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Marseille FR
Journées d’études du Groupe PPE
Marseille
7-8 décembre 2011
Défendre nos citoyens,
nos économies et nos valeurs :
La réponse c’est plus d’Europe
FR
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
TABLE DES MATIÈRES
Programme4
Compte rendu8
Discours
Joseph Daul, MdPE, Président du Groupe PPE au Parlement européen,
19
Wilfried Martens, Président du PPE22
Youssef Amrani, Secrétaire général de l’UpM (L’Union pour la Méditerranée)
25
Franco Frattini, ancien Ministre des Affaires étrangères d’Italie
29
Tokia Saïfi, MdPE, Présidente de la commission politique de l’AP-UpM
32
Arnaud Danjean, MdPE, Président de la sous-commission Sécurité et Défense du PE
34
Elmar Brok, MdPE, Co-coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission des affaires étrangères du PE
36
Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, MdPE, Vice-présidente du PE, Présidente du Groupe de Travail EMUNI
40
Nizar Baraka, Ministre chargé de l’économie et des affaires générales du Royaume du Maroc
43
Mario Mauro, MdPE, Chef de la Délégation italienne (PDL) du Groupe PPE au PE,
Membre de la commission des Affaires étrangères du PE
46
Dominique Vlasto, MdPE, Coordinateur de la commission économique de l’AP-UpM
48
Nadim Gemayel, Membre du Parlement libanais51
Salvatore Iacolino, MdPE, Vice-président de la commission des libertés civiles, de la justice et
des affaires intérieures du PE54
Vito Bonsignore, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable de l’Union
méditerranéenne, Euromed, Coordinateur de l’AP-UpM; Responsable de la commission
spéciale sur la crise financière, économique et sociale du PE
56
Dacian Cioloş, Commissaire européen chargé de l’Agriculture et du Développement rural
59
Michel Dantin, MdPE, Membre de la commission de l’agriculture et du développement rural du PE 61
François Baroin, Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de la République française
64
Conclusions
68
3
PROGRAMME
Mercredi 7 Décembre 2011
SÉMINAIRE CONJOINT PPE ET GROUPE PPE
09h00-09h30 Mot d’accueil
Jean-Claude Gaudin, Maire de Marseille, Président du Groupe UMP au Sénat, Président du
Comité de la Majorité présidentielle
Discours d’ouverture :
-Joseph Daul, MdPE, Président du Groupe PPE au Parlement européen (PE), Membre de
la Présidence du PPE
-Wilfried Martens, Président du PPE
-Jean-Pierre Audy, MdPE, Président de la Délégation française (UMP) du Groupe PPE au PE
09h30-12h30
L’UE ET L’ÉVEIL DÉMOCRATIQUE EN MÉDITERRANÉE : ACCOMPAGNER LE
PRINTEMPS ARABE EN ACCROISSANT L’AIDE AUX JEUNES DÉMOCRATIES EN
GESTATION
09h30-10h30
Les orientations futures du processus d’intégration euro-méditerranéen dans le cadre de
la politique européenne de voisinage et de l’UpM
Présidence :
Ioannis Kasoulides, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable du Groupe de travail
Affaires étrangères, coordinateur du Groupe PPE de la commission culture de l’Assemblée
parlementaire de l’Euro-Méditerranée (AP-UPM)
Youssef Amrani, Secrétaire général de l’UpM (L’Union pour la Méditerranée)
Paulo Sacadura Cabral Portas, Ministre des Affaires étrangères, Ministre d’État du Portugal
Franco Frattini, ancien Ministre des Affaires étrangères d’Italie
Tokia Saïfi, MdPE, Présidente de la commission politique de l’AP-UpM
Arnaud Danjean, MdPE, Président de la sous-commission sécurité et défense du PE
José Ignacio Salafranca Sánchez-Neyra, MdPE, Co-Coordinateur du Groupe PPE au sein de
la commission des affaires étrangères du PE, Président sur le Groupe de Suivi sur le Sud de la
Méditerranée du PE
Elmar Brok, MdPE, Co-coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission des affaires
étrangères du PE
Débats
4
PROGRAMME
10h30-11h30 ACCOMPAGNER LE PRINTEMPS ARABE EN RENFORCANT LA CONFIANCE :
Répondre à l’aspiration des populations à une croissance forte et globale
Développer les investissements économiques
Présidence :
Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, MdPE, Vice-présidente du PE, Présidente du Groupe de Travail EMUNI
Nizar Baraka, Ministre chargé de l’économie et des Affaires générales du Royaume du Maroc
Dhya Mourou, Président de l’Association tunisienne des jeunes avocats
Mario Mauro, MdPE, Chef de la Délégation italienne (PDL) du Groupe PPE au PE, Membre de
la commission des affaires étrangères du PE
Dominique Vlasto, MdPE, Coordinateur de la commission économique de l’AP-UpM
Débats
11h30-12h30 ACCOMPAGNER LE PRINTEMPS ARABE EN RENFORCANT LA CONFIANCE :
Vers une gestion des flux migratoires et des politiques d’intégration
Renforcement des échanges interculturels
Présidence :
Manfred Weber, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable du Groupe de travail
Affaires juridiques et intérieures, Co-coordinateur des Ministres Affaires Intérieures du PPE
Nadim Gemayel, Membre du Parlement libanais
Jean-Dominique Giuliani, Président de la Fondation Robert Schuman, Paris
Jaime Mayor Oreja, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable du Groupe de
travail Stratégie politique, Réseau d’Idées européen
Mário David, MdPE, Vice-président du PPE, Membre de la Délégation à l’Assemblée parlementaire
de l’Union pour la Méditerranée au PE, coordinateur PPE de la commission politique de l’AP-UpM
Salvatore Iacolino, MdPE, Vice-président de la commission des libertés civiles, de la justice et
des affaires intérieures du PE
Simon Busuttil, MdPE, Coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission des libertés
civiles, de la justice et des affaires intérieures du PE
Débats
Conclusions :
Jerzy Buzek, MdPE, Président du PE, Président ex-officio du PPE
Vito Bonsignore, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable de l’Union
méditerranéenne, Euromed, Coordinateur de l’AP-UpM; Responsable de la commission spéciale
sur la crise financière, économique et sociale du PE
5
Jeudi 8 décembre 2011
09h00-10h30
LUTTE CONTRE LA VOLATILITÉ DES PRIX DES MATIÈRES PREMIÈRES ET
SÉCURITÉ ALIMENTAIRE - REDONNER DES VALEURS SAINES AUX MARCHÉS
Présidence :
Corien Wortmann-Kool, MdPE, Vice-présidente du Groupe PPE au PE, responsable du
Groupe de Travail sur l’Economie et l’Environnement
Matières premières industrielles
Antonio Tajani, Vice-président de la Commission européenne chargé de l’Industrie et de
l’entrepreneuriat
Aliments et produits agricoles
Dacian Cioloş, Commissaire européen chargé de l’Agriculture et du Développement rural
Michel Dantin, MdPE, Membre de la commission de l’agriculture et du développement rural du PE
Energie
Günther H. Oettinger, Commissaire européen chargé de l’Énergie
Débats
10h30-11h00
PRÉPARATION DU CONSEIL EUROPÉEN
Présidence :
Joseph Daul, MdPE, Président du Groupe PPE au PE, Membre de la Présidence du PPE
Intervention de Jean Léonetti, Ministre auprès du Ministre d’État, Ministre des Affaires
étrangères et européennes, chargé des Affaires européennes de la République française
Débats
6
11h00-12h00
LUTTE CONTRE LA VOLATILITÉ DES PRIX DES MATIÈRES PREMIÈRES ET
SÉCURITÉ ALIMENTAIRE - REDONNER DES VALEURS SAINES AUX MARCHÉS
(suite)
Présidence :
Marian-Jean Marinescu, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable du Groupe
de travail sur le Budget et les politiques structurelles
Répondre à la volatilité des prix en régulant et en rendant plus transparents les marchés
financiers
Intervention de François Baroin, Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie
de la République française
Michel Barnier, Commissaire européen chargé du Marché intérieur et des Services
Werner Langen, MdPE, Chef de la Délégation allemande du Groupe PPE au PE, Membre de la
commission économique et monétaire du PE
Débats
Conclusions
Jean-Paul Gauzès, MdPE, Coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission économique
et monétaire du PE
13h30-16h00 CONGRÈS DU PPE
7
COMPTE RENDU
Session d’ouverture
Jean-Claude Gaudin, Maire de Marseille et Président
du Groupe UMP au Sénat, a souhaité expliquer dans
son discours d’ouverture que pour faire avancer
l’Europe dans un contexte difficile, il faut toujours
plus et toujours mieux d’Europe. Toujours plus, cela
signifie renforcer et pérenniser l’Europe. Toujours
mieux, signifie la capacité et la volonté de rendre le
continent meilleur. Il n’y a pas d’autres choix et la
famille du PPE doit être celle qui ouvre la voie de
l’espérance et du courage. Pour le Sénateur-Maire de
Marseille, il convient de poursuivre ce projet qui a
apporté la sécurité et la paix au continent européen.
Dans un monde nouveau et en transformation, il faut
savoir se réformer et trouver un nouveau modèle : la
gouvernance économique est un modèle nouveau qui
nécessite volonté et sacrifice.
À Marseille, l’UE est reliée sur le terrain par des
parlementaires et des élus locaux.
J.-C. Gaudin rappelle le rôle majeur des territoires
locaux dans la compétitivité. En 2013, Marseille sera
la capitale de la culture et en est fière. Sans l’UE, rien
ne serait possible.
Joseph Daul, MdPE, Président du Groupe PPE au
Parlement européen (PE), l’Europe vit depuis sa
naissance, après la seconde guerre mondiale, une crise
aussi grave.
La démocratie, les droits de l’Homme, de la Femme,
des enfants, la Liberté, l’État de droit et l’économie
sociale de marché sont les valeurs de l’Europe pour
lesquelles la famille PPE doit se battre. Les débats de
ces journées d’études sont essentiels et éminemment
politiques et leurs conclusions sont dans les mains de
la famille du PPE. Il y a deux messages :
- Le premier est que les institutions européennes,
comme le Parlement européen et la Commission,
doivent rester au centre des décisions européennes.
- Le deuxième message est que le Groupe PPE doit être
fort et uni pour répondre aux défis. Durant l’histoire
de la construction européenne, la famille PPE a été
à l’avant-garde des grands événements comme le
Marché intérieur et la réunification du continent.
Le plan de sortie de crise doit être ambitieux et
réaliste, audacieux, efficace et rester fidèle à la
méthode communautaire. L’Europe ne peut aborder
la mondialisation de façon dispersée : il convient de
partager la souveraineté et non l’abandonner.
La proposition d’un nouveau traité par la France
et l’Allemagne doit être une question débattue par
l’ensemble de la famille européenne, afin qu’il n’y
ait ni vainqueur, ni vaincu. Une décision à 27 est
préférable à une décision à 17+.
Concernant les relations avec le sud de la Méditerranée,
le Groupe PPE a toujours été très actif. Le Printemps
arabe est une chance si l’on apporte de justes réponses.
Wilfried Martens, Président du PPE, considère
que le moment est décisif pour l’Europe. Le défi de
la démocratie dans les pays arabes doit être gardé à
l’esprit. De plus en plus de pays arabes accèdent à la
justice et à la démocratie. Les élections démocratiques
ont eu lieu et la révolution continue en Syrie. L’Union
européenne a un rôle à jouer. Dans le passé, l’UE a
commis quelques erreurs et devra continuer à s’engager
pour la démocratie et les valeurs des droits de l’Homme.
Premièrement, l’UE ne devrait pas oublier de regarder
aussi vers l’Est. Les défis au Sud et à l’Est de l’Europe
sont les mêmes : réfugiés, crime organisé,... Les
structures démocratiques doivent être développées
dans le voisinage.
Deuxièmement, il faut accepter les résultats des
élections démocratiques et offrir aux cultures
musulmanes de nouvelles perspectives. Le dialogue
interreligieux et interculturel a besoin d’être poursuivi.
Troisièmement, il est nécessaire de coordonner la
politique européenne de voisinage avec la politique
étrangère avec les USA. Il y a beaucoup à gagner avec
une approche concertée.
8
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
La politique de voisinage est un instrument décisif
pour les développements du Printemps arabe. Il faut
ouvrir le marché européen à ces pays. Une nouvelle
et meilleure politique de visa doit être mise en place.
Il faut une approche libérale pour les étudiants, les
hommes d’affaires... Cela suppose une approche
commune de la politique des visas.
L’UE a un rôle constructif à jouer.
Jean-Pierre Audy, MdPE, Président de la Délégation
française du Groupe PPE au Parlement européen,
considère qu’économie et valeur sont des termes
liés. On ne peut faire d’économie sur les valeurs
européennes. C’est à l’Europe de cimenter les valeurs
européennes. J.-P. Audy remarque, qu’au sud de la
Méditerranée, les jeunes n’ont pas voulu la chute de
l’Occident mais ont souhaité rejoindre les valeurs
occidentales.
Sur les questions européennes, la droite et le centredroit français sont d’accord. Les Européens ne sont
pas différents, mais diverses et cette diversité les unis.
Baptiste Thollon
Les orientations futures du processus
d’intégration euro-méditérranéen dans
le cadre de la politique européenne de
voisinage et de l’UPM
Selon Ioannis Kasoulides, MdPE, l’Europe doit
prendre conscience du nouveau contexte qui fait suite
au Printemps arabe. M. Kasoulides souligne ainsi
l’importance des résultats des élections dans les pays
du sud de la Méditerranée, ainsi que de leurs nouveaux
gouvernements.
Le secrétaire général de l’UPM, Youssef Amrani,
souligne qu’il est important pour l’Europe de revoir
sa vision à propos de la Méditerranée, et invite le PE
et le Groupe PPE à montrer la voie à suivre dans cette
région. L’Europe et le sud de la Méditerranée doivent
collaborer et avancer ensemble, déclare le secrétaire
général de l’UPM. M. Amrani insiste également sur
la nécessité d’engager le dialogue avec les partis
islamistes qui ont remporté les élections dans leurs
pays et de soutenir leur transition économique.
Paulo Sacadura, ministre des Affaires étrangères et
ministre d’État au Portugal, considère les événements
du Printemps arabe comme l’occasion de rétablir
un partenariat entre l’Europe et les pays arabes. Si
l’on veut recréer une union avec les pays du sud de
la Méditerranée, certaines obligations s’imposent
néanmoins :
- l’Europe doit comprendre que chaque pays a sa
propre histoire ;
- l’Europe ne peut exporter son modèle politique de
démocratie dans le Sud ;
- l’Europe doit respecter la société spirituelle des
pays arabes ;
- l’Europe doit apprendre à travailler avec les
gouvernements islamistes qui ont remporté les
élections.
D’autre part, M. Sacadura soutient que des négociations
s’imposent sans attendre entre la Palestine et Israël
dans le cadre du processus de paix. Le principal
problème dans le sud de la Méditerranée est l’Iran,
cependant, et il n’a pas été résolu, affirme le ministre
d’État du Portugal.
Franco Frattini, ancien ministre italien des Affaires
étrangères, souligne qu’il est important de coopérer
avec les pays du sud de la Méditerranée, mais sans
renoncer aux valeurs de notre société, fondées sur la
dignité humaine, le droit à la liberté, le droit à la religion,
des éléments non négociables selon M. Frattini. Seul
le respect du principe de dialogue mutuel et de respect
mutuel peut permettre d’aboutir à un partenariat
entre l’Europe et les pays arabes, souligne également
l’ancien ministre italien des Affaires étrangères.
Tokia Saïfi, MdPE, estime que l’Europe doit aider
les pays du sud de la Méditerranée à réussir leurs
transitions démocratiques. L’UE doit par conséquent
respecter l’issue de leurs élections, et garantir le respect
des droits humains. De même, Mme Saïfi souligne la
nécessité de renforcer les valeurs du PPE au sein des
partis qui partagent les mêmes valeurs dans le sud de
la Méditerranée, en les soutenant.
Selon Arnaud Danjean, MdPE, l’Europe doit prévoir
un plan pour la Méditerranée qui concerne : le marché,
la mobilité et la migration. Dans le cadre de ce plan
de travail, M. Danjean recommande une collaboration
9
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
plus ouverte avec la société civile et une plus grande
créativité.
essentiel pour assurer la coopération entre l’UE et les
pays arabes.
José Ignacio Salafranca, MdPE, souligne qu’il est
important pour l’Europe d’œuvrer à l’avenir. Selon
lui, l’UE a besoin d’une vision stratégique et elle doit
travailler, dans les quinze années à venir avec les bons
partenaires, qui sont ceux qui partagent les valeurs du
PPE. L’action de l’Europe était autrefois très lente et
non harmonisée ; cela ne peut plus arriver.
Jorge Soutullo
Jan-Willem Vlasman
(Virginia Millán de Silva)
Selon Elmar Brok, MdPE, dans les pays du sud de la
Méditerranée les minorités doivent être protégées, et
cela n’a pas été fait en Iraq. Le véritable danger, c’est
que dans ces pays arabes la liberté rime quelquefois
avec une réduction de la protection, en particulier
pour les minorités religieuses telles que les chrétiens.
D’autre part, l’Europe offre à ces pays une aide
économique pour créer une zone économique durable
et solide et contribuer au développement de la région.
Les interventions sont suivies d’un bref débat, auquel
participent entre autres :
Doris Pack, MdPE, Gaston Franco, MdPE, Alojz
Peterle, MdPE, Ioannis Kasoulides, MdPE, Youssef
Amrani, Ursula Stenzel, ancienne MdPE.
Dans le cadre du débat, qui est centré sur la coopération
entre l’Europe et les pays du sud de la Méditerranée,
les participants expriment la responsabilité importante
qu’a l’UE dans cette région, ainsi que l’importance de
son modèle de démocratie pour les pays arabes.
En ce qui concerne cette coopération, cependant, l’on
s’interroge sur la protection des minorités chrétiennes
dans ces pays du sud de la Méditerranée et sur la façon
de l’assurer, une question importante pour l’Europe.
Les participants se sont d’autre part dit satisfaits d’offrir
à des personnes venues des pays arabes l’occasion
de venir en Europe pour enrichir leur formation et
découvrir à quoi ressemble la démocratie dans nos
pays. Le programme Erasmus est présenté comme
une occasion pour les enseignants et les étudiants
d’enrichir leur formation en vue de songer à l’avenir
dans leur pays d’origine, un élément primordial.
Le débat s’est conclu en soulignant que le dialogue
avec les partis islamistes modérés est un facteur
10
Accompagner le Printemps arabe en
renforçant la confiance :
- Répondre à l’aspiration des populations à une
croissance forte et globale ;
- Développer les investissements économiques.
Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, MdPE, ouvre la session
en remerciant la délégation française d’avoir préparé
les journées d’études, et la ville de Marseille pour son
aide. Elle présente le premier orateur, M. Baraka.
Nizar Baraka parle des principales ambitions et
aspirations du Maroc et de la région, mais aussi des
défis qui les attendent.
Avec un taux de chômage de 10 % et pouvant aller
jusqu’à 40 % chez les jeunes dans les régions les
plus défavorisées, 1,5 million d’emplois vont devoir
être créés chaque année juste pour maintenir les
niveaux d’emploi actuels et éventuellement réduire
quelque peu le chômage. Le renforcement de la
bonne gouvernance, la création d’un climat propice à
l’investissement et le renforcement de la coopération
régionale pourraient renforcer la croissance de deux
points environ par an.
Les évolutions positives sont nombreuses : l’adoption
d’une nouvelle Constitution par référendum,
l’indépendance accrue du système juridique, la tenue
d’élections pacifiques et transparentes en septembre
et le transfert sans heurts du pouvoir au profit d’un
nouveau gouvernement de coalition sont autant
d’éléments qui contribuent à consolider le statut
de pays avancé dont bénéficie le Maroc dans l’UE.
La croissance est stable, à 5 %, depuis quelques
années, la dette publique s’élève à 53 % pour 2011
et le pays possède une économie de marché social
qui fonctionne. Une accélération des réformes
permettra au gouvernement de répondre aux attentes
économiques et sociales des citoyens.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Le Groupe PPE est invité (notamment dans le cadre
de l’accord de coopération entre le Groupe PPE et
le parti de l’Istiqlal) à accompagner le Maroc dans
cette dynamique afin de l’aider à créer une région
méditerranéenne empreinte de paix et de prospérité,
notamment en privilégiant l’investissement et l’emploi.
La zone de libre-échange du sud de la Méditerranée
doit être étendue.
Le deuxième orateur, Dhya Mourou, parle de
l’espoir démocratique suscité par la révolution
tunisienne, mais aussi des difficultés économiques
que connaît actuellement le pays. La démocratie ne
peut prospérer dans une économie faible caractérisée
par un chômage élevé, des différences régionales
et un sous-développement rural. Il souligne que des
mesures urgentes s’imposent pour faire face aux
défis économiques et sociaux en vue de maintenir
la stabilité et d’éviter un retour de la dictature, et
demande à l’Europe d’offrir son aide sur la base des
valeurs universelles et des libertés fondamentales
qu’elle représente.
Mario Mauro, MdPE, insiste sur le rôle que peuvent jouer
le Groupe PPE et l’UE dans le sud de la Méditerranée. Le
processus de Barcelone et l’Union pour la Méditerranée
n’ont pas produit l’action nécessaire pour apporter aux
pays du Sud la démocratie et le développement. Le
Groupe PPE doit concentrer ses efforts sur le fait de doter
son action d’un contenu politique.
Le parti turc AKP est observateur du Groupe PPE
depuis 2005, et le Groupe PPE pourrait jouer un rôle
important dans le dialogue avec les partis islamistes.
L’Ennahda, le parti islamiste tunisien, a affirmé qu’il
souhaitait se réimplanter sur la base du modèle de
l’AKP turc. Le Groupe PPE doit dépasser le stade
du discours ; il doit faire des efforts concrets pour
comprendre les choix politiques opérés par les partis
islamistes et pour suivre et surveiller, sans pour autant
imposer, les débats constitutionnels qui décideront de
la direction des évolutions dans la région.
La Turquie et l’AKP sont parvenus à créer la prospérité
et ont établi des relations diplomatiques solides avec la
Tunisie, l’Égypte, la Libye et la Syrie. Le Groupe PPE
et sa famille politique, mais aussi l’UE et son Service
pour l’action extérieure, doivent suivre ces évolutions
de près et prendre les mesures qui s’imposent.
M. Mauro parle également de la nécessité de créer un
cadre plus efficace pour les PME de la région afin de
stimuler l’économie, car ce n’est qu’en présence d’un
tissu sain de micro entreprises que la région pourra
installer la démocratie.
Pour terminer, Dominique Vlasto, MdPE, poursuit
sur la question de l’amélioration des perspectives
économiques. Il indique que l’UE doit être présente
pour accompagner la reprise économique de la
région. L’un des secteurs clés de la croissance sera le
secteur de la construction, et les autres concernent la
distribution d’eau, l’accès à l’énergie, les transports
et les télécommunications.
Il est également essentiel d’offrir aux jeunes, souvent
qualifiés mais sans emploi, des informations et des
formations si l’on veut assurer la croissance. Car on ne
peut oublier que le Printemps arabe a été déclenché par
les problèmes rencontrés par les jeunes. L’éducation et
la formation professionnelle doivent être étroitement
liées au marché de l’emploi.
Les universités doivent être rapprochées des
entreprises, il faut anticiper les besoins du marché et
les jeunes doivent avoir la possibilité d’exploiter leurs
qualifications.
Jesper Haglund,
Maria Paola De Angelis
11
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Accompagner le printemps arabe en
renforçant la confiance :
Vers une meilleure maîtrise des
flux migratoires et des politiques
d’intégration ; renforcement des
échanges interculturels
Manfred Weber, MdPE, Vice-président du Groupe
PPE au PE, responsable du groupe de travail « Affaires
juridiques et intérieures », co-coordinateur des
ministres des Affaires intérieures du Groupe PPE,
ouvre la réunion en rappelant l’importance politique
des flux migratoires à destination de l’Europe. Il
souligne également la nécessité pour l’UE d’entamer
un dialogue efficace avec les pays tiers, visant à
développer un partenariat afin de cerner les nouvelles
perspectives qui s’offrent aux populations à la suite
du Printemps arabe. Il considère en outre la sécurité
frontalière comme une question d’intérêt bilatéral et
prend également en considération l’impact culturel
découlant des flux migratoires.
Nadim Gemayel, membre du Parlement libanais,
souligne que l’Europe est considérée par les populations
concernées par le Printemps arabe non seulement
comme une destination pour les flux migratoires, mais
aussi comme un modèle de référence et une source
d’inspiration. Dans sa volonté de stimuler un débat
nouveau et ouvert, il est important que l’UE évite
toute attitude mesquine susceptible de déclencher,
en réaction, un renforcement des extrémismes dans
les pays d’Afrique du Nord. Il est par conséquent
essentiel de trouver un terrain d’entente afin d’aborder
concrètement et efficacement la question des flux
migratoires. Dans ce contexte, le facteur culturel
joue un rôle décisif car l’ouverture mutuelle est le
seul antidote à la montée de l’extrémisme. Malgré
la présence grandissante du discours populiste en
Europe, les échanges culturels doivent être considérés
comme un enrichissement. L’entente mutuelle est dès
lors indispensable pour permettre aux pays arabes de
parvenir à la démocratie.
