TCHÉKHOV La Mouette
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TCHÉKHOV La Mouette
G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 104 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 XIXe SIÈCLE Théâtre : texte et représentation TCHÉKHOV La Mouette (237– 3,50 €) I. Pourquoi étudier La Mouette en Première ? La Mouette répond au programme des classes de Première, et plus précisément à l’objet d’étude intitulé « le théâtre : texte et représentation ». La pièce de Tchékhov permet en outre d’aborder une réflexion sur le statut de l’artiste dans la société de la fin du XIXe siècle et éventuellement sur la décadence et le symbolisme. L’étude de La Mouette permet d’envisager différents points : – notions fondamentales de l’analyse dramaturgique : exposition, dénouement, péripétie, personnage, didascalie, réplique, tirade ; – réflexion sur l’inscription générique de la pièce : comédie ? drame bourgeois ? tragédie ? – étude des différents registres : comique, pathétique, lyrique, polémique. L’étude mettra en jeu des méthodes variées : – lectures analytiques ; – questions synthétiques ; – analyses de films ; – lectures cursives. À noter : l’édition « Étonnants Classiques » confronte les mises en scène d’Antoine Vitez (1984), d’Alain Françon (1995), de Stéphane Braunschweig (2001) et de Jacques Delcuvellerie (2005). La séquence proposée suggère la réalisation par les élèves de différents exercices (recherches documentaires, écrit d’invention, commentaire, réflexion sur l’adaptation de la pièce à l’écran, lectures expressives). Cette étude trouvera un prolongement dans la lecture de textes G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 105 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 105 portant sur les figures de l’artiste, qui s’inscrivent dans l’objet d’étude « poésie » (voir dossier, p. 140). II. Présentation de l’œuvre Pour une présentation de l’auteur et un exposé plus détaillé de la pièce, on se reportera à l’édition, p. 7. La pièce met en scène un jeune dramaturge qui aimerait révolutionner le théâtre, Trépliev. Il a écrit une œuvre novatrice interprétée par Nina, une comédienne qui rêve de gloire et dont il est amoureux. La représentation a lieu dans la propriété de Sorine, un vieillard qui n’a pas su réaliser ses désirs les plus simples, en présence de la mère de Trépliev, une actrice célèbre, et de son amant Trigorine, un auteur réaliste de renom. La pièce est un échec et Nina abandonne Trépliev pour suivre Trigorine, qui l’abandonnera à son tour… Ici, point de héros grandiloquents, nulle action spectaculaire, mais des personnages qui, au fil de dialogues ténus, laissent entendre leur drame – celui de l’indécision et de l’inachèvement. L’œuvre de Tchékhov interroge le statut de l’écrivain et se fait l’écho des différentes esthétiques qui s’expriment sur les planches européennes à la fin du XIXe siècle ; elle donne aussi à voir les difficultés d’être femme à cette époque. • Les figures de l’écrivain LE SUPPLICE DE L’AUTEUR L’artiste vit sa vocation comme une fatalité, un poids accablant qui lui interdit tout bonheur. Créer est une tâche douloureuse, pénible, qui confine à la « torture » comme l’affirme Trigorine (acte II). Dans une longue tirade de l’acte II, Trigorine confie la peine qu’il a à écrire : tout d’abord, le travail d’écrivain ne lui laisse aucun répit, accapare tout son temps (« J’écris sans arrêt ») et occupe son esprit jusqu’à l’obsession (« Jour et nuit la même pensée obsédante me vient : je dois écrire, je dois écrire, je dois… ») ; ensuite, il est hanté par la peur de la page blanche, persuadé que l’absence d’inspiration le guette (« je me rappelle que ma nouvelle inachevée m’attend ») ; enfin, il se doit d’être toujours aux aguets (« Je nous épie tous les deux à chaque phrase, à chaque mot et je me dépêche d’enfermer ces phrases et ces mots dans mon garde-manger littéraire ») – ainsi, à chaque instant, « note[-t-il] quelque chose dans son carnet ». L’artiste porte les stigmates du Christ : G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 106 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 106 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION Trépliev dit avoir comme un « clou à travers le cerveau » (acte II). Trigorine, lui, assimile sacerdoce littéraire et « passion » (acte IV) : l’écrivain souffre le martyre pour « donner du miel à je ne sais qui dans le vaste monde » (acte II). Loin de la « gloire » et de « l’éclat » (acte IV), l’artiste connaît une existence torturée. LE SACRE DE L’ÉCRIVAIN ? Quelle récompense reçoivent cette souffrance et ces sacrifices ? Naïvement, Nina interroge : « Est-ce que l’inspiration et tout le processus de la création ne vous donnent pas des moments sublimes de félicité ? » (acte II). En Trigorine, elle voit et admire un « écrivain illustre, le favori du public, dont on parle dans tous les journaux » (acte II). Loin de ces clichés idéalistes, l’artiste reste angoissé par la réception de son œuvre. Il craint le jugement de la critique et de la postérité. Trigorine, qui ne s’« aime pas comme écrivain » (acte II), ne supporte pas d’être comparé à des écrivains illustres (« Ci-gît Trigorine. C’était un bon écrivain mais il écrivait moins bien que Tourguéniev », acte II). Quant à Trépliev, il en est réduit à tout « brûl[er], jusqu’au dernier feuillet », méprisant sa propre création ; redoutant d’affronter le jugement public, il fait interrompre sa pièce (« Assez ! Rideau ! Baissez le rideau ! », acte I). Cette vision de l’artiste, sinon maudit du moins torturé, reflète les perpétuelles inquiétudes de Tchékhov lui-même qui, après avoir écrit La Mouette, n’hésite pas à affirmer avec amertume : « je constate une fois de plus que je ne suis pas du tout dramaturge 1 ». RÉALISME ET SYMBOLISME Deux esthétiques s’affrontent sur scène à travers les personnages de Trigorine et de Trépliev : l’un est un écrivain réaliste, l’autre un écrivain « décadent » (acte I). Pour le premier, l’art doit être une copie du réel ; le monde est sa source d’inspiration. Parlant de sa technique d’écriture, il dit puiser ses « sujet[s] » dans la vie courante pour bâtir des « petit[s] conte[s] ». S’il ne s’inspire pas de la réalité, ses personnages restent « artificiel[s] » ; aussi se lance-t-il dans une conversation avec Nina pour « savoir ce qu’[elle] pens[e] et d’une manière générale quelle créature [elle est] » (acte II). L’écrivain est un observateur des mœurs de son temps, attentif à la vie politique et sociale (« je suis aussi un citoyen, […] je suis obligé de parler du peuple, de ses souffrances, de son avenir, de parler de la science, des droits de l’homme, etc., etc., et je parle de tout », acte II). Il admire la science qui explore les mystères du réel avec plus d’acuité 1. Cité par Sophie Laffitte, Tchékhov, Seuil, coll. « Écrivains de toujours », 1971, p. 94. