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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 54 (2006) 284–288
http://france.elsevier.com/direct/NEUADO/
Article original
Penser et panser le corps : à propos d’un groupe
de relaxation thérapeutique pour enfants
Think and feel the body: a therapeutic relaxation group for children
N. Thoret, S. Carrié, J. Pradère*, G. Serre, M.-R. Moro
Service de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent et psychiatrie générale (Pr M.-R. Moro), CHU Avicenne (APHP),
129, rue de Stalingrad, 93009 Bobigny cedex, université Paris 13, EA 3413, France
Reçu le 2 avril 2006 ; accepté le 13 septembre 2006
Résumé
La relaxation, terme trop souvent généralisé, doit être redéfinie comme une approche thérapeutique agissant sur le corps propre, donc sur la
construction de l’identité dans sa double dimension : corporelle et psychique. Le groupe de relaxation thérapeutique est un groupe mixte, accueillant des enfants de six à dix ans pour lesquels l’approche groupale et le travail autour de l’unité soma/psyché sont indiqués, associés ou non à une
psychothérapie individuelle ; le groupe peut également être proposé à des enfants qui ne bénéficieraient pas d’une thérapie individuelle dans un
premier temps. Les indications actuelles sont : les troubles sévères et spécifiques du langage, les inhibitions massives, l’instabilité psychomotrice,
les failles narcissiques et de l’estime de soi, les problématiques de séparation–individuation. L’échec scolaire et ses troubles associés sont aussi
une bonne indication, dans des problématiques infantiles névrotiques. Les cothérapeutes (psychologue et psychomotricienne) s’appuient sur la
méthode de relaxation thérapeutique élaborée par J. Bergès. Cette technique, originale et adaptée à l’enfant, permet, en induisant un état de
régression, d’amener l’enfant à vivre ou à revivre, de manière plus satisfaisante certaines expériences précoces. Elle accompagne l’enfant dans
un processus de différenciation psychique, le menant peu à peu vers un étayage du moi corporel avec la construction d’images internes suffisamment stables et sécurisantes. Nous exposons deux cas cliniques qui illustrent le processus thérapeutique et la spécificité de l’approche corporelle.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Abstract
Relaxation, a term which is bandied about too easily, needs to be redefined as a therapy based on the body’s physical and psychological
identity. We would like to introduce you to our group which provides therapeutic relaxation for children. This group is made up of boys and girls
between six and ten for whom group sessions and work based on the unit soma/psyche have been prescribed, with or without individual therapy
sessions; group work may also be offered to children who are not initially under individual therapy. The physical signs are: severe, specific
language problems, major inhibitions, lack of psychomotive ability, narcissistic tendencies and self-confidence problems, difficulties of separation–individuation. Failure at school and related problems are also indicators in childhood neurosis. This multidisciplinary team (a psychologist
and a psychomotricity therapist) uses the relaxation therapy developed by Bergès. This technique, which is new and adapted to children, enables
a child to live or relive earlier experiences in a more satisfactory way, through the process of regression. The therapy leads the child in a process
of psychic differentiation, allowing him to support his physical existence with internal images which are sufficiently stable and secure.
We will also present two case studies which illustrate the specific nature of the body-based approach to therapy: Stephane and Theo.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Relaxation ; Groupe thérapeutique ; Processus de séparation–individuation ; Instabilité psychomotrice
Keywords: Relaxation; Psychotherapy; Group; Separation and individuation’s process; Psychomotor instability
* Auteur
correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (J. Pradère).
0222-9617/$ - see front matter © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.neurenf.2006.09.006
N. Thoret et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 54 (2006) 284–288
Nous allons analyser les processus thérapeutiques à l’œuvre
dans un groupe de relaxation thérapeutique pour enfants. Quelles en sont tout d’abord les indications ? Les troubles sévères et
spécifiques du langage, les inhibitions massives, l’instabilité
psychomotrice, les failles narcissiques et de l’estime de soi, les
problématiques de séparation–individuation représentent la
majorité des indications. L’échec scolaire et ses troubles associés sont aussi une bonne indication, dans des problématiques
infantiles névrotiques. La méthode de relaxation employée est
celle de Jean Bergès [1] créée dans les années 1970 et inspirée
de celle de Schultz [2]. Elle est spécialement adaptée aux
enfants. Le groupe, ouvert et accueillant des garçons et filles
d’âge scolaire, est codirigé par une psychomotricienne et une
psychologue clinicienne, formées à la méthode Bergès. Il est
composé de trois à six enfants de six à dix ans. Après avoir
décrit la méthode de relaxation et sa spécificité, nous présenterons le cadre thérapeutique et analyserons deux situations cliniques.