Jean-Dominique Giuliani, Président de la Fondation
Robert Schuman, entame son intervention en rappelant
que l’UE doit stimuler la croissance. Compte tenu
de la stagnation démographique actuelle en Europe,
l’immigration constitue le seul moyen de s’en sortir à
12
court terme. Il est par conséquent essentiel de veiller
à ce que les accords de Schengen et de Dublin soient
pleinement fonctionnels. L’aide financière de l’UE doit
être mieux répartie, en prenant en considération les
événements survenus dans la région méditerranéenne.
De plus, les jeunes représentent la part la plus
importante de la population dans les pays arabes. Ils
doivent être aidés en leur accordant un statut particulier
pour leur permettre de venir étudier en Europe. En ce
qui concerne la religion, le seul véritable problème
concerne le mauvais usage qui en est fait lorsqu’elle
est exploitée à des fins politiques.
Jaime Mayor Oreja, MdPE, Vice-président du Groupe
PPE, responsable de la Stratégie politique, indique
que la crise économique actuelle influence également
le monde arabe. Cette crise est en effet mondiale et
elle concerne non seulement l’aspect économique
de notre société, mais aussi nos modèles et nos
valeurs. Nous devons dès lors revoir notre approche
en commençant par renforcer la cohésion interne de
l’UE. Cette nécessité est encore plus manifeste lorsque
l’on sait que les extrémistes renforcent leur influence
grâce à l’absence de politique en matière de cohésion
interne de l’UE. En l’absence de cohésion interne et
de politique d’intégration efficace pour les immigrés
dans l’UE, il n’y aura pas de politique européenne de
voisinage. Le Groupe PPE doit être à l’avant-poste
dans la définition d’une réponse commune en matière
de politique d’immigration basée sur le principe de la
cohésion interne européenne.
Mario David, MdPE, Vice-président du Parti
populaire européen et président de la délégation pour
les relations avec les pays du Mashrek, indique à quel
point il est important que l’UE témoigne sa solidarité
à l’égard des pays arabes. Il va en effet falloir
attendre un certain temps avant d’observer les effets
des changements suscités par le Printemps arabe. Le
risque est que les populations arabes soient déçues
dans leurs attentes. Il est dès lors essentiel d’appuyer
les politiques de protection de l’environnement et
celles axées sur l’efficacité des ressources dans ces
pays, de même que le renforcement des institutions. Il
est également essentiel de venir en aide à nos voisins
du Sud en les aidant à résoudre leurs problèmes
économiques grâce à une assistance mieux ciblée. Ces
mesures auront également un impact positif sur les
problèmes découlant de la migration.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Salvatore Iacolino, MdPE, Vice-président de la
commission des libertés civiles, de la justice et des
affaires intérieures du PE, salue le fait que le Groupe
PPE accorde une attention particulière à l’immigration et
continue de considérer cette question comme une priorité
politique, comme il l’a également confirmé à l’occasion
des journées d’études du Groupe PPE organisées à
Palerme. Pour faire face à la criminalité et à l’immigration
clandestine, il convient de mettre en œuvre des accordscadres bilatéraux sur la gestion des flux migratoires. En
outre, ces pays sont potentiellement confrontés au risque
d’une islamisation extrême. La surveillance doit dès lors
être renforcée, tout comme le dialogue politique par le
biais du Service européen pour l’action extérieure. Il
convient de s’intéresser plus particulièrement aux jeunes
en développant des programmes destinés aux étudiants,
tels qu’Erasmus, ou en améliorant les perspectives
d’emploi des entrepreneurs.
Simon Busuttil, MdPE, coordinateur du Groupe PPE
au sein de la commission des libertés civiles, de la
justice et des affaires intérieures du PE, plaide en faveur
d’un renforcement de la confiance mutuelle si l’UE
veut vraiment aider les pays arabes. À l’heure actuelle,
il semble que la confiance mutuelle soit totalement
inexistante et des efforts des deux côtés s’imposent pour
la renforcer. Dans ces circonstances, les pays du sud de
la Méditerranée doivent coopérer pour mettre fin aux
franchissements illégaux des frontières, qui mettent à mal
les frontières extérieures de l’UE. De plus, les pays arabes
doivent accepter que l’immigration soit traitée comme un
chapitre distinct et spécifique dans les accords futurs. Il faut
s’intéresser davantage à la protection des droits humains
grâce à la signature de la Convention de Genève sur les
réfugiés. D’autre part, l’UE doit offrir aux pays arabes une
expertise technique en matière de contrôle des frontières
et une aide financière afin de faire face à l’immigration.
Le coordinateur évoque également la nécessité d’une
politique européenne commune en matière d’asile, ainsi
que d’une simplification des procédures d’octroi de visas.
Dans le cadre du débat, les interventions de Nizar Baraka,
ministre chargé de l’Économie et des Affaires générales du
Royaume du Maroc, Anne Delvaux, MdPE, et Philippe
Boulland, MdPE, portent sur les dangers liés à la montée
du populisme et à l’exacerbation potentielle de la situation.
Les intervenants rappellent également qu’il convient de
réduire le phénomène de la fuite des cerveaux, ainsi que
de définir des politiques plus efficaces pour venir en aide
aux migrants qui rentrent dans leur pays. L’idée de créer
un programme destiné aux étudiants afin de permettre
aux jeunes arabes de compléter leur formation en Europe
est considérée positivement, mais il convient d’en définir
clairement les conditions et de déterminer le statut qui sera
accordé aux étudiants arabes.
Jerzy Buzek, MdPE, Président du Parlement européen,
conclut en rappelant l’importance grandissante du
Service européen pour l’action extérieure en tant
qu’outil diplomatique afin d’influencer les évolutions
futures dans les pays arabes. Dans ce contexte, le
Parlement européen doit maintenir ses relations
permanentes avec le Haut représentant pour les affaires
étrangères et la politique de sécurité. Il est fondamental,
à ce stade, d’appuyer le renforcement des institutions et
d’encourager les nouveaux acteurs politiques. Pour le
Groupe PPE, il est plus particulièrement important de
coopérer avec les partis musulmans, comme il l’a déjà
fait par le passé avec la Turquie. La dimension liée à
la société civile doit également être prise en compte. Il
est essentiel d’éviter de commettre les mêmes erreurs
dans la refonte du dialogue futur avec les pays du sud de
la Méditerranée. La seule manière d’assurer la stabilité
consiste à assurer la démocratie et la prospérité.
Vito Bonsignore, MdPE, Vice-président du Groupe
PPE au PE, responsable d’Euromed et de l’Union
méditerranéenne, clôture le débat en signalant que cette
discussion intervient à un moment particulier pour l’UE.
L’on peut en effet constater aujourd’hui que le processus
de Barcelone et l’Union méditerranéenne n’ont pas
répondu aux attentes, et il convient dès lors de procéder
à une réforme approfondie de la politique européenne
de voisinage. Il y a plusieurs questions importantes
et difficiles à aborder si l’on veut revoir la stratégie
communautaire dans la Méditerranée. Il est essentiel de
commencer à coopérer avec les partis islamiques modérés
et, parallèlement à cela, de gérer les flux migratoires à
destination de l’Europe. Un effort particulier doit en outre
être consenti pour contenir les approches populistes. À
propos du processus de paix au Moyen-Orient, l’UE doit
renforcer son rôle politique dans le quartet, en appuyant
vigoureusement la solution des deux États et en facilitant
ce processus par le biais d’une approche innovante.
Michael Speiser
Vittoria Venezia
13
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Lutte contre la volatilité des prix des
matières premières et sécurité alimentaire
- redonner des valeurs saines aux marchés
Matières premières industrielles
Le Groupe PPE a demandé à la Commission européenne
de proposer une véritable politique européenne pour les
matières premières dans le cadre de son initiative phare
relative à la politique industrielle, une vraie politique
européenne soulignant l’importance des entreprises
compétitives et de la chaîne de valeur industrielle en tant
que principaux moteurs de croissance économique forte.
Le Commissaire européen Tajani a souligné que
la demande accrue découlant de la croissance
démographique et les revenus plus élevés sur les
marchés émergents pèsent lourdement sur la nécessité
d’atteindre une répartition des ressources plus efficace,
en particulier en ce qui concerne les matières premières.
Le Groupe PPE défend l’établissement d’une gouvernance
et d’une coordination plus efficaces concernant les
politiques relatives aux matières premières afin de répondre
aux opportunités et aux défis posés par la mondialisation en
combinant tous les instruments et toutes les mesures possibles
de la politique industrielle de l’UE (y compris, par exemple,
les instruments et mesures issus du marché intérieur, de la
concurrence, de la politique de compétences et de la politique
régionale, du commerce et des investissements, des normes
et de la convergence réglementaire).
Le Groupe PPE encourage le développement d’une
méthode plus fiable pour évaluer l’utilisation efficace
14
des ressources, ainsi que pour déterminer et introduire
des objectifs d’amélioration de cette utilisation à
moyen et à long terme.
Le Groupe PPE accorde une attention particulière à
l’accès aux matières premières stratégiques et critiques,
telles que les terres rares (REE), comme l’a indiqué
M. Tsoukalas, ainsi qu’aux problèmes liés à l’utilisation
efficace des ressources, au recyclage et à la substitution
des matières premières, notamment la gestion efficace
des déchets permettant de renforcer la compétitivité
industrielle, de stimuler la croissance durable et de
garantir la sécurité d’approvisionnement en Europe.
Le Commissaire Tajani a rappelé que le Groupe PPE
défend à juste titre un approvisionnement durable
à partir de sources de pays de l’Union grâce à la
coopération entre les États membres dans le domaine
des données et des études géologiques, ainsi qu’un
approvisionnement durable à partir de sources de pays
tiers grâce à la « diplomatie des matières premières »,
aux partenariats avec des pays riches en ressources
et à une politique de développement axée sur le
renforcement de la gouvernance et de la transparence.
Dans ce contexte, Antonio Tajani invite le Groupe PPE
à jouer un rôle actif dans le prochain sommet sur les
matières premières prévu début 2012.
Alfredo Sousa De Jesus
Produits agroalimentaires et agricoles
Le Commissaire Barnier introduit cette première partie
du débat en se félicitant de l’initiative du Groupe PPE
d’étudier la question cruciale de la volatilité des prix
des matières premières et souligne son potentiel de
déstabilisation. D’après lui, la crise, la famine et même
la guerre sont possibles si le problème n’est pas résolu
à temps. Il mentionne les problèmes auxquels est
confrontée l’agriculture mondiale où la demande dépasse
l’offre, notamment en raison de l’augmentation de la
population et du changement d’habitudes alimentaires
dans les économies émergentes. Il poursuit en déclarant
qu’une plus grande transparence et un meilleur contrôle
du marché sont nécessaires et qu’il est essentiel de définir
exactement le rôle de chacun et de mieux connaître les
positions des différents acteurs du marché. Il conseille
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
de prendre davantage de sanctions afin de lutter contre
certains abus sur le marché. Il conclut qu’il incombe au
centre-droit, et non à la gauche, de présenter des solutions
à ce problème et il souligne la nécessité d’accroître la
productivité du secteur agricole.
stocks et l’évolution des prix), créer des stocks stratégiques
et améliorer la gestion des risques. Il conclut en affirmant
que les propositions avancées par le commissaire Ciolos
sont en cours d’examen et qu’elles semblent aller dans la
bonne direction.
Le Commissaire Cioloş fait remarquer qu’une production
alimentaire suffisante est un principe fondateur de la
politique agricole commune (PAC) et qu’il importe,
aujourd’hui plus que jamais, de permettre aux agriculteurs
européens de pouvoir vivre de leur métier. Il affirme qu’il
y a indéniablement un problème dans l’ensemble de la
chaîne alimentaire du fait de l’absence de corrélation entre
les prix accordés aux agriculteurs pour leurs produits et les
prix payés par les consommateurs dans les magasins et les
supermarchés. Il poursuit en exposant les mesures avancées
dans ses propositions de réforme de la PAC, destinées
à renforcer la position des agriculteurs sur le marché. Il
déclare que des mécanismes flexibles sont prévus afin d’agir
sur le marché, s’il y a lieu, et d’éviter des perturbations
majeures. Il explique également son point de vue au sujet
de l’utilisation du Fonds de développement rural qui permet
aux agriculteurs d’investir dans des régimes d’assurance et
des fonds de placement, en particulier les années de bonne
conjoncture économique. Il indique également qu’il est
important d’encourager les agriculteurs à s’organiser en
vue d’accroître leur pouvoir de négociation tout au long
de la chaîne alimentaire et souligne l’expérience positive
constatée dans le secteur des fruits et légumes, une approche
qu’il a l’intention d’étendre à tous les secteurs. Il ajoute
que certaines exceptions aux lois générales régissant la
concurrence pourraient également être envisagées et qu’il se
réjouit d’en discuter davantage avec les membres du PPE.
Il poursuit en saluant l’initiative de la présidence française
du G20 de mettre, pour la première fois, la question de
la sécurité alimentaire à l’ordre du jour. Il se réjouit des
conclusions du G20, particulièrement en ce qui concerne la
transparence sur le marché, la promotion de la recherche et
de l’innovation ainsi que l’idée de PAC régionales.
Mme McGuinness, MdPE, prend la parole lors du débat
suivant et dit regretter le fait que le Parlement européen
ne soit pas correctement représenté ni impliqué dans
les travaux du groupe de haut niveau sur la chaîne
d’approvisionnement alimentaire. Elle ajoute qu’il y a eu
beaucoup de discussions pour une meilleure organisation
des agriculteurs, mais pas assez pour l’autre extrémité de la
chaîne alimentaire, à savoir la concentration dans le secteur
de la distribution.
M. Dantin, MdPE, souligne le fait que l’objectif premier de
la PAC reste celui de nourrir la population et que les fortes
disparités entre les prix sont inacceptables. Il se réjouit de
la réelle détermination, affichée à Cannes, à résoudre le
problème par des actions telles qu’augmenter la production
agricole, favoriser les investissements public/privé dans
l’agriculture, financer la recherche de manière adéquate,
assurer une plus grande transparence sur le marché
(améliorer, en particulier, les informations sur l’état des
M. Zver, MdPE, insiste sur la nécessité de définir
des mesures en vue d’aider les jeunes agriculteurs et
souligne le fait que seulement 6 % des agriculteurs de
l’Union sont âgés de moins de 35 ans. M. Papastamkos
demande plus de précision sur le rôle que pourraient
jouer les régimes d’assurance dans la lutte contre la
volatilité des prix et M. Jahr fait observer que le marché
à terme encourage la spéculation sur les matières
premières agricoles.
Le Commissaire Cioloş répond que le groupe de haut
niveau présidé par le Commissaire Tajani publiera un
rapport en juin. Il indique que, dans la mesure du possible,
une nouvelle législation sera évitée mais que, si les acteurs
de la chaîne alimentaire ne parviennent pas à trouver un
accord, la Commission prendra des mesures. Concernant la
concentration dans le secteur de la distribution, il déclare qu’il
a demandé au Commissaire Almunia d’étudier cette question
en profondeur. Quant à l’augmentation de la productivité, il
souligne les difficultés rencontrées lors de la mise en pratique
des recherches mais ajoute que le prochain CFP prévoira
un plus large budget pour la recherche. Il précise que les
jeunes agriculteurs continueront à recevoir de l’aide au titre
du deuxième pilier de la PAC, mais qu’il a proposé que ces
agriculteurs puissent également bénéficier du financement
du premier pilier. En ce qui concerne les assurances, le
commissaire explique que les fonds du deuxième pilier
permettront aux agriculteurs de subventionner leurs primes
d’assurance ou de les aider à créer des fonds de placement. Il
poursuit en affirmant qu’il importe de garantir une plus grande
transparence sur le marché à terme ainsi qu’une meilleure
information sur les prix. Il annonce que la Commission
publiera des informations régulières sur l’évolution, et
15
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
les perspectives d’évolution, des prix et que d’autres pays
suivront l’exemple, à la suite des résultats du sommet du
G20. M. Dantin souligne la diminution considérable des
ressources financières remises aux producteurs et affirme
que ce point ne pourrait pas être résolu par la PAC. Il ajoute
qu’environ un tiers des agriculteurs de l’Union prendront
prochainement leur retraite et que ces deux sujets suscitent
de réelles inquiétudes.
sont déjà très compétitifs sur le marché international et que
les quotas créent des contraintes inutiles. Pour ce qui est
de l’entrée en vigueur de la nouvelle PAC, il assure aux
membres présents que, bien qu’elle espère une entrée en
vigueur des nouvelles règles début 2014, la Commission
est consciente des risques d’un tel calendrier et prépare des
plans d’urgence.
Alwyn Strange
Mme Lulling, MdPE, ouvre la deuxième partie du débat
en demandant pourquoi la Commission a proposé la
libéralisation des droits de plantation dans le secteur vinicole.
Elle insiste sur le fait que ces droits devraient être maintenus.
M. Siekierski souligne l’importance du marché des céréales
et affirme que le grand public devrait être plus sensibilisé aux
avantages de la PAC et qu’il faudrait en faire davantage pour
assurer la sécurité alimentaire. Mme Bildt prie le commissaire
Cioloş de travailler en plus étroite collaboration avec son
collègue Barnier sur les questions relatives à la chaîne
alimentaire et insiste sur le fait que le Parlement européen
a besoin d’une meilleure information sur les travaux du
groupe de haut niveau. Mme Herranz plaide en faveur du
maintien des quotas de production dans le secteur du sucre
jusqu’en 2020 et invite ses collègues à soutenir la question
orale et la résolution de sa collègue Mme Patrao Neves sur les
déséquilibres de la chaîne d’approvisionnement alimentaire.
M. La Via mentionne les difficultés des négociations pour
un nouveau CFP et s’interroge sur les chances réelles de
voir une nouvelle PAC mise en place pour début 2014. Il
s’enquiert également de l’avenir du programme d’aide
aux plus démunis après 2013. M. Dorfmann demande si
le financement des régimes d’assurance et des fonds de
placement devrait provenir du deuxième pilier, étant donné
que ces instruments sont liés aux revenus des agriculteurs et
qu’ils concernent davantage le premier pilier.
Garantir des prix équitables et non
faussés pour les installations énergétiques
Le Commissaire Cioloş reprend la parole et déclare que
c’est le Conseil qui a pris la décision relative aux droits
de plantation dans le secteur vinicole. Il poursuit en
affirmant que la situation des jeunes agriculteurs est en effet
préoccupante et qu’il espère que le Parlement européen
pourra défendre le financement global de la PAC proposé
par la Commission, ou du moins garantir une augmentation
de ces fonds. Il indique que, pour les questions relatives à
la volatilité des prix et à la chaîne alimentaire, il travaille en
très étroite collaboration avec ses collègues commissaires et
que le rapport du groupe de haut niveau prévu en juin devrait
également être envoyé au Parlement. En ce qui concerne le
marché du sucre, il précise que nos producteurs de sucre
16
Le Groupe PPE estime que les variations importantes et
soudaines des prix observées sur les marchés des matières
premières depuis 2007, en particulier sur les marchés
pétrolier et agricole, ont fait de la volatilité des prix une
question capitale pour l’économie mondiale. Il convient,
en particulier pour l’Union européenne, de répondre à la
volatilité des prix afin de suivre une croissance intelligente,
durable, inclusive et verte, comme l’a indiqué M. Rubig.
Les variations excessives des prix, souvent proches de
la spéculation, favorisent l’incertitude et entravent les
capacités de prévision des différents acteurs économiques.
Cette incertitude est en outre exacerbée par le manque de
transparence sur les marchés des matières premières, ce
qui à son tour rend les prix encore plus volatiles.
Les marchés financiers doivent fournir les moyens de
gérer cette volatilité en permettant aux acteurs de se
prémunir contre les variations des prix. Toutefois, l’auto
réglementation en tant que telle n’est pas suffisante et des
règles renforcées et harmonisées doivent être mises en place
pour ces marchés afin d’empêcher les abus de marché et
les manipulations des prix. C’est pourquoi le Groupe PPE
est favorable à l’adoption rapide de mesures visant à lutter
contre la volatilité des prix et à promouvoir la sécurité dans le
domaine des produits agricoles et des marchés des matières
premières. Il convient également d’aborder et d’encourager
ces initiatives lors de tous les forums internationaux, comme
le G8, le G20, l’OCDE, l’OMC et les Nations unies.
Dans ce contexte, le Commissaire européen Oettinguer
a souligné la dépendance énergétique de l’UE, vis-àvis du pétrole et du gaz, ainsi que le rôle joué par la
politique énergétique en tant qu’instrument de politique
extérieure. Pour cette raison, l’UE aurait pu mieux gérer
ses propres ressources, dans le domaine du nucléaire,
de la technologie CSC, de l’efficacité énergétique, en
particulier dans les bâtiments publics, des énergies
renouvelables, et du stockage de l’électricité.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
M. Vidal-Quadras a souligné qu’en termes de gaz
d’importantes réalisations ont été obtenues, à savoir
en matière d’interconnections, de débit inverse et de
stockage d’urgence, mais il a insisté sur le fait que
l’efficacité énergétique ne suffit pas à elle seule et que
des mesures supplémentaires devraient être prises pour
atteindre une production d’énergie propre. M. Belet a
pris la parole pour dire qu’il est possible d’apporter des
réponses à la plupart des problèmes énergétiques dans
l’UE, et à leurs coûts respectifs, en adoptant la devise
du Groupe PPE, « Plus d’Europe », et en libéralisant
davantage les marchés afin d’acquérir l’énergie à des prix
abordables. En réponse à M. Landsbergis, inquiet quant
à la mise en œuvre du troisième paquet par les autorités
russes, le Commissaire européen Oettinguer rappelle
le rôle de la Commission, qui veille soigneusement à ce
qu’il soit véritablement et convenablement mis en œuvre.
Alfredo Sousa De Jesus
Intervention de M. Léonetti
conclusions de M. Gauzès
et
Jean Léonetti, Ministre français chargé des Affaires
européennes, explique que l’Europe se trouve à la
croisée des chemins :
- soit le renoncement, c’est-à-dire se passer de
l’Europe, mais ce qui n’empêchera pas de devoir
rembourser les dettes des États ;
- soit la voie du langage de vérité et regarder la situation
telle qu’elle est. L’Europe a vécu avec la sécurité de l’euro.
Pour le ministre, il faut plus et mieux d’Europe. Au Conseil,
la France et l’Allemagne ont proposé une méthode et un
objectif. La méthode, c’est la discipline et la solidarité.
L’objectif, c’est la croissance, l’emploi et la compétitivité.
La crise actuelle n’est pas une crise de l’euro, mais de la
dette. Il faut des actions préventives avec l’instauration
de la règle d’or dont le contrôle se fera par la Cour de
justice avec un droit de regard sur son application par
le juge national. Mais ce sont les Parlements qui seront
maîtres de la décision.
La règle d’or doit permettre de redonner la confiance
entre les Européens et ainsi ouvrir la voie à plus de
solidarité. Pour le ministre, l’épisode grec est clos ;
il faut redonner confiance aux investisseurs. Le
Mécanisme européen de stabilité financière sera
opérationnel dès 2012.
La question, qui est aujourd’hui centrale, est de
combattre le populisme et l’euroscepticisme qui sont
nés de la crise. Il faut remettre au centre du débat le
Parlement européen et les Parlements nationaux.
La coordination fiscale doit aussi être discutée entre
les 27 États membres, bien que ce soit un idéal et qu’il
faille certainement avancer sur ce dossier avec moins
d’États. Toutefois quelques États ne peuvent empêcher
l’Europe d’évoluer.
Dans les prochains mois, plusieurs dossiers seront
discutés au Conseil :
- le Cadre financier pluriannuel : il s’agit de dépenser mieux,
plutôt que plus. En période d’austérité, l’effort doit venir
de tous et l’Europe doit elle aussi adopter la rigueur ;
- l’adhésion des États des Balkans occidentaux : le
ministre se dit favorable à l’adhésion de ces États
avec des exigences ;
- l’Iran : sur ce dossier, l’UE doit fournir des réponses claires.
En conclusion, le ministre explique que l’Europe
traverse une étape essentielle de son existence mais
qu’elle est à même d’y répondre.
Jean-Paul Gauzès, MdPE, coordinateur du Groupe PPE
à la commission économique et monétaire du Parlement
européen, rappelle dans ses conclusions qu’il est primordial
de rétablir la confiance et rassurer les entrepreneurs et les
marchés. La méthode intergouvernementale n’est, à cet
égard, pas plus efficace ni plus rapide que la méthode
communautaire : au contraire. Le Groupe PPE apporte son
soutien au Commissaire Michel Barnier dans ses réformes
pour rendre l’UE plus forte. Celles-ci doivent continuer de
défendre ses valeurs, dont la première d’entre elles est la
dimension humaine de la relation économique et sociale. Le
Groupe PPE soutient l’économie sociale de marché et, dans
ce domaine, le Parlement européen peut apporter beaucoup.