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 107 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 107 que l’artiste (« je vois que la vie et la science vont toujours plus avant, tandis que moi, je suis toujours en retard, comme un paysan qui a raté son train », acte II). Tchékhov lui-même, qui ne « sai[t] écrire que d’après [s]es souvenirs », s’inspire de son existence pour composer La Mouette. Dans une lettre à l’un de ses amis, datée du 8 avril 1892, il raconte comment il a dû tuer une bécassine blessée qui le fixait « avec son regard étonné » et il conclut : « ça a fait un être magnifique et plein d’amour en moins sur cette terre, et deux idiots qui sont rentrés dîner à la maison 1 ». On peut aisément rapprocher de cet épisode le portrait de Nina en mouette, à l’acte IV de la pièce. De même, certains ont reconnu dans Trigorine l’écrivain Potapenko, qui séduisit Lika, l’amie de Tchékhov, avant de l’abandonner alors qu’elle était enceinte. Toutefois, on ne peut identifier pleinement les conceptions littéraires de Trigorine à celles du dramaturge. En effet, Tchékhov suggère que le réalisme revendiqué par Trigorine est sclérosant. On ne peut pas copier le réel sans lui ôter toute vie : la mouette que Trigorine a fait empailler (acte IV) est un oiseau sans vie, à l’image des œuvres réalistes qui s’emparent du réel mais ne peuvent restituer l’humanité, sa vie, ses sentiments. À l’opposé, Trépliev ignore le réel pour lui préférer le rêve (« Il ne faut pas représenter la vie comme elle est, ni comme elle devrait être, mais comme elle se présente dans les rêves », acte I). Trépliev entend réagir à la valorisation – qu’il juge excessive – de la science, vecteur de désenchantement du monde. Contre une pensée rationaliste, il manifeste un besoin de spiritualité (« L’âme du monde, l’âme universelle, c’est moi… », acte I). C’est la raison pour laquelle il condamne l’esthétique réaliste, dont il moque la vulgarité et l’utilitarisme : « pour moi, le théâtre d’aujourd’hui n’est que routine et préjugé. […] quand avec leurs images et leurs phrases triviales, ils [les dramaturges réalistes] essaient de pêcher une morale, une petite morale bien facile à comprendre, utile à la vie domestique […], alors je fuis » (acte I). Au contraire, l’artiste doit être « décadent » (acte I). Le terme est employé par Irina et s’entend comme une injure. Pour elle, la création de son fils n’est qu’un « délire décadent » (acte I). Pourtant, ce terme peut aussi recevoir une acception positive. Ainsi Verlaine affirme-t-il dans Poètes maudits (1884), une œuvre dans laquelle il rend hommage au « Parnasse français décadent » : « J’aime le mot de décadence, tout miroitant de pourpre et d’ors. J’en révoque, bien entendu, toute imputation injurieuse et toute idée de déchéance. Ce mot suppose au contraire des pen1. Cité dans Tchékhov, La Mouette, trad. André Markowicz et Françoise Morvan, Actes Sud, coll. « Babel », 1996, p. 204. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 108 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 108 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION sées raffinées, d’extrême civilisation, une haute culture littéraire, une âme capable d’intenses voluptés… Nous pouvons faire une application ironique et nouvelle de ce mot en y sous-entendant la nécessité de réagir par le délicat, le précieux, le rare, contre les platitudes des temps présents. » À la fin du XIXe siècle, les artistes décadents aspirent à une « nouvelle ère artistique ». Dans toute l’Europe, des poètes comme Baudelaire, des romanciers comme Huysmans, des dramaturges comme Ibsen ou Maeterlinck, que Tchékhov découvre l’année où il écrit La Mouette, définissent alors de nouveaux principes esthétiques. Le primat est accordé aux sens et aux notations sensorielles. C’est ce que remarque Dorn, lecteur attentif de Trépliev : « Il pense par images, ses récits sont colorés, enlevés, je les sens très fortement » (acte IV). Au lieu de décrire minutieusement, comme le « paysagiste » réaliste (acte II), l’artiste décadent ou symboliste, préfère un art évocatoire et suggestif. La « lumière tremblotante », le « doux scintillement des étoiles » et les « sons lointains » (acte IV) dessinent un paysage aux nuances et aux contours subtils et estompés. Les personnages symbolistes fuient la réalité et se réfugient dans un ailleurs onirique. La peur du réel peut les conduire au suicide. Ainsi Trépliev se donne-t-il la mort à la fin de la pièce. La littérature décadente n’a donc jamais de visée morale ou politique ; l’artiste n’est nullement engagé ; au contraire, il « flân[e] par [un] chemin pittoresque sans but précis » (acte I). La grandeur de l’art réside dans sa gratuité esthétique. Tchékhov, même s’il présente deux esthétiques opposées, manifeste un élan de sympathie pour l’art décadent et le jeune idéaliste Trépliev. • La femme Outre la figure de l’artiste, Tchékhov donne à voir dans sa pièce la difficulté d’être femme à la fin du XIXe siècle. C’est un thème récurrent dans les œuvres du dramaturge. Dans Platonov, il dresse déjà une galerie de portraits féminins 1 : Alexandra Pétrovna, jeune veuve qui affirme : « Je la veux maintenant, tout de suite, ma vie, et non devant moi 2 ! », Grekova, femme libérée et indépendante mais très sensible, Sofia Iegorovna, amoureuse transie, et enfin Sacha, épouse aimante et mère attentive. À la même époque, le dramaturge norvégien Henrik Ibsen campe 1. Platonov met en scène un instituteur de province, mélancolique, incapable d’agir et de prendre en main son existence. Il séduit les femmes de la société qu’il fréquente car il échappe aux stéréotypes : il n’est ni paysan, ni aristocrate, ni banquier. Toutefois, il est incapable d’offrir à ses amantes la vie dont elles rêvent. L’une d’entre elles, Sofia, finit par le tuer. 2. Platonov, trad. Serge Rezvani, Actes Sud, coll. « Babel », 2003, acte II. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 109 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 109 des héroïnes bourgeoises aux trajectoires originales. Hedda Gabler (Hedda Gabler, 1890), comme Nora (Maison de poupée, 1879) sont des épouses soumises, qui s’ennuient, et cherchent à échapper à une vie morne et étouffante en s’adonnant à l’adultère ou au luxe. En France, on retrouve ce thème, traité sur un mode comique, dans les vaudevilles de Feydeau ou de Labiche : dans ces comédies, on se marie par intérêt et on se trompe par désœuvrement… Selon Tchékhov, La Mouette réunit « trois rôles féminins 1 ». NINA, LA MOUETTE Nina est une jeune fille malheureuse, soumise à des contraintes familiales rigides. En effet, elle ne peut quitter librement le domaine parental (« Mon père et sa femme m’empêchent de venir ici », acte I) ; par ailleurs, elle est déshéritée (« […] la petite est restée sans rien », acte I). Elle nourrit des penchants idéalistes. La jeune fille fait une déclaration romanesque à Trigorine, qu’elle est prête à suivre jusqu’à « Moscou » : c’est au travers d’un texte littéraire qu’elle