
à relier une molécule très petite (la biotine) à trois grosse molécules telles que des enzymes
(phosphatase alcaline, peroxydase).
 Digoxygéninie (DIG)/ Anticorps anti DIG : DIG est une petite molécule dérivée du cholestérol
pour laquelle il existe des anticorps très affins. L’anticorps anti-DIG est reconnu par des
anticorps se fixant sur sa partie constante (Fc) tout comme dans la technique ELISA.
 Le ligand peut être constitué d’une portion de sonde qui ne s’hybride pas sur la cible, mais qui
s’hybride avec un acide nucléique plus long qui sert lui-même de cible pour un grand nombre de
sondes marquées. Cette technique est appelée amplification en arbre de Noël. Elle permet
d’augmenter drastiquement la sensibilité de la méthode.
4.2. Amplification enzymatique du signal
Les molécules fixées sur la sonde par l’intermédiaire d’avidine ou d’anticorps permettent de les relier à des
enzymes qui peuvent créer une réaction chromogénique (phosphatase alcaline + X-P ; peroxydase + molécule
aromatique + H2O2) ou luminophore (peroxydase + luminol + H2O2). L’enzyme permet de créer pour une seule
sonde des millions de produits détectables par densitométrie ou luminométrie.
5 Applications des hybridations
5.1. Hybridation en phase homogène
Dans ces techniques, les séquences à analyser et les réactifs sont tous les deux en milieu liquide, de même que
la détection. Les réactions d’hybridations et de détections ont donc lieu dans un volume.
Certaines Q-PCR et RT-PCR utilisent des sondes pour rendre le signal d’amplification spécifique de la
séquence cible. En plus des deux amorces utilisées pour l’amplification, une sonde s’hybride sur la séquence
marquée, ce qui permet de ne détecter que les amplifiats spécifiques.
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5.2. Hybridation en phase hétérogène
Dans cette catégorie on trouve toutes les techniques qui passent par la fixation préalable des acides nucléiques à
analyser sur un support solide.
5.2.1 Etapes de l’hybridation moléculaire
Pour la plupart des techniques une succession de cinq étapes sont nécessaires pour réaliser l’ensemble des
opérations :
1) étape de fixation ou d’adsorption des séquences nucléiques à détecter sur un support solide ;
2) étape de saturation des sites non spécifiques par un ou plusieurs produits (ADN et ou protéines) ;
3) étape d’hybridation des sondes dans des conditions physicochimiques de moyenne stringeance
(spécificité moyenne => des hybridations non spécifiques peuvent avoir lieu)
4) plusieurs étapes de lavages en conditions de stringeance croissante pour détruire les hybrides non
spécifiques et démasquer les hybrides spécifiques ;
5) la détection des sondes hybridées, lors de laquelle une ou plusieurs étapes de lavages permettent
d’éliminer tous les composants adsorbés au support de manière non spécifique.
5.2.2 Hybridations in situ : F.I.S.H.
L’hybridation in situ s’applique à la
détection de séquences cibles dans les
cellules entières préparées sur des supports
souvent en verre (slide). Les cellules sont
fixées, perméabilisés et souvent décapées
pour exposer les acides nucléiques qui sont
dénaturés pour permettre leur hybridation
par les sondes. Lorsque le marquage est
fluorescent, on parle de FISH : fluorescent
in situ hybridation
Cette technique permet par exemple
d’effectuer des caryotypes faciles à
analyser, car chaque paire de chromosome
fluoresce dans une couleur spécifique (FISH
painting).
5.2.3 Hybridations après transfert : les “blot”
Le transfert des séquences cibles sur un support adapté permet de faciliter leur détection.
L’origine des acides nucléiques est soit un mélange liquide (dot et slot blot), soit un gel d’électrophorèse
(Southern et Northern blot).
5.2.3.1 dot et slot blot, macro et microarrays = les puces (DNA chips)
Les dépôts peuvent se faire sous forme de points (dot) ou de traits (fente = slot). Leur localisation précise
sur la matrice permet d’en positionner de manière reproductible un grand nombre sur une surface très
limitée. Certaines puces à ADN sont donc obtenues par dot blot robotisés.
5.2.3.2. Transferts (blot) à partir de gel d’électrophorèse
La première étape consiste à réaliser une électrophorèse pour séparer les acides nucléiques en fonction de
leur taille. En plus de la reconnaissance spécifique des séquences cibles, cette technique fournit en plus une
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information sur la taille des séquences cibles détectées. La nature de l’acide nucléique détecté détermine le
nom de la technique utilisée.
Nom de la technique Type d’acide nucléique ciblé Applications
Southern blot
ADN
Etude de génotype (typage, phylogénie)
Northern blot
ARN
Etude de transcriptome, phénotype
Remarque : quand la molécule à détecter est une protéine, la technique est appelée Western blot.
L’acide nucléique est transféré soit par création d’un courant liquidien qui circule par capillarité, soit par
un électrotransfert réalisé dans un système où un champs électrique est créé perpendiculairement à la surface
du gel. Dans les deux cas, une membrane poreuse est disposée sur toute la surface du gel. Cette membrane est
traversée par le courant liquidien dénaturant et reçoit les acides nucléiques à sa surface selon en reproduisant
(comme une décalcomanie) les profils d’électrophorèse obtenus dans le gel.
Nature de la
membrane
Nitrocellulose
Nylon
Nylon +
PVD
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Mode de fixation des acides nucléiques
Chauffage 1 h à 80 °C
Irradiation UV
Adsorption stable (échange d’anion)
Adsorption stable
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