Jusqu’à présent, les députés ont d’ailleurs montré une grande
cohérence dans leurs positions : si un contrôle démocratique
des procédures est mis en place au niveau national, un autre
est indispensable au niveau européen.
Lors de leur prochaine réunion, les Chefs d’État et de
gouvernement devront décider de travailler ensemble
et être déterminés à envoyer un message de confiance
fort aux citoyens européens.
Enfin, concernant les agences de notation, M. Gauzès rappelle
qu’elles ont un rôle d’information auprès des investisseurs et
qu’il ne faut pas leur accorder plus d’importance.
Baptiste Thollon
17
OUVERTURE
18
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
JOSEPH DAUL, MdPE
Président du Groupe PPE au PE, Membre de la Présidence du PPE
M
onsieur le Maire de Marseille et Président
du Groupe UMP au Sénat, Cher Jean-Claude
Gaudin,
Monsieur le Président du Parti Populaire Européen,
Cher Wilfried Martens,
Monsieur le Président de la Délégation française du
Groupe PPE, Cher Jean-Pierre Audy,
Cher(e)s Invité(e)s,
Cher(e)s Collègues,
Cher(e)s Ami(e)s,
C’est un grand bonheur pour moi de vous souhaiter,
à titre personnel et au nom des Membres du Groupe
du Parti Populaire Européen, la plus chaleureuse
bienvenue, ici à Marseille.
Je veux, en votre nom à toutes et à tous, remercier très
vivement le Maire de cette belle Ville, mon ami JeanClaude Gaudin, qui n’a pas ménagé ses efforts pour
faire de ces Journées dans la Cité phocéenne un temps
de travail intense et, en même temps, un temps de
rencontre fraternel entre les Membres de l’ensemble
de la famille du PPE, la plus grande force politique en
Europe.
Je veux aussi remercier très chaleureusement notre
Collègue Dominique Vlasto, Membre active de notre
Groupe et également Adjointe au Maire de Marseille,
qui en cette double capacité, a tout fait pour la réussite
de ces Journées d’Études.
Je veux saluer le Président de la Délégation française,
Jean-Pierre Audy, pour son soutien et son engagement.
Je veux enfin féliciter le Président Martens pour le
choix judicieux qu’à la tête de notre Parti européen,
il a fait en décidant de réunir le Congrès du PPE dans
cette ville de Marseille.
Joseph Daul, MdPE
Président du Groupe PPE au PE, Membre de la Présidence du PPE
Cher(e)s Collègues, Cher(e)s Ami(e)s,
Rarement je crois l’actualité européenne, les enjeux
européens auront autant été au-devant de la scène
politique.
Rarement, et je crois même jamais depuis la seconde
guerre mondiale, l’Union européenne et ses Etats
membres n’ont été confrontés à des choix aussi
majeurs, aussi décisifs, pour l’avenir des 500 millions
d’Européens, pour l’avenir aussi des valeurs et des
idéaux que nous, Européens, incarnons dans le monde.
Car il faut bien le dire, rares sont sur la planète les
puissances de la taille et de l’importance de l’Europe
qui portent des messages aussi forts pour l’humanité.
Je veux parler de la démocratie, je veux parler des droits
de la femme, de l’enfant, de l’homme, des minorités.
19
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Je veux parler des libertés, je veux parler de l’État de
droit, je veux parler de l’économie sociale de marché.
Oui, Cher(e)s ami(e)s, nous devons être conscients
que le combat que nous menons pour sauver pour
l’euro, pour sauvegarder et renforcer la construction
européenne, ce n’est pas seulement un combat
économique et financier, ce n’est pas seulement un
rapport aux marchés et aux agences de notation, ce
n’est pas seulement un débat sur la dette publique ou
sur la gouvernance.
Non, ce débat est bel et bien celui des valeurs, celui
des idéaux, celui des principes qui font notre identité,
qui font de nous qui nous sommes, à savoir des êtres
libres, démocrates, et soucieux du bien-être de tous
ceux qui, sur l’ensemble de la planète, nous regardent
et nous demandent de ne pas renoncer à ces idéaux.
Bref, le débat que nous allons avoir, aujourd’hui et
demain dans le cadre des Journées d’Études de notre
Groupe parlementaire, dans le cadre du Congrès du
PPE sous la direction de Wilfried Martens, le débat
que nos Chefs d’État et de Gouvernement auront
demain midi, ici-même, quelques heures avant un
Conseil européen décisif à Bruxelles, ces débats sont
éminemment politiques.
Mais ces discussions, et surtout leurs conclusions, je
dois le dire aussi, sont largement dans les mains de
notre famille politique.
Le PPE porte une responsabilité écrasante, non pas
parce qu’il en a décidé lui-même, mais parce que
les Européens lui ont accordé leur pleine confiance
dans 17 des 27 États membres de l’Union, et dans
les Institutions européennes que sont le Parlement
européen, la Commission et le Conseil.
Mon premier message, ici à Marseille, est que
ces Institutions européennes, et en particulier le
Parlement, directement issu du suffrage universel, et
la Commission européenne, dont le Président, notre
ami José Manuel Barroso, a été choisi parce qu’il
est issu du PPE, premier Groupe parlementaire, ces
Institutions donc, doivent être, et doivent demeurer, au
centre, au coeur des prises de décisions européennes.
20
Cette responsabilité de garant de l’intérêt général
européen, nous les Parlementaires européens, devons
l’exercer à 100%, comme la Commission européenne
se doit d’exercer à 100% la mission, qu’elle a toujours
eue, de gardienne des traités.
Le Groupe PPE jouera tout le rôle qui lui incombe
dans la définition, avec le Conseil et la Commission,
des voies d’avenir pour nos concitoyens, plus encore
dans la crise difficile à laquelle nous faisons face.
Je souhaite que la Commission en fasse de même.
Mon deuxième message, c’est que la famille du PPE
doit tout faire pour être à la fois forte et unie dans la
proposition des mesures de sortie de crise.
C’est notre devoir, et notre famille a toujours honoré
ses devoirs, qu’il s’agisse de la mise en place de la
Communauté européenne dans les années 50, qu’il
s’agisse de la réunification historique du continent
européen après la chute du mur de Berlin, qu’il
s’agisse du marché intérieur de 1993, qu’il s’agisse
enfin de la moralisation financière après la crise
financière de 2008.
Je ne doute pas, donc, que le PPE saura proposer un
plan de sortie de crise à nos concitoyens, aux jeunes
qui ont du mal à trouver du travail, aux actifs qui ne
ménagent pas leur peine pour faire vivre leurs familles
et qui contribuent au bien public par le biais de leurs
impôts, aux retraités qui ont le droit de vivre du fruit
de leur travail de toute une vie.
Ce plan de sortie de crise, il doit être ambitieux, et réaliste.
Il doit être responsable, et solidaire.
Il doit être audacieux, et inclusif.
Il doit viser à des solutions d’urgence, tout en
ménageant l’avenir.
Ce plan, Mesdames et Messieurs, doit à la fois être
efficace, et rester fidèle au principe qui a fait le succès
de l’Union européenne, à savoir le principe de la
méthode communautaire.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Le temps est venu pour nos États d’aborder les défis
de la mondialisation non pas en ordre dispersé, mais
de façon unie et harmonieuse.
Vous savez combien ce sujet me tient a coeur, et je
suis heureux que nous prenions le temps de l’aborder
demain matin.
Le temps est venu pour nos États non
pas
de
renoncer
à
leur
souveraineté,
- personne au PPE ne songerait à le demander -, mais
à partager, à assumer de façon unie leur souveraineté
en dotant, enfin, la zone euro d’une gouvernance
économique et politique digne de ce nom.
Enfin, la régulation des marchés financiers que
j’évoquais au début de mon introduction figure aussi au
menu de nos débats, et je suis heureux que le Ministre
français des finances et Président en exercice du G20,
François Baroin, ait voulu nous rejoindre sur ce sujet.
Les États membres se verront proposer cette semaine,
par Berlin et Paris, de nouvelles règles de gouvernance
qui pourraient, si un accord se dessinait, se traduire par
une révision des traités.
Merci encore aux Présidents Gaudin et Martens, et très
bon séjour à Marseille à toutes et à tous.
Il va de soi qu’une décision unanime des 27 est
préférable a un accord entre les 17+ de la zone euro.
Il va de soi aussi qu’aucun État ne saurait empêcher
ceux qui veulent se donner les moyens d’une
gouvernance de le faire.
Il va de soi, enfin, que le Parlement et la Commission
ne peuvent être que pleinement partie prenante de toute
négociation d’un plan de sortie de crise, quel qu’il soit.
Cher(e)s Ami(e)s,
Nos débats à Marseille feront aussi une large part
aux relations de l’Europe avec son voisinage, et
spécialement avec le sud de l’Europe, puisque nous
sommes ici en pleine Méditerranée.
Notre Groupe est très actif sur ce plan aussi, et j’en
remercie au premier titre mon Vice-président Vito
Bonsignore, et tous les Collègues qui travaillent à ses
côtés.
Le Printemps arabe est une chance pour cette région,
comme la crise économique l’est pour l’Europe, à
condition que l’on soit capable d’y apporter les justes
réponses.
C’est à ces réponses que nous travaillerons encore
aujourd’hui.
Autre crise, autre défi, celui de la sécurité alimentaire
et de la lutte contre la volatilité des matières premières.
21
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
WILFRIED MARTENS,
Président du PPE
élections pleinement démocratiques, et d’autres sont
promises ailleurs. Quelles avancées incroyables pour
la liberté et les droits de l’homme ! En revanche, tant
la guerre civile libyenne que la constante répression
syrienne nous ont rappelé que le « Printemps arabe »
n’allait pas sans poser certaines difficultés.
Wilfried Martens, Président du PPE
C
her Joseph Daul,
Chers députés du Parlement européen,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Alors que nous vivons un moment décisif pour
l’avenir de l’Union européenne, il importe de garder
à l’esprit notre défi primordial en matière de politique
extérieure, apparu au début de cette année : le réveil
démocratique dans la région méditerranéenne. Et quel
lieu pourrait-il mieux se prêter à cet exercice que la
cité phocéenne ?
Tout a commencé en Tunisie, il y a exactement un
an par des revendications pour davantage de justice
sociale, de meilleures perspectives économiques et
la fin du régime autoritaire. La révolte tunisienne a
déclenché des mouvements démocratiques en Égypte,
en Libye, en Syrie, au Yémen, au Bahreïn et dans de
nombreux autres pays du Moyen-Orient et d’Afrique
du Nord. La Tunisie et l’Égypte ont organisé des
22
L’Europe doit jouer un rôle de premier plan dans tous
ces événements. Il est vrai que des gouvernements
européens ont commis de graves erreurs dans le passé,
se sont liés d’amitié avec des autocrates et ont fait
passer la société civile au second plan. Cela ne peut
signifier pour autant que nous nous désengageons
ou que nous apportons de l’aide sans faire des choix
fondés sur nos valeurs fondamentales comme les
droits de l’homme, la démocratie pluraliste et l’état
de droit. C’est justement le triomphe de ces valeurs
au cours du Printemps arabe qui devrait nous donner
confiance et nous imposer l’examen critique de nos
stratégies antérieures.
Tout d’abord, lorsque nous regardons vers le Sud,
ne cessons pas de regarder vers l’Est. Gardons-nous
d’oublier nos voisins orientaux. En dernière analyse,
ils relèvent de la même question stratégique. Il s’agit
de promouvoir les droits de l’homme, l’état de droit, la
démocratie multipartite et la bonne gouvernance dans
les pays proches de nous – sachant que l’absence de
ces facteurs entraîne automatiquement des dangers
pour l’Union elle-même, qu’ils prennent le nom
de réfugiés, de criminalité organisée, de perte de
marchés, de terrorisme et de risque de conflit militaire.
En ce sens, le soutien des démocrates et des structures
démocratiques doit être notre objectif dans l’ensemble
de notre voisinage.
Deuxièmement, nous devons accepter le verdict
des élections démocratiques organisées dans notre
voisinage méridional, en Tunisie aujourd’hui et en
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Égypte demain, et nous devons nous engager dans
un dialogue avec les nouvelles forces démocratiques
au pouvoir. Nous devons également porter un regard
nouveau sur la culture musulmane, si éloignée de
nos traditions. C’est la raison pour laquelle, il y a
deux ans, le PPE a lancé un dialogue interreligieux et
interculturel avec les musulmans, en premier lieu avec
le grand imam de l’Université El Azhar du Caire et
avec le roi Abdallah de Jordanie, et il continuera de
s’engager dans un tel dialogue.
Troisièmement, toute politique européenne vis-à-vis
du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord doit être
étroitement coordonnée avec les États-Unis. Tant du
point de vue gouvernemental que de celui des ONG
et de la société civile, l’Europe et l’Amérique ont
beaucoup à gagner d’une approche concertée.
Quatrièmement, l’Union européenne possède
désormais deux décennies d’expérience dans le
soutien au passage entre les régimes autoritaires et
les démocraties de marché. La politique européenne
de voisinage constituera un facteur de première
importance. Un consensus existe autour du fait que
la PEV est l’instrument qui convient pour gérer
les changements qu’entraîne le Printemps arabe.
Fait également consensus la question de la réforme
de la PEV, dans le sens d’un éclaircissement des
engagements en matière de conditionnalité, d’une
approche plus stratégique des relations commerciales
et d’un volet de la société civile renforcé.
Sixièmement, et enfin, une nouvelle approche
stratégique concernant nos voisins méridionaux
doit impliquer le renouvellement et l’amélioration
de notre politique de visa et d’immigration. Cette
question transcende la PEV et touche de très près au
domaine politique européen de la justice et des affaires
intérieures. Il n’en faut pas moins la résoudre : par des
efforts encourageant la migration circulaire et par une
approche libéralisée des visas destinés aux étudiants,
aux chercheurs et aux entrepreneurs. Par-dessus tout,
cela présuppose une politique commune de visa et
d’immigration de la part de l’Union européenne, sans
quoi les réalisations de Schengen seront en danger,
comme nous l’avons vu en Italie ce printemps.
Mesdames et Messieurs,
Je crois que nous nous retrouvons tous dans l’idée que
non seulement l’Europe a un intérêt fondamental aux
réveils démocratiques dans notre voisinage sud, mais
que nous devons aussi assumer un rôle important et
constructif à cet égard ! Je me réjouis de nos discussions
fructueuses et intéressantes.
Cinquièmement, le commerce sera un autre domaine
de la PEV dans lequel il y aura matière à amélioration :
admettons-le, il est assez facile d’affirmer que l’Union
doit à présent ouvrir ses marchés de l’agriculture et des
services – pour offrir les perspectives de croissance
nécessaires aux pays du Printemps arabe. Ces ouvertures
sont indispensables et, de surcroît, elles offrent des
perspectives de croissance dans l’Union elle-même.
En revanche, dès que l’on discutera concrètement de
la suppression des barrières commerciales, certains
groupes d’intérêt, des producteurs aux syndicats,
y verront forcément une menace sur leurs intérêts.
Ils réagiront. Il ne sera pas aisé de répliquer à ces
protestations, mais elles seront inévitables.
23
THÈME I:
L’UE ET L’ÉVEIL DÉMOCRATIQUE EN MÉDITERRANÉE:
ACCOMPAGNER LE PRINTEMPS ARABE EN
ACCROISSANT L’AIDE AUX JEUNES DÉMOCRATIES
EN GESTATION
24
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
YOUSSEF AMRANI,
Secrétaire général de l’UpM (L’Union pour la Méditerranée)
C
hers Présidents,
Cher Maire,
Chers députés du Parlement européen et des Parlements
nationaux,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi tout d’abord de remercier le Parti
populaire européen et son groupe parlementaire au
Parlement européen qui ont la gentillesse de m’inviter
à ce séminaire conjoint au cours duquel vous vous
proposez de discuter des « Orientations futures du
processus d’intégration euro-méditerranéen dans le
cadre de la politique européenne de voisinage et de
l’UpM ». En ma qualité de Secrétaire général de l’Union
pour la Méditerranée, je ne puis qu’exprimer mon
soutien le plus absolu à votre initiative, qui intervient
à un moment extrêmement opportun : les pays du sud
de la Méditerranée sont engagés dans un processus de
réforme et de transformation politiques qui nécessite
certaines mesures d’accompagnement importantes
tandis que les pays du nord de la Méditerranée souffrent
de la crise la plus dévastatrice à laquelle nous avons
assisté au cours des 70 dernières années.
Je me réjouis sans réserve de la possibilité que nous
donne le Parti populaire européen, de loin la plus
grande force politique en Europe, en invitant l’Union
pour la Méditerranée à discuter de l’avenir de la
politique européenne de voisinage et à partager avec
vous notre vision de l’avenir de la région.
Avant d’entrer plus spécifiquement dans le sujet,
permettez-moi de partager quelques pensées sur les
évolutions électorales les plus récentes. Au lendemain
des victoires électorales de partis confessionnels
islamiques modérés lors des élections tunisienne
et marocaine, je crois fermement qu’il est à présent
plus nécessaire que jamais que les forces politiques
européennes en Europe – et qui d’autre que vous
Youssef Amrani,
Secrétaire général de l’UpM (L’Union pour la Méditerranée)
le ferait avec plus de légitimité – s’engagent dans
un dialogue et dans des discussions avec ces partis.
Ces partis marient des éléments de la politique
confessionnelle comme de la défense de l’économie
de marché, éléments qui ne sont pas bien éloignés des
positions défendues par certains de vos membres si
l’on se reporte quelques décennies dans le passé. Par
conséquent, à l’image de l’ouverture dont vous aviez
fait preuve en 2005 à l’égard du parti turc AK, je vous
encourage à utiliser les outils mis en place par la
Commission européenne et le Parlement européen
pour coopérer et conseiller ces partis politiques qui
sont désormais au pouvoir.
Nouveaux scénarios dans la région
Depuis les sommets de Paris et de Marseille en 2008,
le paysage économique, politique et social de la
région a complètement changé. Le Printemps arabe
transforme rapidement les sociétés dans le Sud et la
25
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
crise économique affecte profondément le nord de la
Méditerranée. Ces deux processus produisent d’ores
et déjà des incidences majeures sur la situation que
connaîtra la région dans les prochaines années.
La Méditerranée est aujourd’hui au centre du débat
international. Les changements auxquels nous
assistons en Tunisie, en Égypte, en Libye et les
réformes menées dans d’autres pays comme le Maroc
montrent que le monde arabe entre dans une nouvelle
ère, après des années de régimes non démocratiques et
de sous-développement économique.
Avec les protestations en Tunisie et sur la place Tahrir,
des milliers de jeunes gens ont démontré qu’ils étaient
totalement favorables au changement, à la démocratie
et à l’emploi. La jeunesse arabe, unanime, a lancé
un appel au monde. Les marchés du travail arabes
sont devenus spécialement défavorables aux jeunes
travailleurs. Non seulement la génération la plus
nombreuse jamais née dans le monde arabe se trouve
désormais en âge de travailler, mais la baisse récente
des taux de natalité est également liée à deux autres
tendances qui font pression sur le marché du travail :
l’évolution du rôle des femmes et le développement
rapide de l’enseignement formel.
Plusieurs enquêtes du PNUD montrent que 45 %
des jeunes Égyptiens envisagent l’émigration.
L’augmentation de la proportion des Tunisiens qui
ont envisagé d’émigrer est peut-être encore plus
révélatrice, puisqu’elle est passée de 22 % en 1996
à 45 % en 2000, pour ensuite bondir à 76 % en
2005. Ce chiffre en dit beaucoup sur l’ampleur du
mécontentement.
Dans un monde globalisé où l’accès aux technologies
de l’information et de la communication est répandu
(30 % d’entre eux utilisent Internet – on les appelle la
« Youth Power Generation »), les raisons qui poussent
les jeunes à émigrer vers l’Europe ou les pays du Golfe
sont impérieuses. Ce n’est pas dans l’intérêt des pays
développés et, surtout, ce n’est pas dans l’intérêt des
pays d’émigration, puisqu’ils risquent de perdre une
force de travail physique et intellectuelle considérable
(une fuite de cerveaux, par exemple).
26
Vingt millions de ressortissants des États arabes vivent
actuellement hors de leurs pays d’origine. L’Égypte,
la Jordanie, le Liban, le Maroc, la Palestine, la Syrie
et la Tunisie comptent parmi les principaux pays
d’émigration ; entre 5 et 20 % de leurs ressortissants
vivent aujourd’hui à l’étranger. Au Maroc et en
Tunisie, notamment, cette proportion a doublé depuis
1995 et une culture de l’émigration s’est développée
dans l’ensemble de la région.
Aussi, ma première conclusion est que la création
d’emplois doit devenir la première priorité réelle
de toutes les initiatives dans la région, dans la
mesure où l’emploi est une source de stabilité et de
croissance. Un problème particulier est apparu avec
la génération de citoyens la plus nombreuse, celle née
dans les années 1980. Cette génération a atteint l’âge
de travailler et a entraîné un basculement : les jeunes
adultes, entre 25 et 35 ans, sont aujourd’hui perçus
comme la tranche d’âge la plus problématique. Leur
croissance a excédé les ressources disponibles, qu’il
s’agisse des emplois, qui leur donnent un revenu et un
statut, ou de la liberté et de la participation.
L’Union européenne et la région méditerranéenne
Nous devons admettre que les changements en
cours sur la rive sud n’affecteront pas uniquement
les perspectives politiques des pays concernés, ils
influenceront aussi de nombreux aspects des relations
économiques, sociales et politiques dans la zone euroméditerranéenne.
Ces changements auront un impact direct en premier
lieu sur les relations économiques entre les deux
rives de la Méditerranée. Ils toucheront les relations
bilatérales et multilatérales entre les divers pays. Ils
transformeront complètement la façon dont l’Europe
perçoit la région et notamment sa politique de voisinage.
Ils auront une incidence sur les conflits stagnants de la
région, en particulier le processus de paix du MoyenOrient. Enfin, ils changeront les conceptions que l’on
peut avoir de la coopération euro-méditerranéenne.
En tant que Secrétaire général de l’UpM, je voudrais
me concentrer tout particulièrement sur ce dernier
aspect du Printemps arabe. Ce nouveau contexte
offre une possibilité de renforcer la coopération
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
euro-méditerranéenne. Si ce processus peut s’avérer
capable de trouver sa place dans les changements et
les réformes en cours, nous avons la possibilité unique
de renforcer l’UpM et le processus dans son ensemble.
coopération et d’intégration économique. Il faut que
ces pays sentent que l’Europe a quelque chose à leur
offrir. Le statut avancé d’association entre l’UE et le
Maroc en est un exemple parlant.
Que faut-il alors changer et comment l’Union
pour la Méditerranée peut-elle renforcer ce
processus?
La politique européenne de voisinage, dans ses
dimensions à la fois bilatérale, mais aussi régionale,
fournit un appui efficace vis-à-vis des pays voisins
de l’Est et du Sud. Dans le cadre des perspectives
financières pour la période 2014-2020, qui sont
actuellement discutées, je suis favorable au
renforcement de la dimension régionale de la
politique de voisinage afin que cette dimension soit
mieux prise en considération dans les instruments
politiques globaux.
Depuis que j’ai repris les fonctions de Secrétaire
général de l’UpM, il y a de cela quatre mois, j’ai eu
la chance de rencontrer un certain nombre de hauts
responsables – dont beaucoup appartiennent à votre
famille politique (22 ministres des Affaires étrangères
des 43 pays membres de l’UpM, 4 Premiers ministres
et d’autres représentants des institutions de l’Union
européenne). Tous sont d’accord sur les points
suivants :
1) souligner le rôle nécessaire que doit assumer
l’UpM dans la région ;
2) souligner l’approche prémonitoire de l’UpM,
qui fait d’elle une plate-forme politique unique et
un instrument régional utile, notamment dans le
contexte de changement actuel ;
3) reconnaître la forte demande des pays du Sud
en ce qui concerne des projets et des initiatives
concrètes.
L’Union européenne a elle aussi des intérêts non
négligeables en Méditerranée en ce moment précis de
la crise économique. La Méditerranée offre à l’Europe
l’occasion d’agrandir sa zone d’influence économique
et d’élargir ses marchés. N’oublions pas que nous
parlons d’une région (UE + pays MEDA du Sud) de
quelque 800 millions de consommateurs, une région
qui, si elle était économiquement intégrée, pourrait
devenir la plus grande et l’une des plus dynamiques du
monde, capable de concurrencer les marchés émergents
et de développer davantage de complémentarités.
L’Europe ne peut pas rater cette occasion historique.
Au cours des 15 dernières années, l’UE a été capable de
donner aux pays de l’Est la perspective de l’adhésion.
