Plus d`Arabes israéliens rejoignent le service national, et

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Plus d`Arabes israéliens rejoignent le service national, et
Plus d’Arabes israéliens rejoignent
le service national, et découvrent
les aides de l’Etat et le patriotisme
Des non citoyens de Jérusalem Est se portent aussi secrètement bénévoles,
85 % des participants le font pour obtenir un bon emploi par la suite
Ils ressemblent au couple sioniste religieux moyen en Israël : elle participe
au service national de l’Etat juif, et lui est un ancien combattant de
l’armée. Sauf qu’ils sont tous les deux arabes musulmans, et qu’elle, Baraa
Abed, est de Jérusalem Est. Son mari (resté anonyme) vient d’un village du
nord du pays.
Abed, 20 ans, qui travaille maintenant comme volontaire dans un bureau du
ministère israélien de l’Intérieur, fait partie d’une communauté croissante
de jeunes arabes qui renoncent à des décennies de combat anti-normalisation
avec le gouvernement israélien à majorité juive, pour à la fois donner, et
recevoir, de l’Etat.
Historiquement, presque tous les participants au service national étaient des
femmes juives religieuses sionistes, qui voulaient servir leur pays mais,
pour des raisons religieuses, ne voulaient pas le faire dans l’armée. Ces
femmes ont reçu des exemptions quasi automatiques de l’armée, même si, ces
dernières années, elles sont de plus en plus nombreuses à choisir de servir
pour l’armée israélienne.
Il y a six ans, seulement 600 personnes non juives étaient dans le programme
de service national d’Israël, dans lequel les participants sont bénévoles
pendant un à deux ans dans des institutions publiques comme des écoles, des
hôpitaux, des tribunaux ou des cliniques.
Actuellement, 4 500 personnes non juives font leur service national, dont 100
viennent de Jérusalem Est. Ce chiffre est le triple de celui de la communauté
ultra-orthodoxe (1 500 personnes), dont la plupart sont des hommes qui ont
obtenu une exemption religieuse pour l’armée, mais voulaient quand même
servir leur pays. Il y a également 8 500 sionistes religieux qui font leur
service national, principalement des femmes.
Les Israéliens non juifs, principalement Arabes, constituent environ 20 % des
8,6 millions d’habitants du pays.
Devant un groupe de journalistes, Abed a déclaré lundi à Jérusalem que son
mari l’avait inspirée pour être volontaire.
Des milliers de juifs ultra-orthodoxes pendant une manifestation contre le projet du
gouvernement d’enrôlement des étudiants de yeshiva dans l’armée israélienne ou le
service national, à Jérusalem, le 16 mai 2013. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Elle a vu les avantages qu’il avait obtenus du pays en tant que soldat, comme
de l’argent pour l’éducation, les soins médicaux, et les opportunités
d’emploi, et a décidé qu’elle voulait la même chose pour elle.
Ancienne vendeuse dans un magasin de vêtements de Jérusalem Est, Abed vivait
seule dans un pensionnat, loin de sa famille avec qui elle ne s’entendait
plus. Elle a déclaré que son expérience l’avait aussi encouragée à prendre le
contrôle de sa vie.
Baraa Abed, résidente de
20 ans de Jérusalem Est,
en août 2016. Elle fait
partie du nombre
croissant d’Arabes qui
rejoignent le service
national d’Israël.
(Crédit : Dov
Lieber/Times of Israel)
« Au début, j’avais peur et pensais que la communauté arabe ne m’accepterait
pas. Puis je me suis dit, qu’est-ce que je vais obtenir d’eux ? L’Etat me
donnera ce dont j’ai besoin », a déclaré Abed, qui, pour des raisons de
sécurité, a demandé à ce que son visage ne soit pas montré.