1. La relaxation thérapeutique chez l’enfant
1.1. Méthode
Le déroulement d’une séance se passe en trois phases successives. La première consiste à se concentrer sur une image
de calme, la deuxième à effectuer une décontraction musculaire avec repérage somatognosique, nomination et mobilisation des parties du corps concernées. La dernière phase est la
reprise, où l’image de calme est abandonnée et les muscles
sont à nouveau contractés. Cette méthode est progressive et
différents paliers existent dans la deuxième phase, de décontraction musculaire :
● les segments du corps sont relaxés de façon individualisée :
d’abord les membres supérieurs, puis inférieurs, les muscles
fessiers, le dos, les épaules, la nuque jusqu’à la mâchoire.
Cette progression se fait sur plusieurs séances et permet
d’atteindre le palier dit de généralisation où le corps est
appréhendé comme unifié, solide, fort et pesant ;
● le palier suivant concerne le rythme respiratoire et met en
jeu l’articulation entre enveloppe externe et intérieur du
corps (air qui entre et qui sort ; notion de dedans–dehors) ;
● Après l’élaboration d’une représentation corporelle, avec un
dedans et un dehors différenciés [3], peut être alors suggérée
la sensation de chaleur à partir du plexus solaire ;
● le dernier palier concerne le visage, les yeux et le front,
points d’où l’on peut voir, observer à distance, agir, projeter, anticiper. Ainsi vont contraster le corps calme, lourd et
chaud et le front haut, dégagé, frais. La dernière induction
sera : « j’ai la tête libre ».
1.2. Spécificités
1.2.1. La voix
La voix du thérapeute sous-tend l’ensemble de la séance
mais des interruptions sont ménagées pour permettre à
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l’enfant de s’écouter, de se centrer sur lui-même. Elle constitue un holding sonore [4], écho du bain de langage des premières semaines de vie. Les phrases prononcées sont courtes,
simples, au présent. Les inductions sont aussi neutres que possible et les images énoncées aident l’enfant à percevoir la réalité de la partie du corps relaxée.
1.2.2. Le toucher
Les mobilisations corporelles du thérapeute renvoient à la
fois au corps du bébé, aux modalités d’interactions gestuelles
précoces et aux soins maternels, mais aussi au corps réel de
l’enfant. Le toucher est extrêmement important car il permet
la localisation progressive des différentes parties du corps (les
membres, le tronc, le visage) ainsi que l’appropriation de la
détente, région par région, pour constituer un repérage topographique spatial, une cartographie du corps. Le toucher est
bref, neutre et diminue au fur et à mesure de la progression
des séances, lorsque la représentation d’un corps unifié est
possible. Peu à peu, l’histoire du corps de l’enfant se dessine
et son vécu affectif devient source d’expériences étayantes et
non anxiogènes. Le toucher, la mobilisation, rendent sa réalité
au corps. À la dépendance du début de la prise en charge où
l’enfant ne prend pas d’initiative, où le thérapeute se tient près
de lui et multiplie les interventions gestuelles et verbales, succède un début d’autonomie avec « sevrage » progressif des
nominations et mobilisations passives.
1.2.3. Le thérapeute
La présence permanente du thérapeute peut être vécue de différentes manières puisque dans le contexte de la relaxation,
l’enfant est allongé et l’adulte debout ou assis. Cette présence
peut être contenante, gratifiante ou persécutive lorsque le thérapeute s’approche, frustrante lorsqu’il s’éloigne avec réactivation
d’une angoisse d’abandon ou au contraire favorisant la capacité
à intérioriser la présence du thérapeute. La relaxation, en induisant un état de régression, peut conduire à la restauration possible d’expériences insatisfaisantes, dans les premiers temps de
la vie (grands prématurés par exemple), ou dans le cas de
carence de soins précoces, lorsque le holding et le handling [4]
n’ont pas été suffisamment bons. De même, lorsque la pulsion
d’agrippement [5] est à l’œuvre, la relaxation peut permettre le
lacher-prise et donc l’accès au processus d’individuation.
2. Le cadre thérapeutique
Le groupe est hebdomadaire, d’une durée d’une heure. Il
s’agit du même découpage temporel à l’intérieur de la séance,
de la même salle où les enfants choisissent leur emplacement
de tapis. Il faut que les thérapeutes puissent circuler entre les
enfants. Chaque séance commence par un temps d’échanges
verbaux entre les enfants et les thérapeutes, puis une demiheure de relaxation où chaque thérapeute s’occupe individuellement de trois enfants ; thérapeute qui restera le même pour
l’enfant tout au long de la prise en charge dans le groupe afin
de s’adapter aux rythmes de l’enfant et de tenir compte de ses
résistances. En fin de séance, nous nous regroupons pour que
ID
944714
Title
Penseretpanserlecorps:àproposd'ungroupederelaxationthérapeutiquepourenfants
http://fulltext.study/article/944714
http://FullText.Study
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