Ces pays y ont puisé l’énergie pour se réformer et
évoluer vers la démocratie. L’Europe ne peut offrir
cette adhésion aux pays du sud de la Méditerranée,
mais elle peut leur donner une perspective de
Il serait notamment judicieux d’élargir le Fonds
régional de l’IEVP, qui représente environ 10 % de
l’enveloppe totale, afin de répondre avec précision
aux besoins actuels de la région. Si nous croyons dans
le futur de la région dans son ensemble et que nous
voulons qu’elle relève ses défis socio-économiques,
nous nous devons de renforcer la dimension régionale
de la politique européenne de voisinage. L’Union pour
la Méditerranée est le catalyseur le plus efficace pour
atteindre ces objectifs. La question que je vous pose
est donc celle-ci : pourquoi ne pas confier à l’UpM
la mise en œuvre du Fonds régional de l’instrument
européen de voisinage et de partenariat pour
concrétiser des projets soutenus par l’UpM ? Tel
était le deuxième grand message que je tenais à vous
communiquer aujourd’hui.
Le rôle de l’UpM
Le temps est à l’action, et le moment est aussi
venu de renforcer le cadre de coopération euroméditerranéen. Nous ne réussirons à relever les
défis de la région que si l’Europe et la Méditerranée
s’entraident. Dans ce contexte, l’UpM est le cadre
qui convient pour une nouvelle coopération politique
et économique, elle est le pont qui peut conduire à
la démocratie et à la croissance économique, tout
en connectant parallèlement les intérêts privés
légitimes avec les intérêts publics.
Votre famille politique est une partisane convaincue
de l’importance du secteur privé dans la société.
27
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Certaines firmes et banques commerciales européennes
coopèrent déjà dans le cadre de projets et d’initiatives
lancés par le secrétariat de l’UpM. Au vu des capacités
limitées des finances publiques, elles devront jouer
à l’avenir un rôle de premier plan dans le futur de
la rive sud. N’oublions pas que la région ne sera
capable de relever le défi de la création d’emplois
qu’à condition de bénéficier du plein engagement
du secteur privé, non seulement en veillant à
l’environnement commercial dans ces pays pour que
l’investissement étranger direct puisse y prospérer,
mais aussi en apportant une meilleure réponse aux
besoins de financement des petites et moyennes
entreprises, grandes créatrices d’emploi dans la région.
L’UpM ne peut vivre en ignorant les récents
événements. Nous adaptons notre fonctionnement
et nos objectifs à ces nouveaux processus afin de
réussir. L’UpM doit fournir un appui non seulement
pour développer le dialogue politique et économique,
mais aussi pour accompagner et soutenir les
nouvelles transitions. Aujourd’hui, les bénéfices de
l’action de l’UpM sont bien réels. Elle est impliquée
dans de nombreux processus comme le partenariat de
Deauville, les groupes de travail de l’Union européenne
pour la Tunisie, l’Égypte, le Maroc et la Jordanie, et
nous sommes prêts à accompagner le processus de
construction socio-économique des pays du sud de la
Méditerranée.
Nous concentrons notre travail sur le développement de
nouveaux projets en coopération avec les institutions
européennes, les secteurs privés et bancaires d’Europe,
d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Notre objectif
consiste à donner un coup de fouet à la coopération
EuroMed grâce au lancement de projets concrets
dans les domaines de l’énergie, des transports, des
PME, de la société civile, de l’enseignement et de
l’environnement. Nos conseils d’administration ont
d’ores et déjà approuvé certains de ces projets. À
cet égard, notre équipe au sein du secrétariat est déjà
opérationnelle et concentre ses efforts sur les pays qui
connaissent des difficultés économiques.
Par conséquent, durant le prochain semestre, l’UpM,
de conserve avec la Commission européenne, la BEI
et le groupe de la Banque mondiale, lancera une
série de nouveaux instruments qui contribueront à
28
attirer des investissements importants et atténuer
différents types de risques associés aux grands
projets dans les domaines de l’énergie, des transports,
du développement urbain, de l’environnement et
de l’eau. Le secrétariat se consacre par ailleurs à la
création d’un important système de contregarantie
destiné aux micro-, petites et moyennes entreprises
afin de faciliter l’accès au financement dans la région
tout en multipliant les possibilités d’emploi. Enfin, le
secrétariat lancera très prochainement une initiative
méditerranéenne globale pour l’emploi avec la
Fondation européenne pour la formation qui aura
pour objectif de créer une partie de ces 20 millions
de nouveaux emplois dont les pays du sud de la
Méditerranée ont besoin d’ici à 2020.
Mesdames et Messieurs, je ne doute pas un instant
qu’à travers le partenariat, à travers la coopération,
que ce soit au niveau du Parlement européen ou de
l’Assemblée parlementaire de l’UpM, au sein desquels
vous vous montrez extrêmement déterminés et actifs,
nous serons capables d’assurer un avenir plus prospère
dans la région. Vous connaissez certainement ce
proverbe qui dit « si tu veux aller vite, vas-y seul, mais
si tu veux aller loin, alors il faut y aller ensemble ». Je
vous engage à prendre une part encore plus active dans
ce processus.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
FRANCO FRATTINI,
ancien Ministre des Affaires étrangères d’Italie
L
a Méditerranée n’est pas seulement une mer qui
unit des continents et représente un pont entre des
cultures, des religions et des civilisations historiques.
À l’ère de la mondialisation, la Méditerranée est
une vaste région, dont la stabilité, la prospérité,
la sécurité doivent être considérées comme une
priorité absolue par la communauté internationale
dans son ensemble.
Les derniers événements du « Printemps arabe »,
les graves problèmes auxquels les populations sont
toujours confrontées dans certains pays de la région,
le conflit non résolu entre Israéliens et Palestiniens,
les conséquences très lourdes qu’a, dans de multiples
domaines, la prolifération nucléaire iranienne : tous
ces facteurs sont déterminants non seulement pour
la Méditerranée, mais aussi pour un monde plus
sûr et plus prospère dans un avenir proche.
L’Europe, et notre famille politique, le PPE et les
partis nationaux affiliés, ont une responsabilité
particulière.
En effet, ces dernières décennies, les pays d’Europe, et
les pays occidentaux en général, ont accepté, et parfois
encouragé ou contribué à renforcer, des partenariats
de complaisance avec un grand nombre de régimes
dictatoriaux. Nous pensions tous, autrefois, qu’il était
dans notre intérêt de privilégier des domaines comme
la stratégie de lutte contre le terrorisme ou les politiques
globales en matière d’immigration clandestine. En d’autres
termes, nous mettions d’abord l’accent sur la stabilité et la
sécurité, aux dépens d’une prospérité partagée pour toutes
les populations résidant dans ces pays ; mais surtout,
nous n’avons pas accordé suffisamment d’importance au
rôle joué dans ces sociétés, des décennies durant, par les
violations continues et massives des droits de l’homme
et des libertés fondamentales. Tous, nous avons commis
une grave erreur.
Franco Frattini,
ancien Ministre des Affaires étrangères d’Italie
Premièrement, parce qu’en coopérant avec des
dictateurs, nous avons ébranlé la crédibilité des
Européens et de l’Occident aux yeux de millions de
jeunes et de classes sociales tout entières dans les
pays arabes.
- Le Printemps arabe nous a brutalement réveillés.
- Ces manifestants qui sont descendus dans les rues
en grand nombre demandaient de la dignité, des
droits humains, du pain et des emplois pour tous.
- Un certain nombre de régimes sont tombés.
- Immédiatement pour certains, tandis qu’en Libye,
une mission internationale a dû être envoyée pour
protéger la population, conduisant à la chute du
régime Kadhafi.
En Syrie, un régime discrédité, frappé par des sanctions
internationales, devrait se retirer dès que possible,
29
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
même l’intervention d’une force internationale doit
être évitée.
souvent instruites, une diffusion de l’idée qu’aucun
des principaux objectifs n’est réalisable.
Mais à présent, comment l’Europe et comment
notre parti peuvent-ils rétablir leur légitimité
dans ces régions clés, en remplaçant les anciens
partenariats de complaisance par de nouvelles formes
de partenariats équitables basés sur des droits, le
développement, l’entente mutuelle ?
Cette issue ouvrirait la porte à l’endoctrinement et
à l’incitation par des groupes extrémistes, qui n’ont
aucun intérêt à coopérer avec les pays occidentaux
et ont plutôt tendance à diffuser des idées hostiles et
discriminatoires.
Comment encourager nos amis de la région à éviter
toute forme d’approche extrémiste, tenus que nous
sommes de respecter les résultats des élections libres ?
À cet égard, l’Égypte aura une valeur de test pour
l’ensemble de la région.
Conformément à la Charte européenne et à la
charte du PPE sur les valeurs fondamentales,
nous ne pouvons nous concentrer exclusivement
sur la promotion de la croissance économique
dans la région du sud de la Méditerranée. Nous
devons investir dans ces jeunes générations qui
revendiquent des opportunités culturelles et des
perspectives d’emploi, ainsi que le respect absolu des
droits fondamentaux de tous les êtres humains.
Premièrement, nous devons investir dans les
échanges culturels ; créons des réseaux entre les
universités du Nord et du Sud, et lançons un vaste
projet Erasmus pour les étudiants de la Méditerranée,
tout en assouplissant ces régimes de visa trop
stricts, souvent considérés comme un obstacle à
la circulation générale des idées et des expériences
culturelles.
- Nous devons investir dans la recherche et
l’innovation.
- Nous devons mettre en œuvre un plan
économique général pour venir en aide aux
économies qui risquent de s’effondrer, réduisant
ainsi le risque important d’une hausse du chômage.
- Le pire des scénarios dans ces révolutions
arabes serait l’apparition d’un sentiment de
frustration au sein de ces sociétés jeunes, et
30
Par conséquent, si nous ne parvenons pas à nouer
le dialogue avec ces sociétés, si nous les laissons se
débrouiller seules dans ces transitions difficiles et
ces situations économiques qui se détériorent, le prix
à payer par nous, l’Europe, et l’Occident, sera
bientôt nettement plus lourd.
Lorsque les gens sont désespérés et affamés, ils
émigrent massivement, indépendamment des
risques qu’ils encourent pour leur vie. Lorsque les
jeunes et les étudiants se heurtent à un mur dans
leur désir d’échanger librement des idées avec leurs
collègues des réseaux d’enseignement européen, ils
ont toutes les chances d’évoluer dans la conviction
qu’un choc des civilisations est le seul moyen de
faire face à ce qu’ils commencent à considérer
comme la « forteresse Europe ».
Dans la promotion de cette stratégie ouverte, nous,
au sein de la famille du PPE, ne faisons que suivre
nos principes. Mais certains de ces principes sont
fondamentaux, basés sur des valeurs et des droits qui
ne sont pas négociables. La vie humaine et la dignité ;
l’égalité entre les hommes et les femmes dans tous les
domaines ; le droit de professer librement sa religion,
pour n’en citer que quelques-uns.
Sur ces points, je pense que le PPE a une
responsabilité particulière : il nous faut maintenir
et renforcer notre identité commune, dont
l’ensemble des principes qui font partie de nos valeurs
chrétiennes.
Nous ne voulons pas imposer notre modèle de
démocratie, ni notre système de droits fondamentaux.
La démocratie ne peut s’exporter : elle doit se
développer au sein d’un peuple et d’une société.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
L’instauration d’un dialogue ouvert et d’une entente
mutuelle entre des cultures et des civilisations
différentes ne doit cependant pas nous amener à
renoncer au fondement de notre propre société dans
un simple souci de complaisance à l’égard de nos
interlocuteurs.
Par conséquent, s’agissant de la liberté de religion,
par exemple, nous ne pouvons rester silencieux
face aux graves discriminations dont sont victimes
les minorités chrétiennes de beaucoup de pays,
des discriminations qui passent par de la violence
physique et des assassinats, ou par l’interdiction légale
de professer le christianisme.
En l’occurrence, la question de la prise en considération
des règles de réciprocité doit être abordée, s’agissant
d’un élément nécessaire pour un partenariat et un
dialogue égaux, dans lequel on ne peut cependant
accepter les déséquilibres et les distorsions des
autres parties.
Pour conclure, l’UE, avec la contribution du PPE,
si elle veut être un acteur efficace et respecté dans
la Méditerranée doit être visionnaire, s’exprimer
et agir, sur le plan politique et non sur le plan
bureaucratique, d’une seule voix, et trouver un juste
milieu entre l’acceptation des raisons et des arguments
d’autrui et la fermeté en ce qui concerne le respect des
fondements de notre construction européenne.
Plus d’Europe, et pas moins d’Europe, pour investir
dans l’avenir de la région méditerranéenne, jetant
aujourd’hui les bases des objectifs à atteindre à court,
moyen et long terme.
L’un des pères fondateurs de l’Europe, Alcide De
Gasperi, a dit un jour : « Le politicien s’intéresse aux
élections suivantes ; l’homme d’État s’intéresse à la
génération suivante ».
Faisons en sorte que l’Europe montre la voie à
suivre dans cet esprit.
Faisons en sorte que notre parti joue le rôle qui lui
revient.
31
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
TOKIA SAÏFI, MdPE,
Présidente de la commission politique de l’AP-UpM
Nous avons le devoir de respecter le résultat des urnes.
Ce printemps arabe est un immense espoir, mais c’est
également un immense défi pour eux mais aussi pour
nous.
Je me concentrerai sur deux défis.
1. Premièrement, le défi politique,
Tokia Saïfi, MdPE,
Présidente de la commission politique de l’AP-UpM
M
essieurs les Présidents,
Chers amis,
Voilà un an déjà que les événements au Sud de la
Méditerranée ont commencé.
Dans les jours qui viennent, les bilans vont être tirés.
Mais dresser des constats est une chose, passer à
l’action en est une autre.
Les réalités politiques du Printemps arabe deviennent
perceptibles.
Les premières élections libres ont montré la volonté de
changement des populations.
Ces peuples ont décidé de faire confiance aux partis
qui se sont toujours opposés aux anciens régimes.
Les résultats des élections en Tunisie, au Maroc et
celles en cours en Egypte conduisent à l’arrivée au
pouvoir des partis politico-religieux.
32
L’Europe de part son expérience des transitions
démocratiques à un rôle majeur à jouer.
Il nous faut aider à la réussite de ces transitions.
Le partage de notre expertise en matière de droit
constitutionnel, de système électoral, de liberté
publique, la liberté de la presse en particulier, peut
renforcer les liens de confiances entre partenaires.
Garantir le respect des droits fondamentaux doit être le
fil conducteur de nos politiques.
Je pense que nous devons échanger, confronter nos
idées avec tous ceux qui respectent les règles du jeu
démocratique, le respect des droits de l’homme et le
refus de toute violence.
Y compris donc avec les représentants des différents
courants politico-religieux.
Alors oui bien sûr nous avons nos lignes rouges et
les respecterons de toutes nos forces, mais l’histoire
nous enseigne que l’absence de dialogue, l’isolement
n’apporte pas toujours ce que nous souhaitons.
En tant que Présidente de la Commission politique et
de sécurité de l’Assemblée parlementaire de l’Union
pour la Méditerranée, j’accueillerai prochainement les
parlementaires nouvellement élus.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Vous pouvez compter sur mes convictions et ma
détermination pour affirmer et défendre les valeurs en
lesquelles nous croyons tous.
Notre parti dispose, en raison de son histoire et de sa
composition, des outils pour soutenir les partis qui
partagent nos idéaux.
2. Deuxièmement le défi sécuritaire.
A l’heure où des changements historiques se déroulent
à nos portes, il est de notre devoir et de notre
responsabilité de repenser nos relations avec nos
voisins les plus proches.
-
La répression en Syrie nous préoccupe et les
prochaines semaines risquent encore d’être meurtrières
mais je ne vais pas m’étendre sur ce sujet.
-
La chute de Kadhafi a des conséquences
potentiellement déstabilisatrices pour une partie du
continent africain et il convient d’en prendre toute la
mesure.
Le retour forcé de centaines de milliers de travailleurs
émigrés pose un redoutable problème économique aux
pays sahéliens, qui vont notamment devoir faire face à
l’arrêt des transferts de fonds.
Au Mali, en Mauritanie et au Niger, les Touaregs
pourraient prendre exemple sur les rebelles libyens
pour réclamer leur autonomie et partir en guerre contre
le pouvoir central.
Des répliques africaines aux séismes arabes ne sont
donc pas à exclure et l’Union européenne se doit de
les anticiper.
Messieurs les Présidents,
Chers amis,
Face à tous ces événements et changements :
Notre parti doit amplifier et renforcer son aide aux
mouvements politiques qui partagent nos valeurs et
nos idéaux afin qu’ils puissent s’organiser et faire
entendre leurs messages.
Il faut continuer à développer une stratégie de soutien
à leur égard.
Le développement d’un réseau fort, global, au Sud
de la Méditerranée permettra, je pense, de relever
ensemble les défis de cette région.
33
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
ARNAUD DANJEAN, MdPE
Président de la sous-commission sécurité et défense du PE
Arnaud Danjean, MdPE
Président de la sous-commission sécurité et défense du PE
C
hers collègues,
Le Parlement Européen et notre groupe politique
avons accueilli avec enthousiasme le printemps arabe,
cet événement géopolitique majeur aussi important
sans doute que la chute du Mur de Berlin il y a deux
décennies. Il faut reconnaitre que cet enthousiasme
était d’autant plus fort que nous avons tous été surpris
par ce mouvement imprévu, spontané, son ampleur et
sa nature authentiquement démocratique.
Pour autant, près d’un an après le déclenchement de
ces révolutions, il convient de faire preuve de lucidité
et de ne pas céder à une certaine naïveté. Attention en
effet à la naïveté quant à l’évolution de ce processus
de démocratisation, qui sera long, très long, et rempli
d’aléas. Les résultats des élections en Égypte, avec
notamment la percée d’un parti ouvertement salafiste,
illustrent combien nous devons rester vigilants - même
s’il faut bien insister sur le fait que la vigilance ne veut
pas dire la suspicion.
34
Naïveté à éviter également quant au rôle que peut
et doit jouer l’Union européenne. La générosité
naturellement affichée a l’égard d’une région avec
laquelle notre destin est historiquement lié depuis
des millénaires ne doit pas nous conduire à mener
des politiques qui s’avèreraient contre-productives ou
inadaptées. Je dois ainsi admettre que les fameux trois
«m» (mobility, market, money) qui sont évoqués à
Bruxelles comme devant être les piliers de notre action,
sont des principes louables mais devant être appliqués
avec finesse, en tenant bien compte de la situation dans
laquelle se trouvent nos pays eux-mêmes. Gardonsnous de promettre des avancées que nous ne pourrons
pas concrétiser, ou que nos pays ne seraient pas en
mesure d’assumer. L’Europe doit également travailler
en partenariat avec tous les pays qui ont également un
intérêt à soutenir la démocratisation de la rive sud de la
Méditerranée- comme cela est fait au sein du G20, de
l’initiative dite de Deauville ou encore du forum pour
l’avenir lancé à Koweït en septembre.
L’approche européenne vis-à-vis des pays en transition
doit concilier trois qualités:
- le volontarisme politique : ne laissons pas, comme
cela est malheureusement trop souvent le cas, la routine
bureaucratique gérer ces processus prometteurs !
J’ai parlé au début de mon propos de l’enthousiasme
soulevé par ces mouvements. Notre curiosité et notre
engagement doivent continuer à s’exercer sur la durée,
en dépit des aléas. Notre disponibilité à accompagner
ces transitions aléatoires doit pouvoir s’afficher
et s’exprimer avec constance, au plus haut niveau
d’engagement politique.
- la responsabilité; qui consiste à ne pas reproduire
les erreurs commises trop longtemps a l’égard des
précédents régimes. Nous devons tenir un langage
de vérité et clairement intégrer une conditionnalité
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
à notre engagement. Tout en rappelant que vigilance
n’est pas suspicion, l’appui européen ne saurait
exister sans le respect des valeurs fondamentales de
liberté d’expression et du respect des droits: droits
des minorités religieuses, droits des hommes et des
femmes. Il nous faut aussi rappeler aux démocraties
naissantes que la stabilité régionale et le droit à
l’existence et à la sécurité d’Israël sont, pour l’Europe,
des exigences essentielles. - le créativité: comme l’a
rappelé avec beaucoup de force le secrétaire général
de l’Union pour la Méditerranée, l’aide de l’Union
européenne se doit d’être innovante, et pas prisonnière
de dispositifs exclusivement centrés sur les relations
avec les structures d’État. Cela suppose de se focaliser
sur des projets très concrets, mais aussi sur la société
civile, et en particulier la jeunesse, qui a été a l’origine
de ce formidable mouvement de démocratisation.
L’aide européenne sera d’autant plus efficace qu’elle
parviendra à toucher cette jeunesse (40% de la
population des pays arabes du sud de la Méditerranée
ont moins de 30 ans), à l’ancrer dans une dynamique
de formation, d’emploi et de participation à la vie
publique. La dimension régionale constitue également
un axe prioritaire, car s’il est vrai que les relations
avec l’Union européenne offrent des perspectives
de croissance importantes, un fort potentiel encore
inexploité existe dans le commerce et le développement
des infrastructures au niveau régional.
Les défis sont immenses, et l’intérêt européen à
accompagner cette transition inédite est à la mesure en
réalité de la profondeur des liens et de la communauté
de destin qui existent historiquement entre les deux
rives de la Méditerranée. Les instruments que l’Union
européenne peut mobiliser sont importants, ils doivent
l’être rapidement, efficacement, toujours sous un
pilotage politique attentif, qui doit prendre pleinement
en considération les spécificités de chacun des pays
et de leur cheminement démocratique, mais sans
jamais abdiquer l’attachement aux valeurs de liberté
et de paix, sur lesquelles s’est bâti le projet européen
et qui doivent continuer d’inspirer l’émancipation
démocratiques des nations arabes.
35
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
ELMAR BROK, MdPE
Co-coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission des affaires
étrangères du PE
Elmar Brok, MdPE
Co-coordinateur du Groupe PPE au sein de la commission des
affaires étrangères du PE
U
n poème, c’est ainsi que Tahar Ben Jelloun,
d’origine marocaine, qualifie le soulèvement
dans le monde arabe. Cette dénomination semble
quelque peu poétique, mais c’est la manière dont cet
écrivain veut attirer l’attention sur les sentiments de
la population. Le soulèvement est « un poème », écritil dans son livre L’étincelle, puisé au plus profond du
poète, dicté par la vie, qui se révolte et espère des jours
meilleurs. Toutefois, pour le Marocain, le Printemps
arabe est avant tout une révolte spontanée de personnes
en colère, une réaction du corps, une expression de
l’intolérable.
Tahar Ben Jelloun sait de quoi il parle. Dans les
années 1960, il faisait lui-même partie de la jeunesse
protestataire. En 1966, il a été emprisonné dans un
camp militaire pendant près de deux ans pour avoir
pris part aux manifestations d’étudiants contre la
tyrannie de la police marocaine.
36
Depuis lors, le Printemps arabe s’est transformé en
Automne arabe. Les bouleversements sont toujours en
cours, avec pour exemple la Libye et la mort de Kadhafi.
On pense également au Yémen et à la poursuite des
protestations malgré le retrait du président Saleh. On
pense également à l’Égypte, où le conseil militaire a
chargé l’ancien Premier ministre Ganzouri de former
un nouveau gouvernement. Les élections législatives
du mois de janvier seront décisives pour la suite. En
Égypte, justement, il convient d’examiner la situation
de près et d’un œil critique. Les évènements récents,
en particulier la répression des manifestants par les
militaires, posent de nouveaux problèmes et dangers.
Le fait que les salafistes radicaux, qui voudraient créer
un État fondé sur la charia, aient reçu 100 millions
d’euros d’aide pour leur campagne électorale de la
part de l’Arabie saoudite, est également interpelant.
Le Printemps arabe risque d’être confisqué si les
forces fondamentalistes égyptiennes bénéficient d’un
nouvel élan. Il ne faut toutefois pas mettre toutes les
associations religieuses dans le même sac. Il importe,
par exemple, de faire la distinction entre les Frères
musulmans et les salafistes et d’examiner s’il est
envisageable de collaborer avec les premiers, le cas
échéant. En tant que représentants de l’UE, nous
devons avant tout veiller à ce que la liberté de religion
soit respectée lors de l’élaboration de la nouvelle
constitution. Les chrétiens doivent être protégés contre
les persécutions. La situation des coptes ne doit pas se
détériorer; il faut, au contraire, qu’elle s’améliore.
Dans certains pays, la situation s’est en revanche
quelque peu consolidée. En effet, les élections en
Tunisie se sont déroulées librement : l’UE y était
présente avec une mission d’observation électorale.
L’assemblée constituante a tenu sa première réunion la
semaine dernière en vue d’élaborer une constitution. Il
faut suivre l’évolution de la situation sous Ghannouchi,
le président d’Ennahda, car les Tunisiens libéraux
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
ont craint que la victoire des islamistes n’entraîne un
bouleversement à leurs yeux dramatique pour le pays,
pouvant aller jusqu’au port du voile obligatoire et à
l’interdiction de l’alcool. Jusqu’à présent, on ne note
toutefois aucun signe concret de restrictions menaçant
les libertés individuelles et les droits des citoyens. Il
faut malgré tout rester vigilant !