s’adresse à lui pour lui avouer son amour passionné (« Si un jour tu as besoin de ma vie, viens et prends-la », acte III). Cependant, cette pureté est entachée par un attrait excessif pour la « gloire » (acte IV) et le succès : elle voue une admiration démesurée à Trigorine, l’écrivain fameux, et à Arkadina, l’actrice célèbre (« Refuser quelque chose à Irina Nikolaïevna, une artiste aussi célèbre ! […] C’est simplement inconcevable ! », acte II). Nina est donc bien une « mouette » (acte I) : comme cet oiseau, elle est attirée par le large mais revient toujours vers le rivage pour s’y échouer. Elle rêve d’une réussite professionnelle et d’un amour exceptionnels mais ne connaît que des échecs (« Nina n’a pas réussi pleinement sa vie personnelle », « Elle s’attaquait toujours aux plus grands rôles, mais son jeu était grossier, sans goût, elle hurlait, elle gesticulait », acte IV). PAULINA ET MACHA, DES FEMMES MAL MARIÉES Les femmes mariées de la pièce sont des épouses malheureuses. Paulina, femme de Ilia Afanassiévitch Chamraïev, le régisseur du domaine, cherche dans des aventures extra-conjugales une échappatoire à une existence étouffante. Elle est en effet la maîtresse de Dorn (« Mon chéri ! », acte I) qui la dédaigne pourtant (« Devant une actrice vous êtes tous prêts à vous mettre à genoux. Tous ! », acte I). Malgré sa jeunesse, Macha paraît âgée, accablée par le poids de l’existence. Dès sa première apparition (acte I), elle déclare « porte[r] le deuil de [s]a vie » et être « malheureuse ». De plus, elle boit pour oublier son existence 1. Dans une lettre à Souvorine, du 21 octobre 1895, cité dans Ivanov, La Mouette, éd. Michel Cadot, GF-Flammarion, 1996, p. 21. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 110 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 110 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION oppressante et vaine (« Elle prise du tabac et boit de la vodka », acte II). Amoureuse éconduite de Trépliev, elle renonce à cet amour idéal pour épouser l’instituteur Medviédienko, qu’elle n’aime pas. Réaliste, elle est convaincue que « l’amour sans espoir, c’est juste bon pour les romans » (acte IV), et pense que le mariage doit la guérir de l’amour (« Une fois mariée, plus de place pour l’amour, les nouveaux soucis effaceront tout le passé », acte III). Elle se marie donc pour oublier l’amour, faire taire ses sentiments. Même à ce titre, son mariage est un échec, puisque, à l’acte IV, elle aime encore Trépliev (« On a promis de muter mon mari dans un autre district. Une fois là-bas, j’oublierai tout… »). UNE FEMME LIBÉRÉE : IRINA Une seule figure féminine rayonne dans la pièce : c’est Irina, l’actrice célèbre et célébrée, amante de Trigorine et mère fantasque. Malgré son âge, elle est une « vraie poulette » et peut jouer les « fillettes de quinze ans » (acte II). Frivole (« Oui, j’ai de l’argent, mais voilà, je suis actrice ; rien qu’en toilettes, c’est la ruine », acte III), elle refuse d’aider financièrement son fils écrivain ; passionnée, elle est prête à tout pour garder son amant volage (« Si tu me quittes, même une heure, je ne survivrai pas, je perdrai la raison, mon merveilleux, mon sublime, mon maître… », acte III). Irina se soucie peu des conventions sociales et morales : elle n’est pas mariée à Trigorine et ne présente pas le visage doux et protecteur de l’archétype maternel (« Irina, ma chère, il ne faut pas traiter comme ça un jeune amour-propre. […] Tu l’as offensé », lui dit Sorine, acte I). Son refus des conventions sociales suscita la réprobation des censeurs, en 1895, qui jugeaient particulièrement immorale l’indifférence de son fils et de son frère à ses frasques. En marge des normes, elle est un personnage qui aspire à profiter de l’existence et à se divertir, repoussant de sa bonne humeur les « ennuyeux personnage[s] » (acte IV). G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 111 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 111 LA MOUETTE III. Proposition de séquence Plan de séquence Cours – Travail de recherche sur l’univers de Tchékhov (voir supra). – Paratexte et scène d’exposition (notion d’horizon d’attente, le genre de la comédie). – Étude comparée de deux portraits de l’artiste (l’art du portrait, le personnage théâtral). – Les trois femmes (le registre comique, la réflexion sur la condition féminine, l’oralité et le naturel). – Le dénouement (la notion de dénouement, l’efficacité dramaturgique, entre comédie et drame). Modules Une fiche synthétique sur la figure de l’artiste à la fin du XIXe siècle sera proposée à partir du corpus de textes figurant dans le dossier de l’édition, p. 140 : – les principes esthétiques de la décadence ; – la représentation du poète et ses relations avec la société : poète-citoyen ou poète marginal ? – les caractéristiques de l’écriture poétique (versification, rythme, sonorités, images…) ; On proposera une autre fiche synthétique, à partir d’un corpus de documents iconographiques évoquant différentes mises en scène ou adaptations de La Mouette. Travail d’écriture et exercice oral – Plusieurs travaux d’écriture sont proposés dans ce dossier : en particulier, une préparation au commentaire comparé ; un sujet de dissertation sur le théâtre ainsi qu’un sujet d’invention sur le jeu théâtral ; – Préparation à l’entretien : débat oral sur la pertinence des adaptations théâtrales et cinématographique et les interprétations qu’elles impliquent (voir fiche de synthèse n° 2, p. 128). Paratexte et scène d’exposition Objectifs → Étudier la valeur programmatique du paratexte et de la scène d’exposition, et définir l’horizon d’attente. Supports → Titre, inscription générique, liste des personnages, et texte, du début à « servez-vous », acte I, p. 37-38. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 112 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 112 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION • Le paratexte Définir le paratexte. Le faire lire. Quelle est la fonction du paratexte ? Donner des informations au lecteur ou au metteur en scène. Classez ces informations. Quel horizon d’attente programment-elles ? LE TITRE : LA MOUETTE Soit réaliste, soit métaphorique. Hésitation initiale. INSCRIPTION GÉNÉRIQUE : « COMÉDIE EN QUATRE ACTES » Rappeler les caractéristiques du genre comique. On s’attend à une fin heureuse, des personnages appartenant à des catégories sociales variées, aux prises avec des problèmes quotidiens. PERSONNAGES Les personnages principaux appartiennent à la même famille (« fils », « frère »). Ce sont des propriétaires terriens (« riche propriétaire ») et leurs employés (un cuisinier, une femme de chambre, un régisseur). Personnel attendu dans une comédie (couple : maître et valet). Les autres personnages, définis par leur métier (écrivain, médecin, instituteur), rappellent les questions traitées dans la comédie (éducation, santé…). On note deux personnages atypiques : l’actrice et l’écrivain. Thème