Les personnes faisant leur service national reçoivent exactement les mêmes
avantages qu’un soldat, ce qui comprend environ 800 shekels (190 euros) par
mois, des soins médicaux gratuits, des transports publics gratuits, et un don
de 11 000 shekels (2 620 euros) à la fin de leur service pour chaque année
servie, qui peuvent être utilisés pour financer des études ou acheter une
maison. S’ils servent deux ans, une année complète d’université est aussi
payée.
De plus, il existe un programme spécial qui n’est disponible que pour ceux
dont l’arabe est la langue maternelle : un an de préparation à l’université
complètement financé. Pendant ce programme, les participants reçoivent 1 500
à 3 700 shekels (357 à 880 euros) par mois, selon leur situation familiale.
Abed, qui n’est pas citoyenne israélienne et n’a qu’un statut de résidence
temporaire, comme la plupart du demi-million d’Arabes de Jérusalem Est, a
déclaré que ses relations symbiotiques avec l’Etat avaient encouragé son
sentiment patriotique.
« Je me sens loyale envers cet Etat. Je vois ce qu’il fournit aux personnes
de ma communauté, malgré tous les mots durs qu’ils disent à propos de l’Etat
», a-t-elle déclaré.
Une fois qu’Abed a commencé à travailler au ministère de l’Intérieur, où elle
aide les arabophones à naviguer dans certains processus administratifs, comme
le renouvellement d’une carte d’identité ou d’un passeport, a-t-elle déclaré,
« j’ai finalement trouvé la stabilité que je cherchais. »
Servir leur pays en secret
Réveillé tard un soir il y a environ un an, un jeune homme de vingt ans du
camp de réfugiés de Shuafat, dans Jérusalem Est, surfait sur internet et est
tombé sur le site du service national d’Israël.
A.H., 21 ans, habite à Jérusalem Est, et est volontaire pour le service national
d’Israël, en août 2016. (Crédit : Dov Lieber/Times of Israel)
A., 21 ans, qui a demandé que son nom et son visage n’apparaissent pas dans
l’article pour sa sécurité, a appelé le bureau et dit qu’il voulait être
volontaire. La première proposition a été dans un hôpital psychiatrique, ce
qu’il a immédiatement refusé. A. a pris le temps d’attendre qu’un poste ouvre
dans un tribunal. Rapidement, il a reçu un appel du ministère de l’Intérieur.
« Je n’avais pas réalisé que c’était un entretien d’embauche. Je pensais
qu’ils m’appelaient pour un problème de résidence », a raconté A., qui lui
non plus n’est pas citoyen israélien, mais résident permanent de Jérusalem.
« Je me sentais bien tous les jours après le travail. C’est la première fois
que je me sens apprécié et accueilli », a déclaré A., qui travaillait avant
dans une station service et aide maintenant les arabophones au ministère de
l’Intérieur, comme Abed.
« Je me sens comme si je travaillais avec ma plus grande famille », a dit A.,
racontant avec un sourire avoir célébré les fêtes juives pour la première
fois avec ses collègues.
Quand il lui a été demandé s’il se sentait loyal envers l’Etat, il a souri
encore : « certainement ».
Mais pour les habitants de Shuafat, tout comme pour Abed, son service est un
secret qui n’est connu que de sa famille proche et de ses meilleurs amis. Si
le mot était passé, sa vie pourrait être en danger. En avril, Baha Nabata, 31
ans, dirigeant d’une association de jeunesse et pour les droits civiques
estimé, a été assassiné dans le camp, apparemment pour « collaboration » avec
les autorités israéliennes pendant sa quête d’amélioration des services
municipaux.
Des lanceurs de pierres palestiniens près d’un feu de bois lors d’affrontements avec
les forces de sécurité israéliennes à Shuafat, à Jérusalem Est, le 5 octobre 2015
(Crédit : AFP/Ahmad Gharabli)
Sar Shalom Gerbi, directeur général du service national d’Israël, a déclaré
que les bénévoles arabes en dehors de Jérusalem pouvaient aussi se retrouver
dans des « situations difficiles ».