Tous ces pays se trouvent encore en plein
bouleversement, ce qui a une influence sur l’ensemble
de la région. La situation est particulièrement
critique en Syrie. Le bain de sang perpétré sous
Assad nécessite une réponse européenne ferme. En
Iran, il se trame également quelque chose. L’UE
a une responsabilité considérable à l’égard de ces
pays. Nous devons aider ces personnes courageuses
et engagées dans leur lutte « contre l’intolérable » !
Nous devons les soutenir. D’une part, notre soutien
doit être moral, et la remise du prix Sakharov (prix du
Parlement européen en faveur des droits de l’homme)
aux activistes du Printemps arabe, qui s’est déroulée
le 14 décembre à Strasbourg, a constitué un signal
fort en ce sens. Asmaa Mahfouz (Égypte), Ahmed alZubair Ahmed al-Sanusi (Libye), Razan Zeitouneh
et Ali Farzat (Syrie) et, à titre posthume, Mohamed
Bouazizi (Tunisie), sont les représentants de toutes
ces personnes courageuses, qui, dans un esprit de
démocratie, de liberté, d’autodétermination, de dignité
et de respect des droits de l’homme, se battent au péril
de leur vie. L’UE, le peuple européen vous soutient !
Vous n’êtes pas seuls ! C’est le message véhiculé par
la remise du prix Sakharov !
nous partageons des valeurs et des intérêts communs.
Si nous ne parvenons toutefois pas à stabiliser ces pays,
le risque est immense, car les organisations terroristes
peuvent se développer dans des pays instables, de
même que la criminalité organisée et les migrations
vers l’Europe. Il ne s’agit pas de nous isoler, mais
nous avons besoin d’une immigration contrôlée, et non
d’un afflux de gens pauvres qui risquent leur vie pour
venir en Europe dans l’espoir d’y trouver un eldorado.
Dans l’intérêt de ces personnes et dans le nôtre, nous
devrions leur donner des perspectives au niveau local.
L’Europe ne peut pas se permettre de laisser sombrer
dans le chaos des pays tels que l’Égypte, le Yémen,
Bahreïn, la Libye ou la Tunisie. En effet, notre propre
sécurité et notre bien-être en Europe s’en trouveraient
menacés.
Pour que le Printemps arabe soit un 1989 et non
un 1979 (révolution iranienne), l’UE doit soutenir
activement les progrès en Afrique du Nord. Chaque
pays est différent, et les changements se déroulent
différemment, comme nous le constatons en Libye
ou en Égypte. D’une manière générale, on peut
toutefois dire que l’Europe a quelque chose à offrir,
car nous avons de l’expérience en ce qui concerne la
transformation de sociétés autocratiques en sociétés
démocratiques fondées sur l’économie de marché !
La Pologne, la Hongrie, la République tchèque et
la Slovaquie ont toutes franchi ce pas au cours des
20 dernières années !
En revanche, nous devons également offrir une aide
financière et technique pour la transformation de ces
pays, car la parole et les actes ne suffisent pas. Nous
devons en effet prendre conscience que notre propre
sécurité et notre propre bien-être en Europe dépendront
très fortement de notre réussite dans la mise en place
d’une stratégie crédible et cohérente en Afrique du
Nord grâce à tous les moyens dont nous disposons,
comme l’instrument en faveur de la démocratie et des
droits de l’homme.
Les conditions sont-elles toutefois comparables ?
En Europe de l’Est, il existait une société civile viable
(églises, partis, associations). En Afrique du Nord, la
situation n’est pas aussi claire. En effet, en Égypte, les
Frères musulmans étaient le seul groupe d’opposition
viable, que la plupart des Occidentaux considéraient
comme l’ennemi de l’Occident. Est-il possible de
collaborer avec eux ? Question délicate… La même
question se pose pour la Tunisie et la Libye. Qui sont
les partenaires de l’Occident pour la démocratisation ?
Il s’agit des problèmes auxquels nous sommes
confrontés aujourd’hui ! Et il nous faut réagir !
Ainsi, le Printemps arabe nous offre des chances : la
chance d’avoir un voisinage sûr et stable avec lequel
L’UE dispose de différents instruments et possibilités
pour influencer activement la situation en Afrique du
37
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Nord. Il s’agit de la PEV, de l’instrument européen
de voisinage et de partenariat (près de 12 milliards
d’euros pour la période 2007-2013). Entre 2011 et
2013, la Tunisie peut par exemple recevoir jusqu’à
258 millions d’euros du budget consacré à la politique
de voisinage. On cite pour l’Égypte un montant
d’environ 150 millions d’euros par an comme valeur
indicative. Dans le cadre de l’instrument pour la
démocratie et les droits de l’homme, un budget de
près de 1,1 milliard d’euros est également disponible
pour la période 2007-2013. L’instrument de stabilité
consacre quant à lui un montant de 2,1 milliards d’euros
pour la même période. Le cadre financier pluriannuel
prévoit aussi une distribution généreuse de fonds.
Proposition de financement pour la période 20142020. L’instrument européen de voisinage recevra une
enveloppe de 16,1 milliards d’euros et l’instrument
européen pour la démocratie et les droits de l’homme,
de 1,4 milliard d’euros.
Doté d’un budget de 350 millions d’euros, le nouveau
programme SPRING (Support to Partnership, Reform
and Inclusive Growth, aide au partenariat, aux réformes
et à la croissance inclusive) est une bonne manière
de répondre au Printemps arabe. L’aide sera adaptée
aux besoins de chaque pays et devrait principalement
être accordée pour la transition pacifique vers la
démocratie et la stimulation de la croissance, condition
indispensable à cet effet. Ces fonds devront être utilisés
de manière intelligente, car ce n’est pas l’importance
des montants qui importe. Après tout, des pays tels
que la Libye, productrice de pétrole, ont suffisamment
d’argent.
À long terme, il s’agit davantage d’utiliser les fonds de
telle sorte que, rapidement, les conditions de vie de la
population s’améliorent, la démocratie et l’État de droit
soient favorisés, les infrastructures soient développées
et la formation des jeunes soit renforcée. Ainsi, une
aide d’urgence de 7 millions d’euros a été accordée
aux Tunisiens en vue de soutenir principalement la
mise en place des élections et d’améliorer la situation
des droits de l’homme.
Le traité de Lisbonne a aussi constitué une étape
importante. En effet, la nomination d’un « ministre
38
des Affaires étrangères » (en même temps haut
représentant et vice-président) et d’un Service
européen pour l’action extérieure offrent les conditions
institutionnelles permettant à l’UE de parler à
l’avenir d’une seule voix et de pratiquer une politique
clairement visible et cohérente pour tous. L’UE a le
potentiel d’influencer les processus de manière active
en tant qu’acteur mondial. Nous devons exploiter ces
processus et parler d’une seule voix. Nous devons
nous engager ensemble en Afrique du Nord avec
tous les moyens dont nous disposons, dans un esprit
de paix et de liberté. Il faut apporter notre aide à
l’établissement de la démocratie, ce qui n’a de sens
que si nous contribuons à offrir dans le même temps
de meilleures conditions de vie. On a évoqué ici l’idée
d’un plan Marshall, d’une zone de libre-échange ; ces
éléments sont utiles, car l’avènement de la démocratie,
de la liberté et de meilleures conditions de vie dans
ces pays auront pour nous des retombées extrêmement
positives au regard de l’histoire.
Il faut à présent suivre les étapes et lignes directrices
suivantes dans le cadre des relations avec nos voisins
méridionaux.
Premièrement, nous devons mieux tirer profit du HR/
VP et du SEAE. Les États membres doivent poursuivre
une politique commune.
Deuxièmement, nous devons mettre en place un
groupe de travail avec la participation du Parlement
européen pour répondre à la demande répétée des
acteurs du changement démocratique en vue d’un
accompagnement du processus de transition vers
la démocratie, en particulier en ce qui concerne des
élections libres et démocratiques et le développement
des institutions, notamment d’une justice indépendante.
Troisièmement, lors de la révision stratégique de
la PEV, il y a lieu de vérifier si, dans les pays ayant
bénéficié d’une aide financière dans le cadre de la
PEV, la transition vers la démocratie s’est opérée.
La Commission doit notamment revoir au plus vite
le programme indicatif national pour la Tunisie et
l’Égypte pour la période 2011-2013 afin de tenir
compte des nouvelles urgences de ces partenaires en
matière de construction de la démocratie.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Quatrièmement, l’UE doit également être prête à mettre
à disposition des mécanismes de soutien financier
temporaire à court terme, notamment des prêts.
Cinquièmement, nous devons renforcer le dialogue
politique avec nos voisins méridionaux.
Sixièmement, il importe de consolider la démocratie
et l’État de droit, ainsi que d’encourager la bonne
gouvernance, la lutte contre la corruption et le respect
des droits de l’homme et des libertés fondamentales que
sont la liberté de conscience, de religion et d’opinion,
la liberté d’expression, la liberté de la presse et des
médias, la liberté d’association, mais aussi le respect
des droits des femmes et de l’égalité entre hommes et
femmes, ainsi que la protection des minorités.
Il est nécessaire de mettre toutes ces mesures en
marche dans les plus brefs délais, car notre respect et
notre reconnaissance vont aux manifestants courageux.
Nous ne devons pas les abandonner dans leur lutte
pour la liberté et la démocratie. Et ce dans notre
propre intérêt également ! Car, comme le disait Georg
Wilhelm Friedrich Hegel, « l’Histoire universelle est
le progrès dans la conscience de la liberté. »
Septièmement, il y a lieu de lutter contre la corruption,
en particulier dans le système judiciaire et au sein de
la police.
Globalement, pour être efficace, le partenariat entre
l’Union européenne et ses voisins du Sud doit être fondé
sur une synergie entre les dimensions bilatérales et
multilatérales, interdépendantes, de cette coopération.
La PEV doit renforcer la dimension multilatérale. La
coopération entre les pays d’Afrique du Nord doit être
renforcée. Les échanges commerciaux entre ces pays
ne s’élèvent pour l’instant qu’à 15 %. Nous avons là un
énorme potentiel de croissance, qui peut apporter bienêtre et stabilité s’il est exploité. Par ailleurs, l’Europe
doit offrir de meilleures conditions commerciales aux
pays d’Afrique du Nord afin d’accroître les volumes
commerciaux avec l’UE. Il y a toutefois lieu de veiller
dans ce cas à ce que ces conditions ne nuisent pas à
l’économie intérieure des pays d’Afrique du Nord.
Au lieu de consacrer le financement prévu dans le cadre
de la PEV à des études qui nous informent en premier
lieu, nous les Européens, des relations entre les pays
d’Afrique du Nord, ce dernier devrait servir à mettre en
place des infrastructures et à renforcer la compétitivité.
Ces fonds doivent servir de mesures d’incitation pour la
poursuite des réformes démocratiques. Ils permettront
d’enregistrer des progrès de manière plus rapide, plus
efficace et plus pragmatique.
39
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
RODI KRATSA-TSAGAROPOULOU, MdPE
Vice-présidente du PE, Présidente du Groupe de Travail EMUNI
Le Groupe PPE, le plus grand groupe politique,
participe activement à la promotion des relations euroméditerranéennes depuis 1995, année d’adoption du
cadre institutionnel du partenariat euro-méditeranéen.
Parallèlement, nous soutenons depuis le début du
Printemps arabe le combat du peuple pour plus de
liberté et de dignité, tout en nous prononçant et en
nous engageant par tous les moyens afin de renforcer
les perspectives de croissance et d’emploi, conditions
préalables nécessaires pour réaliser les objectifs du
Printemps arabe et répondre aux immenses attentes
des populations.
Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, MdPE,
Vice-présidente du PE, Présidente du Groupe de Travail EMUNI
• Répondre aux aspirations des populations
à une croissance forte et globale
• Développer les investissements financiers
L
es changements en cours au Moyen-Orient et
en Afrique du Nord sont historiques et l’Europe
doit tirer les bonnes leçons du Printemps arabe, tout
en prévoyant une stratégie et des réponses politiques
adéquates. L’aspiration des populations à la liberté,
aux droits de l’homme, à la démocratie, à l’emploi,
à la responsabilisation et à la dignité les a poussées
à prendre leur destin en mains dans plusieurs États
de la région. L’Europe a un rôle important à jouer
dans le soutien des objectifs du Printemps arabe en
promouvant des initiatives sociales et économiques
aux niveaux national, européen et mondial, et ce afin
de protéger nos valeurs communes et nos buts en
matière de stabilité, de prospérité et de démocratie
dans toute la zone euro-méditerranéenne, mais aussi
de s’adapter à un monde de plus en plus concurrentiel.
40
Le paquet de Printemps de l’UE, d’un montant de
350 millions d’euros, a été adopté en septembre 2011
pour directement compléter la subvention déjà prévue
dans le cadre de la politique de voisinage. De plus, le
mandat de prêt de la BEI pour les pays voisins du Sud
a été gonflé d’un milliard d’euros, alors que la BERD
a réalisé des progrès significatifs pour étendre le
champ de ses opérations chez les partenaires du Sud.
Une approche coordonnée, bien structurée et globale
de la BEI, de la BERD ainsi que des institutions
européennes et internationales est donc nécessaire
pour soutenir les pays voisins du Sud. Je salue
également les démarches entreprises jusqu’à présent
pour reprendre les négociations en cours en matière
de libéralisation des échanges, tout en tenant compte
des intérêts et des sensibilités des économies des deux
rives de la Méditerranée.
La crise dans la zone euro et le Printemps arabe
constituent dès lors une opportunité unique de
réformer nos politiques et relations économiques, tout
en augmentant les investissements, les échanges et
la mobilité entre le Nord et le Sud, ce qui favorisera
la création d’emplois et renforcera la coopération, la
croissance économique et la concurrence dans toute
la région. De plus, il est important de développer de
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
solides projets à long terme qui impliquent hommes
et femmes, et facilitent l’accès aux instruments
techniques et financiers, l’éducation ainsi que les
opportunités commerciales.
L’Europe doit soutenir le développement et
l’intégration économiques des États partenaires de la
Méditerranée, mais aussi encourager la modernisation
et la libéralisation des économies de ces pays. À cet
égard, la BEI a pris des initiatives courageuses telles
que la FEMIP, tandis que la BERD a récemment élargi
son mandat dans les pays du sud de la Méditerranée.
Nous devons clairement accorder plus d’importance
au soutien au secteur privé et à la création d’un
environnement propice aux investissements dans les
infrastructures, les petites et moyennes entreprises, la
recherche et les énergies nouvelles.
De nombreux jeunes des pays partenaires de la
Méditerranée étaient présents à ces journées d’étude à
Marseille. Je tiens à souligner que l’objectif principal
de toutes nos initiatives et politiques est de donner
des perspectives aux jeunes sans trahir leurs rêves. Le
succès du Printemps arabe dépend du développement
durable de leur pays et de chacun.
Nous devons nous engager dans la coopération
régionale, notamment en soutenant l’Union pour
la Méditerranée, et ce afin de proposer des projets
régionaux concrets offrant des avantages tangibles aux
populations des deux côtés de la région. Le secteur de
l’enseignement et de la formation mettant souvent du
temps à répondre aux demandes des entreprises, ces
dernières doivent aider les institutions éducatives et
« mener de l’extérieur » davantage de programmes
éducatifs axés sur le marché. Il est primordial
d’améliorer les compétences des travailleurs des
pays méditerranéens pour renforcer la compétitivité
et favoriser l’emploi, ce qui nécessite d’adapter
l’enseignement et la formation aux compétences
requises par un marché moderne et compétitif, ainsi
qu’aux besoins spécifiques au développement du
partenariat euro-méditerranéen. La création d’un
espace économique commun et l’objectif de parvenir à
un accord de libre-échange exigent des efforts continus
et l’harmonisation de tous les domaines. Le projet de
l’Université euro-méditerranéenne (EMUNI) constitue
une des priorités de l’Union pour la Méditerranée
(UPM) en matière de promotion d’un espace commun
de recherche et d’enseignement supérieur, de création
de ponts, de renforcement de la coopération, de
communication et de préparation d’un meilleur avenir
commun.
Pour réaliser ces objectifs et tirer le maximum de ces
projets, nous avons besoin d’une société civile active
et engagée. C’est pourquoi l’Europe a renforcé et
considérablement intensifié son partenariat ainsi que
son soutien à la société civile dans son voisinage,
en particulier en Tunisie, en Libye et en Égypte, les
pays du Printemps arabe. À cet égard, nous saluons
le lancement du dispositif pour la société civile des
pays voisins, qui financera les acteurs non étatiques
chez nos partenaires (22 millions d’euros entre 2011
et 2013), visant à renforcer le rôle de la société civile
dans la région et ses relations commerciales avec les
entités telles que la Fondation Anna Lindh, qui apporte
son aide et a réalisé des progrès remarquables en
matière de mécanismes de coopération entre l’UE, le
Conseil de l’Europe et les partenaires méditerranéens
afin de promouvoir la démocratie participative. Il est
donc vital de reconnaître le rôle de la société civile et
des médias dans ce processus démocratique en mettant
les gouvernements devant leurs responsabilités, de
développer un partenariat solide avec les parlements
et les autorités locales afin de superviser la réforme
et de renforcer leur rôle dans l’application des valeurs
universelles, des droits de l’homme, de la démocratie
et des lois.
Nous, peuples des deux rives, avons la chance et le
devoir de servir une vision commune pour créer
un espace d’espoir, de sécurité et de croissance au
bénéfice de tous, du nord au sud de la Méditerranée.
Nous devons collaborer en toute confiance et avec
conviction pour concrétiser ce projet.
41
THÈME II:
ACCOMPAGNER LE PRINTEMPS ARABE EN
RENFORCANT LA CONFIANCE
42
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
NIZAR BARAKA,
Ministre chargé de l’Économie et des Affaires générales du Royaume du Maroc
C
’est pour moi un grand plaisir de participer
avec vous à ces journées d’études qui porte sur
la thématique « accompagner le printemps arabe en
renforçant la confiance». Un sujet qui revêt un caractère
stratégique du fait de la mutation formidable que
connait le monde arabe dans le sens de la démocratie
et de la citoyenneté.
En effet, avec le Printemps arabe, un nouveau
paysage politique est en train de prendre forme au
sein de la région où les attentes et les aspirations
de la population, surtout des jeunes, sont de taille
et s’inscrivent dans ce qu’on pourrait appeler la
dictature de l’instant. D’où le besoin pour nos pays de
répondre au mieux et au plus vite aux aspirations de
démocratie, de liberté et de dignité exprimés par les
citoyens mais aussi à leurs aspirations de croissance
soutenue et globale et d’ investissements à fort
contenu en emplois objet de ce panel.
Mesdames et Messieurs, la problématique de la
préservation et de la création d’emplois s’impose,
aujourd’hui, avec acuité à un moment où les défis
nés des mutations économiques récentes et de la crise
économique sans précédent que connaît le Monde et
principalement nos partenaires européens deviennent
préoccupants et pressants.
Et ce d’autant plus qu’en matière de création d’emplois
et notamment d’emplois des jeunes, les défis sont
grands. Le chômage dans la région MENA qui est de
10% est le plus élevé par rapport à toute autre région
dans le monde. Le chômage est particulièrement élevé
chez les jeunes (24,4% contre 15% dans le monde).
Dans certains pays, ce taux de chômage atteint près de
40% et touche les diplômés (17% en Egypte et 21%
en Tunisie) ce qui pose avec acuité le problème de la
mobilité sociale dans ses pays.
Nizar Baraka,
Ministre chargé de l’Économie et des Affaires générales du Royaume
du Maroc
Et avec la transition démographique que connaissent
nos pays d’Afrique du Nord, les marchés du travail
auront besoin de créer plus de 1,5 millions d’emplois
supplémentaires par an au cours des 10 prochaines
années afin d’offrir des possibilités d’emploi pour
les nouveaux venus sur le marché du travail. Des
efforts énormes attendent donc la région, imposant
des réformes profondes visant à mettre en place les
jalons d’une croissance forte, durable et solidaire : il
s’agit de :
• renforcer l’État de droit, l’intégrité et la transparence
dans la conduite des affaires publiques et privées,
la liberté du commerce et
d’investissement
• mettre en place un climat propice aux affaires et à
l’investissement
• et associer activement le secteur privé au dialogue
et à la concertation public-privé pour l’élaboration
des politiques publiques.
• promouvoir
43
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Au-delà de la nécessité de réaliser une véritable
transition économique dans nos pays, il sera aujourd’hui
obligatoire de donner une impulsion nouvelle aux
efforts d’intégration régionale, de poursuivre la
convergence et le rapprochement des économies de la
région et de construire un cadre des affaires propice au
développement des investissements économiques et au
renforcement du contenu de la croissance en emplois.
Mesdames et messieurs,
Le Maroc est au cœur de la dynamique de changement
que connaît le Monde arabe. Ayant démarré sa transition
politique au milieu des années 90, le Maroc a connu ,
sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Mohamed VI,
une accélération de sa transition démocratique avec
notamment l’adoption par le peuple marocain, le
premier juillet d’une nouvelle Constitution qui au-delà
de l’organisation et de la séparation des pouvoirs, érige
le chef du Gouvernement en tant que chef de l’exécutif,
renforce les pouvoirs du parlement, assure une meilleure
indépendance de la justice, institue une véritable Charte
des citoyens donnant la primauté aux droits de l’homme
et à la protection des libertés individuelles, consacre
une organisation étatique fondée sur la régionalisation
avancée et développe une culture de la responsabilité et
de la reddition des comptes.
Cet ancrage démocratique du Maroc a été conforté
par l’organisation d’élections anticipées transparentes
le 25 Novembre dernier qui ont ouvert la voie à une
alternance par les urnes dans le cadre des institutions
du Royaume .En effet le Secrétaire Général du le parti
de la Justice et du développement, parti d’opposition
arrivé en tête à ces élections a été chargé par le
Souverain de former un gouvernement de coalition.
Cette dynamique de changement tranquille dans le sens
de l’approfondissement démocratique a d’ailleurs été
saluée par toutes les grandes puissances et notamment
l’Union européenne et a permis à notre pays d’être
invité à rejoindre le cadre de Partenariat de Deauville.
Cette dynamique a également incité les agences de
notation Stantards Poors et Fitch rating à maintenir
l’investment grade qu’elles avaient attribué au Maroc
en 2010.
44
Cette appréciation est également imputable aux
politiques publiques menées par notre pays au cours
des 4 dernières années et qui ont permis de réaliser
une croissance économique de près de 5% par an, de
réduire le taux de chômage à 9 %, de stabiliser le cadre
marco-économique avec une inflation maîtrisée à 1%,
un endettement du Trésor contenu à 52% du PIB et un
déficit du compte courant maintenu autour de 4% du
PIB malgré le renchérissement des cours des matières
premières.
En fait, le modèle de développement retenu par notre
pays repose sur 5 axes :
1.la consolidation de la croissance endogène à travers
le renforcement de l’investissement public et des
infrastructures et l’amélioration du pouvoir d’achat
des citoyens en vue de l’élargissement des classes
moyennes.
2.Le positionnement du Maroc en tant que
plateforme d’investissement et d’exportation à
travers l’amélioration du climat des affaires (gain
de 21 rangs doing business), la mise en œuvre
de stratégies sectorielles ( maroc vert, halieutis,
energie, logistique, industrie, automobile, offshoring
tourisme etc…) en vue de donner de la visibilité
aux opérateurs économiques et de développer les
métiers mondiaux du Maroc et le positionnement
du Maroc sur les nouveaux gisements de croissance
(énergies renouvelables solaire et éolien)
3.Le développement des mécanismes de solidarité
pour renforcer la cohésion sociale nécessaire pour
entretenir la croissance (indh, amo, ramed) et
assurer un développement plus équilibré (création
de 21 pôles régionaux de développement) et durable
(Charte de l’Environnement) et ce conformément
au concept de l’économie sociale de marché cher
au PPE
4.Le renforcement des acteurs qu’il s’agisse des
ressources humaines (formation en adéquation avec
les besoins des stratégies sectorielles, politique
active d’emploi) des entreprises (notamment
les PME et les TPE) et de l’État (règles de
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
bonne gouvernance, lutte contre la corruption et
amélioration de la gestion des risques).
5.L’accélération des réformes dans le sens du
renforcement de l’ancrage démocratique du Maroc et
de la mise en œuvre de ce modèle de développement
qui place le citoyen au centre de ses préoccupations
devraient permettre à notre pays de répondre
progressivement aux aspirations des populations
en termes de liberté, de dignité et de bien être et
de réussir à mener à bien les transitions politique,
économique et sociale en cours.