de l’artiste et de la marginalité. DÉCOR : « LA PROPRIÉTÉ DE SORINE » Décor réaliste, conforme aux codes de la comédie. TEMPS : « DEUX ANS S’ÉCOULENT » Pas d’unité de temps. Bilan. Informations nombreuses qui suggèrent que l’on va assister à une comédie, à un spectacle divertissant. Rien ne laisse présager le dénouement. • La scène d’exposition Faire lire le début de la pièce (lecture à plusieurs voix par des élèves, réflexion sur la pertinence de la lecture des didascalies). La scène d’exposition correspond-elle à l’horizon d’attente dressé par le paratexte ? CADRE SPATIO-TEMPOREL Cadre naturaliste : « parc », « propriété de Sorine », « large allée », « parc buisson ». Réflexion sur la précision de la didascalie initiale : le G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 113 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 113 décor doit-il impérativement être conforme aux instructions du dramaturge ? Quelles sont les difficultés posées au décorateur ? Commentez les termes « profondeur », « barrée », « soleil vient de se coucher ». Ils évoquent le moment de la journée : tombée de la nuit. À la fois annonce du spectacle, et, pour le lecteur averti, atmosphère vespérale qui symbolise le déclin. PERSONNAGES Ouvriers qui préparent le spectacle, instituteur pauvre (« vingt-trois roubles »), jeune fille audacieuse (« en noir », « prise du tabac »). GENRE Relevez ce qui est conforme à l’horizon d’attente de la comédie : les thèmes – les questions d’argent (« vingt-trois roubles »), l’amour et le mariage (« Pourquoi épouser un homme qui n’a déjà pas de quoi manger ? »), la fête (« le spectacle va bientôt commencer ») ; la langue – une langue naturelle : prose, contractions orales (« ça »), phrases nominales (« du tabac »). Les indices dysphoriques : le thème du malheur (« noir », « deuil », « malheureuse », « cafard »), l’amour malheureux (« mais je ne peux pas y répondre »). Bilan. Informations parcellaires (personnages principaux ?) et déroutantes (comédie ?). • Conclusion Le dramaturge, tout en donnant des informations, séduit le lecteur et le spectateur en lui offrant une scène d’exposition ambiguë : faudra-t-il rire ou pleurer de l’intrigue à venir ? Étude comparée de deux portraits : Trigorine et Trépliev Objectifs → définition du personnage théâtral ; analyse d’une tirade ; étude de deux portraits antithétiques ; mise en évidence de la démarche comparatiste (entraînement aux épreuves du bac : le commentaire comparé, dissertation, invention). Support → De « Il faut des formes nouvelles » à « la fin des fins », acte I (p. 43-45), et de « Qu’a-t-elle donc de si agréable ? » à « moins bien que Tourguéniev », acte II (p. 81-84). Identifiez les points communs entre les deux passages. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 114 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 114 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION • Des artistes tourmentés DES ÊTRES MALHEUREUX Identifiez le registre employé dans les deux tirades. Registre pathétique : – champ lexical du malheur. Pour Trépliev : « vie insensée », « traîne », « fatigue », « je serais bien plus heureux », « désespérée », « ni talent ni argent », « je me sentais humilié » ; pour Trigorine : « Quelle vie absurde ! », « je dévore ma propre vie », « quelle torture c’était ! », « dégoûté », « écœuré » ; – ponctuation expressive : « Quelle vie absurde ! », « quelle torture c’était ! » ; – première personne. DES ÊTRES EN QUÊTE D’IDENTITÉ Commentez la récurrence de la modalité interrogative dans les deux tirades. Des personnages qui doutent et qui sont à la recherche de leur identité sociale (Trépliev : « Qui suis-je ? Que suis-je ? » ; Trigorine : « Qu’estce qu’il y a de beau et de lumineux là-dedans, je vous le demande ? »). Ils souffrent tous les deux de l’absence de reconnaissance publique (« leur regard prenait la mesure de mon insignifiance », « le public dit : “oui, c’est gentil, il a du talent” »). Quel autre signe typographique manifeste cette crise identitaire ? Les points de suspension. Bilan. Image conforme au cliché romantique : mépris de soi, mépris de l’existence, méprisé par les autres. • Deux visions antithétiques de l’art L’ART COMME MÉTIER Quelle vision de l’art Sorine et Nina défendent-ils ? Ils en font une source de satisfaction personnelle (« C’est bien agréable », « félicité »). Commentez le parallélisme « Je voulais me marier et devenir homme de lettres ». Vision bourgeoise de l’artiste qui embrasse ce métier pour réussir. L’ART COMME MALÉDICTION Les deux artistes partagent-ils ce point de vue extérieur ? Pourquoi deviennentils artistes ? – La vocation comme fatalité : lexique du devoir, qui s’impose comme une nécessité. Trépliev : « il faut », « nécessaire » et l’inscription dans une lignée d’artistes (« je regrette que ma mère soit une artiste », « son G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 115 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 115 nom traîne dans tous les journaux et cela me fatigue ») ; Trigorine : « je dois écrire, je dois écrire, je dois… » et impuissance à infléchir le cours des choses (« J’écris sans arrêt comme si je courais la poste », « je ne peux pas faire autrement »). – Une sensibilité exacerbée : Trépliev se voit comme un écorché vif, il est sans cesse blessé par le monde : « je me sentais humilié » ; Trigorine est à l’affût du monde : « on sent une odeur d’héliotrope. Vite, je note dans ma tête : parfum sucré, couleur de veuve, à garder pour décrire une soirée d’été ». Quelle figure de style repérez-vous dans « Je vois un nuage qui ressemble à un piano à queue » : une comparaison. L’artiste parle sur un mode métaphorique : langage codé. Voir la réflexion de Sorine : « On ne le comprend pas. » Bilan. Deux visions de l’art, une vision bourgeoise, défendue par ceux qui ne sont pas écrivains, et une vision plus romantique, défendue par les artistes eux-mêmes. • Conclusion Alors que les artistes défendent des préceptes esthétiques opposés, ils partagent une même vision de la vocation artistique. • Entraînement aux exercices du bac 1. Commentaire : entraînement au commentaire comparé. 2. Dissertation : peut-on s’identifier à un personnage de comédie ? Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur La Mouette, mais aussi sur les pièces que vous avez lues ou vues. Quelques pistes pour la dissertation : I. Les personnages comiques invitent à l’identification – un statut social moyen – des préoccupations quotidiennes – des personnages incarnés par des comédiens, des êtres de chair et de sang II. Mais il reste toujours une distance de soi au personnage – les artifices de la pièce (personnages typés) – les artifices de la mise en scène (costumes, décor ; réflexion sur le décor dans la scène d’exposition) – le rire 3. Invention : vous écrivez une lettre à Nina, pour lui déconseiller de se faire artiste. Votre écrit sera argumenté et appuyé sur des exemples précis. Vous pourrez vous appuyer sur votre lecture de La Mouette pour approfondir votre argumentaire. Quelques pistes pour l’invention : – l’artiste vit une véritable souffrance intérieure ; G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 116 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 116 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION – l’artiste est méprisé ; – l’artiste vit dans des conditions matérielles difficiles. Les trois femmes Objectifs → Le genre de la comédie, le registre comique, le portrait des trois femmes. Support → De « Un terrain de croquet » à « On entend Sorine ronfler », acte II (p. 67-70). • Une scène de comédie UNE CONVERSATION BADINE Commentez le cadre spatio-temporel de la scène. Quel horizon d’attente crée-t-il ? « Terrain de croquet », « grande terrasse », « lac », « soleil » : ces éléments évoquent le loisir, le repos, la détente, ils appellent une conversation légère et badine. Autour de quoi tourne la conversation ? La coquetterie féminine (lexique du vêtement : « robe », « quatre épingle », « vêtue », « coiffée », « en négligé », « décoiffée », « souillon ») ; l’amour (« amoureuse jusqu’aux oreilles ») ; les loisirs (« il pèche ») et les lectures (« Maupassant, Sur l’eau »). Commentez la longueur des répliques. Quel est le niveau de langue employé ? Répliques brèves. Niveau de langue courant. Signes de l’oralité : – phrases nominales « Élégante, intéressante… » ; – contractions « ça » ; – asyndète : « il est installé dans la cabine, il pèche » ; – non-inversion du sujet dans une phrase interrogative : « Vous permettez quand même que je continue ? » LE REGISTRE COMIQUE Quel est le registre dominant dans cet extrait ? Le registre comique : – comique de mots : « une vraie poulette », « amoureuse de lui jusqu’aux oreilles » ; – comique de situation : Sorine ponctue la conversation de ses ronflements et Dorn fredonne pendant qu’Arkadina bavarde ; – comique de caractère : des personnages entiers, à la limite de la caricature. Commentez la ponctuation expressive dans la réplique de Sorine (« Alors, c’est la joie chez nous ? On est heureux à la fin des fins ? C’est la joie ! ») et celle de Nina (« Que je suis heureuse ! »). Exaltation ; G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 117 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 117 – comique de gestes : « les mains aux hanches, elle fait quelques pas sur le terrain de croquet ». Arkadina défile devant un public indifférent. Bilan. Scène de badinage légère qui pourtant est l’occasion d’une réflexion sur la condition féminine. • Les trois femmes LA FEMME LIBÉRÉE ET SON ÉLÈVE Commentez l’expression « comme il faut ». Arkadina soigne son apparence. Elle semble mettre l’accent sur les conventions, leur donner de la valeur, mais en réalité, ce n’est pas du tout une femme conventionnelle. C’est un rôle qu’elle joue. Montrez qu’Arkadina est une femme anticonformiste. – Elle travaille : « je travaille, je ressens, je bouge sans arrêt » ; – elle cherche à séduire et porte une attention toute particulière à son apparence : « Tirée à quatre épingles » ; – elle a un amant : « amoureuse jusqu’aux oreilles ». Commentez la didascalie « Nina s’assoit à côté d’Arkadina et l’embrasse ». Proximité physique qui traduit une volonté de rapprochement moral. Elle veut ressembler à Arkadina. L’exclamative « Que je suis heureuse ! » montre qu’elle adopte à son tour le ton enjoué de l’actrice. L’hyperbole « C’est si peu intéressant ! » montre que, dans le conflit entre Arkadina et son fils, elle prend désormais le parti de la mère. LA SPLEENÉTIQUE Dressez le portrait de Macha. – Sentiment de vieillesse : elle a l’air plus âgée qu’Arkadina alors qu’elle n’a que « vingt-deux ans ». Ennui et spleen ; – peu coquette : reproches déguisés d’Arkadina qui suggère qu’elle est une « souillon » ; – amoureuse introvertie : son admiration pour Trépliev qu’elle n’ose avouer (« il a les manières d’un poète »). Bilan. Deux visions antithétiques de la femme. Notons qu’elles sont toutes deux originales : femmes marginales qui refusent, pour des raisons différentes, le rôle d’épouse soumise. • Conclusion Une scène de comédie qui tranche avec la gravité de l’ensemble. Personnages féminins qui laissent parler leurs sentiments. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 118 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 118 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION Le dénouement Objectifs → Le dénouement et ses contraintes ; comédie et tragédie ; l’efficacité dramaturgique. Support → De « Trépliev, après une pause. Ce serait moche » à la fin, acte IV (p. 136-137). Situez le passage. Texte arrive à son terme. Dernières répliques échangées entre les personnages. Quelles sont les contraintes inhérentes au dénouement théâtral ? Sont-elles ici respectées ? • Un dénouement ouvert Le dénouement d’une pièce de théâtre doit venir clore l’intrigue ; il doit être : – rapide : Trépliev décide de mourir aussitôt après le départ de Nina (« pendant deux minutes ») ; – complet (tous les fils de l’intrigue doivent être dénoués) : Trigorine et Arkadina forment de nouveau un couple (« Ça [le fait de croiser Nina, l’ancienne maîtresse de Trigorine] pourrait mettre maman en colère ») ; Trépliev est toujours un écrivain maudit et meurt (« déchire tous ses manuscrits » ; « vient de se tuer »), Polina s’occupe toujours de l’intendance (« Sers aussi le thé tout de suite »). Qu’en est-il de Nina ? Avenir plus incertain : va-t-elle vraiment devenir comédienne ou va-t-elle se suicider ? Reste présente sur scène sous la figure de la « mouette empaillée » : signe d’une mort prochaine ? Refus de l’avenir (elle a fait l’éloge du passé)… ; – nécessaire (tous les éléments du dénouement doivent être préparés dans les actes qui précèdent) : les retrouvailles de Trigorine et Arkadina sont programmées avant même qu’il ne la quitte pour Nina (« Trigorine : […] Je suis faible, indolent, toujours docile […] Arkadina, à part : Maintenant, il est à moi ») ; Trépliev, dès le premier acte, déchirait ses textes. Comment expliquez-vous le suicide final de Trépliev ? Il peut surprendre chez un écrivain qui commence à connaître le succès. Il meurt d’amour (« Ne plus vous aimer est au-dessus de mes forces. […] la vie m’est devenue insupportable ») alors que Nina, si elle a refusé d’entrer, lui promet pourtant qu’ils se retrouveront quand elle sera devenue « une grande actrice ». Bilan. Dénouement surprenant, très rapide, qui n’est ni tout à fait complet (qu’advient-il de Nina ?), ni tout à fait nécessaire (suicide de Trépliev qui connaît ses premiers succès et qui est assuré d’avoir été aimé par Nina). G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 119 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 LA MOUETTE 119 • L’efficacité dramaturgique LE SPECTACULAIRE Quel est l’effet produit sur le spectateur par le coup de feu ? Un effet de surprise : Trépliev