Depuis son bureau de Jérusalem, il a énuméré lundi la longue liste
d’incidents d’agressions contre des volontaires arabes, comme être appelés «
lépreux » par un député arabe, un exemple où quatre étudiants ont été
expulsés de leur école par le dirigeant du conseil municipale, et un
coordinateur qui a vu le pare-brise de sa voiture briser par une brique.
Seuls certains volontaires arabes du service national affrontent de telles
menaces, et aucun jusqu’à présent n’a vu sa vie mise en danger. La plupart
ont la bénédiction de leurs familles, a déclaré Gerbi. Cependant, il a accusé
une partie des dirigeants arabes israéliens de salir le service national en
le confondant avec le service militaire obligatoire.
Les bénévoles arabes, comme tous les autres, peuvent arrêter leur service
national quand ils le veulent, a souligné Gerbi. De plus, ils sont souvent
intentionnellement assignés à des endroits où ils peuvent aider leur propre
communauté, comme des écoles arabes, ou des hôpitaux avec beaucoup
d’arabophones, et peuvent vivre chez eux. Les volontaires juifs peuvent être
postés dans tout le pays, ce qui les oblige à vivre loin de chez eux.
Sar-Shalom Gerbi, directeur général du service national d’Israël, en août 2016.
(Crédit : Dov Lieber/Times of Israel)
Gerbi a déclaré qu’il était compréhensible que les Arabes ne veuillent pas
servir dans l’armée israélienne, ce qu’ils ne sont pas légalement obligés de
faire.
« Maintenant, ils peuvent servir leur propre communauté, et obtenir les aides
des soldats », a-t-il dit.
Pourquoi les nombres sont-ils en hausse ?
Gerbi a déclaré qu’il n’avait « aucun doute » que les chiffres des
volontaires non juifs du service national continueront à augmenter.
Le succès du programme, a-t-il affirmé, est dû à la confiance gagnée au sein
des communautés arabes en ne les forçant pas à participer à un melting-pot,
ainsi qu’aux résultats positifs pour les participants. Il a déclaré que 85 %
des bénévoles arabes trouvaient de bons emplois par la suite.
« Ils veulent aider leurs communautés, et ils comprennent que cela peut aussi
être une carte d’entrée dans la société israélienne. C’est bien s’ils sentent
les deux », a-t-il déclaré.
Sur les 4 500 volontaires non juifs, 70 % sont musulmans, tandis que les
autres sont chrétiens, druzes et circassiens ; 90 % sont des femmes.
Des gardes-frontières et des soldats arabes chrétiens autour du ministre (Likud) Ofir
Akunis. (Crédit : unité des porte-paroles de l’armée israélienne)
Zienab Abu Swaid, la coordinatrice pour le service national dans le secteur
arabe, a déclaré que, « aujourd’hui, les jeunes votent avec leurs pieds.
Ceux qui s’opposent au service national ne peuvent pas les arrêter. »
Abu Swaid, qui vient d’une communauté bédouine du nord du pays, a également
demandé que son visage ne soit pas montré, car certains la « méprisent » pour
son travail.
Abu Swaid a un diplôme en éducation et avait d’abord pensé qu’elle
enseignerait dans une école locale, mais a décidé qu’elle voulait avoir un
impact plus important. Après avoir vu le résultat « merveilleux » du service
national sur ses propres neveux, elle a été convaincue que son poste actuel
était le meilleur moyen d’aider.
Selon Abu Swaid, beaucoup d’Arabes ne sont pas volontaires que pour recevoir
les cadeaux du gouvernement.
« Pour beaucoup de gens, ce n’est pas pour les avantages, a-t-elle dit, mais
pour devenir une partie de la société israélienne. »
Journalistes
Dov Lieber
Source : © Plus d’Arabes israéliens rejoignent le service national, et
découvrent les aides de l’Etat et le patriotisme | The Times of Israël

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