Mesdames et messieurs, j’invite les partis populaires
européens à accompagner cette dynamique de
réformes menée par notre pays et plus généralement ce
vent de démocratie qui souffle sur nos pays du Sud de
la Méditerranée de la même manière que vous l’avez
fait suite à la chute du Mur de Berlin avec les pays
de l’Europe de l’Est de manière à contribuer à créer
un espace de paix, de stabilité et de prospérité dans
cette zone méditerranéenne qui a un fort potentiel de
développement et qui pourrait constituer pour l’Union
Européenne un véritable relai de croissance en cette
période de crise économique.
Cet accompagnement devrait également favoriser une forte
intégration régionale Sud Méditerranéenne en appuyant
la nouvelle dynamique maghrébine qui se dessine
aujourd’hui ainsi que les efforts du Maroc pour élargir la
zone de libre échange sud méditerranéenne constituée par
l’accord d’Agadir qui regroupe déjà le Maroc, la Tunisie,
l’Égypte, la Jordanie et dernièrement la Palestine.
Enfin, il conviendrait d’œuvrer pour une intégration
intelligente « UE-MENA » dans le cadre de la
nouvelle division internationale du travail qui est en
cours en focalisant sur certains secteurs spécifiques à
fort potentiel tels que les énergies renouvelables, le
transport, la logistique, le commerce etc….
Mesdames et messieurs, je vous souhaite de fructueux
débats qui ne manqueront pas assurément d’enrichir
les réflexions engagées pour consolider le processus
d’édification de la démocratie dans le monde arabe et
renforcer la confiance en l’avenir.
45
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
MARIO MAURO, MdPE
Chef de la Délégation italienne (PDL) du Groupe PPE au PE,
Membre de la commission des affaires étrangères du PE
parce qu’ils désirent également une stabilité et un
développement qui favorisent à la fois la démocratie et
la prospérité de leurs pays.
Une recherche rapide pourrait nous être utile afin
de comprendre ce que veut dire laisser tomber la
rhétorique : il apparaît sur le site web du Parti populaire
européen que le parti AKP de Recep Tayyip Erdogan
bénéficie depuis 2005 du statut d’« observateur » au
sein de notre famille politique.
Mario Mauro, MdPE
Chef de la Délégation italienne (PDL) du Groupe PPE au PE,
Membre de la commission des affaires étrangères du PE
- Répondre à l’aspiration des populations à
une croissance forte et globale
- Développer les investissements économiques
Je voudrais essayer ici de contrebalancer la rhétorique
euro-méditerranéenne excessive faite ces dernières
années, et surtout ces derniers mois, sur le thème du
Printemps arabe.
Je vais essayer d’expliquer ce que je veux dire en
partant de l’expérience concrète que j’ai acquise au
lendemain du Printemps arabe avec plusieurs collègues
en rencontrant certains des mouvements islamiques
qui sont désormais des protagonistes du scénario qui
se déroule au sud de la Méditerranée et qui y jouent un
rôle central.
Les responsables d’Ennahda en Tunisie, le parti qui
a remporté les élections, et les Frères musulmans en
Égypte affirment avoir pour modèle le parti AKP du
Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Et ce,
46
Cela signifie que nous – en tant que Groupe PPE –
devrions pouvoir nous estimer vainqueurs des
élections dans ces pays du sud de la Méditerranée.
En outre, nous ne devrions pas avoir de problèmes à
imaginer un modèle de développement pour la rive
sud de la Méditerranée justement parce que le parti
pris comme critère et considéré comme leader de la
croissance démocratique de ces pays est un parti qui
est « observateur » de notre famille politique et qui
participe donc à plein titre à nos rencontres.
La réalité est tout autre. Ce n’est pas à nos interlocuteurs
qu’il faut cette fois adresser les questions, mais à nous.
La mienne a clairement pour objectif de provoquer.
Mais, en tant que Groupe PPE, nous devons entamer
une réflexion profonde : qu’avons-nous fait depuis 2005
pour construire une politique euro-méditerranéenne
sérieuse ? Qu’avons-nous fait pour comprendre selon
quelles modalités un parti comme celui de Recep
Tayyip Erdogan peut être efficacement pris pour
modèle par les autres mouvements islamiques des
pays de la rive sud de la Méditerranée ?
Le lien entre l’Union européenne et les pays du sud de
la Méditerranée est vicié par des années de rhétorique.
Le processus de Barcelone a été une initiative
rhétorique parce qu’il n’a pas fourni de résultats
concrets. L´Union pour la Méditerranée a été et
est en partie une initiative encore trop rhétorique,
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
peu concrète, et elle a évidemment besoin de la
contribution d’une réflexion politique qui ne peut
venir que de notre famille politique puisque c’est
nous qui avons en mains les clés du développement
européen et, donc, à plus forte raison, qui sommes
intimement responsables de ce qui se passe dans
la zone euro-méditerranéenne. Et c’est parce que
cette responsabilité nous incombe tellement que
nous comprenons peut-être mieux les choix faits
aujourd’hui par les partis islamiques, choix qui
peuvent être en partie attribués à une tactique
politique visant à conquérir le pouvoir, mais qui, peutêtre, peuvent être mieux compris si l’on tient compte
d’une donnée du Fonds monétaire international.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), si l’on
considère que le PIB de l’Italie, un pays important de la
zone euro-méditerranéenne, s’élève à 100, la somme des
PIB des pays qui donnent sur la Méditerranée et qui vont
du Maroc au Liban, en incluant donc des pays comme
l’Égypte et Israël, mais en excluant la Turquie (à savoir
l’Algérie, l’Égypte, la bande de Gaza, Israël, la Jordanie,
le Liban, le Maroc, la Syrie et la Tunisie), s’élève à près
de 37 %. Avec la Turquie, nous arrivons à 67 %.
Beaucoup des mouvements islamiques de la zone
sud de la Méditerranée ont pour modèle le parti
AKP de Recep Tayyip Erdogan parce qu’il a garanti
la prospérité et qu’il représente une opportunité de
développement qu’aucun de ces pays ne veut perdre
en ce moment. C’est pourquoi la diplomatie turque
est particulièrement active et présente en Égypte, tout
comme en Tunisie, en Libye, etc.
En tant que Groupe PPE, nous devons arrêter de nous
poser des questions rhétoriques : si Ankara est aussi
active dans cette région, sommes-nous vraiment certains
d’être tout aussi actifs ? Et sommes-nous vraiment
certains que notre Service pour l’action extérieure, qui
symbolise aujourd’hui l’action coordonnée de l’Union
européenne dans cette région, soit tout aussi actif,
cohérent et compétent ?
Notre famille politique doit avoir aujourd’hui la
capacité de se remettre en question à la fois par
rapport à ce qui se passe et par rapport à ce qu’elle fait.
Autrement, nous devrons faire face à une autre crise
de la zone euro-méditerranéenne, à la fois économique
et politique, outre celle que nous subissons déjà de
manière significative.
Je voudrais terminer sur une dernière réflexion.
La région compte essentiellement des petites entreprises
voire des micro-entreprises et leur dimension est
souvent indépendante des activités connexes des
grandes entreprises. Ces micro et petites entreprises
(MPE) opèrent dans des contextes régulateurs peu
clairs.
Nous ne pouvons pas négliger ensuite le débat de
nature constitutionnelle et portant sur la modification
des codes en cours dans ces pays. Nous ne devons
certainement pas imposer notre modèle, mais nous
devons rester disponibles en vue de favoriser une
réelle transition vers la démocratie, la stabilité et
le développement. Ce qui se produira au terme du
processus constitutionnel que traversent des pays
comme l’Égypte et la Tunisie sera déterminant pour
le développement de l’ensemble de la zone euroméditerranéenne. Il est certain que Dieu est présent
dans la Constitution des États-Unis et dans celle du
Soudan, mais le résultat n’est pas le même. Tout
comme il est vrai que Dieu n’est pas présent dans la
Constitution de la France ou de la Chine, mais que, ici
non plus, le résultat n’est pas le même.
Cela vaut d’autant plus si, au lieu de considérer le
niveau et le profil constitutionnels, nous passons au
niveau d’un organe commun de régulation qui, s’il est
bien agencé, ne pourra que permettre le développement
des petites et moyennes entreprises, un phénomène qui
influence l’économie, mais aussi la démocratisation
d’un pays. Ce n’est en effet qu’en présence d’un tissu
de petites et moyennes entreprises sain que peut se
faire la vraie démocratisation d’un pays.
En conclusion, il est important, à la fois en tant
qu’institutions européennes, mais aussi en tant que
famille du Parti Populaire Européen, que nous ne
nous tenions pas à l’écart du débat relatif aux codes
et aux Constitutions qui se déroule dans la zone
sud de la Méditerranée et que nous nous posions en
interlocuteurs dans un moment tellement délicat que le
sort et le futur de notre Europe en dépendent.
Je vous remercie.
47
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
DOMINIQUE VLASTO, MdPE
Coordinateur de la commission économique de l’AP-UpM
Soyons pragmatiques : ce qui donne confiance à chacun
d’entre nous, c’est d’avoir la liberté d’expression et
de pensée, un sentiment de sécurité pour soi et sa
famille et une perspective professionnelle pour ses
enfants.
Le printemps arabe a rendu la liberté, c’est un
changement formidable : il doit maintenant offrir
des perspectives meilleures aux citoyens qui se sont
battus pour avoir des élections libres, d’accord – mais
aussi un travail, un environnement plus prospère et
une vie meilleure.
Dominique Vlasto, MdPE
Coordinateur de la commission économique de l’AP-UpM
C
hers Collègues et Amis,
Permettez-moi d’abord, ce matin, dans ce débat,
d’avoir une pensée pour les pays qui attendent
encore leur « printemps », ces pays qui espèrent que
le vent de liberté du « printemps arabe » puisse balayer
leurs régimes répressifs – et je pense en particulier à la
Syrie mais aussi à l’Iran.
Renforcer la confiance, c’est évidemment une
nécessité pour les nouveaux régimes qui se mettent en
place mais c’est aussi une exigence pour nous tous, en
pleine crise économique mondiale.
Cette crise, elle a changé la donne et elle est aussi
une crise de confiance : dans l’économie, les marchés
financiers, les banques et les gouvernements.
Face à cette crise, il ne peut y avoir qu’une seule
réponse, partout dans le monde : la relance de
l’activité économique et le retour à l’emploi.
48
Et l’Union européenne doit accompagner ce défi de la
relance économique, d’autant plus qu’elle y est ellemême aussi confrontée : créer des emplois, relancer
l’activité industrielle, développer les services, ce sont
aussi des impératifs de l’économie européenne.
Quelles sont les priorités pour relancer
l’économie ?
La relance de l’économie, dont je suis convaincue
qu’elle est indispensable pour ramener la confiance
et consolider la stabilité politique, elle passe, me
semble-t-il, par la définition de véritables priorités
d’intervention.
Je vois une première priorité, très concrète,
indispensable, parce qu’elle crée des emplois, non qualifiés
et qualifiés, et parce qu’elle change la vie quotidienne :
c’est la relance du secteur de la construction.
La construction de logements, c’est essentiel parce que
l’habitat apporte une vie meilleure aux familles,
partout où cela n’a pas encore été fait. L’accès à la
propriété, c’est un changement dans les conditions de
vie, c’est aussi un changement de statut social, une
meilleure place dans la société.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Monsieur le Ministre, je crois que ce qui s’est fait, et se
fait toujours, au Maroc, par exemple, est exemplaire
de la transformation d’un pays grâce à la construction
de logements.
Mais construire, c’est aussi investir dans les
infrastructures, la colonne vertébrale de l’économie
de tout pays : c’est la distribution de l’eau, l’accès à
l’énergie, le développement des réseaux de transports
et de télécommunications. Ces secteurs préparent la
future croissance de l’ensemble des entreprises d’un
pays. Ils sont créateurs d’emploi, directs et indirects,
dans les services notamment.
Ils sont aussi créateurs d’emplois qualifiés et non
qualifiés.
Ce qui m’amène à ma deuxième priorité : il faut
orienter les jeunes vers des métiers dans les filières
où existent de vrais besoins et de vrais débouchés.
Cela paraît très simple mais c’est en réalité très
difficile : faire coïncider l’éducation et la formation
professionnelle avec le marché du travail, c’est un
effort politique permanent.
Il faut penser « filière » et anticiper les besoins pour
donner le plus d’opportunités aux jeunes qui sortent
chaque année du système scolaire, avec ou sans
diplôme.
Car j’insiste : tous les emplois ne sont pas qualifiés
et il ne faudra pas faire la même erreur que nous,
qui avons formé des diplômés dans des domaines
de spécialisation sans réfléchir aux besoins du
marché.
On le sait, dans certains pays du Printemps arabe, je
pense à la Tunisie notamment, c’est déjà un problème;
de nombreux diplômés ne trouvent pas d’emploi
correspondant à leur qualification - j’ai lu que 30% des
diplômés tunisiens ne trouvaient pas d’emploi à temps
plein : c’est terrible !
Je me tourne vers vous, M. Mourou, qui présidez
l’association tunisienne des jeunes avocats : peut-être
pourrez-vous nous dire ce qu’il en est aujourd’hui et
nous donner votre sentiment sur la question.
Voilà, c’est en tout cas ce que je voulais partager avec
vous, ce besoin d’agir concrètement pour relancer la
croissance économique, notamment par la construction,
et aussi de faire un très gros effort sur la formation et
l’analyse des besoins d’emplois du marché du travail
pour créer de l’emploi tout de suite.
Quelle aide l’Union européenne peut-elle
apporter ?
Oui, je voudrais simplement ajouter un mot concernant
le rôle que l’Union européenne peut jouer aux côtés de
nos voisons méditerranéens.
D’abord, il faut le redire, la Méditerranée, c’est un
espace que nous partageons tous ici et nous avons
donc tous intérêt à sa stabilité, à sa prospérité et à sa
sécurité.
Et pour y parvenir, nous devons travailler ensemble :
seul, aucun de nos pays ne pourra relever des défis
qui dépassent le cadre naturel de nos frontières (je
pense à l’énergie, aux transports, à l’environnement,
à l’agriculture : dans tous ces domaines, nos pays
peuvent travailler ensemble, être complémentaires).
Et nous avons créé ensemble un cadre pour travailler
ensemble : c’est l’Union pour la Méditerranée. Plus
que jamais, elle est d’actualité ! Les projets concrets
qui ont été initiés, dans les domaines de l’énergie, des
investissements dans les PME, de l’éducation et de
la formation sont autant de progrès, de petits pas
réalisés, et en disant cela, je pense bien entendu à
Jean Monnet, à Robert Schuman, et à cette méthode
communautaire des petits pas qui finissent par
produire de grandes choses.
Oui, l’Union européenne doit accompagner le
changement économique dans les pays du Sud de la
Méditerranée et elle doit le faire, selon moi, dans le
cadre de l’Union pour la Méditerranée. Depuis sa
nomination en juillet 2011, M. Amrani lui a apporté
un nouvel élan.
49
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Je crois qu’elle peut devenir un instrument
multilatéral régional performant, orienté vers la
promotion de la croissance, le soutien à l’emploi,
par exemple avec des incubateurs d’entreprises, et le
développement régional.
Alors, ne laissons pas passer cette chance et
engageons résolument l’aide européenne dans le
cadre de l’UpM qui a déjà fait un très grand travail
d’identification des besoins et de mise en contact des
entreprises, des pouvoirs publics et des investisseurs.
L’exemple de Marseille
Pour illustrer un peu nos propos ce matin, et puisque
nous sommes dans ma ville, permettez-moi un mot sur
la coopération entre collectivités territoriales.
D’abord, je veux dire que cette coopération a changé,
parce qu’elle implique de plus en plus des partenaires
privés et je trouve cela très positif.
Marseille entretient des relations privilégiés avec
plusieurs villes du bassin méditerranéen : lorsque nous
effectuons des échanges, lorsque Jean-Claude Gaudin,
notre Maire, se rend dans un de ces villes ou en accueille
les représentants, il est toujours accompagné d’une
délégation de chefs d’entreprises et d’acteurs de la
société civile, universitaires, médecins ou chercheurs.
Ce qui est intéressant dans ces démarches, c’est de
faciliter les rencontres et les échanges entre acteurs
économiques et de la société civile.
Selon moi, c’est la véritable plus-value de la
coopération décentralisée : créer des partenariats
au plus près du terrain, de la réalité économique. Et
cette coopération, elle ne peut pas se faire uniquement
au niveau des gouvernements ou des instances
internationales.
Alors, Marseille participe à cette dynamique de terrain,
en s’appuyant sur des partenaires institutionnels (la
banque mondiale, l’ONUDI) et privés, je pense en
particulier à ANIMA, notre plateforme multi-pays de
développement économique de la Méditerranée.
50
Le réseau ANIMA, ce sont 80 agences
gouvernementales et réseaux d’affaires, de
financement et d’innovation du pourtour
méditerranéen qui, avec le soutien de l’Union
européenne (programme INVEST in MED) et d’autres
partenaires, montent des projets entre partenaires
locaux. Ce réseau, c’est un des exemples de tous
ceux qui participent à la dynamique de coopération
et tissent, à leurs niveaux, les maillons qui font de
l’Euromed une réalité.
Alors, il faut aussi penser à cette implication locale
parce qu’elle comptera beaucoup dans la relance
économique et dans le retour à la confiance.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
NADIM GEMAYEL,
Membre du Parlement libanais
d’en face. Ce regard est toutefois lui-même,
construit sur une schizophrénie structurelle. Etant
parlementaire, j’œuvre avec les responsables de mon
pays pour créer les conditions d’une réduction de
la migration, mais étant également citoyen libanais
et arabe, je me dois d’éclairer mon auditoire, sur
le regard porté par les populations arabes, sur la
tendance européenne visant à limiter l’émigration,
et sur les conséquences d’une stigmatisation des
émigrés.
Nadim Gemayel,
Membre du Parlement libanais
L
ibanais, Arabe, Chrétien, Oriental, Occidental
de formation, Expatrié un temps en Europe, un
autre temps dans le golfe arabe. Je crois que ces
appartenances multiples résument bien l’esprit avec
lequel j’entends apporter ma contribution.
Je souhaite remercier le groupe parlementaire du Parti
Populaire Européen de m’avoir donné l’occasion
de participer à ses Journées d’Études et de faire
partie de ce panel, qui entend discuter des aspects
de la gestion des flux migratoires et des échanges
culturels, dans le cadre de l’accompagnement du
Printemps arabe.
1. Europe destination d’une émigration
continue
Étant le seul Arabe de ce panel, je me dois d’apporter
un regard différent. Je serai tenté de dire le regard
Il conviendrait d’ajouter à cette grille de lecture,
l’éclairage apporté par ce qui est communément
appelé le printemps arabe. La transformation
interne des pays arabes est sans doute un évènement
historique dont il faudra, à terme, mesurer les
conséquences.
Les populations de la région perçoivent d’un œil
assez critique, les discours qui font la promotion
d’une fermeture des frontières à l’émigration
et qui s’accompagnent souvent d’une mise en
accusation des émigrés. Ce regard critique trouve
son fondement, d’une part, dans une approche
historique des relations entre les deux bords de
la Méditerranée et, d’autre part, dans les atteintes
portées au principe de tolérance dont l’Europe est,
pourtant et avant tout, la garante.
Il est devenu assez récurant, en période électorale et
surtout en période de crise économique, d’introduire
en Europe la question de l’émigration dans le débat
politique, non pas de manière sereine et constructive
mais dans le cadre d’une surenchère nuisible.
L’Europe doit être consciente qu’elle sert de modèle
aux peuples du monde arabe et que les musulmans
modérés présentent l’Europe comme une source
d’inspiration. L’Occident, les Chrétiens d’Orient
51
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
et les Musulmans modérés peuvent et doivent se
retrouver autour de valeurs communes. Il faut donc
savoir garder à l’esprit que des prises de positions
maladroites permettent d’alimenter les discours
extrémistes au dépend de celui des promoteurs de
l’ouverture.
Mon propos ne vise, bien évidemment, pas à
contester le droit pour les pays européens de garantir
une maîtrise des flux migratoires, ni à contester les
inquiétudes, somme toute légitimes, à l’égard des
déséquilibres que des flux migratoires peuvent,
lorsqu’ils ne sont pas maîtrisés, faire peser sur les
sociétés européennes.
Par conséquent et loin de toute polémique devenue
inutile, je pense qu’il conviendrait d’adopter,
ensemble, un langage qui rassemble, et une
politique qui vise à réduire à la source le nombre des
candidatures à l’émigration. Les Etats arabes ont un
intérêt évident à conserver dans leur pays les forces
vives de leur population et les pays européens ont
intérêt à maîtriser les flux migratoires.
Le Printemps arabe n’a, à ce jour, pas eu un effet
accélérateur de l’émigration. Au contraire, cette
partie du monde pourra, à terme, dans le cadre de
l’instauration de démocraties véritables, connaître
une période de stabilité et de prospérité qui devrait
même permettre de réduire ou même d’inverser le
sens du flux migratoire.
C’est donc par une véritable coopération effective
et concrète entre les pays des deux rives de la
Méditerranée que l’on pourrait œuvrer contre une
multiplication des candidatures à l’émigration.
Cette coopération devra s’opérer dans tous les
domaines et les échanges culturels devront en être
une expression essentielle.
2. Les échanges culturels
Le Liban dispose déjà, depuis longtemps, d’un
système démocratique bien que lacunaire.
Néanmoins, il nous a été permis de mesurer
52
combien, au Liban, les échanges culturels avec
l’Europe apportent un enrichissement sur le plan de
l’incorporation des droits humains dans les réflexes
sociaux ainsi que sur le plan du développement de
la culture et des arts.
L’échange culturel constituera donc également un
facteur essentiel dans l’accompagnement des pays
arabes sur la voie de la démocratie. Il est évident
que la liberté d’expression, les manifestations
artistiques et le développement de la culture en
générale contribueront efficacement à une meilleure
assimilation par les peuples de la région du cadre
nouveau qui sera issu de ce que l’on a convenu
d’appeler le printemps arabe.
Plusieurs domaines d’interaction sont facilement
envisageables entre l’Europe, garante des droits
humains, et des pays qui entendent rétablir les
libertés fondamentales : le cinéma, la littérature, le
théâtre et même la musique sont autant de domaines
dont l’essor dépend des conditions politiques et de
la marge de liberté accordées par les pays concernés.
Une ouverture culturelle réciproque et une meilleure
connaissance de l’autre sont à mon sens, les armes
les plus efficaces pour combattre les extrémistes
et pour assurer un enrichissement de toutes les
populations concernées.
Nous avons aujourd’hui, pays d’Orient et
d’Occident, une très grande responsabilité à l’égard
des générations présentes et futures. La théorie
des conflits de civilisation pose une véritable
problématique. Il ne me parait pas raisonnable de
prétendre la résoudre, par les armes. Sur ce plan,
il me semble que l’expérience militaire a déjà
démontré ses limites en Irak et en Afghanistan.
Nous avons, au contraire, l’obligation d’œuvrer
ensemble en faveur des échanges culturels réels et
il nous appartient plus que jamais d’agir ensemble
dans l’intérêt de tous.
Je souhaite conclure par un appel rendu indispensable
par l’évolution historique des pays arabes. La voie
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
vers la démocratie et la liberté a été empruntée
par les peuples au prix de souffrances et de sang.
Beaucoup de bouleversements sont encore à venir.
L’Europe doit être au rendez-vous de l’histoire. Les
forces de progrès et de modération sont conscientes
de l’ampleur des enjeux et des dangers. Elles ne
devront ni ne pourront hésiter ou fléchir. L’Europe,
forte des valeurs qu’elle représente, devra les soutenir
avec conviction et enthousiasme pour que la liberté
puisse vraiment fleurir au printemps. Nous serons
alors ensemble, fils de l’Orient et de l’Occident,
unis autour des valeurs qui donnent aux femmes
et hommes un espace commun d’épanouissement,
d’échange et de progrès.
Je vous remercie.
53
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
SALVATORE IACOLINO, MdPE
Vice-président de la commission des libertés civiles, de la justice et
des affaires intérieures du PE
politique : la première proposition concrète concerne
justement cette question, des accords bilatéraux dans
le cadre d’accords-cadres communautaires pour la
réglementation des flux migratoires et la lutte contre la
criminalité organisée et la migration clandestine. Cela
avec le concours, d’une part, de l’Union européenne,
qui doit se charger, dans le cadre d’une obligation
de solidarité, de cet objectif essentiel et concret et,
d’autre part, des différents pays tiers, en particulier
les pays frontaliers avec le sud de l’Europe.
Salvatore Iacolino, MdPE
Vice-président de la commission des libertés civiles, de la justice et
des affaires intérieures du PE
L
a visite, fin novembre, de la délégation de la
commission LIBE en Sicile a été pour moi
comme pour mes collègues une occasion réelle et
concrète de découvrir la solidarité locale à l’égard
des migrants.
De Palerme à Marseille : nous nous étions rendus à
Palerme pour les Journées d’études en mai cette année
et à présent, à Marseille, le Groupe PPE exprime
l’intention politique de préserver la Méditerranée en vue
de lui redonner son importance, une exigence que l’UE
considère elle aussi désormais comme primordiale.