n’a pas explicité sa résolution de se suicider : on ne sait donc pas si quelqu’un est mort et qui cela peut être (« Nina : ce qu’il faut faire, c’est me tuer »). La révélation se fait en deux temps : – dénégation : « un produit qui a sauté dans ma pharmacie » ; – révélation : « Konstantin Gavrilovitch vient de se tuer ». UNE FIN COMIQUE OU DRAMATIQUE ? Commentez la didascalie : « Elle allume les bougies et s’assoit à la table de jeu. » À la fois jeu, atmosphère légère, propre à la comédie, et évocation d’une veillée funèbre, sombre et solennelle, qui annonce la mort. Hésitation sur le genre de la pièce. Faire réfléchir les élèves sur les moyens de mettre en scène ce dénouement en insistant sur l’aspect comique (voix fortes, gestes outrés, bruits de bouteilles et de verres qui s’entrechoquent) ou au contraire sur l’aspect dramatique (éclairage réduit, costumes sombres, voix atténuées). Quels sont les éléments comiques qui subsistent dans ce dénouement ? Rappeler que la pièce est une « comédie ». – Atmosphère festive : « vin rouge », « bière », « jouer », « boire » ; – comique de gestes : « (Il entre et remet en place le fauteuil.) Course d’obstacles ». Quels sont les éléments dramatiques ? – L’obscurité (« les bougies ») ; – la mouette empaillée, signe mortifère ; – les sentiments des personnages qui apparaissent dans leur gestuelle et dans le ton de leur voix (« avec effroi », « elle se couvre le visage de ses mains ») ; – l’attitude de Dorn, faussement gaie, pour dissimuler le drame : « Il fredonne », « feuilletant une revue ». Bilan. Dénouement efficace qui surprend le spectateur. Ne répond pas à l’horizon d’attente établi par l’acte d’exposition et pose la question de l’inscription générique de la pièce. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 120 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 120 THÉÂTRE : TEXTE ET REPRÉSENTATION • Conclusion Dénouement efficace, qui contraste avec l’atmosphère souvent légère de la pièce. Projette rétrospectivement sur la pièce une lumière plus sombre. IV. Orientations bibliographiques Découvrir l’univers de Tchékhov La lecture de Oncle Vania, Les Trois Sœurs et La Cerisaie permet de se familiariser avec la dramaturgie de Tchékhov. On peut ainsi repérer les personnages et les thèmes récurrents. De plus, on pourra visionner la mise en scène d’Oncle Vania par Julie Brochen (Arte) et celle de La Cerisaie par Peter Brook (CRDP). Textes théoriques BACKES, Jean-Louis, Revue de littérature comparée, no 276/4, 1995, « Nouveaux visages de Tchékhov ». PALACIO, Jean de, Figures et formes de la décadence, Séguier, 1994. LAFFITE, Sophie, Tchékhov, Seuil, coll. « Écrivains de toujours », 1961. Magazine littéraire, « Dossier Tchékhov », no 299, mai 1992. Adaptation cinématographique Claude MILLER, La Petite Lili, 2003. Anne CASSOU-NOGUÈS et Marie-Aude de LANGENHAGEN. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 121 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 121 Fiche de synthèse n° 1 : les figures de l’artiste Support → Dossier, p. 140. L’étude de ces poèmes pourra donner lieu à une fiche de synthèse sur les figures du poète, qui sera une préparation à l’entretien. • Poète et citoyen : pour un art engagé VICTOR HUGO, LES RAYONS ET LES OMBRES (1839), p. 140 Analysez les oppositions qui structurent le poème. Commentez. Trois oppositions majeures structurent le poème de Victor Hugo : – une opposition entre la lumière et la nuit (« ombres », v. 23 ; « nuit », v. 33 1 ; « ombres » et « sombres », à la rime, v. 35 et v. 36 ; « couvre », v. 46, vs « torche », v. 19 ; « flamboyer », v. 20 ; « éclairé », v. 34 ; « rayonne », v. 51 ; « flamme », v. 51 ; « resplendir », v. 53 ; « clarté », v. 54 ; « lumière », v. 55 ; « étoile », v. 59) ; – une opposition entre le ciel et la terre (« porte de la cité », v. 10 ; « les pieds ici », v. 14 ; « courbé dans vos ruines », v. 43 ; « le monde », v. 46 ; « ville », « Louvre », « chaumière », v. 56 ; « plaines », v. 57, vs « ailleurs », v. 14 ; « sacré », v. 32 ; « ciel », v. 47 ; « hauteurs », v. 57 ; « d’en haut », v. 58 ; « étoile », v. 59 ; « Dieu », v. 60) ; – une opposition entre un présent tourmenté et un futur radieux (« temps contraires », v. 1 ; « haines », v. 6 ; « Tourmentent », v. 7 ; « jours impies », v. 11 ; « ruines », v. 43, vs « jours meilleurs », v. 12 ; « utopies », v. 13 ; « yeux ailleurs », v. 14 ; « avenir », v. 20 ; « rêves », v. 22 ; « Les choses qui seront un jour », v. 24 ; « temps futurs », v. 34). Pour Victor Hugo, le poète, s’il est écouté, peut métamorphoser le monde, lui apporter lumière et progrès. Comment Hugo rend-il son discours persuasif ? Relevez et classez les procédés de la persuasion. Implication du locuteur : utilisation de la première personne (v. 4), verbes modalisateurs (« raille », v. 35, « plaint », v. 28), voca1. Les numéros de vers indiqués ici correspondent à une numérotation en continu des extraits donnés. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 122 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 122 bulaire évaluatif (« haines », v. 5, « éclairé », v. 33, « doux », v. 38…), ponctuation expressive (« Peuples ! Écoutez le poète ! », v. 31, v. 50…). L’auteur croit en la grandeur du poète. Implication du destinataire : impératif (« écoutez ! », v. 31 et 32), utilisation de la deuxième personne (v. 32-33), anaphore de « il », vocabulaire généralisant (« le poète », v. 11 ; « Peuples », v. 31 ; « tous », v. 58). Le lecteur est interpellé de façon frontale et il est invité à réfléchir sur le statut et la fonction du poète, en mal de reconnaissance. En vous appuyant sur les quatre premières strophes, montrez que le poète est différent des autres hommes et définissez son rôle. Le poète est un être exceptionnel et à part : – il s’intéresse tout particulièrement aux affaires de la cité (v. 1112) ; – il est un visionnaire (v. 13, 14, 33) ; – il éclaire les consciences (v. 19-20) ; – il est l’objet du mépris des hommes (v. 25) ; – il a une nature singulière (intellectuel, strophe 3 ; être hybride, v. 39). La fonction du poète est de : – travailler au bien-être public (v. 2 et 9-10) ; – prévoir l’avenir (v. 13, strophe 4) ; – éclairer les hommes (v. 31-32). • Le poète voyant : pour un art suggestif PAUL VERLAINE, « ART POÉTIQUE », JADIS ET NAGUÈRE (1874), p. 143 Que refuse Verlaine en poésie ? Quels sont au contraire les conseils qu’il donne au poète ? Les refus de Verlaine : – le refus de l’éloquence ampoulée (v. 4) : refus d’une poésie inutilement compliquée, des grands effets oratoires un peu vains ; – le refus de la rime trop voyante (v. 6 et 7) : elle est assimilée à un faux bijoux, à du toc. Elle ne sert à rien mais, comme elle brille, elle détourne l’attention du vrai sens du poème. Les conseils de Verlaine : – le mètre impair (v. 2) : apporte musicalité et légèreté. Primat de l’harmonie sonore ; G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 123 