Dans la région méditerranéenne, l’on enregistre des flux
migratoires croissants, y compris ces derniers jours, et
beaucoup de migrants accostent en Sicile, ainsi qu’à
Malte et dans d’autres États du sud de l’Europe.
La réglementation du phénomène migratoire
au moyen d’accords bilatéraux est une priorité
54
Nous avons constaté l’importance du vent de liberté
qui a soufflé depuis l’Afrique du Nord vers l’Europe.
Un vent de liberté qu’il faut maintenir, cultiver et
appuyer. Parallèlement à cela, l’on ne peut oublier
la dérive islamiste possible dans les affirmations,
y compris de liberté, qui ont accompagné les
récentes campagnes électorales dans ces pays. Ces
phénomènes doivent par conséquent faire l’objet
d’une surveillance et d’un contrôle constants,
en favorisant avant tout le dialogue interculturel
parallèlement à un dialogue politique, qui doit être
mis en œuvre avec une intensité plus grande que ce
qui a été fait par le Service européen pour l’action
extérieure, notamment.
Le Groupe PPE a soutenu de manière habile le
processus de développement concret et dynamique
de relations avec les pays frontaliers. Il convient
d’intervenir dans ce cadre avec des mesures
concrètes en vue d’atteindre des objectifs qui doivent
bien tenir compte des libertés fondamentales qui
concernent aussi les femmes et les enfants dans le
cadre d’un processus de participation démocratique
aux décisions politiques. Beaucoup d’entre eux,
abandonnés, disparaissent non seulement en Sicile,
mais aussi dans beaucoup d’autres contextes :
cela doit nous amener à réfléchir sérieusement.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
En Sicile, nous avons eu l’occasion de découvrir
certains modèles basés sur une véritable solidarité,
comme celui du père missionnaire Biagio Conte ou
encore d’Emergency : autant d’exemples concrets
d’intégration et d’accueil, ainsi que de protection des
personnes vulnérables.
Nous devons faire en sorte que les jeunes qui vivent
en Afrique du Nord restent là où ils vivent, avec des
politiques et des stratégies communautaires ciblées. À
cette fin, un programme Erasmus destiné aux jeunes
entrepreneurs et aux jeunes chercheurs, similaire à
celui proposé aux citoyens de l’Union européenne,
pourrait jouer un rôle important. En outre, il convient
de libéraliser les visas pour certaines catégories
de travailleurs hautement qualifiés, dans le cadre,
cependant, d’accords-cadres qui tiennent compte
des obligations correspondantes qui incombent aux
pays frontaliers. Sans ces mesures, nous n’arriverons
jamais à des résultats concrets et la responsabilité de
certains États membres ne suffira pas.
objectifs de protection des libertés fondamentales
avec les pays tiers, en se rappelant que la traite des
êtres humains continue à relever de la criminalité
organisée et que les accords-cadres évoqués,
parallèlement au renforcement du mandat confié
à Frontex, pourront représenter un moyen de lutter
efficacement contre les flux migratoires irréguliers.
Nous ne pouvons, par ailleurs, oublier que la réponse
aux migrants économiques ne peut se traduire par le
rapatriement d’une manière générale. Parallèlement
à cela, en ce qui concerne les réfugiés, nous avons pu
constater dans les centres d’accueil en Sicile (à Mineo
ainsi qu’à Trapani) que les procédures de contrôle
qui leur sont appliquées avaient été simplifiées.
La Commission européenne, sous la direction de
M. Barroso, devrait se montrer plus courageuse.
Les réfugiés, lorsqu’ils sont retenus et considérés
comme tels, ont le droit sacro-saint de demeurer
sur le territoire des États membres. Les procédures,
à la fois rigoureuses et simplifiées, souples, doivent
néanmoins se conclure dans des délais raisonnables.
Dans le cas contraire, cela revient à cultiver des rêves
qui ne pourront probablement jamais se réaliser, et
qui s’accompagnent de coûts élevés pour les États
membres.
Pour conclure, si l’on parle aujourd’hui à juste titre
d’un Printemps arabe, il convient néanmoins de
surveiller les processus de développement, au moyen
d’une orientation politique claire et bien définie, afin
de faire concorder et de partager les valeurs et les
55
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
VITO BONSIGNORE, MdPE
Vice-président du Groupe PPE au PE, responsable de l’Union
méditerranéenne, Euromed, Coordinateur de l’AP-UpM; Responsable de la
commission spéciale sur la crise financière, économique et sociale du PE
Le Printemps arabe s’est étendu à d’autres pays de la
région, mais il est encore difficile d’imaginer quel sera
l’épilogue des transformations en cours.
L´Europe est associée à cette saison de grands
changements.
Elle possède en effet une tradition de relations
politiques, économiques et commerciales avec cette
région et sa proximité en fait un protagoniste.
Vito Bonsignore, MdPE, Vice-président du Groupe PPE au PE,
responsable de l’Union méditerranéenne, Euromed, Coordinateur
de l’AP-UpM; Responsable de la commission spéciale sur la crise
financière, économique et sociale du PE
D
ès le mois de décembre 2010, la Méditerranée et
le Moyen-Orient se sont engagés dans une saison
de profonds changements, tant sur le plan politique
qu’institutionnel.
Dans tous ces pays, les mots tels que droits de
l’homme, liberté et démocratie ont dominé l’ensemble
des manifestations, donnant lieu à ce qu’on appelle
communément le « Printemps arabe ».
Le « Printemps arabe » a déjà conduit à des
changements profonds et radicaux dans trois pays.
L’Égypte, la Libye et la Tunisie suivent à présent
péniblement le long chemin de la constitution d’États
régis par des institutions fortes et démocratiques, où le
citoyen est maître de son destin. L’Algérie, la Jordanie
et le Maroc ont également entamé des processus
de transformation en vue d’éliminer les derniers
obstacles qui les séparent de systèmes institutionnels
démocratiquement matures.
56
L´Europe est née après une période de dur labeur,
grâce à la vision des pères fondateurs de l’Union
européenne. Une vision qui s’est propagée également
aux pays d’Europe centrale et de l’Est, qui sont
aujourd’hui membres de cette Union.
Les pays du sud de la Méditerranée et du Moyen-Orient
ont connu, après l’époque coloniale, une période de
relative stabilité, abstraction faite de certains pays et
de certaines périodes historiques. Une longue stabilité,
difficilement conquise, mais avec un coût humain
élevé, une stabilité précaire où la limitation des libertés
individuelles et du progrès social n’était plus acceptable.
Nous aussi, nous avons choisi, par erreur, de soutenir des
hommes forts, au lieu de soutenir des institutions fortes.
Aujourd’hui, le Printemps arabe nous a rouvert les
yeux. Ce qui semblait une époque immuable, en raison
d’une suprématie supposée des raisons de la stabilité
régionale sur l’homme et sa dignité, est révolu.
Après le défi posé par la gestion de la fin de la guerre froide,
qui a conduit à l’élargissement de l’Union européenne,
l’Europe fait face aujourd’hui à un nouveau défi.
Celui de se doter d’une politique extérieure unique
pour la Méditerranée, qui remplace la politique gérée
au niveau national. Mais y parviendrons-nous?
Il y a plusieurs années, l’Europe a lancé, sans grand succès,
une politique commune euro-méditerranéenne, qui n’a pas
remplacé les politiques nationales, mais qui s’y est ajoutée.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Aujourd’hui, en particulier, les événements qui secouent
la Méditerranée incitent au renforcement d’une
politique extérieure européenne fondée sur une action
politique extérieure cohérente, forte et influente. Une
nouvelle politique européenne pour la Méditerranée ne
sera cohérente, forte et influente que si elle est fondée
sur une stratégie de promotion de ses valeurs et sur sa
capacité à instaurer des institutions démocratiques afin
de défendre l’état de droit et les droits de l’homme. Cette
approche doit comprendre une révision approfondie
de la politique européenne de voisinage ainsi qu’une
revitalisation de l’Union pour la Méditerranée.
Le parti et le Groupe PPE estiment que l’Union européenne
doit redéfinir sa politique de voisinage à l’égard de la
Méditerranée, en ciblant, parmi ses ambitions, l’aide et
le soutien accordés à tous les pays qui souhaitent s’unir
à la communauté internationale fondée sur des sociétés
démocratiques, ouvertes et libres, et qui choisissent de
mettre l’être humain au centre de leur dernière action, y
compris en dialoguant avec les partis islamistes modérés.
Le parti et le Groupe PPE considèrent que l’Europe a les
moyens et la capacité d’apporter immédiatement son
aide afin de soutenir et d’encourager l’espoir exprimé
par les peuples lors des révoltes de la Méditerranée.
L’Union européenne doit favoriser, dans les plus brefs
délais, la relance des rencontres au sommet, tant au
niveau des chefs d’État et de gouvernement qu’au niveau
ministériel, et donner à la dimension démocratique
des relations euro-méditerranéennes, représentée par
l’assemblée de l’Union pour la Méditerranée, un rôle
plus incisif dans les futurs choix communs.
Le parti et le Groupe PPE sont d’avis qu’il faudra rapidement
aboutir à une politique commune, efficace et incisive pour
la gestion des flux migratoires, en tenant compte tant des
exigences des pays de l’UE que des difficultés rencontrées
dans la gestion des frontières des pays tiers. Sans politique
migratoire commune, il sera très difficile d’élaborer, avec
succès, une politique d’intégration.
En ce qui concerne la relance de la coopération
économique, le parti et le Groupe PPE estiment
indispensable de créer des contextes favorables aux
investissements et aux échanges commerciaux, d’une
part, en aidant les pays de la Méditerranée à se doter
rapidement d’institutions efficaces garantissant l’état
de droit et, d’autre part, en créant des instruments
financiers et des règlements qui favorisent le
développement des entreprises.
Nous devons reconnaître que les échanges commerciaux
actuels basés essentiellement sur l’achat d’énergie en
échange de produits manufacturés ne contribuent pas au
développement socio-économique des nations du sud de
la Méditerranée et constitue une forme de colonialisme.
La réponse européenne au Printemps arabe ne peut pas
être uniquement économique.
S’agissant du processus de paix au Moyen-Orient,
l’UE doit jouer un rôle plus fort, en soutenant avec
conviction la solution de deux États indépendants
et en contribuant à ce processus avec une nouvelle
approche. Il est nécessaire de mener des négociations
directes et urgentes entre les deux parties.
Le parti et le Groupe PPE considèrent que le dialogue
avec l’ensemble des nouvelles forces politiques issues
des nouvelles élections ainsi qu’avec les mouvements
populaires sera bénéfique pour une stratégie politique
renouvelée.
Le parti et le Groupe PPE ont investi pendant de
nombreuses années afin de promouvoir un dialogue
avec l’Islam et ils poursuivront sur cette voie, tout en
renforçant leurs instruments d’action.
De nouvelles forces apparaissant, nous devons adopter
une nouvelle stratégie plus appropriée.
La présence de forces politiques islamiques dans les
assemblées renouvelées est certainement destinée
à augmenter à l’avenir et, si le vote populaire le
confirme, ces pays pourraient être dirigés par des
gouvernements soutenus par des partis islamiques.
L´Europe doit non seulement poursuivre le dialogue,
mais également l’améliorer, afin d’avancer sur
le chemin de la compréhension mutuelle, tout en
respectant les particularités de chacun.
Si le Printemps arabe donne lieu à une nouvelle ère
fondée sur la démocratie et, par conséquent, sur
l’épanouissement de l’individu, la promotion de
ses droits, de ses devoirs et de ses libertés civiles et
spirituelles, l’Europe devra être à l’avant-garde pour
la promotion de ces valeurs, de sorte que de nouvelles
relations euro-méditerranéennes prometteuses et
fructueuses puissent se développer au profit de tous les
peuples euro-méditerranéens.
57
THÈME III:
LUTTE CONTRE LA VOLATILITÉ DES PRIX DES MATIÈRES
PREMIÈRES ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE - REDONNER
DES VALEURS SAINES AUX MARCHÉS
58
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
DACIAN CIOLOŞ,
Commissaire européen chargé de l’Agriculture et du Développement rural
Un nouveau monde, de nouveaux défis pour
l’agriculture
P
rogressivement, ces dernières décennies, le mot
“régulation” avec ses excès – les montagnes de
beurre et les torrents de lait – a été remplacé par le
mot “volatilité” et les excès que nous connaissons
aujourd’hui : la crise du lait, l’absence de transparence
et la spéculation notamment. Le mot régulation était
passé de mode et la Politique agricole commune était
assaillie de toute part. Mais je sais que le Groupe PPE
a toujours su discerner l’importance de la PAC tant
comme pilier stratégique de la construction européenne
que comme politique sectorielle ayant un impact bien
au-delà des frontières du secteur agricole. D’ailleurs,
ce soutien sans faille n’a pas faibli ces derniers mois.
Je vous remercie pour les débats et les réflexions
que nous avons pu avoir en amont de la présentation
des propositions législatives de réforme de la PAC
après 2013, notamment au moment du rapport sur la
Communication de la Commission.
Face au défi alimentaire, face au défi écologique, face
au défi de la croissance et de l’emploi dans les zones
rurales, nous devons trouver un nouvel équilibre pour
la Politique agricole commune. Cet équilibre ne doit
pas être un retour vers le passé. Il ne doit pas non
plus être un statut quo qui serait source de crises de
plus en plus fréquentes et de plus en plus violentes
et ferait peser une menace économique, écologique
et sociale sur notre agriculture. Ce nouvel équilibre
passe par un véritable partenariat entre l’Europe
et ses agriculteurs, par un partenariat régénéré,
réadapté, repensé en fonction des attentes de notre
génération, des réalités de notre monde et du besoin
de renforcer la compétitivité de l’agriculture. C’est
ce que la Commission européenne a proposé le 12
octobre dernier.
Dacian Cioloş,
Commissaire européen chargé de l’Agriculture et du Développement rural
Ce nouveau partenariat passe d’abord par une gestion
moderne des marchés. Je sais que je parle à côté d’un
convaincu, Michel Dantin, qui est rapporteur du Parlement
européen sur ce sujet véritablement central pour les
prochaines années. Nous ne pouvons plus, comme par le
passé, imposer des prix de “Bruxelles”, tout encadrer, tout
légiférer. Il ne faut pas non plus se résoudre à l’impuissance,
ce qui signifierait un affaiblissement progressif, mais
certain, de notre agriculture, secteurs après secteurs.
Je propose une nouvelle approche à trois niveaux. Un,
des outils de gestion plus efficaces et plus réactifs. Cet
été encore, la crise E-Coli a montré qu’il faut aller vite
pour être efficace. Je propose une clause d’urgence
généralisée. Deux, des instruments de gestion de
la volatilité (fonds mutuels, assurances). Trois, une
gestion partagée, non bureaucratique, entre pouvoirs
publics et acteurs privés à travers un renforcement des
organisations de producteurs et une place confortée
pour les agriculteurs au sein de la chaine alimentaire.
59
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
Ces outils de gestion des crises vont s’ajouter aux
soutiens directs des revenus des agriculteurs qui seront
maintenus, mais mieux ciblés et plus efficaces. Ces
aides aux revenues sont tout simplement indispensables
pour préserver la capacité de nos agriculteurs à investir,
moderniser leurs exploitations. Le revenu moyen
agricole reste trop faible aujourd’hui encore.
L’ensemble de ces outils va permettre de préserver la
capacité de notre secteur agricole à produire et à être
compétitif. Une politique comme la Politique agricole
commune doit s’inscrire dans le long terme et proposer
des perspectives, une compétitivité, non pas seulement
pour demain, mais aussi pour après demain.
Préserver la capacité à produire, cela signifie aussi
maintenir la fertilité de nos ressources naturelles
et développer une agriculture de la connaissance,
capable d’optimiser l’utilisation des sols et de l’eau,
de produire plus avec moins. Cela passe par plus de
recherche et d’innovation – nous proposons un quasitriplement de l’effort de recherche agronomique au
niveau européen, avec un accent spécifique sur la mise
en œuvre de la recherche dans les exploitations.
Nous allons également soutenir les pratiques
agricoles durables. L’environnement a toujours été
présenté aux agriculteurs comme une contrainte, des
règlementations lourdes, figées et parfois déconnectées
de la réalité du terrain. Cette fois, la Commission
propose véritablement de mettre en valeur les efforts
des agriculteurs avec une mesure simple.
La Commission propose d’orienter 30% des aides
directes vers des pratiques agricoles durables. C’est
un instrument à la fois efficace et compréhensible,
visible et concret pour l’ensemble des citoyens,
structuré autour de trois pratiques agricoles simples et
pertinentes pour l’ensemble du territoire européen.
Enfin, nous devons garantir, avec cette grande
politique publique qu’est la PAC, un développement
équilibré de l’ensemble des territoires. La PAC est
aussi un levier de croissance et d’emploi qui dépasse
le strict cadre de l’agriculture. Nous ne pouvons pas
accepter d’un côté une intensification à outrance
60
de la production et, de l’autre, la désertification de
territoires entiers.
L’équilibre, cela passe par un meilleur ciblage des
aides directes, avec des soutiens renforcés pour les
zones défavorisées. Cela passe également par des
stratégies cohérentes et claires définies pour les
programmes de développement ruraux nationaux. Ces
stratégies permettront une mise en œuvre plus flexible
et plus simple que par le passé de nos programmes de
développement rural.
La nouvelle gouvernance que je propose pour ces
programmes permettra de moderniser le monde rural,
avec des investissements dans les infrastructures
publiques et privées, tout en stimulant un secteur
agricole dynamique, innovant qui permet aux
territoires ruraux de se projeter vers d’autres activités
économiques.
Pour conclure, je voudrais revenir quelques instants
sur la question de la volatilité et des valeurs, dans
une perspective plus large. La PAC est un outil.
Mais, dans le contexte mondial actuel, elle ne peut
pas tout. Nous devons avoir une stratégie cohérente
de développement de l’agriculture mondiale avec
une approche globale de notre politique agricole, de
nos politiques commerciales et de notre politique de
développement.
Des avancées doivent être réalisées dans les enceintes
internationales d’une part – je compte sur la FAO
pour jouer un rôle plus important dans les prochaines
années – et d’autre part nous devons continuer à
travailler comme nous le faisons sous l’impulsion du
commissaire Barnier, sur la question de l’encadrement
des marchés pour qu’ils jouent leur rôle de soutien à
l’économie réelle.
Nous ne devons pas accepter que la spéculation,
les excès, les phénomènes irrationnels menacent
l’existence de pans entiers d’un secteur aussi stratégique
que l’agriculture. Un travail sur la transparence a été
engagé au G20 – il doit être poursuivi et amplifié.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
MICHEL DANTIN, MdPE
Membre de la commission de l’agriculture et du développement rural du PE
M
esdames et Messieurs,
Voilà plus de 50 ans, les dirigeants européens ont pris
la décision historique d’abandonner leurs politiques
agricoles nationales pour créer ensemble la politique
agricole commune. L’objectif et la méthode étaient
simples: assurer l’indépendance alimentaire de
l’Europe en mutualisant nos moyens, pour moderniser
notre agriculture et orienter les marchés.
Le triptyque production / commercialisation /
consommation est donc depuis l’origine au cœur de
la PAC. En d’autres termes, la PAC a toujours été
une politique alimentaire commune, autant qu’une
politique agricole commune.
Mais au fil du temps, l’Europe et le monde ont changé,
les priorités ont évolué et les outils de politique publique
se sont modifiés. Dans ce grand chambardement, sans
doute avons nous perdu de vue l’objectif primordial de
toute agriculture, et donc de toute politique agricole.
Cet objectif n’est pas, en tant que tel, d’approvisionner
un marché en matières premières.
Cet objectif reste, et restera toujours avant tout, de
nourrir les hommes.
Or, ces dernières années nous ont rappelé avec une
extrême dureté combien l’accomplissement de cette
mission pouvait s’avérer aléatoire.
Que les prix alimentaires s’envolent, et les
consommateurs les plus humbles sont directement
touchés, les poussant à des émeutes de la faim comme
en 2007/2008 où la hausse des prix a fait passer le
nombre de personnes souffrant de la faim dans le
monde de 850 millions à un milliard. Ces faits ne
peuvent qu’interroger notre sensibilité démocratechrétienne.
Michel Dantin, MdPE
Membre de la commission de l’agriculture et du développement
rural du PE
Que les prix agricoles s’effondrent, et les producteurs
sont acculés à la faillite, à l’abandon définitif de leur
activité, et parfois au suicide, comme en 2009/2010
avec la crise du secteur laitier en Europe.
Certes, l’inélasticité de la demande alimentaire, la
lourdeur des investissements productifs nécessaires à
l’activité agricole, ou encore la prégnance du risque
climatique engendrent depuis toujours une volatilité
des marchés agricoles plus forte que dans n’importe
quel autre secteur.
Certes, la volatilité des prix fait partie intégrante de
la vie normale de toute économie de marché libre
et ouverte, et il serait illusoire, voire dangereux, de
vouloir totalement l’éradiquer.
Mais la volatilité extrême, celle qui rend les cours
imprévisibles et erratiques, celle qui accouche de prix
totalement déconnectés de la réalité de la production
61
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
et de la consommation, cette volatilité-là doit être
combattue sans faiblesse.
Le défi est de taille. Avec une expansion démographique
mondiale galopante, une pression croissante sur les
ressources naturelles nécessaires à la production
agricole; avec des modifications climatiques
profondes, une crise économique aux effets ravageurs,
un développement accru d’usages non alimentaires
des produits agricoles ou encore un fonctionnement
des marchés financiers dont l’encadrement demeure
difficile, l’exigence de maintenir à long terme, à
un niveau relativement stable, des prix à la fois
rémunérateurs pour les producteurs et abordables pour
les consommateurs, semble relever de la gageure.
D’autant que la volatilité des prix ne répond pas
aux mêmes mécanismes, et n’a pas les mêmes
conséquences selon les pays. Selon que l’on se penche
sur le cas de pays développés aux économies matures,
ou sur le cas des pays en développement, dont les
systèmes agroalimentaires restent encore souvent à
créer ou à renforcer.
Ceci étant, même s’ils ne concernent qu’une part
généralement faible de la production agricole, les
marchés mondiaux sont aujourd’hui devenus l’étalon
sur lequel l’ensemble des prix pratiqués sur les
marchés nationaux ou locaux tendent à s’aligner. Dans
un monde global et interconnecté, la transmission des
prix et des crises fait que le premier niveau de réponse
ne peut à mon sens qu’être international.
Je me réjouis donc vivement qu’une véritable prise
de conscience ait eu lieu sur ce sujet. Les travaux du
G20 récemment conclus à Cannes l’ont montré: les
Gouvernements des principales économies mondiales
ont compris l’enjeu, et ils ont démontré une véritable
volonté de s’attaquer à la question.
Je souhaiterais donc ici faire miens les objectifs autour
desquels ils se sont retrouvés:
1) augmenter la production et la productivité
agricoles. Pour nourrir les 9 milliards d’êtres humains
qui peupleront la planète en 2050 et éviter les tensions
62
structurelles sur les marchés, toujours propices à la
volatilité et à la spéculation excessives, cet objectif
relève de l’évidence. Il nécessitera pourtant des
investissements publics et privés massifs dans le secteur
agricole, que ce soit dans les pays en développement,
mais également en Europe. Le secteur fondamental de
la recherche agricole devra également être financé à
la hauteur des enjeux qui sont désormais face à nous.
2) renforcer la transparence des marchés. Il
s’agit ici de la question de la prévisibilité, qui doit
devenir l’un de nos maitres-mots de notre réflexion
en matière agricole. Savoir de quoi demain sera fait
reste aujourd’hui une question lancinante pour les
producteurs, y compris en Europe. Des informations
exactes, transparentes et fournies en temps réel sur
la production, les stocks et les transactions auraient
notamment permis d’anticiper la crise de 2007/2008 et
d’éviter, au moins en partie, les drames que nous avons
connus alors.
3)
approfondir
la
coopération
politique
internationale. C’est-à-dire mettre en œuvre un
embryon de gouvernance internationale en matière
agricole et alimentaire. Constituer des stocks
stratégiques dans toutes les régions du monde, et
agir conjointement sur leurs niveaux quand cela est
nécessaire, comme le font par exemple parfois les
banques centrales en cas de risque monétaire, est
aujourd’hui indispensable.
4) créer des outils de gestion du risque. Ce risque
est avant tout celui qui pèse sur les producteurs. Car,
pardonnez-moi cette lapalissade, mais sans producteur
agricole, pas de production agricole. Si l’on ne peut
éviter toute volatilité ou toute crise, au moins nous
faut-il nous prémunir au mieux de leurs conséquences
dévastatrices, par exemple en développant les fonds
assurantiels et les fonds de mutualisation.
5) réguler les marchés financiers. Il ne s’agit
évidemment pas ici d’empêcher ou de contraindre
des mouvements commerciaux nécessaires, et parfois
indispensables en cas de crise d’approvisionnement
régional, mais bien d’encadrer fermement l’activité
spéculative venant se greffer sur des situations de
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
marché déjà extrêmement tendues, et n’ajoutant que
l’instabilité à l’instabilité.