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 123 – l’hésitation et l’imprécision (strophes 2-3-4) : choix des termes légèrement impropres, primat de la nuance, pour laisser une liberté à l’imaginaire du lecteur. Il faut suggérer et non pas représenter. En quoi le texte est-il un art poétique ? Le poème ressemble à un art poétique traditionnel : Il s’agit d’exposer ses idées : registre didactique (formules de conseil : « il faut », v. 5 ; impératif : « préfère » ; tour général ; modalisateur : « nous voulons », v. 13). Cependant, cet art poétique refuse tout dogmatisme et ressemble plus à une chanson : primat de la musique sur la poésie : – prudence et modération du ton : formules d’atténuation (v. 23) ; – une chanson : énnéasyllabe au rythme souple ; enjambement (v. 5-6) ; jeu sur les sonorités (allitération en liquide et assonance en « u », v. 3) ; quelques reprises lexicales (« nuance », strophe 4). Dressez un parallèle entre les préceptes esthétiques de Trépliev et ceux de Verlaine. – primat des sens et des notations sensorielles : « Il pense par images, ses récits sont colorés, enlevés, je les sens très fortement » (acte IV) ; – triomphe de la nuance et de l’art évocatoire : le « doux scintillement des étoiles », les « sons lointains » et la « lumière tremblotante » (acte IV) dessinent un paysage aux contours et aux nuances subtils et estompés ; – un art gratuit : plaisir esthétique et refus de l’engagement (il « flâne […] par [un] chemin pittoresque sans “but précis” », acte I. PAUL VERLAINE, « CHARLEROI », ROMANCES SANS PAROLE, 1872 Relevez les notations sensorielles dans le poème. Commentez. La vue : « noire » ; « œil » ; « horizons » ; « rouges » ; « yeux »/ L’ouïe : « pleure » ; « siffle » ; « tonnent » ; « bruissait » ; « sistre » ; « cris »/ L’odorat : « vent profond » ; « se sent » ; « sent » ; « parfums » ; « haleine » ; « sueur »/ Le toucher : « gifle ». Les notations sensorielles sont abondantes et construisent un paysage qui fait participer, corps et âme, le lecteur. Les sensations visuelles exhibent deux couleurs contrastées et franches : le rouge et le noir (scène de nuit/ monde infernal de la mine). Les sensations auditives sont particulièrement agressives (sonorités stridentes). Les sensations olfactives sont enivrantes (paysage qui sent : odeur agréable puis fétide. Métamorphose négative). Les sensations G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 124 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 124 tactiles (« gifle ») disent une violence. Le paysage dysphorique est donc placé sous le signe de la brutalité. Enfer du monde industriel. Comment sont reliées entre elles les différentes strophes ? Qualifiez et analysez la syntaxe du poème. – Enchaînement des strophes : pas de liens, principe paratactique. Brutalité des sensations juxtaposées de façon abrupte. – Syntaxe du poème : la violence de l’univers se traduit dans la violence du langage. Syntaxe abrupte : syntaxe nominale. Tour elliptique « Où Charleroi ? » ; ponctuation forte (rythme saccadé, haché. Cinq points d’interrogation, quatre points d’exclamation) ; brièveté des vers (tranchants) ; noter l’absence de conscience structurante (pas de « je » : paysage déshumanisé, sinistre). Les perceptions sont brutes, à l’image d’une syntaxe abrupte et heurtée. Relevez les marques de la subjectivité dans le poème. Quelle image du poète se dégage ? Strophes 1-7 : « pleure » : douleur ; « on » : qui ? ; « veut » : acharnement ; strophe 2 : « se sent » ; « gifle » : douleur ; strophe 3 : « plutôt » : conscience qui juge ; « ! » : axiologie négative ; strophe 4 : « on » ; « ? » : étonnement, désarroi ; strophe 5 : « sinistres » : axiologie négative ; « ! » : dépréciatif ; « ? » : désarroi, double interrogation. Perte de repères ; strophe 6 : « ! » : dépréciatif ; « votre » : geste déictique ; « oh » : lamentation. Lyrisme épuré. L’image d’un poète en crise se dégage. Les marques subjectives sont très ténues mais il y a bien présence d’une conscience qui juge et voit. Le poète est une âme souffrante (paysage noir, endeuillé ; personnification des éléments : projection de ses sentiments sur un paysage ; ponctuation : souffrance, colère du poète face à monde industriel qui incarne le travail ; absence du « je » remplacé par un « on » : crise de l’identité marquée par l’angoisse et la disparition du sujet). Le poète est déboussolé et angoissé face à un monde industriel dans lequel il ne s’insère pas et ne trouve pas sa place. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 125 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 125 • Le poète désenchanté : déception du monde et appel du large BAUDELAIRE, « L’ALBATROS », LES FLEURS DU MAL (1857), p. 146 Quelle est la figure de style qui structure le poème ? Une comparaison : « Le Poète est semblable au prince des nuées ». Comparé : « Poète », comparant : « prince des nuées », outil de comparaison : « semblable au ». Explicitez le parallélisme entre le poète et l’albatros. Le poète et l’albatros sont : – épris de liberté : « vastes oiseaux des mers », « voyage » ; – attirés par un monde spirituel : « Roi de l’azur », « voyageur ailé » ; – moqués par une société inculte : « pour s’amuser », « agacent son bec avec un brûle-gueule », « mime » ; – inadaptés à la vie sociale : « maladroits et honteux », « gauche et veule ». En quoi cette représentation du poète s’applique-t-elle au personnage de Trépliev ? Par sa pièce, Trépliev manifeste son attirance pour un monde spirituel : « l’âme du monde, l’âme universelle, c’est moi… » (acte I). Il est moqué par la société : critique d’Arkadina : « C’est quelque chose de décadent », acte I ; de Nina : « C’est si peu intéressant ! », acte II. Il est inadapté à la vie sociale : l’acte IV montre qu’il vit dans l’isolement le plus complet et il finit par se tuer. MALLARMÉ, « BRISE MARINE » (1845), p. 147 Expliquez le parallèle établi dans le premier vers entre « la chair » et « les livres ». En quoi ce vers reflète-t-il la tonalité d’ensemble du poème ? La « chair » évoque la sensualité et l’érotisme, donc des plaisirs charnels ; les « livres » évoquent des plaisirs spirituels et culturels. Ici les deux termes sont connotés négativement. Le « je » lyrique refuse tout plaisir, qu’il soit sensuel ou intellectuel. Ce double refus donne au poème une tonalité désenchantée. Commentez la majuscule du mot « Ennui ». Personnification qui renforce ce thème, majeur dans l’esthétique décadente. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 126 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 126 Quel est le registre du poème ? Quels sont les sentiments exprimés par le poète ? Le registre est pathétique : forte présence de la première personne ; personnification de l’ennui (« Ennui ») ; tournures négatives (« Rien, ne, ni ») ; interjections déploratives (« Hélas ! »). Le poète exprime son désenchantement et sa lassitude, mais également son désir de partir. Caractéristiques de l’ailleurs : – bonheur absolu (« ivre »), en opposition avec sensualité insatisfaite (v. 1) ; – monde immense : situation mi-céleste, mi-maritime (v. 3). Les points de suspension (v. 15) ouvrent vers une immensité cosmique ; – renouveau : charme de l’exotisme, de l’inconnu (v. 3, 5, 9, 10). Importance du dépaysement, du lointain. Rêve enchanteur d’un voyage exotique. • Complément : analyse de documents iconographiques EUGÈNE DELACROIX, LA LIBERTÉ GUIDANT LE PEUPLE (1831) À lier à l’étude du poème de Victor Hugo. Inspiré d’événements historiques réels : 27-28-29 juillet 1830 : les Trois Glorieuses qui vont amener Louis-Philippe au pouvoir. « J’ai entrepris un sujet moderne, une barricade, et si je n’ai pas vaincu pour la patrie, au moins peindrai-je pour elle. » Description Composition complexe, profusion de personnages dans le tableau. Décrivez le personnage central. La Liberté (la dimension allégorique). Femme aux seins nus, aspect érotique, saleté de la peau, poils perceptibles sous les aisselles, bonnet phrygien : femme du peuple, une « poissarde », une Vénus des rues (vertus sociales de la république, idée de la maternité). Elle porte un fusil à la main et le drapeau français : incarne la liberté (défense de la patrie et de la liberté). Décrivez les personnages qui l’entourent. Personnages autour de la Liberté (la dimension réaliste). Foule furieuse entraînée par cette femme. Toutes les classes sociales sont représentées : femme aux pieds de la Liberté, jeune garçon, homme en chapeau haut de forme. Scène réaliste : thème social (révolte), aspect cru, pas d’euphémisme dans la représentation (charnier, corps démembrés), ville en arrière-plan. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 127 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 127 Interprétation En quoi ce tableau illustre-t-il le poème hugolien ? Le poète peut être rapproché de la Liberté : c’est un guide (position dominante en taille : disproportion symbolique), il montre le chemin. Double aspect caractéristique du poète selon Hugo : poète engagé et poète guide. Fonction sociale du poète. GUSTAVE MOREAU, LE POÈTE VOYAGEUR (1891) À lier à l’analyse de « Brise marine ». Description Objets centraux ? Deux personnages : – un cheval ailé : Pégase, cheval de la mythologie. Nom grec signifiant « source ». Ailes déployées, prêt à s’envoler ; – un personnage au corps masculin mais au visage assez féminin. Il porte des sandales, une peau de bête, une bandoulière. Il a le visage rêveur. Qu’a-t-il dans le dos ? Plusieurs interprétations possibles : flèches et carquois (le personnage pourrait être assimilé à un chasseur) ou forme de lyre (le personnage serait alors assimilé à un poète). Deux êtres étranges qui évoluent dans un cadre montagneux et isolé. Interprétation En quoi ce tableau peut-il être lu comme une illustration de la représentation du poète donnée dans « Brise marine » ? – Poète isolé : au sommet d’un rocher, dans un décor hostile et déserté ; – regard rêveur ou mélancolique : ennui du monde, aspiration à un autre univers, un ailleurs. Dans cette perspective, Pégase pourrait être vu comme l’objet de ses pensées : volonté de s’envoler, de s’enfuir hors du monde. Noter que Pégase est bien prêt à s’enfuir : ailes déployées et sabot qui frappe le sol ; voyage comme source de l’écriture poétique. Si le personnage est un chasseur : poète comme découvreur de nouveaux territoires. Noter la forme des flèches qui rappellent des formes orientales : Orient comme pôle d’attraction des poètes de l’époque. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 128 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 128 Fiche de synthèse n° 2 : La Petite Lili, une adaptation cinématographique de La Mouette (2003) Support → Le film : l’artiste et son public (0 h 14 à 0 h 20), le dénouement (1 h 23 à 1 h 35). • Introduction Le cinéaste Claude Miller s’empare de la pièce de Tchékhov mais il n’est pas fidèle à la lettre du texte. La pièce est pour lui l’occasion d’une réflexion sur les rapports entre fiction et réalité. • L’artiste et son public (0 h 14-0 h 20) Comment le réalisateur transpose-t-il la pièce dans le monde contemporain ? Pensez-vous qu’une telle transposition soit fondée ? – Éléments de transposition : époque (costumes contemporains, magnétoscope…) et lieu (les personnages portent des noms français), relations entre les personnages (Jeanne-Marie se permet d’intervenir et de contester les propos de Mado : le rapport entre les maîtres et les domestiques sont différents), art (on passe du théâtre au cinéma). – Justifications : 1. La pièce traite de questions universelles (l’artiste et son public, la modernité artistique, l’amour et l’admiration…), la transposition manifeste l’actualité de la pièce ; 2. Julien n’est plus écrivain mais dramaturge, ainsi le système de théâtre dans le théâtre est remplacé par un système de film dans le film, ce qui crée la même confusion entre le réel et la fiction. En revanche, par cette transposition, le réalisateur occulte la valeur documentaire de la pièce (décadence des grandes familles dans la Russie de la fin du XIXe siècle, statut des comédiens…) Faire noter aux élèves les réactions des différents personnages, spectateurs du film de Julien. Gestes désordonnés de Mado, mains serrées de Julien et Lili, regard inquiet de Jeanne-Marie, échanges de regards entre Brice et Lili… Les gestes explicitent les sentiments des personnages. Dans la pièce, les didascalies, peu nombreuses, laissent dans l’ombre les émotions de la plupart des personnages à l’exception d’Arkadina. G4-D65347-BAT(6)104-129 Page 129 Vendredi, 15. septembre 2006 4:27 16 129 • Le dénouement (1 h 23-1 h 35) Julien tourne un film inspiré des épisodes survenus au début du film de Claude Miller (et dans le premier acte de La Mouette). Comment s’établit la confusion entre la réalité vécue par les personnages et le film ? Commentez. – Décors reproduits à l’identique (« Julien a tout fait pareil ») mais tournage en studio. – Certains personnages jouent leur propre rôle et se trouvent mêlés à des comédiens qui n’ont pas vécu les événements. – Scénario qui cite les personnages (phrase sur le carnet de Brice). Ainsi s’instaure une grande confusion entre le réel et la fiction. Le réalisateur met en exergue le principe de la catharsis : Julien fait jouer à son personnage dans le film ses émotions, son désir de mort, et s’en libère. La fiction lui permet de vivre des passions qu’il ne vit pas dans le réel. Relevez les références à la pièce. – Le héros est un écrivain et non un cinéaste. – Il se suicide et le coup de revolver est pris pour un courant d’air. Finalement, c’est le film dans le film qui respecte le mieux la pièce : est-ce une façon de dire que la pièce est trop théâtrale ? • Conclusion Le réalisateur prolonge la réflexion de Tchékhov sur le réalisme et sur les relations entre réalité et fiction, dans un film très sensuel et très contemporain.