Est-il admissible que certains mois, à la bourse de
Chicago, le rapport entre volume échangé et volume
produit soit supérieur pour le blé à celui qu’il est pour
le pétrole, que d’aucuns trouvent déjà abusif?
Sur le plan «intérieur», les propositions faites par la
Commission européenne ces derniers mois vont dans
la bonne direction, et ciblent efficacement les défis
propres à notre continent, qu’il s’agisse des initiatives
du Commissaire Barnier sur la transparence, la
supervision et la régulation de tous les marchés
financiers, ou bien entendu des propositions du
Commissaire Ciolos sur la nouvelle politique agricole
commune, notamment en matière d’organisation
commune des marchés.
Je me contenterai de citer ici pêle-mêle :
• le maintien de filets de sécurité par voie
d’intervention publique sur les marchés,
Tous ces outils nous permettront, je le crois, d’avancer
dans la lutte contre la volatilité excessive des prix et
ses effets, et de progresser pour résoudre peu à peu
cette quadrature du cercle qu’est aujourd’hui encore
l’équilibre entre action internationale coordonnée
et action domestique autonome ; entre agriculture
administrée, incapable d’apporter des réponses viables
aux attentes de nos concitoyens en matière alimentaire,
et libéralisation aveugle, qui ne sera jamais en mesure
de répondre aux multiples défis que nous impose le
XXI° siècle naissant.
Nous avons longtemps cru, tout au moins dans les
pays développes, être à jamais libérés du spectre de
la faim. Si celui-ci ne frappe pas encore à notre porte,
prenons garde à ne pas le découvrir une fois qu’il sera
sur le seuil. Prenons garde également à ne jamais nous
accoutumer des famines qui frappent les autres parties
du monde et à ne plus laisser se développer la faim,
ce terreau fertile sur lequel se développent toutes les
instabilités.
• le développement des aides au stockage privé,
Nous devons aujourd’hui nous saisir de tous les outils
à notre disposition pour éviter l’évitable. Il en va de
notre intérêt. Il en va de notre devoir.
• les nouvelles conditions d’activation de ces
Je vous remercie.
outils prenant notamment en compte les charges
d’exploitation et plus seulement les prix,
• la réserve financière de gestion de crise,
• les nouveaux crédits accordés à la recherche
agricole,
• la participation aux fonds de mutualisation et de
systèmes assurantiels,
• ou encore la capacité offerte aux producteurs de
s’organiser collectivement pour peser plus dans la
chaine d’approvisionnement alimentaire et ainsi
protéger leurs revenus, et donc in fine leur capacité
d’investissement.
63
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
FRANÇOIS BAROIN,
Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de la République
française
Vous abordez aujourd’hui un thème très important, qui
est la lutte contre la volatilité des prix et la transparence
financière. Dans ce domaine, le G20 sous présidence
française a agi et j’aimerais vous rappeler quelles sont
nos principales réalisations.
I. Mais avant d’aborder cette question, je
souhaite évoquer la situation de la zone euro.
François Baroin,
Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de la
République française
M
esdames et Messieurs les membres de
gouvernements,
Messieurs les Commissaires européens,
Monsieur le Président du Parlement européen, cher
Jerzy Buzek,
Monsieur le Président du Parti Populaire Européen,
cher Wilfried Martens,
Monsieur le Président du Groupe PPE au Parlement
européen, cher Joseph Daul,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Dans la période difficile que l’Europe et la zone euro
traversent, c’est un vrai plaisir de voir les représentants
de la droite européenne réunis sous la bannière du Parti
Populaire Européen pour ces deux Journées d’études.
Je salue le Président Jean-Claude Gaudin et le remercie
de nous faire l’honneur de nous accueillir à Marseille.
Je vois aussi dans cette assemblée de nombreux visages
connus et tiens également à les saluer.
64
Comme vous le savez, nous sommes aujourd’hui à la
veille de décisions essentielles pour l’avenir de la zone
euro.
Lundi dernier, le Président de la République et la
Chancelière allemande ont présenté leurs propositions
pour tracer les contours d’un accord européen
ambitieux, à la hauteur des difficultés auxquelles nous
devons faire face.
Nous souhaitons que les 27 pays européens ou,
à défaut, les 17 États membres de la zone euro,
s’entendent au plus vite sur des mesures qui marquent
à la fois le renforcement de la discipline commune et
l’accroissement de la solidarité en Europe.
• Nous voulons tout d’abord renforcer le volet
préventif du pacte de stabilité et de croissance,
en instaurant des sanctions automatiques en
cas de déficit public excessif (c’est à dire
supérieur à 3% du PIB). Seules des circonstances
exceptionnelles, dépassant la responsabilité d’un
Etat, devraient conduire à une dérogation à cette
règle.
• Afin d’ancrer l’équilibre budgétaire au cœur de nos
finances publiques, nous proposons d’instaurer
une règle d’or dans chaque État. La Cour de
justice de l’Union européenne serait chargée de
veiller à son uniformité entre les États membres.
Les cours constitutionnelles nationales, pour
leur part, vérifieraient la conformité des budgets
nationaux à la règle d’or nationale. Je précise
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
que l’articulation entre la CJUE et le Conseil
constitutionnel est pleinement respectueuse des
compétences des parlements nationaux.
• Nous souhaitons accélérer l’instauration
du mécanisme européen de stabilité. Notre
objectif est de le rendre opérationnel dès 2012.
Nous proposons que les décisions concernant ce
fonds soient prises à une majorité qualifiée de 85%
- le même seuil qu’au FMI.
• Enfin, en ce qui concerne l’implication du secteur
privé, le mécanisme européen de stabilité
devra être révisé, afin qu’il soit clair que la
solution requise pour la Grèce était unique et
exceptionnelle. Tous les autres membres de la
zone euro réaffirmeront leur grande détermination
à honorer leur signature souveraine. La zone euro
se conformera à la pratique du FMI.
Avec ces règles de discipline et de solidarité nouvelles,
nous disposerons d’un cadre qui écartera durablement les
risques qui pèsent sur les dettes souveraines des Etats.
Désormais, il appartient à l’ensemble des États
membres de prendre les meilleures décisions pour
l’avenir de l’Union européenne et pour la préservation
de notre monnaie commune.
II. La crise de la zone euro ne doit pas nous
faire perdre de vue les chantiers de plus
long terme que vous abordez aujourd’hui,
à savoir la réforme du fonctionnement des
marchés financiers.
Ces réformes participent de la réponse globale à la
crise que la France formule avec ses partenaires, au
niveau du G20 comme en Europe.
Bien entendu, dans cette démarche, le Parlement
européen est un partenaire essentiel des Gouvernements,
qu’il agisse au nom du dialogue économique ou en
tant que co-législateur. C’est la raison pour laquelle
le ministre des finances allemand Wolfgang Schauble
et moi-même nous sommes rendus à Bruxelles le 8
novembre dernier, pour faire état de l’avancement de
nos travaux auprès de la commission ECON, qui est en
charge de ces questions.
Quelques semaines après la clôture du sommet
de Cannes, je veux vous rappeler nos avancées en
matière de régulation financière, et formuler plusieurs
souhaits pour la poursuite de ces travaux au cours des
prochaines années.
1) Le G20 de Cannes a prolongé les efforts déjà
engagés pour opérer des réformes structurelles des
marchés financiers.
Depuis trois ans, c’est avant tout notre perspective
qui a changé : nous avons tiré les leçons de la crise
financière, et avons promu une nouvelle régulation. Ce
n’est ni une régulation allégée, ni une « surrégulation », mais une régulation large, complète, qui
traite de tous les produits, de tous les acteurs, dans
toutes les juridictions.
Depuis trois ans, des chantiers considérables ont été
mis en œuvre. Ils modèlent déjà le nouveau paysage
des marchés financiers.
Le sommet de Cannes a été l’occasion de poursuivre
certains chantiers et d’en inscrire de nouveaux à
l’agenda.
Trois exemples : - Avant la fin de l’année 2012, la régulation des
marchés dérivés de gré à gré sera mise en œuvre
dans l’ensemble des pays du G20.
Les transactions sur ces marchés seront partout
soumises aux mêmes règles de garanties financières.
Ce cadre harmonisé permettra de limiter les risques et
l’effet de levier associés à ces transactions.
Les États-Unis achèveront la mise en place de leur
cadre réglementaire au premier trimestre 2012.
L’Europe devrait les suivre de près.
Bien entendu, je veillerai à ce que les chambres de
compensation offrant des services en euros soient
correctement supervisées.
- La lutte contre les paradis fiscaux.
Nous avons identifié les juridictions non
coopératives, et passé en revue les efforts entrepris
– ou non – pour se mettre en conformité avec
65
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
les standards internationaux de transparence et
d’échange d’informations.
11 juridictions ont ainsi clairement été identifiées
comme présentant de sérieuses carences en matière
fiscale. Il faudra y remédier dans les plus brefs délais.
Par ailleurs, les États membres du G20 ont adhéré
à la convention multilatérale sur l’assistance
administrative mutuelle en matière fiscale. Cette
nouvelle convention donne accès à un réseau
d’échange d’information fiscale incluant les plus
grandes économies. Elle permettra de créer un nouvel
effet d’entraînement, notamment en direction des
pays en développement.
- Au cours du sommet de Cannes, nous avons mis
en place un cadre de traitement des institutions
financières systémiques.
Ce cadre comprend trois volets :
1. des obligations de supervision renforcées ;
2. des obligations de résolution renforcées, avec
l’obligation faite à chaque juridiction de se doter
de régimes de résolution des crises bancaires ;
3. et enfin, des surcharges en capital pour les grandes
banques systémiques à partir de 2016.
En Europe, la négociation de la nouvelle directive
« résolution » s’ouvrira en 2012. Je souhaite qu’elle
aboutisse rapidement.
Nous avons institutionnalisé un mécanisme
international de revue des engagements du G20 dans
les différentes juridictions. Le G20 édictait déjà la
norme financière internationale : désormais, sa bonne
application sera contrôlée.
Le Conseil de Stabilité Financière sera investi de la
mission fondamentale de contrôler le respect des
engagements de chacun. Il mènera l’année prochaine
une analyse approfondie des régimes nationaux
sur les bonus. Nous prendrons connaissance de ses
appréciations ainsi que de ses recommandations avec
le plus grand intérêt.
66
2) La présidence française a également mis
à l’agenda du G20 de nouveaux chantiers de
régulation, qui devront être mis en œuvre en 2012
dans les différentes juridictions.
Au-delà de la réalisation de nos engagements, Cannes
a permis de faire émerger un ensemble de priorités
nouvelles. Cela a profondément renouvelé l’agenda de la
régulation financière. Sur plusieurs de ces chantiers, 2012
sera l’année de la mise en œuvre, en particulier en Europe.
- Nous avons d’abord dessiné un nouveau cadre pour
l’intégrité et l’efficacité des marchés financiers.
Face à l’automatisation croissante des transactions
sur les marchés d’actions, face à la fragmentation des
marchés en une multitude de plates-formes opaques, le
G20 n’est pas resté inactif.
Nous avons adopté les premières recommandations
portant sur les régulateurs de marché internationaux :
obligations d’information renforcées à toutes les étapes
des transactions, procédures de coupe-circuit, outils de
détection renforcés des abus de marché. Les travaux en G20
devront se poursuivre afin d’approfondir ces propositions.
En Europe, nous mettrons ces principes en œuvre
à l’occasion de la révision de la directive MIF. Elle
dessinera notamment un cadre de réglementation de la
négociation automatique à haute fréquence.
La révision de la directive « abus de marché » permettra
aussi de punir sévèrement les manipulations qui
peuvent être associées à ces techniques de négociation.
- Nous avons adopté un cadre de régulation et de
supervision des marchés dérivés de matières
premières.
Le Président Nicolas Sarkozy l’a rappelé : davantage
de transparence et de régulation sont nécessaires sur
ces marchés compte tenu de leurs implications sur
l’économie réelle, mais aussi et surtout sur la vie de
milliers d’hommes et de femmes
À l’initiative de la France, la spécificité de ces marchés
a donc été prise en compte – et c’était la première fois.
En Europe, c’est à nouveau la directive MIF qui sera le
véhicule de transposition de ces engagements.
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
3) Avant de conclure, je voudrais dire un mot des
travaux qui devront être poursuivis sous présidence
mexicaine en 2012.
- Nous avons d’ores et déjà débuté le chantier de
la régulation du marché des dérivés de crédit - les
Credit Default Swaps.
Sous l’impulsion de la France et de l’Allemagne,
l’Europe a joué un rôle pionnier en la matière.
Vous le savez, le règlement européen sur les ventes
à découvert et les CDS souverains a fait l’objet d’un
accord politique entre le Conseil et le Parlement
européen. Il entrera en vigueur l’année prochaine.
Dans l’enceinte du G20, nous avons lancé des travaux
sur le fonctionnement de ce marché, à l’échelle
internationale. Ce chantier devra aboutir d’ici le
prochain sommet.
- Notre travail d’identification des institutions
systémiques doit lui aussi être poursuivi.
Cannes a été l’occasion de la publication d’une liste de
29 banques systémiques d’importance mondiale.
Pour autant, il n’y a pas que les établissements
bancaires qui peuvent être considérés comme des
acteurs systémiques.
Nous avons donc complété ce travail en identifiant des
acteurs non bancaires (comme par exemple les hedge funds)
et des infrastructures de marché (comme les chambres de
compensation) de taille systémique. Je souhaite que ce
travail soit repris par la présidence mexicaine.
- Autre chantier d’envergure pour la présidence
mexicaine : l’initiative pour une meilleure
transparence sur les marchés financiers.
Le G20 a consacré le lancement d’un identifiant
international unique des contreparties aux transactions
financières.
C’est un travail ambitieux, qui durera sans doute des
années. Cannes a posé la première pierre de ce qui
deviendra à terme un nouveau bien public mondial,
parce que la transparence est au service des régulateurs
et renforce la gouvernance internationale.
Il appartient désormais au Conseil de Stabilité
Financière de mettre en œuvre les travaux de manière
coordonnée, dans toutes les juridictions.
Le CSF devra également assurer l’accès équitable et
réciproque des superviseurs aux données financières
collectées dans les différentes juridictions.
- Un dernier point, qui me tient particulièrement
à cœur : nous avons lancé des travaux sur
l’encadrement du système bancaire parallèle –
ce que l’on appelle parfois « la finance de l’ombre ».
Nous savons que l’accroissement de la régulation présente
un risque. Ce risque, c’est de voir des activités financières
migrer vers le trou noir de la finance non régulée.
C’est la raison pour laquelle le Conseil de Stabilité
Financière devra, en 2012, présenter des propositions
concrètes de réglementation. Elles porteront en particulier
sur la régulation des fonds monétaires, sur la régulation
de la titrisation et sur l’encadrement de certaines pratiques
de financement qui ont participé à la crise de 2007.
Je souhaite que l’Union européenne se saisisse d’un tel
sujet, et j’attends des propositions de la Commission
européenne sur cet enjeu dans l’année qui vient
Mesdames et Messieurs,
Pour assurer en Europe la mise en œuvre des différents
chantiers que je viens d’évoquer, l’Autorité européenne
des marchés financiers jouera un rôle crucial. Je veux vous
dire que la France soutiendra toujours le renforcement des
prérogatives du nouveau gendarme boursier européen.
Sur toutes ces questions, l’Europe doit être exemplaire.
2012 est à cet égard une année cruciale : c’est l’année
où le règlement européen pour les infrastructures de
marché (EMIR), la directive CRD 4 et la révision de
la directive MIF doivent aboutir. Ce sont nos priorités.
Mais exemplarité ne veut pas dire naïveté : l’Union
européenne ne doit pas être seule à engager ces réformes.
Nous veillerons donc à ce que le Conseil de Stabilité
Financière tienne son rôle de garant de l’intégrité des
engagements du G20, et ce dans toutes les juridictions.
Nos efforts pour écarter durablement les perspectives d’une
nouvelle crise seront fructueux, et je ne doute pas que le
Conseil européen de demain marquera une nouvelle étape
dans la résolution de nos difficultés. Je vous remercie.
67
CONCLUSIONS
JOURNÉES D’ÉTUDES DU GROUPE PPE À MARSEILLE
68
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
DÉFENDRE NOS CITOYENS, NOS ÉCONOMIES ET
NOS VALEURS : LA RÉPONSE C’EST PLUS D’EUROPE
L’UE ET L’ÉVEIL DÉMOCRATIQUE EN MÉDITERRANÉE : ACCOMPAGNER LE PRINTEMPS
ARABE EN ACCROISSANT L’AIDE AUX JEUNES DEMOCRATIES EN GESTATION
Depuis décembre 2010, le Sud de la Méditerranée et le Moyen-Orient ont commencé une période de profonde
transformation, aussi bien sur le plan politique qu’institutionnel, créant ce que l’on appelle communément le «Printemps
arabe». L’Europe est définitivement impliquée de par sa proximité dans cette période de changements structurels, en tant
que partenaire politique, économique et commercial. Le Printemps arabe de 2011 a ouvert une nouvelle ère.
Les événements en Méditerranée peuvent encourager maintenant le renforcement d’une nouvelle politique étrangère de
l’Union européenne, basée sur une action plus cohérente, puissante et influente. Une nouvelle politique méditerranéenne de
l’UE peut réussir si elle est basée sur une stratégie visant à promouvoir ses valeurs démocratiques et sa capacité à construire
des institutions démocratiques à même de garantir l’État de droit et la protection des droits de l’Homme. Cette nouvelle
approche doit inclure une profonde révision de la politique de voisinage et revitaliser l’Union pour la Méditerranée.
Le Groupe PPE croit que l’UE devrait rétablir sa politique de voisinage envers la Méditerranée, en se concentrant sur l’aide
concrète afin de promouvoir la démocratie et les droits fondamentaux. Il est aussi essentiel d’encourager la croissance et
la création d’emplois par l’investissement dans les infrastructures, l’éducation et la formation, et d’appliquer le principe de
différentiation. Le Groupe PPE croit que l’Europe a le potentiel et les instruments capables de fournir immédiatement son
soutien afin d’encourager l’espoir des peuples engagés dans la révolution méditerranéenne, particulièrement envers les jeunes.
En ce qui concerne l’immigration, le Groupe PPE soutient avec force la création d’une politique européenne commune
d’immigration. Il est aussi important de mettre en avant la dimension européenne de la politique d’intégration et de
souligner le besoin d’engagement dans la lutte contre l’immigration illégale. L’immigration légale, qui est considérée
à court terme comme une solution contre les questions démographiques et économiques des États Membres, appelle
une coordination étroite entre les pays européens et les pays d’origine, à travers des accords de partenariats. D’un
autre côté, le Groupe PPE doit prendre en compte le fait que des millions de jeunes européens sont sans travail. De
plus, le Groupe PPE souligne que l’immigration légale est une responsabilité nationale. Le Groupe PPE soutient
pleinement les facilitations de visa pour des objectifs précis et certaines catégories de personnes.
En ce qui concerne le processus de paix au Moyen-Orient, l’UE devrait jouer un rôle politique plus important que celui
qu’elle a dans le Quartet, soutenir pleinement la solution de deux États et aider le processus par une approche innovante.
L’Europe et ses familles politiques doivent continuer de travailler ensemble avec tous les nouveaux partis
représentés dans les nouvelles assemblées parlementaires. Le Groupe PPE a investi depuis plusieurs années dans la
promotion du dialogue avec l’Islam et continuera en développant ses moyens, afin de poursuivre la compréhension
mutuelle et, en même temps, s’attaquer à l’augmentation potentielle des extrémismes.
Si le Printemps arabe est à l’origine d’une nouvelle ère basée sur la démocratie et, conséquemment, sur la promotion
de la personne humaine, ses droits, devoirs et libertés civiles et spirituelles, le Groupe PPE applaudit le courage
montré par les peuples et la société civile des pays concernés par ces bouleversements. De plus, le Groupe PPE doit
être aux avant-postes de la promotion de ces valeurs, de sorte que de nouvelles, prometteuses et fructueuses relations
euro-méditerranéennes puissent être vraiment établies pour les populations des deux bords de la Méditerranée.
P. Licandro, J. Salafranca, V. Venezia
69
Journées d’études du Groupe PPE à Marseille
LUTTE CONTRE LA VOLATILITÉ DES PRIX DES MATIÈRES PREMIÈRES ET SÉCURITÉ
ALIMENTAIRE - REDONNER DES VALEURS SAINES AUX MARCHÉS
La question de la volatilité des prix, notamment des matières premières, est une question stratégique, car elle est
une cause d’instabilité partout dans le monde. Elle relève entre autre de la capacité de production industrielle et
agricole. Le Groupe PPE doit prendre la tête de ce combat qui peut également être une réponse à la crise financière
et à la période d’instabilité actuelles. Il faut s’attaquer aux causes de l’instabilité des prix. Ainsi, en matière agricole,
l’offre n’est pas suffisante pour la demande. La demande des pays émergents devient de plus en plus importante et
la production doit doubler d’ici 2050 pour nourrir la population mondiale. De même sur les marchés financiers les
contrats de gré à gré ont été multipliés par 14 au cours de la période 2002-2008.
La menace posée par l’extrême volatilité des prix des matières premières agricoles nécessite d’être contrée
urgemment pour garantir la sécurité alimentaire mondiale et celle de l’Union européenne. Les membres du
Groupe PPE et les Commissaires PPE sont d’accord sur la nécessité de combattre les abus des marchés financiers,
d’accroître la transparence des prix, d’améliorer le fonctionnement de la chaine d’approvisionnement alimentaire
afin que les producteurs reçoivent un prix équitable pour leurs produits et qu’ils bénéficient des avantages de
l’imminente réforme de la PAC, de stimuler l’agriculture et d’améliorer la productivité européenne. Le Groupe
PPE accueille favorablement les récentes conclusions du G20 sur la volatilité des prix des matières premières, et
se félicite notamment de l’adoption d’un plan d’action sur la volatilité des prix alimentaires et sur l’agriculture.
Le Groupe PPE est convaincu qu’il faut lutter énergiquement contre la spéculation. Lorsque le volume du commerce
mondial d’un produit de base atteint trente fois sa production, les conséquences sont insupportables et peuvent
porter atteinte aux conditions de vie de millions de personnes.
Le Groupe PPE est convaincu qu’il faut donner aux autorités européennes, telles que l’ESMA (European Securities
and Markets Authority), les moyens réglementaires et les ressources nécessaires pour interdire certaines pratiques et
certains produits. Le Groupe PPE considère que la directive MIFID (directive sur les Marchés d’instruments financiers),
actuellement en cours de discussion au Parlement européen, doit permettre de trouver des solutions à cette problématique.
Le Groupe PPE est conscient qu’il n’est pas facile de définir ce qui constitue la spéculation et que seuls les acteurs
du marché peuvent connaitre l’objectif final de la transaction. De même les produits dérivés sont parfois le seul
moyen de couvrir certains risques. Le Groupe PPE considère que la proposition de la Commission européenne sur
la MIFID, et dont le rapporteur au Parlement européen est M. Ferber, est équilibrée. Le Groupe PPE est notamment
favorable à ce que les traders soient obligés de déclarer leurs position pour pouvoir connaitre à tout moment les
situations des marchés et prendre les mesures nécessaires pour lutter contre la volatilité des marchés.
Le Groupe PPE soutient les négociations en trilogue sur le Règlement EMIR (European Market Infrastructure
Regulation) dont le rapporteur pour le Parlement européen, M. Langen, représente l’une des meilleures garanties
pour obtenir un résultat qui augmentera la transparence des marchés.
Le Groupe PPE soutient avec force l’économie sociale de marché qui est au cœur de ses valeurs. Le Groupe
PPE est convaincu qu’il faut replacer au centre des politiques européennes le caractère humain des relations
économiques et sociales. Dans la mise en œuvre des réformes nécessaires, le Groupe PPE appelle au respect de la
méthode communautaire afin que soit garanti le contrôle démocratique, tant au niveau national qu’européen, des
décisions et afin de redonner confiance aux citoyens européens.
A. Bastiaansen, K. Wynands, B. Thollon
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étrangères
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Février 2011
Réunion du
Bureau du Groupe
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Avril 2011
FR EN DE NL
FR EN DE NL
FR EN DE NL
FR EN DE NL
FR EN DE
Journées d’études
du Groupe PPE à
Palerme Mai 2011
Février 2011
Audition du
Groupe PPE
“Building European
Energy Diplomacy”
Novembre 2011
Réunion du Bureau
du Groupe PPE
-Septembre 2011Wroclaw (Pologne)
Novembre 2011
Réunion du Bureau
du Groupe PPE Octobre 2011- Sofia
(Bulgarie)
Décembre 2011
Audition du
Groupe PPE
“Internet Today
and Tomorrow”
Février 2012
FR EN DE IT
EN
FR EN DE PL
FR EN DE BG
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Unité Stratégie Politique
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au Parlement européen
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Parution : Mars 2012
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Responsable de l’Unité Stratégie Politique
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